Une vague de grèves pour souligner le jour du budget qui paie les riches en Grande-Bretagne
Au moins 40 000 grévistes défilent dans le centre de Londres pour se rendre à un rassemblement à Trafalgar Square, le 15 mars 2023.
Les actions de grève de masse dans toute la Grande-Bretagne, qui ont pris de l'ampleur en février, se sont poursuivies en mars, atteignant leur point culminant le jour du budget de printemps, le 15 mars. On estime qu'entre 400 000 et un demi-million de personnes issues de divers secteurs de l'économie socialisée ont fait grève ce jour-là seulement. Le budget s'est distingué par le fait qu'il n'a rien fait pour répondre aux demandes des travailleurs, de leurs syndicats et de tous ceux qui dépendent des services fournis par les travailleurs. Les grèves de masse devraient se poursuivre en avril.
Grève des enseignants
Rassemblement devant la cathédrale métropolitaine de Liverpool avec des jeunes médecins, des enseignants et des fonctionnaires, le 15 mars 2023.
Plus de 100 000 enseignants ont fait grève les 15 et 16 mars, poursuivant ainsi leur plus importante période de grève depuis 30 ans, qui a affecté la grande majorité des écoles du pays. Le syndicat de l'éducation nationale (NEU) réclame une augmentation de salaire entièrement financée en raison de la hausse de l'inflation et des réductions de salaire en termes réels depuis dix ans. Depuis 2010, les salaires ont chuté de 23 % en termes réels. Le NEU informe que d'autres problèmes causent « à chaque jour des perturbations et des dommages à long terme à l'éducation », notamment l'augmentation du nombre d'élèves par classe, le soutien aux élèves ayant des besoins particuliers, le recrutement et la rétention du personnel, le délabrement des installations et la charge de travail excessive. Workers' Weekly explique : « La lutte pour un système d'éducation moderne et adéquatement financé dure depuis de nombreuses années et les enseignants s'interrogent sur l'avenir de l'éducation qui est sous-financée et minée de manière insoutenable. Leurs actions ont montré à tous que l'avenir même de l'éducation est en jeu. Il faut trouver des moyens de leur permettre de discuter et de trouver eux-mêmes des solutions ».
Le NEU souligne que le gouvernement anglais est déstabilisé par le soutien des enseignants à la grève, l'afflux de nouveaux membres dans le syndicat et le degré de soutien des parents, et qu'il a pris la mesure « très nouvelle et inhabituelle » d'exiger l'annulation des grèves avant de faire une première offre sur les salaires et le financement.
Workers' Weekly ajoute : « La crise s'est développée à un point tel que le blocage des discussions sur l'avenir de l'éducation doit être surmonté, avec les enseignants eux-mêmes au premier plan de cette discussion. Il convient donc de noter que les enseignants ont obtenu des avancées au pays de Galles et en Écosse, où de telles conditions préalables n'ont pas été déclarées, où des offres sérieuses ont été faites et où les actions de grève ont été reportées ou ont pris fin ».
Grève du personnel universitaire
Actions de grève et manifestations à l'échelle de York
Le personnel universitaire s'est mis en grève du 15 au 23 mars, mobilisant 70 000 personnes dans 150 universités britanniques, dont des professeurs, des bibliothécaires et d'autres membres du personnel. Bien que cette action ait complété les 18 jours d'action prévus en février et mars, le Syndicat des universités et collèges (UCU) cherche à obtenir un mandat de ses membres pour étendre les actions de grève jusqu'à la fin de l'année académique. La lutte a été marquée par le diktat des employeurs et leur refus de négocier, et les membres de l'UCU ont rejeté la dernière offre d'environ 5 %. Les actions de grève, qui touchent quelque 2,5 millions d'étudiants, ont été soutenues par l'Association nationale des étudiants.
Le personnel universitaire a subi ce qui équivaut à 10 ans de réductions salariales dues à l'inflation, une moyenne de deux jours de travail non rémunéré par semaine, tandis qu'un tiers du personnel académique est sous contrat temporaire. Le personnel universitaire veut des augmentations de salaire qui répondent à la crise de l'inflation, la fin des contrats précaires et la prise en compte des lourdes charges de travail. Ils veulent également que les réductions des pensions et des avantages sociaux soient abrogées. Les compressions imposées l'année dernière aux régimes de retraite feront perdre au membre moyen 35 % de son futur revenu de retraite garanti. Pour ceux qui sont en début de carrière, les pertes se chiffrent en centaines de milliers de livres.
Workers' Weekly souligne le rôle important joué par le personnel universitaire en écrivant : « Les travailleurs de l'enseignement supérieur apportent une valeur ajoutée considérable à l'économie et contribuent à la culture et à la société en produisant des diplômés de premier cycle et des diplômés des cycles supérieurs hautement qualifiés et en menant des recherches qui débouchent sur des avancées scientifiques et technologiques. L'éducation est un droit et doit servir la société. En luttant pour leurs droits et leurs revendications, les universitaires et les travailleurs de l'enseignement supérieur, ainsi que les enseignants, se battent pour les droits de tous. »
Grève des médecins résidents
Piquet de grève des médecins résidents à Leeds
Du 13 au 15 mars, les médecins en formation d'Angleterre ont mené une grève de 72 heures pratiquement sans précédent. La grève a été décidée par un vote de 98 % en faveur d'une action et 77 % des médecins en formation y ont participé. Les médecins en formation représentent 45 % de la main-d'oeuvre médicale et vont des jeunes diplômés à ceux qui ont 10 ans d'expérience. Près de 50 000 médecins se sont mis en grève pour réclamer une augmentation de 35 % et un rétablissement des salaires après des réductions en termes réels de 26 % depuis 2008, ainsi que des mesures visant à remédier à la surcharge de travail et au problème de la rétention. Il n'y a pas eu de négociations salariales officielles et le gouvernement a clairement indiqué qu'il n'était pas disposé à satisfaire les revendications des médecins en formation.
Manifestation en faveur du service national de santé
Le 11 mars, des milliers de personnes ont manifesté dans les rues de Londres pour montrer leur soutien au Service national de santé (NHS) et aux travailleurs de la santé en grève contre les attaques dont leurs moyens de subsistance font l'objet. Workers' Weekly rapporte que « la manifestation a montré que le mouvement des travailleurs de la santé et du peuple dans son ensemble est plus fort que jamais pour renverser la vapeur face au gouvernement et à l'élite dirigeante. Il s'agit d'un mouvement des travailleurs de la santé et de la population dans leurs communautés pour prendre les décisions concernant la protection et le développement du système de santé public. Avec la poursuite des grèves des infirmières, des paramédics et maintenant des médecins en formation [...], la lutte pour le changement est désormais engagée. »
Grève des travailleurs des transports
Dans le secteur des transports, les conducteurs et le personnel du métro de Londres, membres de l'Associated Society of Locomotive Engineers and Firemen (ASLEF) et du National Union of Rail, Maritime and Transport Workers (RMT), se sont mis en grève le 15 mars pour protester contre les pertes d'emploi et les changements apportés aux régimes de retraite. Les 16 et 18 mars, des grèves ont été organisées par les membres du RMT dans 14 compagnies ferroviaires du pays. Les travailleurs du rail réclament des augmentations de salaire et contestent les plans dits de modernisation, qui prévoient des réductions des tâches de maintenance programmées, des fermetures de guichets de vente et des milliers de suppressions d'emplois.
Grève des fonctionnaires
Environ 133 000 fonctionnaires, membres du Syndicat des services publics et commerciaux, ont fait grève le 15 mars pour protester contre les bas salaires. L'action a touché 124 ministères et services gouvernementaux, dont le Cabinet Office, le ministère de l'Éducation, le ministère de l'Intérieur, le ministère des Transports, le ministère du Travail et des Pensions, les autoroutes nationales, l'agence britannique de sécurité sanitaire, le HMRC, le DVLA et les forces des postes frontaliers, perturbant sérieusement les arrivées dans les ports aériens et maritimes.
Grève des travailleurs des médias
Les 15 et 16 mars, les travailleurs des médias ont organisé une grève de 24 heures dans plusieurs studios et bureaux locaux de la BBC.
« La BBC doit reconnaître l'impact négatif de ses récentes décisions et s'engager pleinement avec le syndicat pour trouver une solution au conflit sur les compressions budgétaires dans les radios locales », a déclaré la National Union of Journalists (NUJ) dans un communiqué. L'action « concerne l'avenir de l'information locale de qualité dans les nombreuses et diverses communautés desservies par la BBC. Les projets de suppression d'émissions de radio et de réduction des ressources ont suscité la consternation et la colère des membres de la NUJ qui connaissent la véritable valeur des informations locales fiables ».
La NUJ a ajouté : « La stratégie Digital First ('le numérique avant tout') tant vantée par la BBC ne devrait pas être mise en oeuvre au détriment de l'information et du contenu qui sont véritablement locaux et accessibles. Au coeur de ces plans, il y a un problème de financement créé par la décision du gouvernement de geler la redevance, mais cela met aussi en évidence une question plus profonde sur le rôle et l'objectif de la BBC à l'ère du numérique. À une époque où le débat est polarisé, où la méfiance est cyniquement attisée dans des caisses de résonnance amplifiées par des algorithmes, un radio diffuseur de service public comme la BBC devrait être apprécié et protégé, et non pas vidé de sa substance ou laissé vulnérable aux caprices de n'importe quel gouvernement du jour », a déclaré le syndicat.
Parmi les autres actions industrielles qui ont coïncidé avec le budget, citons la grève d'une semaine des travailleurs d'Amazon à Coventry.
(Workers' Weekly)
Cet article a été publié dans
Numéro 18 - 7 avril 2023
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