Numéro 40 - 13 juin 2020

Des sujets de graves préoccupations pour le corps politique

Le gouvernement donne un pouvoir consultatif et décisionnel clé
à un supercartel

BlackRock, le supercartel
- Peter Ewart -
BlackRock et la filière canadienne

Un rapport sur la gestion d'actifs et la stabilité financière aux États-Unis


Contestation constitutionnelle de la nation crie de Beaver Lake

La définition de réconciliation du gouvernement Trudeau

- Peggy Morton -

La nation crie de Beaver Lake persiste à défendre ses droits
inhérents et issus des traités

L'Alberta et le Canada nient la pauvreté monétaire de la nation crie dans leur plus récent appel sur l'attribution de frais de justice

- Crystal Lameman -


La politique d'apaisement du Canada
face à l'impérialisme américain

Le Canada au dernier tournant dans sa campagne pour un siège au Conseil de sécurité de l'ONU
- Tony Seed -


États-Unis: la résistance s'organise

Pour la justice et la fin des attaques racistes organisées par l'État et du recours à l'armée contre le peuple


Dangereux développements sur la péninsule coréenne

La RPDC tire les conclusions face au bellicisme incessant des États-Unis

Détérioration des relations intercoréennes

Réunion virtuelle sur les développements actuels
dans la péninsule coréenne


Mise à jour sur la COVID-19

Le président des États-Unis répond par de nouvelles provocations
à une situation déjà désespérée

- Pierre Chénier -

Appel conjoint d'agences de l'ONU à éliminer la stigmatisation
et la discrimination des travailleurs migrants et de leurs enfants
pendant une pandémie

Le traitement inhumain des migrants par les États-Unis
met en péril les peuples des Amériques


Supplément
États-Unis: la résistance s'organise

Déclarations d'organisations américaines et reportage photo




Le gouvernement donne un pouvoir consultatif et
décisionnel clé à un supercartel

BlackRock, le supercartel

La pandémie mondiale actuelle entraîne une crise financière profonde. La réponse à cette crise est un sujet qui préoccupe les travailleurs du monde entier. Dans beaucoup de pays comme le Canada, la situation est davantage compliquée du fait que ce n'est pas eux qui décident de la direction de l'économie car elle est contrôlée par une oligarchie financière et des gouvernements à leur service.

Une crise financière n'est en soi rien de nouveau ; les crises sont inhérentes au système capitaliste dans lequel opère l'oligarchie financière. Celle-ci va de crise en crise, alors pour se maintenir elle crée des instruments et des formes d'organisation qui mutent et changent, comme des créatures sorties du Lac noir[1]. Par exemple, les crises et la corruption de la fin du XIXe siècle ont engendré la fusion du capital bancaire et du capital industriel et les trusts et les monopoles géants des barons voleurs. Et d'une cabale de grands banquiers américains réunis en 1910 sur l'île Jekyll est née la Réserve fédérale. Dans les années 1990, la déréglementation financière du secteur bancaire et le rapiècement, à la Frankenstein, des banques d'investissement et des banques commerciales ont contribué à la crise des prêts hypothécaires à risque et à la Grande Récession de 2008. Et plus récemment, il y a eu la déclaration « rassurante » de la Business Roundtable américaine que les grandes entreprises sont responsables envers toutes les parties, contrairement à la configuration précédente de Milton Friedman dans laquelles elles n'avaient de comptes à rendre qu'aux actionnaires.

Dans le tumulte de ces crises et mutations, il arrive souvent qu'une institution financière particulière réussisse à se hisser au sommet. Au début du XXe siècle, c'était la gigantesque banque J.P. Morgan[2]. En 2008, c'était Goldman Sachs, connue pour avoir floué ses propres clients. En 2020, c'est BlackRock, gestionnaire d'actifs, un système bancaire parallèle et supercartel, qui a accédé à un pouvoir et à une autorité sans précédent dans la distribution des billions de dollars publics en fonds de sauvetage du Trésor américain, et qui a été nommé conseiller principal de la Banque du Canada pour le programme de sauvetage du gouvernement canadien.

Fondé en 1988 par le financier Larry Fink et d'autres, BlackRock a grandi de façon exponentielle depuis, ses actifs sous gestion oscillant à près de 7,4 billions de dollars, avec un autre 20 billions de dollars par le biais d'Aladdin, sa plateforme logicielle de gestion des risques financiers. Il a des bureaux dans 30 pays, des clients dans 200 autres et est, de loin, le plus important gestionnaire d'actifs et le plus grand système bancaire parallèle au monde, avec une gestion d'actifs supérieurs au PIB de n'importe quel pays. BlackRock est le plus grand investisseur privé dans la fabrication d'armes au monde, possède plus de réserves de pétrole, de gaz et de charbon thermique que quiconque et est le plus grand fournisseur de fonds cotés en bourse. Dès 2017, il était le principal actionnaire dans la plupart des 300 plus importantes sociétés en Amérique du Nord et en Europe et copropriétaire de 17 309 compagnies et banques partout dans le monde[3].

La crise financière de 2008 a été en fait une immense aubaine pour le cartel BlackRock lorsque le gouvernement américain a conclu avec lui un contrat de gestion du sauvetage massif des banques et autres institutions financières en difficulté qui s'étaient livrées à la vente de titres toxiques. Paradoxalement, BlackRock lui-même avait joué un rôle important en préparant le terrain pour cette même crise en préconisant la déréglementation du secteur banquier dans les années 1990, ainsi qu'en promouvant le marché des titres toxiques. Et tandis que BlackRock gonflait comme une version moderne du dirigeable Hindenburg, les revenus des travailleurs, des petites entreprises et d'autres sections du peuple aux États-Unis et au Canada stagnaient ou fondaient.

C'est un signe des temps lorsque la plupart des grandes banques et institutions financières aux États-Unis et ailleurs se mettent à réclamer le statut d'« institutions financières d'importance systémique » (IFSI) pour pouvoir bénéficier des sauvetages en dollars publics du Trésor américain et des autres banques centrales. Cependant, BlackRock est une exception. Il a plutôt fortement résisté à l'appellation d'IFSI. Et la raison en dit long sur cette entreprise. Devenir IFSI aurait obligé BlackRock à se soumettre à une autorité gouvernementale réglementaire telle que la Loi Dodd-Frank sur les banques de 2010,  adoptée pour réglementer un tant soit peu les institutions financières en dérapage qui avaient précipité la crise de 2008. Pour BlackRock, le plus important système bancaire parallèle au monde, la moindre réglementation de ses activités, aussi insignifiante soit-elle, est trop.

Ainsi, tandis qu'un grand nombre d'institutions financières se voient imposer certaines restrictions par réglementation gouvernementale, BlackRock et d'autres pirates dits « gestionnaires d'actifs » voguent allègrement dans les eaux troubles d'un monde financier non réglementé. L'instabilité inhérente au système bancaire parallèle est cependant encore plus grande que dans le secteur bancaire traditionnel. Sans les entraves de la réglementation, les systèmes bancaires parallèles s'engagent souvent dans des aventures à plus haut risque sans être appuyés par des réserves, ce qui mène à des niveaux dangereux de leviers, d'écarts et de dettes financiers[4]. Comme des bombes à retardement, ces entités parallèles se tapissent dans les profondeurs du système financier en attendant d'exploser, enrichissant les financiers tout en déstabilisant des économies entières et en semant la destruction dans la vie de millions de gens, comme cela s'est produit lors de la Grande Récession de 2008 et dans d'autres crises.

Lorsque ces crises se manifestent, BlackRock et l'oligarchie financière dans son ensemble préconisent d'arroser les grosses banques et sociétés de billions de dollars en fonds publics, soit directement ou indirectement, détournant ainsi des fonds de la santé, de l'éducation, des services sociaux et d'autres secteurs de l'infrastructure physique et sociale. Responsables de ces « lances d'incendie », comme de raison, sont les institutions financières privées et, à leur tête, est BlackRock.

La puissance et l'autorité de BlackRock ne reposent pas uniquement sur sa taille, elles reposent aussi sur le fait qu'il constitue, comme l'a dit un analyste, une « quatrième branche de gouvernement[5] » ou, comme certains diraient plutôt, la « première » branche. Dès le début, un aspect clé de la stratégie de BlackRock a été de recruter de hauts fonctionnaires de l'État dans le monde entier sur une base intermittente. Une année, ceux-ci travaillent pour le gouvernement et l'année suivante, voilà qu'ils travaillent pour BlackRock et ainsi de suite. Par exemple, Jean Boivin est en ce moment le dirigeant de l'Institut d'investissement de BlackRock, mais a déjà été gouverneur adjoint de la Banque du Canada et sous-ministre délégué des Finances. Aussi, le personnel qui compose BlackRock a dans ses rangs plusieurs anciens représentants de la Maison-Blanche et offre régulièrement ses conseils à des représentants de haut niveau du gouvernement et de banques centrales en Amérique du Nord et en Europe. De cette façon et par une myriade d'autres, les frontières entre l'État et les sociétés privées s'estompent et l'État est réduit à un rôle auxiliaire ou accessoire.

Une autre source importante du pouvoir de BlackRock est qu'il forme de facto un « supercartel », même si les instances de réglementation n'ont pas encore osé le désigner ainsi[6]. Ces dernières années, les gestionnaires d'actifs et les systèmes bancaires parallèles comme BlackRock, Vanguard et State Street sont devenus des organisations de haut niveau de l'oligarchie financière supplantant même les énormes banques d'investissements comme Goldman Sachs. Ensemble, les « Trois Grands » - BlackRock, Vanguard et State Street – dominent trois quarts du marché mondial de plusieurs billions de dollars de fonds indiciels. Les actifs qu'ils gèrent sont supérieurs à tous les fonds souverains de la terre et trois fois plus élevés que l'industrie mondiale des fonds spéculatifs.

Dans le plus pur style cartel, les Trois Grands ont une propriété interconnectée. Par exemple, Vanguard et State Street détiennent des parts importantes de BlackRock et ensemble, les Trois Grands sont « le plus grand actionnaire unique de près de 90 % des entreprises cotées par l'indice boursier S&P, dont Apple, Microsoft, ExxonMobil, General Electric et Coca-Cola. » Selon divers analystes, les Trois Grands coordonnent leurs votes lors de réunions d'actionnaires par l'intermédiaire de départements de gestion d'entreprises centralisés[7].

Pour ce qui est des fusions d'entreprises, les Trois Grands se trouvent souvent des deux côtés de la transaction, c'est-à-dire qu'ils investissent à la fois dans l'acheteur et dans le vendeur, leur donnant « de l'information bilatérale supérieure comparativement à ceux qui n'opèrent que d'un côté de la transaction »[8]. Pour ce qui est des banques, les Trois Grands sont aussi copropriétaires de plusieurs des mêmes grandes banques et forment ainsi de gigantesques cartels financiers. En tant qu'actionnaires conjoints majeurs, ils dominent même les agences de notation financière comme S&P et Moody's qui fixent les cotes de crédit et peuvent avoir un impact énorme sur la viabilité des entreprises et des gouvernements[9].

Les cartels comme les Trois Grands forment une alliance d'oligarques rivaux qui travaillent ensemble contre des compétiteurs et d'autres secteurs d'affaires et de l'industrie, tout en formant un front commun contre leurs propres travailleurs et employés, et contre la population en général. Leur objectif est d'obtenir des profits maximums et de dominer le marché et, pour ce faire, ils agissent de façon anticompétitive, monopolistique, en participant entre autres à la fixation des prix, au truquage d'offres, aux réductions de la production ainsi que des salaires. Ainsi, ils vont à l'encontre des nombreux règlements et normes régissant les conflits d'intérêts, si bien que de telles normes n'existent plus dans le monde financier où règne la loi brutale de la jungle.

Plus récemment, BlackRock a formé des relations de cartel avec le gouvernement des États-Unis et la Réserve fédérale, créant ce qui a toutes les allures d'un cartel géant de type public-privé qui distribue des fonds publics à certaines institutions et entreprises choisies. Les premiers retours montrent que BlackRock verse la plus grosse somme d'argent (48 %) aux mêmes fonds cotés en bourse qu'il gère[10].

Néanmoins, l'organisation financière et la banque centrale les plus puissantes au monde ne peuvent surmonter le trou noir de contradictions et de crises qui sévissent au coeur du système financier. Elles ne peuvent que les exacerber.

Malgré sa dimension de zeppelin, un gestionnaire d'actifs comme BlackRock ne crée pas une valeur nouvelle, mais constitue au contraire une couche oligarchique supplémentaire siphonnant la valeur nouvelle déjà créée par les travailleurs et les forces productives de la société. Son rapport avec ces forces est, il va sans dire, des plus parasitaires.

Cependant, étant donné leur taille, BlackRock et les Trois Grands sont en mesure de déstabiliser l'économie entière d'un pays par « comportement grégaire » et autres types d'activités de cartel comme, par exemple, la vente effrénée de titres toxiques aux États-Unis par les oligarques financiers en 2008. Comme tels, ils ne sont que des entités étrangères, non redevables, qui sont une menace et un danger permanent pour la société. Une tâche fondamentale pour les travailleurs dans les prochaines années sera d'identifier la lutte pour changer le but et la direction de l'économie afin qu'elle soit libérée de l'emprise de l'oligarchie financière et de ses institutions et placée sous le contrôle d'une autorité publique responsable devant le peuple. Une telle économie n'aura pas de place pour des cartels parasitaires comme la machine à piller de BlackRock.

Notes

1. Film « L'Étrange Créature du lac noir » (Creature from the Black Lagoon), États-Unis, 1954

2. Sammon, Alexander, « The dawn of the BlackRock era », The American Prospect. 15 mai 2020

3. Rugemer, Werner, The Capitalists of the 21st Century, Tredition, 2019

4. « La finance de l'ombre », Wikipedia, 2 juin 2020

5. Annie Massa and Caleb Melby, « In Fink we trust : BlackRock is now 'Fourth branch' of government », Bloomberg, 21 mai 2020

6. Rugemer, op. cit.

7. Heemskerk, Eelke et Javier Garcia-Bernardo, BlackRock, Vanguard and State Street own corporate America, Ponderwall, 2019

8. Annie Massa et David McLaughlin, « Biggest deals of 2019 had BlackRock, Vanguard on both sides », Bloomberg, 24 janvier 2020

9. Rugemer, op. cit.

10. Christine Idzelis, « BlackRock rakes in big portion of Fred's ETF investments », Bloomberg, 1er juin 2020

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BlackRock et la filière canadienne

En mars 2020, la Banque du Canada a annoncé que BlackRock, le plus grand gestionnaire d'actifs au monde, allait être nommé conseiller et consultant clé dans le cadre du programme de sauvetage des entreprises face à la COVID-19 du gouvernement libéral fédéral. Ce n'est que la plus récente étape de l'influence croissante et de l'entrecroisement profond du supercartel américain avec l'économie et la politique du Canada qui remonte à plusieurs années.

Par exemple, BlackRock participe à la Banque d'infrastructure du gouvernement fédéral. Lors des élections de 2015, Trudeau avait proposé la formation d'une Banque fédérale de l'infrastructure « afin de fournir du financement à faible taux aux projets de construction de nouvelles infrastructures » et qui « utiliserait ses solides cotes de solvabilité et son pouvoir de prêt pour aider les municipalités à réduire leurs coûts d'emprunt »[1]. Cependant, en janvier 2016, le premier ministre Trudeau a rencontré le PDG de BlackRock, Larry Fink, au Forum économique mondial de Davos, à un moment où Fink réclamait aussi des investissements accrus dans les infrastructures de la part des gouvernements et des intérêts privés. Par la suite, Trudeau a de nouveau rencontré Larry Fink en mars à New York. Plus tard au printemps, le gouvernement libéral a annoncé la formation d'un Conseil consultatif en matière de croissance économique (CCCE) qui, à l'automne 2016, a appelé à la création d'une Banque de développement des infrastructures du Canada. Mais à ce moment-là, le concept initial de la banque de l'infrastructure qui devait fournir un financement à faible taux aux projets de construction d'infrastructures a été remplacé avec le nouvel objectif de permettre au secteur privé, notamment BlackRock et ses clients, de mettre en place une grande partie du financement à un taux plus élevé pour les municipalités et d'autres organismes[2].

Avant la réunion de l'automne 2016, les représentants du gouvernement Trudeau avaient travaillé étroitement pendant plusieurs mois avec les dirigeants de BlackRock pour élaborer des présentations afin d'informer les investisseurs potentiels sur les investissements dans la Banque de l'infrastructure. Le personnel de BlackRock a organisé la rencontre des investisseurs le 14 novembre et, au cours d'un certain nombre de séances à toutes les deux semaines qui l'ont précédée, est même allé jusqu'à aider à préparer la présentation PowerPoint que le ministre fédéral de l'Infrastructure, Amarjeet Sohi, a présentée lors de la réunion. Jean Boivin, actuellement directeur général de BlackRock et auparavant sous-ministre délégué auprès du gouvernement fédéral, a également participé à ces séances.

Ce qui attire des intérêts privés comme BlackRock vers des projets d'infrastructure publique est le rendement plus élevé de ses investissements, qui peut aller de 7 à 9 % par année. Bien sûr, ce rendement supplémentaire finit par être soutiré des deniers publics et, au fil du temps, peut finir par doubler le coût des projets[3]. Cependant, un groupe de réflexion formé par Larry Fink et d'autres financiers a fait valoir que l'investissement privé dans les infrastructures publiques représente « une occasion en or ... avec des sources de revenus prévisibles sur des périodes de temps mesurées en décennies.[4] »

Comme l'ont révélé le projet de transparence BlackRock et divers articles de presse, d'autres organismes gouvernementaux, comme l'Office d'investissement du Régime de pensions du Canada (OIRPC), ont aussi été impliqués avec BlackRock[5]. Mark Wiseman a été PDG du conseil d'administration du régime de retraite de 278 milliards de dollars de 2012 à 2016 qui gère les pensions du Régime de pensions du Canada de 20 millions de Canadiens. Pendant qu'il était à la barre de cet organisme, Mark Wiseman a « externalisé considérablement la gestion des actifs du régime de retraite à BlackRock », notamment en investissant dans les « fonds hypothécaires en difficulté » de BlackRock et dans d'autres investissements mondiaux. À titre de chef de la direction de l'Office, Wiseman a finalement été nommé au Conseil consultatif en matière de croissance économique (CCCE) du gouvernement. Cependant, trois jours seulement après sa première réunion, « Mark Wiseman a annoncé brusquement son intention de démissionner du [Conseil et de l'OIRPC] pour rejoindre BlackRock en tant que responsable mondial des actions ». Malgré ce conflit d'intérêts manifeste, le gouvernement fédéral l'a autorisé à demeurer au Conseil et à demeurer conseiller principal auprès de l'Office. Et c'est ainsi que le gouvernement fédéral permet aux responsables de BlackRock d'être des conseillers clés tout en faisant du lobbying pour obtenir un financement fédéral.

Outre Mark Wiseman et Jean Boivin, qui tous deux ont rejoint BlackRock après avoir occupé des postes de haut niveau dans le secteur public, il existe un certain nombre d'autres exemples de « va-et-vient » de personnel de haut niveau entre BlackRock et le gouvernement fédéral. Par exemple, en 2018, BlackRock a embauché un autre fonctionnaire de l'Office, André Bourbonnais, qui avait été chef de la direction d'Investissements PSP qui est le fonds de retraite de 139 milliards de dollars qui gère les investissements pour la fonction publique, les Forces armées canadiennes et la Gendarmerie royale du Canada. En tout, il y a plus d'une vingtaine de fonctionnaires « qui ont travaillé ou fait des stages à la fois à l'Office et chez BlackRock. » Selon le projet de transparence BlackRock, BlackRock a joué « un rôle important non seulement dans la création de la banque [d'infrastructure], mais aussi dans les décisions concernant le personnel », notamment en déterminant qui devrait occuper les postes clés[6]. Ainsi l'État et le supercartel ne font qu'un.

Pour sa part, le premier ministre Trudeau a continué de rencontrer des dirigeants de BlackRock, notamment en assistant le 8 mars 2017 à un dîner privé avec des dirigeants de BlackRock et à une réunion en 2018 à New York avec des investisseurs de BlackRock. Aujourd'hui, BlackRock étant nommé conseiller clé dans le programme de sauvetage face à la COVID-19, même la Banque du Canada a été « poussée dans l'orbite de plus en plus fréquentée de BlackRock inc.[7] ».

L'un des plus anciens groupes de réflexion économique au Canada, l'Institut C.D. Howe, est également sous l'influence de BlackRock. En 2017, l'Institut, qui avait précédemment publié une étude critique de l'idée d'une banque de l'infrastructure, a reçu un financement de BlackRock et a nommé un haut fonctionnaire du supercartel à son conseil d'administration. Depuis lors, l'Institut a publié diverses publications faisant l'éloge de la Banque de l'infrastructure.

Outre ses percées dans le secteur public canadien, BlackRock est fortement impliqué dans le secteur privé. Bien que l'étendue exacte ne soit pas connue, BlackRock gère ou détient des actifs dans la plupart des grandes sociétés et institutions financières nord-américaines, y compris celles du Canada. De plus, iShares, qui est sa famille de fonds négociés en bourse, domine le marché des fonds négociables en bourse (FNB) de 200 milliards de dollars au Canada (comme c'est également le cas sur l'immense marché américain).

En 2019, BlackRock a formé une alliance stratégique avec RBC Gestion mondiale d'actifs pour fournir une nouvelle marque de FNB nommée « RBC iShares » d'une valeur de 60 milliards de dollars. Selon un communiqué de presse de RBC, « cette alliance transformatrice unit deux chefs de file du marché : le plus grand gestionnaire de FNB au monde et le principal gestionnaire d'actifs au Canada[8] ».

De nombreux experts, journalistes, universitaires, ONG et syndicats ont exprimé leur inquiétude face au poids croissant de BlackRock sur l'économie canadienne ainsi que ses violations éthiques[9]. Les critiques ont fait valoir que le rôle de BlackRock dans la création de la Banque de l'infrastructure « met les priorités des investisseurs fortunés et des clients de BlackRock avant les contribuables canadiens, les investisseurs des régimes de retraite publics et les consommateurs », tandis que d'autres ont souligné que la relation intime entre l'entreprise et le gouvernement « a violé les règles fédérales sur les conflits d'intérêts et a accordé à BlackRock un traitement préférentiel dans la sélection et la mise en oeuvre des projets financés par la nouvelle banque ». Matthew Dubé, porte-parole parlementaire du NPD en matière d'infrastructure, affirme que « les Canadiens devront probablement payer deux fois pour leur infrastructure - d'abord par le biais du Trésor fédéral, puis par le biais de frais d'utilisation qui généreront des profits pour les entreprises[10] ».

Outre la question de la Banque de l'infrastructure, il y a la question plus large d'un supercartel comme BlackRock qui est en mesure d'intervenir et de prendre des décisions qui ont un impact fondamental sur l'intérêt public des Canadiens. En effet, l'immense cartel menace de saisir une plus grande partie de l'économie canadienne dans son filet, surtout maintenant qu'il est un conseiller clé du programme de sauvetage face à la COVID-19 du gouvernement qui fournira du financement à des sociétés et des institutions financières choisies. Comme l'a commenté un professeur, il est probable que BlackRock « supervise désormais une grande partie de presque toutes les économies de retraite des Canadiens[11] ».

Le supercartel compte actuellement 27 billions de dollars d'actifs sous sa gestion, tandis que l'économie canadienne n'a qu'un PIB de 1,9 billion de dollars. Il a ainsi la capacité d'influencer et de fausser l'ensemble de la direction de l'économie ainsi que les affaires politiques du pays. Mais une entité géante avec des objectifs aussi étroits devrait-elle avoir une telle influence sur tout, allant des pensions publiques à l'économie dans son ensemble ? Après tout, les objectifs de BlackRock sont tous liés à ses propres intérêts privés et à ceux de ses clients, et non à l'intérêt public au sens large.

Le supercartel a défendu activement les intérêts de ses investisseurs (et ses propres intérêts) lorsqu'il a fait pression pour la déréglementation du secteur financier aux États-Unis dans les années 1990 et a fait la promotion du marché toxique des titres adossés à des créances hypothécaires, qui ont tous contribué à la crise financière de 2008, ce qui a entraîné d'innombrables faillites, des saisies de logements et des pertes d'emplois aux États-Unis, au Canada et ailleurs (alors que BlackRock a énormément profité de la crise et a même contribué à la provoquer). Au fil des ans, BlackRock a poursuivi des politiques de type cartel qui privilégient ses intérêts et pour lesquelles, selon divers observateurs, il devrait être poursuivi devant les tribunaux ou ses pratiques devraient être rendues illégales. En outre, comme exemple de son manque d'engagement envers toute forme d'intérêt public, le supercartel a été pointé du doigt dans divers scandales internationaux d'évasion fiscale, y compris ceux révélés dans les Paradise Papers et Panama Papers[12].

Tout cela montre que nous avons besoin d'une nouvelle direction de l'économie du Canada. Le pouvoir décisionnel doit être entre les mains du peuple canadien, et non entre celles d'un supercartel ou d'une oligarchie financière qui ont le contrôle de l'État.

Notes

1. Curry, Bill, « Private-sector role in Canada Infrastructure Bank raises conflict issues », Globe & Mail, 5 mai 2017

2. Sanger, Toby, « Creating a Canadian infrastructure bank in the public interest », Canadian Centre for Policy Alternatives, Mars 2017

3. Ibid.

4. Black Rock Transparency Project. Campaign for Accountability, « New evidence shows BlackRock's role in Canada Infrastructure Bank may have also included advising on key personnel », 27 août 2018

5. Ibid.

6. Carmichael, Kevin, « Why the Bank of Canada needs BlackRock's help while fighting the coronavirus downturn », Chatham Daily News, 1er avril 2020

7. Ibid

8. RBC Gestion mondiale d'actifs « RBC Gestion mondiale d'actifs et BlackRock Canada annoncent une alliance stratégique qui transformera le marché canadien des FNB », 8 janvier 2019

9. Bradford, « Democracy Watch files complaint with Ethics Commissioner raising questions about violations of federal ethics law by BlackRock and the federal cabinet », Democracy Watch, 24 mai 2017

10. Blatchford, Andy, « What is BlackRock, and why does it matter now in Ottawa? », Maclean's, 11 mai 2017

11. Ibid.

12. Syndicat national des employées et employés généraux (NUPGE), « Canada Infrastructure Bank promoter involved in tax havens », le 2 mai 2020

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Un rapport sur la gestion d'actifs
et la stabilité financière aux États-Unis

En 2013, le Bureau de la Recherche financière (OFR) du département du Trésor des États-Unis a présenté un aperçu et fait une analyse succincte de l'industrie de la gestion d'actifs, en particulier sur la façon dont des entreprises géantes comme BlackRock et Vanguard, de par leurs activités, pouvaient créer des « vulnérabilités » qui menacent la stabilité financière du système économique[1]. L'étude, intitulée « La gestion d'actifs et la stabilité financière », a été menée au nom du Conseil de surveillance de la stabilité financière du gouvernement américain pour mieux éclairer son analyse quant à savoir si ces entreprises devraient être soumises à une « surveillance et à des normes prudentielles renforcées » comme cela est stipulé dans la Loi Dodd-Frank, adoptée au lendemain de la crise financière de 2008.

La réglementation financière est l'un des outils permettant aux grandes entreprises et aux banques qui dominent l'économie de régler leurs contradictions internes, mais elle est également utilisée comme une arme par une faction, un secteur ou un cartel contre l'autre. En ce sens, le fait que les entreprises géantes de gestion d'actifs ne sont pas assujetties à la réglementation au même titre que d'autres secteurs de l'industrie financière, ce qui leur donne un avantage concurrentiel, se trouve au coeur d'une controverse aux États-Unis. Pour maintenir cette position, BlackRock, la plus grande entreprise de gestion d'actifs au monde, a toujours réussi à éviter ces règlements, au point de refuser d'être nommée « institutions financières d'importance systémique » (où elle se serait vu imposer des règlements) malgré sa taille et son influence gigantesques. En effet, à ce jour, les entreprises de gestion d'actifs restent peu assujetties aux règlements malgré les efforts de l'OFR et d'autres sections de l'oligarchie financière. Néanmoins, dans son rapport l'OFR soulève certains des risques et des dangers que pose l'ascension de ces entreprises de gestion d'actifs pour l'économie dans son ensemble.

Selon le rapport, l'industrie de la gestion d'actifs aux États-Unis a supervisé l'allocation de près de 53 billions de dollars en actifs financiers en 2013. En 2020, ces actifs représentent près de 90 billions de dollars (l'équivalent du PIB de tous les pays du monde réunis). Aussi, l'industrie serait au coeur de l'allocation d'actifs financiers au nom d'investisseurs et serait caractérisée par une grande innovation et une activité financière diversifiée. Les entreprises de gestion d'actifs et les fonds qu'elles gèrent « transigent avec d'autres institutions financières pour transférer des risques, déterminer les prix et investir du capital mondialement à travers une variété d'activités ».

Cependant, leurs activités se distinguent sur plusieurs points importants de celles des banques et des compagnies d'assurances (bien que ces dernières puissent aussi avoir des divisions de gestion d'actifs en leur sein). Par exemple, « les gestionnaires d'actifs agissent avant tout comme agents : gérer des actifs au nom de clients plutôt que d'investir au nom de gestionnaires. Les pertes — ainsi que les gains — reviennent aux clients plutôt qu'aux entreprises de gestion d'actifs. »

En revanche, bien que certaines activités de gestion d'actifs puissent être similaires, « les banques commerciales et les compagnies d'assurances agissent normalement comme principaux : acceptant les dépôts avec une responsabilité de rachat sans frais et sur demande, ou assumant des responsabilités spécifiques vis-à-vis les assurés ».

Selon le rapport, les entreprises de gestion d'actifs pourraient potentiellement participer à un certain ensemble d'activités associées aux fonds ou aux entreprises au sein d'une grande et complexe entreprise, ou avoir un nombre important de gestionnaires d'actifs qui participent à des activités encore plus risquées, l'ensemble de ces activités pouvant représenter une menace pour le système capitaliste monopoliste ou, encore, amplifier ou transmettre une telle menace.

Le rapport identifie quatre facteurs clés qui rendent l'industrie de la gestion d'actifs vulnérable aux menaces et aux chocs: 

1. « un rendement boursier » — c'est-à-dire la recherche de retours sur investissement toujours plus élevés en acquérant des actifs plus à risque, ainsi que l'adoption de « comportements mimétiques », comme se ruer pour entrer ou sortir des marchés et des investissements, en particulier en période de marchés tendus ; 

2. le « risque de rachat » — c'est-à-dire le retrait prématuré ou accru de fonds d'une institution ou d'un instrument financier, etc. dans un marché tendu ou non liquide occasionnant une crise en cascade et même des insolvabilités ; 

3. « l'effet de levier » — c'est-à-dire le recours aux fonds empruntés, pouvant amplifier les mouvements du prix des actifs et accroître le potentiel d'une « vente de feu » de ces actifs, pouvant ensuite s'étendre à l'ensemble du marché ;

4. « les entreprises comme sources de risques » — c'est-à-dire qu'en raison de leur taille, l'échec d'une grande entreprise de gestion d'actifs pourrait représenter un risque pour la stabilité financière de l'économie dans son ensemble, comme cela s'est produit dans plusieurs grandes institutions financières de Wall Street en 2008.

Autrement dit, plus elles sont grosses, plus cela frappe quand elles tombent. Le problème est qu'elles ne font pas que heurter le sol avec force, elles entraînent toute l'économie dans leur chute, plongeant des millions de travailleurs, de petites et moyennes entreprises, de retraités et l'ensemble de la population dans la crise et la ruine.

À cet égard, l'industrie de gestion d'actifs est grandement concentrée. Bien que dans le rapport on ne retrouve pas du tout le mot cartel, certaines des activités qui y sont décrites laissent entendre une activité de type cartel. Par exemple, dans le rapport il est affirmé que « l'interconnectivité et la complexité peuvent transmettre ou amplifier des menaces à la stabilité financière » et que « les grandes compagnies financières tendent à avoir des lignes commerciales qui sont interconnectées de façon complexe ». Aussi, « ces menaces sont particulièrement aigües lorsqu'un nombre restreint d'entreprises domine une activité particulière ou une offre de fonds ». Ceci vient évidemment contredire le mantra des entreprises de gestion d'actifs comme BlackRock à l'effet que « les fonds négociés en bourse » (FNB) et autres instruments financiers qu'elle domine dans les marchés canadiens autant qu'américains sont des investissements sûrs.

Ce qui ressort du rapport, c'est le niveau élevé d'instabilité potentielle et le chaos qui sommeillent au coeur du système financier et jusqu'à quel point celui-ci est de plus en plus en proie à la « loi de la jungle » où les plus puissants refusent de se soumettre même aux règlementations minimales. L'oligarchie financière a créé des institutions et des structures financières immenses et d'une grande complexité leur permettant de s'enrichir comme jamais. Du même coup, elle est comme l'apprenti sorcier invoquant des démons qu'elle ne peut contrôler, même si elle le voulait.

Malgré le risque, les gouvernements américain et canadien ont permis à ces entreprises de prendre de l'expansion et de dominer l'économie. Le plus inquiétant est qu'ils ont remis le pouvoir clé de consultation et de prise de décision entre les mains de BlackRock pour gérer le sauvetage face à la COVID-19. Ce qui en résultera reste à voir.

Note

1. Bureau de la Recherche financière des États-Unis, « Asset management and financial stability », septembre 2013

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Contestation constitutionnelle de la nation crie de Beaver Lake

La définition de la réconciliation
du gouvernement Trudeau


Rassemblement à Edmonton en appui à la contestation judiciaire de la nation crie de Beaver Lake, 19 février 2019

Les gouvernements fédéral et albertain n'ont épargné aucun effort pour bloquer la contestation constitutionnelle lancée par la nation crie de Beaver Lake en 2008 à la défense de ses droits inhérents et issus de traités. L'enjeu est la prise en compte des effets cumulatifs du développement industriel sur les terres et le mode de vie traditionnels de la nation dans le processus d'approbation de projets.

Le dernier développement en date est l'appel, entendu en cour le 4 juin, par les gouvernements fédéral et albertain de la décision de septembre 2019 de la Cour du Banc de la Reine qui exige que chaque gouvernement verse 300 000 $ par année à la nation crie de Beaver Lake pour qu'elle puisse poursuivre sa contestation constitutionnelle.

Le gouvernement de l'Alberta et le gouvernement fédéral ont tenté depuis le début d'empêcher la cause d'être entendue. En 2008, ils ont tenté de la faire rejeter. Le gouvernement de l'Alberta affirme que la contestation est « frivole, vexatoire et un abus de procédure ». Le gouvernement fédéral déclare qu'il ne devait pas être nommé défendeur, cherchant à se laver les mains de ses obligations fiduciaires envers les Cris de Beaver Lake et oubliant que le champ de tir de l'armée canadienne à Cold Lake se trouve sur leur territoire. Le tribunal a décidé en 2013 que la cause pouvait aller de l'avant. Alors que les partis cartellisés qui se succèdent au pouvoir ont alterné au cours des sept années qui ont suivi, le refus de négocier de bonne foi et les tentatives de mettre fin à la contestation constitutionnelle demeurent.

Ce que les gouvernements Trudeau et Kenney demandent dans leur appel de la décision de 2019 sur les coûts est que Beaver Lake devrait épuiser tous ses fonds pour continuer à défendre sa revendication, ce que la nation a déclaré qu'elle ne ferait pas et ne pourrait pas faire. Elle dit qu'une communauté dont la seule source d'eau potable propre est un camion-citerne ne doit pas choisir entre de l'eau propre et la poursuite de sa cause. Toute cette affaire révèle le cynisme du « je vous entends » et d'« aucune relation plus importante » de Trudeau, et ses promesses de faire mieux.

Dans son budget de 2018, le gouvernement Trudeau a déclaré que « la participation des autochtones aux négociations modernes des traités sera financée par des contributions non remboursables ». Mais il continue d'essayer de faire croire que les traités à numéros comme le Traité Six, dont Beaver Lake est signataire, sont des traités de cessation des terres et qu'il n'y a donc plus rien à négocier. L'histoire orale dit autre chose, sans mentionner que la conception de la vente de la terre n'existe même pas dans le droit autochtone et dans les traditions et la conception du monde autochtones que les rédacteurs des traités autochtones étaient tenus de respecter et ont respecté. Tout aussi hypocrites sont les promesses répétées du gouvernement Trudeau en matière d'eau potable pour tous les peuples autochtones. Cette hypocrisie souligne la nécessité de moderniser la Constitution du Canada afin d'éliminer les relations coloniales avec les peuples autochtones et redresser les torts historiques.

La position du gouvernement Trudeau est claire et inacceptable. Sa définition de la réconciliation est que les peuples autochtones doivent se réconcilier avec la perte de leur mode de vie, la perte de leur capacité de s'acquitter de leurs fonctions de gardiens de la terre, et accepter la loi du plus fort comme loi du pays. Cela ne marchera pas. Les projets qui ont été imposés sur le territoire comprennent le champ de tir de Cold Lake, qui occupe illégalement les territoires traditionnels de la nation crie et qui est une violation du concept de paix et d'amitié et doit être fermé[1].

Les Canadiens ont la responsabilité de défendre la nation crie de Beaver Lake qui défend ses droits et ses responsabilités envers la Terre Mère. Le droit souverain des peuples autochtones de dire oui ou non aux projets de développement sur leur territoire traditionnel doit être respecté.

Note

1. Entre autres choses, le champ de tir militaire est le site des exercices annuels de guerre « Maple Leaf » qui comprennent des avions de l'OTAN ainsi que la participation de pays non membres de l'OTAN, dont Israël, l'Australie, la Nouvelle-Zélande, la Suède, Singapour, le Brésil et la Colombie.

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La nation crie de Beaver Lake persiste à défendre ses droits inhérents et issus des traités


Le 4 juin, la nation crie de Beaver Lake a comparu devant les tribunaux en raison d'un appel interjeté par les gouvernements fédéral et albertain contre une décision rendue en 2019 par la Cour du Banc de la Reine de l'Alberta selon laquelle les gouvernements provincial et fédéral devaient payer à la nation les frais juridiques anticipés. Cette décision permet de poursuivre l'action en justice qui établit un précédent entamé en 2008 par Beaver Lake à la défense de ses droits inhérents et issus de traités. Il est mentionné dans la requête que les effets cumulatifs du développement industriel sur les terres et le mode de vie traditionnels de la nation doivent être pris en compte dans l'approbation de projets. La cause qui est en jeu crée un précédent car elle est la première dans laquelle les impacts économiques, environnementaux, sociaux et culturels cumulatifs du développement industriel sont contestés, et non seulement un projet unique.[1]

Crystal Lameman, conseillère en relations gouvernementales des Cris de Beaver Lake, explique : « Il s'agit pour Beaver Lake d'avoir son mot à dire sur à quoi ressemble le développement sur leur territoire et sur leurs terres, sur lequel ni l'Alberta ni le Canada n'ont d'acte de vente - ni en vertu de traités signés ni par le biais d'une autorité décisionnelle unilatérale ultérieure.[2]. »

Le territoire du lac Beaver s'étend sur 38 972 kilomètres carrés et est situé au coeur des sables bitumineux. Les gouvernements ont loué une grande partie de ces terres à des sociétés pétrolières sans aucune consultation ou approbation préalable. Au total sur le territoire, il y a 300 projets avec 19 000 autorisations individuelles, environ 35 000 puits de pétrole et de gaz naturel, le champ de tir des Forces canadiennes de Cold Lake et des milliers de kilomètres de pipelines, de routes d'accès et de lignes sismiques. Près de 90 % du territoire traditionnel est défiguré et pollué par de nombreux projets de sables bitumineux, déplaçant l'orignal et le wapiti et poussant le caribou au bord de l'extinction.

Comme l'affirme la Déclaration de Kétuskéno (2008), les Cris de Beaver Lake ont convenu par un traité de paix et d'amitié de partager la terre avec ceux qui respectent leurs obligations en tant que gardiens de la terre ainsi que leurs droits traditionnels, constitutionnels et issus de traités. La déclaration affirme leurs droits et devoirs en tant que gardiens de la terre et leur droit de subvenir à leurs besoins grâce à ces terres. Dans la poursuite devant les tribunaux initiée en 2008, ils affirment que les gouvernements doivent respecter le droit des gardiens de la terre de dire oui ou non aux aménagements sur leur territoire.

En 2018, après des années à défendre leur poursuite devant les tribunaux contre les gouvernements fédéral et albertain et après avoir épuisé leurs fonds et une importante campagne de financement, Beaver Lake a déposé une requête en frais et dépenses provisoires dans laquelle ils demandent à la Cour d'ordonner au Canada et à l'Alberta de contribuer aux frais pour la poursuite de la procédure. L'Alberta et le Canada ont plaidé que la nation devrait épuiser tous ses avoirs avant de se voir accorder des avances sur les frais juridiques. Le 30 septembre 2019, la juge Beverly Browne a statué que l'Alberta et le Canada devaient chacun contribuer pour 300 000 $ par année aux frais juridiques de la nation, tandis que la nation devrait verser un montant similaire. L'octroi d'une avance sur frais juridiques est considéré comme une mesure extraordinaire, a-t-elle reconnu. « L'affaire dont je suis saisie est suffisamment extraordinaire pour que j'exerce mon pouvoir discrétionnaire d'accueillir la demande. À mon avis, il serait manifestement injuste de contraindre Beaver Lake à abandonner sa réclamation ou de les forcer au dénuement et à vivre dans la misère afin de pouvoir aller de l'avant et présenter la requête... Quoi qu'il en soit, je ne suis pas disposée à forcer la direction de Beaver Lake à choisir entre poursuivre ce litige et tenter de subvenir aux besoins essentiels de la vie que la plupart des citoyens tiennent pour acquis. »

Notes

1. La Première Nation de Blueberry River en Colombie-Britannique va aussi de l'avant avec une poursuite déposée en 2015. Voir la « Défense des droits de traité en Colombie-Britannique - Les premières nations de Blueberry River intentent une poursuite historique sur les impacts cumulatifs », LML, 8 juin 2019

2. Maia Wikler et Crystal Lameman, « Beaver Lake Creek stand strong as Canada and Alberta attempt to derail tarsands legal challenge », Briarpatch Magazine, 5 juin 2020.

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L'Alberta et le Canada nient la pauvreté monétaire de la nation crie dans leur plus récent appel sur l'attribution de frais de justice


Ma communauté natale, la nation crie de Beaver Lake, traité numéro 6 (Alberta), a intenté une poursuite judiciaire en 2008 en raison de l'échec de la Couronne à tenir compte des impacts cumulatifs du développement industriel, y compris les nombreux projets de sables bitumineux — un des plus grands développements d'énergie à grande intensité carbonique au monde. Le premier projet de ce genre à l'époque, l'action sur les droits de traité à enjeux élevés crée un précédent pour les tribunaux canadiens. Avec le procès du traité cri de Beaver Lake, ce sera la première fois que la cour devra fixer une limite par rapport au développement industriel et définir ce qui constitue un abus dans le contexte du traité 6.

L'application du traité exige que la Couronne considère les effets cumulatifs du développement industriel qui menacent les droits de traité au mode de vie, y compris le droit de chasser, de pêcher, de trapper et de cultiver, et cette obligation relève de la Couronne.

Si la Couronne détruit l'exercice significatif des droits de traité en refusant de considérer quelles terres et quelles ressources sont nécessaires au maintien du mode de vie de Beaver Lake, et si ces seuils sont dépassés en raison d'une multitude d'autorisations pour l'utilisation des terres, alors nos droits ont été niés.

La Couronne a systématiquement nié que les traités assurent à ma communauté le maintien de son mode de vie, et elle nie qu'en vertu du traité elle doit considérer les impacts réunis de multiples activités industrielles sur le mode de vie des Cris de Beaver Lake au fil du temps.
Elle se donne plutôt l'autorité de céder des terres — pour lesquelles elle n'a aucun acte de vente — avec comme seule responsabilité l'obligation de consulter, et elle conteste le fait qu'elle doit tenir compte des impacts cumulatifs sur les droits de traité de Beaver Lake, et, sans tenir compte de ces considérations dans leur ensemble, les consultations sont faites sur la base d'un projet à la fois.

Récemment, la Cour d'appel de l'Alberta, dans l'affaire Première Nation de Fort McKay c. Prosper Petroleum Ltd, a confirmé qu'il existe bel et bien une telle obligation, contrairement à la position de la Couronne. Cependant, les tribunaux n'ont pas encore mesuré spécifiquement l'ampleur des obligations de la Couronne dans les cas d'impacts cumulatifs du développement industriel sur les droits de traité. En ce sens, l'affaire de Beaver Lake consoliderait la loi sur les questions suivantes : le traité 6 protège-t-il un mode de vie ? ; qu'est-ce qui est requis de la Couronne pour assurer cette protection ? ; à quel moment la prise en charge d'une terre atteint-elle le seuil de l'infraction ; et quelle est la solution face à cette infraction ?

Beaver Lake préférerait négocier ces questions. Comme l'a affirmé la chef de la nation crie de Beaver Lake, Germaine Anderson, « la Nation ne s'est jamais opposée aux négociations, nous avons toujours exprimé notre intérêt, et pourtant nous n'avons pas été invités à participer ni à les rencontrer à la table de négociation. »

Cependant, la Couronne a jusqu'ici refusé un ordre du jour qui permettrait une négociation significative de ces questions complexes, ainsi que le financement approprié qui assurerait la participation significative de Beaver Lake. Le Canada prétend aussi que les négociations peuvent avoir lieu dans le contexte d'un processus spécial de revendication, ce qui revient à dire qu'il s'engagerait à traiter seulement de l'infraction que constitue la présence d'un champ de tir militaire en plein centre de notre territoire.

Pourtant, même au cours de cette démarche, nous avons fait de multiples tentatives d'avancer à la première étape seulement pour être rejetés sur la base que notre temps était écoulé pour cette année fiscale. Nous n'avons pas encore reçu d'information nous disant si notre demande a été acceptée et quand elle serait entendue. Par conséquent, une décision judiciaire liée au maintien de nos pratiques axées sur la terre est requise puisque la Couronne conteste ses obligations de traité telles que soulevées, et continue d'autoriser l'utilisation de la terre sans égard à l'impact cumulatif sur les droits de traité.

Les questions soulevées par ce cas sont difficiles, complexes, larges et ont engendré une multitude d'étapes préprocès, y compris de nombreuses motions pour mettre fin à la procédure. Depuis dix ans, Beaver Lake a fait valoir cette requête complexe du mieux qu'elle a pu, au coût de 3 millions de dollars. La moitié des fonds a été accordée par de généreux donateurs qui ont compris l'importance que ces questions soient entendues par les tribunaux. Comprenant que cette affaire en est une de justice environnementale, de santé et de protection, ils ont appuyé les efforts de Beaver Lake pour consolider les droits de traité.

Mais comme plusieurs nations de traité, Beaver Lake est une communauté monétairement appauvrie. Elle n'a que tout récemment commencé à mettre de côté certaines réserves monétaires limitées, dont elle a désespérément besoin pour régler la grave situation de pauvreté monétaire dont souffre la Nation. Cependant, c'est une réserve monétaire instable à l'avenir incertain. Aussi est-elle requise en cas d'urgences, comme pour la récente pandémie et pour soutenir l'infrastructure défaillante comme l'usine de traitement d'eau et les lignes de gaz naturel, lesquelles fournissent chauffage et eau pour nos foyers, notre école, notre service de garde et notre prématernelle.

Ainsi, en 2018, après dix ans d'investissement dans cette affaire — défendant les plaidoyers, répondant aux particuliers, colligeant les preuves provenant de 100 membres, et ayant recours à un grand nombre d'experts — nous sommes arrivés à la décision déchirante que nous ne pouvions procéder avec le litige puisque 5 millions de dollars de plus étaient requis pour l'obtention d'un procès, une somme que la Nation n'a tout simplement pas. Nous nous sommes rendu compte que ce ne serait pas prudent pour la Nation de ne construire que la moitié d'un pont.

En avril 2018, Beaver Lake a présenté une demande de coûts intermédiaires, demandant à la Cour d'ordonner que le Canada et l'Alberta couvrent les frais de justice afin de pouvoir poursuivre le procès. Pour ce faire, elle a assumé la charge de la preuve et a péniblement étalé sa pauvreté monétaire et ses défis communautaires dans un dossier de plus de 5 400 pages d'états financiers, les comptes généraux du grand livre, les relevés bancaires, les ententes de répercussions et d'avantages, les documents de fiducie, les vérifications de Services autochtones Canada et plus. La juge Browne, qui avait présidé au procès pendant sept ans, a entendu l'affaire pendant deux jours et demi en février 2019, tandis que les aînés, utilisateurs de la terre et le leadership observaient, après avoir fait des levées de fonds pour faire le voyage à l'extérieur de la communauté pour être présents au procès.

Dans une décision rendue en septembre 2019, la juge Browne a trouvé que l'affaire avait du mérite, était importante pour le public et dans l'intérêt de la justice et qu'elle devait procéder. Elle a trouvé que Beaver Lake était sans le sou, ayant peu ou pas d'argent, si bien que « le litige ne pourrait se poursuivre si l'ordre n'était pas donné ». Elle a déterminé que l'intérêt de la justice serait mieux servi par un ordre partiel de frais de justice. Elle a ordonné que tous les partis — Beaver Lake, le Canada et l'Alberta — partagent les frais du litige et verse 300 000 dollars annuellement jusqu'à ce que la question soit résolue. Ainsi, elle a reconnu que le double objectif de réconciliation et d'accès à la justice ne pouvait être atteint sans un tel ordre, par lequel elle commencerait à examiner l'énorme déséquilibre de pouvoir entre les partis.

Maintenant, en dépit du fait qu'il y a reconnaissance du mérite de la démarche et de son importance pour le public, le Canada et l'Alberta en ont appelé de la décision sur les frais et continuent de nier la pauvreté monétaire de Beaver Lake. Le Canada et l'Alberta auraient pu choisir d'accepter la décision de la juge Browne et d'aller de l'avant pour que le bien-fondé de l'affaire puisse être établi en juin 2024 — la date fixée pour le procès de 120 jours —, mais, dans un effort pour éviter que la cour ne crée un précédent sur une question de telle importance, ils ont plutôt choisi de remettre en cause l'étendue de la pauvreté monétaire de Beaver Lake. L'appel, fixé au 4 juin, déterminera si oui ou non la Nation va continuer sur sa voie d'accéder à la justice, ou si cela lui sera nié en raison de sa pauvreté monétaire.

Le Canada et l'Alberta ont tenté, par leur développement de nos terres, de priver ma Nation d'un mode de vie significatif, d'une vie riche et abondante. Maintenant, par cette requête, ils disent que nous devrons verser chaque sou que nous avons, peu importe si nous avons besoin de cet argent pour répondre à des besoins d'aide de base et/ou aux besoins les plus fondamentaux de la communauté.

Notre conception du monde en tant que peuples autochtones est fondée sur notre relation avec l'eau, l'air que nous respirons, les minéraux de la terre et toute la flore et la faune qui marche, rampe, vole et nage. C'est en raison de ce privilège que nous avons d'être dans cette relation significative et profonde que nous engageons nos efforts collectifs et notre résilience dans la consolidation de nos droits. Nous le faisons pour que nous puissions continuer de vivre notre vie riche et abondante, « aussi longtemps que brille le soleil, que pousse l'herbe et que coulent les rivières ».

Crystal Lameman est coordonnatrice de traités pour la nation crie de Beaver Lake.

(Repris de raventrust.com. Traduit de l'anglais par LML)

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La politique d'apaisement du Canada face à l'impérialisme américain

Le Canada au dernier tournant dans sa campagne pour un siège au Conseil de sécurité de l'ONU

François-Philippe Champagne, ministre des Affaires étrangères du Canada, s'est rendu à New York le 13 juin avant le vote sur la candidature du Canada à un siège au Conseil de sécurité des Nations unies, ce qui a suscité beaucoup d'inquiétude et d'opposition au Canada.[1] Il est déployé, selon Affaires mondiales, pendant quatre jours « pour dialoguer avec divers ambassadeurs et représentants permanents pour parler de l'engagement du Canada envers la paix et la sécurité, les changements climatiques, l'égalité des sexes, la sécurité économique et le multilatéralisme ». La tentative du ministre d'acheter les votes avec des dollars d'« aide » s'inscrit dans le dernier tournant de la campagne très médiatisée des libéraux de Trudeau pour rétablir la réputation ternie du Canada sur la scène mondiale.

Avec son arrogance habituelle, le premier ministre Justin Trudeau s'est donné le mandat du « fardeau de l'homme blanc » lors de sa tournée en Afrique en février pour solliciter des votes pour un siège au Conseil de sécurité. Il a sans doute versé quelques larmes de crocodile les 12 et 13 février lors de sa visite à la tristement célèbre Maison des esclaves au Sénégal, tout comme il a su poser le genou au sol durant une manifestation à Ottawa contre la brutalité policière et le racisme aux États-Unis. Le Canada voit le Sénégal, dont le vote semble maintenant assuré, comme une voie d'accès au marché africain pour les intérêts privés qu'il représente et pour le pillage industrialisé de l'or. Parallèlement, le ministre Champagne a assisté à la remise de permis d'exploitation pour Teranga, un participant au Forum de Halifax sur la sécurité internationale, et Barrick Gold. Le gouvernement canadien a négocié des accords de promotion et de protection des investissements étrangers (APIE) avec le Bénin, le Burkina Faso, le Cameroun, la Côte d'Ivoire, la Guinée, le Mali, le Sénégal, le Nigéria et la Tanzanie, tous favorisant le contrôle néocolonial des ressources minérales. Tous ces pays ont été pillés à l'épuisement par les puissances coloniales.

Le Canada est réputé pour sa complaisance face au bloc économique impérialiste américain et sa machine de guerre bien qu'il parle de multilatéralisme : mépris de la Charte des Nations unies et des principes du droit international ; violations en série des droits humains tels que ceux du peuple palestinien et des demandeurs d'asile ; intervention en cours dans des pays souverains, directement ou par le biais de coalitions et de sanctions qu'il appelle cyniquement soutien à la « restauration de la démocratie » ; augmentation des exportations d'armes mortelles vers les zones de conflit ; le pays « de service » de l'OTAN comme sous le gouvernement Harper avant lui, qui n'hésite pas à enfreindre la Charte des Nations unies et le droit international ; l'usurpation des pouvoirs par la police et l'armée pendant la pandémie ; et un horrible bilan de négligence criminelle envers les conditions de vie des peuples autochtones au Canada.

« Son récent rejet de la loi des Wet'suwet'en, écrit Pauline Easton, qu'il est pourtant tenu de respecter et de défendre, est également révélateur de son attitude envers la primauté du droit international. En fait, sa campagne pour un siège au Conseil de sécurité de l'ONU se heurte à des vents contraires de plus en plus forts : la fausseté de son affirmation répétée que le Canada est un État de droit - ce qui le rend sans doute admissible à un siège au Conseil de sécurité - est exposée à la face du monde entier. »

Le Canada rivalise avec l'Irlande et la Norvège pour les deux sièges de la catégorie Europe occidentale et autres pays, dont le Canada est considéré comme faisant partie. Le Mexique est le seul candidat pour le siège de l'Amérique latine et des Caraïbes et le Kenya et Djibouti se disputent le siège du groupe africain. L'Inde est le seul candidat à un siège non permanent de la catégorie Asie-Pacifique. Sa candidature a été confirmée par les pays qui composent la région Asie-Pacifique, dont la Chine et le Pakistan, en juin de l'année dernière.

L'élection des cinq membres non permanents du Conseil de sécurité de l'ONU aura lieu le 17 juin. Leur mandat ne commencera qu'en janvier 2021.

L'Assemblée générale des Nations unies élit chaque année cinq membres non permanents (sur 10 au total) pour un mandat de deux ans. Les 10 sièges non permanents sont répartis sur une base régionale - cinq pour les États d'Afrique et d'Asie ; un pour les États d'Europe orientale ; deux pour les États d'Amérique latine et des Caraïbes ; et deux pour les États d'Europe occidentale et autres États.

L'Assemblée générale de l'ONU a résolu que l'élection au Conseil de sécurité aura lieu suivant de nouvelles modalités de vote qui tiennent compte des restrictions en place en raison de la pandémie de COVID-19. Plutôt qu'un scrutin secret tenu dans la salle de l'Assemblée générale, les électeurs sont tenus de se rendre dans un lieu désigné pendant un créneau horaire spécifique pour voter. Seuls les bulletins déposés dans les urnes au lieu désigné seront acceptés et aucun bulletin ne sera accepté après l'expiration du dernier créneau horaire.

Si le nombre total de bulletins de vote déposés dans toutes les urnes ne représente pas au moins la majorité des membres de l'Assemblée, le président distribuera une lettre à tous les États membres indiquant une nouvelle date et heure pour les élections.

Le Canada ne mérite pas de siéger au Conseil de sécurité des Nations unies qui agit d'ailleurs aujourd'hui comme un obstacle au règlement pacifique des conflits en raison de l'emprise des grandes puissances, de la quête de domination des impérialistes américains et de l'absence d'un mécanisme permettant de régler le conflit entre les puissances rivales. Le droit de veto de cinq membres permanents est un arrangement d'une autre époque, quand l'ONU comptait 50 membres. Elle en compte aujourd'hui 198 et ses décisions devraient relever de la majorité de l'Assemblée générale.

Quant à la Norvège, elle aussi est membre fondatrice de l'OTAN et maintient sa position en agissant comme entremetteuse. Quel que soit le résultat, l'ONU a besoin de modernisation et renouvellement dans l'esprit des temps modernes.

Note

1. Voir également « Un tournant historique auquel le gouvernement Trudeau ne peut échapper », éditorial du LML du 22 février 2020, et « Le multilatéralisme impérialiste du Canada » de Margaret Villamizar dans le même numéro.

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États-Unis: la résistance s'organise

Pour la justice et la fin des attaques
racistes organisées par l'État et du recours
à l'armée contre le peuple


Les jeunes mènent la marche à Oakland, en Californie, le 11 juin 2020, en exigeant que
la police se retire des écoles.

Partout aux États-Unis, les actions qui ont commencé le 26 mai pour demander justice pour la mort de George Floyd aux mains de la police se poursuivent et la résistance prend une allure organisée. À Minneapolis, où Floyd a été tué, et partout au pays, des appels se font entendre à la justice pour les nombreux cas de brutalité policière et de morts aux mains de la police, surtout d'Afro-Américains, et à des changements en profondeur du système de police qui feront en sorte que le peuple ne sera plus victimisé par une force militarisée qui ne représente pas ses intérêts. Le peuple continue d'affirmer ses convictions sur la nécessité de nouveaux arrangements et de s'investir lui-même du pouvoir par des manifestations et d'autres formes de lutte.

Depuis le 26 mai, des manifestations ont eu lieu dans au moins 750 villes américaines, dans les 50 États, et sur le plan international dans 60 pays, couvrant tous les continents à l'exception de l'Antarctique. Le peuple n'a pas été intimidé par les déploiements massifs de la Garde nationale et des forces de police ni par les actes de violence policière généralisée. Des activistes ont compilé des rapports et des images de ces événements[1]. Une de ces bases de données comptait 659 entrées au 13 juin. Un des incidents qu'on y trouve est la mort d'un homme non armé de 22 ans dans le nord de la Californie le 1er juin, alors qu'il était à genoux, les mains levées. Le policier l'a abattu à partir de la voiture de patrouille, affirmant avoir pris un marteau dans la poche de l'homme pour une arme à feu. D'autre part, le site Web Bellingcat.com a compilé une liste des violences policières contre les journalistes qui, au 2 juin, comptaient 148 cas. Il souligne que « pour vous donner une idée de l'énormité de ce chiffre, le US Press Freedom Tracker a recensé 150 violations de la liberté de la presse pour toute l'année 2019. Les cas durant les manifestations en cours ont presque dépassé les chiffres de 2019 en une semaine.[2] »

Ce qui marque avant tout les événements actuels est le caractère organisé de la résistance. Les Américains et leurs collectifs parlent en leur propre nom, sur la base de leurs propres revendications, malgré toute la pression exercée sur eux pour qu'ils appuient une faction ou l'autre de l'armée ou de l'élite dirigeante qui s'oppose à Trump et qui dit défendre la Constitution. Le mouvement n'a pas encore été détourné de ses objectifs pour soutenir le statu quo qui prive le peuple de pouvoir.

À Minneapolis, où les manifestations de masse ont mené au congédiement des quatre policiers et à des accusations criminelles contre eux pour la mort de George Floyd, l'attention du peuple est maintenant centrée sur les changements en profondeur qui s'imposent dans le système de police qui criminalise systématiquement les Afro-Américains et les autres minorités privés de leurs droits.


Manifestation à Minneapolis le 7 juin 2020

Réagissant aux revendications du peuple, la ville de Minneapolis a adopté à l'unanimité le 12 juin une résolution pour remplacer le service de police par un système de sécurité publique chapeauté par la communauté. « Le meurtre de George Floyd le 25 mai 2020 par des policiers de Minneapolis est une tragédie qui montre que peu importe les réformes, rien n'empêchera la violence meurtrière et les abus de certains membres du service de police contre les membres de notre communauté, en particulier contre les personnes noires et de couleur », disent cinq membres du conseil dans la résolution. La résolution affirme que le conseil initiera un processus d'un an pour dialoguer « avec tous les résidents de bonne volonté de Minneapolis » dans son « Groupe de travail sur la sécurité communautaire », afin de développer un « nouveau modèle transformateur » de sécurité publique dans la ville. Le conseil a également voté à l'unanimité la fin de l'ordre d'urgence locale qui avait été déclarée en raison des manifestations de masse commencées le 26 mai à la suite de la mort de George Floyd.

Les demandes adressées au conseil municipal sur l'imputabilité de la police et la dissolution de la police de Minneapolis ont débuté bien avant la mort de George Floyd, soulignent des militants de Minneapolis qui notent qu'une action opportune aurait pu empêcher la mort de George Floyd. Le 11 juin, l'organisation Twin Cities Coalition for Justice 4 Jamar (TCJ4J) - formée après la mort de Jamar Clark, 24 ans, aux mains de la police en 2015 - a demandé que les policiers responsables d'homicides similaires et d'autres crimes soient tenus responsables et que justice soit rendue aux amis et aux familles. Des activistes à travers les États-Unis lancent des appels à retirer le financement aux services de police et à les remplacer par des organismes sur lesquels le peuple peut exercer un contrôle. Ils appellent aussi à l'augmentation des services sociaux pour fournir aux citoyens une sécurité basée sur la satisfaction des besoins humains, et non sur l'utilisation de la violence étatique et la criminalisation des minorités, des pauvres et des travailleurs pauvres, des secteurs marginalisés et des plus vulnérables de la société.


Minneapolis, 11 juin 2020

La résistance populaire prend également la forme du refus de membres de la Garde nationale d'obéir à l'ordre de déploiement contre des manifestants, car ils reconnaissent la justice de ceux qui ont répondu à l'appel « Black Lives Matter » et ne souhaitent pas être mis en position d'exécuter la brutalité de l'État contre ceux qui exercent leur droit de manifester. Comme l'a dit un membre de la California National Air Guard, « ce qu'on nous dit, c'est de dissuader les gens de commettre toute activité criminelle et des choses de ce genre. Mais cela n'a pas nécessairement d'importance. L'important est ce qui va être communiqué sur le terrain quand vous voyez des gens en uniforme avec des armes, debout en formation. » Il a ajouté qu'il s'était engagé à faire du travail humanitaire, pas à agir comme une force d'invasion. « Beaucoup de soldats ne sont pas à l'aise avec ça, dit-il. Ils ont l'impression que ce n'est pas vraiment ce pour quoi ils se sont engagés. » Des organisations d'anciens combattants et des groupes de défense des droits des GI déclarent avoir répondu à un grand nombre d'appels de soldats leur demandant quelles étaient leurs options pour refuser des ordres. Le groupe de vétérans pour la paix About Face dit qu'il connaît une dizaine de militaires qui ont pris des mesures concrètes pour éviter le déploiement, tandis que de nombreux autres ont demandé de l'aide pour résister aux ordres qu'ils jugent illégaux.

Cette résistance se manifeste également dans la destruction de symboles qui glorifient l'esclavage ou des statues commémorant les marchands d'esclaves. Au milieu de cette situation, les peuples autochtones vivant sur le territoire américain reçoivent un grand appui dans leur demande de retrait des statues de Christophe Colomb pour que le génocide et la dépossession des peuples autochtones ne soient plus présentés comme de grandes réalisations historiques plutôt que des crimes contre l'humanité.

Le 3 juin, les avocats des familles de George Floyd et d'autres ont annoncé qu'ils appelaient l'ONU à ouvrir un dossier sur le non-respect des droits de l'homme aux États-Unis et à sanctionner les États-Unis pour leur mauvais traitement des Afro-Américains.

À cause d'une résistance large et soutenue, l'ancien policier de Minneapolis, Derek Chauvin, qui tenait le genou sur le cou de George Floyd, est actuellement détenu dans les locaux des services correctionnels du Minnesota à Oak Park. Sa caution a été portée à 1 million de dollars le 3 juin lorsque les accusations contre lui ont été élevées au rang de meurtre au deuxième degré. Les ex-policiers Thomas Lane et J. Alexander Kueng, qui ont aidé à maîtriser Floyd, et Tou Thao, qui se tenait tout près, sont accusés de complicité de meurtre au deuxième degré et de complicité d'homicide involontaire au deuxième degré. Leur caution a été fixée à 1 million de dollars sans conditions ou 750 000 $ avec conditions. Lane a été libéré le 10 juin sur une caution de 750 000 $.

Le Marxiste-Léniniste présente un supplément avec des appels de la résistance organisée et un reportage photo.

Notes

1. Pour voir le tableau, cliquer ici.

2. « Visualizing Police Violence Against Journalists At Protests Across The U.S.», Charlotte Godart, Bellingcat.com, 5 juin 2020

Supplément
La résistance organisée prend sa place aux États-Unis 

Déclarations d'organisations américaines
et reportage photo

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Dangereux développements dans la péninsule coréenne

La RPDC tire les conclusions face au bellicisme incessant des États-Unis

Le 12 juin, le ministre des Affaires étrangères de la République populaire démocratique de Corée (RPDC), Ri Song Gwon, a publié une déclaration à l'occasion du deuxième anniversaire du Sommet historique RPDC-États-Unis du 12 juin 2018, à Singapour. Ce sommet entre le président Kim Jong Un, le dirigeant de la RPDC et le président des États-Unis, Donald Trump, avait comme objectif d'établir une nouvelle relation entre la RPDC et les États-Unis qui mettrait fin aux hostilités entre les deux pays et engendrerait la paix et la dénucléarisation de la péninsule coréenne.

« Ce qui en ressort est que l'espoir de relations améliorées entre la RPDC et les États-Unis — espoir élevé il y a deux ans en tant qu'événement mondial — s'est maintenant transformé en son contraire, caractérisé par une détérioration en spirale. La faible lueur d'optimisme, de paix et de prospérité sur la péninsule coréenne s'est effacée pour faire place à un sombre cauchemar », a affirmé le ministre des Affaires étrangères Ri.

Celui-ci a ajouté que la volonté des peuples des deux pays de mettre fin « aux relations les plus antagonistes au monde entre la RPDC et les États-Unis et d'ouvrir une nouvelle ère de coopération vers la paix et la prospérité est plus vive que jamais. Et pourtant, la situation dans la péninsule coréenne se détériore de jour en jour ».

Le ministre des Affaires extérieures a fait valoir qu'afin d'encourager des relations positives et faire preuve de bonne foi, la RPDC avait fermé son site d'essai nucléaire au nord [le site d'essai nucléaire Punggye-ri — note de LML], libéré des citoyens américains accusés d'avoir commis des crimes contre la RPDC, et rapatrié un grand nombre de restes de soldats américains tués ou disparus au combat pendant la Guerre de Corée. Il a souligné que la RPDC avait pris l'initiative de suspendre ses essais nucléaires et ses essais de lancement de missiles balistiques intercontinentaux, toutes des mesures pour nourrir la confiance entre la RPDC et les États-Unis.

Dans sa déclaration, Ri observe que ces mesures prises par la RPDC n'ont fait que servir la stratégie de relations publiques du président Trump par ses annonces intéressées.

Le ministre Ri a souligné que sous prétexte de vouloir améliorer les relations avec la RPDC, les États-Unis avaient pris une direction diamétralement opposée, transformant la péninsule coréenne « en un point chaud le plus dangereux au monde, hanté sans cesse par le spectre d'une guerre nucléaire », ce qui mine la possibilité d'une paix durable à laquelle les deux pays se sont engagés.

« La RPDC fait toujours partie de la liste de cibles de frappes nucléaires préventives, et toutes sortes d'instruments de frappes nucléaires américains visent directement la RPDC », a indiqué Ri. À titre d'exemple, il a souligné la présence de « bombardiers stratégiques nucléaires qui volent en tout temps dans l'espace aérien coréen dans le cadre d'exercices de frappes nucléaires et de groupes de frappe constitués de porte-avions qui voguent les mers autour de la Corée du sud ».

Le ministre des Affaires étrangères a aussi souligné que les États-Unis continuent de fournir « un grand nombre d'armes modernes et de technologie de pointe telles que des aéronefs furtifs et des drones de reconnaissance d'une valeur de dizaines de milliards de dollars US » pour renforcer la capacité offensive de l'armée de la Corée du sud tout en rejetant le fardeau financier du coût de ces armes sur le dos des autorités coréennes.

Le ministre des Affaires étrangères de la RPDC a souligné que depuis les deux dernières années la RPDC a été la cible de « pratiques totalement injustes et anachroniques » qui montrent clairement que le but des États-Unis est de poursuivre une politique de changement de régime en RPDC ainsi que ses menaces de frappe nucléaire préventive et sa politique d'isolement et de suffocation de la RPDC. Il a fait valoir qu'à moins que ne cesse une fois pour toutes « la politique hostile profondément enracinée depuis plus de 70 ans des États-Unis envers la RPDC, les États-Unis seront une menace à long terme pour notre État, notre système et notre peuple ».

Le ministre Ri souligne que sur la base de ces vérités, la RPDC ne peut espérer une amélioration des relations avec les États-Unis sur la base des relations personnelles entre le président Kim Jong Un et le président Trump et que la RPDC n'offrira au président Trump aucune autre occasion de tirer avantage de la situation à des fins politiques intéressées alors qu'elle ne reçoit en retour que des fausses promesses.

Enfin, le ministre des Affaires étrangères de la RPDC a dit qu'en raison de cette réalité, la décision prise par la RPDC et le président Kim Jong Un lors de la récente quatrième réunion élargie de la septième commission militaire centrale du Parti des travailleurs de Corée, visait à augmenter encore plus l'effet dissuasif national d'une guerre nucléaire face aux menaces incessantes de menaces de guerre nucléaire des États-Unis » et que c'était là le message de la RPDC aux États-Unis à l'occasion du deuxième anniversaire du Sommet RPDC-États-Unis de Singapour.

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Détérioration des relations intercoréennes

Le 9 juin, la République populaire démocratique de Corée (RPDC) a interrompu les communications avec la République de Corée (RdC). Elle affirme être exaspérée par le refus de la République de Corée de condamner et de faire cesser la distribution de tracts anti-RPDC lancés le 31 mai par de soi-disant transfuges depuis la ville frontalière de Gimpo. Gimpo se trouve du côté sud de la zone démilitarisée située au 38e parallèle que les États-Unis ont imposée pour diviser la Corée.

Plus tôt, le 4 juin, la RPDC a envoyé un message à la RdC pour protester contre ces lancements de ballons-tracts et l'a appelé à agir pour mettre fin à cette provocation. Elle a rappelé à la RdC les engagements de la Déclaration commune de Panmunjom signée le 27 avril 2018.

« Les autorités sud-coréennes doivent être au courant des articles de la Déclaration de Panmunjom et de l'accord dans le domaine militaire dans lequel les deux parties ont convenu d'interdire tous les actes hostiles, y compris la diffusion de tracts dans les zones le long de la ligne de démarcation militaire. »

Pour donner suite à cette démarche drastique de la RPDC, les médias rapportent que le gouvernement de la République de Corée envisage d'adopter une loi pour rendre illégales ces provocations et d'inculper ceux qui commettent de tels actes.

La Déclaration historique de Panmunjom signée entre le président Kim Jung Un de la RPDC et le président Moon Jae-in de la RdC accorde une attention particulière à la nécessité de travailler ensemble pour mettre fin aux provocations militaires et autres et créer une structure permanente de paix sur la péninsule coréenne. Plus précisément, les trois premiers paragraphes du deuxième point se lisent comme suit :

« La réduction de la tension militaire et l'élimination du danger de guerre dans la péninsule coréenne s'avèrent particulièrement importantes pour le destin de la nation et cruciales pour une vie pacifique et stable des Coréens.

« Le Nord et le Sud sont convenus de cesser sur tous les plans, notamment sur terre, sur mer et dans l'air, tous genres d'actes d'hostilité l'un à l'égard de l'autre de nature à provoquer une tension et un conflit militaire.

« Dans l'immédiat, ils sont convenus de cesser à partir du 1er mai l'émission par haut-parleur et l'épandage de tracts et tous les autres actes d'hostilité dans les parages de la ligne de démarcation militaire, d'en supprimer les moyens correspondants et de transformer la zone démilitarisée en une zone de paix réelle. »

Les relations intercoréennes ont été entravées depuis la division américaine de la Corée en 1945 et sa domination militaire et politique sur la Corée du sud depuis lors. Les États-Unis maintiennent cette division afin d'utiliser la Corée du sud comme terrain militaire pour mener une guerre visant non seulement la RPDC, mais également la Chine et la Russie. Même si aujourd'hui les institutions américaines traversent une crise profonde, la politique étrangère américaine, comme la politique intérieure, est basée sur la destruction, l'agression et la guerre. Pour garder le peuple coréen divisé, les impérialistes américains continuent de présenter la RPDC comme agresseur et ainsi détourner l'attention de leurs propres crimes historiques et présents contre le peuple coréen.

L'administration Trump n'a respecté aucun de ses engagements envers la RPDC convenus lors de l'historique sommet RPDC-États-Unis à Singapour le 12 juin 2018. Le deuxième des quatre points de l'accord se lit comme suit :

« La RPDC et les États-Unis conjugueront leurs efforts pour instaurer un système de paix permanent et durable dans la péninsule coréenne. »

Les nombreuses sanctions américaines conçues par le Conseil de sécurité des Nations unies et l'administration américaine, auxquelles le Canada adhère, sont des actes de guerre. Les États-Unis dictent à la République de Corée, qu'ils appellent un « partenaire stratégique », faisant d'elle le quatrième importateur d'armes américaines pour lequel le peuple coréen doit payer. C'est ainsi que l'ingérence des États-Unis dans les relations intercoréennes continuent de causer des difficultés malgré le désir des Coréens et des deux gouvernements de s'entendre.

Face à cette réalité, il devient d'autant plus important pour le gouvernement de la République de Corée d'honorer ses engagements et de servir le désir de paix du peuple coréen. L'avenir de la Corée sera décidé par le peuple coréen lui-même malgré toutes les difficultés. Les principes directeurs du mouvement du peuple coréen pour la réunification stipulent que la réunification doit être réalisée par le peuple coréen lui-même sans ingérence extérieure ; qu'elle doit être réalisée pacifiquement ; et enfin qu'elle doit être réalisée par l'unité politique du peuple coréen en mettant de côté ses divergences.

(Sources : LML, KCNA, Hankyoreh)

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Réunion virtuelle sur les développements
actuels sur la péninsule coréenne

À l'occasion du 20e anniversaire de l'historique déclaration Nord-Sud

Jeudi 18 juin - 19 h (HAE)

D'importants sujet de préoccupation seront abordés:

• Les relations entre la République populaire démocratique
de Corée et les États-Unis
• Les relations intercoréennes, les exercices de guerre
et les provocations des États-Unis
• Comment la RPDC réussit à contrôler la pandémie
de la COVID-19 malgré les sanctions illégales

Orateur principal : le professeur Kiyul Chung
Fondateur et rédacteur de The 21st Century
Professeur adjoint, Université de Corée, Tokyok Japon
Professeur invité, Université Kim Il Sung, Pyongyant, RPDC

Les sanctions contre la RPDC seront abordées par l'avocat torontois Lorne Gershuny

Organisé par: Commission de la vérité sur la Corée (chapitre canadien)
Fédération coréenne du Canada

BIENVENUE À TOUS !

Pour se joindre à la rencontre et pour plus d'information, cliquer ici
Identifiant pour la rencontre: 868 1560 7481
Mot de passe : 420759

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Mise à jour sur la COVID-19

Le président des États-Unis répond par de nouvelles provocations à une situation déjà désespérée

Le président des États-Unis Donald Trump a tenu une conférence de presse le 5 juin dans laquelle il a dit que la COVID-19 est largement chose du passé et sous contrôle aux États-Unis. Il a déclaré que le pays a été pacifié par le recours à la Garde nationale qui a dominé la rue contre le vandalisme. Il a dit que les États-Unis sont sur la voie d'une grande reprise économique et d'une dominance renouvelée dans les affaires mondiales. La domination de la rue et des affaires mondiales est un thème qui a imprégné toute la conférence de presse. L'affirmation que la pandémie est largement chose du passé a été exprimée graphiquement par la violation de la distanciation sociale dans la façon dont les chaises des journalistes ont été disposées pour la conférence de presse. Selon les médias, les chaises avaient d'abord été disposées de façon conforme aux guides de la distanciation sociale, mais elles ont été déplacées par le personnel de la Maison-Blanche avant le début de l'événement. « Je remarque que vous-mêmes êtes plus près les uns des autres, c'est bien mieux ainsi, ça peut encore être amélioré, c'est juste une question de temps », a-t-il dit aux journalistes.

La conférence de presse avait lieu en réponse aux données sur l'emploi qui ont été publiées par le département du Travail plus tôt dans la journée et qui indiquaient que le taux de chômage avait chuté à 13,3 % en mai, par rapport à 14,7 % en avril, et que 2 509 000 emplois avaient été ajoutés, comparativement à une perte record de 20 687 000 en avril. Trump a qualifié cette hausse, combinée à celle du marché boursier, du « plus grand revirement de l'histoire des États-Unis ».

« C'est un grand jour pour tout le monde en ce qui concerne l'égalité », a-t-il dit.

La conférence de presse avait tous les traits d'un geste fou et désespéré visant à assurer la domination de l'élite dirigeante impérialiste que Trump représente. Ceci comprend la domination électorale, alors que l'élection présidentielle américaine doit avoir lieu en novembre, sur ses rivaux et sur le peuple américain qui n'a cessé de protester contre l'injustice raciale et la violence et l'impunité de l'État depuis le meurtre de George Floyd par la police de Minneapolis le 25 mai.

Des actions semblables ont été tenues par les peuples du monde dans un grand nombre de pays.

Trump a provoqué une grande colère parmi le peuple américain et les peuples du monde lorsqu'il a osé déclarer que George Floyd serait heureux des données sur l'emploi et de la soi-disant pacification des rues par la force brutale, y compris par le recours à la Garde nationale.

« J'espère que George nous regarde en ce moment et dit que c'est une grande chose qui se produit dans notre pays actuellement, a dit Trump avec tant de vulgarité et d'esprit de provocation. C'est une grande chose qui se produit dans notre pays. C'est une grande journée pour lui. C'est un grand jour pour tout le monde. »

La provocation et le désespoir étaient palpables alors que le président des États-Unis a exprimé que la faction impérialiste au pouvoir aux États-Unis est prête à sacrifier encore plus de vies avec un déconfinement sans limites aux États-Unis, déclarant que l'« économie » prime sur toute autre considération en tant que source du pouvoir impérialiste américain au pays et à l'étranger. Il n'a pas eu un seul mot de remords ou de regret pour les 107 000 personnes qui sont mortes de la COVID-19 aux États-Unis jusqu'à maintenant. En fait, il considère qu'il s'agit d'une victoire parce que des millions de personnes, a-t-il dit, auraient pu mourir si les États-Unis n'avaient pas fermé leurs frontières à la Chine de même qu'aux habitants de l'Union européenne et à d'autres qui étaient infectées par ce qu'il a appelé la « peste », un « cadeau de la Chine ». Il a dit que les données sur l'emploi vont encore grandement s'améliorer une fois que tous les États américains vont accepter de se déconfiner et qu'on va permettre à l'économie de repartir, sans contrôle et sans surveillance, avec la levée des mesures visant à freiner la propagation de la pandémie.

Voilà la carte risquée que joue cette faction impérialiste au détriment de la santé et de la sécurité, et de la dignité et des droits du peuple américain et des peuples du monde. Cette carte est pleine de dangers, y compris celui d'une guerre civile totale entre les factions de l'élite. Cela montre à quel point il est nécessaire que les peuples des États-Unis et du monde développent leur propre politique indépendante afin de s'investir du pouvoir, tout en intensifiant leur lutte pour leurs droits, dont la lutte contre l'injustice raciale et la violence et l'impunité de l'État.

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Appel conjoint d'agences de l'ONU à éliminer la stigmatisation et la discrimination des travailleurs migrants et de leurs enfants pendant une pandémie


Plus de 15 000 travailleurs migrants du Myanmar sont rentrés chez eux par
ce passage à la frontière thaïlandaise en un seul jour à la fin de mars. (IOM)

Ce qui suit est un article publié conjointement le 8 juin par l'Organisation internationale du travail (OIT), l'Organisation internationale pour les migrations (OIM), le Fonds international d'urgence des Nations unies pour l'enfance (UNICEF), l'Office des Nations unies contre la drogue et le crime (UNODC) et ONU Femmes, signé par Jeremy Douglas, Karin Hulshof, Nenette Motus, Mohammad Naciri et Tomoko Nishimoto pour leur organisation respective.

La COVID-19 a provoqué des perturbations mondiales massives et mis les plus vulnérables, notamment les travailleurs migrants hommes et femmes et leurs enfants, dans une situation très difficile. Les mesures de confinement, notamment la fermeture des frontières et les restrictions de mouvement, ont eu un impact significatif sur les migrants, exacerbant les vulnérabilités existantes et augmentant potentiellement les risques de transmission. La perte de revenus a conduit à l'insécurité, à des risques accrus de violence et à une augmentation de la dette pour ce groupe déjà vulnérable, y compris pour les familles pour lesquelles les envois de fonds de l'étranger sont une source de revenu essentielle.

En Asie du Sud-Est et dans le Pacifique, 11,6 millions de personnes sont des travailleurs migrants, dont 5,2 millions de femmes. De nombreux pays de la région comptent sur les travailleurs migrants pour le fonctionnement de leur économie afin de combler les pénuries locales de main-d'oeuvre. En 2019, on estime que 2,8 millions d'enfants migrants internationaux vivaient en Asie de l'Est et dans le Pacifique.

L'isolement et la mobilité réduite ont accru le risque d'abus, d'exploitation et de traite des personnes, en particulier des travailleuses migrantes (y compris par les employeurs et les partenaires) et des enfants. Lorsque les ménages sont soumis à des tensions accrues dues à des problèmes de sécurité, de santé et de finance, ainsi qu'à des conditions de vie exiguës, les femmes et les filles sont plus susceptibles d'être exposées à la violence et aux abus. Les mesures de réponse à la COVID-19 qui n'incluent pas les travailleurs migrants dans l'économie informelle exposent davantage ces travailleurs et leurs familles à un risque d'exploitation.

Les fermetures d'écoles ont beaucoup aggravé les vulnérabilités des enfants migrants, pour lesquels les écoles fournissent non seulement une éducation, mais un havre, une source de nourriture, une occasion d'identifier les abus et une plateforme importante par laquelle recevoir des informations. Ce mécanisme de sécurité est désormais perdu, ce qui aggrave encore la perturbation des services de protection de l'enfance auxquels les enfants migrants ont déjà un accès limité. Ils peuvent également être confrontés à des obstacles importants pour accéder aux occasions d'apprentissage en ligne.

Les attitudes à l'égard des travailleurs migrants qui n'étaient généralement pas positives avant la pandémie n'ont fait qu'empirer. Dans les pays de l'Association des nations de l'Asie du Sud-Est, on a signalé une augmentation des violences verbales contre certaines nationalités et des migrants présumés responsables de l'introduction du virus dans les communautés. Cette stigmatisation et cette discrimination sont non seulement inacceptables, mais dangereuses, et elles peuvent mettre les travailleuses migrantes, leurs enfants et leurs familles à risque de violence, de harcèlement et de traite à la fois sexistes et xénophobes.

Les travailleuses migrantes occupent divers métiers, notamment dans les domaines du travail domestique, de l'hôtellerie, de la transformation des fruits de mer, de la fabrication, de l'agriculture et de la construction. Beaucoup sont en première ligne pour répondre à la pandémie, en particulier en tant que soignantes. Ces groupes de migrants peuvent être plus à risque de transmission en raison de leurs conditions de vie et de travail. Beaucoup peuvent ne pas être en mesure d'accéder aux services essentiels, surtout lorsqu'ils en ont le plus besoin, y compris s'ils sont exposés à la violence et aux abus.

Les migrants en situation irrégulière ou sans papiers vivent également dans la crainte d'être expulsés, ce qui les rend moins susceptibles d'avoir accès à un test de dépistage ou d'être soignés, avec des conséquences pour leur propre santé et celle des autres. Outre la crainte de perdre leur moyen de subsistance s'ils se révèlent positifs, les travailleurs migrants sont également plus susceptibles d'être victimes d'exploitation et d'abus, notamment par des écarts salariaux encore plus grands, ce qui accroît la discrimination existante dans certaines professions.

Nous appelons les États à respecter leurs engagements internationaux au titre de la Convention relative aux droits de l'enfant, des normes internationales du travail relatives à la promotion du travail décent, de l'égalité des sexes et de la migration équitable du travail, et de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes.

Les États devraient reconnaître que les migrants sont un élément essentiel de la réponse à la pandémie et prendre des mesures ciblées pour protéger les femmes, les hommes, les filles et les garçons, y compris ceux qui se trouvent dans des situations de vulnérabilité. Ils doivent mettre en place des mesures pour assurer l'accès aux services essentiels pour tous, favoriser le dialogue entre les migrants et les communautés de destination ainsi que les communautés d'origine pour lutter contre la xénophobie, la discrimination ou la stigmatisation des migrants.

Les arrestations de migrants sans papiers ne devraient jamais faire partie des mesures de confinement et, dans le cas d'enfants, elles contreviennent à l'intérêt supérieur de l'enfant. Les enfants et les jeunes, y compris les enfants migrants, ont apporté de précieuses idées et une sensibilité aux besoins et aux défis de la réponse à la COVID-19.

Bien que le virus ne fasse pas de discrimination, son impact social et économique n'est certainement pas égal pour tous. Les plus vulnérables qui ne bénéficient pas d'une mesure de protection sociale ni d'un accès rapide aux soins de santé et aux services essentiels, subissent de manière disproportionnée les conséquences plus graves de la pandémie.

Par conséquent, la réponse immédiate et les mesures de relance à long terme doivent répondre aux besoins et défis particuliers des travailleurs migrants, en particulier des femmes et des enfants. C'est le moment de la solidarité et de l'humanité quels que soient la nationalité, le statut migratoire, le sexe ou l'âge. Plus que jamais, les sociétés ont la responsabilité commune de mettre fin à la pandémie par la réussite. Personne ne doit être laissé pour compte - peu importe qui il est, où il se trouve ou quel statut juridique il a.

Comme l'a souligné le secrétaire général des Nations unies dans un appel à ce sujet, élevons-nous contre la haine, traitons autrui avec dignité et battons la COVID-19 ensemble.

Jeremy Douglas, représentant régional de l'ONUDC pour l'Asie du Sud-Est et le Pacifique

Karin Hulshof, directrice régionale de l'UNICEF Asie de l'Est et Pacifique

Nenette Motus, directrice régionale de l'OIM pour l'Asie et le Pacifique

Mohammad Naciri, directeur régional d'ONU Femmes pour l'Asie et le Pacifique

Tomoko Nishimoto, sous-directeur général du BIT et directeur régional pour l'Asie et le Pacifique

(Traduit de l'anglais par LML)

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Le traitement inhumain des migrants par les États-Unis met en péril les peuples des Amériques


Expulsés des États-Unis durant la pandémie, des migrants arrivent chez eux au Mexique.

Une des choses qui caractérise la pandémie aux États-Unis en ce moment est le traitement inhumain par le gouvernement des personnes sans statut : les immigrants, les travailleurs migrants et les demandeurs d'asile. Il s'agit non seulement de traitement ou de détention dans des conditions peu propices à la distanciation sociale, mais de déportations continues de personnes vers le Mexique, l'Amérique centrale et Haïti. Tout cela est fait au détriment de toutes normes établies pour le traitement des migrants et des réfugiés.

Des pays comme Cuba et d'autres fournissent de l'aide désintéressée aux peuples du monde tout comme le Venezuela qui, malgré tout ce à quoi il doit faire face en tant qu'objet de la guerre économique américaine, accueille les migrants vénézuéliens qui reviennent (plus de 6 000 au 10 juin, la plupart informels), après avoir été abandonnés sans aucun soutien à la frontière des pays voisins qui étaient mal préparés à résister à une pandémie. C'est encore le Venezuela qui leur fournit des services sociaux et de santé gratuits tandis que les impérialistes américains font preuve de mépris sans borne pour la vie humaine en mettant en péril les peuples d'Amérique latine et des Caraïbes alors que cette région est aux prises plus que jamais avec la pandémie.

Une agence de nouvelles rapportait le 7 juin : « Sous prétexte de contenir la propagation de la COVID-19 au pays, les États-Unis vont de l'avant avec leur ordre du jour d'appliquer leurs politiques en matière d'immigration, déportant des milliers de personnes d'Amérique centrale, y compris celles qui ont été infectées par le virus mortel, vers leurs pays d'origine alors même que la pandémie fait rage.

« Dans des centres de détention surpeuplés ou au cours de processus de déportation ayant peu ou pas de mesures sanitaires, l'approche 'business-as-usual' de Washington fait fi d'une crise de santé mondiale et met en danger les systèmes de santé fragilisés dans les pays moins développés de l'Amérique centrale.

« Jusqu'ici, le Guatemala, Haïti, la Jamaïque et d'autres pays d'Amérique latine tels que la Colombie et le Mexique ont annoncé des cas d'infection chez les personnes déportées. Les États-Unis, le pays avec le plus grand nombre d'infections et de décès au monde, sont accusés d'avoir encouragé la propagation du virus dans les régions avoisinantes.

« Marvin Canahui, un migrant guatémaltèque de 38 ans, dit que son expérience vécue est la même que celle de milliers de personnes qui ont été détenues ou déportées par le Service américain de l'immigration et de l'application des règles douanières (ICE) pendant la pandémie.

« 'Ils ne nous ont jamais donné du savon ni du désinfectant à main', a dit Canahui, qui [a été déporté tout récemment] après avoir travaillé aux États-Unis pendant 17 ans. [...]

« Sauf dans la salle à manger et la pièce où se trouvent les téléphones, il n'y avait aucune mesure de nettoyage ou de prévention comme la distanciation sociale dans l'établissement où il partageait le dortoir, les douches et les salles de bain avec près de 200 migrants du Guatemala, du Salvador, du Honduras et du Nicaragua, a-t-il évoqué.

« 'Nous étions entassés, à pleine capacité. Il n'y avait plus de place pour une seule personne, a dit Canahui. Elles (les autorités américaines) ont continué de faire entrer des prisonniers. Nous étions totalement à l'étroit là-dedans.'

« Avant qu'il ne soit déporté à la mi-avril, il a subi un examen de la gorge avec un abaisse-langue en plastique, sans qu'on lui explique pourquoi ni quel en était le résultat.

« Après son arrivée par avion au Guatemala le 14 avril, les autorités de l'immigration à cet endroit l'ont placé, lui et d'autres personnes déportées, en quarantaine pendant 14 jours dans un refuge près de l'aéroport, puisque des nouveaux arrivés avant eux avaient eu des résultats positifs lors de leur test de dépistage du virus. [...]

« Un migrant salvadorien qui n'a donné que son prénom, Carlos, a été détenu dans un établissement de détention au Texas à partir de janvier jusqu'au début d'avril, où il a perdu 20 kilos en raison de problèmes de santé existants et des mauvaises conditions. [...]

« 'Il n'y avait aucune mesure de protection ni de traitement (spécial)' et plus de 80 détenus présents 'n'ont pas été testés', a dit Carlos, 31 ans, qui s'est enfui du Salvador en janvier après que les membres d'un gang ont menacé de le tuer pour avoir refusé de verser de l'argent de protection pour sa petite entreprise.

« Il a dit qu'il espérait demander l'asile aux États-Unis, mais qu'il avait été arrêté presque immédiatement par des agents patrouilleurs à la frontière et envoyé à la 'glacière', le nom familier attribué aux cellules de détention froides où sont les détenus. [...]

« David Cruz, un migrant mexicain de 48 ans, a dit qu'on lui avait donné un masque et qu'on avait vérifié sa température lorsqu'il a été mis dans une cellule de détention à McAllen, au Texas, mais qu'il avait été détenu avec 27 autres personnes dans un espace serré.

« Il a été déporté en mai par l'un des huit vols nolisés pour accélérer le processus de déportation vers le Mexique, qui est habituellement fait par transport terrestre.

« Le but de ces vols est de réduire la propagation de la COVID-19 'aux États-Unis', a dit le service de patrouille frontalière et des douanes américaines dans une déclaration.

« Cependant, les experts latino-américains ont dit que la décision des États-Unis en pleine éclosion de la COVID-19 menaçait de propager le virus au sud de ce pays, en particulier dans les communautés rurales pauvres d'où viennent plusieurs des migrants.

« Le 4 mai, l'organisation médicale non gouvernementale internationale Médecins sans frontières a exhorté les États-Unis de suspendre les déportations, avertissant que le déplacement pourrait détériorer la situation dans des pays qui n'ont pas l'équipement requis pour faire face à une telle crise.

« Loic Jagger, le directeur de l'organisation pour le Mexique et l'Amérique centrale, a dit plus tôt que le fait de déporter des migrants sans d'abord vérifier s'ils ne sont pas infectés est une 'politique criminelle'. [...]

« Selon l'ICE, près de 943 migrants dans plus de 45 centres de détention ont eu un résultat positif à la suite d'un test pour la COVID-19 après que 1 788 tests de dépistage ont été effectués. Le nombre total de migrants détenus dans ces centres a atteint 29 675 à la fin d'avril.

« 'Les États-Unis semblent exploiter la pandémie pour s'attaquer à l'immigration, a dit Ruben Figueroa, un membre du Mouvement migrant mésoaméricain qui défend les droits humains des migrants de l'Amérique centrale.

« 'Ils saisissent cette occasion pour imposer des restrictions beaucoup plus draconiennes. Il en va de même pour les mesures de sécurité. Ils violent (les droits) de ces gens, de leurs communautés et de leur pays d'origine. C'est clair, c'est évident', a dit Figueroa.

« En Colombie, les experts en maladies infectieuses ont sonné l'alarme face aux agissements des États-Unis après que plus de 20 des 64 Colombiens déportés le 30 mars ont été testés positifs pour la COVID-19.

« Aristobulo Varon, un des rapatriés, a dit à la presse locale qu'aucune des personnes déportées n'avait été testée, et leur validation reposait entièrement sur le fait qu'elles n'avaient manifesté aucun symptôme évident du nouveau coronavirus.

« Soraya Marquez, une experte en maladies infectieuses et coordonnatrice en rétablissement de la santé à la clinique Juan N. Corpas de Bogota, a dit que les États-Unis étaient irresponsables dans leur négation des protocoles standards de la santé en pleine pandémie, laquelle a infecté plus de 6,8 millions de personnes par le monde et tué plus de 390 000 personnes.

« 'Je pense que c'est un échec total en raison de leur refus de respecter les protocoles, puisque la présence de la COVID-19 chez des patients sans aucun symptôme est prouvée, et c'est pourquoi des mesures rigoureuses sont nécessaires, ainsi que des mesures et des tests pour confirmer ou non d'une façon ou d'une autre le diagnostic pour ne pas augmenter le nombre d'infections', a dit Marquez.

« La performance des États-Unis dans la pandémie a 'mis un grand nombre de personnes en danger', a-t-elle dit. 'Le message est clair : la vie doit l'emporter sur tout autre intérêt.' »

Le 10 juin, le ministre des Affaires étrangères du Guatemala a dit que les États-Unis avaient recommencé ses vols de déportation des personnes vers ce pays cette semaine, après une pause d'un mois en raison de la pandémie du coronavirus, selon teleSUR. Celui-ci poursuit :

« La porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Patricia Letona, a dit que les vols contiendraient des groupes d'environ 50 personnes y compris des enfants et que deux autres vols étaient prévus la semaine prochaine.

« Bien que des vols provenant des États-Unis avec des mineurs sans accompagnement se sont poursuivis, les déportations dans leur ensemble par voie aérienne vers le Guatemala ont été suspendues à la mi-mai.

« Ces vols ont été une source de tension entre les États-Unis et le Guatemala puisque des douzaines de personnes renvoyées dans ce pays d'Amérique latine se sont avérées positives au coronavirus. Au moins 186 personnes déportées ont été déclarées positives pour la COVID-19 après leur arrivée au pays en dépit des prétentions des États-Unis qu'elles étaient en bonne santé.

« Le gouvernement guatémaltèque a dit que les personnes déportées seraient examinées pour dépister le virus et que seuls ses citoyens détenus dans les centres de détention par le Service américain de l'immigration et de l'application des règles douanières (ICE) reviendraient.

« 'La décision [de reprendre les vols] est fondée sur de l'information technique sur la situation sanitaire', a déclaré Letona.

« Le ministère des Affaires étrangères a dit que près de 5 500 Guatémaltèques sont détenus par ICE. Plus de 2 500 de ces personnes ont un ordre final de déportation et le traitement des autres est en cours.

« L'administration du président américain Donald Trump a exercé une pression sur le Guatemala pour que celui-ci continue d'accueillir des migrants déportés en dépit des préoccupations grandissantes qu'ils peuvent rapporter le coronavirus avec eux et possiblement infecter des communautés éloignées.

« La nouvelle de la reprise de vols a suscité la résistance des groupes de défense des migrants au Guatemala.

« Le directeur du refuge de migrants Casa del Migrante, Mauro Verzeletti, qui est aussi prêtre, a dit que la décision de Washington était une 'erreur majeure' et ne contribuerait en rien aux conditions au Guatemala.

« 'Cela n'engendrera que plus de racisme contre les gens qui reviennent dans leur propre pays', a-t-il dit à Reuters. 'Nous sommes toujours fermés et nous ouvrirons à nouveau lorsque la courbe de la pandémie sera à la baisse.' »

TeleSUR informe que depuis le début de la pandémie au Guatemala à la mi-mars, le pays a accueilli 2 160 personnes déportées des États-Unis. En date du 12 juin, le Guatemala annonce un total de 8 561 cas (6 660 actifs ; 1 567 rétablis ; 334 décès) pour un taux de 478 cas par million et 19 décès par million.

En ce qui a trait à la situation en Haïti, Steve Forester, coordinateur des politiques d'immigration de l'Institut pour la justice et la démocratie en Haïti, rapporte qu'« au moins huit des 30 Haïtiens déportés le mardi 26 mai 2020 des États-Unis vers Haïti avaient été mis en quarantaine au centre du Service de l'immigration et de l'application des règles douanières (ICE) de Pine Prairie, en Louisiane, car ils avaient été testés positifs à la COVID-19 à la fin avril et/ou au début de mai. Il ne semble qu'aucun d'entre eux n'ait jamais été testé négatif deux fois, voire seule une fois, à l'aide d'un test de dépistage fiable de la COVID-19. [...]

« Peu après 12 h 30 le 26 mai, 30 personnes sont rentrées à Port-au-Prince à bord d'un vol Swiftflight 737 d'iAero Airways dont un homme qui, ces derniers jours et le soir du 25 mai, s'était plaint de difficultés respiratoires, de fièvre et des douleurs à la poitrine, aux jambes et aux cuisses. Il était l'un des huit à avoir été testé positif au coronavirus et a donc été mis en quarantaine dans les installations de l'ICE à Pine Prairie.

« Les huit déportés qui avaient été déclarés positifs à la COVID-19 ont été transférés le matin du 25 mai de Pine Prairie au centre de transit d'Alexandria (ASF) de l'ICE en Louisiane, où ils ont été contrôlés pour le coronavirus à l'aide d'un 'test rapide'. [...]

« Nous ne savons pas combien des 22 autres personnes sur le vol du 26 mai peuvent également avoir été testées positives à la COVID-19 ou n'ont pas été approuvées selon le protocole approprié de la santé publique.

« J'ai parlé récemment à un Haïtien expulsé le 7 avril. Il a décrit les conditions de surpopulation dans les centres de détention de l'ICE et dans une zone d'attente, avec des gens assis côte à côte, certains toussant et éternuant. [...]

« Nous ne savons pas combien des 22 autres personnes sur le vol du 26 mai peuvent également avoir été testées positives pour COVID-19 ou n'ont pas été approuvées par le protocole de santé publique approprié.

« Il a dit que tout le monde sur le vol qui les déportait était assis côte à côte deux par deux, sans espace entre eux et avec les sièges de l'allée libres. Un rapport du 25 mai de Vice News documente le mépris de l'ICE pour la distanciation sociale dans le transport des détenus.

« Peu avant le vol du 11 mai dans lequel l'ICE organisait des déportations vers Haïti, les conseillers scientifiques du gouvernement haïtien ont déconseillé de recevoir ceux qui étaient expulsés de l'étranger en raison du risque de propagation du coronavirus.

« La déportation de huit personnes testées positives à la COVID-19, qui n'ont pas été détenues selon le protocole approprié de la santé publique est un autre exemple de la raison pour laquelle personne ne devrait être expulsé pendant la pandémie. En s'engageant dans de telles pratiques, l'administration Trump manque de respect envers Haïti et la vie de son peuple. »

Jake Johnston, associé de recherche principal au Centre de recherche sur les politiques dans le domaine économique (CEPR) à Washington, a également parlé de cette question lors d'un forum organisé par la représentante au Congrès Frederica S. Wilson le 29 mai. Il a expliqué que « Haïti n'est pas le seul pays qui a reçu des vols de personnes déportées des États-Unis pendant la pandémie mondiale. Depuis le 13 mars, l'ICE a effectué pas moins de 135 vols de personnes déportées vers 13 pays d'Amérique latine et des Caraïbes. Les déportés ont par la suite été déclarés positifs au Guatemala, en Jamaïque, au Mexique, en Colombie et en Haïti. Au Guatemala, le gouvernement a identifié plus de 100 cas de COVID-19 parmi les personnes déportées.

« Les déportations continues de l'administration Trump représentent un risque de santé publique important pour la région et pèsent sur les systèmes de santé publique déjà surchargés. Le gouvernement haïtien, par exemple, est contraint d'utiliser des ressources limitées pour mettre en quarantaine les déportés récents, tout en étant incapable de mettre correctement en quarantaine ses propres travailleurs de première ligne. Bien qu'il s'agisse d'un problème régional, il ne fait aucun doute qu'Haïti est l'un des pays les moins bien préparés à faire face à une épidémie de la COVID-19. Au cours des dernières semaines, les cas confirmés ont monté en flèche en Haïti et, avec l'un des taux de test de dépistage les plus bas du monde, cela ne représente probablement que la pointe de l'iceberg. »

Johnson poursuit en disant qu'« environ 60 % des services de santé en Haïti sont fournis par des ONG et des acteurs privés ».

Au 5 juin, Haïti comptait 3 941 cas déclarés de COVID-19 (3 853 actifs ; 24 rétablis ; 64 décès) et 346 cas par million ; 6 décès par million. Le nombre total de nouveaux cas quotidiens a culminé le 6 juin avec 332 et était descendu à 134 au 11 juin, tandis que le nombre de cas actifs n'a pas encore atteint son maximum. Haïti traverse une crise politique depuis le coup d'État de 2004 contre le gouvernement démocratiquement élu de Jean-Bertrand Aristide mené par le Canada, la France et les États-Unis. La situation sanitaire et politique a été aggravée par le tremblement de terre de 2010, puis l'épidémie de choléra provoquée par les soldats de la paix des Nations unies. Les récentes élections sont le résultat de l'ingérence étrangère et ont produit des gouvernements corrompus sans aucune légitimité.

Le Canada a pleinement trempé dans ce scandale, non seulement en Haïti, car il exploite les demandeurs d'asile haïtiens qui travaillent courageusement comme travailleurs de la santé de première ligne, mais en refusant l'asile à tous ceux qui arrivent au Canada en provenance des États-Unis en raison de l'Entente sur les tiers pays sûrs.

(Sources : Xinhua, Haiti Liberté, teleSUR, Worldometers)

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