Numéro 56

8 novembre 2022

Les travailleurs obligent le gouvernement Ford
à annuler la Loi 28

Rejet de la notion d'«accords» sans consentement de Doug Ford

– Enver Villamizar –


Ce que les syndicats ont dit à la conférence
de presse du 7 novembre

« Nous ne cèderons pas! » – Rassemblement des travailleurs de l'éducation à Queen's Park

Au sujet des propositions pour combattre les pouvoirs
de la police avec plus de pouvoirs de police

Le « pouvoir de désaveu » est la plus récente
diversion pour détourner l'attention de la nécessité de remplacer l'ordre constitutionnel

– Pauline Easton –



Les travailleurs obligent le gouvernement Ford à annuler la Loi 28

Rejet de la notion d'«accords» sans
consentement de Doug Ford

– Enver Villamizar –

Le premier ministre de l'Ontario, Doug Ford, a tenu une conférence de presse le lundi 7 novembre où il a déclaré qu'il annulera la nouvelle Loi de 2022 visant à garder les élèves en classe adoptée par son gouvernement quatre jours auparavant, si le Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP), qui représente 55 000 travailleurs de l'éducation, renonce à son droit de grève.

C'est en fait la même demande que celle formulée par le ministre de l'Éducation Stephen Lecce lorsqu'il a déposé cette loi antiouvrière qui impose aux travailleurs de l'éducation une convention collective qui comprend une clause dérogatoire rendant illégale toute contestation juridique. Par l'adoption de la loi anti-travailleur, mal nommée Loi de 2022 sur le maintien des élèves en classe, le gouvernement déclarait à toutes fins pratiques qu'il ne négocierait plus les salaires et les conditions de travail avec les syndicats. Elle avait été précédée de la menace d'imposer des sanctions draconiennes si le SCFP n'acceptait pas de renoncer à son droit de négocier une convention collective et à son droit de grève.

Doug Ford a fait son ultimatum en réponse aux plans des syndicats de tenir des manifestations à l'échelle de la province et d'autres actions pour soutenir la lutte des travailleurs de l'éducation contre la législation. Le SCFP a tenu une conférence de presse quelques heures après Ford en présence des dirigeants de nombreux autres syndicats des secteurs public et privé. Laura Walton, présidente du Conseil des syndicats des conseils scolaires de l'Ontario (CSCSO), affilié au SCFP, a dit que son syndicat avait accepté de mettre fin à sa manifestation politique en réponse à un engagement du premier ministre, qu'il a obtenu par écrit, d'abroger la loi et de reprendre les négociations avec le syndicat pour une nouvelle convention collective. Le gouvernement n'a cependant pas changé de ton et, dans sa réponse, le SCFP a clairement indiqué que le gouvernement devait maintenant tenir ses promesses et que le syndicat ne renonçait pas au droit de grève.

Mme Walton a dit en conférence de presse qu'elle espérait que le gouvernement ferait preuve de la même bonne foi à la table de négociation que le syndicat, qui a mis fin à son débrayage. Elle a déclaré que les travailleurs de l'éducation du SCFP seront de retour au travail mardi, bien qu'il revienne à chaque conseil scolaire de décider de la date de réouverture des écoles fermées en raison de l'action de protestation. Elle a ajouté que le SCFP est toujours en position de grève légale et qu'il est prêt à faire la grève si les nouvelles négociations échouent.

Le ministre de l'Éducation Stephen Lecce a confirmé dans une déclaration à la presse que le gouvernement abrogera la Loi 28 « dans son intégralité ». Comme si le SCFP était à blâmer pour ne pas être à la table des négociations, l'arrogant ministre a déclaré :

« Le SCFP a accepté de retirer son action de grève et de revenir à la table des négociations. En retour, à la première occasion, nous révoquerons la Loi 28 dans son intégralité et serons à la table pour que les enfants puissent retourner en classe après deux années difficiles. »

L'Assemblée législative ne siégeant pas actuellement, il faudrait donc que les députés soient rappelés pour une session hâtive pour que la loi soit abrogée cette semaine.

Les actions de masse des travailleurs de l'éducation de l'Ontario, soutenues par des travailleurs de tous les horizons, ont clairement réprimandé Doug Ford et son gouvernement arrogant. Félicitations !

Les travailleurs ont gagné une autre bataille et c'est important parce que cela montre que notre avenir réside dans la défense des droits de toutes et tous. La situation permet de croire que d'autres affrontements sont à venir.

Doug Ford semble penser qu'il peut, par décret, annuler le droit des travailleurs de retirer leur force de travail, qui est le seul pouvoir qu'ils ont pour garantir que les négociations aient lieu de bonne foi. Son offre d'annuler la loi en échange de la fin de la grève montre qu'il pense que les droits sont des privilèges qui peuvent être accordés pour bonne conduite. Or, les droits appartiennent à leur titulaire du fait de leur existence. Ils n'entrent pas dans la catégorie des privilèges qui peuvent être donnés et retirés, niés et refusés, puis restitués selon ce qui convient aux intérêts privés étroits qu'il sert et où le vent souffle.

Les conventions collectives ne peuvent être imposées par décret lorsqu'il n'y a pas d'accord ou de consentement. C'est se moquer de la conception que les droits appartiennent à leur titulaire. De plus, si le « Non ! » d'une personne n'a aucun pouvoir, alors son « Oui ! » n'a aucun sens.

Même s'il doit s'en aller en rampant, la queue entre les jambes, Doug Ford espère que sa désinformation qui blâme les syndicats et les travailleurs de l'éducation pour ne pas avoir négocié et pour tout ce qui ne va pas en Ontario créera le désarroi dans les rangs des travailleurs, causera de la confusion et les amènera à se soumettre à son diktat.

Les travailleurs et leurs syndicats savent pourtant qu'ils ont le droit de participer aux négociations sans être menacés de recours à la force. Si leur « Non ! » ne signifie rien, en quoi y a-t-il accord ? Quel accord ? C'est une farce.

Les conditions objectives requièrent plus de financement pour l'éducation – plus d'enseignants, plus de travailleurs de l'éducation, plus de personnel. Les conditions de travail des enseignants et des travailleurs de l'éducation sont les conditions d'apprentissage des élèves. Les conditions dans les écoles – le stress, le manque de soins pour les élèves qui en ont besoin, le manque de conditions sanitaires parce que le personnel d'entretien ne peut pas maintenir les normes, peu importe les efforts des personnes obligées de se débrouiller seules pour maintenir les normes, ne sont pas des choses qui tiennent de l'imaginaire des travailleurs ou de leurs syndicats.

Les travailleurs de l'éducation et, en fait, les travailleurs de toute la province, disent Non ! à ce que fait le gouvernement Ford. Les travailleurs qui ne peuvent légalement dire Non ! et le faire respecter sont des travailleurs asservis. La classe ouvrière de l'Ontario ne l'acceptera pas. Que Doug Ford, sa suite et ses porte-parole dans les médias et les intérêts privés étroits qu'il sert se le tiennent pour dit.

Négociations Oui ! Dicter Non ! Non veut dire non !

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Ce que les syndicats ont dit à la conférence de presse du 7 novembre



Le 7 novembre, les représentants de nombreux syndicats ontariens et nationaux ont tenu une conférence de presse pour annoncer une intensification de l'opposition à la Loi de 2022 visant à garder les élèves en classe. Cependant, plus tôt dans la journée, le gouvernement s'est engagé par écrit à abroger la loi dans son intégralité et, en fait, à considérer qu'elle n'a jamais été adoptée et n'a jamais eu force de loi. Cet engagement à abroger la législation a été abordé par les intervenants.

Mark Hancock, président national du SCFP, ouvre la conférence de presse du 7 novembre 2022.

Mark Hancock, président national du Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP), a ouvert la conférence de presse en indiquant qu'il était accompagné de dirigeants du SCFP de tout le pays, notamment les présidents du SCFP de l'Ontario et du Conseil des syndicats des commissions scolaires de l'Ontario (CSCSO).

Se sont également joints à lui des dirigeants du Congrès du travail du Canada (CTC), de la Fédération du travail de l'Ontario, du Syndicat uni du transport (SUT), de la Fédération des enseignantes et enseignants de l'élémentaire de l'Ontario (FEEO), de l'Ontario English Catholic Teachers' Association, de la Fédération des enseignantes-enseignants des écoles secondaires de l'Ontario, de l'International Alliance of Theatrical Stage Employees, de l'Association des enseignantes et enseignants franco-ontariens, du syndicat des Métallos, des Travailleurs et travailleuses unis de l'alimentation et du commerce, Unifor, du Syndicat des métiers de la construction de l'Ontario, de la Fraternité internationale des ouvriers en électricité, de l'Association unie des plombiers et des tuyauteurs, de l'Association internationale des travailleurs du métal en feuille, du Syndicat national des employées et employés généraux et du secteur public, de UNITE HERE ! , de l'Alliance de la fonction publique du Canada, du Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes, du Syndicat des employés de la fonction publique de l'Ontario (SEFPO), de l'Association des infirmières et infirmiers de l'Ontario, de l'Union internationale des employés des services – soins de santé, du Syndicat canadien des employées et employés professionnels et de bureau, de la Société des professionnels unis et du Conseil du travail de Toronto et de la région de York.

Il s'agissait d'une force puissante représentant des millions de travailleurs des secteurs privé et public à travers le pays et Ford avait clairement reçu le message que les syndicats ne reculeraient pas.

Mark Hancock a déclaré qu'il s'agissait d'un rassemblement sans précédent en raison de l'attaque contre les droits des travailleurs. La Loi 28 était une menace directe pour les travailleurs de tout le pays et pour les droits garantis par la Charte à tous les Canadiens, ce qui, a-t-il dit, a uni le mouvement syndical comme jamais auparavant. La décision de Doug Ford d'abroger la loi a démontré le pouvoir de la solidarité des syndicats des secteurs privé et public. « Lorsque nos droits sont attaqués, nous nous défendons les uns les autres », a-t-il déclaré.

La présidente du CSCSO, Laura Walton, a ensuite remercié les travailleurs de l'éducation actuellement sur les lignes de piquetage. Elle a réaffirmé que son syndicat n'avait jamais quitté la table des négociations, ce sur quoi le gouvernement a maintes fois trompé le public. Elle a ensuite annoncé officiellement que Doug Ford avait été forcé de s'engager par écrit à ce que son gouvernement abroge la loi de manière à ce qu'elle soit considérée comme n'ayant jamais existé en Ontario.

Cette déclaration a été accueillie par des applaudissements retentissants. En guise de geste de bonne foi, a-t-elle ajouté, le syndicat va démanteler les lignes de piquetage à partir de mardi et est prêt à négocier immédiatement avec le gouvernement. Elle a précisé que le syndicat ne renonçait pas à son droit de grève à l'avenir si le gouvernement ne négociait pas de manière sérieuse pour répondre aux besoins des travailleurs.

Lorsqu'on lui a demandé quand le gouvernement abrogera la loi, un représentant du SCFP a indiqué qu'aucune date n'avait été fixée mais que Doug Ford avait parlé avec le NPD pour obtenir un accord pour rappeler l'assemblée législative.

Laura Walton a déclaré que les protestations ont commencé parce que le gouvernement Ford ne voulait pas payer un salaire décent aux travailleurs les moins bien payés, parce que « nous connaissons la réalité dans nos écoles. Elles sont tout sauf normales et stables en raison du sous-financement constant et du manque d'investissement dans les services directs dont les élèves ont besoin pour être en sécurité et réussir. » Les travailleurs de l'éducation ont été réduits à la pauvreté par la loi et ont utilisé leur pouvoir pour se défendre, a-t-elle dit. Ce sont les actions des travailleurs qui ont forcé le gouvernement à faire marche arrière. Avec cette lutte, a-t-elle dit, les gens reconnaissent qu'ils ont une voix et qu'ils ne doivent pas accepter d'être réduits au silence.

La présidente du CTC, Bea Bruske, a déclaré que Doug Ford a pris une décision dangereuse avec la Loi 28 et que les travailleurs ne permettront en aucun cas à un premier ministre d'enlever les droits des travailleurs. Elle a ajouté que Ford a pris cette décision en sachant à quel point l'économie est en mauvaise posture et que les parents et les étudiants seraient dans une situation difficile.

Elle a souligné le fait que la réponse des travailleurs de l'Ontario a été égalée par les travailleurs de tout le pays qui ont dit « Non, il n'en est pas question ! ». Les syndicats du Canada sont prêts à se mobiliser une fois de plus et à faire ce qu'il faut pour que cela se fasse, a-t-elle ajouté.

La présidente de la FEEO, Karen Brown, a déclaré : « Qu'il n'y ait aucun doute, nous ne resterons pas les bras croisés et ne laisserons pas ce gouvernement nous priver de nos droits protégés par la Constitution parce qu'il veut éviter les inconvénients des négociations. » Cette loi est une attaque sans précédent, a-t-elle dit, ajoutant que « nos membres et la population de l'Ontario tiendront Doug Ford responsable de sa promesse d'abroger la Loi 28 ».

La présidente d'Unifor, Lana Payne, a félicité les travailleurs de l'éducation pour leur coeur, leur courage et leur résolution et a remercié Laura Walton pour son leadership résolu et déterminé. « La table de négociation est le seul endroit où cela sera réglé, a-t-elle déclaré. La Loi 28 représente une attaque scandaleuse et sans précédent contre les droits des travailleurs et les libertés syndicales et, en tant que mouvement syndical, nous étions prêts à réagir avec une réponse sans précédent, car si les droits fondamentaux peuvent être retirés aux travailleurs du secteur public sans recours, les droits de personne ne sont pas à l'abri. » Elle a souligné que cette mesure pourrait être utilisée de nouveau en Ontario et dans d'autres provinces, où d'autres premiers ministres conservateurs surveillent de près la situation, et elle a conclu que « les travailleurs ont clairement indiqué qu'ils ne toléreront pas que la clause dérogatoire soit utilisée comme arme pour nous priver de nos droits en vertu de la Charte. Ni aujourd'hui, ni demain, ni jamais ». Elle a également informé que la veille, le conseil exécutif national d'Unifor a décidé de prendre toutes les mesures nécessaires pour faire échec à la Loi 28. Maintenant, Unifor sera avec les travailleurs de l'éducation à chaque étape, a-t-elle dit.

La présidente du SEFPO, JP Hornick, a déclaré que l'abrogation de la loi était une bonne chose, mais que les 180 000 membres du SEFPO ne baissent pas leur garde, ils se tiennent prêts. « Nous veillerons à ce que cette promesse soit tenue. Les membres d'OPSEU/SEFPO sont dans cette lutte avec les travailleurs de l'éducation du SCFP, avec tous les travailleurs, jusqu'à ce qu'un accord équitable soit conclu pour les travailleurs de l'éducation du SCFP, pour nos propres travailleurs de l'éducation, pour les enseignants et pour les travailleurs de toute la province, y compris nos camarades du SUT. » Elle faisait référence aux travailleurs de GO Transit qui ont entamé une grève à Toronto le même jour.

L'importance de l'union des syndicats des secteurs privé et public tient au fait que la Loi 28 est une attaque contre les travailleurs et la démocratie et que tous les Ontariens devraient se joindre aux syndicats pour demander des comptes au gouvernement Ford, a-t-elle dit. Elle a ajouté que le gouvernement continuera à essayer de diviser les travailleurs pour mieux régner, comme lors de la conférence de presse de Doug Ford ce matin-là, au cours de laquelle le gouvernement a blâmé le syndicat pour son propre échec à négocier en suggérant que c'est le syndicat qui a quitté les négociations. « Mais nous sommes la majorité. Nous sommes là où réside le pouvoir dans la province. Quand vous vous en prenez à l'un d'entre nous, vous vous en prenez à nous tous. Les travailleurs, unis, fermeront la province chaque fois que nous en aurons besoin », a-t-elle déclaré.

Pendant la période de questions, certains membres des médias ont tenté d'imposer des divisions en demandant que les syndicats qui avaient soutenu Doug Ford pendant les élections provinciales interviennent sur ce sujet. Ni Hancock ni Walton n'ont permis que cette discussion ait lieu en disant que pendant les élections, les gens font des choses, mais ce qui est important, c'est que lorsque le SCFP a eu besoin d'eux, ils sont venus. Cela a donné un ton unificateur pour les batailles à venir.

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« Nous ne cèderons pas! » - Rassemblement des travailleurs de l'éducation à Queen's Park

Des milliers de travailleurs de l'éducation du Grand Toronto ont participé avec entrain à un rassemblement à Queen's Park le 4 novembre pour exiger que le gouvernement Ford abroge la Loi 28 et négocie une convention collective équitable. Le rassemblement a débuté à 8 heures et a pris fin à 14 heures par une marche autour du périmètre de l'Assemblée législative. Les travailleurs d'autres syndicats, dont les Métallos, UNIFOR, des sections locales du Syndicat uni du transport, tous les syndicats des enseignants de l'Ontario, l'Association des infirmières et infirmiers de l'Ontario, les syndicats de la construction et plusieurs autres ont participé à l'action, solidaires avec les travailleurs de l'éducation membres du Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP) — Conseil des syndicats des conseils scolaires de l'Ontario (CSCSO).

On a annoncé à ce rassemblement que plus de 100 actions en appui aux travailleurs de l'éducation avaient lieu au même moment partout dans la province.

Plusieurs dirigeants syndicaux se sont adressés au rassemblement.

Le président national du SCFP Mark Hancock et la secrétaire trésorière nationale Candace Rennick ont rapporté que les syndicats du SCFP partout au pays sont solidaires avec les travailleurs de l'éducation. Hancock a souligné que le SCFP ne se laissera pas intimider par les menaces d'amendes imposées aux membres et aux sections locales du syndicat parce qu'ils auront défié la Loi 28. Il a fermement dénoncé la loi comme étant une attaque contre tous les travailleurs et a dit que le SCFP fera tout pour la faire disparaître. La présidente du SCFP de la Colombie-Britannique Karen Ranalletta s'en rendue en avion à Toronto pour appuyer les travailleurs de l'éducation.

Bea Bruske, la présidente du Congrès du travail du Canada, a fait part de l'appui de la centrale syndicale aux travailleurs de l'éducation. Elle a informé le rassemblement qu'elle avait reçu un appel téléphonique du premier ministre Justin Trudeau exprimant sa préoccupation pour les travailleurs de l'Ontario et comment il regrettait que la clause dérogatoire ait été utilisée contre eux. Elle a dit au premier ministre de joindre l'acte à la parole et de faire quelque chose de concret s'il est si préoccupé.

Patty Coates, la présidente de la Fédération du travail de l'Ontario a fait part de son appui à la grève des travailleurs et a annoncé que la FTO appelait tout le monde à se joindre à un rassemblement au square Dundas au centre-ville de Toronto à midi le jour suivant.

Laura Walton, la présidente du CSCSO, a dénoncé la Loi 28, disant que c'était une attaque contre le droit des travailleurs de s'organiser et de négocier leurs salaires et leurs conditions de travail. Elle a dit que le recours à la clause dérogatoire était « une limite que nous ne pouvons pas laisser le gouvernement Ford franchir ». Elle a dit que l'absence du premier ministre au débat et au vote à l'Assemblée législative était aussi une preuve de lâcheté. Elle a appelé à l'abrogation de la Loi 28 et demandé au gouvernement Ford de retourner à la table de négociation.

Entre chaque intervention, on pouvait entendre retentir autour de Queen's Park le mot d'ordre « Nous ne cèderons pas ! » et d'autres slogans. Il y a aussi eu un appel à la démission du gouvernement Ford.

Le dernier orateur au programme était le président du SCFP de l'Ontario Fred Hahn qui a livré un discours galvanisant, ponctué de cris et d'applaudissements. Hahn a dit qu'il s'agissait d'un moment décisif pour le mouvement ouvrier en Ontario et au Canada et a appelé tous les syndicats à s'unir pour vaincre cette loi. Il a demandé aux syndicats présents au rassemblement ce qu'ils pouvaient faire de plus pour appuyer les travailleurs de l'éducation envers qui le gouvernement Ford a agi avec autant de mépris et qui luttent pour leur dignité et la dignité de tous les travailleurs.

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Au sujet des propositions pour combattre les pouvoirs
de la police avec plus de pouvoirs de police

Le « pouvoir de désaveu » est la plus
récente diversion pour détourner l'attention de la nécessité de remplacer l'ordre constitutionnel

– Pauline Easton –



Alors que la population de l'Ontario, rejointe par les travailleurs de tout le pays, descendait dans la rue pour dénoncer la Loi visant à garder les élèves en classe, adoptée en 2022 par le gouvernement Ford, qui invoque la disposition de dérogation, certains commentateurs bien connus et des personnes haut placées ont évoqué les pouvoirs de la Couronne et affirmé qu'ils pourraient être utilisés pour annuler la loi.

Les discussions sur l'intervention du gouvernement fédéral ont commencé lorsque le ministre de la Justice, David Lametti, a déclaré aux journalistes, le 2 novembre, que la disposition de dérogation « devait être le dernier mot d'une assemblée législative pour exercer sa souveraineté parlementaire. Si elle est utilisée dès le début, elle mine la démocratie canadienne, elle signifie que la Charte n'existe pas. »

Autrement dit, la disposition de dérogation ne devrait être utilisée par une assemblée législative que pour nier les droits que la Charte est censée consacrer une fois que les tribunaux ont déclaré que la loi contestée viole la Charte. C'est ce que le gouvernement Ford a fait lorsque la Cour de l'Ontario a invalidé son règlement sur les dépenses des « tiers » parce qu'il violait le droit à la liberté d'expression.

Lorsqu'on lui a demandé ce que les libéraux pourraient faire, David Lametti a répondu : « Il y a un certain nombre de choses [...] mais je ne vais pas discuter de mes options. »

Justin Trudeau a ensuite déclaré aux journalistes le 4 novembre que son gouvernement est un gouvernement qui « est là pour défendre les droits et les libertés des gens. Nous regardons toutes nos options. » Avec cette condescendance, il a fait comme si des milliers et des milliers de travailleurs de l'éducation et leurs sympathisants n'étaient pas rassemblés dans les rues de l'Ontario pour défier la loi antisociale et anti-travailleurs du gouvernement Ford. Justin Trudeau a déclaré : « Ce serait beaucoup mieux si, au lieu que le gouvernement fédéral doive intervenir et dire : 'Vous ne devriez vraiment pas faire ça, gouvernements provinciaux', ce soient les Canadiens qui disent : 'Attendez une minute. Vous suspendez mon droit à la négociation collective ? Vous suspendez les libertés et les droits fondamentaux qui nous sont accordés par la Charte ?'. »

Ceci de la part d'un pouvoir fédéral qui n'est que trop heureux d'adopter des lois anti-travailleurs quand il le juge nécessaire. Mais ce qui est important, c'est le pouvoir de police que David Lametti et Justin Trudeau évoquent tous deux : le pouvoir de la Couronne appelé « pouvoir de désaveu ». Le désaveu est la décision d'un représentant de la Couronne d'opposer son veto à un texte législatif d'un parlement ou d'une assemblée législative provinciale, et le texte cesse d'avoir force de loi.

Le chef du NPD, Jagmeet Singh, a demandé aux libéraux d'utiliser le pouvoir de désaveu, tout en demandant de soumettre un « renvoi » à la Cour suprême pour qu'elle se prononce sur la validité de l'utilisation de la disposition de dérogation par Ford.

L'analyste et commentateur politique Andrew Coyne a écrit dans le National Post du 2 novembre sur l'utilisation croissante de la disposition de dérogation par les gouvernements provinciaux en dehors de ce qu'il dit être son objectif :

« Si le marché conclu de 1982 est maintenant annulé, si nous sommes de retour à l'époque d'avant la Charte, si les droits des minorités et des individus sont de nouveau à la merci des gouvernements provinciaux, il incombe alors au gouvernement fédéral de reprendre son ancien rôle de garant, du moins jusqu'à ce que le tigre de la disposition de dérogation puisse être remis dans sa cage.

« Le fait que le pouvoir de désaveu n'ait pas été utilisé depuis un certain temps ne signifie pas, comme certains le prétendent, qu'il est devenu nul. Pour qu'une telle convention existe, le gouvernement fédéral lui-même aurait dû y renoncer officiellement. Aucun gouvernement fédéral ne l'a fait.

« Il ne fait aucun doute que sa revitalisation provoquerait un tollé, et elle devrait certainement être considérée comme un dernier recours. Mais l'alternative est de rester les bras croisés pendant que la Charte se dissout sous nos yeux. Le premier ministre, entre tous, ne voudra certainement pas présider au démantèlement de l'héritage dont son père est le plus fier.

« L'option nucléaire ? La clause dérogatoire était censée être l'option nucléaire. Seulement les bombes explosent avec une telle régularité que nous les remarquons à peine. Il est temps d'avoir un peu de dissuasion constitutionnelle. »


Le « désaveu »

La question fondamentale devant nous est de savoir si nous, Canadiens et Québécois, Autochtones, Métis et Inuits, allons nous baser sur la lutte du peuple de ce pays pour l'affirmation des droits de toutes et de tous et un régime et des institutions qui mettent cela au centre de nos préoccupations, ou si nous allons compter sur des institutions coloniales anachroniques, mises en place pour maintenir le pouvoir colonial et le régime colonial dont le but principal est de maintenir le peuple assujetti à un souverain dont le pouvoir décisionnel n'est pas entre nos mains.

L'examen du « pouvoir de désaveu » plaide en fait en faveur de la nécessité de convoquer une assemblée constituante et de rédiger une constitution moderne. Une telle constitution, écrite par le peuple lui-même, aura pour premier acte d'investir le peuple de la souveraineté, et non une personne fictive d'État avec des pouvoirs de police pour déclarer ce dont le peuple a besoin et ce dont il n'a pas besoin et décider des choses dans le dos de tout le monde, parfois même ceux des cercles restreints du pouvoir.

Le Centre d'études constitutionnelles explique :

« La 'réserve' et le 'désaveu' sont souvent confondus, car ils découlent tous deux des pratiques de l'empire colonial britannique, mais ce sont en réalité des termes distincts. Historiquement, la 'réserve' était la pratique selon laquelle un gouverneur colonial, plutôt que de donner ou de refuser son assentiment à un projet de loi, pouvait le renvoyer au gouvernement impérial pour la décision finale. Le 'désaveu', en revanche, était la pratique selon laquelle un projet de loi colonial pouvait toujours être déclaré nul et non avenu par le gouvernement impérial, même si le gouverneur colonial avait donné avait donné la sanction royale.

« Les articles 55, 56 et 57 de la Loi constitutionnelle de 1867 prévoyaient que les actes du Parlement du Canada étaient soumis à ces instruments de contrôle impérial. Quelques-unes de ces lois ont été réservées ou rejetés au cours des premières décennies qui ont suivi la Confédération, mais ces pouvoirs sont tombés en désuétude à mesure que le Canada évoluait vers l'indépendance, même s'ils n'ont jamais été formellement éliminés.

« L'article 90 de la Loi constitutionnelle de 1867, qui adaptait les mêmes pratiques au maintien du contrôle fédéral sur les provinces, s'est avéré beaucoup plus important. Les premiers lieutenants-gouverneurs réservaient fréquemment les projets de loi pour une décision finale du gouvernement fédéral. Bien que cette pratique ait été controversée et qu'elle soit rapidement devenue inutile avec l'amélioration des communications entre Ottawa et les capitales provinciales, un projet de loi de la Saskatchewan a été réservé contre toute attente jusqu'en 1961.

« Le désaveu, du point de vue fédéral, était un instrument de contrôle beaucoup plus fiable sur les provinces. Il a été largement utilisé par les gouvernements Macdonald, Mackenzie et Laurier, en particulier contre le Manitoba et la Colombie-Britannique, et sont ainsi devenus une source de mécontentement de l'Ouest envers le système fédéral. Après 1911, son utilisation a été rare, mais l'élection du gouvernement du Crédit social en Alberta en 1935 a entraîné une brève renaissance. La dernière loi à avoir été rejetée est une loi albertaine de 1943 qui interdisait la vente de terres aux 'étrangers ennemis' et aux huttérites.

« La Charte de Victoria de 1971 aurait éliminé la 'réserve et le désaveu' de la Constitution canadienne, mais les modifications importantes apportées à la Constitution en 1982 ont laissé ces deux pouvoirs intacts. L'un ou l'autre pourrait encore être utilisé pour empêcher la sécession illégale ou unilatérale d'une province, mais autrement leur utilisation future est extrêmement improbable. »


Le fond du problème

Ce qui est au coeur de la question de l'appel de certains pour que la Couronne utilise le pouvoir de « désaveu » pour annuler la Loi visant à garder les élèves en classe de 2022, c'est la nécessité de lutter pour les réclamations que chacun est en droit de faire à la société dans le contexte de la lutte pour une société qui affirme les droits de toutes et de tous. Essentiellement, ce qui se déroule sous nos yeux est une lutte au sein de la classe dirigeante pour contrôler ce qui a échappé à son contrôle à cause des événements en cours. Les arrangements perfectionnés au fil des ans sous la forme d'institutions démocratiques libérales ont été détruits à cause de la volonté de l'ordre économique néolibéral mondial et de la recherche de l'hégémonie des grandes puissances, avec les États-Unis qui émergent comme la soi-disant nation indispensable. Tout cela n'a pas permis de résoudre les contradictions entre les intérêts privés étroits qui ont formé des oligopoles et des coalitions et cartels et internationaux pour s'emparer des pouvoirs d'État des pays qu'ils contrôlent.

Faire appel maintenant au pouvoir exécutif fédéral de supplanter un pouvoir exécutif au niveau provincial est la formule pour une guerre civile dans les rangs des dirigeants. Nous voyons précisément cela se produire aux États-Unis où le pouvoir fédéral et les pouvoirs des États s'affrontent sur toutes les questions auxquelles fait face la politique et en même se disputent tous les deux pour contrôler le pouvoir exécutif fédéral.

Le pouvoir de désaveu utilise essentiellement un pouvoir supérieur de la Couronne pour annuler un autre pouvoir de la Couronne. C'est l'expression flagrante d'un pouvoir supérieur. Il ne sera pas bien accueilli par les peuples du Canada, du Québec ou des provinces, encore moins par les peuples autochtones, les Métis et les Inuits.

De tels pouvoirs vont-ils maintenant supplanter les droits ancestraux lorsque cela convient à des intérêts privés étroits et aux titulaires de charges fédérales, comme c'est le cas avec l'utilisation de la disposition de dérogation lorsque cela convient aux titulaires de charges en Ontario et au Québec ? C'est ce qui se passe déjà avec les gouvernements fédéral et provinciaux qui concluent des accords avec les conseils de bande sous leur contrôle ou avec des sociétés autochtones privées pour obtenir le consentement de voler des ressources sur les territoires autochtones. Des accords sont imposés à ceux qui n'ont jamais cédé leurs terres. L'utilisation des pouvoirs de la Couronne sera de plus en plus utilisée pour remplacer les droits issus de traités. Les pouvoirs de la Couronne seront-ils également utilisés pour forcer les Inuits à accepter de céder leur territoire à l'OTAN ?

Les peuples du Canada et du Québec, les peuples autochtones, les Métis et les Inuits subissent d'énormes pressions pour qu'ils se montrent pragmatiques, comme si c'était une vertu. Être pragmatique est rendu synonyme d'être pratique, réaliste, de résoudre des problèmes alors qu'en fait c'est être opportuniste et intéressé au nom d'idéaux élevés. Tout cela sert à désinformer la lutte pour ce qui appartient de droit aux peuples et aux travailleurs. Le peuple ne peut s'unir derrière une cause que si elle est juste et correspond à ses conditions et s'il peut fournir des arguments rationnels et persuasifs qui l'aident à parfaire sa marche en avant et à ouvrir une voie qui garantira son bien-être.

Le gouvernement fédéral veut utiliser le « pouvoir de désaveu » pour faire en sorte que le peuple compte sur l'État même qui mène l'offensive antisociale et l'attaque pour le sauver. La lutte contre la Loi visant à garder les élèves en classe de 2022 de l'Ontario est une lutte politique contre une loi de l'Assemblée législative qui a sorti les négociations sur les salaires et les conditions de travail des limites du droit du travail. Il appartient aux travailleurs eux-mêmes de s'unir dans l'action et de forcer le gouvernement à reconnaître leur droit de parole, de s'organiser et de négocier leurs salaires et leurs conditions de travail.

Il est également évident que l'idée de convoquer le « pouvoir de désaveu » revient à maintenir les arrangements constitutionnels existants qui sont en fait le problème. Ces arrangements ne peuvent plus maintenir le peuple assujetti à un pouvoir qui existe au-dessus de lui et qui le prive de la capacité d'exercer tout ce qui lui appartient de droit. Les arrangements de partage de pouvoir contenus dans les Constitutions canadiennes de 1867 et 1982 ne peuvent plus régler les luttes entre les pouvoirs fédéral et provinciaux et les peuples du Canada, du Québec, les peuples autochtones, les Métis et les Inuits, ou les luttes de factions au sein de la classe dirigeante qui s'est emparée des pouvoirs de l'État aux niveaux fédéral et provincial.

Les dispositions par lesquelles les gouvernements aux niveaux fédéral et provincial peuvent violer les droits d'une manière garantie par la Constitution n'ont jamais été acceptables pour le peuple qui a toujours lutté pour que les limitations de ses droits soient supprimées.

Aujourd'hui, sous prétexte de défendre la sécurité nationale et l'intérêt national contre les ennemis, comme le décrivent les cercles dirigeants et leurs médias, des gouvernements de pouvoirs de police prennent le pouvoir et les délibérations sur les questions de guerre et de paix sont interdites. Ces arrangements sont « l'ordre constitutionnel » appelé « la démocratie du roi » auquel les élus et les fonctionnaires nommés prêtent serment d'allégeance pour le maintenir et le défendre.

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