Forum ouvrier

Numéro 93 - 8 octobre 2021

Un rassemblement à Vancouver souligne le deuxième anniversaire de la grève des travailleurs de Ledcor

Une dénonciation militante des violations des droits des travailleurs par l'entreprise et les gouvernements

Dégradation de la santé et sécurité au travail au Québec
Un appel à l'action pour défendre les droits et les vies humaines

Les travailleurs des arts et du spectacle luttent pour leurs droits
Les travailleurs de l'animation signent de nouvelles conventions collectives
Les travailleurs du cinéma et de la télévision aux États-Unis exigent un accord qui est juste


Un rassemblement à Vancouver souligne le deuxième anniversaire de
  la grève des travailleurs de Ledcor

Une dénonciation militante des violations des droits des travailleurs par l'entreprise et les gouvernements

Depuis septembre 2019, les membres de la section locale 213 de la Fraternité internationale des ouvriers en électricité (FIOE) ont maintenu sans relâche des lignes de piquetage devant les bureaux de Ledcor Technical Services (LTS) à Port Moody et au siège social de l'entreprise à Vancouver. Alors que les travailleurs entament le 25e mois de leur grève, un rassemblement militant a eu lieu devant le siège social de LTS pour appuyer leurs justes revendications et dénoncer Ledcor et le gouvernement fédéral qui refusent obstinément de régler une première convention collective pour ces travailleurs. Les orateurs se sont succédé pour s'engager à appuyer les justes revendications des travailleurs.

Les travailleurs ont rejoint la section locale de la FIOE en 2017 et ont tenté de négocier une convention collective de deux ans avec l'entreprise pour améliorer leurs salaires et leurs conditions de travail, et mettre fin à la sous-traitance de leur travail par LTS. Le 30 septembre 2019, ils se sont mis en grève après que l'entreprise a licencié 31 travailleurs sans motif ni préavis. Depuis, ils maintiennent des piquets de grève au siège de LTS à Vancouver et sur leur lieu de travail, maintenant à Port Moody.

Le travail principal des travailleurs est l'installation de câbles à fibres optiques. Telus et d'autres grandes entreprises de communication, en plus d'employer leurs propres travailleurs, passent des contrats avec des entreprises comme LTS qui paie ses techniciens à la pièce, ce qui signifie qu'ils gagnent beaucoup moins et ont des avantages sociaux inférieurs à ceux des employés de Telus qui font le même travail. LTS donne à son tour le travail en sous-traitance à d'autres entreprises. Les monopoles de télécommunication utilisent cette méthode de sous-traitance à des entreprises comme LTS comme moyen d'éliminer la main-d'oeuvre permanente et de transformer tous les techniciens en « entrepreneurs indépendants » sans protection en vertu du Code canadien du travail (fédéral) ou de la législation provinciale, la Loi sur les normes d'emploi de la Colombie-Britannique.

Le rassemblement du 1er octobre a été organisé avec le soutien de la Fédération du travail de la Colombie-Britannique, du Conseil du travail de Vancouver et du district, du Conseil du travail de New Westminster et du district et de nombreux syndicats, dont les Syndicats des métiers de la construction, le Syndicat des Métallos, le Syndicat international des débardeurs et magasiniers, le Syndicat canadien de la fonction publique et la section locale 40 de Unite Here. Les orateurs ont dénoncé l'entreprise pour le traitement qu'elle réserve aux travailleurs et la loi fédérale sur le travail qui permet aux entreprises d'avoir recours à des briseurs de grève, ainsi que le Conseil canadien des relations industrielles (CCRI) pour les retards dans le traitement des nombreuses plaintes déposées par le syndicat en 2019. Le CCRI a rendu sa décision seulement le 26 juillet 2021.

Robin Nedila, représentant des travailleurs de LTS pour la section locale 213 de la FIOE, a indiqué que « le CCRI a conclu que LTS a violé le Code canadien du travail en refusant de reconnaître la section locale 213 de la FIOE comme agent négociateur de tous les employés de l'accréditation », une décision qui « a causé un préjudice irréparable à la capacité de négociation de la section locale de la FIOE 213 ». Il a expliqué que l'entreprise avait délibérément et stratégiquement menti aux travailleurs d'un département en leur disant qu'ils n'étaient pas membres du syndicat. Les autres plaintes du syndicat ont été rejetées.

En décembre 2019, le syndicat a demandé au Conseil canadien du travail d'intervenir et de régler les conditions d'une première convention collective, comme le précise l'article 80 (1)-(4) du Code canadien du travail, qui permet au conseil d'« enquêter sur le différend et, s'il le juge utile, de régler les conditions de la première convention collective entre les parties ». Le Conseil a reporté sa décision sur cette demande jusqu'après la décision du CCRI sur les plaintes de pratiques déloyales de travail émises par le syndicat.

Les travailleurs de LTS bénéficient d'un large soutien de la part des travailleurs, des syndicats et du public depuis le début de leur grève. Les participants au rassemblement se sont engagés à poursuivre leur appui continu, tant financier que sur les lignes de piquetage.

(Photos: FO, BC Building Trades, K. Ranaletta)

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Dégradation de la santé et sécurité au travail au Québec

Un appel à l'action pour défendre les droits
et les vies humaines

La Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ) rapporte que le nombre de lésions au travail a connu une augmentation constante de 2016 à 2020. La FTQ a analysé les données fournies par la CNESST, la Commission des normes, de l'équité, de la santé et de la sécurité du travail, l'agence chargée par le gouvernement de l'application des lois sur le travail au Québec.

https://cpcml.ca/francais/Images2020/Movement%20Ouvrier/20623-Ensemble%20luttonspoursante-securite-au%20travail-FTQ-ConstructionCr.JPGUn article récent du Journal de Montréal donne une idée de la dégradation des conditions de santé et sécurité au travail au Québec, dont fait partie une diminution des interventions de la CNESST, en se basant sur l'analyse de la FTQ. De 2016 à 2020, il y a eu une augmentation constante du nombre annuel de lésions professionnelles, qui comprennent les accidents de travail et les maladies professionnelles, de 90 414 à 110 038. Le nombre des accidents de travail a augmenté de 82 179 à 94 750, tandis que le nombre des maladies professionnelles a augmenté de 8235 à 15 288. Quant au nombre de décès reliés au travail, celui-ci se situe en moyenne à près de 200 par année.

Pendant ce temps, les interventions de la CNESST pour protéger la santé des travailleurs ont diminué. Selon l'article, les constats d'infraction livrés par la CNESST en 2020 ont été les plus bas depuis des années, soit 1772, alors qu'ils étaient en moyenne autour de 3600 entre 2016 et 2019. C'est-à-dire que la CNESST a baissé sa garde alors que la pandémie frappait et que les problèmes étaient les plus graves.

L'article cite une représentante en prévention de la FTQ sur le chantier de construction du REM, Réseau express métropolitain, une nouvelle ligne de transport de type métro léger qui traversera le Grand Montréal. Elle dit :

« C'est de plus en plus dangereux. Les travaux doivent être faits vite. Les compagnies marchent aux bonis, donc la santé et la sécurité ne semblent pas être leur priorité. Les travailleurs ne font pas de plaintes et quand ils décident d'en faire, les inspecteurs ne se déplacent pas. Ils font juste appeler et ils attendent des photos prises par le surintendant ».

Les travailleurs du secteur des mines confirment que la CNESST a diminué depuis des années ses activités d'inspection, son émission de constats d'infraction qui mènent à des amendes aux entreprises, et ses avis de dérogation qui mènent à des ordonnances de correctifs pour le non-respect des normes de santé et de sécurité. L'un d'entre eux a dit, en conversation avec Forum ouvrier, que les grands employeurs exercent une pression constante sur la CNESST pour qu'elle n'intervienne pas contre eux, et que la direction de la CNESST exerce une pression sur ses inspecteurs pour qu'ils n'émettent pas de constats reconnaissant des fautes et exigeant des mesures correctives aux entreprises.

C'est un problème très sérieux auquel les travailleurs font face et ce problème sera encore aggravé par la Loi 59, Loi modernisant le régime de santé et de sécurité du travail, qui a été adoptée le 30 septembre dernier par le gouvernement du Québec en dépit de la ferme opposition des travailleurs, des syndicats et des organisations de défense des travailleurs accidentés.

Cette loi accorde un pouvoir unilatéral de décision aux grands intérêts privés en matière de santé et sécurité. Dans ce contexte, elle accorde d'énormes pouvoirs réglementaires à la CNESST, notamment en matière de reconnaissance de ce qui constitue une maladie professionnelle, d'assistance médicale aux travailleurs blessés et malades, de retour au travail, d'indemnisation, et de mécanismes de prévention. La CNESST, qui déjà n'agit pas à la hauteur de ses responsabilités, pourra faire et défaire les règlements à sa guise, sans que cela soit scruté publiquement, sans même que l'Assemblée nationale en soit saisie.

Tout ceci est absolument contraire à une façon prosociale et moderne de traiter des problèmes de santé et sécurité des travailleurs, qui exige que la voix des travailleurs soit décisive dans la détermination de ce qui est salubre et sécuritaire aux endroits de travail et de ce qui est un juste traitement pour les travailleurs accidentés ou rendus malades au travail.

Cela ne fait qu'accentuer la conscience de l'urgence parmi les travailleurs d'intensifier leur lutte contre ces violations à leurs droits.

(Photo: FTQ-Construction)

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Les travailleurs des arts et du spectacle luttent pour leurs droits

Les travailleurs de l'animation signent de
nouvelles conventions collectives

Le 24 septembre, les travailleurs de l'animation de Titmouse Vancouver ont signé leur première convention collective avec l'Alliance internationale des employés de scène, de théâtre et de cinéma (IATSE).

C'est seulement la deuxième convention collective qui a été signée par les travailleurs de l'animation au Canada. La première a été signée par le Syndicat des travailleuses et travailleurs d'Oasis Animation à Montréal en novembre 2019 avec Oasis Animation. Le syndicat est membre de la CSN (Confédération des Syndicats nationaux).

La présidente du syndicat d'Oasis, Tamarind King, a dit : « Les salaires vont s'améliorer et il y aura des augmentations annuelles. Même si la production en animation au pays est en plein essor, les conditions de travail restent précaires. Il y a beaucoup d'insécurité d'emploi et une surabondance de temps supplémentaire non rémunéré. Certains studios canadiens rémunèrent toujours les animateurs à l'image, une tactique de sweatshop qui est fréquente en Asie. Cela signifie que les travailleurs de l'animation ne sont pas payés pour le temps supplémentaire et doivent souvent travailler un grand nombre d'heures seulement pour gagner un salaire de subsistance. »

Il y a 70 000 travailleurs de l'animation au Canada et Vancouver est le centre de la production d'animation au pays avec plus de 60 studios et un des plus importants centres d'animation au monde. Big Bad Boo est la plus grande compagnie d'animation au Canada. L'Ontario possède une industrie qui vaut 200 millions de dollars par année.

L'entente Titmouse protégera près de 200 travailleurs et elle est la toute première convention collective pour la nouvelle Guilde d'animation agréée, la section locale 938 de IATSE.

Les plus grandes compagnies d'animation au monde sont Pixar U.S. (une filiale de Disney) ; Walt Disney, États-Unis ; Studio Ghibli, Japonaise, (Disney) ; Dreamworks, (propriété de Reliance Entertainment Pvt Ltd), Inde ; Nickelodeon, États-Unis ; Aardman, Royaume-Uni.

Parmi les points saillants de l'entente de 4 ans de Titmouse, il y a des procédures définies de temps supplémentaire, une augmentation des salaires minimums, des augmentations annuelles de salaires améliorées, une prime de 15 % pour les employés assumant des tâches de supervision, davantage de congés de maladie/personnels (et la possibilité de prendre des demi-journées), et des REER bonifiés ayant un barème de tarifs réduit. « Il y a de vrais gains pour tout le monde dans cette entente », a commenté Emily Gossmann, la principale déléguée syndicale de la section locale 938 de IATSE et membre du comité de négociation, « et ces gains seront appuyés par la forte représentation que donne IATSE ».

« IATSE est fière d'avoir ces travailleurs talentueux dans ses rangs », a dit le président de IATSE International, Matthew D. Loeb, « et enthousiaste de voir qu'ils peuvent maintenant jouir d'avantages sociaux et de protections dont jouissent depuis longtemps les travailleurs de l'animation représentés par IATSE à Los Angeles. »

(Photos: IATSE 938)

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Les travailleurs du cinéma et de la télévision aux États-Unis exigent un accord qui est juste


Une action des membres d'IATSE à Burbank en Californie, le 3 octobre 2021

Soixante mille travailleurs des coulisses du cinéma et de la télévision travaillant aux États-Unis et représentés par l'Alliance internationale des employés de scène, de théâtre, des techniciens du cinéma, des artistes et des métiers connexes des États-Unis, ses territoires et au Canada (IATSE) se mobilisent pour faire en sorte que les studios et les compagnies de diffusion en continu de Hollywood accordent au personnel qui produit leur contenu un temps de repos raisonnable, des avantages sociaux viables et des salaires décents.

Après plusieurs mois de négociation de contrats de succession à l'entente de base Producteur-IATSE, et à l'Entente sur les normes dans le domaine du théâtre, de la télévision et du cinéma, l'Alliance des producteurs de cinéma et de télévision (AMPTP), qui représente les plus importantes compagnies de production du cinéma et de la télévision, a annoncé qu'elle ne compte pas faire de contre-offre à la plus récente proposition de IATSE. La réaction de IATSE a été d'aller chercher un vote de grève massif, avec une participation de 89,66 % - un total de 53 411 votes, un vote à 98,68 % en faveur de la grève, soit 52 706 votes.

IATSE rapporte que tout au long du processus de négociation, l'AMPTP « a refusé de travailler avec nous pour discuter des problèmes les plus graves dans leurs endroits de travail, notamment :

- les heures de travail excessivement non sécuritaires et nocives ;
- les salaires qui n'assurent pas une subsistance pour les métiers les moins bien rémunérés ;
- le refus catégorique d'assurer un repos raisonnable pendant les pauses pour les repas, entre les journées de travail et pendant les fins de semaine ;
- les travailleurs qui oeuvrent sur certains projets de diffusion en continu dans les « nouveaux médias » sont moins bien rémunérés, même lorsqu'ils travaillent sur des productions ayant des budgets qui rivalisent ou dépassent ceux de grands succès commerciaux diffusés de façon traditionnelle.

IATSE souligne que l'AMPTP est « un ensemble qui comprend des méga-sociétés médiatiques d'une valeur collective de billions de dollars ». Elle n'accepte pas la prétention de l'AMPTP qu'elle « ne peut pas accorder aux équipes travaillant en coulisses les nécessités humaines de base comme un sommeil adéquat, des pauses pour les repas, et des salaires décents. Pire encore, la direction ne semble même pas reconnaître que nos problèmes les plus graves existent ».

IATSE écrit : « Ces problèmes sont réels pour les travailleurs de notre industrie, et un changement s'impose depuis longtemps. Cependant, l'explosion de la diffusion en continu en même temps que la pandémie a multiplié et aggravé les conditions de travail, faisant en sorte que les 60 000 travailleurs de coulisses couverts pas ces conventions collectives en arrivent à un point de rupture. Nous avons risqué notre santé et notre sécurité tout au long de l'année, travaillant au cours de la pandémie pour veiller à ce que notre industrie en sorte indemne. Maintenant, nous ne pouvons accepter et nous n'accepterons pas une entente qui nous laisse avec un résultat qui n'est pas viable. »

IATSE a été fondée en 1893 lorsque les représentants des machinistes de plateau travaillant dans onze villes se sont réunis à New York et se sont engagés à appuyer les efforts de chacun pour obtenir des salaires et des conditions de travail équitables pour leurs membres. Aujourd'hui, IATSE est active dans toutes les formes de production de représentations théâtrales, de cinéma et de télévision, de foires commerciales et d'expositions, de télédiffusion ainsi que de concerts, sans oublier les ateliers d'équipement et de construction qui soutiennent toutes ces facettes de l'industrie du spectacle.

L'Alliance souligne : « Nous sommes plus de 150 000 travailleurs dans à peu près tous les métiers des arts, des médias et du spectacle, et notre mission est d'améliorer la vie de tous les travailleurs du monde du spectacle, à l'intérieur ainsi qu'à l'extérieur de l'endroit de travail. »

(Photos: IATSE, C. Fiorini)

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