Numéro 24 - 14 avril 2020

Notes sur le secteur de l'énergie

Rivalités interimpérialistes et intercartels pour le contrôle du secteur énergétique


La lutte pour l'hégémonie mondiale de l'impérialisme américain

Le contrôle du secteur de l'énergie au Canada

Les questions que les gens se posent au sujet d'une économie et
d'un secteur sur lesquels ils n'ont aucun contrôle

La nécessité de changement dans le secteur de l'énergie

Comment la fracturation hydraulique aux États-Unis perturbe les marchés mondiaux du pétrole et du gaz


À titre d'information

Le projet de LNG Canada

Quelques exemples de projets énergétiques et de pipelines
annulés au Canada



Rivalités interimpérialistes et intercartels pour le contrôle
du secteur énergétique

La rivalité concernant les gazoducs
russes en Europe


La question principale pour les Canadiens pour ce qui est du secteur de l'énergie est « Qui contrôle et qui décide ? ». Pour affirmer une planification scientifique et rationnelle et la responsabilité sociale de la production et de la distribution d'hydrocardbures et des autres ressources énergétiques, le peuple doit arracher le contrôle de ce secteur aux cartels mondiaux.

La rivalité entre impérialistes dans le secteur énergétique s'est exacerbée en particulier depuis l'essor de la production par fracturation hydraulique du pétrole et du gaz naturel aux États-Unis. Le coup d'État en Ukraine et les positions anti-Russes du gouvernement du coup d'État forment la base des attaques contre les exportations de pétrole et de gaz en Europe. Les États-Unis, avec leur surplus actuel de gaz naturel relativement à la demande intérieure, et avec une situation semblable qui se développe dans le secteur du pétrole, mais sans le même empressement à l'exporter, ont lancé une campagne concertée pour supplanter l'énergie russe en Europe par le gaz naturel exporté des États-Unis sous forme de gaz naturel liquéfié (GNL).

Les visées hégémoniques mondiales des oligarques
américains de l'énergie

Avec la production accrue grâce à la fracturation hydraulique, les cartels énergétiques des États-Unis sont maintenant bien placés pour exporter une certaine quantité de pétrole et beaucoup de gaz naturel sous forme de GNL, et ils ont principalement l'Europe dans leur mire. En raison de la croissance rapide de l'approvisionnement intérieur, il y a eu un changement radical aux États-Unis en termes de la planification et de la construction de terminaux à compter de 2010-2011. Plusieurs terminaux complètement neufs conçus pour l'importation du GNL comptent ajouter, ou ont déjà commencé à ajouter, des usines de liquéfaction et ont l'intention de les utiliser plutôt comme des terminaux d'exportation.

En 2019, un grand nombre d'usines de regazéification ont été converties en installations de liquéfaction, par exemple celle de Sabine Pass, au Texas et d'autres. Sept usines de liquéfaction ont été construites ou sont en voie de construction aux États-Unis. Le 21 novembre 2019, les autorités américaines ont délivré des permis pour trois nouveaux terminaux d'exportation de gaz naturel liquéfié dans la vallée du Rio Grande au Texas. La Commission fédérale de réglementation énergétique a approuvé les permis de GNL Rio Grande, GNL Annova et GNL Texas au port de Brownsville.

L'obstacle majeur à l'accroissement des exportations américaines de GNL en Europe est la disponibilité du gaz russe beaucoup moins cher qui arrive par gazoduc. La quantité de gaz russe destinée à l'Europe va bientôt grandement s'accroître avec l'achèvement de la construction de deux nouveaux gazoducs : le Nord Stream 2 et le Turkstream.

Les États-Unis s'opposent violemment à ces deux gazoducs. Ils ont réussi à paralyser l'expansion du Nord Stream 2 en imposant des sanctions à tous les participants. Nord Stream 2 triplera la capacité actuelle. Il comprend le gazoduc sous-marin le plus long au monde qui relie la Russie à l'Allemagne par la mer Baltique pour éviter de passer par l'Ukraine. Les États-Unis ont aussi imposé des sanctions à toute compagnie participant au projet Turkstream, un gazoduc qui relie la Russie à la Turquie, d'où le gaz peut être transféré par les gazoducs existants vers l'Europe centrale. Les deux projets sont presque terminés, mais tardent en raison de l'opposition et des sanctions américaines.

La rivalité interimpérialiste et intercartels pour les ressources énergétiques et les marchés est due au contrôle de l'économie et de la politique par l'oligarchie financière. Ce contrôle empêche le peuple d'affirmer son contrôle sur le secteur énergétique et de se donner une nouvelle direction prosociale pour humaniser l'environnement social et naturel et empêcher la guerre.

Note

Les Canadiens en particulier seront intéressés de savoir que le cartel énergétique danois-britannique Royal Dutch Shell est un investisseur majeur dans le gazoduc Nord-Stream 2. Le cartel Shell est aussi le principal investisseur dans LNG Canada, qui construit un gazoduc dans le nord de la Colombie-Britannique, vers la côte à Kitimat. Une usine de liquéfaction est en construction à Kitimat et y convertira le gaz en GNL pour l'exporter en Asie.

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La lutte pour l'hégémonie mondiale
de l'impérialisme américain

Le développement rapide de la demande d'énergie en Chine et en Corée du sud au cours des dernières décennies et la demande élevée qui se maintient au Japon sont devenus une source de rivalité parmi les producteurs d'énergie existants et émergents. Avec de nouveaux pipelines vers la Chine, la Russie s'est imposée comme un grand fournisseur de pétrole et de gaz en rivalité avec l'Arabie saoudite et d'autres producteurs d'Asie de l'Ouest et d'Afrique et avec les nouveaux exportateurs de gaz naturel liquifié (GNL) aux États-Unis.

L'obstacle à l'acheminement des produits énergétiques russes aux grands marchés de la Corée du sud et du Japon est l'occupation militaire américaine de ces pays et le blocus contre la République populaire démocratique de Corée (RPDC).

La Russie et de nombreux oligarques au Japon et en Corée du sud aimeraient voir les oléoducs et les gazoducs traverser la Chine ou la Russie directement vers la RPDC et continuer à travers la Corée du sud et ensuite sous l'eau jusqu'à l'île de Honshu au Japon. Ils voudraient également que les lignes ferroviaires de la péninsule coréenne se branchent au réseau chinois via la nouvelle Route de la soie et l'initiative la Ceinture et la Route et par un possible tunnel vers le Japon.

La production américaine étant désormais supérieure à la demande américaine, l'enjeu pour une faction des impérialistes américains est dorénavant un meilleur accès aux marchés de l'énergie en Asie et une augmentation, sinon une stabilisation, des prix du pétrole et du gaz. Lorsque les États-Unis étaient un grand importateur de pétrole et de gaz, ils ont cherché à prendre le contrôle des fournisseurs étrangers et à maintenir les prix bas. Ils étaient la principale opposition aux tentatives de l'OPEP de restreindre l'approvisionnement en pétrole et en gaz sur le marché international afin de stabiliser les prix au moins à leur prix de production.

Pour les États-Unis, la manne de la production d'hydrocarbures par fracturation hydraulique est devenue un casse-tête. L'augmentation soudaine de la quantité de pétrole et de gaz disponible a entraîné une pression à la baisse sur les prix. Pour s'attaquer à ce problème, l'impérialisme américain a déclenché de nouvelles attaques contre d'autres producteurs pour supprimer la production de pétrole et de gaz et s'emparer de leurs marchés.

Dans une campagne d'une frénésie sans précédent, les États-Unis ont déclenché des sanctions et des boycottages contre les producteurs de pétrole et de gaz, et des invasions et des guerres. Jusqu'à récemment, avant que la fracturation hydraulique ne permette aux États-Unis de devenir autosuffisants en pétrole, le Venezuela était un de leurs principaux fournisseurs. Par des sanctions et le sabotage, les impérialistes américains ont détruit une grande partie de la production et des marchés pétroliers du Venezuela. La production pétrolière et l'économie de l'Iran sont effectivement entravées par les sanctions américaines tandis que les invasions et la guerre ont détruit une grande partie de la production d'énergie en Libye et en Syrie. Les impérialistes américains ont fait pression sur les entreprises et les gouvernements européens pour qu'ils s'opposent aux projets pétroliers et gaziers russes par le biais de sanctions telles que celles contre la construction des gazoducs Nord Stream 2 et Turkstream.

En revanche, le Japon, la Corée du sud, la Corée du nord et la Chine souhaitent une augmentation de la production de pétrole et de gaz, des prix plus bas et un plus grand nombre de fournisseurs. Le Japon et la péninsule coréenne ne disposent pas d'importantes réserves prouvées de pétrole et de gaz alors que la Chine commence à peine à explorer et à développer ses ressources énergétiques. Elle produit actuellement 3,9 millions de barils par jour, un peu moins que la production canadienne, qui est de 4,6 millions de barils par jour, mais bien en dessous des 15 millions de barils par jour que produisent les États-Unis.

Plusieurs parmi l'élite dirigeante au Japon accueilleraient favorablement la fin de l'isolement de la RPDC car, à leur avis, cela ouvrirait la possibilité que le gaz et le pétrole russes soient acheminés vers le Japon via la péninsule coréenne, puis sous l'eau jusqu'à Honshu. De plus, ils voudraient voir des voies ferrées et des autoroutes sur toute la péninsule coréenne jusqu'à la Chine et la Russie et au-delà, le long de la nouvelle Route de la soie. Même au sein de l'oligarchie financière américaine, l'opposition à l'énergie russe et à d'autres secteurs de la Russie n'est pas unanime, car certaines sections ont des liens et profitent largement de ce secteur et de l'économie russe en général alors que d'autres applaudissent la baisse des prix de l'énergie.

La situation en Asie de l'Est, en Europe et dans le monde est lourde de dangers. En Europe, les États-Unis s'efforcent de maintenir leur domination par des sanctions et des menaces militaires. En Asie de l'Est, ils repositionnent leurs forces armées pour affronter directement la Chine et la RPDC, ainsi que toutes les forces au Japon et en Corée du sud qui pourraient vouloir s'affranchir de leur domination. En Asie de l'Ouest, en Afrique du Nord et dans la région subsaharienne, les États-Unis et d'autres impérialistes mènent une guerre ouverte contre les peuples qui veulent prendre le contrôle de leur économie et de leur pays.

Les Canadiens ont la responsabilité sociale de faire du Canada un facteur de paix. Pour cela, le Canada doit se retirer de l'OTAN et de NORAD et rompre toutes les alliances et tous les accords militaires avec les impérialistes américains. Sur le plan économique, les Canadiens doivent prendre le contrôle du secteur stratégique de l'énergie non seulement en tant que mesure économique avantageuse pour les Canadiens et l'environnement social et naturel, mais aussi pour soustraire le secteur canadien de l'énergie aux rivalités impérialistes mondiales et en faire un facteur de paix et non de guerre.

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Le contrôle du secteur de l'énergie au Canada

Le secteur de l'énergie du Canada est totalement sous le contrôle de l'oligarchie financière mondiale, qui se concerte et rivalise pour les ressources stratégiques à la fois pour le profit et pour alimenter son économie et ses forces militaires.

Les Canadiens ne contrôlent pas le secteur énergétique et n'ont pas leur mot à dire sur sa direction et son développement. La décision de développer ou de ne pas développer le secteur est directement subordonnée au contrôle des cartels et à leur rivalité et collusion.

Le pétrole, le gaz naturel et le gaz naturel liquéfié (GNL) sont exportés et importés en vertu d'ententes commerciales entre cartels. Il ne s'agit pas de relations commerciales d'État à État que le peuple contrôle, puisque celui-ci ne contrôle ni les cartels privés ni l'État. Le prix reçu ou payé pour un produit énergétique est une affaire privée, décidée par les cartels ou l'État en question et par les parasites et spéculateurs qui pullulent dans le système impérialiste.

Le prix de marché du gaz naturel est maintenant bien inférieur au prix de production, et il en est de même pour le prix de marché que LNG Canada devrait recevoir en Asie en ce moment. Le prix du gaz naturel est inférieur à 2 $ par MMBTU (un million d'unités thermiques britanniques), alors que le GNL a baissé en dessous de 4 $ par MMBTU sur les marchés mondiaux. C'est inférieur à ce qu'on considère profitable pour l'extraction par fracturation et la liquéfaction de GNL. Certains trouvent que c'est incroyable que LNG Canada puisse poursuivre un projet alors que le pétrole, le gaz naturel et les prix de marché du GNL sont inférieurs à leur prix de production. Mais c'est peut-être voulu ou c'est peut-être en partie ce qui les attire, mis à part le besoin des ressources énergétiques pour alimenter les industries et les forces militaires.

Un des investisseurs/propriétaires de LNG Canada est Mitsubishi, qui contrôle le marché d'importations de GNL au Japon et est aussi un utilisateur/consommateur majeur de GNL dans tout son immense empire financier/industriel/commercial. Le cartel veut maintenir son contrôle du marché de GNL et saisir/voler le gaz naturel d'autres pays au plus bas prix possible. Cela fait partie du programme pour maintenir le contrôle du marché au Japon et d'un approvisionnement constant d'énergie pour l'économie japonaise, y compris ses propres industries et forces militaires. Lorsqu'il s'agit d'appuyer d'autres projets énergétiques dans le monde ou de s'y opposer, Mitsubishi analyse la situation à partir de ses propres intérêts et se range du côté de ce qui sert ses intérêts. C'est exactement ce que font tous les cartels. C'est aussi ce que font les cartels du secteur « vert » de l'énergie renouvelable qui est en expansion. Ils financent des ONG et d'autres groupes pour qu'ils s'occupent à leur place de faire la promotion ou la dénonciation de différents projets énergétiques.

Pour bâtir un secteur énergétique rationnel et planifié, il faut que le peuple contrôle la direction de l'économie, ce qui veut nécessairement dire contrôler le secteur du commerce de gros et l'exportation et l'importation de biens. Il faut activer le facteur humain/conscience sociale pour la prise de contrôle des affaires économiques pour voir et saisir la nécessité de ne pas permettre aux intérêts privés des impérialistes d'imposer leur diktat. Leur objectif du profit privé maximum est des plus étroits et ne tient aucunement compte des conséquences sociales et naturelles. Comme pour d'autres secteurs de l'économie, un nouvel objectif prosocial et une nouvelle direction sont nécessaires.

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Les questions que les gens se posent
au sujet d'une économie et d'un secteur sur lesquels ils n'ont aucun contrôle

Que devraient penser les travailleurs de l'opposition ou de l'appui aux oléoducs au Canada ? L'opposition ou l'appui viennent-ils d'une position de principe d'opposition à l'impérialisme, à son objectif antisocial de profit maximum et à son refus de reconnaître les droits des peuples autochtones et de trouver des solutions aux changements climatiques dus à l'activité humaine, à la pollution et aux autres problèmes environnementaux ? Ou l'opposition ou l'appui seraient-ils manipulés au service de puissants intérêts privés d'un cartel impérialiste ou l'autre qui agit en concertation ou en rivalité dans le secteur énergétique ?

Pourquoi un oléoduc est-il approuvé et l'autre abandonné ? Y a-t-il une différence de principe ? Peut-on en trouver une et l'expliquer ? Par exemple, le gouvernement fédéral a abandonné le projet d'oléoduc de Northern Gateway dont le trajet allait de l'Alberta jusqu'à la côte nord de la Colombie-Britannique, mais il tente frénétiquement de bâtir l'oléoduc Trans Mountain en direction de Vancouver malgré une opposition massive. En quoi ces deux projets diffèrent-ils ? Pourquoi l'un, mais pas l'autre ? Ils doivent tous les deux transporter le même produit. Pourquoi ne pas annuler les deux projets ? Pourquoi ne pas les approuver tous les deux ? Pourquoi abandonner un pipeline de pétrole vers la côte nord de la Colombie-Britannique pour ensuite imposer la construction d'un gazoduc par LNG Canada sur le même trajet vers la même ville portuaire de Kitimat ?

Le peuple ne contrôle ni le secteur énergétique ni aucun autre secteur. Cette collusion et cette rivalité sur la question des oléoducs est essentiellement une rivalité interimpérialiste et intercartels pour le contrôle du secteur. Cette rivalité fait rage en partie sur le remplacement du pétrole et du gaz traditionnels (et de charbon) par des énergies renouvables et, en partie, sur le contrôle du secteur. Elle est aussi en partie motivée par des considérations géopolitiques et militaires plus larges, à savoir miner l'influence d'impérialistes rivaux dans diverses régions et dans le monde.

Ce qui ressort de tout cela est qu'on ne doit pas permettre aux impérialistes de manipuler la situation à l'avantage d'une ou l'autre des factions de l'oligarchie financière et d'ainsi désorienter le peuple, en particulier la classe ouvrière. La classe ouvrière organisée doit reconnaître et défaire toute tentative de désinformer le peuple. La désinformation sert à maintenir le peuple dans un état de désorganisation et à le rendre incapable de discuter d'une position de principe qui est favorable à ses intérêts et de la défendre. C'est un problème auquel il faut trouver une solution. Cette lutte fait partie de la lutte plus large pour prendre le contrôle du secteur énergétique.

Réaffirmons la thèse : la question centrale pour les Canadiens touchant au secteur énergétique est « Qui contrôle ? » et « Qui décide ? ». Pour affirmer une planification scientifique rationnelle et la responsabilité sociale de la production et de la distribution des ressources hydrocarbures et des autres ressources énergiques, le peuple doit retirer le contrôle de ce secteur des mains des cartels mondiaux.

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La nécessité de changement dans
le secteur de l'énergie

L'existence de milliers de sites de forage orphelins et abandonnés, laissés sans assainissement environnemental en Alberta et en Colombie-Britannique témoigne de la cupidité, de l'anarchie et du manque de responsabilité sociale des sociétés énergétiques. L'objectif de profit privé les mène à prendre des décisions risquées et irresponsables avant, pendant et après leurs opérations. Lorsque des événements imprévus se produisent, comme une baisse des prix du marché, elles lèvent les bras en désespoir de cause et s'écrient : « Que pouvons-nous faire ? Nous n'avons pas d'argent pour nettoyer le gâchis. Alors ça s'arrête là. » Non, ce qui « s'arrête là », c'est le contrôle, la direction et le but socialement irresponsables de l'économie. Les cartels mondiaux qui contrôlent actuellement le secteur de l'énergie montrent par leur pratique irresponsable de laisser des sites pollués orphelins et abandonnés qu'ils sont incapables de résoudre les grands problèmes environnementaux découlant de leur industrie. Il est temps que ça change, il est temps de passer au nouveau, d'humaniser l'environnement social et naturel !

(Photo : Alberta Energy Regulator)

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Comment la fracturation hydraulique aux États-Unis perturbe les marchés mondiaux du pétrole et du gaz


Des manifestations contre les dangers de l'utilisation de la fracturation ont eu lieu partout aux États-Unis. Ci-dessus : au Maryland en 2017. (Food & Water Watch)

Le prix du marché mondial du pétrole a commencé un déclin continu avec l'augmentation rapide de la production de pétrole aux États-Unis en raison de l'utilisation intensive de la fracturation hydraulique vers 2011. De 2007 à 2016, la production annuelle de pétrole aux États-Unis a augmenté de 75 % et plus pour atteindre 15 millions de barils par jour en 2019, tandis que la production de gaz naturel a augmenté de 39 %, en raison des progrès de la technologie de forage horizontal et de la fracturation hydraulique. Cela a poussé les principaux exportateurs de pétrole vers les États-Unis, en particulier l'Arabie saoudite, à rechercher d'autres marchés, ce qui a entraîné une concurrence mondiale accrue pour ces marchés et une guerre des prix. Il semblerait maintenant que la Russie et l'Arabie saoudite cherchent un accord pour réduire l'approvisionnement mondial en pétrole, mais que les États-Unis ou du moins leurs principaux cartels de l'énergie refusent de s'y soumettre.

En échange de toute réduction de sa production pétrolière, la Russie souhaite sans doute que les États-Unis abandonnent leur opposition aux pipelines russes Nord Stream II et Turkstream vers l'Europe et éventuellement que les troupes américaines quittent la Syrie et rendent les champs de pétrole occupés par les États-Unis au gouvernement syrien.

Réduire délibérément le prix d'une marchandise en inondant les marchés d'un certain produit pour chasser un concurrent est la tactique de toujours des cartels impérialistes. Le prix de production du pétrole par fracturation est plus élevé que celui provenant du forage conventionnel. Le prix actuel du marché mondial de moins de 30 dollars le baril entraîne une crise de la production de pétrole non conventionnel (fracturation hydraulique) aux États-Unis. C'est ce que veulent la Russie et l'Arabie saoudite à court terme, mais l'Arabie saoudite ne peut pas paraître appuyer publiquement une telle cause en raison de son statut de dépendance envers l'impérialisme américain.

L'Arabie saoudite est dans la situation la plus difficile en raison de la guerre au Yémen, de la perte temporaire de tourisme et de pèlerinages à La Mecque et de sa position anti-iranienne. Elle a réussi à trouver d'autres marchés pétroliers en Asie de l'Est pour compenser en partie la perte du marché américain de l'énergie due à la croissance de l'offre intérieure aux États-Unis. Mais le monde est toujours inondé de pétrole, surtout maintenant avec la crise de la COVID-19. Une fois que la pandémie sera vaincue, que la demande d'énergie augmentera et que l'offre aura diminué aux États-Unis en raison de la faillite de nombreux petits et moyens producteurs américains de pétrole non conventionnel à cause de la crise, le prix du pétrole augmentera. C'est du moins ce qu'espèrent la Russie et l'Arabie saoudite et peut-être même des grands cartels de l'énergie américains comme ExxonMobil et Chevron.

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À titre d'information

Le projet de LNG Canada

L'ingénierie et la supervision générale de la construction du projet LNG Canada ont été confiées à une coentreprise de deux grandes sociétés d'ingénierie, JGC du Japon et Fluor Corporation des États-Unis.

La première phase du projet comprend le gazoduc Coastal GasLink de 6,2 milliards de dollars qui traverse le nord de la Colombie-Britannique. Il sera construit et exploité par TransCanada. Coastal GasLink sera un gazoduc de 670 kilomètres d'une capacité initiale d'environ 2,1 milliards de pieds cubes par jour (Gpi3/jour) avec un potentiel d'expansion pouvant atteindre environ 5 Gpi3/jour. Le gouvernement de la Colombie-Britannique a délivré des permis malgré le fait que les chefs héréditaires wet'suwet'en, dont les terres doivent être traversées par le gazoduc, n'ont pas donné leur consentement et sont déterminés à poursuivre la lutte pour arrêter la construction de tout pipeline sur leur territoire non cédé.

Le projet de gazoduc est soutenu par une entente de service de transport de 25 ans entre TransCanada Corporation et les partenaires de LNG Canada.

La deuxième phase est la construction d'une usine de liquéfaction et de stockage de gaz de 18 milliards de dollars dans le port de Kitimat, en Colombie-Britannique, avec deux postes de liquéfaction où le gaz naturel sera refroidi pour atteindre son état liquide, puis entreposé en attendant d'être transféré vers des navires-citernes de gaz naturel liquéfié (GNL) pour le transport vers les marchés asiatiques.

Un nouveau terminal pour les navires méthaniers sera construit au port de Kitimat, en Colombie-Britannique, relié à l'usine de liquéfaction et d'entreposage de LNG Canada.

Les navires méthaniers navigueront d'une extrémité à l'autre du chenal Douglas, vers et depuis le port de Kitimat, pour charger du GNL et naviguer à pleine charge vers des destinations outre-mer, principalement en Asie. Ces navires peuvent être détenus et exploités par certains des partenaires de LNG Canada ou par leurs clients acheteurs de GNL, ou ils peuvent être affrétés pour un temps par des armateurs indépendants spécialisés et des exploitants de ces navires spécialisés.

Deux partenaires, Royal Dutch Shell et Mitsubishi, ont déclaré que le projet exportera initialement du GNL à partir de deux unités de traitement, ou trains, totalisant 14 millions de tonnes par an (mtpa) de gaz naturel, et que, finalement, le projet pourrait ajouter deux trains supplémentaires pour un autre 14 mtpa.

L'industrie mondiale du GNL, en tant que gaz naturel sous forme liquéfiée, est de plus en plus utilisée directement pour alimenter les centrales électriques, la pétrochimie et d'autres installations industrielles, et pour la distribution de gaz naturel par gazoduc aux maisons et aux bureaux, ainsi que pour alimenter divers modes de transport tels que le transport maritime.

Une fois terminé, GNL Canada sera probablement le premier terminal canadien à exporter du GNL à l'étranger, tandis que plusieurs terminaux de liquéfaction et d'exportation de GNL fonctionnent déjà aux États-Unis sur les côtes du golfe du Mexique et de l'Atlantique, d'autres étant prévus, y compris sur la côte ouest des États-Unis.

Dans les 10 jours suivant l'annonce de la décision d'investissement de GNL Canada en octobre 2018, deux sociétés japonaises de distribution de gaz, Toho Gas et Tokyo Gas, ont signé des ententes pour des contrats d'achat de GNL sur 15 et 13 ans, respectivement, avec le Groupe Mitsubishi, une filiale de l'un des partenaires et actionnaires de LNG Canada.

LNG Canada bénéficie d'incitatifs fiscaux. Le gouvernement de la Colombie-Britannique a offert aux promoteurs du projet de les dispenser de la taxe sur le carbone de la Colombie-Britannique ainsi que de la taxe de vente provinciale. Le total des subventions du projet est évalué à 5,35 milliards de dollars. Les subventions s'étendent au-delà de l'usine de gaz naturel liquéfié même, jusqu'aux nouvelles lignes de transmission construites par BC Hydro pour desservir les champs gaziers où le gaz sera extrait par fracturation hydraulique. Le coût de ces lignes de transmission est de 296 millions de dollars. Le projet de GNL devrait être l'un des principaux bénéficiaires de l'électricité du nouveau projet de barrage hydroélectrique au site C, dont la construction coûtera plus de 10,7 milliards de dollars et connaît des dépassements de coûts. Le processus de liquéfaction nécessite une énorme consommation d'énergie, généralement à partir du gaz naturel, mais si l'électricité est disponible à partir du site C ou d'une exploitation de rivières par des producteurs indépendants à moindre coût, elle sera utilisée.

Notes

LNG Canada :

Le site Web de LNG Canada indique que l'entreprise exportera du gaz naturel canadien vers les marchés asiatiques et, ce faisant, positionnera le Canada sur la carte mondiale des pays exportateurs de GNL et créera une industrie de GNL de classe mondiale en Colombie-Britannique et au Canada.

Participants à l'entreprise commune :

Royal Dutch Shell Plc. (40 %, partenaire principal), du Royaume-Uni et des Pays-Bas ; PETRONAS (25 %), de Malaisie ; PetroChina Co. Ltd. (15 %), de Chine ; Mitsubishi Corp. (15 %), du Japon ; et Korea Gas Corporation (5 %) de Corée.

Shell : un leader mondial du GNL depuis 1964, qui contribue à ouvrir la voie au secteur du GNL, exploite environ 20 % des navires-citernes de GNL dans le monde et a des projets d'approvisionnement en GNL dans dix pays qui sont en exploitation ou en phase de construction.

PETRONAS : est une société d'énergie entièrement intégrée avec une vaste expérience dans le GNL. Par l'entremise de Progress Energy, sa société d'énergie en propriété exclusive située en amont, et de ses partenaires, PETRONAS est l'un des plus importants propriétaires de réserves de gaz naturel au Canada - avec la majorité de ces réserves dans la formation de gaz naturel de North Montney, dans le nord-est de la Colombie-Britannique. Le prix du gaz naturel a chuté à 1,68 $ par MMBTU bien en deçà du prix de production déclaré par fracturation hydraulique à Montney.

Le fait que PETRONAS détient des réserves de gaz en Colombie-Britannique avec des plans pour augmenter considérablement la production lorsque Coastal GasLink commencera à transporter du gaz vers Kitimat rappelle la situation en Alberta où les producteurs de pétrole se le vendent à eux-mêmes en amont aux États-Unis à un prix à rabais pour le raffinage et éventuellement le revendent à des prix plus élevés. Dans cette situation, les cartels qui contrôlent la production et la distribution peuvent pousser les petits producteurs à cesser leurs activités grâce à des prix bas, déclarer en Alberta qu'ils sont sans un sou, s'enfuir sans payer d'impôt sur les entreprises ni de redevances, et exiger à la place des stratagèmes pour payer les riches, y compris de l'infrastructure gratuite et d'autres subventions.

PetroChina Company Limited (PetroChina) : le plus grand producteur et fournisseur de pétrole et de gaz de Chine. PetroChina a inauguré trois installations d'importation de GNL en Chine et investit de plus en plus dans la production mondiale de gaz non conventionnel (fracturation hydraulique) et les installations d'exportation de GNL. (PetroChina était également un grand partisan, investisseur et premier acheteur du pétrole de l'oléoduc Northern Gateway maintenant annulé, qui prévoyait traverser la Colombie-Britannique de l'Alberta à Kitimat le long d'une route similaire à celle du gazoduc Coastal GasLink.)

Mitsubishi Corporation : le plus grand cartel commercial du Japon avec plus de 50 % de la part de GNL importé au Japon. Mitsubishi investit dans le GNL depuis 1969 et a un intérêt dans 11 projets d'exportation de GNL dans le monde. Mitsubishi est également membre du Mitsubishi keiretsu (Groupe). Le groupe Mitsubishi emploie 350 000 personnes et compte de nombreux secteurs d'activité ou filiales, notamment dans les secteurs de la finance, bancaires, de l'énergie, de la machinerie, des produits chimiques, de la bière et de l'alimentation.

Mitsubishi est l'un des zaibatsu originels après le renversement en 1868 du régime féodal Edo représenté par la petite production. Les zaibatsu étaient de grandes maisons financières et des sociétés de commerce et de fabrication contrôlées par de puissantes familles commerciales et marchandes. Après le renversement du gouvernement féodal d'Edo, ils ont immédiatement fait la transition pour devenir des monopoles dominants par la fusion des entreprises industrielles et financières, en même temps que le commerce international et l'investissement outremer de la richesse sociale sont devenus monnaie courante. Les sept zaibatsu d'origine étaient Mitsui, Mitsubishi, Sumitomo, Yasuda, Furukawa, Asano et Kawasaki.

Korea Gas Corporation (KOGAS) : la plus grande société d'importation de GNL au monde et principal fournisseur de GNL pour la Corée du sud. KOGAS exploite quatre terminaux d'importation de GNL et un réseau de gazoducs à l'échelle nationale en Corée du sud, et un autre terminal au Mexique.

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Quelques exemples de projets énergétiques et de pipelines annulés au Canada

Voici quelques exemples de projets énergétiques et de pipelines annulés au Canada, qui illustrent l'incohérence et les rivalités dans ce secteur. Rien que dans le cas des sables bitumineux, il existe de nombreux projets in situ à diverses étapes - achevés mais non mis en production, en construction, en attente ou annulés.

Projet Énergie Est annulé le 5 octobre 2017


L'oléoduc Énergie Est appartenant à TransCanada était un oléoduc proposé au Canada. Il aurait livré du bitume dilué de l'ouest du Canada à l'est du Canada, à partir des points de réception en Alberta et en Saskatchewan aux raffineries et aux terminaux portuaires du Nouveau-Brunswick et peut-être du Québec. Il aurait également servi à expédier du pétrole américain extrait par fracturation hydraulique de la formation de Bakken (maintenant transporté par rail).

La longueur totale aurait été de 4 600 kilomètres, environ 70 % (3 000 kilomètres) étant un gazoduc existant qui aurait été converti du transport de gaz naturel liquéfié au transport de bitume dilué. Selon le tracé, le pipeline aurait parcouru l'Alberta jusqu'au Nouveau-Brunswick, traversant la Saskatchewan, le Manitoba, l'Ontario et le Québec. Le projet aurait eu une capacité de 1,1 million de barils (~ 200 000 tonnes) de pétrole brut par jour. Irving Oil avait annoncé son intention de construire un nouveau terminal de 300 millions de dollars à ses installations de Canaport à Saint John pour exporter le pétrole livré par l'oléoduc. Le gouvernement du Québec y était fortement opposé.

Projet de Northern Gateway annulé en 2016


Les Gitxsan manifestent contre l'approbation de projets de gaz naturel liquéfié (GNL) dans le nord de la Colombie-Britannique en 2014.

Entreprise : Enbridge (création de l'Imperial Oil - 1949)

Le projet Northern Gateway a été proposé pour la première fois en 2002. Il aurait exporté vers les marchés asiatiques du bitume dilué de Kitimat, en Colombie-Britannique, qui arriverait par oléoduc depuis l'Alberta. La durée du transport par bateau de Kitimat vers l'Asie est deux jours plus courts qu'à partir de Vancouver. Enbridge a signé une entente de coopération avec PetroChina en 2005 pour garantir l'utilisation de la capacité du pipeline. PetroChina est maintenant un investisseur et un participant majeur dans LNG Canada.

En 2006, Enbridge a retardé le projet en faveur de l'accélération de nouveaux oléoducs vers les États-Unis. Jusqu'à son annulation pure et simple par le gouvernement fédéral du Canada en 2016, le projet a dû faire face à de multiples contestations judiciaires dans le cadre d'un long processus réglementaire, ce qui a retardé sa progression à plusieurs reprises. En juillet 2016, la Cour d'appel fédérale a annulé l'approbation précédente de Northern Gateway, invoquant un manque de consultations significatives avec de nombreuses communautés autochtones.

Projet de gazoduc Mackenzie annulé en 2017

Lancement du projet : 2000. Entreprises : ConocoPhillips, ExxonMobil, Aboriginal Pipeline Group.

Également connu sous le nom du gazoduc de la vallée du Mackenzie/gazoduc du fleuve Mackenzie, ce projet de 1200 km dans le nord de l'Alberta et des Territoires du Nord-Ouest a d'abord été lancé au milieu des années 1970, mais a ensuite été abandonné après qu'une enquête officielle du gouvernement a recommandé un moratoire de 10 ans sur le développement du gazoduc.

Le projet a été ressuscité en 2004 avec une nouvelle proposition de transport de gaz naturel vers la mer de Beaufort et l'étranger avec un approvisionnement provenant de gazoducs dans le nord de l'Alberta. A la fin 2010, le projet a été approuvé par l'Office national de l'énergie, mais sans que ne débute sa construction avant la date butoir de 2015.

Oléoduc Eagle Spirit

L'oléoduc Eagle Spirit est un pipeline canadien de 16 milliards de dollars appartenant aux Premières Nations proposé par l'homme d'affaires autochtone Calvin Helin, qui expédierait du pétrole du nord de l'Alberta à Prince Rupert, en Colombie-Britannique, en suivant une route bien au nord de celle de Coastal GasLink. Le groupe a déposé une demande l'année dernière auprès de l'Office national de l'énergie pour obtenir des conseils concernant les exigences pour décrire le projet, une première étape du processus de réglementation.

Proposition de Teck Resources pour un projet de mine à ciel ouvert d'extraction de pétrole abandonné en 2020


Pétitions remises au bureau du ministre de l'Environnement à Vancouver Nord, en janvier 2020, en opposition à l'approbation du projet de mine de Teck

En février 2020, Teck a abandonné les plans pour Frontier Mine - une proposition de mine à ciel ouvert de 20 milliards de dollars pour l'extraction du pétrole - à 25 km au sud du parc national Wood Buffalo et au nord de Fort McMurray, dans le nord-est de l'Alberta. En annonçant la décision, le PDG a laissé entendre que la société avait du mal à trouver des investisseurs pour le projet. Il a écrit entre autres : « Les marchés mondiaux des capitaux évoluent rapidement, et les investisseurs et les clients recherchent de plus en plus de juridictions pour mettre en place un cadre qui concilie le développement des ressources et les changements climatiques, afin de produire des produits les plus propres possible. Cela n'existe pas encore ici aujourd'hui et, malheureusement, le débat croissant autour de cet enjeu a placé Frontier et notre entreprise au coeur d'enjeux beaucoup plus vastes qui doivent être résolus. Dans ce contexte, il est désormais évident qu'il n'y a pas de voie à suivre pour le projet. Le règlement des enjeux des conséquences sociétales du développement énergétique, des changements climatiques et des droits des peuples autochtones est d'une importance cruciale pour le Canada, ses provinces et les gouvernements autochtones. »

(Photos : Stand.earth)

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