Forum ouvrier

27 juin 2019

L'opposition à l'offensive antisociale en Alberta

Résistance grandissante à la loi 9 et au mépris du gouvernement Kenney envers les travailleurs et l'état de droit

Piquetages d'information: Non!  à la loi 9, Loi sur le report de l'arbitrage salarial dans le secteur public
L'Association des enseignants de l'Alberta va entreprendre une contestation judiciaire - Cory Hare, directeur de la rédaction, Service de nouvelles de l'ATA

Les travailleurs du Québec défendent leurs droits
Contestation constitutionnelle des employés et retraités municipaux de la loi qui s'attaque à leurs régimes de retraite
Les travailleurs continuent de s'opposer aux changements dans la formation des grutiers qui mettent en danger leur sécurité et celle du public


L'opposition à l'offensive antisociale en Alberta

Résistance grandissante à la loi 9 et
au mépris du gouvernement Kenney envers les travailleurs et l'état de droit


Piquetage d'information des travailleurs à Lac La Biche pour protester contre la loi 9 et ses attaques contre les négociations du secteur public, le 15 juin 2019

Les travailleurs de l'Alberta organisent des actions partout dans la province pour dire un Non ! retentissant à la loi 9, Loi sur le report de l'arbitrage salarial dans le secteur public. Les travailleurs se sont rassemblés devant l'Assemblée législative dans la soirée du 19 juin, au moment où le gouvernement adoptait le projet de loi à toute vapeur. Pendant la période de questions, le jour suivant, ils ont exprimé leur colère et leur détermination à lutter pour défendre leurs droits et les services publics qu'ils fournissent.

Le Syndicat des employés provinciaux de l'Alberta (AUPE) organise des lignes de piquetage d'information dans des endroits de travail partout dans la province. Les premiers piquetages auront lieu sur l'heure du midi devant des hôpitaux, et tous les syndicats s'organisent pour en faire un succès. L'AUPE organise aussi des assemblées communautaires téléphoniques pour ses membres. L'AUPE a demandé une injonction contre la loi 9 et le Syndicat des Infirmières unies de l'Alberta (UNA) a lui aussi entamé une contestation judiciaire pour bris de contrat et violation des droits de ses membres en vertu de la Charte. La Fédération du travail de l'Alberta (AFL) dit que les syndicats se réunissent en ce moment pour préparer de nouvelles actions.

Le gouvernement du Parti conservateur uni (UCP) de l'Alberta a fait adopter la loi 9 à l'Assemblée législative en invoquant l'allocation de temps pour mettre fin au débat et adopter la loi après une session qui a duré toute la nuit. La loi elle-même et la façon avec laquelle l'UCP a imposé son adoption illustrent bien la destruction de la politique et la crise des institutions démocratiques canadiennes. Le mépris total de l'UCP envers l'Assemblée législative a été démontré lorsque le premier ministre Jason Kenney, sourire en coin, s'est donné en spectacle en distribuant des bouchons pour les oreilles aux membres de son caucus pour qu'ils n'aient pas à entendre les arguments et les amendements de l'opposition. La loi est largement considérée comme étant illégale et une violation du droit des travailleurs de négocier collectivement leurs conditions d'emploi.

Gil McGowan, le président de la Fédération du travail de l'Alberta, a dit : « Kenney voulait empêcher son caucus d'entendre le NPD expliquer comment cette loi contrevient aux décisions de la Cour suprême du Canada sur ce que signifie négocier de bonne foi et sur les obligations des gouvernements en ce qui concerne la négociation collective. »

McGowan a aussi soulevé la prétention de l'UCP d'avoir un mandat d'attaquer les travailleurs du secteur public au nom des Albertains qui l'ont élu : « Ils ne voulaient pas non plus qu'on leur rappelle que nulle part dans les 118 pages de leur programme électoral l'UCP mentionne-t-il qu'il allait rompre les conventions collectives avec les travailleurs du secteur public, saboter le processus d'arbitrage par un tiers parti indépendant ou se donner le droit d'imposer des baisses de salaires sans négociation. L'arrogance et le manque de respect flagrant dont le premier ministre et son caucus ont fait preuve sont à couper le souffle.

« Si le premier ministre pense qu'il peut déchirer des conventions collectives et traîner les droits des travailleurs dans la boue, il se trompe. Et il devrait comprendre que des bouchons pour les oreilles ne seront pas très utiles dans les prochaines semaines parce que si l'UCP continue à agir ainsi, le ton va monter considérablement. »

Le Syndicat des infirmières unies de l'Alberta (UNA) a déclaré : « Avec l'adoption finale de la loi 9, les négociations avec l'UNA sont reportées à l'Halloween. À ce moment-là, on s'attend à ce que le gouvernement dépose des projets de loi ouvrant la porte à une ingérence encore plus agressive dans le processus de négociation collective et d'arbitrage du secteur public, et le moment semble avoir été choisi pour que la controverse n'éclate qu'après les élections fédérales à l'automne. »

Le Syndicat des employés provinciaux de l'Alberta (AUPE) souligne que le ministre des Finances, Travis Toews, a refusé de répondre lorsque les journalistes lui ont demandé si le gouvernement allait autoriser la tenue d'audiences d'arbitrage après le 31 octobre. « Il devient maintenant évident, écrit l'AUPE, que la loi 9 n'est peut-être pas seulement une tactique pour reporter les arbitrages, mais bien pour les annuler. C'est le premier pas d'un stratagème du gouvernement visant à geler ou à baisser les salaires. »

La loi touche 24 conventions collectives et près de 180 000 employés du secteur public, dont certains sont directement employés par le gouvernement mais dont la plupart le sont par des agences publiques comme les Services de santé de l'Alberta.

Les travailleurs visés par le gouvernement avec sa loi 9 vont au travail tous les jours pour fournir des services dont le peuple et la société ont besoin. Ils sont la première ligne de défense des services et des programmes publics que requiert une société moderne. Par ce manque de respect et ce mépris envers les droits des travailleurs du secteur public, et par ce refus de participer à des négociations de bonne foi et le recours au diktat, l'UCP et d'autres gouvernements antisociaux semblables au Canada attaquent tous les travailleurs et entraînent la société dans une voie rétrograde et dangereuse.

Forum ouvrier lance l'appel à tous à se tenir aux côtés des travailleurs du secteur public. Joignez-vous aux piquetages d'information dans votre ville, grande ou petite. Pour de plus amples détails, lire le prochain article. Discutez les enjeux avec vos collègues de travail, vos amis et voisins, et encouragez-les à se joindre et à prendre la parole eux aussi. Unissez-vous à la défense du droit des travailleurs d'avoir leur mot à dire sur leurs salaires, leurs conditions de vie et de travail et leur retraite. Disons Non ! au diktat et à l'arbitraire. Défendons le droit des travailleurs de négocier collectivement ! La loi 9 doit être abrogée !


Piquetage d'information contre la loi 9 à Wetaskiwin, le 14 juin 2019

(Photos: AUPE)

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Piquetages d'information: Non! à la loi 9, Loi sur le report de l'arbitrage salarial dans le secteur public

Le Syndicat des employés provinciaux de l'Alberta (AUPE) organise des piquetages d'information partout dans la province pour dire Non ! à loi 9. La loi vise les travailleurs du secteur public et met fin aux clauses des conventions collectives de 180 000 travailleurs qui stipulaient qu'un arbitrage de réouverture de salaire devait avoir lieu avant le 30 juin. Alors que la loi vise les travailleurs du secteur public, une attaque contre ces travailleurs est une attaque contre tous les travailleurs. Joignez-vous à la défense du droit des travailleurs d'avoir leur mot à dire et un contrôle sur leurs conditions de vie et de travail, et dites non ! au diktat et au mépris de l'État de droit. La loi 9 est inacceptable et doit être abrogée ! Les sections locales de l'AUPE organisent des piquetages d'information aux endroits suivants :

Alberta central
Centre de soins Vegreville
Jeudi 27 juin - 11 h 30 à 13 h

Centre de santé Tofield
Vendredi 28 juin - 11 h 30 à 13 h

Centre de soins de santé Lamont
Mardi 2 juillet - 11 h 30 à 13 h

Centre de santé Two Hills
Mercredi 3 juillet - 11 h 30 à 13 h
Pour de l'information sur ces piquetages : section locale 043 de l'AUPE,
présidente Judy Fader, local4308@gmail.com


Calgary
Centre médical Foothills
Mercredi 3 juillet - 11 h 30 à 13 h
Information : section locale 095 de l'AUPE, président David Choy, chairlocal095@aupe.ca

Edmonton
Hôpital Leduc
Mardi, 9 juillet - 11 h 30 à 13 h
Information : Section locale 054/010, présidente Teresa Bergen teresa666@live.ca
ou section locale 046/003, vice-présidente Sharon Conium, 780-903-5133.


(www.aupe.org/fightback)

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L'Association des enseignants de l'Alberta va entreprendre une contestation judiciaire

L'association des enseignants de l'Alberta (ATA) lance une contestation judiciaire de la loi 9, la loi du gouvernement de l'UCP qui reporte la décision en arbitrage sur les salaires des enseignants.

Lors d'une réunion de fin de semaine, les membres du bureau de l'Association ont autorisé son cabinet juridique à entreprendre une contestation constitutionnelle en raison du fait qu'elle viole le droit de l'ATA à la libre négociation collective.

« Nous défendons nos droits comme les autres membres du secteur public », a dit le président de l'ATA, Greg Jeffery. « Nous allons continuer de demander que les contrats et les ententes, librement conclus, soient respectés. »

Un accord conclu à la table centrale plus tôt cette année comprenait une clause de recours à l'arbitrage pour déterminer les salaires des enseignants. L'accord stipule que cet arbitrage doit avoir lieu avant le 30 septembre. La loi 9 reporte cependant cet arbitrage à après le 31 octobre.

Le nouvel échéancier pour l'arbitrage est le 15 décembre. Peu importe la longueur du report, il est nécessaire de lutter contre ce geste du gouvernement sur une base de principe, a dit Jeffery.

« Les enseignants sont certainement frustrés de n'avoir touché aucune augmentation de salaire en sept ans, et ils espéraient obtenir finalement quelque réparation, et, de voir tout ceci nous être enlevé à la dernière minute est certainement frustrant pour nos membres », a dit Jeffery. « Nous devons dire au gouvernement que cela n'est pas une façon acceptable de mener des relations de travail. »

Ce même lundi, le Syndicat des employés provinciaux de l'Alberta a annoncé qu'il lançait une contestation judiciaire. Le Syndicat des infirmières unies de l'Alberta a fait une annonce similaire vendredi dernier [le 21 juin]. On croit que d'autres syndicats du secteur public sont en train de préparer des contestations semblables.

La liberté d'association

La contestation sera menée en vertu de la section 2 (d) de la Charte des droits et libertés. Les syndicats vont souligner que la loi enfreint leur droit à la libre négociation collective et, conséquemment, leur liberté d'association, a dit Sandra Johnston, la coordonnatrice du service aux enseignants de l'ATA.

« L'arbitrage est un compromis entre les enseignants et le TEBA [l'Association patronale de négociation avec les enseignants ] qui a été accepté lorsque nous n'avons pas pu nous entendre sur les salaires mais que nous voulions tout de même qu'il y ait une entente. Maintenant, l'arbitrage est traité comme s'il était un affront à l'intérêt public. Il est au service de l'intérêt public », a-t-elle dit.

Le gouvernement a justifié la loi 9 en disant qu'il a besoin d'obtenir un meilleur tableau de la situation en vue du prochain budget avant de déterminer les salaires du secteur public, mais Jeffery ne croit pas à cet argument.

« Ils ont déjà réduit les impôts des entreprises ... et créé un centre de crise de 30 millions de dollars ... alors le discours du gouvernement ne tient pas la route parce qu'ils ont déjà commis des gestes fiscaux de grande portée, et tout d'un coup ils ne peuvent pas respecter des conventions collectives négociées de bonne foi », a-t-il dit.

Jeffery a souligné que le gouvernement s'attend à recevoir un rapport le 15 août d'un panel d'experts mis sur pied pour préparer son budget d'automne, et que la présidente du panel a déjà dit qu'une solution simple serait de réduire les salaires de 2% dans tout le secteur public.

« S'ils ne font qu'attendre que tout cela devienne officiel, alors nous ne sommes pas intéressés à y participer », a dit Jeffery. « Personne ne veut d'une coupure de salaire ou d'un autre zéro d'augmentation. »

La loi 9, Loi sur le report de l'arbitrage salarial dans le secteur public, a été adoptée en troisième lecture le 19 juin. Malgré sa contestation judiciaire, l'ATA se concentre sur ses préparatifs d'arbitrage, peu importe quand il aura lieu.

« Nous ne perdons pas de vue que nous devons remporter cet arbitrage », a dit Jeffery.

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Les travailleurs du Québec défendent leurs droits

Contestation constitutionnelle des employés
et retraités municipaux de la loi qui s'attaque à leurs régimes de retraite

Manifestation des employés municipaux de Montréal à la défense de leurs pensions, le 23 avril 2014 (SCFP)

Des dizaines de syndicats représentant les travailleurs municipaux du Québec poursuivent leur contestation constitutionnelle contre la loi 15, Loi favorisant la santé financière et la pérennité des régimes de retraite à prestations déterminées du secteur municipal. Le gouvernement du Québec a adopté cette loi en décembre 2014. Les syndicats engagés dans la contestation représentent des milliers d'employés municipaux à l'échelle du Québec, dont les cols bleus et les cols blancs, les policiers et les pompiers.

Selon les syndicats, cette loi contrevient, entre autres choses, à la liberté de négociation collective. Ils soulignent que l'article 2 de la Charte canadienne des droits et libertés protège la liberté d'association des travailleurs, ce qui est nécessaire pour que le droit de négociation collective veuille dire quelque chose en pratique.

Dans un communiqué publié le 21 juin, le Syndicat canadien de la fonction publique (Québec) mentionne qu'après 85 jours d'audience à la Cour supérieure du Québec, la preuve présentée par les parties est maintenant close. La prochaine étape est la présentation des plaidoiries, ce qui doit commencer au mois d'août et durer deux semaines. La première semaine sera consacrée aux plaidoiries des syndicats.

Lorsqu'ils ont présenté le projet de loi en 2014, le gouvernement du Québec et les maires des grandes villes comme Montréal et Québec ont dit qu'il était une étape nécessaire à la pérennité des régimes de retraite à prestations déterminées dans le secteur municipal et à la garantie de l' « équité intergénérationnelle ». Ils ont utilisé des données faisant état de vastes déficits dans certains régimes de retraite des employés municipaux. Les travailleurs et leurs syndicats ont contesté ces données comme inexactes et frauduleuses. Dans le cas de Montréal, par exemple, les données ne tenaient pas compte du fait que, pendant des années, la ville de Montréal n'avait pas mis l'argent qu'elle était juridiquement tenue de mettre dans les régimes de retraite.

Un trait essentiel de la loi 15 est qu'il retire du champ de la négociation collective les enjeux relatifs aux régimes de retraite des employés municipaux et impose un diktat gouvernemental. La loi fixe à 50-50 le pourcentage des taux de cotisation aux régimes de retraite à venir et y interdit toute clause d'indexation automatique. Elle brise les contrats existants et impose aux travailleurs et aux retraités de payer 50 % des déficits actuariels prévus qui étaient à la charge des municipalités en vertu de conventions collectives dûment signées.

En ce qui concerne les retraités, la loi permet aux municipalités d'annuler l'indexation de leurs pensions et d'utiliser ces montants pour rembourser les déficits. On évalue que les retraités municipaux de Montréal ont été privés de millions de dollars de pensions depuis que la ville de Montréal a suspendu leur indexation en 2016. Pour détruire l'opinion publique et miner l'opposition à cette attaque contre les retraités et leurs droits, les médias monopolisés se sont lancés dans une propagande diffamatoire selon laquelle les retraités municipaux menaient la belle vie au détriment des budgets de la ville. En fait, une grande partie des retraités municipaux doivent vivre avec 30 000 dollars et même 20 000 dans certains cas, selon la date à laquelle ils ont pris leur retraite. Les travailleurs refusent comme étant méprisable qu'un décret de l'État puisse forcer les retraités à vivre dans la pauvreté et les priver de leurs droits faisant l'objet d'une contrat.

La loi a imposé la restructuration régressive de quelque 216 régimes de retraites à prestations déterminées dans environ 1 100 municipalités du Québec. Les employés municipaux versent maintenant des montants beaucoup plus élevés en cotisations à leurs régimes de retraite, ce qui équivaut à une réduction salariale significative. Ceci s'ajoute aux montants que plusieurs ont été forcés de payer pour rembourser les déficits passés, dont ils n'étaient pas responsables.

Par leurs actions et leur discours, les autorités municipales de Montréal et de Québec ont reconnu que ce vol des pensions organisé par l'État et l'abaissement du niveau de vie des employés municipaux vise à détourner une plus grande partie de la valeur que les travailleurs produisent, et qui est maintenant aux mains des municipalités, dans les coffres des entreprises mondiales, au moyen de stratagèmes pour payer les riches. Ces autorités veulent faire des villes une plaque tournante pour l'investissement par des intérêts privés supranationaux mondiaux, au détriment du bien-être et des droits des travailleurs actifs et à la retraite.

Les travailleurs municipaux et leurs alliés ont mené une lutte prolongée pour empêcher le gouvernement d'adopter la loi 15. Ils ont organisé des manifestations et des grèves locales. Les cols blancs de Montréal ont organisé une grève générale en 2014 dont un des thèmes centraux était l'opposition à cette loi et la défense des pensions et du droit de négociation collective.

Depuis que la loi a été adoptée, les travailleurs municipaux ont essayé d'en limiter son impact lorsqu'ils ont négocié le renouvellement de leurs conventions collectives. Par exemple, les travailleurs d'entretien de la Société du transport de Montréal ont négocié et organisé des actions pendant 23 mois à la défense de leurs droits. Ils ont réussi à obtenir une prime de l'employeur en 2019 pour compenser l'augmentation de leurs cotisations à leur régime de retraite.

Les travailleurs ne se sont pas réconciliés avec cet abus de pouvoir de l'État québécois. La contestation constitutionnelle de la loi 15 fait partie de la lutte pour forcer son retrait. Les employés municipaux actifs et à la retraite et leurs alliés demandent que cette loi soit retirée et demandent réparation pour les dommages infligés. Les travailleurs ont le droit de négocier collectivement leurs conditions d'emploi, et ceci comprend avoir un mot décisif à dire sur leur niveau de vie pendant les années actives de travail et à la retraite.

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Les travailleurs continuent de s'opposer aux changements dans la formation des grutiers qui mettent en danger leur sécurité et celle du public

Cela fait maintenant plus d'un an que le gouvernement du Québec et la Commission de la construction du Québec (CCQ) ont aboli arbitrairement le caractère obligatoire du Diplôme d'études professionnelles (DEP) des grutiers et l'ont remplacé par un programme très inférieur de formation en entreprise. Les grutiers et les travailleurs de la construction ont donné de solides arguments contre ce changement dès qu'il a été annoncé. Leurs arguments scientifiques et organisationnels sont tombés dans l'oreille d'un sourd parce que les grandes entreprises de la construction veulent ce changement pour servir leurs intérêts privés étroits, sans égard aux dangers qu'il comporte.

Les travailleurs de la construction protestent contre la négligence de la CCQ en matière de santé et de sécurité suite à un incident impliquant une grue.

Afin d'assurer leur sécurité et celle du public, les travailleurs de la construction n'ont pas abandonné leur opposition à ce changement régressif et demandent au gouvernement du Québec de rétablir immédiatement le caractère obligatoire du DEP. Ils mènent la lutte devant le tribunal de l'opinion publique par le biais de leur site Web et en parlant à tous les médias qui sont prêts à les écouter. Ils ont deux grandes revendications, qu'ils demandent au gouvernement de la Coalition Avenir Québec de satisfaire pour le bien du public.

1) que la nouvelle réglementation soit retirée et que la formation professionnelle obligatoire des grutiers soit maintenue ;

2) qu'une table de concertation soit créée qui comprend toutes les parties concernées, dont les enseignants qui fournissent la formation professionnelle, pour étudier les problèmes relatifs au secteur des grutiers et à la sécurité sur les chantiers de construction.

À la fin avril 2018, le gouvernement du Parti libéral a aboli le caractère obligatoire du Diplôme d'études professionnelles (DEP), sans le consentement ou la contribution des grutiers, des syndicats de la construction ou des enseignants qui donnent la formation professionnelle. Le DEP menant au métier de grutier comprend 870 heures de formation pratique dans une institution d'enseignement professionnel. Le gouvernement a rendu ce diplôme facultatif. Il a instauré un programme de formation en entreprise de seulement 150 heures, qui est fourni et géré par les entreprises de la construction. Le gouvernement et la CCQ ont aussi remplacé l'enseignement et le diplôme professionnel par un cours de 80 heures pour les camions-flèches d'une capacité maximale de 30 tonnes. C'est justement ce type de grues qui versent le plus et qui causent le plus de dommages.

Les grutiers ont refusé d'accepter sans mot dire cette attaque contre leur droit d'avoir un mot décisif à dire et ils ont mené une lutte sans relâche contre la nouvelle réglementation. Ils ont notamment fait le geste audacieux de ne pas se présenter au travail pendant environ une semaine en juin 2018. En réponse à cela, le gouvernement a mis sur un pied un comité d'experts pour étudier la nouvelle réglementation, qui a remis son rapport en mars 2019. Tout en reconnaissant que la formation réduite en entreprise est inférieure à la formation professionnelle donnée par des enseignants dans une institution d'enseignement, le comité d'experts a proposé que la formation professionnelle soit une « référence » et non une exigence. Il a pris pour acquis que la formation en entreprise est là pour rester, et a recommandé des modifications mineures. [1]

En entrevue télévisée au réseau TVA à la fin du mois de mai, le président de l'Union des opérateurs grutiers, Evans Dupuis, a présenté le point de vue du syndicat : « Ce n'est pas réglé encore après un an maintenant que le nouveau règlement est en vigueur. Depuis un an, on a promulgué une formation en entreprise alors n'importe qui peut entrer dans l'industrie de la construction en ayant uniquement une formation en entreprise. En ce qui concerne l'activité des camions-flèches on a sorti cette petite grue de la norme pour permettre à n'importe qui de l'opérer. C'est ce qu'on dénonce depuis le début.

« Pour donner un exemple concret, depuis qu'on a créé le DEP, on a diminué de 66 % le nombre d'accidents mortels dans le métier de grutiers. Le DEP a fait ses preuves. Ce qu'on attend c'est que le nouveau gouvernement prenne une décision qui va respecter la santé et la sécurité et qu'on va s'assurer qu'on ait une formation adéquate pour le métier de grutier. »


En ce qui concerne la recommandation du comité de donner une formation initiale de trois semaines préalablement à la formation en entreprise, l'Union des opérateurs grutiers ne l'appuie pas parce qu'elle n'est pas adéquate et ne se compare en rien avec la formation professionnelle actuelle de 870 heures menant à un diplôme.

De plus, les grutiers et leur syndicat rejettent sur une base de principe l'argument des entreprises de la construction et du gouvernement qu'un abaissement des normes de sécurité est justifiable à cause d'une pénurie de main-d'oeuvre dans le secteur de la construction. Ils soulignent qu'il existe des moyens de combler les besoins de main-d'oeuvre sans abaisser les normes de la formation et mettre en danger la vie et le bien-être des travailleurs et du public. Par exemple, on peut augmenter les inscriptions à la formation professionnelle, accepter plus de candidats
qui auront l'occasion de devenir grutiers. Cela a été fait dans le passé, disent-ils, mais en 2015 les inscriptions ont été diminuées.

Les grutiers rappellent qu'il fut un temps où le gouvernement avait éliminé le cours de conduite obligatoire pour la conduite d'un véhicule au Québec. Le cours obligatoire a été rétabli rapidement parce que le nombre de morts sur la route a augmenté. Ils soulignent que c'est le même principe qui doit s'appliquer dans le métier de grutier pour éviter l'augmentation des accidents et des décès sur les chantiers de construction. Le gouvernement du Québec doit écouter ceux qui font le travail et leurs syndicats et rétablir immédiatement la formation professionnelle obligatoire de 870 heures pour devenir grutier.

Note

1. Pour un examen du rapport du comité d'experts, lire « Le rapport du comité d'experts ne respecte pas les revendications de sécurité de ceux qui font le travail », Pierre Chénier, dans le numéro du 18 avril 2019 de Forum ouvrier

(Photos: FTQ Construction)

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