Forum ouvrier

12 février 2020

Opposition grandissante à l'offensive antisociale en Ontario

Opposons-nous aux tentatives de blâmer les enseignants pour les problèmes
dans le système d'éducation


Piquetage massif en solidarité avec les enseignants et les travailleurs de l'éducation de l'Ontario, des deux côtés de la rue devant le ministère de l'Éducation, le 6 février 2020.

Grève du 21 février à l'échelle de la province: unissons-nous dans l'action avec les éducateurs du primaire et du secondaire 
Des parents de Toronto parlent en leur propre nom à la défense de l'éducation publique
« Ils ne peuvent pas faire fonctionner les écoles sans nous », disent les intervenants auprès des jeunes et des enfants - Balado l'Éducation est un droit
« Rassemblement sans relâche » organisé par les familles d'enfants ayant un trouble du spectre de l'autisme
Mobilisons-nous pour le 22 février - Congrès d'orientation des progressistes- conservateurs à Niagara

La lutte des travailleurs et travailleuses du secteur public au Québec pour leurs droits et les droits de tous
Désinformation gouvernementale pour justifier le refus de négocier avec les travailleurs/euses
Entrevue avec Sylvain Mallette, président de la Fédération autonome de l'enseignement


Lockout à la raffinerie Co-op à Regina
Dénonçons la criminalisation des travailleurs de la raffinerie Co-op
 


Opposition grandissante à l'offensive antisociale en Ontario

Opposons-nous aux tentatives de blâmer
les enseignants pour les problèmes
dans le système d'éducation

Les enseignants , les travailleurs de l'éducation, les parents et des familles entières continuent de se faire entendre en Ontario dans des actions qui expriment leur opposition à la direction que le gouvernement Ford prend dans la province, marquée notamment par les compressions et la privatisation de l'éducation publique.

À ce stade, tous les enseignants du système d'éducation, de la maternelle à la 12e année, de tous les conseils scolaires sont engagés dans différentes actions de grèves et de grèves du zèle pour exprimer leur non ! Le 13 février, les enseignants du français langue maternelle dans les systèmes public et catholique français de la province, qui sont organisés au sein de l'Association des enseignantes et enseignants franco-ontariens (AEFO), feront une grève provinciale d'une journée. Ils seront rejoints par un certain nombre de districts de la Fédération des enseignantes-enseignants des écoles secondaires de l'Ontario (FEESO) et de la Fédération des enseignantes et des enseignants de l'élémentaire (FEEO). La FEEO organise maintenant à chaque semaine une journée de grève à l'échelle de la province et une journée de grève tournante, ce qui fait que ses membres sont en grève complète deux jours par semaine. Le vendredi 21 février, les quatre syndicats d'enseignants, l'Association des enseignantes et des enseignants catholiques anglo-ontariens (OECTA), la FEEO, la FEESO et l'AEFO, tiendront une journée de grève.

Au lieu de respecter cette opposition, le gouvernement Ford tente maintenant d'inciter le public à s'opposer aux travailleurs de l'éducation en disant que l'ancienneté dans les décisions d'embauche de nouveaux enseignants nuit à la qualité de l'enseignement, tandis que l'arbitraire et le népotisme dans l'embauche amélioreraient prétendument le système. Comme il l'a fait précédemment, le gouvernement Ford a visiblement l'intention de dépeindre les travailleurs de l'éducation qui s'organisent en syndicats pour défendre leurs droits, comme le problème en éducation. En fait, il s'agit d'un facteur important pour la défense de la qualité de l'éducation. Cela montre que l'une des luttes principales à l'heure actuelle concerne le droit de ceux qui fournissent les services publics d'avoir leur mot à dire sur leurs salaires, leurs conditions de travail et les services qu'ils fournissent. Pour le gouvernement Ford, c'est l'élite dirigeante qui doit prendre toutes les décisions alors que les travailleurs devraient simplement être des esclaves salariés, soumis aux caprices de ceux dont le travail consiste à mettre en oeuvre une direction antisociale des services publics. C'est sur ce point que le gouvernement Ford n'a réussi à convaincre personne, car le grand public sait très bien que ceux qui fournissent les services sont ceux qui luttent pour leur amélioration.

Quelques photos des actions du 3 au 11 février

Conseil scolaire catholique d'Ottawa

Conseil scolaire du district de Durham


Conseil scolaire du district de Hasting et Prince Edward


Conseil scolaire du district de Toronto


Conseil scolaire catholique de Toronto


Conseil scolaire du district de Peel



Conseil scolaire du district de Niagara


Conseil scolaire du district de Greater Essex County


Conseil scolaire du district de Lakehead

(Photos : F. Hahn, M. Hardy, Dist 12 de la FEESO, OECTA, R. Reid, J. Thom, TECT, M. Bartlett, L. Kaur, A. Perrier, M. Spagnuola, Sparling)

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Grève du 21 février à l'échelle de la province: unissons-nous dans l'action avec les éducateurs du primaire et du secondaire

Le vendredi 21 février, les enseignants du primaire et du secondaire et les travailleurs de l'éducation représentés par l'Association des enseignantes et des enseignants franco-ontariens (AEFO), la Fédération des enseignantes et des enseignants de l'élémentaire de l'Ontario (FEEO/ETFO), l'Association des enseignantes et des enseignants catholiques anglo-ontariens (OECTA) et la Fédération des enseignantes-enseignants des écoles secondaires de l'Ontario (OSSTF/FEESO) vont débrayer ensemble pour résister aux attaques du gouvernement de l'Ontario contre l'éducation publique.

Selon un communiqué de presse conjoint des syndicats affiliés, « C'est la première fois depuis la manifestation politique de 1997 que le personnel enseignant et les travailleuses et travailleurs en éducation des principaux affiliés en éducation de l'Ontario sortiront tous de leurs salles de classe, le même jour. Presque 200 000 membres du personnel enseignant et travailleuses et travailleurs en éducation déclencheront la grève dans les 72 conseils scolaires, touchant presque 5 000 écoles d'un bout à l'autre de la province dans le but de protester contre les coupures au financement en éducation effectuées par le gouvernement.

« Il est évident pour chacun des quatre syndicats en éducation de l'Ontario et pour nos membres que le gouvernement Ford et le ministre de l'Éducation, Stephen Lecce, se soucient seulement de soutirer des fonds du système d'éducation financée à même les deniers publics et non pas des élèves ou des éducateurs », a déclaré Rémi Sabourin, président de l'AEFO. « Pour réaliser leurs coupures, ils ont sciemment plongé les élèves, les familles, les éducateurs et le système en plein chaos ».

« Nous ressentons déjà les effets des coupures irresponsables en éducation de ce gouvernement », a mentionné Liz Stuart, présidente d'OECTA. « Le gouvernement Ford réduit les soutiens aux élèves ayant des besoins particuliers et des problèmes de santé mentale. Il entasse les élèves dans des classes surpeuplées et oblige les élèves du secondaire à suivre des cours d'apprentissage électronique. Si nous permettons au gouvernement de mettre en oeuvre l'ensemble de son plan, des milliers de postes en enseignement et des dizaines de milliers d'options de cours seront perdues. »

« Les éducateurs dans chaque conseil scolaire ne resteront pas silencieux tandis que le gouvernement Ford continue à anéantir notre système d'éducation financée à même les deniers publics », a ajouté Sam Hammond, président de la FEEO/ETFO. « Nos syndicats et nos membres ont contribué à bâtir le système d'éducation de l'Ontario de calibre mondial. En ne s'attaquant pas sérieusement aux enjeux essentiels pour les élèves et leur apprentissage, le gouvernement Ford s'est moqué des négociations au cours des sept derniers mois. »

« Il apparaît clairement maintenant que le programme du gouvernement Ford est totalement idéologique et pas du tout soucieux d'offrir une éducation de qualité , a déclaré Harvey Bischof, président d'OSSTF/FEESO. « Il retire des ressources du système d'éducation publique et, avec des stratagèmes comme l'apprentissage électronique obligatoire, il pose les jalons pour que les intérêts privés profitent de l'éducation de nos élèves. Nous sommes rassurés qu'autant de parents se soient alliés à nous contre le démantèlement du système d'éducation publique de l'Ontario. »

Forum ouvrier encourage tous ceux qui le peuvent à se joindre à cette action à l'échelle de la province et à visiter les piquets de grève devant les écoles de leurs communautés dans tout l'Ontario pour dire clairement que la lutte pour affirmer l'éducation en tant que droit appartient à tous.

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Des parents de Toronto parlent en leur propre nom
à la défense de l'éducation publique

Le mardi 11 février, le même jour où la Fédération des enseignantes et des enseignants de l'élémentaire de l'Ontario tenait sa grève d'une journée, des parents et des élèves des écoles primaires ont organisé un rassemblement à Queen's Park, pour dénoncer publiquement les compressions antisociales à l'éducation publique en Ontario et appuyer fermement les enseignants et les travailleurs de l'éducation.

L'action a été organisée par les Parents Ontariens contre les compressions en éducation, un réseau de parents préoccupés et actifs à Toronto, pour exiger que le gouvernement Ford cesse de parler en leur nom afin de miner la juste lutte des enseignants de l'Ontario qui défendent leurs conditions de travail et le système d'enseignement public.

Des parents et des élèves ont pris la parole au rassemblement et ont exprimé leur appui sans équivoque aux enseignants et au système d'éducation public. Une femme avec deux enfants à l'école primaire a dit que l'opinion publique est avec les enseignants et, que comme parent, elle connaît de première main le rôle vital et important que les enseignants jouent en Ontario pour éduquer les jeunes et les préparer pour l'avenir. Elle a dit qu'il était inacceptable que le gouvernement attaque les enseignants et les travailleurs de l'éducation au nom des parents et prétend faussement défendre le système d'éducation public.

Un autre parent a reproché aux médias de tenter d'isoler les enseignants et de dénaturer leurs demandes qui sont justes et équitables. Plusieurs élèves de 5e et 6e année ont pris le micro pour dire pourquoi ils étaient venus au rassemblement, exprimant leur préoccupation pour leur propre éducation et celle des futurs élèves de l'Ontario.

Au rassemblement, Parents ontariens contre les compressions en éducation a fait circuler une lettre adressée au premier ministre Ford et au ministre de l'Éducation Stephen Lecce dans laquelle le groupe souligne qu'il a parlé aux médias et lors d'événements publics et sur les réseaux sociaux de « ce que veulent les parents » et de la soi-disant « impatience des parents  » envers les enseignants et autres choses du genre. La lettre conteste ces remarques de Ford et de Lecce, et affirme qu'ils n'ont eu « aucun dialogue significatif » avec les parents ontariens et ne peuvent donc pas parler en leur nom. La lettre les avertit que les parents ne seront pas « exclus de cette conversation » alors que les décisions « que votre gouvernement prend ne touchent pas seulement l'avenir académique des élèves - elles affectent la santé physique et mentale de nos enfants ». De nombreux participants à l'action ont signé la lettre.

La lettre demande expressément l'arrêt immédiat des compressions dans le financement de l'éducation spéciale affectant les élèves les plus démunis ; la réduction du nombre d'élèves dans chaque classe pour améliorer le soutien à tous les élèves et l'embauche de plus d'aides-enseignants (AE) pour fournir plus de soutien pour la gestion des classes. La lettre demande également au gouvernement de rendre l'apprentissage en ligne facultatif et non obligatoire, car cela signifie moins de soutien des enseignants aux élèves et ouvre la voie à une privatisation plus poussée de l'enseignement public. La lettre dénonce également la perte de choix de cours pour les élèves du secondaire et les compressions possibles dans le modèle actuellement en place dans les maternelles et jardins d'enfants, soit un(e) enseignant(e) et un(e) éducateur(trice) de la petite enfance (EPE).

La lettre interpelle Ford et son ministre de l'Éducation : « En tant que parents dans le système scolaire public, nous avons été témoins de l'impact extraordinaire qu'un éducateur peut avoir sur la vie d'un enfant. Nous apprécions les enseignants, les AE, les EPE et le personnel de soutien, et nous leur sommes extrêmement reconnaissants de la lutte qu'ils mènent pour nos enfants. Une grève cause des inconvénients mais l'alternative est bien pire. »

Les parents se sont organisés dans toute la province pour appuyer les enseignants et les travailleurs de l'éducation en grève. La lutte pour gagner l'opinion publique sur la question de l'éducation publique en Ontario fait rage. Les parents ne sont pas dupes des prétentions du gouvernement selon laquelle les changements qu'il essaie de mettre en oeuvre sont dans l'intérêt de l'éducation publique ou de leurs enfants. Ils parlent par expérience et avec conviction, et exigent que le gouvernement les écoute au lieu de « parler pour eux ».



(Photos : FO)

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« Ils ne peuvent pas faire fonctionner les écoles sans nous », disent les intervenants auprès des jeunes et des enfants

Voici l'épisode numéro 26, première partie, du site Web edisaright.ca. Il contient une entrevue (en anglais) avec deux travailleurs en éducation, Lisa et Richard, qui oeuvrent auprès des jeunes et des enfants, sur le travail important qu'ils font et ce à quoi ressemblent les salles de classe en Ontario selon eux.

Pour écouter ou télécharger le balado, cliquer ici 

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« Rassemblement sans relâche » organisé par
les familles d'enfants ayant un trouble
du spectre de l'autisme

Le 18 février, des familles d'enfants ayant un trouble du spectre de l'autisme et des enfants atteints d'autisme organisent une action de masse à Queen's Park pour s'opposer au plan du gouvernement Ford de détruire le système actuel, où le financement des services pour les jeunes ayant un trouble du spectre est déterminé selon les besoins, par une attribution de financement uniforme qui traite ces jeunes comme une statistique sans différences, ni besoins spécifiques. L'action baptisée « sans relâche  » devrait être appuyée par tous ceux qui le peuvent, afin de démontrer qu'on ne permettra pas que les membres les plus vulnérables de la société soient laissés à eux-mêmes et forcés de se débrouiller seuls.

Sans relâche: 2e partie
Le mardi 18 février de 11 h 30 à 13 h 15
Queen's Park, Toronto
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Mobilisons-nous pour le 22 février - Congrès d'orientation des progressistes-conservateurs
à Niagara

Les 21 et 22 février, le Parti progressiste-conservateur de l'Ontario tient son congrès d'orientation à Niagara Falls. La mobilisation des travailleurs de partout en Ontario a commencé et on attend des autobus de tous les coins de la province. Tous ceux qui en sont capables sont invités à se joindre à l'action pour exprimer d'une seule voix la position des travailleurs de l'Ontario en opposition à l'offensive antisociale et pour les droits de tous.

Rassemblement : le peuple contre
les compressions des conservateurs
Samedi, le 22 février à 10 h 30
Centre des congrès Scotiabank
6815, avenue Stanley, Niagara Falls

Pour l'information sur les autobus, cliquer ici

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La lutte des travailleurs et travailleuses du secteur public au Québec
pour leurs droits et les droits de tous

Désinformation gouvernementale pour justifier le refus de négocier avec les travailleurs/euses

Le 3 février dernier, le ministre responsable de l'Administration publique et président du Conseil du trésor, Christian Dubé, a adressé une lettre ouverte aux médias concernant le renouvellement des conventions collectives des quelque 500 000 travailleurs et travailleuses du secteur public. La lettre porte le titre arrogant « Les priorités des Québécois au coeur des négociations ».

On ne trouve nulle part dans la lettre même la moindre référence aux préoccupations et aux revendications que les travailleurs du secteur public ont présentées, non seulement en cette période de renouvellement des conventions collectives, mais depuis au moins 20 ans. Les travailleurs et leurs syndicats parlent des services publics qui en sont à un point de rupture tant les conditions de travail et de livraison des services sont intenables ; les membres du personnel enseignant (voir l'entrevue ci-dessous) parlent de la souffrance des professeurs. Les revendications mises de l'avant par les travailleurs et les syndicats engagés dans le renouvellement des conventions visent à remédier à cette situation par une amélioration substantielle immédiate des conditions de travail et des salaires dans les services publics.

D'une manière irresponsable, voire criminelle, le gouvernement du Québec nie tout cela et lui substitue ce qu'il définit comme étant « les priorités des Québécois ». Selon le gouvernement, les priorités des Québécois sont leur capacité de payer, la situation des préposés aux bénéficiaires et des enseignants en début de carrière qui demande à être améliorée, et la nécessité de bouleverser les méthodes traditionnelles de négociation en établissant des forums de discussion parallèles aux négociations ( ou plutôt à leur absence ) qui sont contrôlés par le gouvernement et auxquels des « sommes additionnelles » seront affectées selon le bon vouloir de celui-ci.

Tout ceci, selon le président du Conseil du trésor, proviendrait du mandat qui aurait été accordé à la Coalition Avenir Québec par l'élection québécoise d'octobre 2018, par laquelle la CAQ a été mise au pouvoir avec seulement 38,5 % du vote enregistré et où 34 % des électeurs ne sont même pas allés voter. Une élection qui a atteint un niveau extrême d'attaques sectaires des partis cartels les uns contre les autres au lieu de discussion politique sur les problèmes auxquels la société québécoise fait face. On lit dans la lettre : « [...] le gouvernement a été élu pour faire des changements qui répondent aux priorités des Québécois. [...] Les Québécois ont clairement manifesté leur désir de changement en rompant avec presque un demi-siècle d'alternance entre le Parti libéral et le Parti québécois lors des élections d'octobre 2018. Les électeurs ont exprimé une volonté qui demande aux élus d'être créatifs ; d'oser explorer de nouvelles avenues pour relever les importants défis qui se posent à nous. »

Le gouvernement du Québec fait courir un grand risque aux travailleurs et à la population en cherchant à perpétuer et à aggraver la crise qui affecte les programmes sociaux et les services publics. Il le fait au profit du diktat de l'État qu'il représente en tant que parti au pouvoir, au profit des manigances pour éliminer les négociations avec les travailleurs, au service des intérêts privés. On ne peut pas accepter que ses intérêts sectaires supplantent l'effort que font les travailleurs du secteur public et leurs syndicats pour faire entendre leur voix et parler en leur nom en vue du renouvellement des conventions collectives.

Est-ce que le gouvernement peut nous expliquer qui sont ces « Québécois » qui examineraient la situation des services publics sous l'angle de « leur capacité de payer », selon la façon dont les gouvernements néolibéraux façonnent leurs budgets. Les Québécois sont les travailleurs et les travailleuses du secteur public, leurs familles, et tous les Québécois qui utilisent les services publics et dépendent d'eux dans leur vie. Ils sont au courant de la crise qui affecte les programmes sociaux et les services publics parce qu'ils la vivent depuis des décennies et ils demandent qu'elle soit résolue à l'avantage des travailleurs et des services. Pour cela, la prise de parole des travailleurs du secteur public et les actions de masse à la défense de leurs revendications sont essentielles.

Le gouvernement du Québec doit reculer et signer des conventions collectives qui comprennent des salaires et des conditions de travail et à la retraite qui sont acceptables aux travailleurs et aux travailleuses du secteur public, ceux-là même qui font le travail pour nous tous.

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Entrevue avec Sylvain Mallette, président de la Fédération autonome de l'enseignement

Forum ouvrier : Quelles sont les grandes lignes des offres du Comité patronal de négociation qui vous ont été présentées à la fin de 2019 ?

Sylvain Mallette : La conception qui a guidé la partie patronale dans la rédaction de ses offres peut être résumée dans les mots suivants : une utilisation optimale du personnel enseignant. À notre avis, c'est violent comme expression. La partie patronale propose de nous utiliser de façon optimale, c'est-à-dire jusqu'à l'épuisement, jusqu'à ce que nous soyons à bout de souffle.

C'est un regard méprisant sur la profession enseignante, utilitariste. On veut faire de nous de simples exécutants. Les profs doivent faire ce qu'on leur dit de faire, comme et quand on leur dit de le faire. En même temps, on les rend responsables de tout ce qui ne va pas. On les rend responsables de la réussite éducative. On leur donne un rôle qui s'apparente à celui de travailleur social, sans leur donner les moyens dont ils ont besoin pour accomplir ce travail.

Il y a une volonté de nier ce qu'est un contrat de travail, alors que nous sommes d'abord une organisation qui négocie un contrat de travail. Oui, nous sommes préoccupés par la réussite éducative et avoir de bonnes conditions de travail assure de meilleures conditions d'apprentissage, en particulier des élèves les plus vulnérables. Et nous avons le droit d'avoir de bonnes conditions de travail. À ce sujet, les conditions dans lesquelles on veut nous faire travailler sont inacceptables. J'ai dit clairement en décembre dernier que le dépôt patronal ne peut pas constituer et ne constituera pas une base de négociation.

Par exemple, la partie patronale veut se donner les moyens de ne plus respecter la moyenne et le nombre maximum d'élèves par classe. Elle veut pouvoir ne plus tenir compte des milieux défavorisés dans la constitution des groupes. Pourtant on sait très bien que vivre en milieu défavorisé, avec les élèves qui subissent la pauvreté et leurs parents qui subissent la pauvreté, cela a des incidences colossales sur la réussite scolaire, sur la culture, sur l'égalité des chances.

Selon les offres patronales, le prof, pour avoir accès à des ressources et des services, devrait faire la démonstration qu'il a tout essayé avant de faire la demande. Qu'est-ce que cela veut dire sinon que le prof va être poussé à bout, qu'on va l'essorer complètement, qu'il va être constamment en position de faiblesse et qu'il devra justifier l'appel aux services et aux ressources. C'est complètement inacceptable. On responsabilise l'enseignant/e sous couvert de valoriser la profession, et on individualise la tâche et on rend le prof responsable de tout, surtout de ce qui ne va pas. On fait porter sur ses seules épaules le poids de la réussite. Autrement dit, le prof se retrouve seul en classe, à peu près abandonné, devant répondre aux besoins de tous les élèves, indépendamment de leurs besoins et du niveau des ressources et des services.

Dans le dépôt patronal, il y a aussi une volonté de faire sauter les sujets sur lesquels il doit y avoir consultation de la direction avec les profs et pour lesquels les profs choisissent le mode de consultation qui convient. C'est un retour de 50 ans en arrière. On parle de revaloriser la profession mais en fait ton rôle est réduit à celui d'obéir.

Cela ne ferait que contribuer à la souffrance des profs. La profession enseignante est en souffrance et on ne vas pas négocier la souffrance de nos profs. Cette souffrance provient de la pénurie de personnel, alors que près de 25 % des profs quittent la profession avant la cinquième année de pratique. Les gens ne choisissent plus notre profession. Les départs précipités à la retraite augmentent, même si cela cause une pénalité dans la prestation de retraite, que les profs s'appauvrissent pendant la retraite en partant de façon précipitée. La détresse psychologique est en hausse. Les taux d'invalidité de courte durée, de deux ans et moins, explosent de façon faramineuse. Cinquante pour cent de ces cas-là sont causés par la détresse psychologique. Les profs n'en peuvent plus. Ils ont sur eux le poids du plus et le poids du moins, faire plus avec moins.

Le dépôt patronal illustre que les gestionnaires ont pensé à des réseaux et des systèmes en droite ligne avec la vision néolibérale du rapport de l'être humain avec l'État et les services publics, et du rapport entre les humains eux-mêmes. On est dans une logique marchande, où l'on fait dans le public ce qu'on fait dans le privé. On adopte des approches « lean », des méthodes de production de l'industrie privée. C'est très troublant.

Dans cette logique, les enfants des milieux défavorisés deviennent simplement quelque chose qui coûte cher. Alors on place les enfants des milieux défavorisés dans des conditions très inférieures à celles des élèves des classes plus favorisées qui ont accès à de la culture et à des services. On dirige les enfants des milieux défavorisés vers les métiers semi-spécialisés dès la fin de la deuxième année du secondaire. On renie l'école publique qui était celle par laquelle on voulait créer une égalité des chances. Maintenant l'école publique est placée en concurrence non seulement avec l'école privée mais avec elle-même parce qu'on accepte que certaines écoles publiques sélectionnent les élèves. Les gens qui ont rédigé le dépôt patronal ne sont plus les gardiens de l'école publique qu'on s'était donnée. Ils ont adhéré à la vision néolibérale marchande et utilitariste du réseau des écoles publiques.

FO : Quelles sont les demandes de la FAE dans ce contexte ?

SM : Nous voulons améliorer le quotidien de nos membres pour faire en sorte que les conditions de travail dans lesquelles nous oeuvrons nous permettent de réaliser notre mission qui est d'instruire les élèves, notamment les élèves des milieux défavorisés qui, avec leurs familles, subissent la pauvreté. C'est dans une approche humaniste que nous entrevoyons la négociation. En négociant nos conditions de travail, nous négocions aussi les conditions d'apprentissage de nos élèves. En tant qu'enseignants et enseignantes, nous avons le droit à de bonnes conditions de travail et comme citoyens et citoyennes nous sommes les gardiens de l'école publique. Si nous acceptons d'affaiblir nos conditions, nous acceptons d'affaiblir l'école publique.

Nous demandons aussi d'être reconnus comme des experts de la pédagogie, qui ont le droit de choisir les meilleures approches pédagogiques, les outils d'évaluation et les méthodes d'intervention auprès de nos élèves.

Nous voulons aussi faire en sorte que les profs aient accès à la permanence. Cela fait partie de la reconnaissance de ce que nous sommes. Ce n'est pas normal que des profs qui approchent de la retraite avec 35 années de service vivent encore des conditions d'emploi précaires. On maintient les profs dans la précarité, et ce sont majoritairement des femmes parce que les femmes représentent 73 % de la profession enseignante.

Nous devons aussi faire en sorte que les écoles forment des groupes qui tiennent compte des difficultés qu'ont les élèves, de chacun des élèves. Le prof qui accueille ce groupe doit avoir moins d'élèves pour répondre à ces réalités. Ou alors on doit ouvrir des classes pour ces élèves ce qui ne veut pas dire les retirer de la société mais reconnaître que, dans leur cheminement, ils ont besoin d'une aide particulière qu'on va leur donner, même si cela coûte plus cher, pour leur donner le temps de se réaliser comme êtres humains.

Il faut affirmer ces choses mais il faut aussi poser des gestes, ce qui pose le problème de la mobilisation et de l'action syndicale. Il faut se solidariser et reconnaître l'utilité de l'action syndicale qui permet d'améliorer les conditions de l'ensemble de la société. Quand nous faisons des gains, cela tire vers le haut ceux qui n'ont pas accès à la syndicalisation, qui ont des horaires coupés, comme toutes les femmes qui doivent avoir deux ou trois emplois et qui vivent dans la précarité.

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Lockout à la raffinerie Co-op à Regina

Dénonçons la criminalisation des travailleurs de la raffinerie Co-op


Les travailleurs de la raffinerie Co-op, membres de la section locale 594 d'Unifor, manifestent devant la législature de la Saskatchewan le 30 janvier 2020.

Le 5 décembre, les Coopératives fédérées (FCL) ont mis en lockout leurs travailleurs de la raffinerie de Regina deux jours après que les travailleurs aient voté de déclencher la grève plutôt que d'accepter la demande de la compagnie à la table de négociation, un affaiblissement significatif de leur régime de retraite. Lors de précédentes séances de négociation, la compagnie s'était engagée à préserver le régime de retraite à prestations déterminées, qui a fait l'objet d'un accord lors de négociations antérieures, il y a plusieurs années de cela.

La compagnie a mis en place les conditions pour pouvoir continuer de produire pendant une grève ou un lockout, plusieurs semaines avant de mettre les travailleurs en lockout. Elle a construit des camps pour loger des travailleurs de remplacement qui sont amenés à la raffinerie par la voie des airs, afin de rendre inefficace la lutte des travailleurs à la défense de leurs droits.

Depuis le début du lockout, FCL a reçu le plein appui de l'État contre les travailleurs. La compagnie a obtenu une injonction qui interdit aux piqueteurs de retenir les camions à l'entrée et à la sortie de la raffinerie pendant plus de dix minutes. À la fin-janvier, les travailleurs de la Co-op ont été rejoints par des centaines de travailleurs d'autres syndicats et d'autres membres d'Unifor de partout au pays pour tenir une ligne de piquetage étanche, dresser des barricades et empêcher les allées et venues à l'entrée et à la sortie de la raffinerie. De nombreux participants, dont des responsables locaux et nationaux d'Unifor, ont été arrêtés pendant ces actions de masse.


Les Métallos se joignent aux travailleurs de la raffinerie Co-op sur la ligne de piquetage,
le 1er février 2020, l'une des multiples délégations de solidarité
accueillies par les travailleurs en lockout.

Les travailleurs d'Unifor et leurs sympathisants ont aussi bloqué les entrées et les sorties de l'installation de stockage de carburant de FCL à Carseland, à environ 65 kilomètres au sud-est de Calgary. Ils ont érigé des clôtures et restreint l'accès des véhicules qui entrent et sortent du terrain du dépôt. Cela a mené à des pénuries périodiques de carburant aux stations-service et cartes-accès de la Co-op dans l'ouest canadien. La compagnie a imposé des restrictions de carburant à ses stations carte-accès de 300 litres de diesel et de 100 litres d'essence. Les travailleurs en lockout blâment avec raison le diktat de FCL qui veut voler leur régime de retraite à prestations déterminées et le refus du gouvernement de la Saskatchewan de forcer FCL à négocier de bonne foi, pour les pénuries de carburant. Ils défendent leur droit de mener une lutte qui a un impact réel et bloque la tentative de la compagnie de saccager les pensions et les avantages sociaux qu'ils ont négociés en refusant de négocier, en faisant entrer des scabs par la voie des airs pour faire fonctionner la raffinerie d'une manière non sécuritaire pour la communauté et en s'appuyant sur les pouvoirs de prérogative de l'État pour écraser les travailleurs et leur syndicat.

Le 6 février, la juge Glenda Campbell a accordé une injonction à l'entreprise qui restreint le piquetage au dépôt de Carseland et demande aux travailleurs d'enlever les barricades. Le lendemain, elle a modifié l'injonction pour permettre à la police d'enlever les barricades si les travailleurs ne le font pas. Le 7 février à Regina, la police a bloqué l'accès à tous les piqueteurs sur la 9e Avenue Nord entre les rues McDonald et Winnipeg et escorté les camions de la Co-op jusqu'à la raffinerie tout en vérifiant les noms des chauffeurs à partir d'une liste fournie par FCL. La police a ensuite enlevé des sites les toilettes et les installations dressées par les travailleurs pour se réchauffer.


La police escorte les camions qui traversent les lignes de piquetage des travailleurs,
le 7 février 2020.

On attend une décision du juge Neil Robertson en réponse à la demande de la compagnie d'imposer des amendes d'un million de dollars plus 100 000 dollars par jour au syndicat local tant que l'injonction n'est pas « respectée ». La compagnie demande aussi que le président de la section locale 594, Kevin Bittman, et son vice-président, Lance Holowachuk, soient mis en prison pendant respectivement 90 et 30 jours s'ils n'appliquent pas l'ordonnance de la cour leur ordonnant d'enlever les barricades qui ont été dressées le 20 janvier.

Le 6 février, le président national d'Unifor, Jerry Dias, a demandé au premier ministre Scott Moe et à FCL de mettre fin immédiatement au conflit en donnant à un médiateur indépendant nommé par le gouvernement le pouvoir d'un arbitre si les parties ne sont pas capables d'en arriver à un accord après sept jours de négociation. Le syndicat avait déclaré que si l'employeur cessait immédiatement son utilisation de travailleurs de remplacement et acceptait de négocier, les lignes de piquetage seraient démantelées et les travailleurs reprendraient le travail dès le lundi 10 février. Une fois de plus, la compagnie a refusé de reprendre les négociations. FCL refuse toujours de le faire et affirme qu'elle ne négociera pas et ne renoncera pas aux travailleurs de remplacement tant que la barricade ne sera pas démantelée.


Ligne de piquetage secondaire à l'installation de Co-op à Dryden, en Ontario, en appui aux travailleurs de la raffinerie Co-op à Regina, le 4 février 2020

(Photos : Unifor 594)

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