Les incendies de forêt font toujours rage au Québec

Au cours des six premiers mois de l'année 2023, près de 14 900 kilomètres carrés ont été touchés par des incendies de forêt au Québec. Au cours du seul mois de juin, plus de 14 500 kilomètres carrés de forêt ont brûlé au Québec, soit une superficie plus de 30 fois supérieure à celle de l'île de Montréal et trois fois celle de l'Île-du-Prince-Édouard. Au cours des dix dernières années, la superficie moyenne des forêts brûlées au cours de la même période de juin était de 77 kilomètres carrés.

En juin de cette année, le mois le plus intense d'activité de feux de forêt au Québec, plus de 14 000 personnes ont combattu ces incendies, dont, à divers moments, des équipes composées de 547 pompiers-forestiers de France, du Portugal, d'Espagne, des États-Unis, de la Corée du sud, du Yukon et du Nouveau-Brunswick, assistés d'une vingtaine de bombardiers d'eau et de près de 80 hélicoptères.

Des pompiers coréens arrivent au Québec, le 2 juillet 2023, pour participer à la lutte contre les incendies de forêt.

Au cours du mois de juin, des milliers de personnes ont été évacuées pour des périodes allant de quelques jours à quelques semaines de villes de la Côte-Nord, de l'Abitibi et du nord du Québec, dont Sept-Îles, Maliotenam, Chibougamau, Chapais, ainsi que Normétal, Lac Simon, Lebel-sur-Quévillon, Senneterre, etc. Trois secteurs de Val-d'Or ont été évacués à la fin du mois de juin, de même que quelque 360 personnes de la communauté atikamekw d'Obedjiwan, en Mauricie. Plus d'un millier de résidents des communautés cries de Mistissini, Oujé-Bougoumou et Waswanipi, dans le nord du Québec, ont également été contraints de quitter les lieux par mesure de précaution. D'autres communautés en Haute-Mauricie, en Abitibi-Témiscamingue et dans le Nord du Québec sont demeurées sur un pied d'alerte. Au 6 juillet, 155 846 personnes avaient été évacuées de leur domicile en raison de la menace d'incendies de forêt, un bilan sans précédent depuis 40 ans, selon le ministère des ressources naturelles du Québec, dont 40 % des personnes évacuées provenaient de communautés autochtones.


À mesure que la saison estivale progressait en juillet et en août, de nombreuses régions sont restées en état d'alerte, comme l'Abitibi. De nouveaux incendies de forêt sont apparus à des latitudes plus septentrionales, comme dans la région de la Baie James, autour du 52e parallèle. Quelque 200 employés d'Hydro-Québec travaillant aux centrales hydroélectriques LG-3 et LG-4 dans le nord du Québec ont été évacués par avion les 20 et 21 juin par mesure de précaution, étant donné que la route Transtaïga reliant les 660 kilomètres de centrales du complexe de La Grande Rivière à la route principale de la Baie James était touchée par les incendies de forêt. Les conditions ont continué à se dégrader, les avions ne pouvant plus y atterrir. À partir du 6 juillet, l'évacuation du personnel est restée en vigueur pendant un certain temps, jusqu'à ce que les travailleurs puissent retourner à leur poste. Une deuxième évacuation d'une centaine de travailleurs du site du barrage hydroélectrique LG-3 a été ordonnée le 16 août en raison de nouveaux feux de forêt dans la région de la Baie James.

En juillet et en août, de nombreuses communautés cries situées le long de la baie James ont été contraintes d'évacuer leurs villages. Pas plus tard que la semaine dernière, 200 personnes de la communauté crie de Wemindji, sur la côte de la baie James, ont été évacuées par avion. De plus, de nombreux tronçons de la route principale qui relie l'Abitibi à la région de la Baie James ont été temporairement fermés en raison de la fumée et des vents violents. Cette route est un lien terrestre vital entre les communautés cries du nord et le reste du Québec. Cette situation perdure depuis le 17 juillet, date à laquelle le ministère des Ressources naturelles du Québec a annoncé que l'accès routier à la zone forestière comprenant l'ensemble du territoire occidental de la Première nation Eeyou Istchee était limité aux services essentiels.

Première cohorte de pompiers-forestiers auxiliaires cris ayant complété la formation de base

L'organisme responsable de la lutte contre les incendies de forêt au Québec, la Société de protection des forêts contre le feu (SOPFEU), rapporte que 523 incendies de forêt ont été répertoriés depuis le début de la saison 2023, soit deux fois plus que la moyenne de 271 pour la période correspondante des dix dernières années. Le 26 juin, la SOPFEU a indiqué que 12 500 kilomètres carrés avaient été touchés par des incendies dans la « zone intensive » – située au sud du 51e parallèle – depuis le début de la saison. Le précédent record, datant de 1923, année où des données fiables sont devenues disponibles pour les forêts exploitées commercialement, était de 12 300 kilomètres carrés.

À titre d'information – la SOPFEU

La Société de protection des forêts contre le feu (SOPFEU) est un organisme à but non lucratif qui compte environ 450 employés en tout temps. Sa mission est « de protéger la forêt, les communautés et les infrastructures stratégiques contre les incendies de végétation, tout en assurant la pérennité du milieu forestier ».

Selon son site web, la SOPFEU dispose d'un réseau qui « lie le gouvernement du Québec, l'industrie forestière et les grands propriétaires de boisés privés. Les gestionnaires de parcs et établissements de plein air, les chefs pompiers municipaux, les contremaîtres forestiers et les médias sont autant de précieux collaborateurs qui maximisent le rayon d'action de la SOPFEU. »

La SOPFEU précise que son personnel concentre ses efforts sur les feux prioritaires afin de protéger les communautés et certaines infrastructures stratégiques. Les zones de villégiature (camps et chalets) ne sont pas prioritaires. Par exemple, le 28 juin 2023, au plus fort de l'activité des feux de forêt, « 14 feux ont été classés en priorité 1, alors que 12 feux ont été classés en priorité 2 ».

« En ce qui concerne les incendies non maîtrisés, la priorité est donnée à la lutte contre les fronts de feu dans les zones susceptibles de menacer les communautés. Là où ce n'est pas encore le cas, des lignes d'arrêt mécanisées sont construites pour protéger les villes, les communes et les villages. »

Sous le titre « Anticiper pour mieux maîtriser », la SOPFEU indique que « les observations et prévisions météorologiques sont au coeur du travail de la SOPFEU. Son savoir-faire s'appuie sur sa faculté pointue d'analyse des données de 193 stations météo. Chaque heure, chaque jour, la SOPFEU est ainsi en mesure d'observer la situation en forêt et d'évaluer les zones à risque à l'échelle provinciale. Des avions survolent par ailleurs la forêt, à la recherche de fumées suspectes à partir de circuits établis selon les conditions météorologiques, le danger d'incendie ou la foudre », peut-on lire sur le site de la SOPFEU.


Vue aérienne des forêts brûlées dans le nord du Québec

Sur les 523 feux de forêt répertoriés depuis le début de l'année 2023 dans la zone de protection intensive (ZPI) par la SOPFEU, 236 étaient des feux de forêt provoqués par la foudre. Même si seulement 45 % des feux de forêt sont causés par la foudre, cela représente plus de 99 % de toutes les superficies boisées brûlées. Sur les 137 feux de forêt répertoriés par la SOPFEU dans la Zone nordique (NZ) depuis le début de 2023, 126 étaient des feux sauvages causés par la foudre, ce qui représente 92 % de toutes les superficies boisées brûlées[1]. La latitude nord correspondant au 51e parallèle est la ligne qui sépare les deux grandes régions du Québec : la zone de protection intensive qui correspond au territoire le plus densément peuplé du Québec et la zone nordique habitée principalement par les peuples autochtones cris et inuits.

Ce que cela révèle est le besoin de migrer vers la détection et la reconnaissance en temps réel des feux de forêt par satellite afin que les équipes et le matériel déployés chaque jour pour combattre les feux de forêt puissent le faire sur une base efficace. « Avoir un bon angle d'observation sur un incendie est ce qu'il y a de plus important pour le combattre efficacement. Il n'y a pas assez de pilotes pour avoir un avion qui surveille chaque feu tous les jours, encore moins deux fois par jour », selon Joshua Johnston, un scientifique de Ressources naturelles Canada qui travaille sur la Mission GardeFeu, qui deviendra en 2029 le premier satellite canadien spécialement conçu pour surveiller les feux de forêt.

Note

1. « Statistiques Zone intensive – Tableau par mois et par cause, 2023 », SOPFEU

(Avec des fichiers de la SOPFEU, de Ressources naturelles Canada, du ministère des Ressources naturelles du Québec, du Grand Conseil des Cris, de La Presse, du Devoir. Photos : SOPFEU, Grand Conseil des Cris)


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Numéro 45 - 23 août 2023

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