Forum ouvrier

Numéro 43 - 23 juin 2020

Les travailleurs des postes intensifient la lutte pour leurs droits

L'arbitre fédéral refuse de traiter des revendications nécessaires


Manifestation à Edmonton le 22 novembre 2018 contre le projet de loi C-89 obligeant les travailleurs des postes à retourner au travail

Dominion Diamond Mines dans les Territoires du Nord-Ouest se range sous la protection de la loi sur les faillites
Les travailleurs sont déterminés à défendre leurs droits - Todd Parsons

Les travailleurs continuent de prendre la parole sur les questions de sécurité
Le besoin de briser le silence sur le manque de sécurité sur les chantiers de construction - Evans Dupuis
Nous ne pouvons accepter aucun relâchement dans les normes et les règlements sanitaires - André Racicot
Les questions de sécurité qui préoccupent les travailleurs des postes pendant la pandémie - Toni MacAfee


Les travailleurs des postes intensifient la lutte pour leurs droits

L'arbitre fédéral refuse de traiter
des revendications nécessaires


Ligne de piquetage à Napanee, le 10 novembre 2018

Le 11 juin, l'arbitre Elizabeth McPherson, une ancienne présidente du Conseil canadien des relations industrielles nommée arbitre dans le cadre de la mise en oeuvre de la Loi C-89, Loi sur la reprise et le maintien des services postaux, a publié son rapport final. La Loi a été adoptée par le Parlement le 26 novembre 2018 pour déclarer illégales les grèves tournantes des travailleurs des postes et forcer les travailleurs à mettre fin à leurs grèves légales sous la menace de lourdes amendes pour les travailleurs individuels et le syndicat.

Le Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes (STTP) négociait avec Postes Canada depuis près d'un an au nom des factrices et facteurs ruraux et suburbains (FFRS) dont la convention collective est arrivée à échéance le 31 décembre 2017, et de tous ceux qui sont affectés aux opérations urbaines, soit les facteurs, les travailleurs des services de messagerie et tous les travailleurs internes dont la convention collective a expiré le 31 janvier 2018.

Le numéro du 22 novembre 2018 de Forum ouvrier soulignait que Postes Canada et le gouvernement Trudeau ont provoqué une crise en refusant de négocier avec le syndicat, ayant plutôt choisi de recourir à une loi criminalisant la lutte des travailleurs pour leurs droits[1].

La Loi C-89 prévoyait 90 jours de médiation-arbitrage et les audiences ont commencé le 16 janvier 2019. Ce processus ne s'est pas mieux déroulé que les négociations. Après des reports et des retards continus, l'audience finale a eu lieu le 6 mai et l'arbitre a remis sa décision le 11 juin.

Au lieu des 90 jours prévus par la Loi, la médiation-arbitrage a pris plus de 560 jours. Le rapport ne contient aucune explication quant à l'incapacité de l'arbitre à faire son travail conformément à la Loi.

Il ressort clairement du rapport que l'arbitre n'a pas abordé le régime de non-négociation imposé par Postes Canada et appuyé par le gouvernement libéral. Les principales revendications des postiers n'ont toujours pas été correctement considérées lors des audiences d'arbitrage qui se sont étalées sur 560 jours. L'arbitre n'a pas résolu les problèmes importants de santé et de sécurité, le système de rémunération à deux vitesses, le paiement de toutes les heures travaillées pour les FFRS, la surcharge des facteurs et l'affectation du personnel pour les travailleurs internes avec l'utilisation accrue de travailleurs temporaires et du travail précaire à temps partiel.

C'est très préoccupant pour les travailleurs et travailleuses des postes de voir qu'après presque deux ans sans convention collective, ils sont contraints de travailler sous des ordonnances fédérales. On n'a pas tenu compte de leurs préoccupations en matière de santé et de sécurité, et de bonnes conditions de travail nécessaires pour effectuer leur travail. L'arbitre a publié un rapport qui va dans le sens du refus de Postes Canada de négocier, sachant très bien qu'elle pourrait compter sur les libéraux de Trudeau pour l'utilisation de pouvoirs législatifs pour criminaliser toute résistance des travailleurs et éliminer tout semblant de négociations.

Ce que l'arbitre avait à dire


La durée de la convention collective sera de quatre ans à compter de janvier 2018, ce qui veut dire qu'il ne reste que 18 mois.

Les échelles salariales prévues à l'annexe « A » de la convention collective sont majorées par les montants suivants aux dates indiquées :

1er février 2018 - 2,0 %

1er février 2019 - 2,0 %

1er février 2020 - 2,5 %

1er février 2021 - 2,9 %.

« L'augmentation de traitement pour l'unité des FFRS doit s'appliquer après la mise en oeuvre des augmentations imposées par la décision de l'arbitre Flynn sur l'équité salariale et de celles convenues par les parties dans le cadre de ce processus. Le but est de maintenir l'équité salariale atteinte grâce au processus de l'arbitrage Flynn. »

L'arbitre a refusé de se pencher sur le système de traitement salarial à deux vitesses qui existe. Par exemple, un travailleur interne embauché avant 2013 a un salaire horaire de sept dollars de plus qu'un travailleur de la même classification embauché après le 1er février 2013. Afin de régler ce problème, le syndicat a exigé que les huit années qu'il faut accumuler pour atteindre le maximum soient réduites. L'arbitre a refusé. Sa décision maintient le même arrangement pour les groupes un et deux des opérations urbaines.

En ce qui concerne la santé et la sécurité, les facteurs ont subi de graves blessures sur leurs itinéraires en raison de la méthode de livraison à deux liasses qui a été introduite avec la manière séquentielle de trier le courrier. L'arbitre a refusé de répondre à la demande des travailleurs d'éliminer cette méthode de travail dangereuse. Le problème est reconnu dans le rapport, mais l'arbitre n'a pas pris position pour éviter de nouveaux accidents. Le commentaire du rapport sur ce grave problème expose clairement la nature du processus d'arbitrage qui ferme les yeux sur les besoins des travailleurs. Sur la question du système à deux lots, l'arbitre déclare :

« La soussignée n'est pas une experte en ergonomie et hésite à préciser dans la convention collective une méthode particulière de tri et de livraison. Je propose plutôt un protocole d'entente qui officialisera la pratique actuelle qui consiste à ne pas sanctionner les factrices et facteurs qui choisissent de fusionner, avant de commencer leur livraison, leur courrier trié de manière séquentielle et leur courrier trié manuellement. »

De même, sur la question de la surcharge de travail des facteurs, l'arbitre a refusé de prendre position et a proposé une autre étude pour discuter du processus de mise à jour du volume des itinéraires des facteurs. Cela signifie qu'une fois de plus, les problèmes rencontrés par les facteurs en conséquence de l'augmentation considérable des volumes de colis et la nécessité de restructurer les itinéraires feront l'objet d'études complémentaires sans solution en vue.

L'arbitre n'a eu aucun problème à accepter la proposition de Postes Canada concernant un « effectif temporaire en période de pointe » qui n'aurait aucune restriction quant aux jours de la semaine où ces employés peuvent être déployés. Au lieu d'attribuer les postes vacants et de maximiser les postes réguliers à temps plein en combinant les postes à temps partiel en fonction des heures travaillées, la capacité de la société des postes à recourir à des travailleurs temporaires conduira à la création de plus de travail précaire et les problèmes d'affectation du personnel qui persistent ne seront pas résolus.

En ce qui concerne les FFRS, l'arbitre a refusé de répondre aux demandes du syndicat de rémunérer ces travailleurs pour toutes les heures travaillées. Cela nécessiterait la restructuration de leurs itinéraires sur la base d'une journée normative de huit heures de la même manière que les facteurs des opérations urbaines. L'arbitre a refusé de modifier le modèle de travail à la pièce existant et propose une autre étude sur la façon de mesurer le contenu, la charge de travail et les méthodes de rémunération appropriées pour rémunérer les FFRS pour toutes les heures travaillées de plus de 40 heures par semaine. L'arbitre a également rejeté la demande du syndicat d'une compensation horaire pour la livraison de colis la fin de semaine. Elle a plutôt accepté la proposition de Postes Canada de fournir aux FFRS qui livrent des colis la fin de semaine 2 $ pour chaque colis.

La Loi C-89 et la décision d'arbitrage n'aident pas les travailleurs des postes durant la pandémie

Le processus de médiation-arbitrage imposé par la Loi C-89 n'a pas permis de résoudre les graves problèmes auxquels sont confrontés les postiers. Le principal objectif de la Loi était d'empêcher les travailleurs de lutter pour leurs droits à des conditions de travail décentes et à un environnement de travail sécuritaire. Ce problème est devenu beaucoup plus grave, car les travailleurs des postes ont continué à travailler tout au long de la pandémie. Le service important qu'ils fournissent, le tri et la livraison des lettres et des colis dans toutes les collectivités du Canada les a placés en première ligne de la lutte contre la COVID-19, ce qui pose des risques énormes à leur santé.

Il est inconcevable que, dans des conditions aussi dangereuses, les travailleurs et travailleuses des postes aient encore une loi fédérale suspendue au-dessus de leur tête avec des menaces de lourdes amendes s'ils entreprennent des actions pour protéger leurs droits. Malgré cela, les travailleurs des postes partout au pays ont pris des mesures comme celles de fermer des centres de tri et de refuser de travailler si Postes Canada n'observe pas les mesures de sécurité. C'est grâce aux travailleurs et à l'affirmation de leurs droits que les services postaux ont été maintenus au niveau requis par les Canadiens.

Il est grand temps que la Loi C-89 soit abolie afin que Postes Canada n'ait aucun endroit où se faufiler et n'ait aucune excuse pour faire la sourde oreille aux revendications des travailleurs.

Voir le rapport complet de l'arbitre.

Note

1. Voir Forum ouvrier du 22 novembre 2018

(Photos : FO, STTP)

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Dominion Diamond Mines dans les Territoires du Nord-Ouest
se range sous la protection de la loi sur les faillites

Les travailleurs sont déterminés
à défendre leurs droits


Le chantier principal de la mine de diamants d'Ekati

Dominion Diamond Mines est sous la protection de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies (LACC) depuis le 22 avril. Les travailleurs et leur syndicat exigent que la compagnie respecte ses obligations envers les fonds de retraite et les clauses de leur convention collective portant sur la protection des emplois. Ils demandent également que la mine Ekati soit maintenue en activité.

Dominion Diamond Mines est l'un des plus grands producteurs et fournisseurs mondiaux de diamants bruts de première qualité. Elle possède et exploite la mine de diamants Ekati et détient 40 % de la mine de diamants Diavik dont le principal propriétaire est Rio Tinto, également l'exploiteur de la mine. L'entreprise est propriétaire du projet diamantifère de Lac de Gras qui fait partie du champ de kimberlites et qui comprend les mines de diamants Ekati et Diavik. Le projet est considéré comme ayant un potentiel d'exploration important pour la kimberlite diamantifère. Tous ces sites sont situés à environ 300 kilomètres au nord-est de Yellowknife. En plus de ses activités minières et d'exploration, la compagnie a des bureaux de vente en Belgique et en Inde. En 2017, Dominion Diamond Mines a été achetée par le monopole américain Washington Companies qui détient des sociétés de transport ferroviaire, de transport maritime, de construction et d'exploitation minière, de vente d'équipements lourds, de technologie aéronautique et de développement immobilier.

Forum ouvrier publie ci-dessous une récente entrevue avec Todd Parsons, président du Syndicat des travailleurs du Nord (UNW), qui représente plus de 400 travailleurs de la mine de diamants d'Ekati.

Forum ouvrier : Quelle est l'importance de Dominion Diamond Mines comme employeur dans les Territoires du Nord-Ouest ?

Todd Parsons : Dominion Diamond Mines est l'un des plus gros employeurs à part le gouvernement dans notre région. Entre autres, il fournit des emplois aux autochtones dans bon nombre de nos petites collectivités ainsi qu'aux habitants de Yellowknife. Alors que 400 membres de l'unité de négociation sont touchés par la demande de protection contre l'insolvabilité, il y en a 700 autres qui ne font pas partie de notre unité de négociation, mais qui travaillent dans la mine et sont également touchés. La fermeture de la mine aurait un effet dévastateur pour les travailleurs et leur collectivité et pour l'ensemble de l'économie des Territoires du Nord-Ouest.

FO : Dominion Diamond Mines a en fait fermé la mine de diamants d'Ekati le 19 mars, avant de déposer une demande de protection contre l'insolvabilité, n'est-ce pas ?

TP : Oui. La société dit que la fermeture est liée à des inquiétudes concernant la COVID-19 et l'impossibilité de vendre les diamants extraits sur le site[1]. Elle dit qu'elle n'était pas en mesure de vendre son produit sur les marchés, car les parquets en Belgique et en Europe étaient fermés, pour la plupart à cause de la COVID-19. La mine n'a en fait jamais rouvert. Nous avons soulevé la question avec l'employeur, mais il n'a pas donné de date définitive pour la réouverture.

Pendant ce temps, l'autre société d'exploitation du diamant, Diavik Diamond Mine, qui est détenue à 40 % par Dominion Diamond Mine et le reste par Rio Tinto, n'a jamais fermé ses portes et dit qu'elle est en mesure de vendre ses diamants sur les marchés mondiaux. Il y a un conflit entre elles sur cette question. Il est difficile de confirmer les faits.

Un mois après la fermeture de la mine Ekati, Dominion Diamond Mines a obtenu la protection des tribunaux contre l'insolvabilité en vertu de la LACC.

Le fait que tout cela arrive en même temps soulève plusieurs questions.

Notre syndicat est très impliqué dans le suivi des procédures judiciaires. Notre conseil juridique cherche à protéger les travailleurs à la fois pour ce qui est des obligations de retraite et des obligations d'emploi prévues par la convention collective. L'employeur doit continuer de respecter ses obligations en matière de retraite et d'accorder les avantages sociaux prévus dans la convention collective. Ces obligations sont primordiales. Nous voulons aussi que les opérations minières soient maintenues.

Nous voyons qu'une autre filiale de Washington Companies a fait une offre d'achat des actifs de la mine Ekati. L'offre comprend le maintien des obligations de retraite et d'emplois et la poursuite des opérations minières.

Cependant, il appartiendra au tribunal de déterminer si cette offre est acceptée ou non. D'autres soumissions peuvent être faites dans le cadre des procédures judiciaires de la LACC. Il est assez inhabituel, dans le contexte des procédures en protection de faillites, que Washington Companies déclare publiquement son offre. Je ne suis au courant d'aucune autre offre en ce moment.

Ce qui est certain, c'est que si le site minier ferme, ce serait très grave pour les travailleurs et les communautés, et très dur pour l'économie du Nord, surtout dans les conditions de la pandémie de la COVID-19. Nous ne pouvons pas nous permettre de perdre ce moteur économique de notre économie. Les obligations en matière de retraite et d'emplois doivent être respectées et la mine Ekati doit continuer d'exploiter le diamant.

Note

1. Lorsque Dominion Diamond Mines a suspendu les opérations à la mine Ekati en mars, le syndicat a dit que c'était une décision unilatérale et que la compagnie n'avait pas travaillé avec le syndicat pour trouver des solutions mutuellement acceptables aux problèmes de santé et sécurité de tous les travailleurs, de leur famille et de leur communauté, et à l'incertitude économique que la suspension des opérations cause pour les travailleurs. Le syndicat a également déposé un grief pour violation de divers éléments de la convention collective, car l'entreprise a tout simplement déclaré que la convention collective ne s'appliquait pas à une situation de pandémie mondiale. Par conséquent, elle a violé les procédures négociées pour les mises à pied et les rappels lorsqu'elle a décidé quelle équipe elle garderait pour entretenir le site minier. Les travailleurs se sont vu refuser leurs indemnités de départ dûment négociées s'ils optaient pour une mise à pied permanente en raison de la suspension indéfinie des opérations. La compagnie a également enfreint les accords socioéconomiques et les accords sur les retombées économiques qu'elle a conclus avec des groupes des Premières Nations, qui prévoient l'emploi d'un certain nombre d'autochtones dans l'exploitation de la mine.

(Photos : FO, Dominion Mines)

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Les travailleurs continuent de prendre la parole
sur les questions de sécurité

Le besoin de briser le silence sur le manque de sécurité sur les chantiers de construction

Forum ouvrier : Tu as soulevé dans les médias qu'il existe un sérieux problème sur les chantiers de construction en ce qui concerne l'information sur la propagation possible de la COVID-19. Peux-tu nous en dire plus ?

Evans Dupuis : Le problème est que la Santé publique, la compagnie ou le maître d'oeuvre, et la CNESST (Commission des normes, de l'équité, de la santé et de la sécurité du travail) ne veulent pas nous fournir l'information à savoir quel travailleur est atteint, si c'est un de nos membres, s'il a passé un test, s'il a été déclaré positif, si une enquête a été faite, si les mesures en place étaient adéquates, si tout le monde qui a été contact avec lui a fait l'objet d'une enquête, etc. Nous ne sommes pas capables d'avoir l'information. Comment peut-on faire un suivi dans ces conditions afin de rassurer les travailleurs que tout a été fait de manière sécuritaire, qu'il n'y aura pas de propagation ?

Les compagnies ou les maîtres d'oeuvre nous disent qu'il s'agit d'une information personnelle, confidentielle, et que nous devons nous adresser à la Santé publique. La Santé publique nous dit elle aussi que c'est une information confidentielle. Ça n'a pas de sens.

Nous avons par exemple un grutier qui a été mis en quarantaine parce qu'il avait des symptômes et qu'il a passé un test. Selon la règle, si tu vas passer un test parce que tu as des symptômes, la Santé publique dit que tu dois te mettre en quarantaine tant que tu n'as pas les résultats. Nous avons fini par le savoir parce que le membre nous a appelés. Il est allé voir la Santé publique qui lui a dit que sa situation est problématique, qu'il s'est beaucoup promené d'un chantier à l'autre, que c'est peut-être un gros cas. Il venait de passer un test, qui s'est avéré négatif plus tard, a passé un second test, lui aussi négatif. Son médecin, voyant que les tests étaient négatifs, lui a finalement donné un billet de retour au travail, disant que ses symptômes n'étaient pas des symptômes de la COVID-19. Ce travailleur ne sera pas payé pour sa période de quarantaine. Ses tests sont négatifs, alors il ne sera pas couvert par le système d'indemnisation de la CNESST. Il ne sera pas admissible à la PCU parce qu'il a gagné trop d'argent. Il ne sera pas admissible aux prestations d'assurance-emploi pour maladie, parce que sur son dossier c'est écrit « possible COVID ».

En plus, avec la pandémie, les comités mixtes de santé et sécurité ne fonctionnent pas. C'est un endroit où on pourrait poser des questions, demander quelle enquête a été faite, si les conditions de sécurité pour prévenir la COVID-19 étaient en place, si la distanciation de deux mètres était respectée, si les travailleurs portaient des masques, avec qui le travailleur avait été en contact.

Nous demandons d'avoir accès à l'information, soit de la Santé publique ou de la CNESST, pour pouvoir faire un suivi. La CNESST dit que ce n'est pas à elle de nous informer, que cela appartient à la Santé publique. La Santé publique devrait travailler avec la CNESST pour que celle-ci nous donne l'information. Quand il y a un accident de travail qui est déclaré, la CNESST nous donne l'information. Si l'accident implique un de mes membres, je me rends sur les lieux de l'accident, je discute des mesures correctives. Avec la COVID cela devrait être la même chose.

FO : Comment sont les conditions de sécurité sur les chantiers en ce moment en rapport à la COVID-19 ?

ED : Il y a des chantiers sur lesquels il n'y a aucune mesure de sécurité de prise face à la COVID. Sur d'autres chantiers, les compagnies disent aux travailleurs de porter un masque et une visière et alors il n'y a plus de distanciation de deux mètres. À d'autres endroits, la distanciation de deux mètres est respectée. La situation peut dégénérer et donner lieu à une épidémie, à mon avis.

Quand les chantiers de construction ont été rouverts, la CNESST s'était engagée à faire des enquêtes systématiques sur la situation avec la COVID-19 sur les chantiers, mais cela n'est pas ce qui se passe. Si la CNESST n'est pas là pour faire son enquête et qu'un travailleur est retiré des chantiers, c'est tout un débat à savoir si le travailleur va être indemnisé auprès de la CNESST, s'il a contracté ses symptômes au travail, si c'est relié au travail ou non. La CNESST doit travailler avec la Santé publique, elle doit être là très activement sur les chantiers.

Ce qui m'inquiète le plus, c'est qu'on pense juste à travailler et on laisse faire les cas. S'il y a beaucoup de cas, il y a des chantiers qui vont fermer, ce ne sera pas mieux. Ce n'est pas ça qu'on veut. On dirait qu'ils nous cachent cela pour qu'on ne mette pas de la pression. Mais les règles ne sont pas respectées. Le deux mètres n'est pas respecté. La méthode de travail n'est pas bonne. C'est ça qui est camouflé.

J'espère qu'on aura plus d'ouverture de la part autant de la Santé publique que de la CNESST, que la CNESST va participer aux enquêtes pour qu'on puisse faire un suivi des cas de COVID et qu'on puisse intervenir. C'est important.

(Photos : FTQ-Construction)

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Nous ne pouvons accepter aucun relâchement dans les normes et les règlements sanitaires

Forum ouvrier : Quels sont les plus récents développements dans le travail du syndicat pour la défense de la santé et de la sécurité des travailleurs de la mine dans le contexte de la COVID-19[1] ?

André Racicot : Notre préoccupation constante, c'est l'application des normes sanitaires sur le terrain pour faire en sorte que les travailleurs ne contractent pas et ne propagent pas la COVID-19. À ce sujet, le syndicat a demandé à l'employeur de libérer un autre représentant en prévention, à plein temps, strictement pour s'assurer de l'application des normes sanitaires.

Pour te donner un exemple, il faut assurer la désinfection des équipements sous terre, je parle ici des équipements mobiles, les camions tombereaux, les chargeuses-navettes, etc. Les personnes qui entrent à chaque quart de travail doivent désinfecter les équipements pour éviter une possible contamination. Une recette maison avait été faite au début, une solution comprenant de l'eau de javel pour désinfecter ces équipements. Le Purell était difficile à trouver sur le marché parce que la demande était très forte. Mais une solution à l'eau de javel comme désinfectant, c'est efficace pour une journée seulement, cela s'évapore très rapidement. Pour l'employeur, c'était une solution commode, cela ne coûte pas cher, pas besoin d'un fournisseur pour obtenir le produit. Nous sommes allés sur le terrain pour voir comment cela se faisait, nous avons fait des recherches, nous avons fait notre travail de représentant à la prévention. Et nous avons demandé à l'employeur d'arrêter ce type de désinfection et de fournir un véritable désinfectant, et il a accepté. S'il avait refusé, nous aurions fait une plainte à la CNESST [Commission des normes, de l'équité, de la santé et de la sécurité du travail].

Nous devons nous prémunir contre le relâchement dans les normes sanitaires, surtout si on va vers une deuxième vague. Maintenir le deux mètres de distance, le lavage des mains, la désinfection des outils communs, la désinfection des séparateurs qui ont été mis dans les jeeps de transport du personnel, etc. L'employeur a fait son travail pour la réouverture de la mine, mais si on ne fait pas d'action syndicale, si on ne vérifie pas les normes, c'est le relâchement qui s'installe. On doit s'assurer que les normes sanitaires entrent dans les moeurs des travailleurs. Il faut faire beaucoup d'interventions sur le terrain auprès des travailleurs pour les sensibiliser, les rappeler à l'ordre au besoin. Nous devons prendre le pouls des travailleurs en tout temps. Personne ne connaît mieux le travail que ceux qui le font. Nous faisons notre propre travail de vérification. Nous avons un devoir comme société, et nous avons aussi un devoir comme syndicat de veiller au bien-être de nos membres et de nous assurer qu'ils ne tombent pas malades et ne propagent pas la maladie chez eux ou dans la communauté. L'employeur connaît notre efficacité et il sait que nous n'allons pas hésiter à intervenir pour corriger les choses qui ne vont pas bien du point de vue de la santé et de la sécurité.

Nous allons être aux prises avec la pandémie pour une bonne période de temps. Nous allons probablement connaître une deuxième vague, nous devons être préparés à faire face à la musique. Nous devons aller dans le même sens au point de vue sanitaire, les employeurs et les travailleurs, mettre de hauts standards en place, pas seulement par écrit, mais sur le terrain.

La priorité de l'employeur demeure de sortir le plus de minerai possible, c'est le côté productivité qui prime. Surtout au prix de l'or en ce moment, qui est très élevé, et avec un dollar canadien à environ 70 cents face au dollar américain alors que l'or se transige en dollars américains. Les employeurs réalisent un excédent de profit avec la dépréciation du dollar canadien.

En Abitibi, je suis convaincu qu'on va assister à la réouverture d'une série de mines, en particulier des mines de surface qui coûtent moins cher à exploiter qu'une mine souterraine et qui peuvent être rentables avec une teneur en or inférieure à ce qu'elle doit être dans une mine souterraine. Ici même, chez Westwood, en plus de la mine souterraine, la compagnie est en train d'exploiter une fosse non loin d'ici. C'est un nouveau développement. Le potentiel de faire plus d'argent avec l'or est très fort. Il y a de plus en plus de petites minières qui veulent partir des activités et les grosses minières examinent la situation et vont se les accaparer, c'est comme ça que ça marche.

La question de la santé et de la sécurité devient alors de plus en plus importante. La pression est que ça presse, il faut sortir le minerai rapidement, et le danger d'accidents de travail devient plus grand. Avec l'augmentation de l'extraction, ils vont faire appel à des entrepreneurs pour leur fournir de la main-d'oeuvre pour sauver sur les coûts, ne pas avoir à louer de la machinerie, etc. Nous voulons qu'ils donnent le travail à nos travailleurs, mais s'ils engagent des travailleurs à contrat, nous devons les défendre eux aussi, ce sont des travailleurs, ils sont partie prenante des conditions de travail dans les installations, on ne fait pas de différence, leur santé et leur sécurité doivent être protégées elles aussi.

Pour nous, ça veut dire plus de vigilance, surtout que cela se passe en pleine crise de la pandémie. On doit s'assurer que tous les travailleurs rentrent chez eux le soir avec tous leurs membres et pas infectés par la COVID-19. Pour cela, nous devons éduquer les travailleurs, les former, être sur le terrain, nous assurer que les travailleurs comprennent la raison pour laquelle nous mettons ces mesures sanitaires en place.

Note

1. Lire « Les travailleurs des mines demandent le respect des consignes de la Santé publique avec la reprise des activités minières - Entrevue avec André Racicot, président de la section locale 9291 du Syndicat des Métallos en Abitibi », Forum ouvrier, 23 avril 2020

(Photos: FTQ-Construction)

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Les questions de sécurité qui préoccupent les travailleurs des postes pendant la pandémie

Forum ouvrier publie ci-dessous un article de Toni MacAfee, écrit le 26 mars, sur la lutte que mènent les travailleurs des postes pour affirmer leurs droits et garantir leur santé et sécurité et celle du public alors qu'ils continuent de fournir les services postaux pendant la pandémie.

Jeff Callaghan, le directeur de la région de l'Atlantique du STTP, qui a soumis l'article, souligne que la lutte des travailleurs des postes est toujours bien vivante aujourd'hui, comme elle l'a été depuis le début de la pandémie, sur des questions comme le besoin d'équipement de protection individuelle, le maintien de la propreté des endroits de travail, la distanciation sociale et le droit de refuser un travail dangereux.

***

La région de l'Atlantique du STTP représente les membres des quatre provinces atlantiques. Cela comprend les facteurs/factrices, les courriers des services postaux, les commis et les répartiteurs, les commis des services au détail, les factrices et facteurs ruraux et suburbains, les techniciens et les mécaniciens qui travaillent chez Postes Canada. Le STTP représente également d'autres travailleurs chez d'autres employeurs ; les membres qui fournissent les services de livraison pour de multiples entreprises privées qui sont des sous-traitants de Postes Canada ; les agents de communications et les administrateurs de transfert au Centre médical d'urgence qui font tous les transferts, prennent tous les appels et répartissent les ambulances en Nouvelle-Écosse ; les agents de communications du 911 à Medacom à l'Île-du-Prince-Édouard ; les nettoyeurs de Bee Clean dans les établissements postaux de Moncton, Saint John au Nouveau-Brunswick et Saint-Jean à Terre-Neuve.

Alors que de nombreux travailleurs sont présentement à la maison, nos membres, aux côtés des travailleurs de la santé, des travailleurs de vente au détail, des livreurs motorisés, des commis de magasin, des pompistes et de plusieurs autres travailleurs fournissant d'importants services continuent de travailler pendant la pandémie.

Pour les travailleurs de Postes Canada, les enjeux principaux sont les équipements de protection individuelle, le nettoyage adéquat des établissements, des dépôts et des comptoirs au détail, et le défi de la distanciation sociale dans les centres et les dépôts de même que pendant la livraison sur la route et dans les comptoirs de vente au détail.

Nos membres ont lutté très fort pour obtenir des clauses dans nos conventions collectives qui protègent clairement nos droits et assurent la protection de notre santé et sécurité. Maintenant plus que jamais, nos membres et nos sections locales s'assurent que ces droits sont reconnus en pratique. Depuis le début de la crise, les membres du STTP ont invoqué leur droit de refus en ce qui concerne les enjeux cités plus haut de même que sur d'autres problèmes qui n'étaient pas traités dans leurs endroits de travail d'une manière adéquate et en temps opportun.

Être représentant en santé et sécurité du STTP est maintenant une position pleine de défis, mais nos membres et nos sections locales exigent que les droits, la santé et la sécurité de nos membres soient protégés. Les membres des exécutifs locaux travaillent sans relâche et présentent des revendications à l'employeur pour obtenir les équipements nécessaires pour que nos membres accomplissent leur travail de façon sécuritaire.

Nous avons pu observer le contraste qui existe entre ce que dit la direction au plus haut niveau et ce qui se passe sur le plancher de travail. Il semble que ce n'est pas toute la direction qui prend cette pandémie aussi au sérieux que nos membres, ce qui souvent ne leur laisse d'autre choix que de refuser des conditions de travail non sécuritaires. Il y a eu de nombreuses occasions où des cadres et des superviseurs ont pris une mauvaise décision et où nos sections locales les ont contestées sur le plancher et, lorsque nécessaire, ont fait parvenir cette information à la région pour qu'elle soit discutée au niveau supérieur.

Alors que les travailleurs des postes continuent de fournir les services aux comptoirs de vente au détail, de trier votre courrier et vos colis, de vous livrer vos produits, nous vous demandons de respecter les protocoles de distanciation sociale pendant que nous travaillons. Il arrive souvent que les gens se rassemblent pendant que les travailleurs livrent le courrier dans leurs boîtes aux lettres d'appartement et leurs boîtes aux lettres communautaires. Nous vous invitons à attendre que nous ayons fini notre travail et à respecter notre espace pour que tous soient en sécurité. Dans les comptoirs de vente au détail, nous vous demandons de suivre les guides directeurs qui ont été mis en place pour limiter le nombre des clients et mettre en oeuvre la distanciation sociale.

Les détails changent d'une province à l'autre, mais nos membres continuent de riposter à l'employeur afin d'assurer le respect de la santé et de la sécurité. Il faut que Postes Canada et le gouvernement garantissent que les travailleurs aient les bons équipements et les bons outils pour accomplir leur travail de façon sécuritaire. Nos membres, qui vivent déjà beaucoup de stress, ne doivent pas être inquiets de se retrouver au travail sans les gants, les gels antibactériens et les serviettes désinfectantes qui sont si essentiels. Postes Canada et le gouvernement ne doivent pas invoquer les coûts comme excuse pour ne pas protéger nos membres. Nous devons avoir la garantie que nos endroits de travail et nos équipements seront nettoyés adéquatement, que les instruments protecteurs comme les diviseurs en plexiglas sont installés et que les gants, les gels antibactériens pour les mains et les serviettes désinfectantes sont disponibles à chaque jour lorsque requis. Sinon, nos membres n'auront d'autre choix que de refuser les conditions de travail non sécuritaires.

Lorsque vous voyez votre postier ou tout autre travailleur en train de travailler au sein du public et pour le public pendant cette crise, assurez-vous d'être aimable, respectueux et de faire de votre mieux pour que leur sécurité soit protégée. En luttant pour garantir notre sécurité, nous luttons aussi pour protéger la vôtre.

Lorsque tout ce chaos sera derrière nous et que la poussière retombera, il faudra se rappeler les travailleurs qui étaient à l'oeuvre pour fournir les services afin de combler nos besoins pendant cette période. Nous devrons aussi nous assurer que les gouvernements et les employeurs démontrent à ces travailleurs le respect qui leur revient en assurant une meilleure protection de leurs droits et une amélioration de leurs salaires, de leurs avantages sociaux et de leur protection.

(Traduit de l'anglais par Forum ouvrier)

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