Numéro 39

7 octobre 2022

Sur la conjonction historique

Introduction à la discussion sur
la situation internationale

Faisons du Canada une zone de paix !

Non à l'expansion de l'OTAN dans l'Arctique canadien

– Steve Rutchinski –

Opposons-nous à tous les prétextes pour militariser l'Arctique ! Défendons le droit des peuples de l'Arctique à établir des relations fraternelles favorables à eux-mêmes et à la paix mondiale !

– Enver Villamizar –

Action militante contre la promotion de la guerre
au spectacle aérien de Toronto



Sur la conjonction historique

Introduction à la discussion
sur la situation internationale

Cette introduction à la discussion sur la situation internationale a été présentée par Pauline Easton lors d'une réunion des membres et sympathisants du PCC(M-L) à Gatineau le 27 juillet 2022. Elle est basée sur le travail théorique du PCC(M-L) sur les définitions modernes nécessaires pour faire place au renouvellement du processus politique et de l'ordre constitutionnel.

Il est de la plus haute importance aujourd'hui de reconnaître que nous vivons une conjoncture historique rare où l'Ancien a disparu et où le Nouveau n'a pas encore vu le jour. Elle est entre autres caractérisée par le fait que les forces productives de ce monde se sont développés au-delà de tout ce que les humains ont pu concevoir en termes de politique. Qu'est-ce que cela signifie et quelles en sont les conséquences ?

Le système international qui périclite aujourd'hui a vu le jour avec la Première Guerre mondiale, le traité de Versailles, la Deuxième Guerre mondiale, etc. Il a fallu deux guerres mondiales pour établir l'ordre mondial. Le droit international, les accords commerciaux, les traités, les institutions financières, l'ONU – tout cela a été créé. Cette période comporte des réalisations dont la plus importante est la preuve qu'il existe une alternative à l'impérialisme et à la guerre impérialiste. La Grande Révolution socialiste d'Octobre de 1917 et la création de l'URSS en 1922 ont donné naissance au Nouveau à cet égard.

Historiquement, dans le contexte de l'existence de sociétés de classes, les guerres sont le mécanisme de changement des systèmes. Et la guerre mondiale est déclenchée lorsqu'il y a un marché mondial. La Révolution d'Octobre et la création de la Russie soviétique, puis de l'URSS en 1922, ont donné une alternative sous la forme de gouvernements antiguerre. Parce que le développement du capital tendait à l'anéantissement du socialisme et du communisme en tant que système, le monde a vu la montée du nazisme et de l'État fasciste ainsi que du militarisme japonais. L'URSS les a combattus. Appuyée par la résistance des travailleurs et des peuples du monde, elle a montré qu'il y a une issue à la guerre impérialiste.

À la fin de la Deuxième Guerre mondiale, les crimes contre l'humanité, les crimes de guerre et les crimes contre la paix ont été définis par le Tribunal international de Nuremberg (et d'autres tribunaux similaires). Ces instruments ont été reconnus au niveau international et ils ont une importance dans l'historiographie libérale parce qu'on prétend que les États-Unis en sont responsables, alors que ce sont les Soviétiques qui ont été capables de fournir la synthèse de l'expérience qui a donné lieu aux définitions de l'époque, surtout en ce qui concerne la définition de l'agression. Aujourd'hui, toutes ces notions sont utilisées contre les peuples du monde, comme par exemple la façon dont les États-Unis accusent les autres de génocide, de crimes de guerre, de crimes contre l'humanité, etc.

La gauche libérale a tendance à se référer à Nuremberg et à divers instruments comme la Déclaration universelle des droits de l'homme – toutes ces choses qui ont fait partie de la défaite du fascisme – pour présenter les États-Unis comme la principale force ayant établi ces concepts, en disant que ce sont des concepts anglo-américains, pas français, pas soviétiques. En fait, ce sont les juristes soviétiques qui ont contribué à définir l'agression et les crimes contre la paix, entre autres, pas les Américains.

L'importance de tout cela est que ces choses ont été utilisées pour détourner l'attention de la nécessité d'unir les peuples dans l'action pour établir les conditions qui garantiraient leur désir de paix, de liberté et de démocratie, par exemple en procédant à la dénazification et à la démilitarisation et en traduisant en justice ceux qui ont commis des crimes. Pour y parvenir, une notion et une pratique de la complicité ont été développées. Celle-ci va au-delà de la conception anglo-américaine d'un complot. Le complot est nécessairement une affaire secrète, tandis que la complicité s'établit simplement en déterminant d'où vient l'agression et ce que font les différentes forces par rapport à cela. Cela n'a rien à voir avec un complot secret. Elle n'est pas secrète et il n'y a même pas un besoin de contact direct.

Un des premiers exemples de cela est donné par les pays qui ont soutenu l'impérialisme américain dans son affirmation que la République populaire démocratique de Corée (RPDC) a agressé la République de Corée (RC), se révélant ainsi un agresseur et justifiant l'intervention en 1950 de 22 nations membres de l'ONU dans la guerre dans la péninsule coréenne sous le drapeau de l'ONU. Tout d'abord, les impérialistes américains ont ouvertement divisé la Corée à la hauteur du 38e parallèle et ont créé la République de Corée pour saper les élections appelées dans tout le pays par le peuple coréen qui venait de conquérir sa libération contre l'occupation japonaise. Sur cette base, ils ont instauré un régime fantoche virulemment anticommuniste en Corée du Sud et ont fomenté une guerre civile. Ils se sont engagés dans d'innombrables provocations contre la RPDC au 38e parallèle et lorsque la RPDC s'est défendue, ils l'ont accusée d'avoir « envahi le sud » et d'avoir commis une agression. Les États-Unis ont ouvertement brouillé la définition de l'agression et rendu d'autres pays complices au nom de la lutte contre la propagation de l'« agression communiste ».

L'apport global de Nuremberg est la définition de l'agression qui inclut la préparation et la propagande pour la guerre. Avant même que Nuremberg n'établisse cette définition, des bombes atomiques avaient été utilisées. Au cours des premières années du développement des armes nucléaires, dans les années 1940, une relation entre les armes nucléaires et l'État américain s'est établie, par le biais du Bureau du président. Une fois le lien entre les armes nucléaires et le Bureau du président des États-Unis établi de façon permanente, il est impossible que les États-Unis ne soient pas une force contre les définitions établies à Nuremberg. Soutenu par l'ensemble des forces universitaires et industrielles, le lien entre les armes nucléaires et le président est devenu une force d'agression.

Cet arrangement est au coeur de l'établissement d'un gouvernement de guerre permanent aux États-Unis, de ce qu'on appelle le complexe civil-militaire-industriel. Tous les arguments donnés éclipsent le fait que les armes nucléaires sont activement utilisées pour définir l'agression. Elles sont l'arme ultime. Ce n'est pas simplement parce qu'il s'agit d'une arme de destruction massive. En fait, le bombardement incendiaire de Tokyo a fait plus de morts que le bombardement d'Hiroshima et Nagasaki avec l'arme nucléaire. La raison en est que la bombe nucléaire a d'abord été considérée comme une plus grosse bombe. Plus tard, tout ce qui pouvait menacer la sécurité des États-Unis a été désigné comme une arme de destruction massive. C'est la définition utilisée aujourd'hui pour criminaliser quiconque, même si son crime est d'utiliser sa parole d'une manière que les dirigeants déclarent une menace à la sécurité nationale, comme dans le cas de Julian Assange. Les États-Unis, la Grande-Bretagne, l'Australie, le Canada et d'autres lèche-bottes américains sont complices de son extradition vers les États-Unis, bien qu'il ne soit pas citoyen américain et n'ait commis aucun crime. Au contraire, il a exercé son droit civil de parole et de diffuser des informations.

Quant aux armes nucléaires, elles ont été utilisées à plusieurs reprises pour menacer les peuples soviétiques, le système soviétique, la Corée, le Vietnam, Cuba et les peuples d'Europe dans leur ensemble. Ce qui n'est pas aussi facilement compris, c'est que la chose concerne davantage la fonction du président des États-Unis. Le serment du président des États-Unis n'est pas, comme on le croit généralement, de défendre la Constitution des États-Unis, c'est d'exécuter fidèlement sa fonction. La seconde partie du serment dit simplement que le président doit protéger la Constitution des États-Unis « du mieux de ses capacités ». Cela peut signifier tout ce que chaque président définit en fonction des intérêts privés qui contrôlent la fonction. Le serment comporte toujours deux aspects : l'un concerne l'ensemble de l'appareil gouvernemental des pouvoirs de police et l'autre est de lui conférer une légitimité constitutionnelle.

Avant la création du Bureau fédéral d'investigation (FBI) comme force de police fédérale en 1908, les pouvoirs de police étaient à l'origine principalement basés sur les États – ils relevaient des tribunaux et des corps policiers locaux. Les décisions des tribunaux locaux au niveau de l'État avaient le contrôle de l'établissement et de la conduite des pouvoirs de police. Aujourd'hui, aux États-Unis, il existe 17 agences de renseignement, dont le FBI, qui font toutes partie des pouvoirs de police de l'exécutif fédéral. Elles constituent une autorité distincte de celle des États, liée au contrôle des armes nucléaires, de l'armée permanente et de la bureaucratie militaire au niveau fédéral. Elles sont utilisées pour définir et limiter toutes les luttes qui ont lieu à l'intérieur des États-Unis ou à l'étranger. Tout cela et les armes nucléaires elles-mêmes sont utilisés en dehors du mécanisme de l'ONU.

La complicité est plus qu'un complot. C'est un phénomène commun aujourd'hui avec l'apparition de gouvernements de pouvoirs de police et la désarticulation de la politique. Par exemple, les différentes ailes du cartel qui a créé les débats présidentiels aux États-Unis à l'époque de la présidence Clinton, n'ont cessé de faire monter les enchères dans le but de gagner et de connecter les responsables de l'appareil d'État au marché monétaire. Aujourd'hui, la spéculation de ce qu'on appelle les Super PAC dans les élections a atteint des niveaux sans précédent. Les Super PAC peuvent recueillir des sommes illimitées auprès de sociétés, de syndicats, d'associations et de particuliers et dépenser des montants illimités pour soutenir ou s'opposer à des candidats. Au 15 août, 2 325 groupes organisés en tant que Super PAC ont déclaré des recettes totales de 1 488 195 425 $ et des dépenses indépendantes totales de 430 215 694 $ pour l'exercice financier 2021-2022.

Tout cela concerne le point que le monde a atteint aujourd'hui, où les élections ne servent plus à régler les différends entre les factions au pouvoir pour le contrôle du pouvoir politique. Ce qui était autrefois des partis politiques au sein d'un État censé servir le bien public et défendre une autorité politique est devenu des cartels de type mafieux, instruments d'intérêts privés étroits qui exercent désormais directement les pouvoirs politiques pour favoriser leurs propres intérêts. Cela alimente les scénarios de guerre civile au niveau national, tandis qu'au niveau international, une fois que la politique s'effondre, nous avons dépassé la notion d'agression telle que définie à Nuremberg. Nous n'avons plus affaire à la guerre en tant que continuation de la politique par d'autres moyens, car il n'y a pas de politique, seulement des diktats pour imposer la soumission et, à défaut, la destruction des forces productives. Cela s'est développé sur une longue période, comme en témoigne le diktat des États-Unis ne permettant pas les négociations pour parvenir à la paix, comme en Palestine, en Syrie, en RPDC, en Ukraine et dans d'autres conflits. Depuis la création d'Israël, la division de la Corée et la guerre de Corée, la partition de l'Inde et bien d'autres exemples, la complicité a donné lieu à des situations permanentes de ni guerre/ni paix et, aujourd'hui, à des guerres de destruction de nations entières et de leurs forces productives. Au coeur de la complicité se trouve l'affirmation que toute l'affaire a une légitimité constitutionnelle aux États-Unis.

Dans le cas de la Libye, les États-Unis ont détruit une société entière; elle n'existe plus. Mais au moment de cette guerre de l'OTAN menée par les États-Unis, Obama a déclaré qu'il ne s'agissait pas d'une guerre ni même d'hostilités. En d'autres termes, le cas de la Libye montre comment le problème des pouvoirs de police se joue au niveau international également. Mais plus encore, dans le cas de la Libye, lorsqu'Obama a déclaré que l'invasion ne s'élevait pas au niveau de la guerre, il a énoncé une nouvelle doctrine – la doctrine Obama. La doctrine Obama dit essentiellement que l'engagement dans une guerre ne nécessite pas de mécanisme constitutionnel. Obama est allé jusqu'à dire que la destruction de la Libye ne constituait même pas une situation d'hostilités telle que définie par les lois de la guerre. Cela a repoussé encore les limites de la constitution américaine. Cette doctrine inclut le droit déclaré de procéder à des assassinats par le biais de la guerre des drones, d'utiliser des contracteurs privés pour s'engager dans la guerre sous le couvert de fausses missions humanitaires, etc.

Tout cela confirme que ce ne sont pas seulement les gens comme Trump qui appellent ouvertement à la destruction de la Constitution des États-Unis : l'aile de la classe dirigeante américaine qui prétend défendre les institutions démocratiques libérales et sauvegarder l'ordre constitutionnel est tout aussi désireuse de sa destruction. Il en va de même pour le gouvernement actuel du Canada, qui s'efforce de concentrer les pouvoirs de police dans l'exécutif et de rendre les assemblées législatives inutiles, tout cela au nom de la préservation de l'ordre constitutionnel. Les dirigeants de divers pays qui sont complices du prétendu « ordre international basé sur des règles » se battent pour concentrer de plus en plus de pouvoirs de police dans l'exécutif, lequel a été accaparé par des intérêts privés étroits. Ils sont engagés dans la bataille pour le contrôle de toutes les forces productives qui se sont développées au-delà de tout ce que les humains ont conçu en termes de politique. Ce qu'ils ne peuvent soumettre par la force, ils le détruisent.

Les dirigeants sont confrontés à des contradictions qui ne peuvent être résolues au niveau international du point de vue des intérêts des énormes oligopoles qui ont été créés. Le monde entier est pris en otage par le dilemme américain de maintenir l'ordre qui a été instauré après la Deuxième Guerre mondiale et qui permet aux États-Unis de se proclamer superpuissance. Les pays qui respectent la Charte des Nations unies et l'État de droit international établi sur sa base après la Deuxième Guerre mondiale tentent d'ériger un bloc contre les actions des États-Unis, et se heurtent au problème de la complicité établie par les États-Unis.

Depuis la présidence de Ronald Reagan, le nouveau modus operandi est de rechercher la complicité de ce qu'on appelle les alliés. C'est sous Reagan et, en Grande-Bretagne, sous Margaret Thatcher, que les bases de l'offensive néolibérale antisociale ont été posées au nom du néo-conservatisme. Il s'agissait d'un programme visant à restructurer les arrangements étatiques au niveau national afin de faire payer la crise de l'État-providence aux travailleurs et d'intensifier l'utilisation de méthodes secrètes au niveau international. Depuis l'effondrement de l'ancienne Union soviétique sous la pression de la restructuration réactionnaire appelée perestroïka et glasnost, nous voyons les dirigeants anglo-américains et leurs complices détruire les forces productives des pays les plus anciens, comme l'Irak, la Libye et la Syrie.

Beaucoup de choses arrivent à leur terme. Il y a notamment la fin de la guerre froide et la fin de l'ordre mondial des grandes puissances impérialistes. Ce sont deux moments qui sont liés et qui ont leur propre motion. Les pays impérialistes qui ont connu deux guerres mondiales, qui ont servi à éliminer l'Angleterre et la France en tant que grandes puissances, sont toujours là, tout comme le conflit-et-collusion entre les États-Unis et, aujourd'hui, non pas l'Union soviétique, mais la Russie, sur ce qui a toujours été appelé la question allemande[1].

Un problème auquel les dirigeants américains sont confrontés est qu'aux États-Unis, tout le système constitutionnel est encore en place. C'est la base pour donner à la société américaine sa forme républicaine – des 13 colonies aux États, puis à leur expansion jusqu'à l'ensemble du territoire désigné comme les États-Unis aujourd'hui. La période de création des États-nations, qui commence à l'issue de la guerre civile anglaise dans les années 1660, est également une période de crise internationale qui a entraîné les prémices de la création des États-Unis, au fil de nombreuses guerres. La conception de la souveraineté, entière et indivisible, s'est développée parallèlement en France et en Angleterre, d'abord au nom du droit divin, comme en témoignent l'établissement de l'Église d'Angleterre et la prise de possession des terres de l'Église sous Henri VIII puis Elizabeth I en Angleterre et la déclaration de Louis XIV en France, « L'État c'est moi ! » Le fondement de la décision finale est né du régicide de Charles Ier dans la théorie avancée par Thomas Hobbes dans son célèbre ouvrage Léviathan, qui expose sa théorie de la Convention – la théorie d'une personne fictive de l'État et de l'autorité publique et l'ordre constitutionnel qui en émanent. Il traite de deux questions interdépendantes issues de la guerre civile et constitue la base du droit des nations, également appelé droit de la guerre.

Les États-nations autonomes peuvent entretenir des relations pacifiques avec les autres ou entrer en guerre. La guerre est au centre de toutes les questions relatives aux relations entre les pays reconnus comme des États-nations, établis sur le modèle européen, que la forme de gouvernement soit monarchique ou républicaine. Les guerres qui se sont déroulées en Chine, en Perse, en Amérique et en Europe pendant une période de formation de 60 ans ont été comparables à ce qui s'est produit plus tard sous le nom de Deuxième Guerre mondiale. Cette période a été une autre conjoncture rare qui a également compris une crise environnementale. Les États-nations, la théorie des États-nations et leur lien avec la capacité militaire et, plus important encore, le développement des forces productives, sont devenus un nouvel ensemble. Une partie essentielle de l'enquête sur ces années de formation nécessite également l'examen de l'influence de la révolution prolétarienne, en particulier depuis 1848, date de la publication du Manifeste du Parti communiste de Marx et Engels, qui résume toute la période précédente, jusqu'à aujourd'hui.

En ce qui concerne la théorie de la représentation, c'est-à-dire la manière dont les individus se rapportent à l'État, le problème n'est pas seulement que l'État est un mécanisme de coercition, c'est aussi qu'il suppose l'appartenance à un corps politique. La définition de l'appartenance donnée par Hobbes est fondamentalement ce que nous avons aujourd'hui. Elle est en train de mourir, mais elle ne sera pas achevée tant que des définitions modernes n'auront pas été élaborées sur la base de la mobilisation et des méthodes démocratiques de masse.

Le principal obstacle au renouvellement nécessaire aujourd'hui est que l'État prive les peuples d'une conception du monde. C'est le cas depuis les années 1600 et c'est une question qu'il faut aborder.

La conjoncture est ici un tournant, un moment où tout se joue. Si l'on ne porte pas attention à l'histoire, on ne reconnaîtra pas qu'il s'agit d'un type particulier et rare de conjoncture. Par exemple, dans les années 1970, nous avons dit que la révolution était la principale tendance. Soit la révolution entraverait la guerre impérialiste, soit la guerre impérialiste donnerait lieu à la révolution. Tout serait réglé. Mais ce n'est pas ce qui s'est passé. Avec l'effondrement de l'Union soviétique, l'essor de la révolution s'est transformé en un repli. La révolution a battu en retraite. L'initiative est passée des mains de la classe ouvrière et du peuple aux mains de la bourgeoisie réactionnaire et de son offensive antisociale qui a donné la priorité à la restructuration de l'État pour favoriser des intérêts privés étroits. La contre-révolution s'est installée.

Engels y a fait allusion après la mort de Marx, à un moment où les sociaux-démocrates allemands se faisaient élire au gouvernement. Il a dit concernant les élections que l'obtention du suffrage universel était une mesure de la maturité de la classe ouvrière. Il a dit que les mouvements seraient écrasés dans les deux premières décennies des années 1900, qu'il y aurait une guerre mondiale pour écraser ces mouvements. Son argument n'était pas que la guerre allait avoir lieu à tel ou tel moment, mais que seul le prolétariat pouvait construire une société nouvelle.

Il n'est pas rare de voir des gens prendre des arguments du passé et les utiliser à mauvais escient dans le présent pour spéculer sur ce qui va se produire. Dans toutes les périodes historiques, des conceptions et des mouvements importants sont utilisés comme points de référence. Ce n'est pas grave. Les arguments en soi ne sont peut-être pas faux, mais ils passent à côté de l'essentiel. Ce sont des arguments de type « fin de l'histoire ». Les arguments de la fin de l'histoire prétendent que l'idéologie évolue – l'idéologie évolue du capitalisme ou du socialisme, tout comme une espèce évolue, avec un début, un milieu et une fin. Il n'y a aucune preuve de cela puisque les idées et les idéologies ont toutes une base matérielle qui leur est propre. Les idées ne naissent pas des idées. Dans la présentation du monde par l'auteur de la thèse sur la fin de l'histoire, Francis Fukuyama, ce qui évolue est la forme du gouvernement. Il ne parlait pas des croyances, c'est-à-dire de ce qui est dans la tête des gens, qui est souvent confondu avec l'idéologie. Fukuyama disait que la forme idéologique avait atteint sa forme finale.

Les formes ont à voir avec ce qui se passe entre les individus et le collectif, comment la représentation se fait, comment le gouvernement prend forme. Ce sont des formes, pas des contenus. Lorsque les gens parlent de crimes contre l'humanité et de croyances, la forme idéologique concerne la manière dont les choses sont démêlées et dont le cerveau appréhende ces relations. L'échange des points de vue est important mais ce qui ressort, c'est la forme de la représentation. Cette forme basée sur la théorie de la Convention permet qu'un collectif, un corps politique, puisse avoir des pouvoirs sur les individus. C'est dans ce contexte que Fukuyama pose la forme finale de ce gouvernement.

La fin de l'histoire dit qu'il n'y a pas d'autre moyen que cette forme de gouvernement pour régler ces questions. C'est faux. Les individus et les collectifs, la structure générale de la société, les institutions et les organisations internationales sont tous des choses qui existent. Ce que les dirigeants anglo-américains et leurs complices demandent, c'est la complicité avec cette forme finale et la désinformation de l'État vise précisément à empêcher la reconnaissance de cette réalité. Tous les mouvements pour la justice, la paix et la démocratie doivent se concentrer sur le remaniement de l'ordre constitutionnel plutôt que sur la fidélité aux relations entre les humains et entre les humains et la nature et ce qu'elles révèlent, à savoir la nécessité que les peuples se donnent les moyens d'agir en formulant les revendications qui s'imposent. Le peuple doit parler en son propre nom, et non pas céder son autorité à d'autres qui représentent une personne fictive de l'État qui règne au-dessus de lui.

Comment développer ses propres organisations de défense ? Quelle est la base de leur autorité ? Il est important de répondre à ces questions car les intérêts privés disent qu'ils constituent eux-mêmes l'autorité publique parce qu'elle est constitutionnelle. Cela ne traite pas du contenu de l'autorité publique. La manière dont la société est constituée est la forme.

Les forces productives sont énormes à l'heure actuelle et elles sont créées par des êtres humains qui sont classés comme subordonnés à ces forces productives. Mais c'est leur travail, le travail des êtres humains. La classe ouvrière fait partie intégrante de ces forces productives, mais elle est contrainte à une relation d'asservissement parce que la classe dirigeante en revendique la propriété. Les forces productives créées par les humains, ainsi que le développement rapide de la science et de la technologie, sont la source des relations. Il n'y a pas de société en dehors d'eux. Ces forces ont dépassé les limites de toute forme existante. L'arme de choix pour détruire les forces productives est l'arme nucléaire.

Depuis environ 10 000 ans, les êtres humains ont développé leurs propres moyens de subsistance, l'agriculture, la domestication des animaux, les débuts des villes, la technologie, etc. Cela donne lieu à la création de besoins humains et c'est ce qui motive tout le reste. La révolution qui a eu lieu dans cette conjoncture historique était plus gigantesque que les révolutions plus récentes. C'est de cette conjoncture que nous sortons tous.

Lors de l'élection américaine qui a porté Donald Trump a pouvoir, ce dernier a dit que Clinton était contre le réchauffement climatique tandis que lui était contre l'utilisation des armes nucléaires. Ce sont deux parties des forces productives humaines qui sont devenues si puissantes qu'elles échappent au contrôle des forces productives. Selon les géologues, nous vivons dans une période anthropocène, où les humains existent comme une force géologique de la nature. Le climat existe en tant que force humaine. Il est reconnu que les forces productives humaines ont créé cette situation. Les modèles de réchauffement climatique sont issus du développement des armes nucléaires et des prédictions d'hiver nucléaire. Il suffit de dire qu'une longue histoire de développement humain arrive à son terme. Nous pourrions connaître une nouvelle ère glaciaire, ou autre.

Un problème pour les cercles dirigeants est qu'ils pensent pouvoir prédire qui les représentera, mais même avec 17 agences de renseignement, ils ne le peuvent plus. Hilary Clinton l'a découvert à ses dépens en perdant les élections face à Trump. Dans cette élection, Clinton a dit que le but de l'élection de permettre à des millions de personnes de choisir leur camp. De même aujourd'hui, avec la rivalité factionnelle à laquelle nous assistons aux États-Unis, cette forme finale d'État représentatif et son processus politique ne peuvent plus faire de prédictions sur la façon dont les choses vont tourner. Les peuples sont simplement appelés à choisir leur camp. Tout cela souligne que toutes les formes qui assuraient l'équilibre et une certaine stabilité et prévisibilité sur cette base, ne fonctionnent plus. Rien de ce qui est en place ne permet de faire de prédictions et c'est l'une des raisons pour lesquelles les gouvernements de pouvoirs de police entrent en jeu – pour préserver l'État.

Les cercles dirigeants doivent faire des prévisions. Par exemple, comment gérer les développements en Chine, où des centaines de millions de personnes – la taille de la population des États-Unis, du Canada et du Mexique réunis – quittent la campagne pour les villes et sont prolétarisées. L'incapacité des impérialistes américains et de leurs complices, dont le Canada, à analyser les situations en tenant en compte les spécificités de la conjoncture historique et les ramifications de la révolution technique et scientifique fait que les États-Unis, la Grande-Bretagne et d'autres pays sont de plus en plus désespérés dans leurs efforts pour contrôler les forces productives qui leur ont échappé. Ce qu'ils ne peuvent pas contrôler, ils cherchent alors à le détruire, créant ainsi la situation extrêmement dangereuse et volatile que nous connaissons aujourd'hui.

La conjoncture historique engendre différentes possibilités. Une telle possibilité est que des sociétés s'effondrent. On reconnaît aussi des sociétés établies au-delà de l'horizon étroit du droit bourgeois ou de la société civile. Il est possible de passer de chacun selon ses capacités à chacun selon ses besoins.

Nous avons besoin d'un moyen de calculer les besoins humains et de les satisfaire. Il n'y a pas de processus politique pour cela à l'heure actuelle. Les dirigeants parlent de préférences et non d'intérêts, c'est pourquoi le processus et les institutions politiques ne permettent pas de faire des prévisions et les terroristes font des choses que les dirigeants ne peuvent pas prévoir. Ils sont en dehors de leur civilisation. L'argument de Bush selon lequel vous êtes soit avec nous, soit avec les terroristes concerne ceux qui essaient de faire des calculs sur l'ensemble de l'ordre mondial. Ils ne peuvent pas faire de prédictions parce qu'ils ne sont pas en phase avec le mouvement de la société à ce moment historique rare auquel il faut faire face. Le mécanisme des États-Unis et des puissances de l'OTAN pour faire face à cette situation est la guerre – la guerre civile à l'intérieur du pays et la guerre mondiale.

1. « The German Question », Wikipedia

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  Faisons du Canada une zone de paix!

Non à l'expansion de l'OTAN
dans l'Arctique canadien

– Steve Rutchinski –

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Le secrétaire général de l'OTAN, Jens Stoltenberg, a effectué une visite au Canada les 24 et 25 août au cours de laquelle il a visité des installations militaires à Edmonton, Cambridge Bay (Nunavut) et Cold Lake (Alberta). Cette visite avait pour but d'ouvrir la voie à la militarisation du Grand Nord canadien par les États-Unis et leur alliance agressive de l'OTAN. Elle souligne non seulement les objectifs agressifs des États-Unis contre la Russie et la Chine mais aussi contre la souveraineté du Canada dans l'Arctique.

Le premier ministre Trudeau a accompagné le secrétaire général de l'OTAN lors de ce voyage. Justin Trudeau a tenté de détourner l'attention de ce qui se prépare en disant qu'il n'y a eu « aucun changement profond » dans la politique canadienne en ce qui concerne l'implication de l'OTAN dans l'Arctique. En même temps, il a confirmé ce que lui et son gouvernement planifient réellement. Justin Trudeau a déclaré que l'« agression russe » a rendu « opportun » de « partager avec l'OTAN » ses efforts pour protéger la région arctique.

Ce n'est pas partout que Jens Stoltenberg va qu'il peut écrire un article d'opinion dans le principal média d'information monopolisé du pays. Dans ce cas, le 24 août, le Globe and Mail a publié son article d'opinion pour donner le ton de la visite. Il s'agissait d'un article sur le bellicisme habituel de l'OTAN, qui qualifie tout ce qui ne correspond pas aux intérêts des États-Unis, d'abord et avant tout avec leur bloc impérialiste, de menace à laquelle il faut répondre par la force brutale.

Jens Stoltenberg a profité de l'occasion pour affirmer que si l'Arctique « a traditionnellement été une zone de faibles tensions », cette période touche rapidement à sa fin. Il a désigné « la capacité de la Russie à perturber les renforts alliés dans l'Atlantique Nord » comme « un défi stratégique pour l'Alliance ». Il a également pointé du doigt le projet chinois de « route polaire de la soie », une route commerciale qui relierait la Chine et l'Europe via l'Arctique, comme une menace « qui porte atteinte à nos valeurs et à nos intérêts ».

Le Canada craint depuis longtemps que de telles activités et une telle présence ne sapent sa revendication de souveraineté dans le Grand Nord, par exemple sa revendication du passage du Nord-Ouest qui n'est pas reconnue par les États-Unis et plusieurs autres membres de l'OTAN qui suivent l'exemple américain. Lors d'une conférence de presse, en réponse à une question, Justin Trudeau a explicitement déclaré que le passage du Nord-Ouest est un territoire canadien. Mais ses paroles ne sont pas suivies d'actes lorsque le Canada prend des mesures pour partager la responsabilité de « protéger l'Arctique » avec l'OTAN et NORAD. Il s'agit clairement d'un changement.

Justin Trudeau a hésité à s'engager ouvertement en faveur d'exercices majeurs dirigés par l'OTAN sur le sol canadien dans le Grand Nord. Toutefois, la ministre de la Défense, Anita Anand, a déclaré que la participation des alliés aux exercices militaires nationaux canadiens serait la bienvenue.

La Presse canadienne a rapporté le 24 août que les « experts » canadiens s'accordent à dire que « la visite de Stoltenberg semble représenter un assouplissement de la réticence passée d'Ottawa à travailler avec l'OTAN dans l'Arctique, même si le Canada n'ouvre pas complètement la porte »..

Dans les années 1980, les Inuits affirment
leur souveraineté sur leurs terres, Ntesinan,
et s'opposent aux vols de l'OTAN au-dessus de celles-ci. 

Radio-Canada a pour sa part donné la parole à Yves Brodeur, ancien ambassadeur canadien à l'OTAN, qui demande ouvertement que les forces militaires de l'OTAN s'entraînent dans l'Arctique canadien. « Ce serait une bonne chose » a déclaré Brodeur à Radio-Canada en entrevue. « Avoir des troupes de l'OTAN des pays de l'OTAN avec le Canada s'exerçant dans le Grand Nord serait, pour autant en ce qui me concerne, un gros atout pour l'organisation, pour l'OTAN. »

Du début à la fin de la visite, il s'agissait d'un assaut sous forme d'opérations de psychologie et de propagande de l'OTAN contre les convictions des Canadiens pour ouvrir la voie à la militarisation du Nord, aux exercices militaires de l'OTAN et peut-être même au stationnement de forces de l'OTAN dans le Grand Nord canadien.

Cela a des conséquences désastreuses pour les peuples autochtones du Nord et pour les Canadiens, ainsi que pour les peuples et l'environnement fragile de la région polaire et la capacité des nations à exercer leur souveraineté. Elle justifie une opposition ferme des gens épris de paix de ce pays.

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Opposons-nous à tous les prétextes pour militariser l'Arctique ! Défendons le droit des peuples de l'Arctique à établir des relations fraternelles favorables à eux-mêmes et à la paix mondiale !

– Enver Villamizar –

La visite d'un site d'alerte avancée du NORAD à Cambridge Bay, au Nunavut, et de la base des Forces canadiennes de Cold Lake, en Alberta, par le secrétaire général de l'OTAN, Jens Stoltenberg, accompagné du premier ministre Justin Trudeau, les 25 et 26 août, est un sujet de grave préoccupation pour les Canadiens. Cette tournée a été utilisée comme une occasion de promouvoir les 42 milliards de dollars de fonds publics que le gouvernement fédéral dépense pour renforcer le contrôle des États-Unis sur le territoire canadien et intégrer davantage les forces armées canadiennes à celles des États-Unis au nom du renforcement de la sécurité de NORAD et même de l'Europe[1].

Le NORAD, qui signifie Commandement de la défense aérospatiale de l'Amérique du Nord, est toujours dirigé par un général américain et relève du Commandement du Nord des États-Unis. Cela place le territoire canadien sous le commandement des États-Unis.

Pour camoufler cet arrangement, le premier ministre Trudeau a répété la désinformation que le NORAD est une défense « conjointe » de l'Amérique du Nord, et sous « commandement binational ». L'argument donné par Jens Stoltenberg et Justin Trudeau pour les investissements dans NORAD et une plus grande présence de l'OTAN dans l'Arctique était que les investissements pour militariser l'Arctique par le biais de NORAD profiteront à l'alliance militaire et à son « milliard de citoyens ».

La visite de Jens Stoltenberg a été utilisée pour attiser l'hystérie selon laquelle la Russie et la Chine sont des menaces pour le Canada et que, par conséquent, le Canada devrait renforcer l'OTAN et NORAD dans l'Arctique. Avec l'adhésion probable de la Suède et de la Finlande à l'OTAN, sept des huit nations arctiques seront membres de l'OTAN, à l'exception de la Russie, et donc l'OTAN, par extension, devrait pouvoir militariser davantage l'Arctique au nom de la protection de son « milliard de citoyens ».

Ironiquement, les affirmations de Jens Stoltenberg selon lesquelles la trajectoire la plus courte pour les missiles russes vers les États-Unis passe par l'Arctique, présentent le Canada comme une menace pour la sécurité des États-Unis. Il a également déclaré que les plans de la Chine pour une « Route polaire de la soie », une route commerciale qui relierait la Chine et l'Europe via l'Arctique, ainsi que ses projets de construction du plus grand brise-glace du monde et ses investissements dans les infrastructures énergétiques dans l'Arctique constituent une menace « qui porte atteinte à nos valeurs et à nos intérêts »[2].

Autrement dit, même le commerce international de la Chine qui nécessite le passage dans les eaux arctiques est une menace qui doit être contrée par la militarisation. Cela soulève la question de savoir si la simple existence de la Chine doit désormais être considérée comme une menace pour l'OTAN et ses membres. Combien, parmi le milliard de citoyens que l'OTAN prétend représenter, pourraient accepter cet argument irrationnel, sans parler du presque 1,5 milliard de citoyens de la Chine ? Le fait est que le peuple canadien et les peuples autochtones du Nord se sont toujours opposés à l'OTAN et aux efforts des États-Unis qui s'efforcent d'accroître leur présence et leur contrôle dans l'Arctique.

Pour sa part, Justin Trudeau s'est joint à l'hystérie, en faisant référence à plusieurs reprises à l'Arctique, non pas comme une terre peuplée par les Inuits depuis des temps immémoriaux, mais comme les « approches nord et ouest de l'Europe ». En d'autres termes, la militarisation de l'Arctique est liée à la militarisation de l'Europe.

La présence de l'OTAN a également été justifiée au nom de la réponse au changement climatique, qu'elle qualifie de « multiplicateur de menaces » et considère comme étant avant tout une menace sécuritaire et militaire, plutôt qu'une menace pour les peuples du monde et leur bien-être. La visite a été utilisée pour présenter l'expansion de l'OTAN dans l'Arctique comme liée à la science et même à la protection de l'environnement, avec la promotion du nouveau « Centre d'excellence OTAN pour le changement climatique et la sécurité » que le Canada accueille dans l'Arctique canadien. En somme, toutes les raisons irrationnelles et fallacieuses ont été invoquées pour tenter de justifier quelque chose qui ne peut l'être : la militarisation d'un Arctique déjà fragile au nom de la paix et de la sécurité.

Les jeunes d'Iqaluit, au Nunavut, défendent leur avenir et leur droit à avoir leur mot à dire sur ce qui se passe sur leurs territoires lors d'une marche pour le climat, 5 juin 2019.

Le fait est que l'Arctique appartient aux Inuits et aux peuples autochtones qui vivent sur le territoire arctique de plusieurs États-nations, dont c'est le droit de décider ce qui s'y passe. Ce fait, ainsi que leur opposition à la militarisation de l'Arctique sous commandement des États-Unis pour les « avantages » qu'elle leur apportera prétendument, sont toujours cachés. Justin Trudeau a révélé une conscience coupable lorsqu'il a déclaré : « Nous ne pouvons jamais oublier que la souveraineté ne vient pas des soldats ou des scientifiques, elle vient des gens qui vivent ici depuis des millénaires. Tout ce que nous faisons ici doit non seulement les soutenir, mais aussi tirer parti de leur soutien dans tout ce que nous faisons. »

Qui essaie-t-il de tromper ? Peut-être pense-t-il que sa nomination d'une Inuite et ancienne présidente de la Conférence circumpolaire inuite au poste de gouverneure générale et, à ce titre, de commandante en chef des Forces armées canadiennes (un poste qui revient en réalité au président des États-Unis en raison de l'adhésion du Canada à NORAD et à l'OTAN) convaincra les Inuits que leurs préoccupations d'hier ont été prises en compte et ne sont plus d'actualité ?

En 1989, alors qu'elle était présidente de la Conférence circumpolaire inuite , l'actuelle gouverneure générale Mary Simon a plaidé en faveur d'une zone arctique de paix. « Tout renforcement militaire excessif dans le Nord, que ce soit de la part de l'Union soviétique [d'alors] ou des États-Unis, ne sert qu'à diviser l'Arctique, à perpétuer les tensions Est-Ouest et la course aux armements, et à mettre nos peuples dans des camps opposés », écrivait-elle à l'époque[3]. Il est clair que l'exigence de compromettre sa conscience est devenue la vogue dans le monde impérialiste du XXIe siècle.

La militarisation de l'Arctique et son contrôle par les États-Unis ne soutient pas les peuples du Nord et n'a pas leur appui. C'est précisément la raison pour laquelle tout cela est présenté comme une réponse aux dangers sécuritaires posés par la Russie et la Chine, plutôt que comme une demande des militaristes américains et des plus grands oligopoles pour contrôler les terres, les ressources et les routes commerciales qu'ils convoitent dans leur volonté de contrôler le monde.

Au lieu de militariser l'Arctique, ce qui ne fait qu'accroître les tensions, le Canada devrait exiger sa démilitarisation et permettre aux peuples qui y vivent d'établir des relations fraternelles et des activités durables sur l'ensemble de leurs territoires.

Notes

1. Les investissements particuliers comprendront :-de nouvelles stations radars, la modernisation des systèmes de commandement et de contrôle, des avions de ravitaillement en vol supplémentaires, des missiles air-air perfectionnés pour les chasseurs, des mises à niveau de l'infrastructure des Forces armées canadiennes dans le Nord, et un financement supplémentaire pour compléter et améliorer les projets spatiaux clés.
Les allocations spécifiques comprennent :
- 6,38 milliards de dollars pour des missiles air-air.
6.96 milliards de dollars pour :
- un système de radar transhorizon dans l'Arctique permettant « une poursuite des menaces depuis la frontière canado-américaine jusqu'au cercle arctique »;
- un système de radar transhorizon polaire permettant d'assurer une couverture radar d'alerte « au-delà des voies d'approche vers l'Amérique du Nord depuis l'extrême nord »;
- un réseau complémentaire de capteurs ayant des capacités classifiées distribués dans tout le Nord canadien que les États-Unis pourront utiliser; et
- réaliser et élargir le nouveau projet de surveillance spatiale de pointe annoncé en 2017 dans la politique de défense du Canada;
- 4,13 milliards de dollars pour :
- moderniser les capacités et les systèmes de commandement, de contrôle et de communication des Forces armées canadiennes;
- moderniser le Centre multinational d'opérations aérospatiales du Canada.;
- renouveler les capacités de communications radio à haute et basse fréquence des Forces armées canadiennes;
- renforcer les communications par satellite dans l'Arctique au moyen de fonds supplémentaires afin de réaliser et d'élargir le projet de communications Polaire annoncé dans la politique de défense « Protection, Sécurité, Engagement »;
- acheter et installer de nouvelles radios numériques et de nouvel équipement de réseau;
- collaborer avec les États-Unis afin d'élargir le soutien à l'initiative Pathfinder du NORAD, qui met à profit l'infonuagique et l'apprentissage automatique;
- 15,68 milliards de dollars pour ;
- acquérir des avions de ravitaillement en vol supplémentaires;
- moderniser l'infrastructure des Forces armées canadiennes à quatre endroits dans le Nord du Canada;
- mettre niveau l'infrastructure des chasseurs et les capacités d'alerte de réaction rapide du NORAD dans les bases du Canada;
- moderniser l'infrastructure d'entraînement opérationnel aérien des Forces armées canadiennes.
Fiche d'information : Financement pour la défense continentale et la modernisation du NORAD
2. « In the face of Russian aggression, NATO is beefing up Arctic security », Globe and Mail, 24 août 2022
3. « La lutte des Inuits pour faire de l'Arctique une Zone de paix », LML, 6 avril 2019

(Photos : E. Tranter, LML)

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Action militante contre la promotion de la guerre au spectacle aérien de Toronto

Des activistes antiguerre ont tenu un piquetage animé à l'entrée Dufferin de l'Exposition nationale du Canada (CNE) à Toronto le 4 septembre. Le Spectacle aérien international du Canada, promu comme une « activité familiale » par le CNE, est un évènement annuel. C'est avant tout un étalage d'aéronefs militaires des forces armées américaines et canadiennes. Les membres de plusieurs organisations différentes, y compris un contingent du Parti marxiste-léniniste du Canada (PMLC), ont participé à l'action. Avec leurs bannières, leurs pancartes et leurs slogans, les manifestants ont dénoncé la glorification de la guerre, la promotion des industries de guerre, l'achat par le Canada d'avions F-35 et d'autres équipements militaires au coût de milliards de dollars, et ont appelé à mettre fin au spectacle aérien et à ce que le Canada sorte de l'OTAN.

Le spectacle aérien a été condamné pour ce qu'il est – de la propagande de guerre, une justification pour la militarisation de la vie canadienne et l'intégration accrue du Canada à la machine de guerre américaine, et un outil de recrutement pour attirer les jeunes dans l'armée. C'est une tentative de convaincre le peuple canadien que la technologie des avions de guerre est chose « passionnante ». Pendant ce temps, la mort et la destruction infligées aux êtres humains, aux nations et aux peuples dans les guerres et les actes d'agression pour lesquels ces armes sont utilisées par les États-Unis et son alliance agressive de l'OTAN, et le propre rôle du Canada en tant qu'agresseur dans le monde, sont poliment ignorés.

Des milliers de personnes se rendant au CNE sont passées tout près de l'action. Plusieurs se sont arrêtées pour lire les pancartes, prendre des photos, discuter et exprimer leur appui. Un des sujets soulevés par les participants à l'action est le 77 milliards de dollars que le Canada dépense pour l'achat de nouveaux aéronefs de combat F-35. L'OTAN impose de telles obligations à tous ses membres, y compris le Canada. Les producteurs d'armes, tels que Lockheed Martin basé aux États-Unis, raflent des centaines de milliards de dollars dans la construction de ces instruments de destruction massive tout en intégrant les économies du Canada et d'autres pays membres de l'OTAN dans la machine de guerre des États-Unis.

Un autre sujet soulevé par l'action est le rôle destructeur que les avions de guerre célébrés par le spectacle aérien ont sur l'environnement et les changements climatiques. L'année dernière, par exemple, la Conférence COP 26 de l'ONU sur le changement climatique a identifié et condamné les forces armées américaines en tant que l'une des sources majeures d'émissions de gaz à effet de serre et de changement climatique destructeur. Et c'est sans mentionner tout le reste de l'alliance agressive qu'est l'OTAN.

Un porte-parole du PMLC a condamné la récente visite du secrétaire général de l'OTAN Stoltenberg dans l'Arctique et les plans visant à militariser l'Arctique sous prétexte de répondre aux menaces provenant de la Chine et de la Russie. Soulignant les préoccupations dont les gens avaient fait part – l'opposition à la guerre et aux agressions, l'opposition à l'État qui donne des milliards de dollars aux producteurs d'armes multinationaux comme Lockheed Martin ou encore la dégradation environnementale — il a dit que tout cela met en lumière la nécessité d'affirmer Canada Hors de l'OTAN et du NORAD et Faisons du Canada une Zone de paix.

(Photos : LML)

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