États-Unis: la résistance s'organise

Pour la justice et la fin des attaques racistes organisées par l'État et du recours à l'armée contre le peuple


Les jeunes mènent la marche à Oakland, en Californie, le 11 juin 2020, en exigeant que
la police se retire des écoles.

Partout aux États-Unis, les actions qui ont commencé le 26 mai pour demander justice pour la mort de George Floyd aux mains de la police se poursuivent et la résistance prend une allure organisée. À Minneapolis, où Floyd a été tué, et partout au pays, des appels se font entendre à la justice pour les nombreux cas de brutalité policière et de morts aux mains de la police, surtout d'Afro-Américains, et à des changements en profondeur du système de police qui feront en sorte que le peuple ne sera plus victimisé par une force militarisée qui ne représente pas ses intérêts. Le peuple continue d'affirmer ses convictions sur la nécessité de nouveaux arrangements et de s'investir lui-même du pouvoir par des manifestations et d'autres formes de lutte.

Depuis le 26 mai, des manifestations ont eu lieu dans au moins 750 villes américaines, dans les 50 États, et sur le plan international dans 60 pays, couvrant tous les continents à l'exception de l'Antarctique. Le peuple n'a pas été intimidé par les déploiements massifs de la Garde nationale et des forces de police ni par les actes de violence policière généralisée. Des activistes ont compilé des rapports et des images de ces événements[1]. Une de ces bases de données comptait 659 entrées au 13 juin. Un des incidents qu'on y trouve est la mort d'un homme non armé de 22 ans dans le nord de la Californie le 1er juin, alors qu'il était à genoux, les mains levées. Le policier l'a abattu à partir de la voiture de patrouille, affirmant avoir pris un marteau dans la poche de l'homme pour une arme à feu. D'autre part, le site Web Bellingcat.com a compilé une liste des violences policières contre les journalistes qui, au 2 juin, comptaient 148 cas. Il souligne que « pour vous donner une idée de l'énormité de ce chiffre, le US Press Freedom Tracker a recensé 150 violations de la liberté de la presse pour toute l'année 2019. Les cas durant les manifestations en cours ont presque dépassé les chiffres de 2019 en une semaine.[2] »

Ce qui marque avant tout les événements actuels est le caractère organisé de la résistance. Les Américains et leurs collectifs parlent en leur propre nom, sur la base de leurs propres revendications, malgré toute la pression exercée sur eux pour qu'ils appuient une faction ou l'autre de l'armée ou de l'élite dirigeante qui s'oppose à Trump et qui dit défendre la Constitution. Le mouvement n'a pas encore été détourné de ses objectifs pour soutenir le statu quo qui prive le peuple de pouvoir.

À Minneapolis, où les manifestations de masse ont mené au congédiement des quatre policiers et à des accusations criminelles contre eux pour la mort de George Floyd, l'attention du peuple est maintenant centrée sur les changements en profondeur qui s'imposent dans le système de police qui criminalise systématiquement les Afro-Américains et les autres minorités privés de leurs droits.


Manifestation à Minneapolis le 7 juin 2020

Réagissant aux revendications du peuple, la ville de Minneapolis a adopté à l'unanimité le 12 juin une résolution pour remplacer le service de police par un système de sécurité publique chapeauté par la communauté. « Le meurtre de George Floyd le 25 mai 2020 par des policiers de Minneapolis est une tragédie qui montre que peu importe les réformes, rien n'empêchera la violence meurtrière et les abus de certains membres du service de police contre les membres de notre communauté, en particulier contre les personnes noires et de couleur », disent cinq membres du conseil dans la résolution. La résolution affirme que le conseil initiera un processus d'un an pour dialoguer « avec tous les résidents de bonne volonté de Minneapolis » dans son « Groupe de travail sur la sécurité communautaire », afin de développer un « nouveau modèle transformateur » de sécurité publique dans la ville. Le conseil a également voté à l'unanimité la fin de l'ordre d'urgence locale qui avait été déclarée en raison des manifestations de masse commencées le 26 mai à la suite de la mort de George Floyd.

Les demandes adressées au conseil municipal sur l'imputabilité de la police et la dissolution de la police de Minneapolis ont débuté bien avant la mort de George Floyd, soulignent des militants de Minneapolis qui notent qu'une action opportune aurait pu empêcher la mort de George Floyd. Le 11 juin, l'organisation Twin Cities Coalition for Justice 4 Jamar (TCJ4J) - formée après la mort de Jamar Clark, 24 ans, aux mains de la police en 2015 - a demandé que les policiers responsables d'homicides similaires et d'autres crimes soient tenus responsables et que justice soit rendue aux amis et aux familles. Des activistes à travers les États-Unis lancent des appels à retirer le financement aux services de police et à les remplacer par des organismes sur lesquels le peuple peut exercer un contrôle. Ils appellent aussi à l'augmentation des services sociaux pour fournir aux citoyens une sécurité basée sur la satisfaction des besoins humains, et non sur l'utilisation de la violence étatique et la criminalisation des minorités, des pauvres et des travailleurs pauvres, des secteurs marginalisés et des plus vulnérables de la société.


Minneapolis, 11 juin 2020

La résistance populaire prend également la forme du refus de membres de la Garde nationale d'obéir à l'ordre de déploiement contre des manifestants, car ils reconnaissent la justice de ceux qui ont répondu à l'appel « Black Lives Matter » et ne souhaitent pas être mis en position d'exécuter la brutalité de l'État contre ceux qui exercent leur droit de manifester. Comme l'a dit un membre de la California National Air Guard, « ce qu'on nous dit, c'est de dissuader les gens de commettre toute activité criminelle et des choses de ce genre. Mais cela n'a pas nécessairement d'importance. L'important est ce qui va être communiqué sur le terrain quand vous voyez des gens en uniforme avec des armes, debout en formation. » Il a ajouté qu'il s'était engagé à faire du travail humanitaire, pas à agir comme une force d'invasion. « Beaucoup de soldats ne sont pas à l'aise avec ça, dit-il. Ils ont l'impression que ce n'est pas vraiment ce pour quoi ils se sont engagés. » Des organisations d'anciens combattants et des groupes de défense des droits des GI déclarent avoir répondu à un grand nombre d'appels de soldats leur demandant quelles étaient leurs options pour refuser des ordres. Le groupe de vétérans pour la paix About Face dit qu'il connaît une dizaine de militaires qui ont pris des mesures concrètes pour éviter le déploiement, tandis que de nombreux autres ont demandé de l'aide pour résister aux ordres qu'ils jugent illégaux.

Cette résistance se manifeste également dans la destruction de symboles qui glorifient l'esclavage ou des statues commémorant les marchands d'esclaves. Au milieu de cette situation, les peuples autochtones vivant sur le territoire américain reçoivent un grand appui dans leur demande de retrait des statues de Christophe Colomb pour que le génocide et la dépossession des peuples autochtones ne soient plus présentés comme de grandes réalisations historiques plutôt que des crimes contre l'humanité.

Le 3 juin, les avocats des familles de George Floyd et d'autres ont annoncé qu'ils appelaient l'ONU à ouvrir un dossier sur le non-respect des droits de l'homme aux États-Unis et à sanctionner les États-Unis pour leur mauvais traitement des Afro-Américains.

À cause d'une résistance large et soutenue, l'ancien policier de Minneapolis, Derek Chauvin, qui tenait le genou sur le cou de George Floyd, est actuellement détenu dans les locaux des services correctionnels du Minnesota à Oak Park. Sa caution a été portée à 1 million de dollars le 3 juin lorsque les accusations contre lui ont été élevées au rang de meurtre au deuxième degré. Les ex-policiers Thomas Lane et J. Alexander Kueng, qui ont aidé à maîtriser Floyd, et Tou Thao, qui se tenait tout près, sont accusés de complicité de meurtre au deuxième degré et de complicité d'homicide involontaire au deuxième degré. Leur caution a été fixée à 1 million de dollars sans conditions ou 750 000 $ avec conditions. Lane a été libéré le 10 juin sur une caution de 750 000 $.

Le Marxiste-Léniniste présente un supplément avec des appels de la résistance organisée et un reportage photo.

Notes

1. Pour voir le tableau, cliquer ici.

2. « Visualizing Police Violence Against Journalists At Protests Across The U.S.», Charlotte Godart, Bellingcat.com, 5 juin 2020

Supplément
La résistance organisée prend sa place aux États-Unis 

Déclarations d'organisations américaines
et reportage photo


Cet article est paru dans

Volume 50 Numéro 40 - 13 juin 2020

Lien de l'article:
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