Numéro 81 - 7 décembre 2020

La politique étrangère du Canada

Les agissements du Canada
aux Nations unies

Le rôle méprisable du Canada dans l'opposition aux droits
humains des Palestiniens

- Yi Nicholls -

Une invocation intéressée et dangereuse des victimes de l'Holocauste pour camoufler les crimes commis contre les Palestiniens

- Louis Lang -


Des développements inquiétants aux États-Unis

Les pouvoirs présidentiels sont utilisés pour attaquer et
restructurer la main-d'oeuvre fédérale

- Kathleen Chandler -

Le Congrès menace le public de fermer le gouvernement alors que les cas de COVID-19 atteignent des niveaux records

L'affrontement électoral n'est toujours pas résolu


Développements au Guatemala

Au milieu d'appels à la démission, le président sollicite le soutien de l'Organisation des États américains

- Gerardo Villagran del Corral -



La politique étrangère du Canada

Les agissements du Canada aux Nations unies

Rien de bon ne ressort de l'action du Canada aux Nations unies où il fait activement la promotion des définitions impérialistes des droits et cajole les pays pour qu'ils adoptent ces définitions sous peine de représailles des institutions financières, militaires et politiques impérialistes. Il participe à l'imposition d'une restructuration des relations internationales pour servir les intérêts de l'impérialisme américain.

Le but de la nomination de l'apologiste aguerri de l'État anglo-canadien, Bob Rae, au poste d'ambassadeur du Canada auprès des Nations unies est de réaliser ces objectifs néfastes. Aucunement découragé par son échec à obtenir un siège au Conseil de sécurité, le Canada a annoncé la nomination de Rae en faisant les louanges de son rôle de champion du multilatéralisme, des droits humains et de la paix. Un communiqué du cabinet du premier ministre présente Bob Rae comme un excellent choix pour continuer « de mobiliser nos partenaires internationaux et de promouvoir les valeurs canadiennes de paix, de liberté, de démocratie et de droits de la personne, alors que nous avançons dans cette période d'incertitude mondiale ».

Les actes, cependant, éclairent ce que sont « les valeurs canadiennes de paix, de liberté, de démocratie et de droits de la personne » que le Canada représente. La politique étrangère du Canada est fondée sur la domination du monde par le système impérialiste d'États occidentaux dirigé par l'impérialisme anglo-américain, qui s'appuie sur l'OTAN, son bras armé. Cette politique n'est pas nouvelle puisqu'elle est basée sur une réactivation narcissique de la doctrine intéressée de « moyenne puissance » élaborée dans les années 1940 et qui a guidé la diplomatie canadienne au service de l'impérialisme américain pendant la guerre froide[1].

Bob Rae est un homme de confiance de l'impérialisme anglo-américain. Son activité passée sur des questions qui continuent à être préoccupantes montrent très bien que le Canada ne vise rien de progressiste avec cette nomination.

En 2004, Bob Rae a appuyé la participation du Canada et de la France au coup d'État dirigé par les États-Unis en Haïti et au renversement du gouvernement de Jean-Bertrand Aristide élu démocratiquement par le peuple. Avec une vraie logique de bandit, Bob Rae a déclaré que c'était « l'inefficacité et la corruption grossière » d'Aristide qui ont conduit au coup d'État qui a renversé son gouvernement et non l'intervention criminelle des États-Unis, du Canada et de la France.

Bob Rae est un ardent sioniste et un partisan inconditionnel des abus de pouvoir d'Israël en tant que puissance occupante de la Palestine. Ennemi des droits du peuple palestinien, il a été membre du comité directeur de la « Coalition parlementaire canadienne de lutte contre l'antisémitisme » formée en 2009 avec pour objectif de saper les droits du peuple palestinien en criminalisant et en réduisant au silence ceux qui s'opposent aux crimes d'Israël contre les Palestiniens en les traitant d'antisémites.

Soulignons qu'au sujet de Gaza et des territoires occupés, qui ont été transformés en la plus grande prison à ciel ouvert du monde, où des crimes contre la paix et des crimes contre l'humanité sont commis chaque jour par l'État sioniste d'Israël, le Canada et son ambassadeur auprès des Nations unies sont totalement silencieux ! Qui plus est, cette année le Canada s'oppose activement à l'enquête sur les crimes de guerre et les crimes contre l'humanité commis par Israël ouverte par la Cour pénale internationale. Voilà le programme « droits de la personne » du Canada en action !

En 2010, Bob Rae s'est rallié au gouvernement Harper et a prôné le maintien d'une présence militaire canadienne importante en Afghanistan. Il s'est opposé au retrait prévu des forces canadiennes d'Afghanistan et a appelé Stephen Harper « à aller jusqu'au bout ».

En 2011, Bob Rae était porte-parole du Parti libéral en matière d'affaires étrangères au Parlement. Il a exigé un changement de régime en Libye et a soutenu la participation du Canada aux bombardements sauvages de l'OTAN qui ont détruit ce pays et ont déclenché la violence, l'instabilité et l'insécurité qui se sont depuis propagées vers le sud, au Mali et dans tout le Sahel.

Lorsque le président du Venezuela, Hugo Chavez, est décédé en mars 2013, Bob Rae a tweeté : « Nos condoléances et espoirs d'un avenir démocratique. » Lorsque le président Nicolas Maduro a été élu par le peuple vénézuélien en 2013, Bob Rae a demandé à Stephen Harper d'imposer des sanctions plus sévères au Venezuela. En janvier 2020, il a déclaré : « Chavez et Maduro ont terriblement abusé de leur pouvoir, appauvri leur peuple et créé la plus grande crise humanitaire et de réfugiés de l'histoire moderne de l'Amérique latine. L'idéalisation de leur régime et de leur idéologie est une honte. »

Le Canada utilise la « moyenne puissance » et une politique étrangère de longue date en faveur du multilatéralisme pour protéger les intérêts de l'impérialisme anglo-américain, sous la direction des États-Unis et avec le soutien de la « puissance dure » de l'OTAN et en créant au besoin des « coalitions de volontaires[2] ». 

En entrevue à CTV en juillet dernier, Bob Rae a dit : « Les bases fondamentales de notre approche de la vie, de notre approche de la politique, de notre approche des relations internationales sont solides... Et je ne veux pas nous voir jeter le bébé avec l'eau du bain. »

Le Forum international sur la sécurité de Halifax qui s'est tenu dernièrement, que le Canada a financé en partie et dont il a été l'hôte, a tenu une session spéciale sur le rôle des « moyennes puissances » dont le thème était « Go Canada ! » Le forum a publié le « Guide pour les démocraties » dont le titre est : « Chine contre démocratie - Le plus Grand Jeu ». Le « Guide » déclare : « Alors que les États-Unis restent le leader naturel du monde libre, les alliances et les partenariats entre démocraties seront différents de ceux du XXe siècle. Le plus urgent actuellement est de réinventer des alliances démocratiques dignes du XXIe siècle. »

Le secrétaire d'État américain Mike Pompeo, dans son allocution à la Bibliothèque présidentielle et au Musée Richard Nixon, l'a formulé ainsi au début de l'été : « Le défi que pose la Chine exige des efforts, de l'énergie de la part des démocraties – celles d'Europe, celles d'Afrique, celles d'Amérique du Sud, et en particulier celles de la région indo-pacifique. [...] Nous ne pouvons donc pas faire face seuls à ce défi. Les Nations unies, l'OTAN, les pays du G7, le G20, nos capacités économiques, diplomatiques et militaires combinées sont sûrement suffisantes pour relever ce défi si nous les utilisons avec clarté et avec beaucoup de courage. »

Le Canada est clairement un instrument de cette politique réactionnaire à l'ONU : « réinventer des alliances démocratiques dignes du XXIe siècle » aux dépens de l'ONU elle-même si nécessaire, conspirer avec des « partenariats internationaux » qui partagent les mêmes objectifs pour empêcher les nations de poursuivre leurs propres projets d'édification nationale et transformer les forums de l'ONU en champs de bataille contre ceux qui sont considérés comme des rivaux, tout cela étant considéré comme normal.

Dans une entrevue accordée au Globe and Mail le 23 octobre, Bob Rae explique ce que « réinventer » veut dire pour le Canada : « La souveraineté n'est pas le seul principe reconnu dans la Charte [des Nations unies], et au cours des 70 dernières années, nous avons créé, non seulement la Déclaration universelle, mais aussi un certain nombre d'institutions axées sur les droits de la personne. » Il a accusé la Russie et la Chine de « faire une interprétation stricte de la Charte des Nations unies » pour opposer la « souveraineté » aux « droits de la personne ». Bob Rae a sans doute à l'esprit la doctrine impérialiste de la responsabilité de protéger que le Canada a élaborée et que les États-Unis et l'OTAN utilisent pour contourner la Charte des Nations unies. Ainsi, la responsabilité de protéger a été utilisée par le Canada pour justifier la destruction de la Yougoslavie et de la Libye.

Peu avant le Forum d'Halifax sur la sécurité internationale de cette année, le Canada s'est joint à un groupe de 39 pays organisés par les États-Unis qui a accusé la Chine de « violations des droits de la personne » et de « génocide » contre la minorité ouïghoure du Xinjiang. La Grande-Bretagne a présenté une déclaration commune à cet effet. À titre d'ambassadeur du Canada auprès des Nations unies, Bob Rae a déclaré qu'il ne pouvait pas prouver ces accusations, mais a cependant demandé au Conseil des droits de l'homme des Nations unies de faire enquête pour voir si quelque chose pouvait être trouvé.

L'ONU a déjà démontré avec preuves à l'appui que le Canada opprime les nations autochtones. Rae soutiendrait-il une « révolution de couleur » pour provoquer un « changement de régime » au Canada et instiguer des opérations secrètes de terrorisme au Canada comme cela se fait contre la Chine ? La discussion sur les principes des Nations unies qui reconnaît tous les pays comme égaux, grands ou petits, sur la base de la souveraineté, n'est tout simplement pas permise. L'ajout de doctrines comme la responsabilité de protéger au nom de la protection des droits humains est une démarche pragmatique et injustifiable qui détruit la base de principe des relations internationales pour permettre des crimes contre la paix.

Quant à la paix et au respect des principes de la Charte des Nations unies, lors d'une réunion du Conseil de sécurité le 24 octobre portant sur la situation en Syrie, Bob Rae a totalement déformé la vérité et accusé la Russie de prolonger le conflit en Syrie en utilisant son veto contre toute nouvelle intervention des États-Unis. La guerre en Syrie a été déclenchée en violation de la Charte des Nations unies par l'impérialisme américain, le Canada et leurs alliés de l'OTAN. Les bandes terroristes, protégées par l'occupation américaine et l'OTAN, ont infligé d'énormes dommages au peuple syrien. Cela inclut les « casques blancs », des mercenaires militaires privés que le Canada paie, protège et présente comme étant une organisation humanitaire. Les États-Unis se sont même emparés des réserves de pétrole syriennes, mais le Canada considère que toute discussion sur des questions de fond est taboue. Il est passé maître dans l'art de créer des mécanismes qui garantissent qu'aucune discussion n'ait lieu.

Pas plus tard que la semaine dernière, le 27 novembre, plus de 70 pays ont demandé aux Nations unies de mettre immédiatement fin aux mesures coercitives unilatérales, c'est-à-dire aux sanctions et aux blocus que des pays, principalement les États-Unis, ont imposés à d'autres pays. Ces mesures sont condamnées comme une violation des droits humains et de la souveraineté des nations, notamment dans le contexte de la pandémie de la COVID-19. Le Canada n'a cependant pas participé à cette rencontre ni déclaré son opposition aux mesures coercitives unilatérales.

Voilà seulement quelques exemples parmi les plus récents de ce que le Canada fait et prépare aux Nations unies sous la direction de Bob Rae. Les tentatives de « réinventer » des alliances dignes de l'ordre du jour de l'impérialisme américain au XXIe siècle sont inacceptables. Elles existent dans la tête de ceux qui ne veulent pas accepter la réalité telle qu'elle est. Ils croient que les conditions qui ont depuis longtemps surpassé leurs jeux du XIXe siècle existent encore. Aujourd'hui, l'Afghanistan est tout aussi insaisissable qu'il l'était alors et charger dans la vallée de la Mort comme l'a fait à l'époque la Brigade légère est une voie tout aussi désastreuse aujourd'hui. Il est pitoyable que ni Justin Trudeau, ni Chrystia Freeland, ni Bob Rae n'ont appris qu'aujourd'hui le devoir n'est pas envers le Roi et le pays, il est envers les peuples du monde et envers l'environnement naturel et social. Il est envers la réalisation de la cause de paix, de liberté et de démocratie des peuples au XXIe siècle. Affronter une force de sept milliards d'humains est non seulement stupide, c'est aussi totalement irresponsable.

Notes

1. Moyenne puissance

Giovanni Botero, un maire de Milan au XVe siècle, a défini une « moyenne puissance » comme un acteur ayant suffisamment de force et d'autorité pour se suffire à lui-même sans avoir besoin de l'aide des autres. Depuis, le concept de moyenne puissance a été constamment mentionné dans le domaine des relations internationales. La « classification » des acteurs étatiques a fait l'objet de débats diplomatiques pour la première fois lors du règlement de paix des guerres napoléoniennes en 1815. C'est alors que la catégorie de moyennes puissances a été officiellement reconnue, parmi lesquelles figuraient les États allemands.

Le concept de moyenne puissance a été sérieusement examiné dans les dernières années de la Deuxième Guerre mondiale en ce qui concerne le Canada et l'Australie. Les deux pays ont essayé de trouver des moyens de renforcer leur influence en se basant sur leurs contributions aux alliés. Au début de la création des Nations unies, le premier ministre canadien Mackenzie King a insisté pour que les pays de moyenne puissance coopèrent entre eux afin d'assurer leur influence dans la société internationale et proposé le concept de « moyenne puissance » en 1944. En Australie, le ministre des Affaires extérieures Herbert Evatt a discuté du concept de moyenne puissance en vue de garantir l'intérêt national de son pays dans un nouvel ordre mondial après la Deuxième Guerre mondiale. Depuis lors, le concept de moyenne puissance est devenu une marque de commerce de la politique étrangère des deux pays.

(« A Critical Review of the Concept of Middle Power », Dong-min Shin, E-International Relations, 4 décembre 2015)

2. En 1942, le diplomate canadien Humpfrey Wrong a souligné que la société internationale devait respecter le rôle du Canada comme moyenne puissance selon trois principes fonctionnels : le degré d'implication, l'intérêt et la capacité.

Selon la perspective comportementale, un pays est une moyenne puissance s'il joue certains rôles considérés comme ceux d'une puissance moyenne ou s'il s'identifie comme tel. Le professeur Andrew F. Cooper et ses collègues ont proposé que la recherche de solutions multilatérales aux problèmes internationaux, la préférence pour des positions de compromis dans les différends internationaux et l'adoption des notions de bonne citoyenneté internationale constituent le comportement typique d'une moyenne puissance.

La troisième approche est la perspective hiérarchique qui classe et catégorise les États selon des normes relatives à leurs capacités. Elle tend à utiliser des indices statistiques pour catégoriser les pays, comme la taille du territoire, le PIB, le volume des échanges commerciaux et des réserves de devises étrangères, la population et le nombre de soldats. Les pays dotés de capacités moyennes sont regroupés en moyennes puissances; les grandes puissances et les puissances faibles peuvent être classées de la même manière.

(Ibid.)

(Archives du LML, Gouvernement du Canada, Globe and Mail, Canada-Haiti Information Project, Nations unies, E-International Relations. Photos : LML)

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Le rôle méprisable du Canada dans l'opposition aux droits humains des Palestiniens


Manifestation à Montréal en appui au peuple palestinien, contre le soi-disant Accord du siècle des États-Unis, le 1er février 2020

Le 19 novembre, le Canada a voté avec 162 pays en faveur d'un projet de résolution des Nations unies affirmant le droit des Palestiniens à l'autodétermination. La résolution affirme « le droit du peuple palestinien à l'autodétermination, y compris son droit à un État de la Palestine indépendant » et « souligne la nécessité impérieuse de mettre un terme immédiatement à l'occupation israélienne qui a commencé en 1967 et de parvenir à un accord de paix juste, durable et global entre les parties israélienne et palestinienne », reposant sur une solution à deux États.

La résolution a été adoptée par 163 voix contre 5 avec 10 abstentions. Outre Israël et les États-Unis, les îles Marshall, la Micronésie et Nauru ont également voté contre la résolution. L'Australie, le Cameroun, le Guatemala, le Honduras, Kiribati, les Palaos, la Papouasie-Nouvelle-Guinée, le Rwanda, le Togo et les Tonga se sont tous abstenus.

Les années précédentes, le Canada a voté avec Israël contre le droit du peuple palestinien à l'autodétermination, mais pour la deuxième année consécutive, poussé par la décision du secrétaire d'État américain l'an dernier de renverser la position de l'avis juridique du Département d'État qui jugeait les colonies israéliennes illégales, il a voté en faveur de la résolution. En même temps, il a voté contre 15 autres résolutions affirmant les droits des Palestiniens, touchant toutes à des questions importantes concernant la mise en oeuvre de la première résolution.

Le Canada joue à des jeux indignes de tout pays qui prétend défendre les droits. En fait, au cours des 20 dernières années, les votes du Canada sur la question palestinienne ont constamment évolué vers la défense des violations par Israël de ses devoirs en tant que puissance occupante. Cette tendance a coïncidé avec la nomination par le premier ministre de l'époque, Paul Martin, du sioniste Irwin Cotler au poste de ministre de la Justice. Cela a été suivi par l'adoption de positions sionistes extrémistes par le gouvernement Harper que les libéraux de Justin Trudeau continuent de mettre en oeuvre. La nomination par Trudeau du sioniste avoué Bob Rae, comme ambassadeur du Canada auprès des Nations unies, est du même calibre et révèle également la voie que le Canada a choisie sur la scène internationale, celle de reprendre toute cause contrerévolutionnaire réactionnaire que soutiennent les États-Unis, cette « nation indispensable », tout en se proclamant humanitaire et le plus grand défenseur de la paix, de la démocratie et des droits. 

La semaine dernière, le gouvernement Trudeau a nommé Irwin Cotler envoyé spécial du Canada pour la préservation du souvenir de l'Holocauste et la lutte contre l'antisémitisme. Irwin Cotler est connu pour avoir représenté au niveau international l'Alliance internationale pour la mémoire de l'Holocauste (AIMH) dont la définition du « nouvel antisémitisme » vise à qualifier toute critique d'Israël d'antisémite. Récompenser les activités méprisables de Cotler et ses attaques contre les luttes du peuple palestinien et de ses sympathisants à l'échelle mondiale pour les droits humains fondamentaux par cette nomination démontre clairement que la prétention des libéraux de Justin Trudeau d'être du côté des droits humains et de la liberté à la défense du peuple palestinien sonne faux.

Le vote sur la résolution affirmant le droit des Palestiniens à l'autodétermination a eu lieu au sein de la troisième commission des Nations unies qui, chaque année, examine un ensemble de 16 résolutions sur des questions importantes auxquelles le peuple palestinien est confronté. Les résolutions, énumérées ci-dessous, sont maintenant soumises à l'Assemblée générale des Nations unies pour débat et vote en session plénière en décembre cette année. Cliquer sur les titres abrégés ci-dessous pour avoir accès à l'information détaillée.

1. Ressources naturelles : « Souveraineté permanente du peuple palestinien dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, et de la population arabe dans le Golan syrien occupé sur leurs ressources naturelles »

La résolution en bref attire l'attention sur les droits inaliénables du peuple palestinien et de la population du Golan syrien occupé sur leurs ressources naturelles, y compris la terre, l'eau et les ressources énergétiques. Exige d'Israël de cesser d'endommager ou d'exploiter ces ressources.

2. Autodétermination : « Le droit du peuple palestinien à l'autodétermination »

La résolution en bref réaffirme le droit du peuple Palestinien à l'autodétermination, incluant le droit à un État indépendant palestinien.

3. Assistance aux Palestiniens

La résolution en bref demande à la communauté internationale d'augmenter son aide humanitaire aux Palestiniens.

4. Pratiques israéliennes : « Pratiques israéliennes affectant les droits de l'homme du peuple palestinien dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est »

La résolution en bref demande qu'Israël cesse la violation du droit international dans les territoires palestiniens occupés et appelle à la protection internationale de la population civile palestinienne.

5. Colonies : « Les colonies de peuplement israéliennes dans le territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, et le Golan syrien occupé »

La résolution en bref réaffirme que les colonies de peuplement israéliennes sont illégales et un obstacle à la paix, et demande aux membres de l'ONU de faire la distinction dans leurs opérations pertinentes entre Israël et ses colonies.

6. Applicabilité de la Convention de Genève : « Applicabilité de la Convention de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre, du 12 août 1949, au Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, et aux autres territoires arabes occupés »

La résolution en bref réaffirme que la Convention de Genève est applicable à l'occupation israélienne, et demande à Israël de respecter le droit international.

7. Comité spécial : « Travaux du Comité spécial chargé d'enquêter sur les pratiques israéliennes affectant les droits de l'homme du peuple palestinien et des autres Arabes des territoires occupés »

La résolution en bref demande au « Comité spécial » de l'ONU sur cette question de continuer à enquêter sur les politiques et pratiques israéliennes dans les territoires palestiniens occupés.

8. Biens des réfugiés : « Biens appartenant à des réfugiés de Palestine et produit de ces biens »

La résolution en bref : Réaffirme que les réfugiés palestiniens ont droit à leurs biens, et demande à l'ONU de protéger les biens arabes et les droits de propriété en Israël.

9. Opérations de l'UNRWA : « Opérations de l'Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient »

La résolution en bref reconnaît le travail de l'Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA), l'agence responsable des réfugiés palestiniens, et demande à la communauté internationale de le soutenir.

10. Personnes déplacées 1967 : « Personnes déplacées du fait des hostilités de juin 1967 et des hostilités postérieures »

La résolution en bref réaffirme le droit de toutes les personnes déplacées du fait des hostilités de juin 1967 et des hostilités postérieures de retourner dans leurs foyers ou anciens lieux de résidence dans les territoires occupés par Israël depuis 1967.

11. Assistance à l'UNRWA : « Aide aux réfugiés de Palestine »

La résolution en bref étend le mandat de l'office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA), qui est l'agence responsable des réfugiés palestiniens.

12. Occupation de Jérusalem Est : « Jérusalem »

La résolution en bref condamne l'occupation d'Israël de Jérusalem Est comme étant illégale, appelle à une solution juste et durable qui tienne compte des préoccupations légitimes des Israéliens et des Palestiniens, et demande à toutes les parties de respecter le statu quo historique en ce qui concerne les lieux saints.

13. Règlement pacifique : « Règlement pacifique de la question de Palestine »

La résolution en bref appelle à une paix globale, juste et durable au Moyen-Orient, demande à Israël de se retirer des territoires palestiniens occupés depuis 1967, incluant Jérusalem Est, et demande à la communauté internationale de ne reconnaître aucune modification unilatérale des frontières d'avant 1967.

14. Programme d'information spécial : « Programme d'information spécial sur la question de Palestine du Département de la communication globale du Secrétariat »

La résolution en bref étend le mandat du « programme d'information spécial sur la question de Palestine » qui est assuré par le département de la communication globale du Secrétariat de l'ONU (anciennement département de l'information publique). Sous ce programme, le département collecte, archive et distribue de nombreuses informations sur la Palestine, y compris les activités connexes des Nations unies.

15. DPR : « Division des droits des Palestiniens du Secrétariat »

La résolution en bref renouvelle le mandat de la Division des droits des Palestiniens du Secrétariat de l'ONU, qui suit l'évolution de la situation en Palestine, organise des réunions et des manifestations et gère le système d'information des Nations unies sur la question de la Palestine (UNISPAL).

16. CEIRPP : « Comité pour l'exercice des droits inaliénables du peuple palestinien »

La résolution en bref renouvelle le mandat du Comité pour l'exercice des droits inaliénables du peuple palestinien. Le comité a été établi en 1975, et a comme mandat de promouvoir la réalisation des droits inaliénables du peuple palestinien. Il organise des réunions et des évènements et dispose d'une variété de programmes d'information et de formation.

Pour voir le tableau de bord de l'ONU sur comment le Canada a voté dans le passé, cliquer ici.

(Photos : LML)

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Une invocation intéressée et dangereuse des victimes de l'Holocauste pour camoufler les crimes commis contre les Palestiniens

Le 25 novembre, le premier ministre Justin Trudeau a nommé Irwin Cotler envoyé spécial pour la préservation de la mémoire de l'Holocauste et la lutte contre l'antisémitisme. L'annonce de la nomination par le bureau du premier ministre mentionne que « M. Cotler a joué un rôle de leadership dans la lutte contre le racisme, l'antisémitisme et la haine pendant de nombreuses années. Il possède aussi une vaste expérience dans les domaines de la justice et des droits de la personne, notamment dans les affaires liées aux atrocités de masse. M. Cotler s'appuiera sur ces connaissances pour diriger la délégation du gouvernement du Canada auprès de l'Alliance internationale pour la mémoire de l'Holocauste (AIMH). »

Les Canadiens ne peuvent pas accepter la déclaration du cabinet du premier ministre car elle est pleine de contradictions et n'est pas fondée sur des faits. Les affirmations prétentieuses de « combattre la haine et l'intolérance » et de défendre les droits humains sont utilisées par le gouvernement canadien pour dissimuler le fait que sa principale priorité a été et continue d'être la défense du sionisme israélien. En ce qui concerne M. Cotler, les déclarations au sujet de sa « vaste expérience dans les domaines de la justice et des droits de la personne » ne résistent pas non plus à l'examen.

Loin de lutter contre le racisme et l'antisémitisme, la nomination de Cotler par Justin Trudeau sert à promouvoir davantage ses activités de promotion internationale de ce « nouveau » mouvement de « l'antisémitisme » qui cherche à qualifier la critique d'Israël d'antisémite. En tant que l'un des principaux soutiens du gouvernement canadien qui qualifie d'antisémite le mouvement Boycott, désinvestissement et sanctions (BDS) pour les droits humains des Palestiniens, Cotler a également montré son mépris pour les droits humains.

En tant que chef de la délégation du Canada auprès de l'AIMH, Cotler a l'approbation du gouvernement pour poursuivre la campagne de mise en oeuvre de la redéfinition de l'antisémitisme de l'AIMH. L'AIMH a déjà une longue feuille de route de suppression des voix des défenseurs des droits humains des Palestiniens dans le monde et elle veut étendre cette définition pour réduire encore d'autres voix au silence.

La définition de l'antisémitisme de l'AIMH s'énonce ainsi :

« L'antisémitisme est une certaine perception des Juifs qui peut se manifester par une haine à leur égard. Les manifestations rhétoriques et physiques de l'antisémitisme visent des individus juifs ou non et/ou leurs biens, des institutions communautaires et des lieux de culte. »

Deux des activités que l'AIMH considère comme un comportement antisémite sont :

« en affirmant par exemple que l'existence de l'État d'Israël est le fruit d'une entreprise raciste »

« l'établissement de comparaisons entre la politique israélienne contemporaine et celle des Nazis »

Cotler tente de justifier la nécessité de cette nouvelle définition en affirmant qu'une nouvelle forme d'antisémitisme existe. Dans un article de 2010 paru dans le National Post, Cotler déclarait :

« En un mot, l'antisémitisme classique est la discrimination, le déni ou les atteintes aux droits des Juifs de vivre en tant que membres égaux de la société dans laquelle ils vivent. Le nouvel antisémitisme implique la discrimination, le déni ou l'attaque du droit du peuple juif à vivre en tant que membre à part égale de la famille des nations, qui ciblent Israël en tant que collectivité juive parmi les nations[1]. »

Le 25 novembre, Trudeau a déclaré que Cotler « soutiendra également les efforts de promotion et de sensibilisation déployés auprès des Canadiens, de la société civile et du milieu universitaire en vue de faire progresser l'adhésion à cette définition à travers le pays et son adoption à l'échelle internationale. »

Tout cet argument est intéressé et malhonnête parce que le sionisme, qui est une idéologie d'État, est attribué au peuple juif dans son ensemble. C'est doublement malhonnête parce que ces soi-disant défenseurs du droit à l'autodétermination n'ont pas un mot à dire sur la violation continue des droits humains du peuple palestinien sauf de qualifier leur juste lutte de terrorisme.

Voix juives indépendantes (VJI) documente des exemples dans plusieurs pays où la définition de l'AIMH a été utilisée – ou des tentatives ont été faites – pour annuler des événements ou faire taire les mouvements de solidarité palestiniens [2].

En tant que président du Centre Raoul Wallenberg pour les droits de la personne, Cotler s'est davantage révélé comme un apologiste des violations impérialistes de la souveraineté des nations dans leur quête pour la domination mondiale. Sous couvert de défense des droits humains et sous la présidence de Cotler, le Centre Wallenberg promeut activement la doctrine impérialiste de la « responsabilité de protéger » (R2P), qui est utilisée pour justifier le changement de régime et l'ingérence étrangère contre tout pays qui ne se soumet pas au diktat impérialiste.

Dans un article publié le 28 février 2011 dans le New York Times, intitulé « La Libye et la responsabilité de protéger », dont Cotler est un des auteurs, on peut lire :

« La situation en Libye est un cas type pour le Conseil de sécurité et sa mise en oeuvre de la doctrine de la responsabilité de protéger. Et pourtant un fait demeure. Comme l'a dit le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon : 'perdre du temps, c'est perdre des vies'. Le Conseil de sécurité doit en faire plus – et rapidement. Il relève de notre responsabilité collective de veiller à ce que la responsabilité de protéger soit une approche efficace dans la protection des peuples et des droits humains.' »

Il est maintenant bien connu que nombre des « atrocités de masse » attribuées au dirigeant libyen Mouammar Kadhafi, que Cotler avait si ardemment condamnées, n'étaient que des fabrications entretenues pour justifier l'agression militaire qui a mené à l'anéantissement de la Libye par les États-Unis et les pays membres de l'OTAN, dont le Canada.

Maintenant, Cotler continue de jouer son rôle sinistre, tentant de justifier les ambitions des impérialistes américains au Venezuela. Le magazine Foreign Policy a publié un article cosigné par Irwin Cotler le 6 février 2019 portant le titre « Reconnaître Juan Guaido comme dirigeant du Venezuela n'est pas un coup, c'est embrasser la démocratie. » Une fois de plus, Cotler se présente comme le sauveur du peuple contre « l'assaut brutal et criminel de Maduro contre l'ordre démocratique libéral » et l'impérialisme américain est justifié dans son recours à tous les moyens nécessaires pour « accomplir la transition vers une gouvernance démocratique ».

La nomination de Cotler intervient alors que des crimes sont commis contre le peuple palestinien dans les territoires occupés, en particulier à Gaza, où, depuis 14 ans, le peuple a subi des bombardements continus et des attaques militaires contre des civils par l'armée israélienne. Israël a transformé Gaza en la plus grande prison à ciel ouvert du monde où plus de 2 millions de personnes sont attaquées et forcées de vivre dans des conditions inhumaines.

Ces actes barbares sont condamnés par les peuples du monde entier et Israël cherche désespérément à détourner l'attention de ses responsabilités en tant que puissance occupante et de sa construction continue de colonies illégales sur les terres palestiniennes. Une puissance occupante est tenue d'assurer la sécurité publique, des normes d'hygiène et de santé publique suffisantes, ainsi que l'alimentation et les soins médicaux de la population sous occupation. Les punitions collectives, régulièrement appliquées par Israël, sont interdites.

Avec l'adoption de la « Loi sur l'État-nation », Israël est devenu un État officiellement discriminatoire sur la base de la religion et de la politique israélienne qui consiste à détruire systématiquement les maisons palestiniennes à Jérusalem-Est tout en construisant des colonies illégales dans les territoires palestiniens occupés, l'une des méthodes de nettoyage ethnique. Elle a été utilisée depuis 1948 pour chasser les Palestiniens de leurs terres. [3] Ces actes et ces violations criminels du droit international sont ce qu'Irwin Cotler continuera d'essayer de dissimuler et il utilisera sa position d'envoyé spécial du Canada pour la préservation du souvenir de l'Holocauste pour renverser la vérité et suggérer que l'État sioniste est la victime d'antisémitisme.

Cela ne doit pas passer ! Le gouvernement canadien se couvre de honte en invoquant la mémoire de l'Holocauste européen pour justifier que de telles souffrances soient infligées au peuple palestinien.

En outre, associer le nom de Cotler aux victimes de l'Holocauste est une insulte aux survivants de l'Holocauste et à leurs familles dont la souffrance est utilisée pour promouvoir le même racisme débridé et la même mentalité obscurantiste des sionistes qui ont causé tant d'oppression et de misère dans le passé.

Note

1. Selon le site Web, « L'AIMH (anciennement groupe de travail sur la coopération internationale sur l'éducation, le souvenir et la recherche sur l'Holocauste, ou ITF) a été lancé en 1998 par l'ancien premier ministre suédois Goran Persson. Aujourd'hui, les membres de l'AIMH se composent de 34 pays membres, dont chacun reconnaît que la coordination politique internationale est impérative pour renforcer l'engagement moral des sociétés et lutter contre la négation croissante de l'Holocauste et l'antisémitisme.

« Le réseau d'experts de confiance de l'AIMH partage leurs connaissances sur les signes avant-coureurs du génocide actuel et l'éducation sur l'Holocauste. Ces connaissances soutiennent les décideurs politiques et les multiplicateurs de l'éducation dans leurs efforts pour développer des programmes efficaces et informent les responsables gouvernementaux et les ONG actives dans les initiatives mondiales de prévention du génocide.

« La Déclaration du Forum International de Stockholm sur l'Holocauste (ou « Déclaration de Stockholm ») est le document fondateur de l'AIMH et continue de servir d'affirmation permanente de l'engagement de chaque pays membre de l'AIMH envers des principes partagés.

« Cette déclaration est le résultat du Forum international organisé à Stockholm du 27 au 29 janvier 2000 par l'ancien premier ministre suédois Goran Persson. Le Forum a réuni les représentants de 46 gouvernements, dont 23 chefs d'État ou premiers ministres et 14 vice-premiers ministres ou ministres.

« Leur vision est restée intacte, inchangée au cours des années suivantes, démontrant sa valeur universelle et durable. » [LINK to : www.holocaustremembrance.com/about-us]

2. Le document VJI peut être trouvé ici.

3. La loi nationale de l'État est la principale législation qui fonde les droits sur la religion. Voici les trois points principaux de la loi :

i) Le « droit d'exercer l'autodétermination nationale » en Israël est « propre au peuple juif ».

ii) L'hébreu est la langue officielle d'Israël. L'arabe – la langue largement parlée par les Arabes israéliens – est réduit à un « statut spécial ».

iii) Elle reconnaît la « colonie juive » comme une « valeur nationale » et exige que l'État « s'efforce d'encourager et de promouvoir son établissement et son développement ».

La plus récente mise en oeuvre de la loi de l'État-nation d'Israël a eu lieu à Karmiel. Le quotidien Haaretz publiait l'article suivant le 1 décembre 2020 :

« En novembre 2020, se servant de la loi comme justification, les tribunaux de première instance d'Israël ont décidé que Karmiel est une ‘ville juive' et que les écoles de langue arabe ou le transport scolaire pour les enfants arabes étaient susceptibles d'en modifier l'équilibre démographique et seraient préjudiciables à son identité, empêchant à toutes fins pratiques l'accès aux écoles par les enfants arabes dans la ville du district nord d'Israël, Karmiel. Les tribunaux ont laissé entendre que toute facilitation de l'accès pourrait inciter les citoyens arabes palestiniens d'Israël à s'installer en ville, nuisant ainsi à l'‘identité juive'. »

Dans un éditorial de Haaretz au sujet de cette décision, on affirme : « La loi de l'État-nation a légalisé le racisme et la suprématie juive, et autorise l'État à discriminer contre les citoyens arabes en les empêchant de vivre dans l'endroit de leur choix dans des conditions équitables, aggravant ainsi la ségrégation ethnique en Israël. »

(Photos : LML, Ralph RH)

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Des développements inquiétants aux États-Unis

Les pouvoirs présidentiels sont utilisés pour attaquer et restructurer la main-d'oeuvre fédérale

En octobre, le président des États-Unis Donald Trump a promulgué un décret présidentiel appelant à ce que possiblement des centaines de milliers de travailleurs fédéraux soient reclassifiés pour les transformer à toutes fins pratiques en travailleurs « de gré à gré ». Cette mesure permettrait à l'exécutif de congédier des travailleurs sans raison et sans recours, d'en embaucher d'autres sans tenir compte des conventions collectives et des normes existantes et de leur enlever toute autre forme de protection. Ces travailleurs se verraient également nié le droit à la représentation syndicale. Tous les travailleurs fédéraux considérés comme occupant des « postes d'élaboration de politiques, de création de politiques ou de défense de politiques » doivent être reclassifiés vers cette nouvelle autorité d'embauche dite de « service exempté », portant l'appellation Schedule F. Le président élu Biden n'a pas encore dit s'il allait tenter d'abroger ce décret.

Trump a ordonné aux responsables de départements d'identifier tous ces travailleurs pas plus tard que le 19 janvier, le jour avant qu'il doive, à ce stade, quitter ses fonctions. Le 23 novembre, on rapporte que le Bureau de la gestion et du budget (OMB) entreprendra de reclassifier 88 % de sa main-d'oeuvre (425 travailleurs) au sein de la Schedule F. Bien qu'il soit relativement petit, l'OMB joue un rôle important dans la proposition et la gestion des affaires budgétaires. Le changement accroît ainsi l'autorité du président sur ces questions. Le département de l'Énergie serait lui aussi en train de rapidement reclassifier ses travailleurs.

L'objectif du décret présidentiel est clairement d'enlever tout obstacle actuel empêchant l'exécutif d'embaucher et de congédier arbitrairement les travailleurs fédéraux, y compris les travailleurs ayant le plus d'ancienneté : « Afin de mener à bien les nombreuses activités attribuées à la branche exécutive en vertu de la loi [...] il est nécessaire que le président ait le pouvoir de gestion nécessaire sur ces effectifs particuliers de professionnels [...] Les agences doivent avoir une plus grande flexibilité dans le choix de ces employés qu'elles en ont dans le processus compétitif actuel des services. [...] Les agences ont besoin de la flexibilité nécessaire pour retirer rapidement les employés peu performants de ces postes sans avoir à faire face à des retards importants ou à des litiges. »

La mesure est une prise en charge directe par des intérêts privés des arrangements de la société civile. C'est une attaque contre la main-d'oeuvre fédérale syndiquée par laquelle on met fin aux pratiques convenues touchant aux normes régissant l'embauche, le congédiement et le rendement. C'est aussi une menace contre tous les travailleurs et une pression à la baisse sur leurs conditions de travail. Conformément à la tendance générale, un contrat n'est plus un contrat et un service ne relève plus du bien public.

Les travailleurs fédéraux ont contesté le décret présidentiel et exhorté le Congrès à y faire entrave. Le président de la Fédération américaine des employés gouvernementaux (AFGE), le plus grand syndicat de travailleurs fédéraux, avec 670 000 membres, a dit : « Il s'agit de la plus grande attaque contre la fonction publique de notre vivant. Le président n'épargne aucun effort pour politiser et corrompre le service professionnel. Ce décret présidentiel élimine les droits en vertu des procédures établies et la protection de centaines de milliers d'employés fédéraux et autorisera des élus politiques et d'autres représentants à embaucher et congédier ces travailleurs à volonté. » Le Syndicat national des employés du Trésor, qui comprend les travailleurs de l'OMB, a intenté un procès contestant la légalité de ce décret qui remplace la loi existante.

Le processus signifie que de nombreux responsables de départements gouvernementaux décideront quels travailleurs feront désormais partie de la nouvelle catégorie. Leurs recommandations seront ensuite envoyées au Bureau de la gestion du personnel (BGP) qui a le dernier mot. Cependant, il n'y a aucune définition de ce qui constitue « des postes d'élaboration de politiques, de création de politique ou de défense de politiques ». Un mémorandum de directives du BGP affirme : « Ni le code des États-Unis ni les précédents judiciaires ne définissent précisément ces termes dans le contexte de l'usage statutaire. » Il réitère ensuite les généralisations fournies par le décret présidentiel, qui, elles, sont très vastes. Elles comprennent tout travailleur qui participe à « des négociations de convention collective », « qui révise, fait circuler ou oeuvre à des règlements ou à des délibérations proposées », « participe de façon importante au développement ou à l'ébauche de règlements » ou « à un travail important relié à la politique au sein d'une agence ». La participation à une de ces catégories signifierait que quelqu'un pourrait être reclassifié. Le BGP pourrait autoriser des congédiements même avant le 19 janvier, basés sur les recommandations des responsables de départements.

Normalement, la vaste bureaucratie civile reste en place peu importe les changements d'administration. Celle-ci comprend par exemple la plupart des 760 000 travailleurs de la fonction publique au Pentagone et plusieurs des 240 000 travailleurs au département de la Sécurité nationale. Le décret ne fait pas que créer une main-d'oeuvre « de gré à gré ». Il restructure aussi cette bureaucratie pour qu'elle soit instable et, conformément aux calculs intéressés des mandataires de cet ordre exécutif, une force plus malléable à la disposition de l'exécutif. Il sert aussi à effacer la mémoire qu'une main-d'oeuvre de longue date conserve et qui touche aux normes pour elle-même et pour la gouvernance dans son ensemble, y compris les normes régissant la reddition de comptes.

Il y a présentement des propositions au Congrès à l'effet de ne pas financer le décret présidentiel, bien qu'en toute vraisemblance elles ne réussiront pas à empêcher divers responsables de départements de le mettre en oeuvre ni le début des congédiements. Des lettres ont aussi été envoyées au Congrès en opposition au décret. Elles mettent en lumière l'aspect de restructuration et de consolidation du pouvoir exécutif. Au sujet des protections entourant les embauches et les congédiements, une des lettres fait valoir que les arrangements actuels « n'existent pas que pour les fonctionnaires eux-mêmes, mais plutôt pour veiller à ce que le gouvernement fournisse des services à l'abri d'une influence politique indue. Ils assurent une continuité gouvernementale malgré les changements d'administration, et préservent la connaissance et l'expertise institutionnelle au sein du gouvernement. Ils protègent l'État de droit qui, lui, protège les employés loyaux à la constitution plutôt qu'à un parti politique. Il est urgent que le Congrès agisse, en particulier en raison du fait que nous sommes dans une période de transition. Toute inaction va créer un dangereux précédent, indicatif d'une indifférence de la part du Congrès face à l'expansion du pouvoir exécutif. Le décret présidentiel met fin à un cadre législatif de longue date qui assure des services publics non partisans – un cadre qui veille à ce que les projets de loi adoptés par le Congrès soient mis en oeuvre tels que rédigés, et que les fonds qu'ils contrôlent seront distribués tels que stipulé. Si le Congrès ne dit rien, c'est qu'il accepte non seulement ce décret mais toutes futures mesures administratives visant à démanteler les paramètres législatifs en place pour promouvoir une fonction publique non partisane. »

La mission de Donald Trump en tant que président était de briser les liens entre les structures actuelles de gouvernance et de l'État de droit aux pays et à l'étranger pour poursuivre la politique d'expulsions et la guerre de drone de Barak Obama. Les actions de Trump à la frontière, ses camps de détention pour les enfants, sa répression des manifestants par le biais de forces fédérales et, plus récemment, son mépris pour les protocoles de transition, n'en sont que quelques exemples. Il a consolidé un gouvernement de pouvoirs de police en éliminant les limitations de ces pouvoirs et en y ayant recours plus ouvertement au pays et à l'étranger. Plus l'exécutif concentre le monopole du recours à la force entre ses mains, plus grande est sa capacité d'agir avec impunité, ce qui finit par sembler « normal ». Le décret présidentiel est un exemple des tentatives d'attaquer massivement la main-d'oeuvre fédérale et de la restructurer en faveur des pouvoirs de police de l'exécutif. Ce qui est détruit, c'est le concept même d'un service civil voué au service du bien public – ce qui est encore plus évident du fait que nombre de ces travailleurs jouent un rôle primordial pour assurer le fonctionnement des services de santé et des programmes sociaux pendant la pandémie de la COVID-19.

Il en ressort que les travailleurs de tous les secteurs et de tous les milieux doivent créer de nouvelles formes d'organisation et de résistance puisque tout ce que le président fait n'est pas contraire à la constitution. Il est crucial de ne pas laisser l'espace du changement aux archiréactionnaires qui tiennent à tout prix à soumettre l'ensemble de la main-d'oeuvre à des intérêts privés étroits qui ne rendent de comptes à personne.

(Photos : AFGE)

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Le Congrès menace le public de fermer le gouvernement alors que les cas de COVID-19 atteignent des niveaux records

Pour éviter la fermeture du gouvernement le 11 décembre, le Congrès américain a maintenant moins d'une semaine pour adopter son projet de loi budgétaire omnibus géant de 1,4 billion de dollars ou une résolution provisoire qui évite la fermeture. Dans des conditions où le nombre d'infections, d'hospitalisations et de décès liés à la COVID-19 ont atteint des niveaux records, l'incapacité du Congrès d'adopter un budget est une menace atroce pour le public. Des centaines de milliers de travailleurs fédéraux, dont beaucoup sont essentiels à la prestation de services de santé et de bien-être, pourraient être licenciés et les services en général réduits.

Le projet de loi Loi d'autorisation de la défense nationale, qui prévoit 740 milliards de dollars par an pour la guerre, n'a pas non plus été adopté. Il a facilement été adoptée depuis 59 ans, chaque année avec de grandes majorités – ce qui indique le soutien commun des dirigeants pour les guerres d'agression et d'ingérence américaines à l'étranger.

Il n'y a eu aucun progrès en ce qui concerne le versement de fonds d'urgence pour la COVID-19. Les échecs sur tous les fronts soulignent que les conflits entre les dirigeants restent non résolus et que le service de ce qui constitue « le public » de même que la conception du « bien public » et de ce qui constitue « l'intérêt public » sont obsolètes.

Le dysfonctionnement illustre que la concentration du pouvoir arbitraire au sein du Bureau du président ne résout pas non plus les problèmes. Les menaces de Trump de mettre son veto sur les projets de loi sont un facteur principal de la confrontation actuelle et reflètent ses efforts pour renforcer les pouvoirs exécutifs sur les questions budgétaires. Il a menacé de mettre son veto sur trois projets de loi devant le Congrès qui traitent de questions budgétaires s'ils n'incluaient pas ses revendications. Même le chef du Sénat, Mitch McConnell, un allié clé de Trump, a tiré cette conclusion – en s'adressant aux représentants du Congrès, en déclarant : « Je veux rappeler à tout le monde que pour obtenir des résultats, il faut avoir la signature d'un président » En 2018, le refus de Trump de signer le projet de loi budgétaire a déclenché la plus longue fermeture du gouvernement à ce jour.

Le président du Comité des crédits du Sénat, Richard Shelby (Alabama), a indiqué le 2 décembre qu'une résolution « provisoire » de continuation semble probable pour le budget. Un projet de loi de « relance » peut également être inclus dans une telle mesure. Cependant, la Maison-Blanche a déclaré qu'elle ne garantirait pas que Trump signe un tel projet et évite une fermeture. 

Une nouvelle proposition de 908 milliards de dollars de financement « de relance » est actuellement en discussion, bien moins que les 2,2 billions de dollars adoptés dans un projet de loi de la Chambre, mais non débattus au Sénat. La nouvelle proposition n'inclut aucun fonds direct pour les particuliers, 300 $ au lieu de 600 $ par semaine pour les fonds de chômage prolongé et aucun des fonds connexes pour l'équipement de protection et les tests de dépistage. McConnell et la Maison-Blanche ne demandent que 332,7 milliards de dollars. Les projets de loi budgétaires avaient été un moyen de répartir les fonds publics entre les forces monopolistes rivales pour atténuer les conflits - un autre mécanisme qui ne fonctionne plus.

Pour le projet de loi Loi d'autorisation de la défense nationale, un « rapport de conférence » de 4 500 pages qui réconcilie les projets de loi du Sénat et de la Chambre et ne permet aucun amendement, a été publié. Il devrait être adopté par les deux chambres la semaine prochaine. Il reflète des différences, y compris au sein de la coalition républicaine, sur des questions telles que le maintien des troupes en Allemagne et en Afghanistan, le changement de nom des bases militaires en l'honneur des généraux confédérés et l'utilisation de forces fédérales non identifiées contre les manifestants. Trump a continué à dire qu'il y mettrait son veto.

Un autre problème soulevé par Trump est l'élimination d'une partie d'une loi fédérale, connue sous le nom de l'article 230. Elle protège les entreprises comme Facebook et Twitter de poursuites face à des publications de leurs utilisateurs. Le conflit sur la question de savoir comment et si ces géants de l'Internet devraient supprimer ou censurer le contenu, ou le marquer comme « litigieux », s'est intensifié avec le conflit électoral et les allégations répétées de fraude de Trump. Le rapport de la conférence n'élimine pas l'article 230, les républicains affirmant que « 230 n'a rien à voir avec les forces armées ». Le sénateur Jim Inhofe (Oklahoma), président républicain du Comité des services armés du Sénat, a déclaré que cela ne faisait pas partie du projet de loi. C'est une indication que les alliances au sein et entre les démocrates et les républicains et le Congrès et le président fonctionnent plus comme des coalitions – à la fois en rivalité et en fusion – et sont fluides plutôt que fixes.

Que l'un ou l'autre de ces projets de loi soit adopté ou non, le dysfonctionnement du Congrès et les mécanismes habituels de résolution des conflits – tels que la répartition du budget et l'élection elle-même – demeurent. Les secours pour la COVID-19 pour le public sont urgents. Mais en fait de politique et de relations politiques de gouvernance – qui incluent les besoins publics et prévoient des négociations pour parvenir à des règlements – il n'y a rien eu depuis la Loi sur l'aide, le soulagement et la sécurité économique du coronavirus (Loi CARES) en mars. Même un accord pour garantir que les 455 milliards de dollars de fonds restants de la Loi CARES parviennent au public n'est pas possible. Ajoutez les efforts de Trump pour saper davantage le Congrès en tant qu'organe législatif tout en usurpant plus de pouvoir pour la présidence, il est évident que la configuration existante ne peut qu'apporter plus de crises et de dysfonctionnements. C'est le peuple, exclus de l'équation dans tous ces conflits, qui est décisif pour amener les changements nécessaires et créer de nouvelles institutions gouvernementales qui placent au centre le peuple et ses droits, au pays et à l'étranger.


(Voice of Revolution. Photos : California Nurses Assn, SEIU)

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L'affrontement électoral n'est toujours pas résolu

Le président Trump refuse toujours de concéder sa défaite. Les principaux États clés tels que la Pennsylvanie, le Michigan, la Géorgie et le Nevada ont tous certifié le vote. Un nombre suffisant d'États l'ont fait, accordant à Biden plus que les 270 votes au Collège électoral requis pour l'élection. Malgré tout, Trump a publié une vidéo de 46 minutes sur les réseaux sociaux dans laquelle il prétend qu'il y a eu fraude.

« Cette élection est sans doute la plus frauduleuse qu'on n'ait jamais vue », a dit Trump. Il a ajouté que les résultats devraient être annulés et que la Cour suprême devrait intervenir. Il a dit : « Espérons qu'elle décidera dans l'intérêt de notre pays parce que notre pays ne peut pas vivre avec ce genre d'élection. »

Trump a aussi dit qu'il ne participera pas à l'investiture de Biden lors du Jour d'investiture, une étape importante de la traditionnelle « transition pacifique » du pouvoir. Reste à voir s'il va quitter ses fonctions sans concéder ou s'il va passer à l'action en déclarant une urgence nationale et en obstruant la transition.

Malgré l'obstination de Trump, d'autres membres de son administration ont concédé. Le procureur général William Barr a déclaré que le département de la justice n'avait trouvé aucune preuve de fraude électorale répandue qui pourrait changer le résultat de l'élection. Christopher Krebs, le directeur de l'Agence de la sécurité de l'infrastructure et de la cybersécurité du département de la Homeland Security, a aussi affirmé qu'il avait confiance dans l'intégrité de l'élection. Après avoir été congédié par Trump, il a dit, dans des rencontres publiques : « Le peuple américain doit faire confiance à 100 % à ses votes », et que les prétentions de Trump étaient « farfelues » et « absurdes ».

La majorité des républicains au Congrès n'ont rien dit, alors qu'ils reconnaissent la validité des élections au Congrès. Trump a attaqué les gouverneurs et les secrétaires d'État républicains comme ceux de la Géorgie et de l'Arizona, pour avoir certifié leurs élections en faveur de Biden. Les deux gouverneurs avaient été appuyés par Trump.

En Géorgie, la situation est particulièrement complexe, puisqu'un scrutin pour des sénateurs américains aura lieu le 5 janvier. Les alliés de Trump dans cet État ont utilisé le mot « trahison » en parlant du secrétaire d'État et ont déclaré que les responsables des élections devraient être abattus ou pendus. Les gens sont pourtant censés aller voter. Une des poursuites judiciaires des alliés de Trump empêche les responsables des élections de préparer les machines de votes pour les élections du 5 janvier. Le gouverneur et le secrétaire d'État ont demandé au tribunal de les autoriser à aller de l'avant, mais il n'y a pas encore eu de décision. Tout ceci crée une situation irrationnelle pour les électeurs.

Les nombreuses autorités rivales aux niveaux fédéral et des États ont créé une situation par laquelle non seulement les résultats sont contestés, mais le processus dans son ensemble est discrédité. Par exemple, la certification a mis en lumière que c'est une poignée de gens, tant républicains que démocrates, qui décident de certifier ou de ne pas certifier. Et la certification finale sera décidée par le Congrès le 6 janvier. Trump va évidemment s'entêter jusqu'à cette date, bien que les équipes certifiées pour le Collège électoral favorables à Biden doivent se réunir le 14 décembre. Les résultats seront ensuite envoyés au Congrès. Reste à savoir s'il y aura une fermeture du gouvernement le 11 décembre, ce qui reste toujours fort possible, et quel sera l'impact sur le vote.

Parler de trahison c'est utiliser un langage de guerre civile et un conflit violent est toujours possible. Il semblerait, cependant, qu'avec des forces comme celles de Barr qui concèdent et celles du monde des grandes entreprises qui l'exigent, les dirigeants réussiront à éviter un affrontement pour l'instant en forçant Trump à quitter ses fonctions, qu'il concède sa défaite ou non. Biden, cependant, n'a toujours pas l'autorité requise. Pour cette raison et parce que l'autorité présidentielle a usurpé des pouvoirs que la constitution accorde aux États, les conflits et les rivalités continueront, non seulement entre les autorités fédérales et des États, mais aussi au sein des bureaucraties présidentielles, militaires et civiles, et entre elles. Les forces de tous les côtés parlent toujours de trahison.

Peu importe leurs conflits, les oligarques au pouvoir agissent tous dans le but de priver le peuple du pouvoir et de maintenir les riches au pouvoir. Les réformes proposées vont dans ce sens, tentant de rétablir la crédibilité du processus électoral tout en préservant sa fraude fondamentale qui est que, dans les faits, ce processus prive le peuple du pouvoir et ne reflète pas ses intérêts et sa lutte pour une direction prosociale et antiguerre du pays. Les élections ont mis en lumière encore plus que les rapports de force existants doivent être changés et que c'est le peuple lui-même en continuant de lutter pour les droits et en s'organisant qui réussira à apporter ce changement.

(Voice of Revolution. Photos : VOR, sarah4justice)

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Développements au Guatemala

Au milieu d'appels à la démission, le président sollicite le soutien de l'Organisation des États américains


21 novembre 2020 - Manifestation sur la place de la Constitution

Des milliers de Guatémaltèques sont toujours dans les rues pour exiger la démission du président conservateur Alejandro Giammattei, qu'ils accusent de ne pas allouer suffisamment de ressources pour lutter contre la pauvreté et les inégalités, tandis que ce dernier poursuit sa répression brutale et invoque la Charte démocratique interaméricaine.

Approuvée en 2001, cette charte contient une série de mesures visant à rétablir l'ordre démocratique dans les nations qui l'invoquent et à garantir le respect des droits humains fondamentaux. Alejandro Giammattei a ajouté qu'il avait communiqué avec le Secrétaire général de l'Organisation des États américains (OÉA), Luis Almagro, pour assurer un dialogue, et a exprimé son ouverture à une négociation inclusive qui conduirait à une entente entre les secteurs de la société.

La situation de grande instabilité politique a éclaté après qu'une énorme manifestation populaire qui s'est tenue le 21 novembre dans la partie historique de Guatemala, la capitale, s'est terminée par de nombreux incidents et l'incendie d'une partie du bâtiment où se trouve le Parlement.


21 novembre 2020 - Incendie de l'Assemblée législative au Guatemala

On soupçonne qu'il s'agissait d'une opération planifiée par le gouvernement pour saper la légitimité des manifestations. Ceux qui ont attaqué le bâtiment législatif étaient vêtus de noir et portaient des bâtons pour briser les fenêtres du bâtiment, mais à aucun moment ils n'ont été arrêtés par la police présente sur les lieux, selon le journal guatémaltèque Le Periódico.

Un soupçon supplémentaire est né du fait que la session de samedi du Congrès n'était pas clôturée, car le budget n'a été approuvé que des heures après. Des personnalités politiques et sociales du pays disent que le saccage de l'édifice parlementaire visait à discréditer la légitimité de l'immense manifestation, qui s'est déroulée dans un climat général de tranquillité jusqu'à l'attaque violente de la police.

Selon les chiffres officiels, un enfant sur deux de moins de cinq ans souffre de malnutrition chronique dans le pays et près de 60 % de la population guatémaltèque vit en dessous du seuil de pauvreté.

Le président a déclaré que les manifestations sont un moyen que les groupes minoritaires tentent d'utiliser pour mener un véritable coup d'État. Dans une déclaration antérieure, l'OÉA a reconnu le droit de manifestation, mais a condamné le vandalisme dénoncé par les autorités. Les porte-paroles des manifestants ont rejeté ces accusations.

L'Alliance pour les réformes, qui regroupe 40 organisations sociales, a exigé la démission du ministre de l'Intérieur, Gendri Reyes, à la suite de la répression de samedi. Le vice-président, Guillermo Castillo, qui s'était distancié de Giammattei, a exigé sa démission et a demandé au parquet d'enquêter sur l'incendie des bureaux du Congrès ainsi que sur la répression policière.


28 novembre 2020

Le budget approuvé laisse une large place à la corruption – un mal profondément enraciné dans le pays – car il ne prévoit pas de mécanismes de contrôle pour garantir une utilisation appropriée des ressources, accordant plus de ressources aux ministères qui ont fait l'objet d'énormes irrégularités au cours des dernières années, comme ceux des communications, des infrastructures et du logement.

La manifestation du 21 novembre s'est soldée par au moins 15 manifestants et 12 policiers blessés et plus de 30 arrestations. La répression policière s'est étendue à plusieurs départements du pays.

Le Congrès a approuvé des prêts de plus de 3,8 milliards de dollars pour lutter contre la pandémie, mais à peine 15 % de ces ressources sont parvenues aux Guatémaltèques. La COVID-19 a contaminé près de 120 000 personnes et plus de 4 000 personnes sont décédées dans ce pays de 17 millions d'habitants.

La raison des manifestations

Le Congrès, principalement composé du parti au pouvoir et des partis apparentés, a approuvé un budget de près de 12,8 milliards de dollars pour 2021, soit une augmentation de 25 % par rapport à cette année. La plupart des fonds sont affectés aux infrastructures du secteur privé et ne prévoient pas d'augmentation pour la santé ou l'éducation, ni pour la lutte contre la pauvreté et la malnutrition infantile.

Le Congrès a également affecté environ 65 000 $ pour les repas des députés, ce qui a scandalisé la population car à ce moment-là, la tempête Iota entrait dans le pays et causait des destructions, laissant les communautés pauvres isolées et sans nourriture – communautés déjà touchées par le récent passage d'un autre puissant ouragan, Eta, qui a fait 59 morts et près de 100 disparus.

Tout cela se produit dans une situation où les hôpitaux sont sans médicaments, les médecins sans salaire et le nombre de personnes touchées par la pandémie en augmentation. L'économie a souffert, des dizaines de milliers de personnes ont perdu leur emploi et les prix des denrées alimentaires et d'autres biens ont augmenté.

Pour cette raison, des appels ont été lancés pour manifester sur plusieurs places du pays, notamment à la « Plaza de la Constitucion » (anciennement Parc central), pour exiger la démission du président et des membres du Congrès, la fin de la corruption et l'annulation du budget 2021. Des milliers de manifestants portaient des pancartes exigeant la convocation d'une assemblée constituante.


21 novembre 2020 - manifestation à Antigua

Les questions se répètent : sommes-nous au bord d'un autre cycle de manifestations similaire à celui de 2015, lorsque des manifestations massives contre la corruption du gouvernement d'Otto Pérez Molina et de Roxana Baldetti ont eu lieu ? Atteindra-t-il des niveaux de confrontation violente ?

Ce qui est clair, c'est qu'il y a un sentiment de colère et d'indignation contre le gouvernement, qui s'est exprimé de diverses manières (pacifiques et violentes), alors qu'il ne peut pas et ne veut pas répondre aux revendications des citoyens et tente d'utiliser l'OÉA pour réprimer « démocratiquement » le peuple.

Gerardo Villagran del Corral est un anthropologue et économiste mexicain, associé au Centre latino-américain d'analyse stratégique (CLAE).

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