Forum ouvrier

Numéro 72 - 22 octobre 2020

Les gouvernements continuent de manquer à leur devoir

La réouverture des écoles et la reprise de l'économie ne sont pas censées être
un désastre pour la société

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Avis d'expert sur comment se protéger contre la transmission de la COVID-19 dans les écoles

La lutte des travailleurs de la santé pour leurs droits s'intensifie
Des professionnelles en soins bloquent des ponts au Québec pour forcer le gouvernement à négocier

Rapport sur la tragédie au CHSLD Herron à Dorval, au Québec
Un statu quo intenable - Pierre Soublière


Les gouvernements continuent de manquer à leur devoir

La réouverture des écoles et la reprise de l'économie ne sont pas censées être un désastre pour la société

On peut dire, sans l'ombre d'un doute, que la reprise des classes et la réouverture de l'économie n'auraient pas dû être le désastre pour la société qu'elles le sont présentement. En fait, avec le début de la nouvelle année scolaire et la reprise des activités économiques, le Canada connaît une recrudescence des infections, des éclosions, des hospitalisations et même des décès. L'« option » devant nous n'a jamais été une reprise dangereuse des classes pour redémarrer l'économie ou alors le retour au confinement total. Ce n'est pas ainsi que le problème se pose. Il existe des mesures de prévention pratiques qui peuvent et doivent être prises aussi longtemps que la pandémie est parmi nous, ce qui peut durer encore un bon moment.

En mai dernier, lors de la première vague, le Marxiste-léniniste a publié un article intitulé : Pourquoi la pandémie devrait-elle paralyser l'économie[1] ? « Le plus grand problème », y lit-on, « reste celui de savoir qui détermine l'ordre du jour du pays et qui décide des politiques à adopter. Les citoyens subissent simplement ce qui est décidé et n'ont pas leur mot à dire pour établir leurs conditions de vie et de travail ou sur la manière dont ils peuvent contribuer au bien-être de tous. » C'est encore plus vrai aujourd'hui.

L'ordre du jour est établi par les riches, les oligarques mondiaux qui possèdent et contrôlent notre économie. Les mesures qui doivent être prises pour assurer une reprise sécuritaire des activités économiques, y compris la réouverture des écoles, qui est essentielle, sont considérées par les oligarques comme un obstacle à leur quête de profit.

En conséquence, la nouvelle année scolaire a commencé et l'économie a redémarré avec un mépris total pour les conclusions que la science a tirées pour empêcher la propagation de l'infection de la COVID-19. Ce n'est pas sorcier : distanciation physique, hygiène des mains, création de bulles pour limiter les interactions, port du masque, éviter les espaces clos pendant des périodes prolongées, etc.

De plus, les enseignants, les éducateurs, le personnel soignant de première ligne, les travailleurs du transport en commun et les travailleurs de tous les secteurs de l'économie sont empêchés de participer à établir un ordre du jour pour la société. Les nombreuses propositions qu'ils ont mises de l'avant reposent sur des preuves scientifiques, mais elles sont ignorées.

Par exemple, si les recommandations des enseignants et des travailleurs de l'éducation, comme une limite à la taille des classes, le regroupement des élèves en cohortes, une ventilation adéquate dans tous les espaces clos et une distanciation adéquate dans le transport par autobus scolaire, avaient été suivies, cela aurait certainement ralenti la montée de la deuxième vague.

Pourtant, dans chaque province et au Québec, les autorités gouvernementales, quel que soit le parti cartellisé qui forme le gouvernement, ont ouvert les écoles sans préparation ni mesures de sécurité adéquates. Ils l'ont fait au mépris total des avis de leur propre santé publique (sur la distanciation physique et les bulles restreintes, par exemple) et contre l'avis des experts médicaux et scientifiques. Forum ouvrier reproduit ci-dessous des extraits de l'avis d'un de ces experts.

Avec des mesures appropriées, les écoles peuvent être à la fois des institutions puissantes pour la socialisation des jeunes de tous âges, un facteur de comportement sécuritaire pendant la pandémie et des institutions essentielles pour une économie moderne. Cependant, sans que les mesures appropriées ne soient prises, les écoles exposent les enseignants, les élèves et la société dans son ensemble à d'énormes risques et à des superpropagations.

L'irrationalité que nous vivons soulève la question : qui décide ? Cette irrationalité appelle à des changements substantiels basés sur le renouveau démocratique. C'est le peuple qui doit être investi du pouvoir décisionnel de façon à ce que ceux qui sont concernés par les décisions prises, peu importe lesquelles, puissent faire des choix informés et assumer la responsabilité de leurs conséquences. En ce moment, les travailleurs n'ont d'autre choix que de continuer à se battre pour des mesures rationnelles pour faire face à la pandémie. À mesure qu'ils le font, le refus des cercles dirigeants de reconnaître le droit qui appartient à chacun de participer aux décisions sur ce qui doit être fait, renforcera certainement la conscience et la conviction que les travailleurs eux-mêmes doivent devenir les décideurs. Pour que cela se réalise, le problème posé et à résoudre est comment renouveler le processus politique pour mettre fin à ses tendances antidémocratiques qui donnent naissance à des gouvernements de partis qui paient les riches.

Note

1. « Pourquoi la pandémie devrait-elle paralyser l'économie ? », Le Marxiste-léniniste, 16 mai 2020

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Avis d'expert sur comment se protéger contre
la transmission de la COVID-19 dans les écoles

Le docteur David Fisman est un expert en épidémiologie de renommée mondiale sur la transmission de la COVID-19. Son avis d'expert faisait partie de la requête faite auprès de la Commission des relations de travail de l'Ontario (CRTO) par les quatre syndicats d'enseignants et des travailleurs en éducation qui ont demandé un plan de remédiation à l'échelle de la province face aux conditions dangereuses dans lesquelles les écoles ont repris. Le CRTO a rejeté la requête pour « défaut de compétence ». Forum ouvrier reproduit des extraits de l'avis d'expert du docteur Fisman.

Les qualifications du témoin expert

David Fisman : professeur titulaire à la Dalla Lana School of Public Health de l'Université de Toronto (DLSPH) ; ancien chef de la division d'épidémiologie de la DLSPH ; nouveau chef du volet Préparation à la pandémie au nouvel Institut des pandémies de l'Université de Toronto ; médecin-hygiéniste adjoint de la ville de Hamilton de 2001 à 2003 ; plus de 200 publications dont « 15 articles liés à l'épidémiologie de la COVID-19 » depuis février 2020 ; a été financé par les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC) pour des études menées sur la COVID-19 ; a récemment présidé un symposium international sur la transmission de la COVID-19 ; conférencier invité au récent symposium de l'Organisation mondiale de la santé (4 août 2020) sur la transmission de la COVID-19 et « membre de la table de modélisation et de la table des sciences de l'Ontario, qui prodiguent des conseils au gouvernement provincial de l'Ontario sur la COVID-19 ».

Comment la COVID-19 se propage

12. « ... au début de la pandémie, les transmissions par fomes (c'est-à-dire les infections résultant d'un contact physique avec un objet contaminé) étaient considérées comme une voie importante... Cependant, les preuves montrent maintenant que les fomes sont un facteur beaucoup moins important de la COVID-19 qu'on ne le pensait à l'origine. »

13. « ... les aérosols sont de plus en plus reconnus comme un mode de transmission important de la COVID-19... Ceci est susceptible d'expliquer la propension de la COVID-19 à provoquer de grandes grappes dans un environnement 'cloisonné, rapproché, surpeuplé', comprenant les établissements de soins de longue durée, les usines de transformation des aliments et les refuges pour itinérants. »

15. « ... Les restaurants, bars et autres lieux de rassemblement intérieurs tels que les églises sont très présents dans l'histoire des événements à superpropagation de la COVID-19. »

16. « Le fait que les grands rassemblements en plein air... n'ont pas semblé avoir entraîné la propagation de la COVID est une preuve supplémentaire du rôle important joué par les aérosols. »

17. « La transmission par aérosol est plus probable pendant la phase présymptomatique de l'infection... »

18. « L'infection asymptomatique semble courante ... Les enfants âgés de moins de 10 ans étaient trois fois plus susceptibles d'être asymptomatiques que les autres. »

19. « ... Les enfants âgés de 10 ans et plus sont aussi susceptibles que les adultes d'être infectés par la COVID-19... »

21. « ... Les charges virales chez les enfants sont similaires, et peut-être plus élevées, que les charges virales chez les adultes. »

24. « ... Les idées fausses à propos des enfants et de la COVID-19 sont attribuables à la probabilité accrue d'infection asymptomatique chez les enfants (probabilité multipliée par trois dans les données sur l'Ontario)... »

Une revue des mesures de la santé publique pour contrôler
la propagation de la COVID-19

32. « ... les meilleures pratiques à l'échelle mondiale montrent qu'il est possible de réduire la transmission de la COVID-19 à de faibles niveaux en combinant la distanciation, le port du masque, la réduction de la taille des rassemblements, la ventilation et d'autres mesures non pharmaceutiques. »

36. « Le port du masque est probablement le moyen le plus efficace de contrôler la source : ... les masques réduisent le risque de transmission aérienne de la COVID-19 à courte et longue distance. ... Puisqu'il semble que les individus sont les plus infectieux avant l'apparition des symptômes, et que de nombreuses personnes infectées sont complètement asymptomatiques, il est important que le port du masque soit effectué de manière universelle dans tous les endroits intérieurs. »

41. « ... il est remarquable qu'en juillet et août 2020 la Colombie-Britannique a connu une recrudescence du nombre effectif de reproduction... tandis que l'Ontario et le Québec ont traversé une période de faible recrudescence de cas [nombres de reproduction] par suite des exigences du port du masque, malgré des ouvertures substantielles d'activités économiques dans ces provinces. ... la réduction relative du risque associé aux ordonnances du port du masque en Ontario a probablement été de l'ordre de 38 % dans l'ensemble de la province, plus élevée dans la région métropolitaine de Toronto... »

42. « ... il n'y a aucune raison de s'attendre à des sévices, physiques ou psychologiques, par le port de masque chez les enfants... »

43. « ... des espaces intérieurs mal ventilés, des endroits surpeuplés et des contacts étroits augmentent la probabilité que ces aérosols infectent des cas secondaires. ... l'utilisation de masques est une intervention qui aide. ... Un autre mécanisme est une ventilation accrue... c'est-à-dire éliminer l'air à l'intérieur d'un espace clos et le remplacer par de l'air extérieur... »

45. « La distanciation réduit la probabilité de transmission... la distanciation est plus efficace à des distances supérieures à 1,5 mètre. »

46. « ... aucune de ces mesures n'est un substitut à l'autre. Au contraire, elles doivent toutes être utilisées simultanément et de manière cohérente afin de réduire efficacement le taux de reproduction de la COVID-19. »

Les écoles et la COVID-19

57. « Je pense que la réouverture non sécurisée des écoles entraînera probablement des augmentations soudaines de la maladie qui causeront une augmentation du nombre de malades et de décès dans la communauté... »

58. « À mon avis, une attention particulière portée sur la réduction de la taille des classes, l'amélioration de la ventilation dans les écoles et l'utilisation de masques aideraient à réduire les augmentations soudaines de cas de la COVID-19 liées aux écoles au Canada cet automne.

Le Guide relatif à la réouverture des écoles de l'Ontario

59. « J'ai examiné le Guide relatif à la réouverture des écoles de l'Ontario (le Guide). (...) Le Guide ne contient pas de mesures suffisantes pour protéger adéquatement les élèves, les enseignants et les autres adultes qui travaillent dans les écoles, ou le public en général. »

60. « ... il y a au moins cinq défauts majeurs dans le Guide : le fait de ne pas exiger à l'intérieur un port universel du masque à tous les niveaux d'âge ; le fait de ne pas exiger une ventilation améliorée ; le fait de ne pas établir de normes minimales pour la distanciation physique ; ne pas exiger de réduction de la taille des classes à l'extérieur des conseils désignés d'écoles secondaires et de graves lacunes dans son approche face aux cohortes.

64. « La ventilation des espaces intérieurs n'est pas abordée par le Guide... En raison du fait que les salles de classe sont cloisonnées, rapprochées et surpeuplées ... une ventilation adéquate est essentielle pour réduire le risque d'infection. »

69. « ... le Guide n'établit pas de règles minimales de distanciation. »

71. « ... le Guide n'oblige pas les écoles à réduire la taille des classes... »

72. « La réduction de la taille des classes est l'un des outils les plus efficaces pour réduire le risque... le Document de référence mis à jour de SickKids pour la réouverture des écoles indique que 'la réduction de la taille des classes devrait être une stratégie prioritaire' pour la réouverture des écoles. La réduction de la taille des classes produit quatre formes de protection simultanément :

- ... réduit la probabilité que tout membre d'une classe soit infecté

- ... réduit le nombre de cas secondaires pouvant résulter d'un cas principal

- ... permet une plus grande distanciation

- ... réduit la production globale d'aérosols plus fins dans un espace intérieur fixe ... »

78. « À mon avis, l'absence totale de limites de la taille des classes dans la plupart des classes est une approche déraisonnable de la réouverture des écoles du point de vue de la santé publique. (...) des classes d'une vingtaine d'élèves produisent des taux d'infection sous-jacents significativement plus élevés que des classes en comprenant la moitié. »

82. « Le regroupement des élèves dans une seule classe, combiné à des classes moins nombreuses, à une distanciation avec port du masque universel d'au moins 1,5 mètre et à des taux de ventilation adéquats constitue un moyen efficace de garantir que les écoles ne deviennent pas les vecteurs de la propagation de la pandémie de la COVID-19. »

84. « ... Le Guide indique que les enseignants spécialistes... continueront de passer d'une classe à l'autre pour dispenser un enseignement. Cela augmente le risque d'infection tant pour l'enseignant que pour les élèves. Nous avons déjà vu un exemple clair de comment ce type de déplacement d'une cohorte à l'autre peut être le moteur de la pandémie en Ontario : le cas des établissements de soins de longue durée. »

86. « Au niveau des écoles secondaires, les écoles sont tenues... de garder les élèves à environ 100 contacts directs et indirects par jour et de les limiter au sein de deux cohortes de classe ... Les conseils de santé publique incitent les individus à maintenir des cercles sociaux de 10, mais le Guide utilise la règle des contacts dix fois plus importants comme objectif. »

88. « ... Les autres stratégies préconisées par le Guide [hygiène des mains, autodépistage, lunettes et écrans faciaux - note de FO] ne sont pas des substituts adéquats à l'exigence du port universel du masque, à la mise en oeuvre d'une distanciation physique de 1,5 mètre ou plus, à la réduction de la taille des classes, à une ventilation adéquate et elles ne remédient pas aux lacunes sur les règles de cohorte dans le Guide. »

(Photos : FO, FEESO)

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La lutte des travailleurs de la santé pour leurs droits s'intensifie

Des professionnelles en soins bloquent des ponts au Québec pour forcer le gouvernement à négocier


Sur le pont Jacques-Cartier, à Montréal, le 19 octobre 2020

Le 19 octobre au matin, des membres de la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ) ont bloqué la circulation du pont Jacques-Cartier à Montréal et du pont de la ville de Québec entre Ste-Foy et Lévis pendant près d'une heure. Elles ont organisé ces manifestations comme moyen d'informer tout le monde de leur situation. Ces professionnelles de la santé exigent que leurs négociations avec le gouvernement du Québec aboutissent et que celui-ci respecte et reconnaisse leurs revendications pour une amélioration urgente immédiate de leurs salaires et de leurs conditions de travail. Elles appellent à un débat télévisé public avec le ministre de la Santé.

« Tant au sens propre qu'au sens figuré, c'est un signal de détresse que nous lançons une fois de plus au gouvernement Legault. Au cours des derniers jours, nous avons été claires : le gouvernement retrouvera les professionnelles en soins où il n'a pas l'habitude de les voir. Nous n'avons plus d'autre choix. Depuis trop longtemps, et sur toutes les tribunes, nous répétons que l'épuisement a raison des professionnelles en soins et les pousse vers la maladie, la retraite ou la démission. Nous sommes à la table de négociation depuis des mois et nos propositions concrètes continuent d'être ignorées. Si nos mots ne sont plus entendus, nos actions, elles, devront l'être. Aujourd'hui, nous voulons que tout le Québec sache que nous en avons assez, nos conditions de travail doivent changer », a déclaré Nancy Bédard, présidente de la FIQ.

La FIQ a lancé un appel public au ministre de la Santé et des Services sociaux, Christian Dubé, pour la tenue d'un débat ouvert avec la fédération, diffusé par les médias pour que tout le monde puisse voir et entendre l'état des conditions de travail des professionnelles de la santé.

« Comment se fait-il que nous soyons encore à l'étape de convaincre le gouvernement du bien-fondé de nos demandes ? J'invite monsieur Dubé, sur le média de son choix, à une discussion franche qui permettra à la population de juger par elle-même de la question de la surcharge de travail, du temps supplémentaire obligatoire et du réaménagement des horaires de travail à temps complet. Il est maintenant temps que les voeux du ministre Dubé se transforment en actions concrètes », a déclaré la présidente de la FIQ.

La fédération a annoncé qu'elle entreprendra d'autres actions dans les semaines qui suivent pour que la voix de ses membres soit entendue par tout le monde. Les 24 et 25 octobre, les membres de la FIQ refuseront de faire du temps supplémentaire obligatoire (TSO). Les travailleuses vont s'en tenir à leur quart de travail normal et ne travailleront en temps supplémentaire que sur une base volontaire, tout en refusant le TSO.

Un survol des revendications de la FIQ

Voici certaines des principales revendications de la fédération :

- une charge de travail raisonnable et sécuritaire

- des ratios professionnelles en soins/patients sécuritaires

- la stabilisation des équipes de travail

- l'élimination du recours aux heures supplémentaires obligatoires comme outil de gestion

- la réalisation des postes à temps plein plus attractifs [en éliminant l'imposition du temps supplémentaire obligatoire et d'autres abus — note de FO]

- le respect du jour chômé lors de congés fériés statutaires négociés

- le droit des travailleurs à avoir leur mot à dire pour établir les horaires

Pour ce qui est des salaires, la FIQ demande une augmentation salariale de 12,4 % sur trois ans, dont 7,4 % est un rattrapage pour l'écart grandissant entre les travailleurs de la santé et les autres travailleurs du secteur public comme les travailleurs d'Hydro-Québec ou universitaires. Le gouvernement du Québec s'en tient à une « offre » provocatrice de 5 % d'augmentation sur 3 ans, ce qui représente à toutes fins pratiques zéro augmentation compte tenu de l'inflation. Cette offre salariale est restée la même depuis le mois de mai.

(Photos : FIQ)

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Rapport sur la tragédie au CHSLD Herron à Dorval, au Québec

Un statu quo intenable

Le « Rapport d'enquête sur les événements survenus dans le cadre de la pandémie de la COVID-19 au CHSLD Herron » fut mandaté par le gouvernement du Québec à la suite du décès, entre le 28 mars et le 10 avril, de 31 personnes aînées, résidentes du Centre de soins de longue durée Herron. L'auteur du rapport retourne jusqu'en 2017 pour chercher les facteurs qui, au cours de ces années, peuvent avoir mené à une telle tragédie. Voici les faits saillants de ce rapport qui a seulement été rendu public le 23 septembre.

Diverses organisations avaient observé un grand nombre de problèmes majeurs dès 2017 dans les soins accordés à la résidence Herron. Parmi les organisations, il y avait : le Conseil québécois d'agrément, le ministère de la Santé et des Services sociaux, le Protecteur du citoyen, l'Ordre des infirmières et infirmiers auxiliaires du Québec et l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec. Quelles ont été les principales préoccupations soulevées par l'ensemble de ces organisations ? Elles sont :

- des mesures de contrôle des infections inadéquates

- un ratio personnel/résidents élevé

- un haut taux de roulement de personnel évalué à plus de 20 % sur une base annuelle

- une formation inadéquate du personnel sur les symptômes psychologiques et comportementaux de la démence

L'auteur du rapport observe que, comme dans plusieurs autres CHSLD au Québec, Herron opère dans un contexte permanent de pénurie de personnel. Il affirme : « Cela se traduit par de l'absentéisme au travail, des ratios infirmières/résidents élevés. Ces situations créent un supplément de travail pour le personnel en poste, de l'épuisement et le départ d'employés. »

Au niveau organisationnel, au moment de l'éclosion de la pandémie, il y avait un manque de fournitures d'assistance telles que des piqués et des culottes d'incontinence ainsi que des équipements médicaux de base comme des appareils de prise de tension artérielle et des thermomètres.

Le 8 avril, lors de l'intervention d'urgence menée par le CIUSSS ODIM (Centre intégré universitaire de Santé et de Services sociaux de l'Ouest-de-l'Île-de-Montréal), voici certains des nombreux soins de santé qu'il y a apportés :

- un nombre suffisant d'équipements de protection individuelle

- la présence de médecins spécialistes en gériatrie et en médecine interne

- une équipe de pharmaciens pour assurer la logistique et la sécurité dans le circuit des médicaments

- des professionnels en renfort pour contrer la malnutrition, la déshydratation et la dénutrition des résidents

- du travail fait avec le service alimentaire afin de revoir le fonctionnement, la texture, la qualité et la température des aliments

- le dépistage du coronavirus pour tous les résidents

Une chose qui est définitivement mise en relief dans l'intervention d'urgence du 8 avril est que les niveaux de soins de la résidence Herron étaient complètement inadéquats, bien avant la pandémie. À cet égard, l'auteur affirme : « Est-ce que des promoteurs privés peuvent parvenir à répondre à l'ensemble des besoins qu'exigent les conditions d'une lourde perte d'autonomie ? Enfin, est-ce que les conditions pour les travailleurs et travailleuses dans ces organisations concourent à une offre de services stable, continue et de qualité ? L'expérience des trois dernières années du CHSLD Herron porte à croire que non. Dans ce contexte, le statu quo pour ce type de ressources en 2020 est-il toujours possible ? »

Dans sa propre déclaration lors de la publication du rapport, le gouvernement du Québec dit que ce rapport servira « à mieux prendre soin de nos aînés et de nos populations vulnérables dans tous les milieux de vie au Québec ».

Aussi longtemps que le gouvernement du Québec refusera d'augmenter les investissements dans la santé, y compris pour les travailleurs qui dispensent les soins et qui exigent des conditions qui leur permettront de voir à la santé et à la protection de tous au mieux de leur capacité, la situation ne changera pas.

(Photos : FIQ, Unifor)

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