Rassemblement antiguerre à Halifax contre
l'agression impérialiste américaine de l'Iran,
le 11 janvier 2020
Le Forum d'Halifax sur la sécurité
internationale (FHSI), qui s'est tenu du 20
au 22 novembre 2020 à Halifax, se décrit
lui-même comme « la première réunion importante de
dirigeants de la défense et de la sécurité depuis
les élections présidentielles aux
États-Unis ». À son grand désespoir, les
élections présidentielles aux États-Unis ne sont
pas encore terminées. Seuls une vingtaine de pays
ont reconnu Joe Biden comme le nouveau président
des États-Unis et d'autres attendent une sorte
d'annonce formelle par une quelconque commission
électorale. Cependant, les institutions
américaines sont plongées dans une telle crise
qu'elles sont incapables de décider quelle est
cette autorité.
Conséquemment, au
lieu que les élections américaines aient fourni
une ligne de marche claire aux fauteurs de guerre
rassemblés à Halifax, les dysfonctionnements des
institutions démocratiques américaines des
États-Unis sont quelque chose que le FHSI est
incapable de surmonter. Dès le départ, l'ordre du
jour du FHSI, qui repose sur la prétention que
l'adoption de bonnes politiques les sortira de la
crise profonde dans laquelle ils sont plongés, est
rongé par la crise.
Les tentatives de rejeter la responsabilité de la
crise sur tel ou tel individu ne sont pas
convaincantes. La crise ne peut pas être surmontée
parce que les impérialistes sont incapables de
surmonter les conditions qui ont dépassé de
beaucoup leur capacité de tout contrôler par leur
monopole de l'usage de la force. L'ordre du jour
du FHSI reflète les problèmes auxquels font face
les cercles dirigeants pour décider comment
maintenir le rôle des États-Unis en tant que «
dirigeants indispensables ». On le voit aux
trois principales sessions publiques : « La
démocratie contre nous-mêmes : divisés, nous
échouons », « 75 ans plus tard :
reconstruire l'ordre mondial démocratique »
et « L'après 2020 : le monde avec les
États-Unis ».
L'ordre du jour révèle les problèmes toujours
plus graves auxquels font face les cercles
dominants qui sont prisonniers des vieilles formes
qui sont anachroniques et ne servent plus leur
objectif aujourd'hui. Leur modèle d'État-nation a
d'abord été établi après la guerre civile en
Angleterre dans les années 1660, puis
perfectionné et imposé à l'humanité sous la forme
d'États démocratiques libéraux au XIXe et au début
du XXe siècle reposant sur les définitions
intéressées de « paix, ordre et bon
gouvernement », puis renforcé après la
Deuxième Guerre mondiale sous la forme de
l'État-providence basé sur l'idéologie et les
mécanismes anticommunistes de la guerre froide et
visant à maintenir les peuples désinformés et
privés de pouvoir. Depuis la chute de l'Union
soviétique il y a trente ans, cette démocratie
impérialiste, loin d'avoir prouvé sa supériorité,
a démontré son essence élitiste, raciste et
fondamentalement inhumaine et son incapacité à
fournir une quelconque justification pour
elle-même et son monopole sur l'usage de la force
au pays et à l'échelle internationale.
L'intensification
des conflits entre les factions rivales qui
luttent pour le pouvoir, tant au niveau interne,
pour le contrôle des pouvoirs exécutifs et
militaires, qu'à l'échelle internationale, et en
particulier au sein du bloc de l'OTAN, donne lieu
à des expressions de plus en plus extrêmes d'une
obsession morbide pour la défaite. Leur désespoir
est palpable alors que ces factions complotent et
manigancent comment former les femmes et les
jeunes pour qu'ils prennent en main les fonctions
de la bureaucratie afin qu'elle continue à
fonctionner tout en maintenant les peuples dans un
état de dispersion et privés de pouvoir. Malgré le
tapage sur la recherche de solutions pacifiques
aux problèmes, et sur la fin du scénario de «
guerre perpétuelle », ou son maintien sous
prétexte qu'il constitue une méthode «
antiterroriste robuste » légitime, ce conflit
ne vise pas à éliminer les gouvernements de guerre
et les économies de guerre et tout ce qu'ils
signifient au pays et à l'étranger.
Les Canadiens exigent que le Canada sorte de
l'OTAN et de NORAD comme fondement d'une nouvelle
direction des relations étrangères et d'une
économie qui s'appuie sur ses propres forces et
sur l'entreprise publique afin de garantir les
droits de tous et de toutes. Toutes les tentatives
d'imposer l'OTAN au corps politique comme étant
une « valeur canadienne » et encore plus
comme une partie intégrante des institutions
décisionnelles, vont à l'encontre de ce que
veulent les Canadiens. Criminaliser leur
opposition en disant qu'elle constitue une «
ingérence étrangère » montre l'ampleur du
désespoir des cercles dirigeants, car aucun des
arguments qu'ils mettent de l'avant ne peut
justifier leur économie et leurs arrangements de
guerre. Malgré les efforts de l'Association
canadienne pour l'OTAN, dont le Parlement canadien
s'est fait l'écho, d'imposer le point de vue que
l'opposition des Canadiens à l'OTAN constitue de
l'ingérence étrangère dans les affaires
intérieures du Canada, cela n'est pas accepté.
Criminaliser les positions et la voix des
Canadiens en disant qu'ils sont, volontairement ou
non, « dupes de la Russie » ou des « agents
des Chinois » ou autres choses du genre, ne
fera qu'aggraver la crise dans laquelle les
cercles dirigeants sont plongés.
Le spectre de la Chine est une fois de plus dans
la ligne de mire du FHSI pour servir cette fin.
C'est absolument méprisable. Conformément à son
initiative tapageuse visant à présenter un plan
concerté et stratégique transatlantique contre la
Chine et la République populaire démocratique de
Corée, le sujet de discussion dominant des
sessions qui sont diffusées est « La démocratie
contre la Chine : le grand jeu ». Cela
évoque de façon délibérée la quête eurocentrique
du XIX e siècle de l'impérialisme anglo-américain
appelée « Le grand jeu » pour dominer l'Asie,
ses peuples et leur vaste richesse minérale, et la
« mission civilisatrice de l'homme blanc ».
Cela ne fait que révéler l'étendue de la
banqueroute de l'impérialisme parce que nous
sommes au XXIe siècle et non au XIXe siècle et
qu'il y a longtemps que la Chine s'est levée. En
dépit des efforts des impérialistes américains et
de leurs hommes de main, ils ne sont pas capables
d'échapper à l'histoire et les peuples
n'accepteront pas que la force et la violence
soient utilisées pour régler les problèmes en
faveur des intérêts impérialistes rivaux.
Tony Seed prend la parole à un rassemblement
antiguerre à l'extérieur du Forum d'Halifax sur la
sécurité internationale en novembre 2012. Des
rassemblements ont été organisés chaque année
depuis le début des forums.
Une des questions importantes qui est discutée au
FHSI et parmi les cercles dominants concerne le
discours sur les « guerres sans fin », aussi
appelées les « guerres éternelles ». Il ne
s'agit pas d'une fin de l'agression et de
l'ingérence, mais d'une nouvelle forme pour
celles-ci. Joe Biden et Donald Trump ont tous deux
parlé démagogiquement contre les « guerres sans
fin » pendant les élections aux États-Unis.
La voie de Donald Trump de la destruction ouverte,
du recours à la force et de l'élimination de
l'état de droit, n'a pas réussi à unir les
factions rivales, y compris les forces armées.
L'équipe Biden, comme ce fut le cas de Barack
Obama qui a mis de l'avant sa doctrine de la
guerre des drones après la guerre contre la
terreur et la guerre préventive de George Bush
reposant sur le « bien contre le mal », a
besoin d'un cadre juridique et théorique pour
justifier l'injustifiable. C'est également le cas
du Canada : justifier en droit la violation
ouverte des droits que l'empire américain pratique
couramment.
Le fantasme de Joe Biden hante aussi le
gouvernement Trudeau : transcender les
conditions en imposant une autorité qui ne
correspond pas aux besoins de l'époque. Ils ont
besoin d'une justification pour réprimer
l'agitation intérieure grandissante et unifier les
factions rivales de l'élite dominante des
États-Unis et unifier aussi les « alliés » du
bloc de l'OTAN, qui sont divisés et fragmentés sur
la base de leurs propres intérêts privés. Il
n'existe pas de consensus autour des demandes des
États-Unis d'augmenter les dépenses militaires, de
sauvegarder l'hégémonie des États-Unis et de
perpétuer les notions de guerre froide de «
sécurité collective » et de « partenariat
transatlantique ». Leur « coalition des
volontaires », obtenue par la coercition et
composée d'une trentaine de pays seulement sur
les 193 pays membres des Nations unies, ne
gagne pas de terrain, mais est au contraire de
plus en plus isolée et dénoncée. Au moment où le
Groupe des 77 et le Mouvement des non-alignés
agissent dans le cadre des Nations unies et de
l'état de droit international tel qu'établi dans
la période de l'après-guerre alors que l'OTAN ne
le fait pas, les conflits ne peuvent que
s'accroître. L'OTAN est une alliance militaire
voyou qui bafoue l'état de droit international et
dont les activités agressives sont dénoncées par
la majorité des peuples du monde, qui la
qualifient d'« Organisation terroriste de
l'Atlantique Nord ».
Le Marxiste-Léniniste publie un
supplément cette semaine qui fournit de
l'information sur l'ordre du jour du 12e
Forum d'Halifax sur la sécurité internationale.
(Photos : LML, R. Devet)
Supplément
Forum belliciste d'Halifax
sur la sécurité
internationale
Les infirmières de San Francisco manifestent pour
des niveaux d'effectifs sûrs et les conditions de
travail dont elles ont besoin, le 12 novembre
2020.
La poursuite de l'affrontement sur les résultats
de l'élection présidentielle aux États-Unis, face
à une multiplication des cas de COVID-19 dans tout
le pays, ne fait que confirmer le sentiment
populaire que le pays va dans la mauvaise
direction et que ceux qui gouvernent, à tous les
niveaux, sont inaptes à gouverner. Les
travailleurs de la santé et les autres premiers
intervenants et travailleurs essentiels ne
disposent toujours pas de suffisamment
d'équipements de protection individuelle (ÉPI) et
de tests. Par exemple, les infirmières du
Minnesota qui s'occupent des patients atteints de
COVID-19 disent qu'elles n'ont pas été testées
depuis le début de la pandémie. Les pompiers et
les enseignants dorment dans leur voiture pour ne
pas infecter leurs familles. L'opinion très
répandue est que ce qui se passe est criminel et
que le gouvernement doit être tenu pour
responsable de tous les décès et du fait qu'il ne
garantit pas la gratuité des ÉPI, des tests et des
soins de santé pour tous ceux et celles qui en ont
besoin.
Il y a 11,4
millions de cas diagnostiqués et ce chiffre ne
cesse d'augmenter, soit environ un Américain
sur 32. Déjà 250 000 personnes sont
mortes et ce chiffre atteindra 300 000
dans les deux prochains mois.
Les États-Unis ont toujours été le pays qui
compte le plus grand nombre de cas et de décès
dans le monde. Le nombre moyen de nouveaux cas par
jour s'élève actuellement à plus de
158 000 – plus de cas par jour que le
nombre total de cas signalés en Chine
(91 906), qui a pourtant une population bien
plus importante. Un million de nouveaux cas sont
apparus au cours de la dernière semaine.
Pour visualiser ce que
représentent 250 000 décès, cela
pourrait être la population entière de villes
comme Rochester dans l'État de New York, Norfolk
en Virginie, Birmingham en Alabama, Bâton Rouge en
Louisiane, Irving au Texas, Grand Rapids au
Michigan, Des Moines en Iowa et Spokane dans
l'État de Washington.
Malgré cette réalité, s'il est généralement
accepté que Joe Biden a remporté l'élection
présidentielle, le conflit persiste au sein des
cercles dirigeants sur qui contrôle les rênes du
pouvoir de la présidence. Cela se reflète dans les
poursuites judiciaires alors que certains parlent
d'une « transition pacifique » de la
présidence.
Donald Trump a intenté une trentaine de
poursuites à ce jour, dont la plupart ont été
rejetées, mais d'autres pourraient potentiellement
empêcher Biden de conserver les 270 voix du
collège électoral nécessaires pour être président.
Si les résultats ne sont pas certifiés en
Pennsylvanie (20 grands électeurs) et au Michigan
ou en Géorgie (chacun avec 16 grands
électeurs), ou au Nevada (6), par exemple, Joe
Biden n'aurait pas les 270 votes requis. Ces
décisions pourraient être rendues par la Cour
suprême. Si aucun candidat n'obtient les 270
voix, la Chambre des représentants serait appelée
à trancher, ce qui pourrait favoriser Donald Trump
puisque chaque État ne dispose que d'une seule
voix. Alternativement, si les 600 000
travailleurs qui ont appelé à une grève générale
n'acceptent pas la légitimité de la décision des
tribunaux ou de la Chambre des représentants, ils
pourraient rassembler des millions d'autres
personnes, un scénario que toutes les factions des
cercles dirigeants veulent éviter. Le conflit au
sein des cercles dirigeants aggrave la crise dans
laquelle ils se trouvent, notamment en renforçant
la résistance et la revendication d'une démocratie
qui favorise le peuple.
Les travailleurs des compagnies aériennes se
mobilisent pour prendre les mesures nécessaires à
la sécurité sur le lieu de travail, le 18 novembre
2020.
Une « transition pacifique »
Joe Biden multiplie ses appels à la coopération
de Donald Trump pour la transition. Le 18
novembre, il a déclaré à propos de Trump : «
C'est tout simplement scandaleux ce qu'il
fait. » Il n'exclut pas une action en
justice.
Reflet de la politisation des différentes agences
du cabinet, le procureur général William Barr,
chef du département de la Justice, a envoyé une
note autorisant les procureurs fédéraux à enquêter
sur les allégations de fraude électorale avant la
certification par l'État – un autre moyen de
retarder ce processus. Richard Pilger, le chef de
la division des crimes électoraux du département
de la Justice, a immédiatement démissionné et a
dénoncé le geste de William Barr. Seize procureurs
de cette division, responsables de l'application
des lois électorales fédérales, ont demandé à
William Barr d'annuler la note de service. Ils ont
déclaré qu'elle n'est pas fondée sur des faits et
qu'elle « pousse les procureurs de carrière dans
la politique partisane ». Comme c'est plus
largement le cas, le conflit reflète les divisions
au sein et entre les différentes agences de niveau
ministériel qui composent le Bureau du président.
Les arrangements de la gouvernance sont en train
d'être restructurés pour renforcer les diktats de
haut en bas et la politisation des différentes
agences sert cette cause.
L'accent est également mis sur l'Administration
des services généraux, qui doit déterminer qui est
le vainqueur. Elle s'est abstenue de le faire
jusqu'à présent, avec comme conséquence que des
ressources de plusieurs centaines de millions de
dollars et les réunions conjointes entre les
forces Trump et Biden sont bloquées. Deux des
principales préoccupations soulevées par le camp
Biden et d'autres sont l'accès aux briefings
présidentiels qui traitent des questions de
sécurité tant étrangères que nationales et les
informations sur la COVID-19, y compris les
niveaux actuels des stocks fédéraux d'ÉPI et les
plans de distribution d'un vaccin. Biden a
répété : « Davantage de gens pourraient
mourir si nous ne coordonnons pas nos
efforts. »
Le processus de transition concerne à la fois la
continuité du pouvoir des oligarques et
l'apposition de l'empreinte Biden sur la
bureaucratie. Cela comprend le remplacement de
quelque 4 000 personnes nommées pour des
motifs politiques, dont 1 200 doivent
être approuvées par le Sénat, dans une quarantaine
d'agences du cabinet du président. Il s'agit
d'annoncer les nouveaux chefs de cabinet ainsi que
de « négocier des contrats, faire des briefings et
organiser des réunions » avec le personnel de
niveau intermédiaire des deux institutions. Les
départements et agences concernés supervisent la
réponse fédérale à la pandémie du coronavirus, les
forces armées, la sécurité intérieure et les
autres forces de sécurité nationales, les services
sociaux, y compris les services de santé et
l'éducation, le commerce, les finances, le
travail, etc. Biden a constitué une équipe
de 500 « équipes d'examen des agences »
pour superviser la transition sur tous ces fronts,
mais tout cet effort est paralysé pour l'instant.
La continuité concerne également le maintien de
la position des États-Unis dans le monde, laquelle
est également sapée par le conflit au sein des
cercles dirigeants. Si de nombreux pays, le Canada
en premier, ont félicité Joe Biden, comme la
Grande-Bretagne, la France, l'Allemagne, le Japon,
la Corée du Sud, l'Australie et Israël, d'autres
comme la Russie, le Brésil et le Mexique ne l'ont
pas fait. La Chine n'a pas félicité Biden
le 13 novembre, mais les représentants
chinois ont dit que « le résultat de l'élection
américaine sera confirmé conformément aux lois et
procédures en vigueur aux États-Unis ».
Le secrétaire d'État Mike Pompeo a déclaré
le 10 novembre qu'il y aurait une «
transition en douceur » vers « une autre
administration Trump », portant un autre coup
à la légitimité de l'élection. Il a été dépêché à
l'étranger le 13 novembre pour s'entretenir
avec sept pays qui ont reconnu la victoire de
Biden : la France, la Turquie, la Géorgie,
Israël, les Émirats arabes unis, le Qatar et
l'Arabie saoudite.
Les conflits ne peuvent pas être résolus par
des institutions dysfonctionnelles
L'inquiétude concernant la « transition
pacifique » provient du fait que les
institutions démocratiques américaines sont
dysfonctionnelles et ne parviennent pas à résoudre
les différends au sein des cercles dirigeants, ce
qui compromet les tentatives de les faire
apparaître comme légitimes aux yeux du peuple.
Cela est encore plus évident avec la possibilité
croissante d'une fermeture du gouvernement si une
loi sur les dépenses d'urgence n'est pas adoptée
d'ici le 11 décembre. De plus, des dizaines
de millions de travailleurs perdront leurs
allocations de chômage prolongées à la fin du mois
de décembre et un financement fédéral
supplémentaire n'est pas en vue. S'il existe un
vaccin, les États auront besoin d'au moins 6
milliards de dollars de fonds fédéraux pour le
distribuer. Nombreux sont ceux qui craignent que
le vaccin soit obligatoire et que les forces
armées soient chargées de faire appliquer la
vaccination obligatoire.
Qu'ils aient voté ou non, de nombreux Américains
ne reconnaissent plus la légitimité du
gouvernement, surtout lorsqu'il s'agit de répondre
aux besoins de la population en matière de
COVID-19 et de recours à la force, au pays et à
l'étranger. L'usage de la violence dans les villes
américaines – par la police d'État et les forces
locales, par les services de l'immigration et des
douanes et par d'autres agences fédérales – a été
largement et souvent condamné. La grande majorité
est également favorable à l'arrêt des guerres et
de la violence contre les peuples du monde entier.
La « transition pacifique » est considérée
comme une caractéristique de la démocratie
américaine et la preuve que la Constitution
américaine confère une légitimité aux
gouvernements. L'inquiétude à ce sujet est
exprimée par Tom Donohue, président et
directeur général de la Chambre de commerce des
États-Unis, Jay Timmons, président et directeur
général de l'Association nationale des
manufacturiers, et Joshua Bolten, président
et directeur général du groupe commercial Business
Roundtable for CEOs, qui ont tous déclaré
qu'il était temps que le processus de transition
aille de l'avant.
Faisant référence au refus de Trump de permettre
au processus de transition d'avancer, Barack Obama
a déclaré : « Il y a des dommages à cela,
parce que ce qui se passe, c'est que le transfert
pacifique du pouvoir – la notion que quiconque
d'entre nous qui accède à un poste élu, que ce
soit comme employé à la fourrière ou comme
président, sommes des serviteurs du peuple, c'est
un travail temporaire, nous ne sommes pas
au-dessus des règles, nous ne sommes pas au-dessus
des lois – c'est l'essence de notre
démocratie. »
Tous s'efforcent de cacher la réalité de la
situation actuelle, à savoir que la notion de
fonctionnaires et d'élus comme « serviteurs du
peuple » a été éliminée en même temps que le
respect des règles et des lois. Les oligarques qui
se sont emparés de la machine pour s'en servir
exclusivement à leurs propres fins ne veulent pas
être entravés par des règles et des lois ou par
l'obligation de servir l'intérêt public.
Les factions rivales au sein des cercles
dirigeants ne suivent plus aucune règle, comme le
montre l'affrontement. Encore plus inquiétant est
le fait que le non-respect des lois et des règles
est aussi évident parmi les forces de police et
les forces militaires américaines aux États-Unis
comme dans le monde entier. Barack Obama et sa
guerre de drones illégale, le déporteur en chef
qui a séparé des millions de familles, l'ont
montré quand il était président et Donald Trump
lui a tout simplement emboîté le pas en éliminant
toute règle de droit ici ou à l'étranger. Le
non-respect des règles dans la transition en est
l'expression.
La poursuite de l'affrontement est la preuve du
dysfonctionnement des institutions et du désespoir
des cercles dirigeants à surmonter leurs divisions
croissantes dans une situation où ils ne disposent
plus de mécanismes et de structures pour le faire.
Les appels à l'unité de Biden, qui ne cesse de
répéter que « nous devons nous rassembler en tant
que pays », restent sans réponse.
Ce qui est révélé, c'est que la démocratie
américaine est épuisée et inadaptée à l'ère
moderne. Sa légitimité, notamment dans la mesure
où elle est confirmée par des élections, est en
lambeaux quel que soit le résultat de la
transition. À certains égards, on peut dire que le
peuple, par sa résistance organisée et sa demande
d'avoir voix au chapitre dans la prise de décision
et la résolution des problèmes auxquels l'humanité
est confrontée, s'avance pour combler la brèche
laissée par un gouvernement dysfonctionnel et
violent. Il cherche à garder l'initiative et à
faire avancer sa lutte pour les droits et pour
s'investir de pouvoir afin de les garantir.
Alors que le drame électoral continue de se
dérouler aux États-Unis, le président Trump et
diverses forces républicaines ont intenté jusqu'à
présent environ 30 poursuites et d'autres
sont possibles. La plupart ont été rejetées,
beaucoup pour faute de preuves de fraude, mais
d'autres sont toujours en suspens. Les plus
importantes d'entre elles sont les efforts pour
bloquer la certification du vote en Pennsylvanie,
au Michigan, en Géorgie et au Nevada. Si Trump
réussissait à bloquer la certification en
Pennsylvanie et au Michigan et dans l'un des deux
autres, Biden n'aurait pas les 270 votes du
Collège électoral nécessaires pour l'élection.
L'objectif principal n'est pas de changer le
décompte des voix, mais de bloquer la
certification et de pousser Biden en dessous
de 270, ce qui signifierait que la Chambre
des représentants déciderait de la présidence.
Lors d'un tel vote, chaque État obtient une voix
et actuellement 27 États ont une majorité de
républicains dans la délégation. Cependant, cela
pourrait changer lorsque tous les résultats seront
connus pour les élections à la Chambre.
À part l'obtention d'une injonction, l'un des
résultats de chacune des poursuites aurait pu être
de bloquer la certification des résultats du vote
dans un État donné en causant suffisamment de
retard pour empêcher la certification dans l'État
à la date requise par la loi de l'État. Cependant,
les résultats ont déjà été certifiés en Géorgie,
où la date limite était le 20 novembre. La
certification est attendue au Michigan et en
Pennsylvanie, deux États où la date limite est le
lundi 23 novembre. Les résultats des comtés
ont déjà été certifiés au Nevada le 16 novembre
et, dans tout l'État, les résultats seront
certifiés le 24 novembre.
En Arizona, où la date limite est le 23, le
Parti républicain a appelé à une vérification plus
large des votes au-delà du comté de Maricopa, qui
comprend Phoenix. Une telle vérification
retarderait la certification. Un juge de l'État de
l'Arizona a rejeté la poursuite en faveur des
défendeurs, ce qui signifie qu'il ne peut y avoir
d'appel. Il a également rejeté la demande
d'injonction du parti pour empêcher le comté de
Maricopa de certifier ses résultats électoraux.
Cela a éliminé dans les faits l'Arizona comme une
arène pour la décertification.
Géorgie
La Géorgie a terminé un recomptage manuel qui a
donné à Biden le plus grand nombre de votes
par 12 780 sur 5 millions de voix.
Le secrétaire d'État de la Géorgie, Brad
Raffensperger, un républicain, a déclaré à
plusieurs reprises que le décompte était valide et
qu'il n'y avait pas eu de fraude. Il a ordonné le
recomptage pour contrer les affirmations de Trump
selon lesquelles l'élection ne s'est pas déroulée
équitablement. Raffensperger a certifié les
résultats des élections le 20 novembre et le
gouverneur Brian Kemp a ensuite approuvé la liste
des électeurs pour Biden le 21 novembre. Avec
la Géorgie, Biden a maintenant 306 votes au
Collège électoral et perdre le Michigan et la
Pennsylvanie le placerait toujours à 270.
Michigan
Le Michigan doit certifier au plus tard
le 23 novembre. Déjà, le processus de
certification montre que la structure est conçue
pour laisser la décision entre les mains de
quelques personnes des partis cartellisés. Chaque
comté a un conseil de solliciteurs, généralement
composé de 4 personnes, deux républicains et
deux démocrates. Ils votent au niveau du comté et
leurs résultats sont envoyés au Conseil d'État des
solliciteurs, également composé de quatre
personnes, deux de chaque parti, qui certifient le
vote de l'État.
Lorsque le moment est venu pour le comté de
Wayne, qui comprend Détroit, de certifier, il y a
eu au début un vote partagé 2 à 2 où les
républicains disent qu'il y avait des
irrégularités à Détroit. La ville est à
environ 80 % afro-américaine. Il y a eu
ensuite une « discussion » entre eux et un
deuxième vote a eu lieu et le comté de Wayne a
certifié 4 à 0. Par la suite, les deux
républicains ont déclaré vouloir annuler leur vote
en faveur de la certification, mais aucun
mécanisme n'existe pour le faire.
Cependant, les forces de Trump avaient déposé une
plainte fédérale appelant à bloquer la
certification en raison d'irrégularités, Détroit
étant l'un des endroits mentionnés. Ils ont depuis
retiré leur poursuite, affirmant que les
affidavits des deux républicains qui ont annulé
leur vote montraient qu'ils avaient gagné. Cela
empêche qu'il y ait une décision d'un tribunal
tout en les positionnant pour avoir un nouveau
procès, qui pourrait aller jusqu'à la Cour
suprême, si le Conseil d'État certifie le vote. Il
fournit également des munitions aux républicains
du Conseil d'État pour ne pas le certifier. De
cette manière, le contrôle exercé par cette
poignée de personnes et la nature partisane des
décisions sont évidents.
Pennsylvanie
Pour la Pennsylvanie, deux poursuites en cour
fédérale pourraient se retrouver devant la Cour
suprême. L'une concerne la décision du secrétaire
d'État de prolonger la date limite de réception
des bulletins de vote du 3 novembre au 6
novembre. Le juge Alito de la Cour suprême a déjà
dit que cette affaire mérite d'être entendue
devant la Cour et que la décision du secrétaire
d'État, plutôt que la législature de l'État,
pourrait être inconstitutionnelle. Une telle
décision pourrait également avoir un impact sur le
Michigan et le Wisconsin. Jusqu'à présent, la Cour
suprême n'a pas accepté d'entendre l'affaire.
Une deuxième poursuite consiste à empêcher
directement la certification du vote. Trump dit
que l'ensemble du processus était
inconstitutionnel en raison d'un large éventail
d'irrégularités. Il s'agit notamment du fait que
les bulletins de vote par la poste ont été
illégalement dépouillés et que les électeurs ont
été indûment autorisés à corriger les bulletins de
vote défectueux, ce qui signifie peut-être qu'il
manquait une signature ou une enveloppe
intérieure. Tout en affirmant que le vote est
invalide, la poursuite demande également « un
recours où Trump serait déclaré le gagnant »
en Pennsylvanie. Au moins, ils ne veulent pas que
le vote soit certifié afin que Biden n'obtienne
pas les 20 votes Collège électoral.
Le juge de district Matthew Brann, qui a entendu
l'affaire, a déclaré que l'arrêt de la
certification priverait effectivement tous les
électeurs de l'État de leurs droits de vote :
« Au fond, vous demandez à ce tribunal
d'invalider 6,8 millions de votes, privant
ainsi chaque électeur du Commonwealth. » Il a
ajouté : « Pouvez-vous me dire comment ce
résultat peut être justifié ? »
Deux des cabinets d'avocats qui préparaient
l'affaire se sont retirés, les avocats affirmant
qu'il n'y avait pas suffisamment de preuves.
L'avocat de Trump, Rudy Giuliani, a ensuite pris
la relève. Il a déclaré lors de l'audience qu'il y
avait « une fraude électorale généralisée dans
tout le pays », mais n'a fourni aucune
preuve. Le juge a demandé des dépôts écrits et,
le 21 novembre, a rejeté l'affaire dans son
intégralité. Trump peut toujours faire appel à la
Cour suprême des États-Unis. L'une des
difficultés, cependant, est que pour le peuple,
une décision de la Cour suprême en faveur de Trump
serait rejetée. La Cour est perçue comme étant
biaisée en faveur de Trump et une telle décision
déclencherait sans aucun doute une large
résistance et peut-être des grèves des
travailleurs. Une tentative de recourir à la
violence contre de telles actions ne ferait que
discréditer davantage l'ensemble du processus et
renforcerait la détermination du peuple pour un
changement qui lui serait favorable.
Nevada
La Géorgie n'étant probablement plus en jeu,
Trump se tourne maintenant vers le Nevada,
avec 6 votes au Collège électoral, juste
assez pour mettre Biden en dessous de 270
lorsqu'ils sont combinés à ceux de la Pennsylvanie
et du Michigan. Le Nevada a un système où les
greffiers du comté ont fait rapport le 16
novembre aux groupes de commissaires pour chacun
des 17 comtés. Le comté de Clark comprend Las
Vegas et Washoe comprend Reno et les deux sont
considérés comme essentiels. Les commissaires de
Clark ont voté 6 à 1 en faveur de la
certification et Washoe 4 à 1. Les
résultats dans leur ensemble ont favorisé Biden
par 33 596 voix sur près de 1,4
million de voix exprimées. Les votes certifiés par
les commissaires de comté vont maintenant à la
Cour suprême du Nevada pour la certification
finale du vote à l'échelle de l'État le 24
novembre.
Donald Trump a déposé une poursuite le 17
novembre. Selon le document déposé devant le
tribunal et publié par sa campagne, la poursuite
demande une ordonnance du tribunal que Trump «
soit déclaré le vainqueur de l'élection au
Nevada », ou, alternativement, que les
résultats dans l'État soient annulés et aucun
gagnant n'y soit certifié. La poursuite a été
intentée par la liste des électeurs de Trump pour
le Collège électoral. La poursuite affirme, encore
une fois sans fournir de preuves, que « la fraude
et les abus rendent illégitimes les prétendus
résultats des élections au Nevada ».
Autres préoccupations
On peut voir qu'en plus de tenter de décertifier
le vote, Trump jette également les bases de
l'élimination du rôle des responsables de comté et
de l'État en matière d'élections présidentielles.
Il a dirigé à plusieurs reprises son feu sur ces
responsables, qu'ils soient républicains ou
démocrates, dans le cadre du discrédit de la
structure actuelle des élections.
La décision de Trump d'avoir une Cour suprême qui
lui obéit consiste à établir comme un fait
accompli le lien ouvert entre la Cour suprême et
le Bureau de la présidence. Cela brise toute
prétention que la Constitution américaine prévoit
ce que l'on appelle des « freins et
contrepoids » et repousse les limites de ce
qui peut être accompli par les prérogatives de
l'exécutif américain non seulement à l'étranger,
mais également au niveau national. Biden se
servira de ce précédent tout comme Obama s'est
prévalu des pouvoirs saisis par Bush avant lui.
Tout cela montre le besoin urgent de renouveler
la Constitution américaine et ses institutions sur
une nouvelle base historique. Elles sont pourries
jusqu'à la moelle et inaptes pour l'époque
moderne.
Un aspect de l'affrontement électoral actuel qui
fait rage parmi les dirigeants est le dénigrement
de la structure existante des élections
américaines. Cette structure est avant tout basée
sur les États et donne un pouvoir considérable aux
représentants des États et des comtés. Trump
prétend qu'il y a eu fraude électorale et fait
tout ce qu'il peut pour cibler ces représentants,
qu'ils soient républicains ou démocrates.
En outre,
l'existence même du Collège électoral est
contestée. Il est effectivement obsolète et un
vestige de l'esclavage. Parce qu'il est basé sur
les États – ce qui est un compromis adopté pour
renforcer l'unité nationale au moment de la
création du Collège électoral – cela est devenu
incompatible avec ce qui est censé être une
élection nationale pour l'élection du président
basée sur le suffrage universel. À plusieurs
reprises, le fait qu'il n'affranchit pas tous les
électeurs également a été révélé et les résultats
ne sont pas considérés comme étant représentatifs
de l'ensemble du vote, comme cela s'est produit
lors de l'élection de Trump en 2016 et d'autres
élections auparavant.
La structure actuelle accorde aussi aux États le
pouvoir d'adopter la loi électorale pour leur
État. Cela veut dire que les règles de
l'inscription au vote, du vote lui-même, de la
présentation des candidats et de leur inscription
sur le bulletin de vote, etc., varient
considérablement. Cela impose l'inégalité au
niveau de l'électorat et de la participation à la
vie politique du pays en général.
Une des mesures promues pour aborder le problème
est un scrutin direct pour élire le président,
sans Collège électoral et, vraisemblablement, sans
que les États jouent le même rôle. Il s'agirait
plutôt d'une élection fédérale, avec les mêmes
règlements pour tout le pays, contrôlés par le
gouvernement fédéral. Cela pourrait comprendre par
exemple la facilitation du vote par une
méthode fédérale dite « motor-voter » (par
laquelle une personne peut s'inscrire comme
électeur au moment de renouveler son permis de
conduire). Les permis délivrés par les États
doivent déjà être approuvés par le gouvernement
fédéral pour pouvoir entrer dans les aéroports et
les édifices fédéraux. Il ne serait pas difficile
d'étendre cette méthode pour l'inscription au vote
au nom de la formation d'une seule liste
électorale fédérale qui serait prétendument plus
sécuritaire, moins vulnérable aux fraudes, etc.
Les électeurs apprécieraient sans doute un
arrangement plus simple et qui semblerait plus
équitable.
La question est qu'un vote direct pour l'élection
du président et les réformes dans cette direction
créent une structure qui consolide le pouvoir de
la présidence et la dictature présidentielle.
Cette structure écarte encore plus le peuple de la
décision du système électoral qui est requis tout
en renforçant la notion d'un mandat présidentiel,
puisqu'on vote directement pour le président. Elle
augmenterait le pouvoir du gouvernement fédéral.
C'est là un élément clé de la restructuration
actuelle de l'État américain. On le voit aux
conflits qui se déroulent entre les États et le
gouvernement fédéral sur le financement et les
approvisionnements en ce qui concerne la COVID-19,
l'immigration, la police et d'autres questions. La
direction est d'accroître le contrôle fédéral,
surtout pour ce qui est de l'usage de la force.
Une plus grande concentration du contrôle et du
pouvoir entre les mains du pouvoir fédéral, en
particulier dans le Bureau du président, ne fait
pas qu'affaiblir les États. Elle empêche encore
plus le peuple d'avoir tout mot à dire sur les
décisions. C'est une direction qui est contraire à
ce que le peuple revendique et de ce dont il a
besoin, qui est de contrôler l'activité de la
police et les budgets et d'être lui-même habilité
à gouverner et à décider. L'élection directe du
président est une façon de détourner et de
pacifier ce mouvement, au nom de l'amélioration de
la démocratie.
La Constitution dans son ensemble, avec ses
amendements et la loi électorale qui en découle,
est obsolète et un vestige de l'esclavage. La
direction requise n'est pas d'élire directement le
président, mais plutôt de créer des formes de
démocratie qui favorisent le peuple et servent ses
intérêts. Ce qui est requis est une nouvelle
constitution avec un nouveau processus électoral
qui investit le peuple du pouvoir et garantit ses
droits. Les réformes doivent emprunter cette
direction et non celle d'un pouvoir plus concentré
entre les mains des riches.
(Voice of Revolution)
Le 135e
anniversaire de la pendaison de Louis Riel
Louis Riel
Chanson
d'Alexandre Belliard
Une horde
ambitieuse en mal de nouvelles terres Débarque chez les
Métis comme s'ils n'existaient guère D'un océan à
l'autre, chemin de fer à tout prix Les millionnaires
du rail se sont offert un pays
Riel, chef
légitime de l'Assiniboia Réclame en homme
digne, le respect de leurs droits Trahi par Ottawa,
traité comme du bétail Les Métis n'ont
plus le choix, il faut livrer bataille Victoire à
Rivière-Rouge et près de Lac aux Canards Tous leurs
espoirs s'écroulent à Batoche plus tard Riel, les fers
aux pieds; écroué à Regina « Coupable »,
disent les jurés; Richardson sonne le glas
Parodie de
justice dans le plus grand désordre C'est la haine
qui dicte, la potence et la corde De la furie
orangiste, Thomas Scott est le fiel Macdonald le
complice, de la mort de Riel Telle une
cicatrice profonde qui lacère La mémoire des
Métis, que rien ne fera taire Francophones de
partout expriment leur colère Et pleurent Louis
Riel, assassiné hier
Du gibet de ce
dernier ne reste qu'une estampe Un bout de corde,
un musée, la maison de ses parents Et lui qui fut
pourtant père du Manitoba Doit encore
aujourd'hui, essuyer les coups bas Martyr pour les
uns et traître pour les autres L'histoire le
portera en vainqueur face aux fauves On le voudrait
oublié, c'est qu'il dérange encore Toujours
controversé, plus d'un siècle après sa mort
Le chef métis Louis Riel (au centre) entouré
de conseillers de l'Assemblée législative
métisse
d'Assiniboia
Le 16 novembre 1885, le
pouvoir colonial britannique a pendu le grand
leader métis Louis Riel. Ce dernier a été
accusé et trouvé coupable de haute trahison
après la défaite des Métis à la bataille de
Batoche en mai de la même année. L'exécution
de Louis Riel était une façon de frapper la
conscience de la nation métisse, mais le
pouvoir colonial ne parvint pas à mettre fin à
sa lutte pour ses droits et sa dignité en tant
que nation. La lutte des Métis pour affirmer
leur droit d'être et assumer la direction de
leurs affaires politiques continue à ce jour.
Les deux grands
soulèvements de la Rivière Rouge (1869-1870)
et du Nord-Ouest (1885) n'étaient pas des
éléments isolés. Ils ont eu lieu à une époque
où les Premières Nations et la nation du
Québec cherchaient à s'affirmer, au moment où
régnait une effervescence révolutionnaire en
Europe. Les soulèvements des Métis
traduisaient une réponse au projet colonial
britannique qui cherchait à reproduire l'État
britannique en Amérique du Nord et à tenir en
échec les aspirations légitimes des nations
qui composaient le Canada.
L'Acte de l'Amérique du Nord
britannique de 1867 et l'achat des
Terres de Rupert de la Compagnie de la Baie
d'Hudson par le gouvernement canadien en
1869-1870, juxtaposés au déclin de leur
économie traditionnelle basée sur la chasse du
bison, ont contraint les Métis à se doter d'un
rapport de force avec les autorités coloniales
et à négocier l'entrée dans la Confédération
du Manitoba grâce à la mise sur pied d'une
Assemblée législative. L'esprit qui animait
Riel et les membres du gouvernement provisoire
à cette époque est contenu dans la Déclaration
des habitants de la Terre de Rupert et du
Nord-Ouest qui affirme la souveraineté des
Métis sur leurs terres. Ces derniers
refusaient également de reconnaître l'autorité
du Canada, « [...] qui prétend avoir le droit
de venir nous imposer une forme de
gouvernement encore plus contraire à nos
droits et à nos intérêts [...] ».
La Loi du Manitoba, qui
établissait le Manitoba en tant que province,
a été votée au parlement fédéral en mai 1870.
Le gouvernement n'a pas tardé à exercer son
contrôle sur son nouveau territoire comme en
font foi l'expédition militaire de Wolseley
plus tard dans l'année - qui a contraint Riel
à la fuite par crainte pour sa sécurité -, la
création de la Police montée du Nord-Ouest
(1873) et de la Loi sur les Indiens (1876).
Le premier ministre John A. Macdonald s'est
fait le champion de la colonisation de l'Ouest
et du développement de l'agriculture avec la
politique nationale qu'il a promue à partir de
1878. Avec l'aide des Oblats (les membres
laïcs de l'Église catholique affiliés à une
communauté monastique), les autorités ont
cherché à sédentariser et à forcer les Métis à
adopter le mode de vie agricole. Face à une
existence marquée par ce cadre contraignant et
sous la pression des spéculateurs fonciers,
certains Métis vendirent les terres qui leur
avaient été octroyées pour aller s'établir en
Saskatchewan.
C'était aussi une époque
où les nationalismes s'exprimaient. L'épisode
du Manitoba fit prendre conscience aux
Québécois de la fragilité de la situation des
Métis alors que l'abolition de l'enseignement
en français au Nouveau-Brunswick en 1871
indiquait le besoin d'organisation. Les
sociétés nationales à la défense des droits et
des intérêts des francophones, telles que les
sociétés Saint-Jean-Baptiste, se répandirent à
travers le continent en raison des vagues
migratoires partant de la vallée du
Saint-Laurent. La Convention nationale de
Montréal en 1874 et les fêtes de la
Saint-Jean-Baptiste à Québec en 1880 et à
Windsor en 1883 ont rassemblé des délégations
de toute l'Amérique française afin de
démontrer avec force la vitalité de la «
famille canadienne-française ». Les Acadiens
ont tenu leur première Convention en 1881 où
ils ont célébré et adopté une doctrine
nationale.
Discours de Louis Riel au jury dans la salle
d'audience de Regina, juillet 1885.
Les chefs métis, sous
l'influence du clergé, ne sont pas allés à
contrecourant. Dès les lendemains de la
Résistance de la Rivière-Rouge, fut fondée à
Saint-Boniface l'Association
Saint-Jean-Baptiste du Manitoba. Son
vice-président n'était nul autre que Louis
Riel. Cette association regroupait à ses
débuts autant les Canadiens français que les
Métis francophones.
Toutefois, conscients de
leur identité distincte, les chefs métis
voulaient façonner leur propre nationalisme.
Riel en viendra à articuler un nationalisme
proprement métis, doté d'une fête et de
symboles nationaux propres. Ce processus
culminera avec la création à Batoche en
septembre 1884 de l'Association nationale des
Métis afin de promouvoir le développement de
leur conscience politique.
Les Métis ont pris les
armes encore une fois pour affirmer leur
nation et leur droit d'être lors de la
Rébellion du Nord-Ouest de 1885. Pendant trois
jours, du 9 au 12 mai 1885, 250 Métis ont
affronté vaillamment 916 soldats des Forces
canadiennes à Batoche, mais ont été vaincus et
Riel s'est rendu.
Macdonald et son cabinet
adoptèrent la ligne dure à l'endroit de Riel
et de ses compagnons. Louis Riel fut jugé à
Régina en juillet 1885. Le procès dura cinq
jours. Le jury l'a reconnu coupable le 31
juillet, après seulement une demi-heure de
délibérations, mais a demandé la clémence. Or,
le juge Hugh Richardson, qui présidait au
procès, l'a condamné à mort. De septembre 1885
à octobre 1886, plusieurs de ses camarades,
tous autochtones, seront condamnés au même
sort.
Si les temps ont changé,
l'État canadien a hérité du pouvoir colonial
et persiste à vouloir nier la nation métisse,
les Premières Nations et la nation du Québec.
La fière histoire de la lutte des Métis pour
affirmer leurs droits en tant que nation n'est
pas que pour les bouquins qui amassent la
poussière, elle continue d'éclairer le
présent. La lutte pour l'affirmation des
droits qui appartiennent à tous du fait qu'ils
sont humains est précisément la lutte pour des
arrangements modernes centrés sur l'être
humain. La vie de Louis Riel représente la
lutte pour la reconnaissance des droits sur
une base moderne.
La vie de Louis Riel est
un legs important et toujours aussi pertinent
aujourd'hui alors que l'État canadien fait
tout ce qu'il peut pour nier les droits des
Métis, des Premières Nations et de la nation
du Québec, de même que les droits des
travailleurs, des femmes, des jeunes, des
minorités nationales et de tous les collectifs
de la société, tout cela au nom de la
sécurité, de l'équilibre, de l'austérité et
d'autres faux idéaux.
(D'après un article de
Marc-André Gagnon publié dans le Chantier
politique, numéro 32, le 18 novembre 2013. Les
photos proviennent des archives publiques)
À l'occasion du 135e anniversaire de la
pendaison de Louis Riel, Étincelle Radio a sorti
un nouvel épisode intitulé « Louis Riel et la
lutte de la Nation métisse ». Il explique la
lutte des Métis pour affirmer leurs droits en
tant que nation et leur suppression par l'État
canadien, et incorpore des hommages musicaux à
Riel et aux Métis. Pour l'écouter, cliquer ici.