Numéro 82 - 9 décembre 2020
La Journée internationale des droits de
l'homme
Le respect des droits humains,
point de départ de toute société digne
de se dire démocratique
• Le
droit de conscience est une question de société
nouvelle
- Pauline Easton -
31e anniversaire de la tuerie de Polytechnique
• Fin
à toute forme de violence contre les femmes!
- Forum des Femmes -
Rétablissez le moratoire sur les expulsions!
• Les
défenseurs des demandeurs d'asile dénoncent la
décision du gouvernement fédéral de reprendre
les expulsions
- Diane Johnston -
• Les
justifications inhumaines du gouvernement pour
reprendre les expulsions
La Journée internationale des
droits de l'homme
Le Canada prétend être un modèle d'égalité et de
respect des droits humains malgré ses violations
de plus en plus flagrantes des droits des humains
au pays et à l'échelle internationale. Non
seulement ses pratiques font-elles du tort aux
personnes directement touchées, mais elles portent
atteinte à la conscience de la société dans son
ensemble. Prenons par exemple le traitement des
travailleurs pendant la pandémie, ou des personnes
âgées dans les résidences de soins de longue durée
qui sont considérées comme sacrifiables, des
sans-abri dont les abris de fortune peuvent être
détruits et les biens brûlés impunément dans des
descentes policières comme cela s'est produit à
Montréal cette semaine, après qu'une situation
semblable ait été dénoncée à Vancouver cet été.
Les pratiques du Canada montrent la noirceur d'âme
des dirigeants qui excusent l'état actuel des
choses et s'en dissocient en prétendant que tel ou
tel problème ne relève pas de leur responsabilité.
Les déclarations concernant l'approvisionnement de
toutes les réserves des Premières Nations en eau
potable et en logements salubres sont des
promesses vides de sens et ne sont pas
justiciables. Ces droits ne sont pas reconnus. Sur
le plan international, l'application des régimes
de sanctions impérialistes américains est un acte
de guerre qui entraîne des conséquences
humanitaires dévastatrices pour lesquelles le
gouvernement n'assume aucune responsabilité.
L'offensive
antisociale se poursuivant sans relâche, de
nombreuses lois sont adoptées qui portent atteinte
aux droits fondamentaux de l'être humain. Le
gouvernement ne s'élève pas contre ces violations
qu'il ne reconnaît même pas.
Au contraire, l'approche du gouvernement sur
toutes les questions est de payer les riches.
Toutes les victimes de cette politique sont vues
comme moins qu'humaines. Tant qu'il en est ainsi,
les grands discours sur les droits à l'égalité,
les droits des minorités, les droits des
autochtones, les droits des femmes, les droits de
l'enfant ou des personnes âgées ou les droits de
citoyenneté, le droit à la vie privée et tous les
autres droits ne sont que des paroles en l'air.
Aucune section du peuple ne peut être traitée de
manière égale quand la discrimination en vertu de
la réalité concrète de chacun est la règle.
Plus important encore, le droit de conscience,
reconnu dans la Déclaration universelle des droits
de l'homme, est naturellement foulé aux pieds
quand l'être humain n'est pas au centre des
préoccupations du gouvernement. Au nom des droits,
les élites dirigeantes au service d'intérêts
privés étroits se livrent à toutes sortes
d'activités criminelles : toutes sortes de
balivernes sont dites sur l'« unité
nationale », la liberté d'opinion politique,
le droit des nations d'exercer leur souveraineté,
la paix, la démocratie et les « droits de la
personne » pour virer la vérité à l'envers. Cela
fait partie de la crise de crédibilité et de
légitimité dans laquelle sont embourbés les
gouvernements dits démocratiques.
L'offensive antisociale néolibérale a conduit la
société dans une direction opposée à ce qui est
requis, à savoir une société qui reconnaît les
droits humains de tous et toutes. Elle part du
principe que seules les revendications de la
petite élite financière ont une quelconque
légitimité.
Sans s'attaquer à ce problème, la célébration de
la Journée internationale des droits de l'homme ne
contribuera pas à la cause des êtres humains et
encore moins à la réalisation de leurs droits.
- Pauline Easton -
Aujourd'hui, dans l'ensemble, les Canadiens
s'inquiètent de ce qui arrive aux sociétés partout
dans le monde, y compris la leur. On leur
donne le droit de faire, de dire et d'agir comme
ils l'entendent tant que cela est sans conséquence
sur le pouvoir qui est au-dessus d'eux. Ils
peuvent acheter ce qu'ils veulent et ils peuvent
voter pour qui ils veulent. La liberté est décrite
tantôt comme un choix du consommateur, tantôt
comme un choix politique. Personne n'est obligé
d'obéir à personne, mais si vous faites quelque
chose qui est contraire aux intérêts privés
étroits dictés par la classe dominante, vous aurez
affaire au « plein poids de la loi ».
En d'autres mots, une caractéristique frappante
de la situation actuelle est que les
gouvernements, qui n'ont aucun argument pour
justifier les terribles choses qu'ils font,
parlent des droits de la même façon : comme
s'il s'agissait d'abstractions sans conséquences.
Comment peut-on avoir une vie de dignité dans un
tel état de choses ?
Une bataille acharnée se mène entre ce qui est
progressiste, positif et sain et ce qui est
régressif, négatif et malsain. Et dans ces
circonstances, les Canadiens doivent trouver
comment s'orienter dans la vie. Ils vivent dans un
monde où les classes existent et, par conséquent,
il y a nécessairement un conflit entre les deux
façons et les deux perspectives qui donnent lieu à
des opinions contradictoires sur pratiquement
tout.
De plus, dans notre société, l'anarchie règne
dans différents domaines, notamment dans
l'économie où, outre la politique consistant à
payer les riches quoi qu'il arrive, tout est
laissé au hasard. Cela comprend le soin et
l'éducation des jeunes générations, le soin et la
protection des personnes âgées et de ceux et
celles qui ont besoin d'une aide sociale et la
prise en charge de tous les autres aspects de la
vie. Tout cela montre que les personnes en
position de pouvoir ne peuvent pas justifier leurs
positions par une logique solide et des faits
tirés de la vie.
Par conséquent, c'est dans l'abstrait qu'elles
trouvent les justifications pour ce qu'elles font.
« Au Canada, tout individu peut faire ce qu'il
veut », disent-elles. Comme si c'était le
seul et dernier mot sur le sujet, comme si cela
pouvait se substituer à une discussion de fond sur
ce qui constitue une démocratie adaptée à son
époque et sur la façon dont les droits sont
définis.
Il n'y a rien qui soutienne cette affirmation. Il
ne peut jamais y avoir de société où un individu
peut faire ce qu'il veut parce que l'existence
même de la société impose des limites à ses
membres. Nous créons notre société, mais pas selon
tous nos souhaits et désirs. Nous ne pouvons pas
dire non plus que nous ne décidons de rien. Ainsi,
l'idée que l'individu peut faire ce qu'il veut est
soit une simple abstraction, un profond
détachement par rapport à la vie, une opinion
négative et malsaine, soit une impossibilité.
B. Paul, le
rédacteur en chef du Nouveau Magazine,
écrivait en octobre 1987, à une époque où la
conscience de la société était basée sur la
supplantation des arrangements de
l'État-providence par l'apparition du
néolibéralisme, appelé néoconservatisme à l'époque[1] :
« Le droit de conscience, le droit d'avoir des
opinions, de les prêcher et de les pratiquer, est
un droit fondamental. Et ce droit n'est pas
uniquement une idée, un exercice intellectuel.
Prenez le cas de l'ouvrier conscient de ses
conditions de vie qui préconise l'abolition du
régime capitaliste. Pourquoi préconiserait-il une
chose pareille ? Parce qu'il ne voit pas
d'autre façon de défendre ses intérêts et
d'assumer son avenir. Cet ouvrier gravite
instinctivement vers le socialisme, alors que pour
le capitaliste l'idée même de l'abolition du
système capitaliste est un péché mortel. »
Il est écrit dans la loi que tous les futurs
citoyens doivent prêter le serment d'allégeance
aux institutions canadiennes, c'est-à-dire à la
société qui est construite sur la base d'une
économie qui paie les riches et qui est membre de
l'alliance militaire impérialiste américaine
agressive qu'est l'OTAN. Cette disposition de la Loi sur la
citoyenneté s'applique uniquement aux
résidents permanents qui veulent obtenir la
citoyenneté ; elle ne s'applique pas aux
Canadiens de naissance.
Cependant, les Canadiens de naissance sont
traités comme des êtres légitimes ou illégitimes
selon qu'ils défendent ou non ce qu'on appelle les
valeurs canadiennes telles que représentées par
les institutions démocratiques dites libérales.
Cela montre que le gouvernement veut préserver le
système qui consiste à payer les riches et faire
respecter le statu quo tout en prétendant qu'une
personne peut croire ce qu'elle veut à condition
de jurer allégeance à « notre mode de vie ».
B. Paul écrit :
« La conscience est d'abord une affaire de
science et de civilisation, de bien-être du
peuple, de liberté et de progrès, d'avancement de
la société. Il n'est donc pas surprenant que
seules les personnes progressistes abordent la
question de la conscience d'une manière sincère,
franche et honnête. Il est généralement reconnu
que la liberté est la reconnaissance de la
nécessité. Notre conscience peut-elle être
détachée de cette nécessité ? »
Sur la question des droits, en particuliers les
droits humains, le gouvernement du Canada défend
une position qui laisse clairement entendre que
les droits sont effectivement une abstraction.
Notre conscience de ce que constitue un droit doit
être encadrée par les institutions démocratiques
libérales anachroniques. Elle consiste à reprendre
la version qui nous est donnée par ces
institutions. Si nous n'acceptons pas ce diktat,
nous sommes des extrémistes d'une espèce ou d'une
autre et nous méritons l'exclusion, la diffamation
et la mort civile. Bref, nous sommes criminalisés.
B. Paul soumet la considération suivante : «
Ce qui est nécessaire aujourd'hui, c'est de créer
une société nouvelle qui sera débarrassée des maux
du capitalisme. Que dire de la conscience qui ne
reconnaît pas cette réalité ? »
Autrement dit, non seulement les contradictions
qui existent aujourd'hui sur la conscience, la
conception du monde et la conduite de chacun
sont-elles très vives, mais elles ont aussi un
caractère urgent. Chacun doit se faire une opinion
sur la direction que doit prendre la société et
chacun doit prendre des mesures concrètes qui la
mènent dans cette direction.
Cela s'applique aussi à la jeune génération. Les
jeunes ressentent un besoin profond de décider de
leur orientation. Cette préoccupation en pousse
certains au nihilisme, au fatalisme et à des
conséquences tragiques. Elle en pousse d'autres à
adopter des positions révolutionnaires. Il en va
de même pour les travailleurs, en particulier les
jeunes travailleurs, d'un océan à l'autre. Tout
cela montre l'importance de la conscience.
Alors que
les gouvernements et les forces de
l'establishment, y compris les médias, les
universités, les groupes de réflexion et les
porte-paroles de toutes sortes d'intérêts
commerciaux et d'organisations sociales et
caritatives, affirment que le droit de s'exprimer
librement est protégé au Canada, la question plus
importante ici est la négation du droit de
conscience. Il n'est pas possible d'avoir le droit
de conscience quand les ennemis de ce droit ont un
tel pouvoir.
Personne ne peut accuser des gens comme Joe
Biden, Justin Trudeau, Chrystia Freeland, Irwin
Cotler et Jason Kenney d'être des hommes et des
femmes de conscience. Non pas parce qu'ils sont
politiquement réactionnaires, mais parce que leur
conception même du monde actuel laisse la question
de la conscience au Moyen-Âge. La question de la
conscience ne peut jamais être réduite au droit de
contre-révolution et de réaction.
« La conscience et la science, la conscience et
le progrès, la conscience et la révolution sont
des choses qui ont beaucoup en commun, écrit B.
Paul. Il est impossible de concevoir l'un sans
l'autre. [...] Ceux qui essaient de justifier des
attitudes égocentriques et autodestructrices
doivent le faire aux dépens de la conscience. Être
sans conscience équivaut à rejeter délibérément
les valeurs humaines et la civilisation, à
favoriser un comportement aveugle et
animal. »
B. Paul souligne qu'il y a une différence entre
préjugé et conscience. « Puisque tous les
individus sont un produit de la société, ils ont
tendance à penser que leurs points de vue et leur
conscience sont quelque chose de fini, de réglé
d'avance. Mais la conscience exige une attitude
tout à fait consciente et entièrement justifiée
par la science, et entièrement dans l'intérêt de
la liberté et du progrès. Nous ne sommes pas des
hommes et des femmes de conscience du simple fait
de ramasser spontanément des choses ici et là. Peu
importe combien de fois on le répétera, ça ne
passe pas. Nous sommes en faveur d'une conscience
bien précise, celle conférée par les
préoccupations et les besoins du peuple. Cette
conscience n'est ni vague ni passagère. Elle puise
sa force dans le progrès de l'humanité vers la
création d'une société où tout ce qui est aveugle
et rétrograde sera chose du passé. »
B. Paul résume cette pensée de façon
succincte : « Le droit de conscience se
rapporte en définitive à la création d'une société
nouvelle. »
Note
1. « À propos de la
conscience », B. Paul, Le Nouveau
Magazine hebdomadaire, 14
octobre 1987
31e anniversaire de la tuerie de
Polytechnique
- Forum des Femmes -
Le 6 décembre 2020 marque le 31e
anniversaire de la tuerie de l'École polytechnique
à Montréal, un des événements les plus tragiques
qui ait frappé la société québécoise et
canadienne. Le 6 décembre 1989, un
individu ouvrait le feu sur 28 personnes,
tuant 14 femmes et blessant 10 femmes
et 4 hommes, avant de se suicider. Au moins
quatre personnes se sont suicidées à la suite de
cette événement tragique.
C'est tout à l'honneur des femmes et de leurs
organisations, en cette occasion, de réitérer leur
demande pour l'élimination de toute forme de
violence faite aux femmes et aux enfants de même
que dans la société. Les 12 jours d'action
contre la violence ont été lancés au Québec
le 25 novembre, Journée internationale pour
l'élimination de la violence à l'égard des femmes,
de même que les 16 jours d'action à l'échelle
internationale du 25 novembre au 10
décembre, Journée internationale des droits de
l'homme. Dans les conditions de la pandémie, des
rencontres virtuelles sur Facebook, des vigiles,
des lancements de livres et d'autres activités se
tiennent durant cette période pour se souvenir et
examiner la bataille dans les conditions
d'aujourd'hui.
Les femmes ne partent pas du point de vue
intéressé des gouvernements qui clament être les
champions des femmes et disent s'opposer à la
violence contre elles du bout des lèvres, la
présentant comme une affaire de comportement, pour
mieux poursuivre leur programme néolibéral
antisocial de destruction et de violence envers la
société en toute impunité. Elles rejettent cette
vision hypocrite qui permet le maintien des
conditions qui contribuent à la violence contre
les femmes. Les femmes et les forces progressistes
mènent une lutte courageuse et inspirante pour
exiger que le gouvernement assume sa
responsabilité sociale envers les femmes. Il doit
garantir leurs droits à la sécurité, à un
logement, à la santé et l'éducation, y compris le
soin des petits, avec toutes les ressources
nécessaires, et contre toutes formes de violence.
Les femmes et la société sont en droit d'exiger
une société responsable. En tant que membres à
part entière de la société et afin de pouvoir
participer pleinement à tous les domaines de la
vie, les femmes se battent pour les conditions de
vie qu'elles méritent. C'est d'autant plus
inspirant dans le contexte de la pandémie de la
COVID-19 qui impose le confinement et l'isolement,
et dans le contexte d'une dégénérescence
politique, sociale, culturelle et économique au
sein de la société.
L'organisation des 12 jours d'action au
Québec a souligné : « Des mois de pandémie et
des semaines de confinement au printemps 2020
ont fait ressortir des violences qu'on croyait
révolues. D'autres se sont aggravées, intensifiées
et transformées : des violences sexistes et
sexuelles, mais aussi la violence de ne pas être
vue ou entendue. Les impacts de ces violences
systémiques se font sentir chez toutes les femmes,
notamment : chez les femmes autochtones, les
travailleuses de la santé, chez les femmes de
minorités nationales et immigrantes, chez les
personnes LGBTQ+, chez les femmes en situation de
handicap, chez les femmes confinées, incarcérées,
sans statut, travailleuses du sexe, et chez les
femmes en situation d'itinérance.
« Alors que les formes de violence se
multiplient, les barrières d'accès aux services
s'élèvent et nous ont montré à quel point aucun
droit ou forme de protection ne peut être tenu
pour acquis. Et les violences systémiques
persistent de façon d'autant plus insidieuse
qu'elles se développent en silence. »
Un problème de comportement, dit le
gouvernement Trudeau
Le premier ministre Justin Trudeau et
la ministre des Relations Couronne-Autochtones,
Carolyn Bennett, ont pris la parole la première
semaine de décembre pour débiter les pires
absurdités et faire des déclarations hypocrites,
tantôt à l'endroit des femmes autochtones, des
femmes qui font partie des minorités nationales,
dites racisées, tantôt à l'endroit des plus
vulnérables. Plus ils nomment et catégorisent les
femmes, plus ils les marginalisent et les
déshumanisent. La ministre Bennett a ainsi invité
les Canadiennes et Canadiens à agir si l'on est
témoin de violence à l'endroit des femmes, à
donner du temps et de l'argent aux organisations
non gouvernementales qui oeuvrent à mettre fin à
la violence, en disant que les femmes racisées,
LGBTQ, les femmes autochtones, etc. « ont besoin
de nous et elles comptent pour nous ».
Dans son intervention, il y a le « nous » et
le « elles » et le rôle du « nous » est
d'aider, d'être conscients de la violence,
d'élever la voix, de donner de l'argent et de se
convertir en bénévoles. Comme si les femmes
n'existaient pas en tant que collectif et que le
gouvernement n'avait pas la responsabilité sociale
de voir au bien-être de toutes et de tous.
Justin Trudeau, pour sa part, a réduit la
violence à une affaire de comportement misogyne et
dit que « les femmes et les filles partout dans le
monde ne devraient pas avoir à craindre de
réussir, d'être ambitieuses, que l'égalité
homme-femme est non négociable maintenant et pour
toujours ».
Le problème d'égalité n'est pas une abstraction
comme le veut le premier ministre. La réalité est
que ceux qui gouvernent ne sont pas les égaux des
victimes de leurs gouvernements.
Le premier ministre a parlé de la violence en
temps de pandémie : « Cela a été difficile
pour tout le monde, alors imaginez combien ça l'a
été encore plus pour ceux qui ne se sentent pas en
sécurité chez eux, mais qui ne savent pas où
aller. Il est incontestable que la violence fondée
sur le sexe a été aggravée par la pandémie. C'est
inacceptable. » Il a annoncé un sempiternel
plan d'action national sur la violence basée sur
le sexe : « Nous sommes prêts à faire ce
travail difficile aux côtés des militants, des
bénévoles et de tous ceux qui se battent en faveur
du changement. » Mais il s'est assuré de
garder le silence sur les conditions de travail
violentes et intenables que subissent les femmes,
y inclus les infirmières, les enseignantes, les
éducatrices de garderie et toutes les femmes qui
travaillent dans les services, pour ne nommer que
celles-là, qui ne sont pas inclues dans son
soi-disant plan national sur la violence basée sur
le sexe.
Sans honte, il a parlé du lobby des armes
d'assaut en disant « qu'il n'y a pas de place dans
notre pays pour des armes conçues pour tuer le
plus grand nombre de personnes dans le plus court
laps de temps. » Il le dit alors que son
gouvernement participe activement à l'achat
d'armements et de matériel de guerre de même
qu'aux activités agressives et militaires de
l'OTAN en tant que membre de cette organisation.
Du 20 au 22 novembre dernier, à
l'Halifax, le Canada a été l'hôte pour la douzième
année consécutive du Forum d'Halifax sur la
sécurité internationale chapeauté par l'OTAN et
appuyé par les plus grands monopoles d'armements
et d'autres intérêts privés qui exigent
l'augmentation des dépenses militaires,
l'intensification des préparatifs de guerre et le
contrôle de tous les intérêts qui s'opposent aux
leurs. Dans ce forum, il a été question de
sophistiquer le recrutement de femmes dans l'armée
comme chair à canon et dans des postes supposément
dirigeants qui disposent de nos jeunes comme de la
chair à canon. La politique étrangère du Canada
est une politique proguerre empreinte d'ingérence,
avec notamment des manigances contre le Venezuela
à la veille de l'élection du 6 décembre, un
appui au gouvernement répressif et corrompu
d'Haïti et le refus de condamner la répression au
Chili. Ce sont tous des « gestes ou des
paroles » qui permettent les pires violences
contre les femmes.
Les femmes à la tête de la lutte pour
l'élimination de la violence contre elles et leurs
enfants
6 décembre 2019 : commémoration à
Montréal à l'occasion du 30e anniversaire de
la tragédie de l'École polytechnique à la
Place-du-6-décembre
L'expérience et la lutte des femmes sont à mille
lieues du discours du gouvernement qui ne dupe
plus même les plus naïfs. Elles élèvent la voix
depuis longtemps dans leurs marches, prises de
parole, manifestations, revendications et
pétitions pour l'élimination de toutes les formes
de violence. Elles demandent un changement dans la
direction de l'économie, pour une direction
prosociale qui nécessite de nouveaux arrangements
et le renouveau des institutions qui ne
fonctionnent plus et bloquent l'avance de la
société.
Les femmes se battent pour le pouvoir de décide
afin d'humaniser la société. Il y a un processus
qui bloque la discussion pour garder les femmes à
la merci des gouvernements qui privent le peuple
du pouvoir de décider pour mettre fin à toute
forme de violence et sur toutes les questions qui
les concernent. Les femmes ont besoin de nouveaux
arrangements lorsqu'elles revendiquent des
investissements massifs en santé, en éducation et
dans les programmes sociaux, dans les organismes
de défense des droits des femmes et les maisons
d'hébergement de même qu'en demandant la fin de la
violence permanente subie par les femmes,
notamment les femmes autochtones dont les milliers
de femmes disparues et assassinées.
En ce 31e anniversaire de la tuerie de
Polytechnique, nous rendons hommage aux 14
jeunes femmes qui ont perdu la vie :
Geneviève Bergeron, Hélène Colgan, Nathalie
Croteau, Barbara Daigneault, Anne-Marie Edward,
Maud Haviernick, Maryse Laganière, Maryse Leclair,
Anne-Marie Lemay, Sonia Pelletier, Michèle
Richard, Annie St-Arneault, Annie Turcotte et
Barbara Klucznik-Widajewicz. Nous rendons hommage
aux femmes autochtones tuées et assassinées et aux
milliers de femmes et enfants victimes de violence
sous toutes ces formes. Nous poursuivons la lutte
pour l'élimination de cette violence !
Rétablissez le moratoire sur les
expulsions!
- Diane Johnston -
Piquetage à Montréal pour demander un statut
permanent pour tous, le 21 novembre 2020
Les défenseurs des demandeurs d'asile déboutés et
des autres travailleurs sans statut condamnent la
décision du gouvernement libéral de Justin Trudeau
de reprendre l'expulsion de ceux qui travaillent
pendant la pandémie de la COVID-19 dans le système
de santé et dans les autres services essentiels
pendant la pandémie de la COVID-19. L'Agence des
services frontaliers du Canada (ASFC) a informé
par courriel les avocats en droit de l'immigration
que l'agence reprendrait les expulsions à compter
du 30 novembre sur lesquelles il y avait un
moratoire depuis le 17 mars.
Le programme spécial
pancanadien très restreint, annoncé le 14
août par les gouvernements fédéral et québécois,
qui doit « fournir une voie vers la résidence
permanente pour les demandeurs d'asile », n'a
pas encore été mis sur pied. Il ne couvrirait que
les aides-infirmières et les préposés aux soins
prodiguant des soins directs aux personnes
infectées par la COVID-19, en autant que toutes
les exigences du programme soient respectées. Même
si le programme a été annoncé par les
gouvernements fédéral et Legault en réponse à
l'immense appréciation de ces travailleurs par le
public, c'est le gouvernement Legault qui aura le
dernier mot sur qui, au Québec, sera accepté dans
le programme de résidence permanente.
Dans un récent courriel aux médias, un
porte-parole du ministère de l'Immigration du
Québec a informé que le programme devrait entrer
en vigueur au cours de l'hiver et que les détails
de son application au Québec seront annoncés «
sous peu ».
Selon Frantz André, du Comité d'action des
personnes sans statut (CAPSS), la décision n'a
fait qu'exacerber la vulnérabilité des
travailleurs essentiels surnommés « anges
gardiens » par le premier ministre du Québec,
François Legault. « Donc, nous commençons [les
expulsions] trois semaines avant Noël, alors que
le programme et les détails du programme spécial
pour les préposés qui sont des demandeurs d'asile
n'ont pas encore été annoncés, a-t-il déclaré en
ajoutant, « j'appelle cela criminel. Ce n'est pas
correct ! »
Frantz André a également indiqué que l'annonce de
la reprise des renvois a laissé de nombreuses
personnes craintives et incertaines quant à leur
admissibilité au programme spécial. Il a ajouté
que certains de ces travailleurs qui auraient pu
être admissibles ont abandonné et décidé de
quitter le Québec et que d'autres ont envisagé de
se suicider.
Il dit que les ordres d'expulsion devraient être
suspendus jusqu'à ce qu'il soit clair qui est
admissible au programme. À son avis, tous les
demandeurs d'asile dans le pays depuis le début de
la pandémie méritent de rester. « Je pense qu'ils
ont tous contribué, économiquement, à sauver des
vies, et si le Canada est mieux c'est grâce à ces
personnes », a-t-il dit, ajoutant que leur
contribution a montré que loin d'être un fardeau
pour le Canada, ils sont un cadeau.
Wilner Cayo, le président de Debout pour la
dignité, a poursuivi dans la même veine, notant
que l'incertitude fait que ceux qui continuent à
travailler pour assurer leur survie sont aux
prises avec une « énorme angoisse ».
Il a également souligné que le programme
totalement hors d'atteinte ne résout pas la
situation à laquelle font face d'autres
travailleurs essentiels, y compris les gardiens de
sécurité et le personnel de nettoyage dans les
maisons de retraite, les chauffeurs de camion
travaillant dans la production alimentaire, etc.
Le président de l'Association québécoise des
avocats et avocates en droit de l'immigration
(AQAADI), Guillaume Cliche-Rivard, a déclaré que
l'annonce par l'Agence des services frontaliers du
Canada était une « très mauvaise nouvelle »
et ne fera qu'ajouter à l'anxiété des demandeurs
d'asile. « Cela veut dire que les gens qui étaient
en attente et dans l'espoir de régulariser leur
statut, certains avec le programme qui vise les
anges gardiens, pourront être renvoyés avant,
a-t-il dit. Ces personnes jouent un rôle important
dans tous les secteurs de notre société. Cela
inclut les personnes comme les agents de sécurité
qui veillent sur nos établissements de santé ou
ceux qui nettoient nos CHSLD qui ne sont inclus
dans aucun programme [de régularisation], mais
qu'on ne peut pas se permettre de perdre. »
Selon lui, à
quelques semaines des vacances des Fêtes et en
plein milieu de cette deuxième vague de pandémie,
le moment choisi pour reprendre les expulsions
n'aurait pas pu être pire. « On est en pleine
recrudescence avec 1400 cas par jour. Qu'on
soit en mesure de laisser partir certaines
personnes me semble complètement illogique, a-t-il
souligné. Ce même gouvernement qui nous dit de ne
pas sortir et d'éviter de prendre l'avion nous dit
qu'il va renvoyer des gens dans leur pays en ce
moment. »
Guillaume Cliche-Rivard fait également remarquer
que l'Agence des services frontaliers du Canada
(ASFC), qui est sous la responsabilité de Sécurité
publique Canada, ne dispose d'aucune information
précise sur une personne visée par l'expulsion,
sur l'emploi qu'elle occupe par exemple. «
L'Agence ne sait pas quel travail font ces
personnes. Même si ces procédures étaient
suspendues pour certaines personnes qui
travaillent dans les services essentiels, rien
n'empêche légalement l'expulsion d'un préposé aux
bénéficiaires. »
Il a demandé à l'ASFC de rétablir immédiatement
son moratoire sur les expulsions.
« Compte tenu de la pandémie, nous mettons la
santé de ces personnes en danger en les renvoyant,
a déclaré l'avocat québécois en immigration
Stéphane Handfield. C'est une pandémie mondiale.
Pourquoi l'ASFC fait-elle cela maintenant ?
Cela n'a pas de sens. »
Pour Marjorie Villefranche, directrice générale
de la Maison d'Haïti et coporte-parole de la
Coalition pour la régularisation des statuts,
cette annonce n'est pas une surprise. « Ils
choisissent un moment où on ne va pas faire trop
attention à ça, a-t-elle déclaré. C'est dans leur
habitude. On est un peu avant Noël, et tout le
monde est occupé à autre chose, a-t-elle ajouté.
Ça veut dire que les personnes qui sont des
demandeurs d'asile déboutés, et qui justement
pourraient bientôt voir leur statut se
régulariser, sont à risque d'être
expulsées. ».
Marjorie Villefranche craint également que les
personnes qui prodiguaient des soins directs aux
patients ne soient expulsées avant que le
programme de régularisation ne voie le jour, de
même que quelque 5 000 demandeurs
d'asile déboutés déjà dans le pays, qui auraient
pu être inclus dans le même programme s'il avait
été élargi pour couvrir tous les travailleurs des
services essentiels.
(Sources : Presse
canadienne, CBC News, CTV News, Le Devoir.
Photos : LML, J4MW, OFL)
À la toute fin du mois de novembre, l'Agence des
services frontaliers du Canada (ASFC) a commencé à
aviser les avocats de l'immigration qu'à compter
du 30 novembre, elle reprendrait les
expulsions. Les expulsions étaient suspendues
depuis le 17 mars.
Le directeur de l'application de la loi à l'ASFC,
Chris Lorenz, a envoyé un courriel indiquant qu'à
la suite de consultations avec Santé Canada et
l'Agence de la santé publique du Canada, les
renvois devaient recommencer. Il a ajouté que les
expulsés recevraient des masques non médicaux, des
gants et un désinfectant pour les mains pendant le
voyage.
« La décision a été prise en tenant compte des
différents facteurs mondiaux concernant la
COVID-19, tels que la réouverture progressive des
pays, l'émergence d'options de vaccination viables
et les stratégies coordonnées entre les pays et
les compagnies de transport aérien pour atténuer
la transmission possible », a écrit Lorenz.
Il a également noté que la décision d'arrêter la
plupart des expulsions pendant la pandémie « était
une mesure exceptionnelle qui n'était pas partagée
par la communauté internationale ».
« Le renvoi rapide des demandeurs déboutés joue
un rôle crucial dans le soutien de l'intégrité du
régime d'asile du Canada », a déclaré l'ASFC
dans un communiqué, ajoutant qu'elle « a
l'obligation légale de renvoyer dès que possible
les personnes qui n'ont pas le droit légal de
rester au Canada. ».
Le gouvernement fédéral a déclaré qu'il
continuerait de faire des exceptions pour les
demandeurs de 14 pays où il affirme que leur
sécurité pourrait être compromise[1].
La porte-parole de l'ASFC, Rebecca Purdy, a
déclaré que « l'Agence ne renverra pas ceux qui
pourraient être admissibles à la résidence
permanente en vertu de la politique publique des
anges gardiens ». Le programme, annoncé
le 14 août, n'a pas encore été finalisé. Elle
a ajouté que le nombre d'expulsions « continuera à
être considérablement réduit pendant un certain
temps et que tous les individus continueront
d'avoir accès à tous les recours auxquels ils ont
droit en vertu de la loi ».
Les fonctionnaires du bureau du ministre de
l'Immigration Marco Mendicino ont également
confirmé que ceux qui pourraient être admissibles
au programme spécial ne seraient pas expulsés. «
Nous pouvons garantir qu'en ce qui concerne ces
personnes, il n'y aura pas de renvois », ont
indiqué les fonctionnaires, confirmant qu'ils
travaillent en collaboration avec le ministère de
la Sécurité publique en charge des expulsions.
Cependant, ils ont ajouté qu'ils « ne peuvent
garantir que les gardiens de sécurité ou les
femmes de ménage ne seront pas expulsés ».
Note
1. Afghanistan, Burundi,
République centrafricaine, République démocratique
du Congo, Bande de Gaza, Haïti, Irak, Libye, Mali,
Somalie, Soudan du sud, Syrie, Venezuela, Yémen.
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