Numéro 18 - 7 avril 2023

Opposition massive des travailleurs d'Europe à l'offensive antisociale

L'affrontement sur la réforme des retraites en France va au coeur de la crise des institutions démocratiques libérales

Toulouse, France, 23 mars 2023

Les travailleurs allemands organisent des grèves de masse contre des conditions de vie et de travail intenables

Une vague de grèves pour souligner le jour du budget qui paie
les riches en Grande-Bretagne

Inde

Les fermiers poursuivent leurs assemblées de masse et
leurs activités d'organisation

– J. Singh –



Opposition massive des travailleurs d'Europe à l'offensive antisociale

L'affrontement sur la réforme des retraites en France va au coeur de la crise des institutions démocratiques libérales

Paris, 23 mars 2023

Depuis le 19 janvier, des manifestations de masse ont lieu en France contre la réforme antisociale des retraites du gouvernement du président Emmanuel Macron. Des centaines de manifestations ont eu lieu depuis le début de l'année et jusqu'à 3,5 millions de personnes ont manifesté dans toute le France le 23 mars. L'ampleur des manifestations a été qualifiée d'historique et parmi les plus grandes des 40 ou 50 dernières années en termes de nombre de manifestants.

Face à cette lutte large et soutenue des travailleurs, le gouvernement Macron a utilisé des pouvoirs spéciaux pour faire passer en force sa réforme des retraites, qui fera passer l'âge de la retraite de 62 à 64 ans. Le 16 mars, incapable de négocier suffisamment de voix pour garantir l'adoption du projet de loi par l'Assemblée nationale, Emmanuel Macron a eu recours à l'article 49.3 de la Constitution française, qui permet aux gouvernements de contourner le pouvoir de l'Assemblée nationale et d'imposer des lois sans vote. Ces pouvoirs ont été inscrits dans la Constitution sous la présidence de Charles de Gaulle, au nom de la garantie de la « stabilité politique ». Un tel recours à la constitution expose toutefois le gouvernement à deux votes de défiance, auxquels Emmanuel Macron a réussi à survivre, mettant ainsi en danger de non-réelection les députés contraints de voter avec lui, ce qui montre à quel point la situation se détériore.

« En recourant au 49.3, le gouvernement fait la démonstration qu'il n'a pas de majorité pour approuver le report de deux ans de l'âge légal de départ en retraite. Le compromis politique a échoué. Ce sont les travailleurs qu'il faut écouter quand on prétend agir sur leur travail », a déclaré sur Twitter Laurent Berger, secrétaire général de la Confédération française démocratique du travail (CFDT).

La situation actuelle en France révèle avant tout la crise dans laquelle sont enlisées les institutions démocratiques dites libérales. Ce n'est pas le peuple qui établit l'ordre du jour et décide des questions qui le concernent, mais une élite qui a usurpé le pouvoir décisionnel. Changer l'âge de la retraite ne résoudra pas les problèmes auxquels l'économie française est confrontée et prendre des mesures qui favorisent les riches et transforment les travailleurs français en choses jetables sur un livre comptable ne fera que les exacerber.


Slogan sur un mur de Paris

Au milieu de ces manifestations, le roi Charles III d'Angleterre a tenté d'effectuer son premier voyage à l'étranger en se rendant en France du 22 au 26 mars. Les travailleurs français ont réagi comme il se doit et ont montré leur refus de la régression et leur rejet des symboles de formes de gouvernance anachroniques auxquelles ils ont mis un terme décisif il y a plus de 200 ans. À Bordeaux, qui devait être la première étape du roi en France, une répétition prétendument symbolique de l'itinéraire d'Élisabeth II en France après son couronnement, des manifestations de masse ont stoppé net ce projet. Dans un geste qui fait vraiment se demander dans quel monde vit la classe dirigeante, l'accueil a été déplacé à Versailles mais les ouvriers n'ont rien voulu savoir. Ils ont menacé de couper les lignes de train et d'autobus pour Versailles, les employés des services publics ont coupé l'approvisionnement en gaz et en électricité à Versailles et le personnel du Mobilier national a refusé de poser les tapis rouges et les pavoisements. Les travailleurs français, à leur crédit et à leur honneur, ont réussi ainsi à annuler la visite ; un début approprié pour le règne malheureux de cette relique de l'histoire à la veille de son couronnement.

Manifestations dans toute la France le 23 mars


Paris
Nice

Niort
Saint Quentin
Bézier
(Photos : CGT)

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Les travailleurs allemands organisent des grèves de masse contre des conditions de vie et
de travail intenables


Grève du secteur public le 22 mars 2023

Tout au long du mois de mars, les travailleurs allemands se sont mobilisés pour réclamer les conditions de vie et de travail dont ils ont besoin pour assurer les services publics et la production dans leurs secteurs. On dit que l'inflation en Allemagne est de 10,4 %, mais lors des dernières négociations avec les employés du secteur public, le 23 février, le gouvernement n'a proposé qu'une augmentation de salaire de 5 %.

Dans le secteur public, qui compte 2,5 millions de fonctionnaires et employés municipaux, le syndicat Verdi demande une augmentation de 10,5 % ainsi qu'une augmentation mensuelle minimale de 500 euros pour les salaires les plus bas. Il demande également une augmentation de salaire de 200 euros par mois pour les stagiaires, les étudiants et les internes, ainsi que l'octroi d'un emploi permanent aux apprentis ayant achevé leur formation avec succès.

Le syndicat EVG, qui négocie pour quelque 180 000 travailleurs de la société ferroviaire nationale Deutsche Bahn, revendique une augmentation de salaire de 12 %, soit au moins 650 euros de plus par mois. Pour le personnel débutant, il demande au moins 325 euros de plus par mois sur une période de douze mois.

Le syndicat industriel IG Metall réclame une augmentation de salaire de 8 %, soit au moins 200 euros de plus par mois pour les travailleurs qu'il représente.

Le 3 mars, les travailleurs des transports publics locaux se sont mis en grève, en coordination avec les jeunes militants pour les vendredis climatiques pour l'avenir.

Le 8 mars, la Journée internationale des femmes, les travailleurs des crèches, des jardins d'enfants et des services sociaux ont cessé le travail dans tout le pays. Les travailleurs municipaux qui assurent la collecte des ordures, les travailleurs forestiers, les agents de sécurité dans les aéroports et les travailleurs culturels se sont tous mis en grève en mars.


Grève des travailleurs des services de garde d'enfants le 8 mars 2023

Le 9 mars, les travailleurs de l'industrie regroupés au sein du syndicat IGBCE ont organisé une journée d'action pour réclamer une amélioration de la sécurité sur le lieu de travail et une baisse des tarifs d'électricité dans l'industrie.


Journée d'action pour la sécurité au travail et la réduction du tarif de l'électricité pour l'industrie,
9 mars 2023
Grève des travailleurs du secteur public, 9 mars 2023

Les 160 000 postiers qui avaient voté à 86 % en faveur d'une grève illimitée au début du mois de mars, en appui à une augmentation de salaire de 15 % pour lutter contre l'inflation, ont conclu une nouvelle convention collective de deux ans avec la Deutsche Post le 11 mars, obtenant des augmentations de salaire de 11 à 20 %. Les postiers avaient organisé plusieurs débrayages en janvier et février pour faire valoir leurs revendications.

Le 27 mars, des dizaines de milliers de travailleurs du secteur des transports ont organisé une « grève d'avertissement » d'une journée, interrompant les transports ferroviaires et aériens. Près de 400 000 voyageurs aériens à travers l'Europe ont vu leurs vols annulés. Les transports locaux, y compris les métros, les traversiers et les autobus, n'ont pas fonctionné non plus. La dernière fois que des grèves conjointes ont été organisées dans les secteurs des transports locaux, nationaux et aériens, c'était il y a 30 ans.



Grève des travailleurs du rail
Grève des travailleurs des aéroports

Le gouvernement estime que les revendications des travailleurs sont « déraisonnables ». Cependant, les travailleurs allemands sont bien conscients de leur contribution à la société et à l'économie et s'en tiennent à leurs revendications. Ils sont également encouragés par les positions prises par leurs homologues en France, au Royaume-Uni et en Grèce.

Un rapport de la Deutsche Welle, comme beaucoup d'autres, attribue avec désinvolture la « flambée des prix des carburants, de l'énergie et des denrées alimentaires » à laquelle les travailleurs allemands sont confrontés « en partie [à] l'invasion de l'Ukraine par la Russie », comme si une telle situation était inévitable. Au lieu de cela, les cercles dirigeants de l'Allemagne continuent de s'associer à la guerre par procuration menée par les États-Unis/ l'OTAN en Ukraine, au détriment de tous les peuples d'Europe. S'exprimant devant le Bundestag le 2 mars, le chancelier allemand Olaf Scholz a déclaré qu'il était en pourparlers avec l'industrie de l'armement afin d'augmenter la production d'équipements militaires pour l'armée allemande et les autres armées européennes. Plus tard dans le mois, Eva Högl, commissaire chargée des forces armées allemandes, a dit que le renforcement de la puissance de l'armée était « trop lente » et que le fonds spécial de 100 milliards d'euros destiné à combler ses lacunes devrait être porté à 300 milliards d'euros.

Grève des agents de sécurité dans les aéroports, 10 mars 2023
Grève des travailleurs forestiers, 16 mars 2023

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Une vague de grèves pour souligner le jour du budget qui paie les riches en Grande-Bretagne

Au moins 40 000 grévistes défilent dans le centre de Londres pour se rendre à un rassemblement à Trafalgar Square, le 15 mars 2023.

Les actions de grève de masse dans toute la Grande-Bretagne, qui ont pris de l'ampleur en février, se sont poursuivies en mars, atteignant leur point culminant le jour du budget de printemps, le 15 mars. On estime qu'entre 400 000 et un demi-million de personnes issues de divers secteurs de l'économie socialisée ont fait grève ce jour-là seulement. Le budget s'est distingué par le fait qu'il n'a rien fait pour répondre aux demandes des travailleurs, de leurs syndicats et de tous ceux qui dépendent des services fournis par les travailleurs. Les grèves de masse devraient se poursuivre en avril.

Grève des enseignants

Rassemblement devant la cathédrale métropolitaine de Liverpool avec des jeunes médecins, des enseignants et des fonctionnaires, le 15 mars 2023.

Plus de 100 000 enseignants ont fait grève les 15 et 16 mars, poursuivant ainsi leur plus importante période de grève depuis 30 ans, qui a affecté la grande majorité des écoles du pays. Le syndicat de l'éducation nationale (NEU) réclame une augmentation de salaire entièrement financée en raison de la hausse de l'inflation et des réductions de salaire en termes réels depuis dix ans. Depuis 2010, les salaires ont chuté de 23 % en termes réels. Le NEU informe que d'autres problèmes causent « à chaque jour des perturbations et des dommages à long terme à l'éducation », notamment l'augmentation du nombre d'élèves par classe, le soutien aux élèves ayant des besoins particuliers, le recrutement et la rétention du personnel, le délabrement des installations et la charge de travail excessive. Workers' Weekly explique : « La lutte pour un système d'éducation moderne et adéquatement financé dure depuis de nombreuses années et les enseignants s'interrogent sur l'avenir de l'éducation qui est sous-financée et minée de manière insoutenable. Leurs actions ont montré à tous que l'avenir même de l'éducation est en jeu. Il faut trouver des moyens de leur permettre de discuter et de trouver eux-mêmes des solutions ».

Le NEU souligne que le gouvernement anglais est déstabilisé par le soutien des enseignants à la grève, l'afflux de nouveaux membres dans le syndicat et le degré de soutien des parents, et qu'il a pris la mesure « très nouvelle et inhabituelle » d'exiger l'annulation des grèves avant de faire une première offre sur les salaires et le financement.

Workers' Weekly ajoute : « La crise s'est développée à un point tel que le blocage des discussions sur l'avenir de l'éducation doit être surmonté, avec les enseignants eux-mêmes au premier plan de cette discussion. Il convient donc de noter que les enseignants ont obtenu des avancées au pays de Galles et en Écosse, où de telles conditions préalables n'ont pas été déclarées, où des offres sérieuses ont été faites et où les actions de grève ont été reportées ou ont pris fin ».

Grève du personnel universitaire

Actions de grève et manifestations à l'échelle de York

Le personnel universitaire s'est mis en grève du 15 au 23 mars, mobilisant 70 000 personnes dans 150 universités britanniques, dont des professeurs, des bibliothécaires et d'autres membres du personnel. Bien que cette action ait complété les 18 jours d'action prévus en février et mars, le Syndicat des universités et collèges (UCU) cherche à obtenir un mandat de ses membres pour étendre les actions de grève jusqu'à la fin de l'année académique. La lutte a été marquée par le diktat des employeurs et leur refus de négocier, et les membres de l'UCU ont rejeté la dernière offre d'environ 5 %. Les actions de grève, qui touchent quelque 2,5 millions d'étudiants, ont été soutenues par l'Association nationale des étudiants.

Le personnel universitaire a subi ce qui équivaut à 10 ans de réductions salariales dues à l'inflation, une moyenne de deux jours de travail non rémunéré par semaine, tandis qu'un tiers du personnel académique est sous contrat temporaire. Le personnel universitaire veut des augmentations de salaire qui répondent à la crise de l'inflation, la fin des contrats précaires et la prise en compte des lourdes charges de travail. Ils veulent également que les réductions des pensions et des avantages sociaux soient abrogées. Les compressions imposées l'année dernière aux régimes de retraite feront perdre au membre moyen 35 % de son futur revenu de retraite garanti. Pour ceux qui sont en début de carrière, les pertes se chiffrent en centaines de milliers de livres.

Workers' Weekly souligne le rôle important joué par le personnel universitaire en écrivant : « Les travailleurs de l'enseignement supérieur apportent une valeur ajoutée considérable à l'économie et contribuent à la culture et à la société en produisant des diplômés de premier cycle et des diplômés des cycles supérieurs hautement qualifiés et en menant des recherches qui débouchent sur des avancées scientifiques et technologiques. L'éducation est un droit et doit servir la société. En luttant pour leurs droits et leurs revendications, les universitaires et les travailleurs de l'enseignement supérieur, ainsi que les enseignants, se battent pour les droits de tous. »

Grève des médecins résidents

Piquet de grève des médecins résidents  à Leeds

Du 13 au 15 mars, les médecins en formation d'Angleterre ont mené une grève de 72 heures pratiquement sans précédent. La grève a été décidée par un vote de 98 % en faveur d'une action et 77 % des médecins en formation y ont participé. Les médecins en formation représentent 45 % de la main-d'oeuvre médicale et vont des jeunes diplômés à ceux qui ont 10 ans d'expérience. Près de 50 000 médecins se sont mis en grève pour réclamer une augmentation de 35 % et un rétablissement des salaires après des réductions en termes réels de 26 % depuis 2008, ainsi que des mesures visant à remédier à la surcharge de travail et au problème de la rétention. Il n'y a pas eu de négociations salariales officielles et le gouvernement a clairement indiqué qu'il n'était pas disposé à satisfaire les revendications des médecins en formation.

Manifestation en faveur du service national de santé

Le 11 mars, des milliers de personnes ont manifesté dans les rues de Londres pour montrer leur soutien au Service national de santé (NHS) et aux travailleurs de la santé en grève contre les attaques dont leurs moyens de subsistance font l'objet. Workers' Weekly rapporte que « la manifestation a montré que le mouvement des travailleurs de la santé et du peuple dans son ensemble est plus fort que jamais pour renverser la vapeur face au gouvernement et à l'élite dirigeante. Il s'agit d'un mouvement des travailleurs de la santé et de la population dans leurs communautés pour prendre les décisions concernant la protection et le développement du système de santé public. Avec la poursuite des grèves des infirmières, des paramédics et maintenant des médecins en formation [...], la lutte pour le changement est désormais engagée. »

Grève des travailleurs des transports

Dans le secteur des transports, les conducteurs et le personnel du métro de Londres, membres de l'Associated Society of Locomotive Engineers and Firemen (ASLEF) et du National Union of Rail, Maritime and Transport Workers (RMT), se sont mis en grève le 15 mars pour protester contre les pertes d'emploi et les changements apportés aux régimes de retraite. Les 16 et 18 mars, des grèves ont été organisées par les membres du RMT dans 14 compagnies ferroviaires du pays. Les travailleurs du rail réclament des augmentations de salaire et contestent les plans dits de modernisation, qui prévoient des réductions des tâches de maintenance programmées, des fermetures de guichets de vente et des milliers de suppressions d'emplois.

Grève des fonctionnaires

Environ 133 000 fonctionnaires, membres du Syndicat des services publics et commerciaux, ont fait grève le 15 mars pour protester contre les bas salaires. L'action a touché 124 ministères et services gouvernementaux, dont le Cabinet Office, le ministère de l'Éducation, le ministère de l'Intérieur, le ministère des Transports, le ministère du Travail et des Pensions, les autoroutes nationales, l'agence britannique de sécurité sanitaire, le HMRC, le DVLA et les forces des postes frontaliers, perturbant sérieusement les arrivées dans les ports aériens et maritimes.

Grève des travailleurs des médias

Les 15 et 16 mars, les travailleurs des médias ont organisé une grève de 24 heures dans plusieurs studios et bureaux locaux de la BBC.

« La BBC doit reconnaître l'impact négatif de ses récentes décisions et s'engager pleinement avec le syndicat pour trouver une solution au conflit sur les compressions budgétaires dans les radios locales », a déclaré la National Union of Journalists (NUJ) dans un communiqué. L'action « concerne l'avenir de l'information locale de qualité dans les nombreuses et diverses communautés desservies par la BBC. Les projets de suppression d'émissions de radio et de réduction des ressources ont suscité la consternation et la colère des membres de la NUJ qui connaissent la véritable valeur des informations locales fiables ».

La NUJ a ajouté : « La stratégie Digital First ('le numérique avant tout') tant vantée par la BBC ne devrait pas être mise en oeuvre au détriment de l'information et du contenu qui sont véritablement locaux et accessibles. Au coeur de ces plans, il y a un problème de financement créé par la décision du gouvernement de geler la redevance, mais cela met aussi en évidence une question plus profonde sur le rôle et l'objectif de la BBC à l'ère du numérique. À une époque où le débat est polarisé, où la méfiance est cyniquement attisée dans des caisses de résonnance amplifiées par des algorithmes, un radio diffuseur de service public comme la BBC devrait être apprécié et protégé, et non pas vidé de sa substance ou laissé vulnérable aux caprices de n'importe quel gouvernement du jour », a déclaré le syndicat.

Parmi les autres actions industrielles qui ont coïncidé avec le budget, citons la grève d'une semaine des travailleurs d'Amazon à Coventry.

(Workers' Weekly)

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Inde

Les fermiers poursuivent leurs assemblées de masse et leurs activités d'organisation

– J. Singh –


Mahapanchayat à Delhi, 19 mars 2023

Des milliers de fermiers venus de toutes les régions de l'Inde se sont rassemblés à Delhi le 19 mars dans un mahapanchayat (grande assemblée de masse) pour dire à l'élite dirigeante et à son État qu'ils ont l'intention de poursuivre la lutte pour obtenir satisfaction de leurs revendications, notamment un prix minimum de soutien pour les produits – une forme d'intervention sur le marché par le gouvernement pour protéger les producteurs agricoles contre toute chute brutale des prix.

Des banderoles vertes, jaunes, bleues et rouges étaient visibles à des kilomètres à la ronde lorsque les fermiers sont arrivés à Delhi à bord de leurs tracteurs. Les cris de Kisan mazdoor ekta (unité fermiers-ouvriers) et Nasal aur fasal (pour la prochaine génération et nos récoltes) pouvaient être entendus dans les rues et ruelles proches du Parlement. Un orateur a déclaré qu'à partir de Delhi, tous retourneraient dans chaque village pour s'organiser et se préparer aux batailles à venir. « Hum yahan apni rozi-roti ke liye aaye hain. Apne bachhon ke liye, apne ghar, apni zameen ke liye  (Nous sommes ici pour nos moyens de subsistance, nos enfants, notre maison et nos terres) », a déclaré Anita Devi lors de la manifestation au Ramlila Ground de Delhi.


Delhi, 19 mars 2023

Un dirigeant de la coalition de syndicats agricoles Samyukt Kisan Morcha (SKM) a déclaré : « Plusieurs questions n'ont pas été répondues et cela exige un autre 'andolan'. Nous nous réunirons à nouveau le 30 avril à Delhi. Je demande à tous les syndicats de fermiers d'organiser des rassemblements dans leur État respectif et de tenir des panchayats avant la réunion. »

L'élite dirigeante impose à nouveau l'anarchie et la violence au Pendjab pour faire échouer le mouvement des fermiers. Un gangster incarcéré a donné une longue entrevue sur plusieurs meurtres commis. Tous les fonctionnaires impliqués nient toute responsabilité. Un jeune homme du Pendjab fait l'objet d'une traque dramatique. Des rumeurs d'arrestation ou de fuite circulent dans tous les médias. Désinformation, tromperie et fraude sont imposées par le gouvernement central et les médias. Son avocat a déposé un recours en habeas corpus devant le tribunal. Plus de 100 jeunes ont été arrêtés. De nombreuses personnes se souviennent des années 80 et 90, lorsque l'armée a occupé le Pendjab et a perpétré un génocide. Mais les fermiers et le peuple du Pendjab ne se laisseront pas écraser et poursuivront leur lutte pour le renouveau et la rénovation.

Une convention tribale s'est tenue récemment à Hamirpur, dans l'Himachal Pradesh. Environ 800 000 délégués autochtones des quatre États voisins y ont participé, à savoir le Maharashtra, le Madhya Pradesh, le Rajasthan et le Gujarat. Plusieurs questions importantes ont été abordées, telles que la culture des Adivasis (peuples autochtones), la nécessité de développer des sociétés où les moyens de subsistance, la biodiversité et la nature sont protégés, la réalisation du potentiel des ressources naturelles pour protéger et maintenir des moyens de subsistance dignes, le renforcement de la gouvernance locale/villageoise (Gram Sabha), la médecine tribale et la conservation des plantes médicinales, la sensibilisation à la valeur nutritionnelle et les avantages  pour la santé des aliments locaux, le développement de structures d'enseignement universitaire pour les Adivasis, la protection des forêts contre la propagation des incendies de forêt et la destruction des forêts.  La destruction généralisée des principales forêts est devenue un problème majeur en raison du pouvoir des riches sociétés d'agriculture, d'élevage, d'abattage et de plantation. En 2009, l'Inde se classait au 10e rang mondial en termes de perte de forêts et de dégradation de l'environnement. La déforestation annuelle est estimée à 13,7 millions d'hectares.

Partout dans l'Himalaya, les gens se rassemblent également pour sauver la région. Les habitants de Joshimath, dans l'Uttarakhand, ont tenu des manifestations et des pèlerinages (yatras) contre la déforestation insouciante, l'urbanisation, les centrales hydroélectriques, les tunnels ferroviaires et les autoroutes sur les pentes et le long des rivières, qui provoquent une érosion massive du sol, des affaissements, des effondrements, des averses torrentielles, des dévastations et la destruction.

À Cambridge, dans le Massachusetts, aux États-Unis, il y a eu un symposium animé sur l'agriculture, les communautés dépendantes de la nature, les changements climatiques et les inégalités, à l'occasion du 92e anniversaire du martyre de Rajguru, Sukhdev et Bhagat Singh. Durant la journée entière, les participants se sont penchés sur des solutions concrètes aux problèmes urgents auxquels sont confrontés les habitants de l'Inde et du monde entier. Un des thèmes récurrents des présentations et des discussions était la nécessité pour les citoyens de mettre en place des mécanismes durables et évolutifs leur permettant de prendre des décisions qui affectent leur vie et la nature. De nombreuses initiatives prises en Inde ont fait l'objet d'une discussion critique. La journée entière a été consacrée à l'examen de solutions et s'est terminée par un dîner et des spectacles culturels en soirée.

(Photos: tractr2twitr, Jubildas, K. Sandhu)

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