Le Marxiste-Léniniste

Supplément

Numéro 1520 avril 2019

D'importants anniversaires

• 58e anniversaire de la défaite de l'invasion américaine
de la baie des Cochons à Cuba
• 71e anniversaire du soulèvement de l'Île Jeju en Corée
• 76e anniversaire du soulèvement héroïque
du ghetto de Varsovie

58e anniversaire de la défaite de l'invasion
américaine de la baie des Cochons à Cuba

La patrie cubaine est la patrie où les Cubains ont gagné le droit de contrôler leur propre destinée et de construire leur propre avenir!
Une proclamation pour tous les temps

- Yudy Castro Morales -


71e anniversaire du soulèvement de l'île de Jeju en Corée

Le massacre de Jeju rappelle la longue histoire de résistance à l'agression américaine contre la Corée


76e anniversaire du soulèvement héroïque du ghetto de Varsovie

Défi et résistance organisée contre le nazisme
aux heures les plus sombres

Zog Nit Keynmol, hymne yiddish du mouvement des partisans juifs



58e anniversaire de la défaite de l'invasion américaine
de la baie des Cochons à Cuba

La patrie cubaine est la patrie où les Cubains ont gagné le droit de contrôler leur propre destinée et de construire leur propre avenir!


Le peuple cubain célèbre le 58e anniversaire de la première grande défaite de l'impérialisme américain en Amérique latine à Playa Giron. La cérémonie rendant hommage aux héros et aux martyrs responsables de la victoire contre les mercenaires a lieu devant le musée de Ciénaga de Zapata, qui recèle des trésors historiques de cette bataille.

Le 19 avril, le peuple cubain célèbre la victoire de Playa Giron, sa victoire sur l'invasion de mercenaires menés et financés par les États-Unis qui ont été envoyés pour attaquer Cuba à la baie des Cochons. Dans les jours qui ont précédé l'invasion la baie de Cochons soutenue par les États-Unis en 1961, les aéroports de Santiago de Cuba, de San Antonio de los Baños et de La Havane ont été bombardés.

Lors du rassemblement devant le cimetière de La Havane après les funérailles des victimes des bombardements, le dirigeant de la Révolution cubaine, Fidel Castro, a pris la parole devant une foule armée, prête à affronter ce qui semblait imminent : une invasion. « Cette Révolution, nous ne la défendons pas avec des mercenaires », a-t-il déclaré en parlant des pilotes embauchés avec de l'argent américain qui avaient mené les bombardements, « Nous la défendons avec les hommes et les femmes du peuple. »

« Qui a les armes ? » a demandé Fidel Castro à la foule rassemblée à l'intersection désormais célèbre des 23e et 12e rues. « Quelles sont les mains qui brandissent ces armes ? Sont-ce des mains d'exploiteurs ? » Les gens ont brandi leurs armes au-dessus de leurs têtes et ont crié « NON ! » « Quelles sont les mains qui brandissent ces armes ? Ce ne sont pas des mains d'ouvriers ? Et qu'est-ce qui forme la majorité du peuple ? Une Révolution où les humbles ont les armes est-elle démocratique ? Camarades ouvriers et paysans, ceci est la Révolution socialiste et démocratique des humbles, avec les humbles et pour les humbles. »


Fidel inspecte les armes durant la bataille contre l'invasion à la baie des Cochons.

L'invasion a complètement échoué et toute la force mercenaire a été capturée ou tuée.

Près de 60 ans plus tard, Cuba a triomphé malgré toutes les attaques terroristes des États-Unis. Des dizaines de bombardements de champs de canne à sucre, de villes et même les hôtels ; l'attentat à la bombe d'un avion de ligne cubain qui a tué toutes les personnes à bord. Des centaines de tentatives d'assassinat contre les dirigeants cubains - 638 contre Fidel Castro ; les attaques militaires, la guerre économique et biologique menée contre la population cubaine - toutes ces tentatives de détruire la Révolution cubaine ont échoué. Le blocus financier et commercial implacable de Cuba est un acte de guerre qui, à ce jour, reste impuni.[1]

Malgré d'énormes difficultés, malgré l'agression ouverte des impérialistes américains, qui sont à peine à 165 kilomètres, et les immenses problèmes sociaux qu'elle a provoqués, la souveraineté et l'indépendance de Cuba restent intactes. Contrairement à la situation qui prévaut dans les forteresses de l'impérialisme, la Révolution cubaine continue de fournir des soins de santé, l'éducation et le logement comme des droits et non des privilèges. Les aliments de base continuent d'être subventionnés par l'État et le peuple cubain est fier de la patrie qu'il a lui-même établie et défendue.

Dans son discours prononcé le 1er mai 1961, après la victoire de Playa Giron, le légendaire chef de la révolution cubaine Fidel Castro a dit que le type de patrie dont parlent les impérialistes est celui des parasites qui vivent du travail de la majorité, de ceux qui exploitent le plus grand nombre. La nouvelle patrie cubaine, a-t-il dit, est une patrie où les Cubains ont gagné le droit de contrôler leur destinée et le droit de construire leur avenir qui sera nécessairement meilleur que dans le passé.

Parlant du gouvernement américain qui avait organisé le débarquement de la baie des Cochons, Fidel Castro a terminé son discours du 1er mai, il y a 58 ans, par le défi qui a caractérisé Cuba jusqu'à ce jour. « Si M. Kennedy n'aime pas le socialisme, eh bien, nous n'aimons pas l'impérialisme ! », a dit Fidel, déclarant l'engagement qui guide Cuba à ce jour.

À cette occasion, à la veille du 1er mai, lorsque la classe ouvrière et le peuple cubains exprimeront leur détermination à défendre leur patrie pour laquelle ils se battent, pour qu'elle soit véritablement du peuple, par le peuple et pour le peuple, le Parti communiste du Canada (marxiste-léniniste) adresse ses salutations révolutionnaires aux travailleurs et au peuple cubains et à leurs dirigeants. Quelles que soient les opinions politiques véhiculées sur la Révolution cubaine, le droit d'un peuple de déterminer sa propre destinée et le fait que ce droit continue d'être exercé par une petite île face à la nation la plus puissante de la terre commande le respect et l'admiration. Contre toutes les difficultés, Cuba a maintenu son indépendance et son mode de vie, montrant au monde entier que cela peut être fait parce que cela doit être fait. C'est une question de principe si l'on veut que le peuple soit vraiment libre avec une démocratie de son choix. Cela doit être fait si l'on veut préserver la paix dans les Amériques et si l'on veut mettre fin à la misère, à l'analphabétisme et aux maladies. Cuba a montré au monde que c'est possible. Elle a montré au monde, et continue de montrer au monde entier, la véritable signification de l'internationalisme et de l'aide humanitaire, qui sont conçus pour répondre aux besoins du peuple, et non pour servir les intérêts de l'impérialisme. C'est la voie qui va transformer le monde d'une manière qui favorise les peuples, et non une infime minorité.


La milice cubaine salue la victoire de la baie des Cochons le 19 avril 1961.

Note

1. Le 19 octobre 1960, le département d'État de Dwight D. Eisenhower a imposé le premier blocus commercial à Cuba dans le but d'écraser les forces rebelles qui avaient renversé la dictature de Batista à Cuba. Le président John F. Kennedy a étendu le blocus aux exportations américaines vers Cuba et a imposé un blocus total le 7 février 1962.

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Une proclamation pour tous les temps


Fidel s'adresse aux miliciens à La Havane à la veille de l'invasion de la baie des Cochons. Dans ce discours il proclame le caractère socialiste de la Révolution cubaine, le 16 avril 1961.

Les blessures des récents bombardements n'étaient pas refermées que planait la menace (et plus tard la certitude) d'une autre attaque, le commandant en chef Fidel Castro Ruz a proclamé, il y a 58 ans, le caractère socialiste de la Révolution.

Cet acte de principes déterminant a été suivi par la défaite du débarquement de la baie des Cochons, ou, ce qui revient au même, une victoire socialiste qui a réaffirmé le cours irréversible de notre pays. Depuis ce temps, Cuba a continué d'écrire cette histoire, sans interruption, certes, mais non sans reculs et non sans erreurs, consciente que cette proclamation n'était pas qu'une feuille de route, mais bel et bien un défi quotidien pour la défense de la cohérence.

Et cette cohérence devait donner un nouveau texte constitutionnel, lequel a été promulgué il y a quelques jours à peine, et dont le regard est tourné vers l'avenir et qui consacre même l'irrévocabilité du socialisme « en tant qu'alternative viable », comme l'a fait valoir le général de l'armée et premier secrétaire du Comité central du Parti, Raul Castro Cruz, dans son discours du 10 avril.

Si la définition (de la Révolution) en tant que socialiste, il y a 59 ans, semblait une entreprise chimérique, aujourd'hui le contexte international n'est pas moins complexe puisque, comme l'a souligné le général de l'armée dans sa mise en garde, « l'actuel gouvernement des États-Unis et son ambition hégémonique envers la région représentent la menace la plus urgente des cinq dernières années contre la paix, la sécurité et le bien-être de l'Amérique latine et des Caraïbes ».

Néanmoins, et je reviens à ses paroles, nous défendons le socialisme « parce que nous croyons à la justice sociale, à un développement équilibré et viable, et à une distribution équitable de la richesse et des garantis pour les services de qualité pour toute la population. Nous pratiquons la solidarité et nous rejetons l'égocentrisme. Nous partageons non seulement ce que nous avons de trop, mais même ce dont nous manquons.

« Nous répudions toute forme de discrimination sociale et luttons contre le crime organisé, le narcotrafic, le trafic d'êtres humains et toutes formes d'esclavage... Nous avons foi en la démocratie populaire... nous cherchons à promouvoir la prospérité du pays, et parce que nous croyons qu'un monde meilleur est possible. »

Cette conviction, qui est essentiellement un résumé concis de notre projet social, a été réitérée le mardi 16 avril, lorsque nous avons commémoré à nouveau l'anniversaire de la Proclamation du commandant en chef dans le centre-ville, à l'intersection des 23e et 12e rues, à Vedado, dans notre capitale, le 16 avril 1961.

À cette cérémonie ont participé les membres du comité central — Luis Antonio Torres Iribar, premier secrétaire du Parti à La Havane, et Reynaldo Garcia Zapata, président de l'Assemblée provinciale du Pouvoir populaire dans la capitale. Étaient également présents le colonel de réserve Victor Dreke, président de l'Association des combattants de la Révolution cubaine à La Havane, et des représentants du Parti, du gouvernement et des organisations de masse.

(Granma, 16 avril 2019. Traduit de l'espagnol par LML)

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71e anniversaire du soulèvement de l'île de Jeju en Corée

Le massacre de Jeju rappelle la longue histoire d'agression américaine contre la Corée

Des activistes protestent à la base navale américaine sur l'Île Jeju, en Corée du sud,
le 20 juin 2017, contre l'arrivée de navires de guerre des États-Unis, du Canada et de Corée du sud pour des exercices militaires.

Le 3 avril 1948, sur l’île de Jeju, le gouvernement militaire américain en Corée a été à l’origine du massacre de Jeju. Cela a commencé plus de deux ans avant que les États-Unis déclenchent la guerre de Corée sous le couvert du drapeau des Nations unies. Ce n’est qu’en 2008, soixante ans plus tard, que la véritable ampleur des crimes commis à Jeju a commencé à se faire jour, lorsque des fosses communes ont été découvertes à l’aéroport de Jeju. Les événements ne sont toujours pas bien connus. Aujourd'hui, les insulaires de Jeju perpétuent la tradition du défi militaire en rejetant la base navale américaine en eau profonde construite sur l'île.

Avec les troisièmes sommets intercoréens et les sommets entre la RPDC et les États-Unis, il est important d'examiner les événements qui se déroulent dans leur véritable contexte historiquel, et non dans la perspective de la guerre froide imposée par les États-Unis pour justifier la division de la Corée et tous les crimes qui y sont associés. Ce faisant, il est possible de tirer les conclusions qui s'imposent quant aux raisons pour lesquelles la Corée était divisée, aux sources de tension sur la péninsule coréenne et à la nécessité de réunir la Corée et de défendre la cause de la paix internationale.

LML publie ci-dessous un extrait d'un article écrit par un ancien combattant et activiste pour la paix américain, S. Brian Wilson, sous le titre : « L'assaut des États-Unis et de la Corée du sud contre une île idyllique : pas la première fois », publié sur son blogue le 21 juin 2012.

L'assaut des États-Unis et de la Corée du sud contre une île idyllique : pas la première fois (extraits)
- S. Brian Wilson -

[...] Un des chapitres les plus sombres et finalement inconnus de l'intervention des États-Unis a eu lieu dans les régions sud de la Corée avant la Guerre de Corée. En 1945, dans une étude conjointe de renseignement de l'armée et de la marine américaines, il était dit que la vaste majorité des Coréens nourrissaient un profond désir d'indépendance et d'autodétermination, et qu'ils s'opposaient catégoriquement à tout contrôle par des successeurs des Japonais honnis qui les avaient gouvernés depuis 1910. Une autre étude américaine a aussi fait valoir que 80 % des Coréens désiraient un système socialiste plutôt que capitaliste.

Malgré les conclusions de ces documents internes, le président des États-Unis, Harry Truman, suite à la capitulation des Japonais en août 1945, a imposé une partition qui ne devait être que temporaire au 38e parallèle de la Corée, divisant ainsi une culture homogène vieille de 5 000 ans. Il a ensuite commandé au général américain Douglas MacArthur de « gouverner » le peuple vivant au sud du 38e parallèle. En octobre 1945, en quête d'un Coréen digne de confiance qui « partagerait le point de vue américain » pour qu'il soit l'homme fort des États-Unis, MacArthur a transporté des États-Unis à Séoul, à même son aéronef personnel, Syngman Rhee, un homme de 71 ans d'origine coréenne. Rhee, un méthodiste qui avait vécu aux États-Unis pendant 40 ans, devait être le gouverneur intermédiaire de la Corée, elle-même bouddhiste et confucianiste.


À gauche: Un acte illégitime n'attend pas l'autre après que les États-Unis eurent divisé la Corée, le général américain Douglas MacArthur (à gauche) impose dans la partie sud de la Corée Syngman Rhee en tant que « président ».  À son tour Rhee tient en mai 1948 des élections frauduleuses pour codifier la division.

De façon unilatérale, Rhee a décidé d'organiser des élections séparées en 1948 dans le but de créer le fondement « juridique » d'une Corée divisée de façon artificielle, en dépit d'une vaste opposition populaire partout dans la péninsule, au nord autant qu'au sud du 38e parallèle, y compris les résidents de l'île de Cheju (nommé maintenant Jeju et dont l'appellation sera dorénavant utilisée). Ce qu'on appelle le soulèvement du 3 avril 1948 à Jeju comme riposte à ces élections a en fait duré jusqu'en 1950. Il s'agit d'un des plus grands massacres de l'histoire moderne de la Corée. Le soulèvement de Jeju en 1948 n'est rien de moins qu'un microcosme de la Guerre de Corée à venir.

Selon une évaluation du renseignement national de la CIA, Rhee était si peu populaire qu'il était peu probable que la nouvelle République de Corée (RDC) puisse survivre sans « l'infusion massive d'aide des États-Unis ».

L'ambassade américaine a décrit la répression de l'opposition de Jeju à Rhee de campagne de « terre brûlée » et d'« extermination ». En vertu de protocoles secrets, les forces constabulaires et policières de la RDC ainsi que les unités paramilitaires étaient soumises au contrôle du Gouvernement militaire de l'armée américaine en Corée (USAMGIK).


Détention en masse en 1948 de personnes soupçonnés d'être communistes sur l'île de Jeju afin d'écraser le refus du peuple de se soumettre au diktat étranger

Aussi, selon des documents de la CIA, la politique sous l'égide du USAMGIK et le régime Rhee était dominée par une petite élite de riches Coréens qui répondait à la dissidence de la vaste majorité par la répression et avait recours à des politiques « d'une brutalité impitoyable » semblables à celles qui avaient servi à la structure japonaise précédente tellement haïe par la plupart des Coréens.


Représentation du début du massacre du 3 avril 1948 par l'artiste Kang Yo Bae sur la base de déclarations de témoignages - cliquer pour agrandir

Le gouverneur militaire américain de la Corée, John Reed Hodge, a informé les représentants du Congrès américain que « Jeju était une véritable région communale qui est contrôlée de façon pacifique par le Comité du peuple ». Malgré tout, il a commandé à trois officiers militaires américains (entre autres) — le colonel Harley E. Fuller, le capitaine John P. Reed, et le capitaine James Hausman — de conseiller et de coordonner la campagne d' « extermination » et de « terre brûlée ». Ces Coréens qui avaient collaboré avec les occupants japonais honnis s'étaient maintenant mis au service des forces constabulaires et policières coréennes entraînées par les Américains. Des unités paramilitaires de droite devinrent un élément sanguinaire de l'appareil de sécurité de Rhee. Des conseillers américains accompagnaient toutes les forces constabulaires et policières coréennes (ainsi que d'autres unités de la RDC après 1948) dans leurs campagnes au sol. Des pilotes américains pilotaient des C-47 pour le transport de troupes, d'armes et d'équipement de guerre, tout en dirigeant à l'occasion des frappes. Des officiers de renseignement américains fournissaient des renseignements sur une base quotidienne. De surcroît, des bâtiments de guerre de la marine américaine comme le USS Craig ont bloqué et procédé au bombardement de l'île, pour entraver l'arrivée des forces d'opposition additionnelles et des approvisionnements dans l'île, tout en empêchant les insulaires en proie au désespoir de fuir par bateau.

Le successeur de Hodge, le général William Roberts, avait déclaré qu'il était « de la plus haute importance » que les dissidents « soient détruits le plus tôt possible ». L'organisation de répression japonaise, la « ligue nationale d'orientation » (Bo Do Yun Maeng), a été consolidée par le régime Rhee. Elle avait servi à identifier de façon systématique tout Coréen qui s'était opposé à l'occupation du régime japonais et maintenant elle servait à identifier tous ceux qui s'opposaient de facto au règne sanguinaire des États-Unis et de Rhee. Des milliers de personnes ont été tuées, emprisonnées et torturées, et plusieurs d'entre elles ont été jetées à la mer. 


Quelques uns des légions d'enfants devenus orphelins suite au massacre de Jeju, qu'on voit ici en train de fuir vers un lieu sûr

Le gouverneur de Jeju à l'époque avait reconnu que la répression des 300 000 résidents de l'île avait eu comme conséquence que près de 60 000 insulaires avaient été tués tandis que 40 000 d'entre eux s'étaient enfuis par bateau au Japon. C'est ainsi qu'un tiers de ses résidents ont été soit tués ou se sont enfuis pendant la campagne d'« extermination ». Près de 40 000 maisons ont été détruites et 270 des 400 villages ont été rasés. Un des acolytes de Roberts, le colonel Rothwell Brown, soutenait que les insulaires n'étaient que « des fermiers et pêcheurs ignorants, sans éducation », un piètre prétexte pour justifier la répression de ceux qui, selon Brown, avaient refusé de reconnaître la « supériorité » de l'« American Way ».

Le secrétaire d'État américain, Dean Acheson, et le responsable de la Planification politique du département d'État, George Kennan, ont avoué en 1949 que la suppression de la menace interne en Corée du sud (c'est-à-dire l'attachement passionné des Coréens à l'autodétermination), en collaboration avec la CIA nouvellement créée, avait été déterminante à la préservation du pouvoir de Rhee et au succès assuré de la politique mondiale d'endiguement des États-Unis. La révolution chinoise de 1949 était un autre élément qui rendait nécessaire la répression des Coréens et de leur grand attachement à l'autodétermination indispensable au succès de la Guerre froide émergente. Ces efforts étaient accompagnés d'efforts semblables des États-Unis en Europe où les opérations clandestines de la CIA avaient réussi à écraser les mouvements socialistes au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale.


La résistance des insulaires de Jeju a inspiré des soulèvements similaires sur la péninsule, qui ont été réprimés de manière aussi brutale par les forces appuyées par les États-Unis, au nom de contenir le communisme. Ici sont représentés des scènes de répression à Jeju en 1948.

L'étude de 1949-1950 du Conseil de sécurité nationale, le NSC-68, a élaboré les visées des États-Unis d'un système politique mondial « favorable à un environnement mondial où peut survivre et s'épanouir le système américain ».

La Guerre de Corée qui a duré de juin 1950 à juillet 1953 était une expression à une autre échelle de la lutte de 1948-1950 des insulaires de Jeju pour préserver leur autodétermination du règne tyrannique de Rhee appuyé par les États-Unis et de son groupe restreint de riches concitoyens. Fait peu connu, la division de la Corée de 1945 imposée par les États-Unis contre la volonté de la vaste majorité des Coréens a été la cause première de la Guerre de Corée qui a éclaté cinq ans plus tard. La guerre a détruit par bombardement la plupart des villes et villages au nord du 38e parallèle et plusieurs villes et villages au sud, et par conséquent quatre millions de Coréens ont été tués - trois millions (un tiers) de résidents vivant au nord et un million vivant au sud, en plus du meurtre d'un million de Chinois. Il s'agit d'un crime international de proportions effarantes qui est toujours non reconnu même s'il a fait cinq millions de victimes et séparé de façon permanente dix millions de familles coréennes.


Récupération de restes humains découverts dans une fosse commune près de l'aéroport
de l'île de Jeju, en 2008

Suite à la Guerre de Corée, Dean Acheson en est arrivé à la conclusion que « la Corée nous a sauvés », puisqu'elle avait permis aux États-Unis de mettre en oeuvre la stratégie impérialiste apocalyptique décrite dans le NSC-68. En Corée, la réalité est que les États-Unis ont imposé un gouvernement dictatorial après l'autre pendant 50 ans, longtemps après le départ forcé de Rhee en 1960, à l'âge de 85 ans. Depuis 1953, les États-Unis et la Corée du sud vivent en vertu d'un Traité de défense mutuelle, une entente sur le statut des forces et un commandement de forces combinées dirigé par un général américain à quatre étoiles. En réalité, en dépit des prétentions contraires, la Corée n'a jamais assumé sa souveraineté depuis la division imposée de la péninsule par les États-Unis en 1945. Les États-Unis ont eu jusqu'à 100 bases militaires et près de 50 000 soldats sur le territoire coréen, et encore aujourd'hui, ils ont une douzaine de bases et 28 000 soldats stationnés en Corée. Pendant des décennies, les États-Unis ont entretenu leur principal champ de bombardement asiatique dans le sud de Séoul. [...]

(Traduit de l'anglais par LML. Photos: US National Archives, Yang Jo Hoon, D.H. Song, kayakeurs contre la guerre)

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76e anniversaire du soulèvement héroïque du ghetto de Varsovie

Défi et résistance organisée contre le nazisme aux heures les plus sombres

Le soulèvement du ghetto de Varsovie (peintre inconnu)

Pendant la Deuxième Guerre mondiale, la résistance contre les nazis a été organisée dans de nombreux ghettos de l'Europe orientale alors que le peuple armé d'armes de contrebande et d'armes faites à la main a combattu pour la liberté jusqu'à la mort. Entre 1941 et 1943, plus de 100 unités de résistance juives ont été formées par les mouvements de résistance clandestins. Le soulèvement armé du ghetto de Varsovie est l'exemple le plus connu de la résistance armée des juifs contre les nazis. Ce soulèvement a eu lieu du 19 avril au 16 mai 1943, lorsque les habitants du ghetto juif de Varsovie, en Pologne occupée par les nazis, se sont soulevés contre les déportations vers les camps d'extermination.


Le monument commémoratif consacré après la guerre, érigé sur les ruines du bunker du 18 rue de Mila dans le ghetto de Varsovie

Les nazis ont créé des ghettos dans les villes de l'Europe orientale qu'ils occupaient. Le ghetto de Varsovie était le plus grand de Pologne, établi peu après l'invasion des Allemands en septembre 1939. Plus de 400 000 juifs à Varsovie, la capitale de la Pologne, étaient confinés dans une zone de 2,5 kilomètres carrés. En novembre 1940, ce ghetto était entouré d'un mur de plus de trois mètres de haut, surmonté de barbelés, et étroitement surveillé pour empêcher les mouvements entre le ghetto et le reste de Varsovie. Les nazis contrôlaient le ravitaillement et la quantité de nourriture qui entraient dans le ghetto et les maladies et la famine tuaient des milliers de gens chaque mois.

Pendant l'occupation nazie de la Pologne, plus de 250 000 juifs du ghetto de Varsovie ont été déportés ou tués.

En juillet 1942, Heinrich Himmler, chef du corps paramilitaire nazi Schutzstaffel (la SS), ordonna que les juifs soient « réinstallés » et déportés vers les camps d'extermination. On a dit aux juifs qu'ils étaient transférés dans des camps de travail ; cependant, on a su rapidement dans le ghetto que la déportation vers les camps signifiait la mort. Deux mois plus tard, 265 000 juifs avaient été déportés du ghetto de Varsovie au camp d'extermination de Treblinka et plus de 20 000 autres avaient été envoyés dans des camps de travail forcé ou massacrés dans le ghetto pendant les opérations de déportation.

Il restait environ 55 000 à 60 000 juifs dans le ghetto de Varsovie. Quand les informations de massacres au centre d'extermination de Treblinka parvinrent au ghetto, un groupe de survivants, pour la plupart des jeunes, a formé une organisation connue sous le nom polonais de Zydowska Organizacja Bojowa, l'Organisation juive de combat (OJC). L'OJC a émis une proclamation appelant le peuple juif à résister à être conduit de force au point de transfert et embarqué dans les wagons de marchandises. Le 18 janvier 1943, lorsque les nazis entrèrent dans le ghetto pour reprendre les déportations vers les camps, une unité de l'OJC, armée d'armes introduites clandestinement par la résistance polonaise antinazie, leur a tendu une embuscade. Après quelques jours, les troupes ont reculé et les nazis ont suspendu les déportations du ghetto de Varsovie pour les prochains mois. Cette petite victoire a inspiré les combattants du ghetto à se préparer à la résistance future. L'OJC a été élargie pour incorporer des membres d'organisations politiques clandestines. Les forces de la résistance polonaises ont fourni un entraînement, des armements et des explosifs. Mordechaj Anielewicz, âgé de 23 ans, a été nommé commandant. L'organisation de combat a été unifiée, des stratégies ont été planifiées, des bunkers souterrains, des tunnels et des passages sur les toits ont été construits. Les juifs du ghetto de Varsovie se sont préparés à se battre jusqu'à la mort.

Le 19 avril 1943, Himmler envoya des troupes SS sous le commandement du général SS Juergen Stroop pour continuer les déportations. Mais la population du ghetto ne se présenta pas aux déportations. Au lieu de cela, les organisations de combat du ghetto s'étaient barricadées à l'intérieur de bâtiments et de bunkers, prêts à résister aux Allemands. Sept cent cinquante combattants, en infériorité numérique et d'armement, ont combattu les nazis lourdement armés et bien entraînés. Après trois jours, les Allemands ont commencé à brûler le ghetto, bâtiment par bâtiment, pour forcer les juifs à sortir de leurs cachettes. La résistance s'est poursuivie alors que les Allemands, avec leurs auxiliaires, des chars et de l'artillerie lourde, réduisaient le ghetto en décombres, bloc par bloc, détruisaient les bunkers où de nombreux habitants étaient cachés. Ce n'est que le 16 mai que la révolte fut écrasée et que le ghetto tomba sous le contrôle des nazis. Ce jour-là, comme un ultime acte de vengeance, les Allemands ont détruit la Grande Synagogue de Varsovie.

La Grande Synagogue de la rue Tomackie à Varsovie, construite entre 1872 et 1878, fut détruite par les nazis le 16 mai 1943.

Dans son rapport après la destruction du ghetto, le général Stroop écrit que 56 065 juifs avaient été capturés ; de ce nombre, 7 000 ont été déportés au centre d'extermination de Treblinka, et les autres ont été envoyés dans des camps de travail forcé et au camp de Majdanek. On estime que les Allemands ont perdu plusieurs centaines d'hommes dans le soulèvement. Plusieurs des résistants ont réussi à s'échapper du ghetto et à rejoindre des groupes partisans dans les forêts autour de Varsovie.

Le soulèvement du ghetto de Varsovie a inspiré des soulèvements des camps d'extermination et des ghettos dans toute l'Europe orientale occupée par les nazis. Le 2 août 1943, 1 000 prisonniers juifs de Treblinka se sont emparés d'armes à l'armurerie du camp et se sont soulevés. Même si beaucoup ont été repris et exécutés, plusieurs centaines de détenus se sont évadés.


Portrait de groupe de membres du détachement de Kalinine (partie du groupe de 1200 partisans juifs de Touvia Bielski) en mission de garde à un aéroport dans la forêt de Naliboko en Pologne

Yitzhak Zuckerman, un des dirigeants du soulèvement du ghetto de Varsovie, a souligné plus tard son importance : « Je ne pense pas qu'il y ait un réel besoin d'analyser l'insurrection en termes militaires. C'était une guerre de moins de mille personnes contre une puissante armée et tout le monde savait comment cela allait se terminer. Ce n'est pas un sujet à étudier dans une école militaire, ni les opérations, ni la tactique. Ce serait un sujet majeur dans une école qui s'intéresserait à l'esprit humain. La véritable importance du mouvement était dans la force montrée par la jeunesse juive, après des années d'avilissement, qui l'a poussée à se soulever contre ses destructeurs, et à décider quelle mort elle choisirait : Treblinka ou le soulèvement. Je ne sais pas s'il existe une norme pour mesurer cela. »[1]

Note

1. Barbara Harshav, ed., trans., A Surplus of Memory : Chronicle of the Warsaw Ghetto Uprising, (Berkeley, Los Angeles, Oxford : University of California Press, 1993), p. xiii.

(Photos : Yad Vashem Archive, Jewish Partisan Educational Foundation)

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Zog Nit Keynmol, hymne yiddish
du mouvement des partisans juifs

Unité de partisans juifs près de Krasnik en Pologne vers 1943

Hirsh Glick, jeune poète et partisan du ghetto de Vilnius, a composé cette chanson en 1943, inspirée par les nouvelles du soulèvement du ghetto de Varsovie. La chanson est écrite sur la musique de la chanson soviétique « Ce ne sont pas des nuages, mais l'orage » des compositeurs soviétiques Dmitri et Danil Pokrass. Cette chanson est devenue l'hymne emblématique du mouvement de résistance.

Pour entendre la chanson interprétée en yiddish par Paul Robeson lors du Concert de 1949 à Moscou, cliquez ici.

Zog Ni Keynmol (Nous sommes là)

Ne dis jamais que tu vas de ton dernier pas,
Quand les jours bleus sont écrasés sous un ciel bas,
  L'heure viendra, que nous avons tant espérée,
Frappant le sol, nos pas diront : Nous sommes là !
L'heure viendra, que nous avons tant espérée,
Frappant le sol, nos pas diront : Nous sommes là !

Des palmiers verts jusqu'aux lointains pays neigeux,
Nous sommes là ! Le coeur en peine et douloureux,
Où notre sang, goutte après goutte, fut semé,
Notre courage et notre force vont germer.
Où notre sang, goutte après goutte, fut semé,
Notre courage et notre force vont germer.

Soleil futur tu embellis le jour présent,
Hier est l'ombre où disparaîtront nos tyrans,
Si le soleil se perd avant le jour levant,
Tel un appel d'âge en âge soit notre chant.
Si le soleil se perd avant le jour levant,
Tel un appel d'âge en âge soit notre chant

Il fut écrit, ce chant, par le sang, par le feu,
Ce n'est pas le chant d'un oiseau dans le ciel bleu,
Quand tout brûlait, parmi les murs qui s'écroulaient,
Fusil en main mon peuple a chanté ces couplets.
Quand tout brûlait, parmi les murs qui s'écroulaient,
Fusil en main mon peuple a chanté ces couplets. 

Ne dis jamais que tu vas de ton dernier pas,
Quand les jours bleus sont écrasés sous un ciel bas,
L'heure viendra que nous avons tant espérée,
Frappant le sol nos pas diront : Nous sommes là !
L'heure viendra que nous avons tant espérée,
Frappant le sol nos pas diront : Nous sommes là !

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