Numéro 68 - 1er novembre 2020

Élections 2020 aux États-Unis

Les «deux Amériques» qui s'affrontent


Le 28 août 2020: manifestation de plus de 70 000 personnes à Washington, dans les conditions de la pandémie, à l'occasion du 57e anniversaire de la Grande Marche sur Washington de 1963 (Karey)

Dans ce numéro
Les «deux Amériques» qui s'affrontent

- Kathleen Chandler -

Un moment de vérité

- Pauline Easton -

De grandes revendications en faveur d'une nouvelle direction de l'économie et des affaires politiques

Derrière la mobilisation des milices racistes

Pour que le changement ne soit pas encore une fois la victime

- Hilary LeBlanc -

Les tentatives de présenter Biden comme le champion de
l'unification du pays


De la presse du Parti sur la signification de l'élection
présidentielle américaine de 2016

La fin du «business as usual»


À titre d'information
Au sujet des élections


SUPPLÉMENT

Pas de relâche du mouvement de protestation aux États-Unis




Élections 2020 aux États-Unis

Dans ce numéro

Ce numéro du LML et son supplément sont consacrés à l'élection du 3 novembre aux États-Unis. Le but est de fournir aux lecteurs des opinions, des commentaires et des analyses et de l'information pour les aider à discerner ce qui est pertinent et ce qui ne l'est pas dans cette élection, pour aller au coeur de ce qui se passe dans ce pays. Il est crucial de lever le voile sur la désinformation qui vise à maintenir le peuple sans pouvoir.

LML appelle ses lecteurs à ne pas se faire prendre par la désinformation qui devient encore plus intense à l'approche du jour de l'élection. Rejetons tout le discours qui laisse le peuple hors de l'équation ou le blâme pour les résultats. Rejetons aussi le discours qui dit que le vote compte ou que par cette élection le peuple donne un mandat ou encore que les forces armées devraient intervenir d'une façon ou d'une autre.

Les contradictions dans les rangs des cercles dirigeants des États-Unis s'accentuent avec la restructuration des arrangements en place pour s'emparer directement du pouvoir politique et ne laisser aucun arrangement actuel leur barrer la route. L'État du Canada est intégré à l'État des impérialistes américains et à leur système impérialiste d'États. Les développements et les conflits d'intérêts dans ce pays sont un prolongement de la guerre civile qui fait rage au sein de la classe dominante des États-Unis et les élections ne vont pas résoudre ces conflits. Conséquemment, les dangers qui grandissent menacent autant les peuples du Canada, du Québec et du monde que le peuple américain. Seule la lutte du peuple pour s'investir du pouvoir afin de créer une personnalité démocratique moderne qui place lui et son pouvoir décisionnel à l'avant-plan peut écarter les dangers et donner naissance au type de changement dont les peuples ont besoin.

La démocratie américaine est profondément en crise parce que ce n'est pas le pouvoir du peuple, par le peuple et pour le peuple. Les élections sont une fraude de A à Z parce que les citoyens américains ne sélectionnent pas les candidats, ne décident pas de leur ordre du jour et ne votent même pas pour eux, et parce qu'il n'existe pas de moyen de rendre les dirigeants redevables de leurs actions.

À l'occasion des élections américaines 2020, LML salue le peuple américain combattant. Nous saisissons l'occasion pour saluer sa résistance courageuse et sans relâche au racisme, à la brutalité et l'impunité policières et pour l'égalité et la justice.

C'est la détermination du peuple à exercer un contrôle sur toutes les décisions qui le concernent qui compte. C'est la lutte du Nouveau contre l'Ancien. Nous sommes convaincus que cette élection présidentielle, quels que soient les résultats et les dangers qui se pointent, ne fera pas dévier la vaste résistance du peuple de la réalisation de ses objectifs. Cette résistance repose sur la détermination à obtenir la justice, la redevabilité et la réparation, ces revendications qui répondent à l'appel de l'histoire et aux besoins de l'époque.

LML appelle ses lecteurs à participer activement à l'acte de découvrir la signification de cette élection présidentielle aux États-Unis. Nous vous encourageons à nous faire parvenir vos opinions et vos contributions. Écrivez à redaction@cpcml.ca.

(Photos : VOR, Lafayette Country Democrats)

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Les «deux Amériques» qui s'affrontent


Manifestation à Philadelphie le 27 octobre 2020 pour protester contre la mort de Walter Wallace Jr aux mains de la police dans cette ville quelques jours plus tôt

Les élections américaines de 2020, qui se tiendront le 3 novembre, sont l'élection du président, ainsi que l'élection de l'ensemble des 435 membres de la Chambre des représentants et d'un tiers des 100 sénateurs. Les élections se déroulent dans des conditions de crise sans précédent pour ce que l'on appelle « la plus grande démocratie du monde » :

- plus de 220 000 personnes sont mortes de la COVID-19 et plus de 8 millions en ont été infectées;
- quelques milliardaires ont augmenté leur fortune de 930 milliards de dollars au cours des six premiers mois de la pandémie de la COVID-19;
- près de 62 millions de personnes ont perdu leur emploi;
- quelque 98 000 entreprises ont fermé leurs portes de façon définitive;
- plus de 12 millions de personnes ont perdu leur assurance-maladie financée en partie par l'employeur;
- 22 millions de personnes ont déclaré ne pas avoir assez de nourriture;
- un sixième de tous les locataires seraient en retard dans le paiement de leur loyer.

Plus de 20 millions de personnes ont participé à un mouvement de protestation qui se poursuit sans relâche depuis mai 2020, lorsque George Floyd a été tué par la police, pour exiger des comptes et des réparations. Cette résistance large et persistante pour faire cesser la violence policière raciste et obtenir justice, égalité et responsabilité, a entraîné une profonde remise en question du système de justice actuel, ou plutôt d'injustice comme beaucoup l'appellent. Il est largement reconnu que les services de police, les tribunaux et les incarcérations de masse sont racistes dans leur essence, injustes et incapables de tenir les services de police responsables, que ce soit aux niveaux local, des États ou fédéral. Les demandes ne se limitent pas à obtenir le licenciement de quelques policiers, car un changement bien plus important est nécessaire dont le contrôle par le peuple est l'élément central.

Des réunions et des débats ont déjà lieu pour réimaginer la sûreté et la sécurité en incluant des enjeux comme la lutte contre la pauvreté, le droit au logement, à la santé et à l'emploi, en particulier dans les conditions de la COVID-19. Les efforts d'organisation se concentrent également sur les budgets et le droit des citoyens de décider comment les fonds publics sont dépensés, que ce soit pour le maintien de l'ordre, les forces armées, les prisons et les guerres ou pour la santé et le logement.

Les gens ne sont pas dupes des élections comme moyen de changement. Les obstacles à la participation des électeurs montrent que ce n'est pas le peuple qui élit celui qui est porté au pouvoir. Les obstacles à la participation comprennent l'obligation de s'inscrire pour voter, un grand nombre de personnes admissibles étant dans l'impossibilité de le faire bien qu'elles en aient le droit. Les Afro-Américains ont depuis longtemps été la cible de cette exclusion de fait. Chaque État a des exigences différentes en matière d'inscription, de mise en candidature, d'enregistrement des partis, etc. L'ensemble du processus est antidémocratique et inéquitable. Malgré cela, lorsque les conditions le permettent, des candidats antiguerre ou des candidats de tiers partis se présentent pour exprimer la volonté d'affirmation du peuple en tant que décideur.

La couverture médiatique se concentre sur les sondages et l'opinion sur qui va gagner l'élection. Pour qui le peuple va-t-il voter ? Nous pouvons prédire avec certitude que c'est la classe dominante qui gagnera l'élection. Nous pouvons également prédire que le peuple continuera de s'organiser et de se battre, qu'il trouvera les moyens de déjouer les pressions qui l'obligent à se taire sur les questions d'impunité policière, d'injustice, d'appauvrissement, d'inégalité, d'environnement, de guerre et de paix. Il continuera de parler en son propre nom et d'exprimer ses préoccupations et ses revendications.

Le mouvement de résistance héroïque se poursuit sans relâche malgré la violence des forces fédérales, des États et municipales déchaînées contre une population qui ne se laisse pas décourager par la criminalisation de sa résistance et des diverses formes de participation aux affaires politiques. L'affrontement des « deux Amériques » n'est pas entre la vision de Joe Biden et celle de Donald Trump, toutes deux étant essentiellement identiques. Il oppose la vision du peuple à la vision des cercles dirigeants. Voilà les « deux Amériques » d'aujourd'hui.

Celle des riches, de leur économie de guerre et de leur gouvernement de guerre avec sa violence et sa brutalité, et celle du peuple qui défend les droits de tous et toutes sur tous les fronts en s'opposant aux inégalités, à la violence policière et à l'impunité.

Dans le débat sur l'élection américaine, les questions soulevées par les médias monopolisés sont une diversion, destinées à diviser le peuple et à le rallier à une faction ou l'autre des cercles dirigeants. Or, ce qu'il faut, c'est une enquête et un débat sur ce à quoi ressemble une démocratie moderne qui investit le peuple de pouvoir. Comment réalise-t-on l'égalité des membres du corps politique ? Comment peut-on établir des rapports entre nous qui mettent l'individu et le collectif sur un pied d'égalité ? Ce sont là quelques-unes des questions auxquelles il faut répondre aujourd'hui pour que le mouvement populaire puisse atteindre son but.

(Photos : R. Melgarejo, We Are California, T. Phon Quang, Minnesota DOT, Karey)

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Un moment de vérité


Le Mur d'anciens combattants et derrière eux le Mur des mamans qui forment les lignes
de front dans les manifestations contre la violence et l'impunité policières  le 29 juillet 2020, à Portland en Oregon.

L'expérience du mouvement de résistance aux États-Unis et de la présidence de Donald Trump révèle d'abord et avant tout comment se déroule le processus décisionnel aux États-Unis et qui le contrôle. Cela a également été révélé par les présidences qui ont précédé celle-ci, quelle que soient la période de l'histoire, les circonstances, la personnalité du président, le style de son gouvernement ou du parti politique au pouvoir.

Toutefois, avec l'avènement des arrangements néolibéraux après l'effondrement de l'ancienne Union soviétique, une contre-révolution virulente occupe l'espace du changement. Le diktat des impérialistes voulant que tous ceux qui n'adhèrent pas à l'économie de marché, à la démocratie multipartite et à leur définition des droits de l'homme sont des éléments voyous et n'ont pas de légitimité s'est imposé. Cette offensive contre-révolutionnaire des impérialistes a exacerbé toutes les contradictions inhérentes à un système basé sur des rapports de production qui ne peuvent plus contenir les forces productives ni les contrôler.

La violence est devenue la méthode privilégiée pour contrôler et réprimer l'opposition. L'état d'exception et le gouvernement des pouvoirs d'urgence sont devenus permanents, tout cela au nom de la préservation des institutions démocratiques libérales, du contrôle de la pandémie du coronavirus, de la paix et d'autres justifications qui se révèlent tout aussi irrationnelles qu'insoutenables.

Bien que les États-Unis se déclarent la « nation indispensable » et proclament que la démocratie américaine est « la plus avancée du monde », les conditions matérielles ne se soumettent pas à la volonté des cercles dirigeants.

Aujourd'hui, le conflit entre l'autorité gouvernementale et le peuple sur la direction que prend le pays prend une ampleur sans précédent. Comme le montre la persistance de la résistance aux autorités américaines, la revendication d'égalité, de justice et de responsabilité ne peut être réduite au silence ni arrêtée. Il est clair que ces élections ne trancheront pas ces questions; nous voyons partout qu'elles vont être réglées par le peuple et sa lutte pour que les droits soient reconnus sur une base moderne.

Le rejet du point de vue juridique

À cet égard, les gens rejettent le point de vue juridique qu'on leur propose dans un effort pour sauver les institutions démocratiques anachroniques qui perpétuent l'existence d'une autorité imposée au peuple. Ce point de vue juridique est l'un des obstacles auxquels fait face actuellement le peuple des États-Unis et il le rejette.

Une des caractéristiques principales de cette façon de voir les choses est que les problèmes doivent être examinés sur la base de leur légalité ou de leur illégalité. Cela est fait pour entraîner tout le monde dans la recherche de solutions qui défendent les institutions démocratiques anachroniques existantes et dans un débat sur le pour et le contre de solutions proposées par d'autres. Cela amène également à se tourner vers les tribunaux et les organismes publics et, souvent, à compter sur eux pour régler les problèmes.

C'est une vision bornée, coincée dans les arrangements existants, qui a conduit à un conflit sans précédent entre les conditions et l'autorité, entre l'Ancien, qui s'efforce en vain et irrationnellement d'atteindre l'immortalité, et le Nouveau qui s'efforce de naître afin d'établir une nouvelle autorité qui correspond aux conditions actuelles.

Le point de vue juridique laisse le peuple et sa volonté de s'investir du pouvoir hors de l'équation. Le peuple n'est pas considéré comme la force du changement. Ses discussions et son effort d'organisation pour s'investir du pouvoir ne doivent pas avoir lieu. Les médias monopolisés jouent leur rôle de lancer et d'entretenir le débat pour ou contre Joe Biden ou Donald Trump, tout cela pour étouffer le grand mécontentement qui existe envers l'ensemble des arrangements en place aux États-Unis et pour réprimer la lutte du peuple pour des changements qui lui sont favorables et non en faveur de gouvernants qui sont manifestement inaptes à gouverner.

De la même manière, les tentatives d'utiliser l'opinion contre Trump pour plonger les gens dans ce débat de pour ou contre confinent la discussion aux arrangements existants au lieu de montrer que le système est dysfonctionnel et que de nouveaux arrangements qui investissent le peuple du pouvoir sont nécessaires, et d'engager la discussion sur ce que ces nouveaux arrangements pourraient être.

Une période de transition

Nous sommes dans une période de transition. Les anciens arrangements ne fonctionnent pas et ne nous servent pas, alors que les nouveaux arrangements n'existent pas encore. L'organisation doit viser à faciliter la naissance du Nouveau et à unir tous ceux que l'affirmation politique favorise afin qu'ils se joignent aux efforts pour définir des institutions modernes, des formes modernes de collectifs dans lesquelles le peuple est le décideur.

La fidélité doit être envers l'ensemble des relations humaines et à ce qu'elles révèlent, et non envers les anciens arrangements de la Constitution des États-Unis et à ce qui est appelé société civile. Alors que nous rejoignons nos frères et soeurs des États-Unis en luttant dans notre propre pays sur toutes les questions qui concernent les droits civils, notre point de vue  la manière dont nous envisageons les problèmes ne peut être un point de vue juridique. Nous ne nous limitons pas à la défense des droits civils. Contrairement aux gouvernants, nous disons que les intérêts conflictuels en jeu concernent les intérêts individuels et collectifs dans leur rapport avec l'intérêt général; et que les rapports entre tous les individus et tous les collectifs peuvent être harmonisés avec le bien commun. Les intérêts individuels et collectifs peuvent être harmonisés en donnant à la démocratie une définition moderne qui répond aux besoins actuels. Pour ce faire, il faut une définition moderne de la démocratie, dans son contenu et sa forme. L'effort pour réaliser cette définition donnera naissance à la personnalité démocratique moderne qu'exige le monde d'aujourd'hui.

L'harmonisation des intérêts est l'acte d'être de la personnalité démocratique. Une démocratie moderne est un moyen de garantir l'épanouissement d'une telle personnalité démocratique.

Les droits ne sont pas des privilèges que les gouvernants peuvent accorder ou retirer en fonction des avantages que cela leur procure. Les droits ne peuvent pas être sacrifiés sur l'autel des élections. L'égalité n'est pas un droit inaliénable divin et interprété comme une construction sociale sujette à la manipulation par ceux qui gouvernent. Elle est liée à l'appartenance au corps politique et appartient à tous en raison de leur être objectif. La qualité inhérente de la définition moderne de l'égalité est qu'elle confère à tous les membres du corps politique le droit de participer à la prise des décisions qui affectent leur vie, de faire le bilan de l'expérience de leur mise en oeuvre et de tracer une voie vers l'avant à partir de là. Ce n'est que si le principe fondamental de l'égalité est reconnu sur une base objective moderne que ceux qui violent les décisions du collectif peuvent être tenus responsables.

Dans l'élection actuelle aux États-Unis, il n'y a pas d'égalité. C'est la lutte persistante et grandissante des travailleurs de toutes origines et convictions qui garantit l'égalité conférée par l'appartenance. Une démocratie moderne consacrera une telle égalité qui interdit le racisme et la discrimination ou la violation de la personne humaine et de l'environnement social et naturel. Elle interdira le recours à la force dans le règlement des conflits au sein des nations et entre les nations, assurera le bien-être économique et protégera l'environnement social et naturel.

Les êtres humains expriment leurs aspirations les plus profondes par leurs revendications. Afin de réaliser leurs objectifs, les gens tirent la conclusion qui s'impose que les formes de lutte du passé, fondées sur la Constitution et sur ce qu'elle nous dit en termes de définitions et de moyens, doivent être changées. De nouvelles formes sont nécessaires pour que les travailleurs puissent saisir et se battre pour réaliser ces revendications et transformer leur situation, apporter la paix, la démocratie et la justice et protéger l'environnement naturel et social. La nouvelle situation exige une nouvelle approche et les solutions que les travailleurs veulent.

À cet égard, les efforts électoraux et la propagande habituels qui visent à dérouter les gens en les ralliant à l'un ou l'autre des deux principaux partis cartellisés qui se disputent le pouvoir, les républicains et les démocrates, n'arrivent pas à l'heure actuelle à les convaincre de compter sur les politiciens des riches et leur pouvoir pour résoudre les problèmes auxquels ils sont confrontés. Le gouvernement, à tous les niveaux, s'est montré raciste et totalement antidémocratique. Cela est évident dans les élections elles-mêmes, avec la pratique répandue de suppression des électeurs et un système raciste et discriminatoire qui visent de toute évidence à maintenir les rapports qui perpétuent le pouvoir des intérêts privés étroits.

L'élément crucial de cette prise de conscience est que les gens voient la nécessité de garder les choses entre leurs mains propres et s'organisent pour une démocratie qui leur appartient.

L'exemple des infirmières qui, dans tous les États-Unis, ont organisé des vigiles la semaine précédant l'élection pour pleurer les morts et lutter pour les vivants témoigne de la conscience qui a imprégné le mouvement. Les infirmières ciblent tous les élus pour leurs échecs à contrôler la COVID-19. De nombreuses actions sont également prévues après les élections.

La position est ferme : c'est le peuple et son combat pour les droits de tous et toutes qui obligent à rendre des comptes et permettent d'obtenir réparation. Une démocratie moderne doit être mise en place, qui invente des arrangements en faveur des travailleurs, quels que soient leur race, leur origine nationale, leur genre, leurs croyances ou leurs convictions.

La sécurité ne réside pas dans une meilleure utilisation des pouvoirs de police, elle réside dans la lutte pour les droits de tous et de toutes.

C'est un moment de vérité et un moment de rendre des comptes dans tout le pays; un moment où les séquelles de toutes les injustices passées ont rattrapé ceux qui forment la classe dirigeante et qui en ont profité.

Après ces élections, rien ne restera comme avant. La volonté du peuple doit prévaloir pour que le résultat lui soit favorable plutôt que favorable à l'impérialisme et toute la réaction.

(Photos : S. Malgarejo, N. Glaros, T. Phan-Quang)

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De grandes revendications en faveur d'une nouvelle direction de l'économie et des affaires politiques


Le 29 octobre 2020. Les infirmières à l'hôpital Good Samaritan à Los Angeles tiennent une vigile pour les travailleurs de la santé qui sont morts de la COVID-19.

Alors que le jour des élections approche, les gens sont bombardés de sondages et de rapports de toutes sortes quant à savoir qui pourrait gagner la course présidentielle. Les campagnes et les médias font partie d'un effort pour faire dérailler le mouvement de masse en cours et le détourner de son objectif de changements qui favorisent le peuple. Cependant, l'ampleur et la détermination de la résistance sont telles que les jeunes et les travailleurs gardent l'initiative et poursuivent leur lutte contre le racisme du gouvernement et ses échecs face à la COVID-19 et pour l'égalité, la justice et la responsabilité. C'est évident dans les diverses actions.

Les infirmières, par exemple, à l'initiative du Syndicat national des infirmières unies (NNU), se sont jointes aux organisateurs communautaires pour organiser du 26 octobre au 1er novembre des vigiles dans tout le pays. Elles ont pleuré les plus de 2 000 travailleurs de la santé morts de la COVID-19, tout en prenant la position de se battre pour les vivants. Les noms des 2 000 morts, dont 232 infirmières, ont été compilés par les infirmières elles-mêmes. Alors que les forces armées tiennent un registre de ses morts et de ses blessés, le gouvernement ne fera pas de même pour les travailleurs de la santé et tous les autres travailleurs de première ligne qui ont assumé leur responsabilité sociale en défiant la maladie et la mort.

Les travailleurs de la santé sont restés en première ligne malgré le manque d'équipement de protection individuelle (ÉPI) et malgré le fait que le gouvernement n'a cessé de les attaquer pour avoir défendu leurs droits. Dans leurs vigiles ils ont pris la position que tous les élus et les grands employeurs des hôpitaux doivent être tenus responsables de leurs échecs. Ils ont souligné que les Afro-Américains, les Latinos et les Philippins sont touchés de manière disproportionnée, avec un taux d'infection et de mortalité considérablement plus élevé. Ils exigent que l'économie soit adaptée pour répondre aux besoins de tous les travailleurs en matière de conditions de travail sécuritaires, y compris des ÉPI, du personnel, des tests et des désinfectants en nombre suffisant et un congé de maladie payé de 14 jours durant une mise en quarantaine.

Les infirmières demandent au gouvernement fédéral d'utiliser la Loi sur la production de défense pour accroître considérablement la production de tous les ÉPI dont les travailleurs et le public ont plus largement besoin. La loi est généralement utilisée à des fins de guerre. Les infirmières demandent plutôt que la loi soit utilisée pour assurer une production qui répond aux besoins du peuple. Elles demandent également à l'Administration de la sécurité et de la santé au travail (OSHA) d'établir une norme de sécurité nationale dans les conditions de la pandémie que tous les endroits de travail privés et publics doivent respecter. L'OSHA a jusqu'à présent déclaré que les réglementations déjà en place étaient suffisantes. En demandant des comptes au gouvernement fédéral et à tous les élus, les travailleurs de la santé manifestent également leur désir d'une nouvelle direction politique, où les agences gouvernementales et les fonctionnaires sont responsables du bien-être de la population, et non des monopoles et de leurs intérêts privés.

Un certain nombre de syndicats ont intenté le 8 octobre une poursuite devant les tribunaux contre le gouvernement fédéral qui va dans le même sens. Les syndicats concernés sont le Syndicat uni du transport (ATU), le Syndicat des travailleurs du transport (TWU), l'American Federation of Labour et le Congress of Industrial Organization (AFL-CIO), la Fédération des enseignants et enseignantes des États-Unis (AFT), le Syndicat international des employés des services (SEIU), les Communications Workers of America (CWA) et les Travailleurs unis de l'alimentation et du commerce (TUAC). Les syndicats représentent collectivement plus de 15 millions de travailleurs des industries de première ligne qui ont subi des milliers de décès et des centaines de milliers de cas de maladie causés par la COVID-19, dont beaucoup sont dus à un nombre insuffisant d'ÉPI.

La poursuite appelle le secrétaire à la Santé et aux Services sociaux Alex Azar et le secrétaire à la Sécurité intérieure Chad Wolf à agir immédiatement pour assurer la production et la distribution des ÉPI. Les deux agences n'ont pas répondu à une pétition d'août de ces mêmes organisations, ainsi que d'autres, qui exigeaient une action urgente. Les travailleurs des entrepôts, de la transformation de la viande et des conserveries ont également organisé des débrayages et d'autres actions pour exiger le respect de leur droit à la santé et à la sécurité.

Les travailleurs des postes et les enseignants se sont mobilisés pour obtenir des conditions sécuritaires. Cela a fait partie intégrante des manifestations Black Lives Matter et de la lutte contre la privatisation du service postal et des écoles publiques. Les enseignants se mobilisent pour défendre l'éducation en tant que droit et service public, et les travailleurs des postes pour que le service postal soit élargi en tant que service public. Cette volonté reflète une reconnaissance générale de ce qui est public et du concept de bien public, ce que la direction actuelle de l'économie et de la politique est en train d'éliminer. Avec les fermetures qu'entraînent la COVID-19 et l'apprentissage à distance, de nombreux enseignants, élèves et parents envisagent de réorganiser l'éducation, d'une manière qui favorise tout le monde afin que le contrôle et la prise de décision soient entre leurs mains.

Depuis le mois de mai, le mouvement qui persiste contre les morts aux mains de la police et la violence raciste policière et pour l'égalité, la justice et la reddition de comptes s'est poursuivi sans relâche. Plus de 20 millions de personnes de tous horizons y ont participé directement. Le contrôle des services de police et, plus généralement, une nouvelle direction pour ce qui constitue la sûreté et la sécurité dans les villes et au sein des collectivités, est au centre des revendications partout au pays.

Le peuple se bat pour s'investir du pouvoir de décider sur ces questions. Il réclame une économie axée sur l'élimination de la pauvreté et des politiques qui garantissent les droits au logement, aux soins de santé et à des moyens de subsistance reconnus comme importants pour la protection et la sécurité. Ils veulent le contrôle des budgets, qui fournissent invariablement beaucoup plus de fonds au maintien de l'ordre, à la violence et au racisme, qu'aux services sociaux et à la satisfaction des besoins du peuple. Et peut-être plus important encore, étant donné que les actions du peuple ont persisté et que la violence et le manque de responsabilité du gouvernement ont également persisté, des discussions sont en cours sur les arrangements politiques existants, sur le fait que la Constitution et la fraude électorale ne servent pas les intérêts du peuple et bloquent le développement d'une société qui le fait.

Diverses organisations, dont Veterans for Peace, appellent à une économie de paix, exigent la fin du financement massif du Pentagone et de la militarisation de la vie. Les anciens combattants ont fait partie intégrante du mouvement contre le racisme et la violence du gouvernement, notamment en s'organisant pour protéger les jeunes de la police. Le lien entre les guerres et l'agression à l'étranger des États-Unis, et la violence de l'État contre le peuple à l'intérieur du pays est établi depuis longtemps. Les gens demandent la fin de toutes les violences par l'État, au pays et à l'étranger, et pour des résolutions politiques non violentes aux problèmes sociaux. Cela inclut la demande d'un gouvernement antiguerre et d'une économie de paix.

(Photos : California Nurses Assn, American Postal Workers Union)

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Derrière la mobilisation des milices racistes

Les médias monopolisés font la promotion de milices racistes armées qui se disent prêtes à intervenir dans les bureaux de vote le 3 novembre et à se mobiliser après les élections si Donald Trump perd.

Une grande attention est accordée à l'appel de Donald Trump à constituer une « armée pour Trump » dont les recrues vont être déployées dans les bureaux de vote ce qui est considéré par beaucoup comme une intimidation des électeurs et des travailleurs d'élection. En outre, les médias répètent fréquemment le commentaire de Trump lors du premier débat avec son rival Joe Biden, quand il a demandé à des groupes comme les « Proud Boys », une bande de racistes, anti-musulmans et anti-peuple, de « se tenir prêts » à agir s'il perd dans ce qu'il a appelé une élection « truquée ». D'autres groupes comme les « Gardiens du serment », le KKK et divers groupements hitlériens seraient également prêts à agir.

Beaucoup de ces milices comptent dans leurs rangs des policiers, des shérifs et des militaires, actuels ou anciens, et ont généralement obtenu des armes de type militaire. Elles sont connues et souvent infiltrées par des agences comme le FBI, comme cela a été le cas longtemps pour le KKK et les forces néonazies. Elles ne sont pas « indépendantes » et séparées de l'État comme on le prétend, elles sont plutôt un bras de l'État raciste qui a pour tâche d'exécuter sa violence.

L'inquiétude parmi les cercles dirigeants au sujet de ces milices et de leur contrôle est telle que le Conseil des relations étrangères (CFR), un conseil de premier plan qui réunit diverses factions de l'élite dirigeante et s'intéresse à l'établissement de rapports entre les factions, qualifie la mobilisation de ces milices de « danger extraordinaire pour la démocratie américaine ». Le CFR affirme que ces groupes armés comprennent ceux qui appellent à la sédition et à « une nouvelle guerre civile américaine ».

Le CFR relie cette inquiétude au fait que « près de 13 500 manifestations et protestations ont eu lieu dans tout le pays depuis la mort de George Floyd ». Bien qu'il affirme que « l'écrasante majorité des manifestations [...] ont été pacifiques », elles ont « exacerbé les tensions et polarisé les positions politiques ».

Ce qui est omis, c'est que les tensions exacerbées sont celles qui opposent la grande majorité des gens de tous horizons et de toutes nationalités qui soutiennent la résistance au gouvernement et à ses services de police. Plus de 20 millions de personnes ont participé directement aux manifestations et ont tenu bon contre les violences policières. Les « positions polarisées » sont celles qui existent dans les cercles dirigeants, qui opposent les différentes factions représentant des intérêts privés étroits qui se disputent le pouvoir. Ces intérêts privés ne sont pas vraiment intéressés à résoudre leurs conflits, car toute réconciliation gênerait l'obtention du contrôle total dont ils ont besoin pour pouvoir disposer de toutes les ressources naturelles et humaines comme ils le souhaitent. Si l'élection sert traditionnellement à résoudre les conflits entre les factions, dans ce cas-ci il n'y a aucune résolution en vue. Au contraire, les tensions liées aux troubles civils et à l'utilisation des milices exacerbent les contradictions et bloquent toute enquête et délibération rationnelles sur ce que révèlent les événements en cours au sujet des problèmes dans lesquels la démocratie américaine est enlisée.

La menace d'une guerre civile préoccupe beaucoup les cercles dirigeants qui souhaitent préserver l'union et éviter un conflit ouvert et violent. Ils reconnaissent tous que de grands États comme la Californie, le Texas et New York pourraient facilement devenir indépendants. Des alliances régionales sont également en train de se dessiner, comme entre New York, le New Jersey et le Connecticut, qui pourraient aussi constituer des États indépendants. L'exacerbation des conflits entre les États tels qu'ils sont actuellement constitués et le Bureau du Président sur la COVID, l'immigration, le financement et l'utilisation des agences de police - indique à quel point les conflits d'intérêts s'aggravent.

Les forces armées et les nombreuses agences de police fédérales, des États et locales étant également divisées, les cercles dirigeants ne peuvent pas prévoir si ces forces se soumettront à Donald Trump en tant que commandant en chef des forces armées, ou si elles s'opposeront à lui s'il perd et refuse de quitter ses fonctions. Ou, comme l'a dit Joe Biden, elles s'entendraient sur la nécessité d'utiliser les forces armées pour démettre Trump de ses fonctions et réprimer la résistance au nom d'une « transition démocratique pacifique » et de la préservation de l'union.

Mais la plus grande préoccupation des cercles dirigeants est que la plus grande des factions, le peuple également appelée « le pouvoir de la rue » persiste à réclamer justice, l'égalité et la fin de la brutalité et de l'impunité policières et de la discrimination raciale. La lutte de sections toujours plus larges du peuple a l'empreinte d'une conscience et d'une organisation qui grandissent et s'élargissent. Tous les jours, nous assistons à l'expression du droit de parler en son propre nom, pour la garantie des droits de tous et de toutes et pour le contrôle du pouvoir de décision. Il est largement reconnu que les travailleurs de première ligne, voire tous les travailleurs, peuvent faire beaucoup mieux que ceux qui sont actuellement au pouvoir pour apporter des solutions politiques non violentes et rendre des comptes.

La mobilisation des milices racistes a davantage à voir avec la tentative de détourner la colère des gens contre l'État américain raciste vers ces groupes. Il s'agit d'attiser la colère afin de dresser les gens les uns contre les autres, alors l'État apparaît comme étant « au-dessus d'une population polarisée », qui intervient pour la protéger, alors qu'il est la source du racisme et de la violence qui ravagent la société américaine. Bien sûr, il s'agit aussi d'avoir ces groupes « prêts » à intervenir, prêts à perturber et à attaquer la résistance, comme cela s'est déjà produit, afin de justifier une intervention fédérale et militaire encore plus importante après les élections. Une éventuelle « urgence nationale » invoquant les actions de ces groupes et la résistance à ceux-ci pourrait également être proclamée entre le jour de l'élection et l'assermentation en janvier.

La mobilisation des milices n'est pas seulement révélatrice de Donald Trump l'individu, elle révèle surtout la nature de l'État américain et sa difficulté à conserver le pouvoir et à rester indivisible dans les conditions de divisions intenses de la classe dominante et face au rejet populaire de la direction actuelle du pays. C'est l'État qui mobilise les milices racistes et qui crée les conditions d'une violence et d'une répression encore bien plus grandes contre le peuple, en utilisant ces groupes dans la répression du peuple et pour justifier la répression du peuple.

(Voice of Revolution. Photos : S. Devol, D. Druauthamer, Radical Graffiti)

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Pour que le changement ne soit pas encore
une fois la victime

Les campagnes de Joe Biden et Donald Trump se sont concentrées sur le fait que l'élection présidentielle est décisive pour l'avenir des États-Unis. Les gens doivent voter « comme si leur vie en dépend » (Michelle Obama) et « les enjeux n'ont jamais été aussi importants » (vice-président Mike Pence). Cette façon catégorique de présenter les choses sert à éclipser le peuple et son large mouvement de résistance persistante comme facteur décisif pour façonner l'avenir. Elle cache les relations de pouvoir actuelles qui garantissent un gouvernement des riches, par les riches et pour les riches, qui ne peut pas être également un gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple.

C'est la réalité que la vie a révélée à plusieurs reprises. Et c'est précisément parce que le peuple la reconnaît de plus en plus - comme en témoignent les revendications de millions de personnes pour l'égalité, la fin du racisme du gouvernement et les droits humains pour tous - que cette élection est présentée comme étant si décisive. Il s'agit de détourner les mouvements d'affirmation du peuple, par lesquels les gens prennent les choses en main, s'expriment en leur propre nom et formulent leurs propres revendications.

Lors de la Convention nationale du Parti démocrate, Biden a lancé un appel spécifique aux jeunes, disant : « Pour tous les jeunes qui n'ont connu qu'une Amérique où il n'y a que les inégalités croissantes et les opportunités diminuées, ils méritent de vivre pleinement la promesse de l'Amérique. »

Barack Obama s'est concentré sur le mouvement de résistance : « Je vous demande également de croire en votre propre capacité à assumer votre propre responsabilité en tant que citoyens – pour vous assurer que les principes fondamentaux de notre démocratie perdurent. Parce que c'est ce qui est en jeu actuellement : notre démocratie. » Les républicains « espèrent donc rendre le vote aussi difficile que possible et vous convaincre que votre vote n'a pas d'importance. C'est comme ça qu'ils gagnent. C'est ainsi qu'ils continuent à prendre des décisions qui affectent votre vie et celle des personnes que vous aimez. [...] C'est ainsi qu'une démocratie dépérit, jusqu'à ce qu'elle ne soit plus du tout une démocratie. Nous ne pouvons pas laisser cela se produire. Ne les laissez pas vous enlever votre pouvoir. Ne les laissez pas vous enlever votre démocratie. Faites un plan dès maintenant sur la façon dont vous allez vous impliquer et votez. »

Par un tour de passe-passe, Obama passe de « notre » à « votre ». Il parle des « principes fondamentaux de notre démocratie », c'est-à-dire ceux de la Constitution des États-Unis qui maintiennent le pouvoir entre les mains des descendants des « hommes de propriété de race blanche » qui ont constitué les États-Unis d'Amérique en premier lieu, puis de « votre démocratie » et de « votre pouvoir ». Le pouvoir des jeunes résiderait donc dans le vote en faveur des mêmes forces de la classe dirigeante qui sont responsables des crises actuelles, qu'il s'agisse de l'échec à subvenir aux besoins des citoyens pendant la pandémie, des morts aux mains de la police raciste et de la violence policière, du chômage, des évictions et de la pauvreté, ou des catastrophes climatiques et des guerres d'agression sans fin.

La prétention est que le pouvoir n'est pas conféré par une action unie collective à la défense des droits de tous et toutes. Ce que l'on appelle alors la responsabilité des citoyens n'est pas de promouvoir et d'harmoniser les intérêts individuels, collectifs et sociaux pour faire avancer la société et moderniser la démocratie. Ce n'est pas de lutter pour une nouvelle direction pour le pays qui remette les affaires politiques et économiques entre les mains du peuple. Non, la responsabilité des jeunes serait de voter pour un système qui n'a jamais assuré l'égalité ou garanti les droits de tous, mais qui promet de le faire.

Il y a un désir grandissant parmi les jeunes et les travailleurs aujourd'hui d'être les décideurs sur toutes les questions politiques et économiques qui les touchent. Il y a une volonté de s'investir du pouvoir de gouverner et de décider. C'est la nouvelle direction qui peut mener à une démocratie où tous sont des membres égaux du corps politique et où il y a reddition de comptes et non l'impunité, le racisme et l'inégalité continuels inhérents aux « principes fondamentaux » de la démocratie à l'américaine.

La ruse derrière l'effort pour à la fois détourner et diviser le peuple sur qui élire ou s'il faut voter ou pas, pour concentrer toutes les énergies et les ressources sur le vote, est qu'ensuite c'est le peuple qui sera blâmé pour les résultats du vote. La question n'est pas de savoir qui est élu, mais plutôt comment faire progresser au mieux les luttes actuelles pour les droits et s'investir du pouvoir, et comment utiliser les élections pour accentuer ce combat pour le Nouveau : pour de nouveaux arrangements, une nouvelle direction, une démocratie qui sera l'accomplissement du peuple.

(Photo : F. Zuccarella)

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Les tentatives de présenter Biden comme le champion de l'unification du pays

Cette élection à la présidence des États-Unis – une des principales sources de pouvoir et de ressources pour les oligarques financiers – s'est transformée en lutte sans merci entre des coalitions changeantes pendant qu'on persiste à vouloir convaincre le peuple américain qu'il faut sauver une démocratie désuète qui ne sert plus personne. Si d'un côté Trump continue de ne jurer que par son ordre du jour basé sur « la loi et l'ordre », Joe Biden, lui, est présenté comme celui qui peut faire taire le mouvement de résistance qui fait rage partout au pays et unifier les factions qui se font la guerre au sein des cercles dirigeants.

L'administration Trump a répondu à la demande des oligarques financiers que le président puisse agir avec impunité, sans se soucier des lois et des arrangements constitutionnels existants. Ils veulent qu'on enlève toute limite à leur capacité de servir leurs propres intérêts privés étroits. Pour y arriver, Trump a accepté le rôle qu'on lui a confié de l'homme de l'extérieur, qui n'est pas membre de l'« establishment de Washington », avec ses accusations de corruption et de népotisme. « Nous avons mis fin au règne de la classe politique en faillite », a déclaré Trump. Cette image était nécessaire dans les conditions où les institutions actuelles, comme le Congrès, sont devenues dysfonctionnelles. Tous les efforts ont été déployés pour mettre fin aux prérogatives du Congrès et consolider celles du président.

C'est ce qui est aussi ressorti de la Convention nationale républicaine, où Trump et sa conjointe sont intervenus à partir de la Maison-Blanche pour bien faire sentir le pouvoir de la présidence. Il en va de même pour le secrétaire d'État Mike Pompeo, dont l'intervention a été faite à partir de Jérusalem où il y était en visite d'État. Le secrétaire d'État n'est pas censé intervenir dans une campagne électorale, encore moins brouiller la ligne de démarcation entre faire campagne et gouverner. De telles actions servent à montrer que les cercles dirigeants ne tentent même plus de dissimuler qu'ils aient complètement usurpé les prérogatives du gouvernement pour servir leurs intérêts privés. Il n'y a plus de ligne de démarcation, si ligne de démarcation il y a eu, ni de considération pour ce qui dans le passé constituait « le public » ou un gouvernement au service d'un « bien public ».

Biden et la convention démocrate ont dit très peu de choses sur le rôle du Congrès et, comme Trump, Biden a souligné le rôle décisif de la présidence. Il a aussi montré qu'il est « digne de confiance », puisque loyal au statu quo et en mesure, lui aussi, de se servir de la présidence pour accorder des ressources illimitées aux oligarques tout en écartant le peuple du pouvoir.

« Aucune des questions que je soulève ne va à l'encontre d'un libre marché ni du capitalisme », a déclaré Biden. Il a annoncé des plans pour verser plus d'un billion de dollars par le biais de subsides gouvernementaux aux oligarques de la production de guerre basée sur l'industrie de l'automobile et de l'acier. Il a promis d'énormes montants puisés à même les fonds publics aux financiers privés pour que ceux-ci puissent rembourser leurs dettes.

Parmi les sujets des discours de Biden, on trouve : « Nous devons unir l'Amérique. »; « Si nous ne réussissons pas à unir l'Amérique, nous sommes cuits, nous sommes morts ». « J'ai toujours soutenu que l'Amérique donne sa pleine mesure quand nous agissons comme une seule nation, une seule Amérique. »

Vraisemblablement, les personnes qui manifestent par millions et les nombreux millions de personnes qui les appuient ne perçoivent pas leur Amérique, leur lutte pour un changement qui est favorable au peuple, comme étant « cuite » ou « morte ». Cette préoccupation morbide de la défaite et de la mort provient plutôt des conflits et des divisions qui s'exacerbent dans les rangs des cercles dirigeants, y compris la possibilité d'une guerre civile violente. Biden veut passer pour le champion qui peut unir la bureaucratie militaire et mettre fin aux divisions entre les représentants fédéraux, des États et locaux, et entre les agences policières. Il pense ainsi se démarquer de Trump qui n'a pas réussi à cet égard, s'étant contenté de répéter tout simplement que tout peut être réglé en recourant à la répression et en invoquant la loi et l'ordre. Le hic, évidemment, est comment compte-t-il accomplir tous ces miracles. Il martèle qu'il va apporter des réformes au système pénal, garantir la sécurité du vote et la cybersécurité pendant l'élection. Il prétend qu'en remettant d'abord la démocratie sur ses pieds aux États-Unis, il pourra ensuite le faire dans le monde également.

L'image qu'il projette de quelqu'un qui « peut unir » laisse entendre qu'il va d'abord se consacrer à l'unité des autorités industrielles et civiles, comme celles des États et des villes. Le choix de Kamala Harris comme vice-présidente sert cet objectif dans une certaine mesure. On espère que ses nombreux liens parmi les procureurs généraux des États et les agences policières et sa connaissance du milieu aideront à unir pacifiquement les forces locales et des États sous un leadership fédéral.

En se présentant comme une force loyale et digne de confiance pour la défense du statu quo, Biden se garde bien de dire que ce qu'il propose ne va pas au-delà d'offrir des possibilités pour ce qui est des citoyens américains. Il répète que chacun mérite « au moins une chance » et qu'il s'assurera ce que soit bien « tout le monde » et pas seulement quelques-uns. « Le temps est venu d'imaginer et de bâtir une nouvelle économie américaine pour nos familles et pour nos communautés, une économie qui donne à chaque Américain la chance d'obtenir un rendement équitable pour son travail et la même chance que tout le monde de trouver sa place », dit Biden.

En effet, les gens veulent une nouvelle direction pour l'économie qui permette de placer les droits des citoyens au centre, tels que le droit à la santé, à l'éducation, à un moyen de subsistance et à un logement pour tous, en opposition à un simple « accès » ou « possibilité », ce qui ne veut rien dire sinon tout simplement répéter ce qui est au coeur du « rêve américain » en faillite. Biden lui-même affirme que « plus de 56 % des Américains pensent que leurs enfants n'atteindront jamais le niveau de vie qu'ils ont connu ». Les gens en arrivent eux-mêmes à cette conclusion sur la base de leur expérience réelle qui montre que les relations économiques et politiques actuelles ne peuvent garantir l'égalité et le droit de décider des questions comme les agissements de la police, la santé, la guerre et la paix, mais cette réalité-là n'intéresse pas du tout Biden.

Le « rêve américain » des dirigeants américains est en lambeaux. L'« Amérique » avec laquelle les Américains ont grandi a montré ses vraies couleurs comme jamais auparavant lors de l'agression « choc et effroi » contre l'Irak, avec les camps de torture du régime Bush qui ont montré l'essence de la démocratie, de la liberté et des droits de cette Amérique.

L'administration Obama ne leur a pas permis de surmonter l'humiliation puisqu'ils ont ensuite perdu leurs maisons lorsque la bulle immobilière a éclaté et que la réponse d'Obama a été de secourir les criminels de Wall Street. La doctrine d'Obama de la guerre des drones pour assassiner des civils innocents dans des pays lointains au nom de la capture de terroristes et du sauvetage de vies américaines n'a pas restauré la foi dans le rêve américain. Obama est par ailleurs devenu l'« expulseur en chef », établissant une tyrannie que Donald Trump a poussée encore plus loin. Les prétentions du camp de Biden qu'il atteindra les mêmes objectifs, mais de façon plus « juste » sont également vouées à l'échec. Il propose par exemple des logements sociaux et répète qu'il y aura des millions d'« emplois syndiqués et bien rémunérés ». C'est le même vieux discours usé à la corde.

Tant que les citoyens n'ont pas un rôle dans les prises de décision sur l'utilisation des fonds d'investissement massifs promis par le gouvernement fédéral et sur qui paiera pour ces dépenses, tant que le droit au logement et à l'emploi n'est pas garanti, tout cela n'est que du vent.

Biden tente de détourner l'attention de la réalité actuelle où un groupe de plus en plus minuscule d'oligarques puissants a usurpé le pouvoir et utilise les gouvernements entièrement à ses propres fins privées étroites, lesquelles sont directement contraires aux intérêts des peuples des États-Unis et du monde. Cette vieille notion de l'égalité des chances comme solution est bel et bien morte et n'est guère apte à étouffer les mouvements d'affirmation des peuples qui veulent se gouverner eux-mêmes et décider eux-mêmes de tout ce qui les concerne.

Comme le dit l'Américain averti, il faut être endormi pour croire au rêve américain.

(Photos : VOR, L. Bloom)

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De la presse du Parti sur la signification de l'élection
présidentielle américaine de 2016

La fin du «business as usual»


Des étudiants du secondaire de Berkeley, en Californie, débraient pour protester contre l'élection de Trump le 9 novembre 2016.

L'article qui suit a été publié dans LML du 12 novembre 2016 au lendemain de l'élection présidentielle qui a porté Donald Trump à la présidence des États-Unis. Il permet de voir ce que le Parti avait prédit.

Le Parti communiste du Canada (marxiste-léniniste) considère que l'élection de Donald Trump à la présidence des États-Unis le 8 novembre signifie que la nouvelle administration américaine représentera l'exercice du pouvoir des oligopoles par les pouvoirs policiers sans limites. Cette élection a plongé les peuples des États-Unis et du monde dans une situation encore plus dangereuse qu'avant.

Le 5 novembre, à quelques jours de l'élection, le PCC(M-L) écrivait :

« ...la campagne a révélé à quel point l'État et le système de gouvernance américains opèrent par la corruption et la coercition et à quel point le peuple est privé de pouvoir politique ». Il notait que l'effort pour priver le peuple du pouvoir est « l'autre aspect très important du pouvoir d'État entre les mains de l'oligarchie financière. L'élite impérialiste dominante parvient à priver le peuple du pouvoir en le privant d'une conception du monde, d'une façon de voir l'ensemble des problèmes posés pour qu'on puisse calmement les démêler et leur trouver des solutions. »

La même chose vaut pour ce qui est de l'analyse des résultats de l'élection. Tout est fait pour « priver le peuple d'une conception du monde, d'une façon de voir l'ensemble des problèmes posés pour qu'on puisse calmement les démêler et leur trouver des solutions ».

Quels sont les verdicts de cette élection selon l'élite impérialiste dominante ? Pour le camp Clinton, le verdict est que c'est l'apocalypse annoncée et que les valeurs et la vision d'Hillary Clinton sont la seule chose qui nous sépare de l'apocalypse, comme elle l'a dit durant la campagne. Le camp Trump, lui, prétend avoir créé un « mouvement » anti-establishment qui veut s'attaquer aux problèmes de l'économie et « arrêter de perdre notre temps ». Les deux camps s'entendent pour dire que maintenant que l'élection est terminée, tous doivent se rallier au devoir de la Constitution, celui d'assurer une transition en douce et d'unir l'Amérique.

Clinton ne concède rien pendant que Trump entreprend de « redonner à l'Amérique sa gloire perdue »

Mise à part la présidence, Hillary Clinton n'a rien concédé dans son discours de concession, pas même sa défaite. Bien qu'elle n'ait pas réussi à unir l'Amérique derrière sa vision et ses valeurs, elle a dit qu'elle continuera de défendre cette vision et ces valeurs et a appelé ses partisans à le faire aussi. C'est la vision qui utilise l'agression et la guerre comme tactique de négociation, qui blâme la Chine pour le déclin de l'économie américaine et qui fait de la Russie l'ennemi principal des États-Unis. Elle est captée dans cette expression utilisée durant l'élection, que les États-Unis sont « la nation indispensable », qui laisse entendre que toutes les autres ne le sont pas. Cette vision a également été exprimée par Hillary Clinton en 2008 lorsqu'elle a dit que les États-Unis pouvaient « effacer l'Iran de la carte » et en 2011 lorsqu'elle a accueilli la nouvelle de l'assassinat du leader libyen Mouammar Kadhafi en disant : « Nous sommes venus, nous avons vu, il est mort. »

Dans son discours de victoire, Donald Trump a pris le soin de mentionner que plusieurs généraux l'ont appuyé, comme l'ont fait aussi la National Rifle Association, Rudolph Giuliani, qui était maire de New York lors des attentats du 11 septembre 2011, et d'autres comme lui qui sont en faveur des pouvoirs policiers déchaînés que Trump considère nécessaires pour « redonner à l'Amérique sa gloire perdue ». Les principaux arguments de sa campagne étaient que le système américain est brisé ou truqué, que la position des États-Unis dans le monde a été affaiblie et que seulement un président avec une personnalité forte comme lui peut remettre l'Amérique dans le droit chemin. Sa stratégie est d'être « engagé » et que tout est dans l'art de conclure un accord. Le soir de la victoire, il a dit : « J'ai passé ma vie dans le monde des affaires et j'ai remarqué trop de projets et de gens au potentiel inexploité partout sur la planète » et « c'est ce que je m'engage à faire pour notre pays ».

Il faut blâmer l'État et non le peuple pour le racisme, le sexisme et la conception du monde anti-classe ouvrière

Après l'élection, la section des médias et des experts, commentateurs et célébrités qui se prétendent progressistes et civilisés a fait l'étalage de stéréotypes racistes, sexistes et antiouvriers, qu'elle attribue à Trump. Selon elle, les États-Unis sont divisés entre les gens instruits et les gens non instruits et c'est « la classe ouvrière blanche » qui est à blâmer pour la défaite de Clinton. Dans le stéréotype propagé, la classe ouvrière américaine est en gros constituée de tous ceux qui n'ont pas de diplôme collégial et la « classe ouvrière blanche » raciste, sexiste, suprémaciste, xénophobe, arriérée, non instruite et non civilisée. Les êtres humains sont des catégories de choses et non des personnes dans ce stéréotype.

Tout est fait pour cacher que c'est l'État américain qui est antiouvrier, sexiste, raciste et anti-immigrant, et profondément anticommuniste, et c'est la raison pour laquelle on blâme la classe ouvrière pour la défaite de Clinton.

Pendant ce temps, les individus et les organisations suprémacistes qui agissent spontanément ou à l'instigation de l'État, toutes sortes d'individus déséquilibrés ou psychopathes, ont le feu vert pour déverser leur haine personnelle et exorciser leurs cauchemars psychopathiques. C'est autorisé par le discours grossier et incendiaire de style télé-réalité qu'a tenu Donald Trump durant la campagne électorale et par la promotion incessante qu'en ont faite les médias américains, et sans moindre mesure par le camp Clinton. Le camp Clinton a dépensé deux fois plus d'argent que le camp Trump pour répandre cette image parmi l'électorat américain. Et ce sont les médias et l'entourage de Clinton qui usent maintenant de tous les épithètes pour présenter les travailleurs américains qui ont voté pour Trump comme des fanatiques et des ignorants qui foulent aux pieds les droits des citoyens et résidents des États-Unis.

Il ne convient pas à ceux qui consacrent toutes leurs énergies à combattre pour les droits de tous et toutes de se laisser prendre par cette propagande officielle qui traite les gens comme des catégories de choses et sur cette base divise le corps politique.

Soutenons la classe ouvrière et le peuple américains dans leurs efforts pour s'investir du pouvoir et défendre les droits de tous et toutes

Le PCC(M-L) dénonce les attaques lancées contre différentes sections de la population américaine depuis l'élection, tant les attaques spontanées que celles instiguées par un État rongé par la crise qui vient de se donner un feu vert pour gouverner par les pouvoirs policiers non entravés. Les pouvoirs policiers ne reconnaissent pas les membres du corps politique qui constituent la société civile et un gouvernement des lois. Ils ne reconnaissent pas les droits qui reviennent à tous les membres du corps politique, sans parler des droits qui appartiennent à tous et toutes du fait qu'ils sont des êtres humains. Les pouvoirs policiers ne reconnaissent que des catégories de « choses » à punir de différentes manières. Dans les différents scénarios qu'on peut voir depuis quelque temps, tous les Américains appartiennent à des catégories : « voyous », « contestataires », « faiseurs de trouble », « ennemis étrangers », « noirs », « Latinos », « Hispaniques », « musulmans », « terroristes », « détraqués » et autres catégories qui servent à les déshumaniser et à les laisser en proie aux abus.

Le PCC(M-L) profite de l'occasion pour exprimer sa sympathie avec celles et ceux qui, aux États-Unis, sont la cible d'attaques racistes, antiouvrières et anti-peuple et qui mènent une résistance courageuse en disant au monde entier que ce n'est pas leur démocratie, que Trump n'est pas leur président et que les attaques lancées ne sont « pas en mon nom ».

(12 novembre 2016. Photos : G. Berenabas, F.J. Sangosti, BLM, Nite Images)

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À titre d'information

Au sujet des élections

Les élections de 2020 aux États-Unis sont des élections présidentielles. Elles sont aussi des élections pour l'ensemble de la Chambre des représentants dont les 435 membres ont des mandats de deux ans, et pour le tiers du Sénat qui représente 100 membres ayant chacun un mandat de six ans. Le nombre de représentants à la Chambre est proportionnel au poids démographique de l'État, tandis que chaque État a deux sénateurs.

Le Bureau du président, le principale source de pouvoir pour les oligarques dirigeants, est le véritable centre d'intérêt. C'est là que résident les pouvoirs de police et le contrôle du cabinet et de ses nombreuses agences policières. Le président Trump cherche à obtenir un deuxième mandat de quatre ans et l'ancien vice-président Joe Biden cherche à le remplacer. Les candidats à la vice-présidence, Mike Pence et Kamala Harris, ne sont pas élus, mais plutôt choisis par les candidats présidentiels et entrent en fonction dès que le candidat de leur camp est élu président.

Le caractère inéquitable du processus électoral aux États-Unis est évident lorsqu'on considère qu'il y a 22 autres candidats, dont la plupart sont inconnus des électeurs. Aussi, ce n'est pas tout le monde qui peut voter pour l'un d'entre eux. Ces candidats ont été tenus à l'écart des débats par la Commission présidentielle, composée seulement de démocrates et de républicains et qui fait partie du système cartel de partis qui décourage et empêche la participation de tous les autres. Des débats avec la participation de tous les candidats n'existent tout simplement pas. En raison de diverses restrictions et exigences dans chaque État, ils ne peuvent participer au scrutin. Il leur faut des ressources humaines et financières immenses pour se retrouver sur le bulletin de vote. Certains États exigent des dizaines de milliers de signatures qui doivent être obtenues dans une période extrêmement restreinte. Par conséquent, au Vermont et au Colorado, il y a 21 candidats sur le bulletin de vote, au Arkansas et en Louisiane, il y en a 13 respectivement tandis que tous les autres États ont moins de treize candidats. Dans douze États, il y a seulement trois candidats sur le bulletin de vote.

Les candidats sont aussi désavantagés par le système majoritaire uninominal à un tour aux États-Unis, adopté dans presque tous les États (seulement le Maine et le Nebraska ont la représentation proportionnelle, répartissant les votes électoraux en fonction du total de votes pour chaque candidat dans les districts électoraux). Ce système va de pair avec le Collège électoral, qui est détenu par les démocrates et les républicains, où le nombre de votes par État est proportionnel au poids démographique de chaque État. Au Collège électoral, le candidat ayant le plus de votes peut tout de même perdre, comme c'est arrivé en 2016. Les votes du Collège électoral d'un État sont accordés au candidat qui obtient une majorité simple – non pas une majorité des électeurs éligibles, mais une majorité simple. Pour remporter l'élection, 270 votes des Collèges électoraux sont requis.

En 2020, seulement deux autres candidats ont réussi à être inscrits au scrutin dans suffisamment d'États pour remporter la victoire au niveau du Collège électoral. Il s'agit de Howie Hawkins du Parti vert et Jo Jorgensen des Libertaires. Hawkins s'est qualifié dans 47 États, dont 17 États par la méthode du « write in ». Les deux candidats ont eu accès au scrutin dans des États ayant des nombres élevés de votes électoraux, tels qu'en Californie, en Illinois, au Michigan, au Ohio, au Massachusetts, à New York, en Floride et au Texas. Hawkins a été écarté du scrutin en Pennsylvanie par les démocrates qui ont contesté ses signatures, tandis que Jorgenson, lui, y participe toujours. Le choix des candidats par « write-in » veut dire que leur nom n'est pas sur le bulletin de vote, mais qu'ils se sont qualifiés en tant que candidats non inscrits et que les électeurs peuvent ajouter leur nom par écrit, pourvu qu'il soit écrit correctement et au complet.

En outre, sept autres candidats se sont qualifiés pour le scrutin dans cinq États ou plus : Don Blankenship du Parti constitutionnel s'est qualifié dans 22 États, dont 4 par « write-in »; Brian T. Carroll du Parti de solidarité américaine dans 23 États, dont 15 par « write-in »; Roque De La Fuente du Parti Alliance dans 18 États, dont 3 par « write-in »; Alyson Kennedy du Parti socialiste des travailleurs, dans six États; Gloria La Riva, du Parti pour le socialisme et la libération dans 22 États, dont 7 par « write-in »; Brock Pierce, Indépendant, dans 20 États, dont 4 par « write-in »; Kanye West, Indépendant, dans 16 États, dont 4 par « write-in ».

La Chambre et le Sénat

Présentement, à la Chambre des représentants, ceux qu'on appelle les démocrates constituent la majorité, avec 232 sièges, alors que 218 sièges constituent la majorité des votes dans la Chambre de 435 membres. Ceux qu'on appelle républicains détiennent 197 sièges. On s'attend à ce que les démocrates conservent leur majorité et qu'ils puissent même l'accroître. Bien que les membres de la Chambre aient des mandats de deux ans, la grande majorité est réélue de façon routinière. Lors des élections à la Chambre des représentants de 2018, par exemple, il y n'y a eu que 89 nouveaux membres, plus que normalement. Le nombre de femmes – 101, le nombre le plus élevé de tous les temps – reflète les efforts exercés par celles-ci pour jouer un rôle plus important dans la vie politique du pays.

Au Sénat, il y a présentement 53 républicains et 47 démocrates (dont 2, y compris Bernie Sanders, sont inscrits en tant qu'indépendants bien qu'ils votent pour les démocrates). Il y a 9 nouveaux sénateurs et 26 femmes sénatrices, ce qui est aussi sans précédent, dont certaines peuvent être réélues. Les démocrates défendent 12 sièges, et les républicains, 23. Aucun autre parti n'est représenté au Congrès.

Un autre exemple du caractère inéquitable des élections est l'ampleur du microciblage auquel on se prête actuellement. Dans certains États tels New York et la Californie, les gens ne verront aucune campagne ni publicité puisque ces États sont perçus comme des États « gagnés d'avance » par l'un ou l'autre des candidats. Cependant, dans d'autres États, des centaines de milliards de dollars sont investis dans la publicité à la télévision, sur Facebook et sur d'autres réseaux. Les principaux États perçus comme des États dits « clés » dans la course à la présidence sont la Floride, la Géorgie, la Pennsylvanie, l'Ohio, le Michigan, le Wisconsin, le Minnesota et l'Arizona. Dans la course au Sénat, quelques-uns des 35 États dans la course électorale sont ciblés. Les démocrates tentent de l'emporter notamment dans 4 États présentement aux mains des républicains. Parmi eux, il y a l'Iowa, le Montana, l'Idaho, l'Arizona, la Caroline du Nord et du Sud et le Maine. Trois des sièges démocrates au Sénat qui sont ciblés sont au Minnesota, au Michigan et au New Hampshire. On peut constater qu'il ne s'agit pas d'élections nationales, où les électeurs sont tous sur un pied d'égalité, mais plutôt d'élections conflictuelles, par lesquelles des États et même des districts spécifiques sont ciblés.

Parmi les courses les plus importantes pour des sièges sénatoriaux qui appartiennent tous aux républicains, où des sommes « sans précédent » d'argent sont investies par les deux candidats, mentionnons :

- l'Iowa, où la républicaine Joni Ernst, élue en 2014 et perçue comme une alliée clé de Trump et qui est intervenue en sa faveur lors de la convention républicaine, se présente contre Theresa Greenfield, qui n'a jamais été élue au gouvernement. Avant l'élection d'Ernst, les deux sénateurs d'Iowa avaient été en poste pendant plus de 30 ans.

- la Caroline du Nord : le sénateur Thom Tillis, pour qui c'était le premier mandat, tout comme pour Ernst, se présente contre Cal Cunningham, un officier réserviste de l'armée qui n'a jamais été élu au gouvernement. Cette course pour le Sénat pourrait être la plus dispendieuse de l'histoire. Le vice-président Pence fait campagne pour Tillis et les deux participent régulièrement aux événements de Trump.

- la Caroline du Sud : Lindsey Graham, qui est sénateur depuis 2003, se présente contre l'Afro-américain Jaime Harrison. Celui-ci n'a jamais été élu au gouvernement, mais a été président du Parti démocrate en Caroline du Sud de 2013 à 2017. Graham détient un pouvoir non négligeable au sein du Sénat en tant que président du Comité judiciaire et membre des comités budgétaires, des crédits et des relations étrangères.

- le Maine : la sénatrice Susan Collins, élue au Sénat en 1997, se présente contre Sara Gideon, présentement présidente de la Chambre pour le Maine. C'est aussi parmi l'une des courses les plus dispendieuses. Jusqu'ici, plus de 150 millions de dollars ont été dépensés, avec Gideon bien en avance pour ce qui est des dépenses.

Il est important de souligner que le Sénat et la Chambre sont devenus en pratique des instances de consultation, où les principales lois stagnent et où le budget ne sert plus à régler les différends mais, au contraire, exacerbe les divisions et engendre des fermetures des opérations du gouvernement. Aussi, on ne peut plus parler des démocrates et des républicains comme de partis politiques, ayant une cohésion et une préoccupation pour le public et ses intérêts, mais plutôt comme faisant partie d'un cartel qui sert des intérêts privés étroits. C'est ce qui a sauté aux yeux lors du premier débat présidentiel et de la campagne négative assourdissante, où des milliards de dollars ont été dépensés pour discréditer l'opposition plutôt que de traiter sur une base politique des problèmes auxquels la société fait face. C'est une façon de faire que le public déteste tout à fait.

Le pouvoir, y compris les pouvoirs de police massifs et leur contrôle sur les questions de guerre et de paix, est concentré dans le Bureau du président, qui est le trophée pour lequel s'entredéchirent les factions rivales d'oligarques.

(Voice of Revolution)

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