31e anniversaire de la tuerie de Polytechnique

Fin à toute forme de violence contre les femmes!

Le 6 décembre 2020 marque le 31e anniversaire de la tuerie de l'École polytechnique à Montréal, un des événements les plus tragiques qui ait frappé la société québécoise et canadienne. Le 6 décembre 1989, un individu ouvrait le feu sur 28 personnes, tuant 14 femmes et blessant 10 femmes et 4 hommes, avant de se suicider. Au moins quatre personnes se sont suicidées à la suite de cette événement tragique.

C'est tout à l'honneur des femmes et de leurs organisations, en cette occasion, de réitérer leur demande pour l'élimination de toute forme de violence faite aux femmes et aux enfants de même que dans la société. Les 12 jours d'action contre la violence ont été lancés au Québec le 25 novembre, Journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes, de même que les 16 jours d'action à l'échelle internationale du 25 novembre au 10 décembre, Journée internationale des droits de l'homme. Dans les conditions de la pandémie, des rencontres virtuelles sur Facebook, des vigiles, des lancements de livres et d'autres activités se tiennent durant cette période pour se souvenir et examiner la bataille dans les conditions d'aujourd'hui.

Les femmes ne partent pas du point de vue intéressé des gouvernements qui clament être les champions des femmes et disent s'opposer à la violence contre elles du bout des lèvres, la présentant comme une affaire de comportement, pour mieux poursuivre leur programme néolibéral antisocial de destruction et de violence envers la société en toute impunité. Elles rejettent cette vision hypocrite qui permet le maintien des conditions qui contribuent à la violence contre les femmes. Les femmes et les forces progressistes mènent une lutte courageuse et inspirante pour exiger que le gouvernement assume sa responsabilité sociale envers les femmes. Il doit garantir leurs droits à la sécurité, à un logement, à la santé et l'éducation, y compris le soin des petits, avec toutes les ressources nécessaires, et contre toutes formes de violence. Les femmes et la société sont en droit d'exiger une société responsable. En tant que membres à part entière de la société et afin de pouvoir participer pleinement à tous les domaines de la vie, les femmes se battent pour les conditions de vie qu'elles méritent. C'est d'autant plus inspirant dans le contexte de la pandémie de la COVID-19 qui impose le confinement et l'isolement, et dans le contexte d'une dégénérescence politique, sociale, culturelle et économique au sein de la société.

L'organisation des 12 jours d'action au Québec a souligné : « Des mois de pandémie et des semaines de confinement au printemps 2020 ont fait ressortir des violences qu'on croyait révolues. D'autres se sont aggravées, intensifiées et transformées : des violences sexistes et sexuelles, mais aussi la violence de ne pas être vue ou entendue. Les impacts de ces violences systémiques se font sentir chez toutes les femmes, notamment : chez les femmes autochtones, les travailleuses de la santé, chez les femmes de minorités nationales et immigrantes, chez les personnes LGBTQ+, chez les femmes en situation de handicap, chez les femmes confinées, incarcérées, sans statut, travailleuses du sexe, et chez les femmes en situation d'itinérance.

« Alors que les formes de violence se multiplient, les barrières d'accès aux services s'élèvent et nous ont montré à quel point aucun droit ou forme de protection ne peut être tenu pour acquis. Et les violences systémiques persistent de façon d'autant plus insidieuse qu'elles se développent en silence. »

Un problème de comportement, dit le gouvernement Trudeau

Le premier ministre Justin Trudeau et la ministre des Relations Couronne-Autochtones, Carolyn Bennett, ont pris la parole la première semaine de décembre pour débiter les pires absurdités et faire des déclarations hypocrites, tantôt à l'endroit des femmes autochtones, des femmes qui font partie des minorités nationales, dites racisées, tantôt à l'endroit des plus vulnérables. Plus ils nomment et catégorisent les femmes, plus ils les marginalisent et les déshumanisent. La ministre Bennett a ainsi invité les Canadiennes et Canadiens à agir si l'on est témoin de violence à l'endroit des femmes, à donner du temps et de l'argent aux organisations non gouvernementales qui oeuvrent à mettre fin à la violence, en disant que les femmes racisées, LGBTQ, les femmes autochtones, etc. « ont besoin de nous et elles comptent pour nous ».

Dans son intervention, il y a le « nous » et le « elles » et le rôle du « nous » est d'aider, d'être conscients de la violence, d'élever la voix, de donner de l'argent et de se convertir en bénévoles. Comme si les femmes n'existaient pas en tant que collectif et que le gouvernement n'avait pas la responsabilité sociale de voir au bien-être de toutes et de tous.

Justin Trudeau, pour sa part, a réduit la violence à une affaire de comportement misogyne et dit que « les femmes et les filles partout dans le monde ne devraient pas avoir à craindre de réussir, d'être ambitieuses, que l'égalité homme-femme est non négociable maintenant et pour toujours ».

Le problème d'égalité n'est pas une abstraction comme le veut le premier ministre. La réalité est que ceux qui gouvernent ne sont pas les égaux des victimes de leurs gouvernements.

Le premier ministre a parlé de la violence en temps de pandémie : « Cela a été difficile pour tout le monde, alors imaginez combien ça l'a été encore plus pour ceux qui ne se sentent pas en sécurité chez eux, mais qui ne savent pas où aller. Il est incontestable que la violence fondée sur le sexe a été aggravée par la pandémie. C'est inacceptable. » Il a annoncé un sempiternel plan d'action national sur la violence basée sur le sexe : « Nous sommes prêts à faire ce travail difficile aux côtés des militants, des bénévoles et de tous ceux qui se battent en faveur du changement. » Mais il s'est assuré de garder le silence sur les conditions de travail violentes et intenables que subissent les femmes, y inclus les infirmières, les enseignantes, les éducatrices de garderie et toutes les femmes qui travaillent dans les services, pour ne nommer que celles-là, qui ne sont pas inclues dans son soi-disant plan national sur la violence basée sur le sexe.

Sans honte, il a parlé du lobby des armes d'assaut en disant « qu'il n'y a pas de place dans notre pays pour des armes conçues pour tuer le plus grand nombre de personnes dans le plus court laps de temps. » Il le dit alors que son gouvernement participe activement à l'achat d'armements et de matériel de guerre de même qu'aux activités agressives et militaires de l'OTAN en tant que membre de cette organisation. Du 20 au 22 novembre dernier, à l'Halifax, le Canada a été l'hôte pour la douzième année consécutive du Forum d'Halifax sur la sécurité internationale chapeauté par l'OTAN et appuyé par les plus grands monopoles d'armements et d'autres intérêts privés qui exigent l'augmentation des dépenses militaires, l'intensification des préparatifs de guerre et le contrôle de tous les intérêts qui s'opposent aux leurs. Dans ce forum, il a été question de sophistiquer le recrutement de femmes dans l'armée comme chair à canon et dans des postes supposément dirigeants qui disposent de nos jeunes comme de la chair à canon. La politique étrangère du Canada est une politique proguerre empreinte d'ingérence, avec notamment des manigances contre le Venezuela à la veille de l'élection du 6 décembre, un appui au gouvernement répressif et corrompu d'Haïti et le refus de condamner la répression au Chili. Ce sont tous des « gestes ou des paroles » qui permettent les pires violences contre les femmes.

Les femmes à la tête de la lutte pour l'élimination de la violence contre elles et leurs enfants


6 décembre 2019 : commémoration à Montréal à l'occasion du 30e anniversaire de la tragédie de l'École polytechnique à la Place-du-6-décembre

L'expérience et la lutte des femmes sont à mille lieues du discours du gouvernement qui ne dupe plus même les plus naïfs. Elles élèvent la voix depuis longtemps dans leurs marches, prises de parole, manifestations, revendications et pétitions pour l'élimination de toutes les formes de violence. Elles demandent un changement dans la direction de l'économie, pour une direction prosociale qui nécessite de nouveaux arrangements et le renouveau des institutions qui ne fonctionnent plus et bloquent l'avance de la société.

Les femmes se battent pour le pouvoir de décide afin d'humaniser la société. Il y a un processus qui bloque la discussion pour garder les femmes à la merci des gouvernements qui privent le peuple du pouvoir de décider pour mettre fin à toute forme de violence et sur toutes les questions qui les concernent. Les femmes ont besoin de nouveaux arrangements lorsqu'elles revendiquent des investissements massifs en santé, en éducation et dans les programmes sociaux, dans les organismes de défense des droits des femmes et les maisons d'hébergement de même qu'en demandant la fin de la violence permanente subie par les femmes, notamment les femmes autochtones dont les milliers de femmes disparues et assassinées.

En ce 31e anniversaire de la tuerie de Polytechnique, nous rendons hommage aux 14 jeunes femmes qui ont perdu la vie : Geneviève Bergeron, Hélène Colgan, Nathalie Croteau, Barbara Daigneault, Anne-Marie Edward, Maud Haviernick, Maryse Laganière, Maryse Leclair, Anne-Marie Lemay, Sonia Pelletier, Michèle Richard, Annie St-Arneault, Annie Turcotte et Barbara Klucznik-Widajewicz. Nous rendons hommage aux femmes autochtones tuées et assassinées et aux milliers de femmes et enfants victimes de violence sous toutes ces formes. Nous poursuivons la lutte pour l'élimination de cette violence !

(Photos : LML, A. Funduk)


Cet article est paru dans

Volume 50 Numéro 82 - 9 décembre 2020

Lien de l'article:
31e anniversaire de la tuerie de Polytechnique: Fin à toute forme de violence contre les femmes! - Forum des Femmes


    

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