Numéro 45 - 23 août 2023

Les incendies de forêt sont treize fois pires que
la moyenne des dix dernières années

Profonde sympathie et inquiétude pour les habitants et les pompiers des Territoires du Nord-Ouest et de l'intérieur de la
Colombie-Britannique


Feu de forêt dans les Territoires du Nord-Ouest

Nos hommages aux pompiers forestiers décédés

Des feux de forêt brûlent sur de larges étendues partout au Canada

– Peggy Askin –

Les conditions de travail des pompiers forestiers

– Peggy Morton –

Les pompiers de l'Alberta s'expriment

L'irresponsabilité des gouvernements face à la crise climatique et aux intérêts privés

Les incendies de forêt font toujours rage au Québec



Les incendies de forêt sont treize fois pires que la moyenne des
dix dernières années

Profonde sympathie et inquiétude pour les habitants et les pompiers des Territoires du Nord-Ouest et de l'intérieur de la Colombie-Britannique


Lutte contre les incendies de forêt près du lac Nadina en Colombie-Britannique

Le Parti communiste du Canada (marxiste-léniniste) exprime son soutien et sa profonde sympathie aux résidents de Yellowknife, Hay River et Fort Smith, à la Première Nation K'atl'odeeche, à la Première Nation Salt River et aux autres communautés des Territoires du Nord-Ouest, ainsi qu'aux résidents de Kelowna et des communautés de la Colombie-Britannique qui ont dû évacuer et ont perdu leur maison et leurs biens en raison des vastes incendies qu'on dit « hors de contrôle ». Le PCC(M-L) adresse ses plus sincères condoléances aux familles, aux amis, aux collègues et aux proches des quatre pompiers qui ont perdu la vie en luttant contre ces incendies ravageurs.

Des pompiers des Territoires du Nord-Ouest

Nous exprimons également notre inquiétude pour les communautés autochtones dont les chefs et les habitants ont fait savoir qu'elles étaient livrées à elles-mêmes. Les peuples autochtones vivent avec le feu depuis des temps immémoriaux et savent comment maîtriser les incendies, mais leur savoir est ignoré et, trop souvent, les pratiques culturelles qui protègent leurs communautés sont déclarées illégales et criminalisées. En plus d'être criminalisés pour des pratiques culturelles qui protégeaient leurs communautés, ils subissent les conséquences d'une exploitation économique socialement irresponsable de la terre et de la forêt, qui crée des conditions qui aggravent les problèmes lorsque les incendies se déclarent.

Nous rendons hommage aux pompiers qui sont venus de tout le pays et de nombreux pays étrangers pour apporter leur aide. Le système canadien d'information sur les feux de forêt indique que, jusqu'à présent, la destruction causée par ces incendies est 13 fois plus importante que la moyenne sur dix ans. Un responsable de la recherche sur les incendies de forêt au Service canadien des forêts a informé les médias que le Canada se trouve actuellement au « niveau 5 de préparation nationale », ce qui signifie que le pays a engagé toutes ses ressources nationales pour se mobiliser dans la lutte contre les incendies. Environ 5 000 pompiers d'Afrique du Sud, d'Australie, du Chili, du Costa Rica, d'Espagne, des États-Unis, de France, du Mexique, de Nouvelle-Zélande et du Portugal sont venus seconder les pompiers canadiens.

Les résidents de toutes ces régions montrent de quoi ils sont faits lorsqu'ils s'unissent pour s'offrir mutuellement toute l'aide possible. Mais cela n'excuse pas l'inaction des gouvernements face à la crise climatique qui exacerbe les effets destructeurs des pratiques imprudentes des monopoles forestiers et autres, aggravés par l'offensive antisociale et les coupes dans les services de lutte contre les incendies de forêt, créant des conditions que l'on dit ensuite « incontrôlables ».

Les êtres humains organisés dans un État moderne sont tout à fait capables d'humaniser l'environnement social et naturel. Ils peuvent se débarrasser des pollueurs et de ceux qui détournent les fonds publics vers des dépenses de guerre et des stratagèmes pour payer les riches et qui abandonnent les normes et les réglementations environnementales à des intérêts privés étroits. Ils peuvent mettre fin à la criminalisation de ceux qui s'opposent à la destruction de l'environnement, au pillage de nos ressources naturelles et au refus de protéger les populations touchées.

Les pompiers et leurs syndicats, les scientifiques et les chercheurs, ainsi que les communautés autochtones et d'autres communautés de la forêt proposent de nombreuses mesures immédiates pour mieux protéger les communautés et fournir aux pompiers et aux gardiens du feu autochtones ce dont ils ont besoin pour faire leur travail. Ce numéro de Forum ouvrier est consacré à leurs efforts.

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Nos hommages aux pompiers forestiers décédés

De gauche à droite : Devyn Gale, Adam Yeadon, Ryan Gould et Zachery Freeman Muise

Depuis le 13 juillet 2023, quatre travailleurs sont morts au Canada alors qu'ils combattaient des incendies de forêt.

Devyn Gale, de Revelstoke, en Colombie-Britannique, a été frappée par un arbre et tuée dans la lutte contre un incendie près de Revelstoke le 13 juillet. Âgée de 19 ans, Devyn était étudiante en soins infirmiers au campus Okanagan de l'Université de la Colombie-Britannique et en était à sa troisième saison de lutte contre les incendies. Elle était membre du Syndicat des fonctionnaires provinciaux de la Colombie-Britannique (BCGEU).

Adam Yeadon, 25 ans, de Fort Liard, dans les Territoires du Nord-Ouest, a été mortellement blessé le 15 juillet alors qu'il combattait des incendies près de Fort Liard. Adam était membre de la Première Nation Acho Dene Koe. La mort d'Adam est le premier décès d'un pompier depuis 1971 dans les Territoires du Nord-Ouest. Il était pompier forestier depuis plusieurs années. Il était membre de la section locale 13 du Syndicat des travailleurs du Nord, qui fait partie de l'Alliance de la fonction publique du Canada (AFPC).

Quelques jours plus tard, le 19 juillet, Ryan Gould, un pilote d'hélicoptère de 41 ans, est décédé après que son appareil s'était écrasé alors qu'il combattait un incendie près du lac Haig, à l'est de Manning, dans la région de la rivière de la Paix, en Alberta. Ryan était un pilote expérimenté qui luttait contre les incendies depuis une vingtaine d'années.

Zachery Freeman Muise, un pompier de 25 ans originaire de Waterford, en Ontario, a été tué alors qu'il luttait contre un incendie de forêt dans une zone reculée au nord de Fort St. John, le 28 juillet. Il est décédé lorsque le véhicule utilitaire tout terrain qu'il conduisait s'est renversé sur une pente abrupte sur une route de gravier.

Forum ouvrier offre ses sincères condoléances aux familles, collègues et amis de Devyn Gale, Adam Yeadon, Ryan Gould et Zachery Freeman Muise. Ces travailleurs montrent de quoi sont faits les travailleurs, les jeunes et les peuples autochtones ainsi que l'urgence de protéger ceux qui travaillent dans des conditions dangereuses en cette saison des feux sans précédent.

Les médias et les représentants du gouvernement reconnaissent les risques auxquels les travailleurs sont confrontés lorsqu'ils luttent contre les incendies de forêt et le fait qu'il s'agit d'une profession dangereuse, ainsi que le fait que les pompiers qui ont perdu la vie aimaient leur travail et savaient à quel point il était important. En même temps, les médias laissent entendre qu'ils connaissaient les risques qu'ils prenaient et que cela « fait partie du travail ». Ce n'est pas acceptable. Les conditions dans lesquelles les pompiers travaillent sont extrêmement dangereuses, c'est un fait, mais elles sont rendues encore plus dangereuses par le manque de pompiers expérimentés dû aux compressions dans les services publics.

Pour vraiment rendre hommage à ceux qui ont perdu la vie, il faut agir pour prévenir de tels décès. Les pompiers et les syndicats qui les représentent, les peuples autochtones qui ont une expérience millénaire avec les feux de forêt et les scientifiques qui s'expriment sur la réalité des incendies dans la forêt boréale au XXIe siècle comprennent tous les conditions et savent que le facteur humain, dans la forme d'une mobilisation de toutes les ressources dont dispose la société, doit être mis à contribution. Ils doivent avoir une voix décisive sur ce qu'il faut faire. Il faut leur assurer les conditions de travail et de vie requises pour les services qu'ils rendent.

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Des feux de forêt brûlent sur de larges étendues partout au Canada

– Peggy Askin –

Des feux de forêt continuent de brûler partout au Canada, tout particulièrement en Colombie-Britannique et dans les Territoires du Nord-Ouest en ce moment, mais les incendies au Québec continuent aussi de brûler et de causer des dommages. Les incendies à l'intérieur de la Colombie-Britannique et des Territoires du Nord-Ouest sont les plus récents d'une saison de feux de forêt sans précédent pour la Colombie-Britannique, l'Alberta, les Territoires du Nord-Ouest, l'Ontario, le Québec et la Nouvelle-Écosse, pendant que la fumée a recouvert d'importantes régions du Canada et des États-Unis, y compris des endroits aussi éloignés que l'Europe. Les dommages causés aux communautés, à la vie des gens, à tout ce qui leur appartient et à leurs moyens de subsistance, aux économies locales, aux forêts et à l'environnement continuent à un rythme effréné. Près de 200 000 personnes ont été évacuées de leurs maisons et de leurs communautés, plusieurs plus d'une fois, et des centaines de personnes ont tout perdu.

Le feu est un phénomène naturel dans l'écosystème de la forêt boréale, mais les feux du XXIe siècle sont différents. Alimentés par le réchauffement climatique et l'action des gouvernements au service d'intérêts privés étroits, ils brûlent plus intensément, se répandant plus rapidement et se produisent plus fréquemment, dévorant de vastes étendues de terre.

Le 20 août, le Centre interservices des feux de forêt du Canada, qui produit une base de données en temps réel des feux de forêt partout au pays, rapporte qu'il y a eu 5 832 feux jusqu'à présent en 2023, dont 1 150 sont toujours actifs. De ces feux, 657 seraient « hors de contrôle », dont 382 en Colombie-Britannique, 160 sont « stables » et 225 sont « sous contrôle ». Les incendies ont brûlé 15 millions d'hectares de forêt, (150 000 kilomètres carrés), une superficie deux fois plus grande que le Nouveau-Brunswick, et la saison des incendies va continuer jusqu'à l'automne. C'est deux fois plus que le record de 75 596 kilomètres carrés brûlés en 1989.

Ressources naturelles Canada affirmait en 2020 : « Le feu joue un rôle important dans les écosystèmes forestiers. Chaque année au Canada, 9000 incendies en moyenne brûlent plus de 2 millions d'hectares. C'est deux fois la superficie moyenne qui était brûlée au début des années 1970, et divers scénarios de modélisation prévoient que la superficie sera encore multipliée par deux ou plus d'ici la fin du siècle, en raison du réchauffement attendu du climat. Cette amplification des feux aura de lourdes conséquences sur les écosystèmes forestiers, l'exploitation des forêts, la protection des collectivités et le bilan de carbone. »

Trois ans plus tard, la superficie incendiée est supérieure à ce qui avait été prédit d'ici la fin du XXIe siècle. Pendant ce temps, les gouvernements refusent d'agir, les conclusions et les recommandations tirées des incendies précédents comme à Fort McMurray et Slave Lake sont ignorées ou reléguées aux oubliettes, et les conditions des pompiers se détériorent. La technologie existe qui permettrait de protéger les communautés, mais les grandes entreprises s'en servent pour protéger leurs installations pendant qu'on laisse les communautés vulnérables et sans protection.

Les pompiers se font entendre et exigent que des mesures soient prises face aux conditions dangereuses et intolérables liées à leur travail. Les précieuses connaissances des peuples autochtones, qui vivent dans la forêt depuis des temps immémoriaux et qui savent comment vivre avec le feu, ont été ignorées et même criminalisées. Les communautés sont ignorées par les gouvernements qui poursuivent leur offensive antisociale, coupant même dans les services d'incendie. Ils continuent de servir les monopoles et les oligopoles et poursuivent leurs actions désastreuses qui alimentent la violence des feux de forêt. Tous se font entendre. Avant tout, cette saison des feux de forêt fait valoir que les communautés, les pompiers, les peuples autochtones et les Métis doivent immédiatement exercer leur pouvoir décisionnel et que c'est le problème majeur à résoudre.

Lutte contre les incendies à lac Nadina en Colombie-Britannique

Les communautés autochtones et métisses

Les communautés autochtones sont frappées de façon disproportionnée pendant qu'on les empêche d'exercer leur pouvoir décisionnel dans leurs territoires ancestraux. Elles ne constituent que 5 % de la population du Canada, mais représentent 42 % de toutes les évacuations et 50 % des évacuations en raison de la fumée sont dans les communautés autochtones, et sont habituellement d'une plus longue durée que pour les communautés non autochtones.

Les Territoires du Nord-Ouest

Plus de 200 feux de forêt brûlent dans les Territoires du Nord-Ouest et 70 % des 45 000 résidents du territoire ont été forcés d'évacuer, y compris dans la capitale de Yellowknife, les villes de Hay River et Fort Smith, les communautés dénées de Ndilo et de Dettah, les Premières Nations de K'atl'odeeche et de Jean Marie River, situées dans la Première Nation Ka'a'gee Tu.

Les personnes évacuées par voie aérienne se rendent à Calgary, tandis que d'autres prennent la longue route vers le sud en auto pour se rendre à Edmonton ou dans d'autres villes de l'Alberta où des centres d'accueil ont été mis en place. Les centres les plus proches à Fort Murray et Grande Prairie sont déjà remplis et beaucoup entreprennent le voyage de 14 heures en auto jusqu'à Edmonton. D'autres campent dans les terrains de camping provinciaux.

D'immenses efforts ont été déployés pour sauver la ville de Yellowknife, un réseau de pare-feu ayant été mis en place dans l'ouest de la ville, ainsi que près de 20 kilomètres de boyaux et de tuyaux alimentant un système de gicleurs et de canons à eau. Une ligne d'extinction de 10 kilomètres non propagatrice d'incendie a été construite dans la forêt.

Mike Westwick, l'agent d'information pour les incendies des Territoires du Nord-Ouest, a dit à la conférence de presse quotidienne du 21 août que des facteurs météorologiques pourraient pousser le feu plus près de Fort Smith ainsi que Hay River et que les prochains jours s'annonçaient difficiles. Les mesures de suppression des incendies ont tenu le coup à Yellowknife, mais la situation demeure grave dû aux conditions de sécheresse et de vent.

Précédemment, des feux de forêt ont aussi frappé les communautés des Premières Nations de K'atl'odeeche et de Sambaa K'e ainsi que la communauté de Hay River qui ont maintenant été évacuées une deuxième fois. Plusieurs maisons et structures de la Première Nation de K'atl'odeeche ont été détruites et elle est à nouveau sous ordre d'évacuation.

La Colombie-Britannique


Incendie de forêt à Kookipi Creek près de Boston Bar, Colombie-Britannique

En Colombie-Britannique, près de 35 000 personnes ont reçu l'ordre d'évacuer et un autre 30 000 ont reçu des alertes d'évacuation dès le 19 août. Le gouvernement provincial a déclaré l'état d'urgence le 18 août et a restreint les voyages non essentiels à l'intérieur du sud de la Colombie-Britannique afin que plus d'hébergements temporaires soient disponibles pour les personnes évacuées et les pompiers et pour faciliter la circulation sur les routes. Les deux principales régions frappées sont la ville de Kelowna et la région de Shuswap. Cinq cents pompiers combattent les incendies, avec des quarts de travail pouvant aller jusqu'à 48 heures.

Le feu de forêt de McDougall Creek, à près de 10 kilomètres de Kelowna ouest, brûle toujours hors de contrôle. En outre, Shuswap est aux prises avec une crise sans précédent, la visibilité étant si faible que le feu n'a pu être combattu que sur le terrain seulement. Trois feux ont convergé vers le Complexe Adams. Des maisons et des structures ont été détruites dans les deux zones et le niveau de destruction n'est pas encore connu.

La Colombie-Britannique a eu à combattre d'importants feux de forêt tout l'été. Plus dans la saison, ces feux étaient principalement dans la zone du service d'incendie de Prince George, le plus important étant le feu de forêt de Donnie Creek. En ce moment, la Première Nation de lac Takla a publié un ordre d'évacuation à l'intention de plusieurs communautés. Certaines communautés comme celle de Tumbler Creek ont pu retourner chez elles mais d'autres sont toujours en état d'alerte.

L'incendie de Donnie Creek continue de brûler dans une zone entre le Fort Nelson et Fort St-John. C'est le feu de forêt le plus intense des 102 années du service des incendies de la Colombie-Britannique et, avant la fin de juillet, il avait brûlé plus de 15 000 kilomètres carrés de forêt boréale. Le risque d'incendie dans de vastes régions de la Colombie-Britannique est coté d'élevé à extrême.

Voir la Carte des risques d'incendie.

L'Alberta

L'Alberta a été gravement touchée, avec environ 1 000 incendies depuis le début de la saison des feux et 81 feux actifs au 21 août. L'état d'urgence en vigueur pour la province du 6 mai au 3 juin a maintenant été levé après que de fortes pluies aient amélioré la situation. Cette année, 1 754 656 hectares de forêt ont brûlé, soit le double du record précédent établi en 2019.

L'incendie du complexe de Wood Buffalo, qui chevauche la frontière avec les Territoires du Nord-Ouest, est combattu conjointement par des équipes de l'Alberta et des Territoires. À l'heure actuelle, l'incendie ne se trouve qu'à 4 kilomètres au sud de Fort Smith et s'étend sur 415 420 hectares. Un autre incendie important, au complexe Basset, est hors de contrôle au nord-ouest de l'établissement métis de Paddle Prairie.

Des milliers de personnes sont rentrées chez elles après avoir dû évacuer à cause d'incendies plus tôt dans la saison. Dans la plupart des communautés, les incendies ont été circonscrits grâce aux efforts considérables des pompiers qui ont réussi à éviter que la plupart des maisons soient endommagées.

L'expérience de la Première Nation Athabasca Chipewyan, sur les rives du lac Athabasca, reflète celle de nombreuses nations autochtones et communautés métisses, qui font preuve d'une grande solidarité sociale en veillant les unes sur les autres. Fort Chipewyan n'est accessible que par bateau ou par avion, une fois que la route de glace hivernale a fondu.

Lorsque la communauté de Fort Chip a dû être évacuée, des membres des nations cries et métisses de Fort McKay ont piloté des convois de bateaux pour les mettre en sécurité sur les 300 kilomètres qui séparent Fort Chip de Fort McKay, à contre-courant, avec une fumée si épaisse qu'ils ne pouvaient souvent pas voir. « Nous les tenons, nous les rattraperons et nous veillerons à ce qu'ils soient pris en charge », a déclaré Ron Quintal, président de la nation métisse de Fort McKay.

Au début de l'été, les 1 600 membres de la Première Nation crie de Sturgeon Lake, la colonie métisse d'East Prairie, qui compte 300 personnes, et la nation crie de Little Red River, qui compte 3 700 membres, ont été contraints d'évacuer, ce qui a entraîné la perte de maisons, d'un pont, d'une usine de traitement de l'eau et d'autres infrastructures essentielles. Frankie Payou, un pompier de forêt ayant 14 ans d'expérience, a été gravement blessé le 14 mai après qu'un arbre lui soit tombé dessus. Il a été admis aux soins intensifs dans le coma.

Dans la plupart des cas, les gens ont dû s'arranger entre eux pour trouver un logement temporaire. Le même esprit généreux pour offrir de l'aide aux personnes dans le besoin qui existait lors de l'incendie de Fort McMurray en 2016 a été observé dès le premier jour, comme c'est le cas partout au Canada.

Pendant ce temps, les gouvernements refusent d'assumer leurs responsabilités sociales en s'occupant des personnes touchées par les incendies de forêt et continuent de renvoyer la balle au niveau municipal et communautaire. Par exemple, la ville de High Level demande depuis des années aux gouvernements provinciaux successifs de créer un centre d'évacuation polyvalent, a déclaré la mairesse Crystal McAteer, mais rien n'a été approuvé. High Level a servi de centre d'évacuation à douze reprises depuis 2003, mais entre les hôtels et les lits d'appoint à l'aréna municipale, la ville ne peut accueillir qu'un maximum de 1 600 personnes.

L'Ontario

Il y a actuellement 67 feux de forêt actifs dans les régions du nord-est et du nord-ouest de l'Ontario. Parmi eux, 12 sont sous contrôle, 2 sont en cours d'exécution et 53 sont en cours d'observation. L'Ontario a connu une année moyenne en ce qui concerne les incendies de forêt, avec 660 à ce jour, ce qui est proche de la moyenne décennale de 620 incendies par an.

« À la fin du printemps et au début de l'été, l'Ontario a connu une escalade de l'activité des incendies après un début de saison plus lent que la moyenne, a déclaré Alison Bezubiak, des services d'aviation, de lutte contre les incendies de forêt et d'urgence de l'Ontario, à CBC News le 18 août. Mais à cette époque, les conditions étaient plus chaudes et plus sèches. Combinées à des éclairs importants et généralisés, ces conditions ont contribué à augmenter la charge d'incendie. »

Les risques d'incendie de forêt sont maintenant considérés comme étant de faibles à modérés dans toute la région du nord-est aujourd'hui, à l'exception d'une poche présentant un risque d'incendie élevé, située au nord de Kapuskasing. Les incendies les plus graves survenus plus tôt dans la saison se sont produits dans les régions autour de Cochrane, Chapleau et Sudbury, et à proximité des communautés des Premières Nations d'Attawapiskat, du lac Seul, de Cat Lake et de Poplar Hill.

Plus tôt cet été, près de 500 habitants de Fort Albany ont été évacués par avion, tandis que d'autres ont été secourus par les habitants de Kashechewan, venus en bateau pour les mettre en sécurité. La Première Nation Apitipi Anicinapek, près du lac Abitibi, et Attawapiskat, à l'ouest de Moose Factory, ont également été touchées.

Nouvelle-Écosse

La Nouvelle-Écosse a été durement touchée au début de la saison des incendies : 20 000 personnes ont été évacuées et plus de 200 maisons ont été détruites. Un incendie près de la ville de Shelburne est devenu le plus grand feu de forêt de l'histoire de la Nouvelle-Écosse. Un autre incendie, plus petit, près de Halifax, a entraîné l'évacuation d'environ 16 000 personnes.

En juillet, la province signalait que tous les incendies de Barrington Lake, dans le comté de Shelburne, et de Tantallon et Hammonds Plains, dans la municipalité régionale de Halifax, ont été éteints. Cependant, des précipitations allant jusqu'à 100 millimètres ont provoqué de graves inondations dans toute la Nouvelle-Écosse, qui a déclaré l'état d'urgence à l'échelle de la province du 22 au 26 juillet.

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Les conditions de travail des pompiers forestiers

– Peggy Morton –

Une équipe de pompiers forestiers au Québec prépare le travail du lendemain

Les pompiers forestiers se sont avérés être une ressource inestimable, allant au-delà de ce qui est exigé d'eux pour contenir les feux de forêt qui brûlent partout au Canada. Tout comme pour les travailleurs dans le domaine de la santé qui, après avoir été encensés en tant qu'« anges gardiens », ont été traités comme des choses jetables, les gouvernements sont indifférents aux conditions des pompiers et à leur inestimable expérience et leur savoir-faire dans la lutte contre les feux de forêt au XXIe siècle.

Les pompiers forestiers et leurs syndicats, les peuples autochtones et les autres communautés les plus frappées par les feux de forêt, ainsi que les chercheurs et les scientifiques se font tous entendre sur ce qu'il faut faire. Ils mettent de l'avant plusieurs recommandations et solutions et demandent que les services de feux de forêt soient restaurés après avoir été charcutés et détruits par l'offensive antisociale menée par les gouvernements partout au pays et ils exigent une démarche digne du XXIe siècle pour contrôler les feux de forêt.

Les conditions de travail, qui ont toujours été difficiles, sont maintenant insoutenables. Une des premières mesures requises est de résoudre le problème de recrutement et de rétention en prenant en compte l'énorme valeur créée par les travailleurs, les dangers qu'ils doivent affronter et le travail difficile qu'ils font.

La saison a débuté dans un contexte de pénurie aigüe de pompiers forestiers. Selon le balado Hotshot Wakeup, plus de 40 % des pompiers forestiers au Canada ont quitté le secteur en raison des conditions de travail insoutenables. Par conséquent, le Canada doit compter sur des milliers de pompiers venant de partout dans le monde. Malgré l'aide appréciée des plus de 5 000 pompiers provenant de divers pays cette année, il y a toujours une importante pénurie. La vie de ces pompiers est à risque en raison du manque de ressources humaines et d'autres ressources au Canada.



Des pompiers d'Afrique du Sud, du Costa Rica et du Chili (de haut en bas) arrivent au Canada pour combattre les incendies de forêt.

Le travail des services de feux de forêt est en grande partie saisonnier ou temporaire. Les salaires sont bas, les taux de base pour les équipes de pompiers étant entre 21 et 24 dollars d'heure partout au pays. Pour gagner assez d'argent pour survivre pendant la saison morte, il faut faire beaucoup de temps supplémentaire et les revenus varient énormément d'une année à l'autre, selon le niveau d'activité des feux. Il n'y a pas de formation professionnelle. En Alberta, les pompiers ont dénoncé le gouvernement pour avoir publié des offres d'emploi de travail saisonnier comme pompier moins d'un mois avant le début de la saison. Par conséquence, le roulement du personnel a été de 25 % à 50 %, rapporte Mike Dempsey du Syndicat des employés provinciaux de l'Alberta (AUPE).

Contrairement à la situation des pompiers dans les zones urbaines, il n'y a pas de possibilité de retraite précoce ni la reconnaissance des impacts de l'exposition soutenue à la fumée intense. Même dans les zones urbaines, le service d'incendie est de plus en plus réduit à un service volontaire. Un grand nombre d'emplois dépendent de la sous-traitance avec des entreprises privées, et même les personnes qui travaillent dans le secteur public et qui ont des régimes de retraite ne peuvent survivre à la retraite en raison du travail saisonnier et des salaires de misère. Les heures supplémentaires ne sont pas comptabilisées en tant qu'heures donnant droit à une pension.

La situation est à peu près la même aux États-Unis où en juin le directeur adjoint du Service forestier a dit au Congrès que si une solution salariale n'était pas adoptée, le service forestier pourrait perdre de 30 à 50 % de sa main-d'oeuvre.

Le Syndicat de la fonction publique de la Colombie-Britannique (BCGEU) revendique des équipes de pompiers à temps plein et à l'année longue. « Afin de pouvoir élargir et augmenter notre capacité de combattre les feux de forêt, nous avons besoin d'un service dévoué avec un recrutement et une rétention qui permettront à une autorité dévouée de combattre les feux de forêt et de vivre et de travailler à l'année longue dans ces communautés », dit Paul Finch, vice-président du BCGEU en 2022, dans le magazine d'information Pique. La réponse du gouvernement de la Colombie-Britannique a été d'embaucher une équipe permanente de 100 personnes, une mesure nettement insuffisante.

Des équipes à temps plein, rémunérées comme il se doit, pourraient recruter et retenir les travailleurs, les former comme il faut pour qu'ils soient prêts à intervenir dès le début de la saison, qui commence de plus en plus tôt selon les travailleurs et leurs syndicats. Présentement, la formation de nouvelles équipes est minimale. Elle peut être de 40 heures en Ontario et de 8 jours de 10 à 12 heures en Colombie-Britannique. Le fait de perdre des équipes ayant de l'expérience augmente les risques pour les pompiers dans un contexte où les incendies sont plus intenses et difficiles à contrôler.

Le Syndicat des employés provinciaux de l'Alberta (AUPE), qui représente les pompiers forestiers, revendiquent de mettre fin à la sous-traitance dans le privé et que les sommes perdues en raison des compressions faites par le gouvernement du Parti conservateur uni (PCU) soient restituées. L'AUPE affirme qu'elle n'a pas arrêté d'exiger du gouvernement qu'il embauche les pompiers forestiers nécessaires et que ceux-ci soient affectés en tout temps sur le terrain. Le gouvernement a plutôt réduit le financement de ce travail essentiel et confié certains services en sous-traitance à des entreprises privées. En mai, la Commission de la fonction publique de l'Alberta a lancé un appel désespéré à tous les employés du gouvernement provincial ayant de l'expérience à combattre les feux de forêt de se porter volontaires, ce qui confirmait, selon l'AUPE, que le gouvernement était en effet désespéré.

Trina Moyles, qui a travaillé dans une tour d'observation de feux de forêt dans le nord-ouest de l'Alberta, a expliqué dans le balado du Narwhal « Let's talk about wildfires » (« Discutons des feux de forêt ») pourquoi la question d'avoir des équipes permanentes à l'année longue est importante. Des brûlages contrôlés dans des conditions idéales alors qu'il y a encore de la neige sur le sol, et que le vent et la température sont faibles, sont d'excellentes mesures permettant aux pompiers de gagner en connaissances et en expérience et de contrôler l'ampleur et la propagation des feux de forêt[1].

En outre, les pompiers soulignent que parce que l'intensité des incendies a changé, et parce que les nuits sont plus douces, les incendies ne s'estompent pas la nuit comme ils le faisaient par le passé. Par conséquent, les équipes doivent travailler toute la nuit et continuer de travailler jusqu'au lendemain. Il est donc nécessaire d'avoir deux ou plus de quarts de travail plutôt que l'approche actuelle qui est de confier à une équipe la tâche de combattre à elle seule un incendie.

Les gardiens du feu dirigés par des autochtones

De nombreux pompiers forestiers sont membres de nations autochtones. Amy Cardinal Christianson, chercheuse métisse en incendie au Service canadien des forêts de Ressources naturelles Canada, indique que la plupart des pompiers autochtones sont saisonniers, même si nombre d'entre eux travaillent dans ce domaine depuis 30 ou 40 ans. Les peuples autochtones réclament depuis longtemps un programme de gardiens du feu dirigé par les autochtones, qui inclurait des pratiques culturelles, explique Amy Cardinal[2].

Les peuples autochtones de l'île de la Tortue vivent avec le feu depuis des temps immémoriaux et ont développé des pratiques culturelles telles que les brûlages contrôlés pour maintenir l'équilibre des écosystèmes. Les brûlages étaient effectués de manière cyclique, en fonction des conditions, et reposaient sur les connaissances approfondies des gardiens du feu. Les gouvernements qui ont suivi ont rendu ces pratiques illégales et, aujourd'hui encore, elles ne peuvent être mises en oeuvre sans permis, qui sont difficiles à obtenir. Par exemple, la conservation des prairies ouvertes grâce à des brûlages contrôlés d'herbes sèches au printemps rend le sol noir, réchauffe le sol et produit de l'herbe nouvelle plus tôt, réduisant ainsi la quantité d'herbe sèche où le feu peut facilement s'allumer. Les gardiens du feu expliquent que cette pratique a créé des conditions favorables aux plantes médicinales et alimentaires, au retour d'animaux tels que les élans, les bisons et les mouflons, ainsi qu'à la création de coupe-feu. Ils expliquent que lorsque le sous-bois et les jeunes arbres sont brûlés, les arbres restants deviennent plus grands et plus résistants aux incendies de surface, tandis que la canopée est plus étalée, ce qui profite à la faune et à la flore, mais réduit également la propagation du feu dans la canopée. Ils soulignent également que le reboisement effectué par les monopoles en plantant une seule espèce après une coupe à blanc ne rétablit pas l'équilibre de l'écosystème dont les forêts ont besoin. Il s'agit d'une démarche purement intéressée visant à faciliter la demande pour l'exportation de grumes.

Le territoire des Tsilhqot'in, situé à l'intérieur de la province, a connu en 2017 certains des pires incendies de l'histoire de la province. Le chef Joe Alphonse du gouvernement national des Tsilhqot'in a qualifié l'incapacité des gouvernements fédéral et provincial à reconnaître les connaissances autochtones de la plus grande menace pour la Première Nation que les feux de forêt eux-mêmes.

Joe Alphonse a expliqué que les connaissances locales des membres de la Première Nation Tsilhqot'in et leur attachement à leurs terres leur ont donné un avantage lorsqu'ils sont restés sur place pour les protéger en 2017. « Nous avons réussi à tout sauver, nous avons arrêté le feu juste à notre porte et nous l'avons fait sans que personne ne perde la vie ou ne soit blessé. »

Joe Alphonse a déclaré qu'après les incendies de 2017 qui ont touché les terres des Tsilhqot'in, la Première Nation est devenue la première communauté à signer un accord formel de réponse aux incendies de forêt avec les gouvernements fédéral et de la Colombie-Britannique, à la suite duquel 400 personnes de la communauté ont été formées à la lutte contre les incendies. Ne pas prêter attention à la nature changeante des incendies du XXIe siècle n'est pas une option, en raison des conséquences énormes pour la vie humaine et l'écosystème dans son ensemble, a-t-il souligné.

La nécessité d'adopter des mesures « anti-feux » pour protéger les villes et les communautés des Premières Nations et des Métis est évidente, surtout depuis l'incendie de Slave Lake en 2011 et celui de Fort McMurray en 2016, où des milliers de personnes ont perdu leur maison et tout ce qu'elles possédaient. Il a également montré que les gouvernements refusaient de prendre au sérieux les mesures nécessaires pour protéger les communautés, en particulier celles qui n'ont qu'une seule ou même aucune route d'accès[3].

Les mesures visant à répondre aux incendies de forêt du XXIe siècle font partie du travail pour surmonter les effets destructeurs des changements climatiques et les pratiques imprudentes des monopoles et oligopoles et des gouvernements à leur service qui exercent aujourd'hui le pouvoir de décision. Les peuples autochtones et les communautés locales ne perdent pas seulement leurs maisons, elles perdent aussi leurs territoires traditionnels, qui jouent tous un rôle décisif dans la gestion des incendies.

De nombreuses pratiques industrielles qui ont un impact négatif sur la gravité et la propagation des incendies doivent également être éliminées. Outre la plantation de monocultures, ces pratiques comprennent la pulvérisation d'herbicides pour tuer les espèces de moindre valeur commerciale mais moins susceptibles de brûler, ainsi que la plantation de peuplements d'arbres qui ont tous le même âge[4].

Toutes les personnes engagées dans la prévention, la lutte contre les incendies, la recherche et l'éducation constituent une ressource extrêmement précieuse. Elles sont dévouées et savent ce qu'il faut faire maintenant pour atténuer l'impact des incendies du XXIe siècle. Ceux qui ont montré par leur travail qu'on peut leur faire confiance pour protéger nos communautés et prendre soin de notre mère la Terre doivent avoir un pouvoir de décision. Ils savent que les demandes qu'ils adressent à la société sont justes. Cela inclut ce dont ils ont besoin pour leur propre santé, leur sécurité et leur bien-être, y compris la fin de la précarité et des salaires et conditions de travail adéquats.

Notes

1. Trina Moyles est l'auteur de Lookout : Love, Solitude, and Searching for Wildfire in the Boreal Forest. (Heather Van Haren)

2. Voir « Canada needs Indigenous-led fire stewardship, new research finds, UBC News and Centering Indigenous Voices : The Role of Fire in the Boreal Forest of North America »

3. Voir aussi « The Fires Awakened Us – Tsilhqot'in Report – 2017 Wildfires »

4. Voir « Pas de retour en arrière- un changement de paradigme en gestion forestière – Peter Ewart », Forum ouvrier, 19 mars 2021

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Les pompiers de l'Alberta s'expriment

Le travail des pompiers formés et, dans de nombreux cas, hautement qualifiés, qui luttent pour contenir les incendies de forêt destructeurs en Alberta permet de sauver des vies et d'éviter que des communautés entières ne soient ravagées. Les pompiers reprochent au gouvernement du Parti conservateur uni (PCU) ses compressions drastiques et irresponsables dans la prévention et la lutte contre les incendies qui ont rendu la lutte contre les incendies extrêmement difficile.

Vingt-six tours d'incendie, soit plus de 20 % des tours de la province, ont été fermées malgré leur rôle essentiel dans la détection précoce, l'équipe de rappel Rapattack a été supprimée, les patrouilles aériennes ont été réduites et le personnel permanent a subi des licenciements. La durée de la saison a été raccourcie, ce qui signifie un début plus tardif et une fin plus précoce. Par conséquent, les pompiers, les répartiteurs radio, les observateurs, les logisticiens et d'autres intervenants étaient encore en formation lorsque les incendies ont éclaté[1]. Le manque d'équipes de pompiers expérimentés est aggravé par la destruction des soins de santé et d'autres services par l'offensive antisociale, ce qui entraîne un grave problème de rétention et une réduction du nombre de pompiers. Le résultat est une situation catastrophique où il n'y a personne pour contenir un petit incendie avant qu'il ne devienne un véritable brasier.

La dissolution de l'équipe de rappel Rapattack est un exemple du coût pour la Terre Mère et la population de l'Alberta de ce que le PCU et d'autres appellent des « économies ». D'anciens membres de l'équipe de rappel Rapattack de l'Alberta, une équipe spécialisée dans la lutte contre les incendies de forêt, s'expriment et affirment que les compressions budgétaires du gouvernement ont laissé la province à court de personnel pour lutter contre les incendies actuels. « Nous aurions pu faire la différence », a déclaré Jordan Erlandson, un ancien membre de l'équipe.

L'équipe de rappel Rapattack était composée de 63 pompiers stationnés dans toute la province, notamment à Edson, Fox Creek et Lac La Biche, des communautés menacées par ce que l'on a appelé les feux de forêt du géant endormi. « Ils nous ont dit que le programme avait été éliminé », a déclaré l'ancien membre Adam Clyne, qui a ajouté que l'excuse de la province pour ces réductions était le budget. Non seulement les pompiers, mais aussi les communautés qu'ils servent ont condamné l'élimination de l'équipe de rappel Rapattack. Parmi eux, le maire de Fox Creek, une communauté qui a été évacuée.

L'unité a été formée à la descente en rappel depuis des hélicoptères et pouvait arriver rapidement sur les lieux pour éteindre des incendies de forêt qui ne couvraient encore que quelques hectares. La descente en rappel est l'un des moyens les plus rapides et les plus sûrs pour pénétrer dans les buissons épais, les fondrières et les forêts denses. Elle permet aux pompiers de se mettre directement au travail au lieu de parcourir les terres avec du matériel lourd. Lorsqu'un orage déclenchait plusieurs incendies, les membres de l'équipe pouvaient les éteindre avant qu'ils ne fusionnent en un seul. Jordan Erlandson a déclaré : « Nous aurions pu attraper certains d'entre eux lorsqu'ils étaient encore petits. »

Ces pompiers dégageaient également des espaces d'atterrissage pour permettre à d'autres hélicoptères d'acheminer des équipes et du matériel. Ils ont expliqué comment un temps précieux est perdu maintenant que les équipes doivent marcher avec du matériel lourd parce qu'aucun espace d'atterrissage n'a été dégagé. Adam Clyne a expliqué l'importance des équipes de rappel : « De cette façon, les pompiers ne sont pas déjà épuisés lorsqu'ils atteignent la ligne de feu. »

Les « économies » s'élèvent à 1,4 million de dollars sur un budget total de lutte contre les incendies de forêt de 117 millions de dollars en 2019. À l'époque, Devin Dreeshen, alors ministre de l'Agriculture et des Forêts, a affirmé que l'équipe ne passait que 2 % du temps à descendre en rappel depuis les hélicoptères, citant des chiffres qu'il disait basés sur les données de 1400 feux en Alberta de 2014 à 2018.

Ce n'est pas ce que révèlent les documents obtenus en vertu de la loi sur l'accès à l'information à partir des communications internes du gouvernement et fournis à la Presse canadienne. Selon ces documents, les équipes de rappel ont été appelées environ 100 fois par an entre 2014 et 2018 et sont descendues en rappel dans un incendie en moyenne 23 fois par an. « Il s'agit d'une évaluation des incendies de forêt sur lesquels les équipes de rappel ont été déployées alors qu'il n'y avait pas d'autre moyen possible », indique un courriel d'un forestier du gouvernement.

Jordan Erlandson souligne que les équipes de rappel sautent parfois plusieurs fois dans le même feu dans le cadre d'une grande campagne. Il estime que les équipes ont sauté jusqu'à 20 fois par incendie et probablement près de 100 fois sur l'incendie qui a rasé des parties de Fort McMurray en 2016.

L'Alberta avait initialement prévu de remplacer les équipes de Rapattack en suspendant les pompiers sous des hélicoptères volants et en les déposant sur le site de l'incendie. Transports Canada a bloqué ce plan, estimant qu'il était trop dangereux.

Jordan Erlandson explique : « La suppression des équipes a également entraîné la suppression d'outils importants tels que de plus grosses pompes, de plus gros hélicoptères, de plus gros seaux sur l'hélicoptère, de plus grosses équipes, de plus de tuyaux, de plus de scies et de plus d'expérience. »

Les Rapattackers auraient pu être utiles, dit Ryan Kalmanovitch, un pompier contractuel qui lutte actuellement contre les incendies près d'Edson. Il ajoute que même durant les jours relativement calmes, les Rapattackers pourraient aider à définir les périmètres d'incendie et à arroser les points chauds. Il poursuit : « Ils seraient en mesure d'agir tant que les incendies sont petits, ce qui nous permettrait de ne pas détourner les ressources. Ils seraient absolument utiles, peut-être plus que d'autres équipes. Ils nous manquent vraiment. »

Le budget de la lutte contre les incendies a également été considérablement réduit en 2016, ce qui avait été justifié en disant que si les fonds étaient nécessaires à l'avenir, des fonds d'urgence seraient disponibles et des contrats à court terme seraient utilisés.

Ces services publics vitaux et les travailleurs qui les fournissent sont d'une immense valeur pour nos communautés, et les pompiers spécialisés qui s'expriment en ce moment le démontrent. Les pompiers qui s'expriment indiquent clairement où doit se situer la prise de décision. Les pompiers et les communautés qu'ils servent savent ce qu'il faut faire, c'est-à-dire mettre au premier plan les besoins des communautés et des pompiers, qui doivent avoir les salaires et disposer de tout ce dont ils ont besoin pour faire leur travail et protéger leur santé et leur sécurité.

Note

1. « 'We are a skeleton crew out here' : UCP cuts led to disastrous Alberta wildfire situation », The Narwhal, Trina Moyles, 10 mai 2023

(Avec des informations de CBC, Global News et The Narwhal)

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L'irresponsabilité des gouvernements face à la crise climatique et aux intérêts privés

L'ampleur des incendies de forêt qui brûlent au Canada, souvent hors de contrôle, et l'étendue des dégâts qu'ils ont causés sont devenus une préoccupation majeure pour les Canadiens et les habitants des pays touchés par la qualité de l'air qui se détériore rapidement. La fumée toxique des incendies s'est répandue dans tout le Canada, loin au sud des États-Unis et a atteint l'Europe.

Selon une série de rapports produits entre 2019 et 2022 par Santé Canada, Environnement et changement climatique Canada et Ressources naturelles Canada, le Canada est le pays le plus affecté dans l'hémisphère nord par le réchauffement planétaire, en partie à cause de la diminution marquée de la banquise polaire qui a une incidence directe sur la température de l'océan Arctique[1]. Même le cercle arctique n'est pas épargné par le feu. Au cours de l'été 2020, les feux de forêt dans l'Arctique ont battu tous les records d'émissions de CO2, selon les scientifiques du Copernicus Atmospheric Monitoring Service (CAMS). L'Arctique se réchauffe deux fois plus vite que le reste de la planète et voit déjà les incendies commencer à le menacer également. Les conditions plus chaudes et plus sèches vont notamment allonger la saison propice aux feux dans les régions où se situe la forêt boréale.

La superficie annuelle brûlée et le nombre de grands incendies de forêt ont augmenté au Canada sur une période de 50 ans, et cette tendance est évidente si l'on examine les statistiques les plus récentes compilées par le gouvernement du Canada pour la période allant de 1960 à 2010 [voir les graphiques ci-dessous].

D'après les données de la Base de données nationale sur les forêts, plus de 8 000 incendies se déclarent chaque année et brûlent en moyenne plus de 2,1 millions d'hectares [21 000 kilomètres carrés].

En 2023, les incendies de forêt ont déjà brûlé un nombre record de 153 000 kilomètres carrés de forêts à travers le Canada en un seul été. Au 27 juin, 492 incendies faisaient rage dans le pays, dont 259 étaient considérés comme hors de contrôle par les autorités chargées de les combattre.

Nécessité d'une détection satellitaire rapide

Les experts s'accordent à dire que la détection rapide par satellite est essentielle pour lutter efficacement contre les incendies de forêt. Dès 2010, il est devenu évident que l'augmentation de l'activité des feux de forêt à l'avenir serait principalement due à la foudre. La foudre est à l'origine d'environ 50 % de tous les incendies, mais représente environ 85 % de la superficie annuelle brûlée[2]. Les graphiques 1960-2010 et les informations plus récentes sur les incendies de forêt le confirment, ce qui signifie que le gouvernement canadien et les gouvernements provinciaux doivent prendre les choses en main.

Le Canada possède l'une des plus grandes forêts boréales du monde et dispose d'une agence de la Couronne, l'Agence spatiale canadienne (ASC), mais il n'a pas son propre satellite capable de détecter la foudre, même si la technologie existe, comme l'a démontré en décembre 2022 l'Agence spatiale européenne avec ses satellites météorologiques EUMETSTAT (European Organization for the Exploration of Meteorological Satellites).

« Il s'agit de séquences d'images captées sur des périodes d'une minute par l'imageur d'éclairs embarqué du satellite MTG-I1, qui opère en orbite géostationnaire à 36 000 kilomètres d'altitude, précise Eumetsat.

« Lancé le 13 décembre 2022 par une fusée Ariane 5, ce satellite météorologique de troisième génération embarque un imageur de détection de foudre équipé de quatre caméras couvrant l'Europe, l'Afrique, le Moyen-Orient et une partie de l'Amérique du Sud[3]. » Ces caméras sont capables d'observer en continu l'activité des éclairs depuis l'espace.

Ces caméras sont capables d'observer en continu l'activité de la foudre depuis l'espace, mais le Canada, deuxième plus grand pays du monde en termes de superficie, principalement situé à des latitudes subarctiques et arctiques, dispose de capacités limitées en matière de surveillance par satellite de la progression des incendies de forêt en temps réel.

De l'aveu même de l'Agence spatiale canadienne, « 98 % des quatre millions de kilomètres carrés de terres forestières canadiennes se trouvent dans la forêt boréale. Les feux de forêt qui y font rage figurent parmi les plus grands et les plus intenses du monde entier. Tous les ans, environ 7 500 incendies détruisent plus de 2,5 millions d'hectares de forêt, une superficie équivalant à peu près à la moitié de la Nouvelle-Écosse.La superficie dévastée par les feux de forêt devrait doubler d'ici 2050 à cause des changements climatiques : la saison des feux de forêt ne cesse de se prolonger, les conditions météorologiques extrêmes s'accentuent et les sécheresses se multiplient[4]. »

Au lieu de réitérer ce que les scientifiques dans le domaine de la gestion des forêts et du changement climatique demandent depuis des années, c'est-à-dire la nécessité d'avoir un plan national pour prévoir et prévenir ces phénomènes naturels et surtout mettre en place des mesures pour les contrer de la manière la plus efficace, l'ASC, à l'instar des gouvernements irresponsables qui s'engagent dans le bellicisme au lieu de s'occuper de leurs responsabilités sociales, ne prend pas de mesures. Et ce, alors que le Canada a besoin de satellites pour suivre en temps réel l'évolution des incendies de forêt. Sans cela, les ressources humaines et matérielles ne peuvent être déployées de la manière la plus efficace. L'Agence spatiale canadienne a été très claire à ce sujet : « En moyenne, environ 3 % des feux de forêt sont très vastes et non maitrisés, et sont par ailleurs à l'origine d'environ 97 % de la superficie brûlée. En améliorant notre capacité de prévoir quels feux de forêt sont susceptibles de devenir impossibles à maitriser, nous pourrons déterminer contre lesquels il faut lutter en priorité, ce qui permettra de réduire de beaucoup les pertes économiques [5]. »

Lorsqu'il est question de la détection des feux de forêt, le Canada dépend des données de satellites d'autres pays (États-Unis et de l'Europe), notamment des satellites Sentinel de l'Agence spatiale européenne. Ces satellites permettent de déterminer une vaste gamme d'émissions, des gaz à effet de serre aux particules, en passant par le monoxyde de carbone. Ces informations sont cruciales pour déterminer comment et où déployer sur une base quotidienne les équipes de pompiers-forestiers ainsi que le matériel pour combattre les feux.

Toutefois l'une des données les plus utiles recueillies par les satellites est la puissance radiative du feu, une mesure de la quantité d'énergie émise par un incendie. Cette information satellitaire doit être recueillie en fin d'après-midi, une période cruciale et la plus critique dans le développement des feux, alors que les satellites américains et européens qui survolent ces régions du Canada le font à des moments où les incendies ne brûlent pas à leur apogée.

Dans ce dessin, les traits colorés indiquent les temps de passage de divers satellites utilisés actuellement dans la gestion des feux de forêt : les satellites américains Terra (vert foncé), Aqua (bleu), Suomi NPP (violet) et Landsat 8 (rose), et les satellites européens Sentinel-3 (vert pâle) et Sentinel-2 (orange) .

Ce décalage entraîne des conséquences désastreuses pour les équipes sur le terrain qui luttent contre les incendies de forêt. Elles ont besoin de ces informations à la fin de chaque journée pour planifier le jour suivant. Selon un article publié récemment dans l'Actualité, « Lors de l'incendie de 2016 qui a ravagé une grande partie de Fort McMurray, en Alberta, les données satellitaires étaient téléchargées à Ottawa puis expédiées à Edmonton. Au moment où elles arrivaient, elles étaient déjà trop vieilles pour être utiles [6]. »

L'urgence est telle que le 17 mai, l'ASC a annoncé la construction d'un satellite, surnommé GardeFeu, destiné à « surveiller quotidiennement, depuis l'espace, tous les feux de forêt en activité au Canada ». Il est nécessaire « pour sauver des vies et protéger la santé de la population, nos ressources, nos infrastructures et notre environnement », a déclaré l'ASC. GardeFeu surveillera quotidiennement tous les feux de forêt actifs au Canada. Mais loin de s'atteler à la tâche, on apprend que l'ASC a lancé un appel d'offres et que tout ce qu'il en ressort jusqu'à présent, c'est que les coûts s'envolent.

L'ASC a lancé un appel d'offres en 2019 pour construire le satellite GardeFeu pour un coût de 31 millions de dollars. Selon la publication en ligne SpaceQ, « la mission GardeFeu coûtera désormais au moins 170 millions de dollars et ne sera pas lancée avant 2029, la conception et la mise en oeuvre devant commencer au printemps 2024 ».

Le contrat de construction a été attribué à une société appelée ExactEarth, basée à Cambridge, dans l'Ontario. Il devait être opérationnel en 2026[7]. ExactEarth a ensuite été rachetée par Spire Global, une société spécialisée dans la construction de nanosatellites. Il s'agit d'une entreprise américaine basée à San Francisco, fondée en 2012 et désormais cotée à la bourse de New York. Le déploiement des deux premiers satellites de Spire Global a eu lieu en novembre 2012 dans ce qui allait devenir « le premier déploiement de satellite commercial américain depuis la Station spatiale internationale ».

Depuis des années, les scientifiques spécialisés dans la gestion des forêts et le changement climatique soulignent la nécessité de disposer d'un plan national de prévision, de prévention et, surtout, de mise en place de mesures visant à lutter le plus efficacement possible contre les incendies de forêt. Les moyens d'y parvenir et de maîtriser la crise climatique sont connus. Le problème réside dans les gouvernements qui ne sont fidèles qu'à des intérêts privés étroits et à l'économie de guerre américaine. L'histoire du contrat de construction du satellite GardeFeu montre à quel point leur conception erronée de la sécurité nationale est dangereuse.

Figure 1a – Tendances dans la superficie annuelle brûlée (en centaine de milliers d'hectares (ha)) au Canada entre 1959 et 2010
nds of hectares (ha)) across Canada between 1959 and 2010.
Figure 1b – Tendances dans le nombre de grands feux (>200 ha) au Canada entre 1959 et 2010.

La situation n'est pas différente pour le Québec (voir graphique ci-joint)

Notes

1. « Rapport sur le climat changeant du Canada », Gouvernement du Canada, Ottawa,, 2019, 446 p

2. « Base nationale de données sur les feux de forêt du Canada (BNDFFC) », Gouvernement du Canada, 1980-2021

3. « Le premier satellite européen détecteur de foudre à l'oeuvre », La Presse, 3 juillet 2023

4. « La mission GardeFeu : améliorer la gestion des feux de forêt au Canada », Gouvernement du Canada, Agence spatiale canadienne

5. Ibid.

6. « Les satellites peuvent jouer un rôle pour mieux combattre les incendies de forêt », l'actualité, 21 mai 2023

7. « Spire's ExactEarth to Support WildFireSat Mission », SpaceQ, 11 mai 2023

(Avec des informations de la SOPFEU, Gouvernement du Canada, Gouvernement du Québec, Hydro-Québec, Le Devoir, Journal de Montréal, Journal de Québec, La Presse, l'Actualité)

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Les incendies de forêt font toujours rage au Québec

Au cours des six premiers mois de l'année 2023, près de 14 900 kilomètres carrés ont été touchés par des incendies de forêt au Québec. Au cours du seul mois de juin, plus de 14 500 kilomètres carrés de forêt ont brûlé au Québec, soit une superficie plus de 30 fois supérieure à celle de l'île de Montréal et trois fois celle de l'Île-du-Prince-Édouard. Au cours des dix dernières années, la superficie moyenne des forêts brûlées au cours de la même période de juin était de 77 kilomètres carrés.

En juin de cette année, le mois le plus intense d'activité de feux de forêt au Québec, plus de 14 000 personnes ont combattu ces incendies, dont, à divers moments, des équipes composées de 547 pompiers-forestiers de France, du Portugal, d'Espagne, des États-Unis, de la Corée du sud, du Yukon et du Nouveau-Brunswick, assistés d'une vingtaine de bombardiers d'eau et de près de 80 hélicoptères.

Des pompiers coréens arrivent au Québec, le 2 juillet 2023, pour participer à la lutte contre les incendies de forêt.

Au cours du mois de juin, des milliers de personnes ont été évacuées pour des périodes allant de quelques jours à quelques semaines de villes de la Côte-Nord, de l'Abitibi et du nord du Québec, dont Sept-Îles, Maliotenam, Chibougamau, Chapais, ainsi que Normétal, Lac Simon, Lebel-sur-Quévillon, Senneterre, etc. Trois secteurs de Val-d'Or ont été évacués à la fin du mois de juin, de même que quelque 360 personnes de la communauté atikamekw d'Obedjiwan, en Mauricie. Plus d'un millier de résidents des communautés cries de Mistissini, Oujé-Bougoumou et Waswanipi, dans le nord du Québec, ont également été contraints de quitter les lieux par mesure de précaution. D'autres communautés en Haute-Mauricie, en Abitibi-Témiscamingue et dans le Nord du Québec sont demeurées sur un pied d'alerte. Au 6 juillet, 155 846 personnes avaient été évacuées de leur domicile en raison de la menace d'incendies de forêt, un bilan sans précédent depuis 40 ans, selon le ministère des ressources naturelles du Québec, dont 40 % des personnes évacuées provenaient de communautés autochtones.


À mesure que la saison estivale progressait en juillet et en août, de nombreuses régions sont restées en état d'alerte, comme l'Abitibi. De nouveaux incendies de forêt sont apparus à des latitudes plus septentrionales, comme dans la région de la Baie James, autour du 52e parallèle. Quelque 200 employés d'Hydro-Québec travaillant aux centrales hydroélectriques LG-3 et LG-4 dans le nord du Québec ont été évacués par avion les 20 et 21 juin par mesure de précaution, étant donné que la route Transtaïga reliant les 660 kilomètres de centrales du complexe de La Grande Rivière à la route principale de la Baie James était touchée par les incendies de forêt. Les conditions ont continué à se dégrader, les avions ne pouvant plus y atterrir. À partir du 6 juillet, l'évacuation du personnel est restée en vigueur pendant un certain temps, jusqu'à ce que les travailleurs puissent retourner à leur poste. Une deuxième évacuation d'une centaine de travailleurs du site du barrage hydroélectrique LG-3 a été ordonnée le 16 août en raison de nouveaux feux de forêt dans la région de la Baie James.

En juillet et en août, de nombreuses communautés cries situées le long de la baie James ont été contraintes d'évacuer leurs villages. Pas plus tard que la semaine dernière, 200 personnes de la communauté crie de Wemindji, sur la côte de la baie James, ont été évacuées par avion. De plus, de nombreux tronçons de la route principale qui relie l'Abitibi à la région de la Baie James ont été temporairement fermés en raison de la fumée et des vents violents. Cette route est un lien terrestre vital entre les communautés cries du nord et le reste du Québec. Cette situation perdure depuis le 17 juillet, date à laquelle le ministère des Ressources naturelles du Québec a annoncé que l'accès routier à la zone forestière comprenant l'ensemble du territoire occidental de la Première nation Eeyou Istchee était limité aux services essentiels.

Première cohorte de pompiers-forestiers auxiliaires cris ayant complété la formation de base

L'organisme responsable de la lutte contre les incendies de forêt au Québec, la Société de protection des forêts contre le feu (SOPFEU), rapporte que 523 incendies de forêt ont été répertoriés depuis le début de la saison 2023, soit deux fois plus que la moyenne de 271 pour la période correspondante des dix dernières années. Le 26 juin, la SOPFEU a indiqué que 12 500 kilomètres carrés avaient été touchés par des incendies dans la « zone intensive » – située au sud du 51e parallèle – depuis le début de la saison. Le précédent record, datant de 1923, année où des données fiables sont devenues disponibles pour les forêts exploitées commercialement, était de 12 300 kilomètres carrés.

À titre d'information – la SOPFEU

La Société de protection des forêts contre le feu (SOPFEU) est un organisme à but non lucratif qui compte environ 450 employés en tout temps. Sa mission est « de protéger la forêt, les communautés et les infrastructures stratégiques contre les incendies de végétation, tout en assurant la pérennité du milieu forestier ».

Selon son site web, la SOPFEU dispose d'un réseau qui « lie le gouvernement du Québec, l'industrie forestière et les grands propriétaires de boisés privés. Les gestionnaires de parcs et établissements de plein air, les chefs pompiers municipaux, les contremaîtres forestiers et les médias sont autant de précieux collaborateurs qui maximisent le rayon d'action de la SOPFEU. »

La SOPFEU précise que son personnel concentre ses efforts sur les feux prioritaires afin de protéger les communautés et certaines infrastructures stratégiques. Les zones de villégiature (camps et chalets) ne sont pas prioritaires. Par exemple, le 28 juin 2023, au plus fort de l'activité des feux de forêt, « 14 feux ont été classés en priorité 1, alors que 12 feux ont été classés en priorité 2 ».

« En ce qui concerne les incendies non maîtrisés, la priorité est donnée à la lutte contre les fronts de feu dans les zones susceptibles de menacer les communautés. Là où ce n'est pas encore le cas, des lignes d'arrêt mécanisées sont construites pour protéger les villes, les communes et les villages. »

Sous le titre « Anticiper pour mieux maîtriser », la SOPFEU indique que « les observations et prévisions météorologiques sont au coeur du travail de la SOPFEU. Son savoir-faire s'appuie sur sa faculté pointue d'analyse des données de 193 stations météo. Chaque heure, chaque jour, la SOPFEU est ainsi en mesure d'observer la situation en forêt et d'évaluer les zones à risque à l'échelle provinciale. Des avions survolent par ailleurs la forêt, à la recherche de fumées suspectes à partir de circuits établis selon les conditions météorologiques, le danger d'incendie ou la foudre », peut-on lire sur le site de la SOPFEU.


Vue aérienne des forêts brûlées dans le nord du Québec

Sur les 523 feux de forêt répertoriés depuis le début de l'année 2023 dans la zone de protection intensive (ZPI) par la SOPFEU, 236 étaient des feux de forêt provoqués par la foudre. Même si seulement 45 % des feux de forêt sont causés par la foudre, cela représente plus de 99 % de toutes les superficies boisées brûlées. Sur les 137 feux de forêt répertoriés par la SOPFEU dans la Zone nordique (NZ) depuis le début de 2023, 126 étaient des feux sauvages causés par la foudre, ce qui représente 92 % de toutes les superficies boisées brûlées[1]. La latitude nord correspondant au 51e parallèle est la ligne qui sépare les deux grandes régions du Québec : la zone de protection intensive qui correspond au territoire le plus densément peuplé du Québec et la zone nordique habitée principalement par les peuples autochtones cris et inuits.

Ce que cela révèle est le besoin de migrer vers la détection et la reconnaissance en temps réel des feux de forêt par satellite afin que les équipes et le matériel déployés chaque jour pour combattre les feux de forêt puissent le faire sur une base efficace. « Avoir un bon angle d'observation sur un incendie est ce qu'il y a de plus important pour le combattre efficacement. Il n'y a pas assez de pilotes pour avoir un avion qui surveille chaque feu tous les jours, encore moins deux fois par jour », selon Joshua Johnston, un scientifique de Ressources naturelles Canada qui travaille sur la Mission GardeFeu, qui deviendra en 2029 le premier satellite canadien spécialement conçu pour surveiller les feux de forêt.

Note

1. « Statistiques Zone intensive – Tableau par mois et par cause, 2023 », SOPFEU

(Avec des fichiers de la SOPFEU, de Ressources naturelles Canada, du ministère des Ressources naturelles du Québec, du Grand Conseil des Cris, de La Presse, du Devoir. Photos : SOPFEU, Grand Conseil des Cris)

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