Forum ouvrier

Numéro 6 - 15 février 2021

Le rôle décisif des travailleurs pour aplanir
la courbe de contamination de la COVID-19

Les travailleurs d'Olymel affirment
leur droit de décider

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Le Canada doit accorder un statut à tous et à toutes
L'Alliance des travailleurs migrants pour le changement réclame des mesures  pour protéger les travailleurs migrants
Mépris flagrant du gouvernement Trudeau pour la vie humaine : mettons fin aux renvois! - Diane Johnston
L'Association des avocats et avocates en droit des réfugiés s'oppose à l'expulsion des réfugiés pendant la pandémie 




Le rôle décisif des travailleurs pour aplanir la courbe de
contamination de la COVID-19

Les travailleurs d'Olymel affirment
leur droit de décider

Malgré le nombre élevé de travailleurs malades qui ont contracté la COVID-19 à l'usine de transformation du porc d'Olymel à Red Deer en Alberta, la compagnie a refusé d'accéder à la revendication des travailleurs d'une fermeture « coupe-circuit » de deux semaines. Il y a 1 850 travailleurs à l'usine d'Olymel, où 10 000 porcs sont abattus et transformés à chaque jour.

En date du 14 février, il y avait 315 cas de COVID-19 liés à l'usine, dont 194 cas actifs, soit plus du double de la semaine précédente. Un jeune travailleur, âgé de seulement 30 ans, est mort tragiquement de la COVID-19 le 28 janvier.

Le 6 février, le président de la section locale 401 des Travailleurs unis de l'alimentation et du commerce, Tom Hesse, a réclamé une fermeture temporaire avec plein salaire pour les travailleurs, après les avoir consultés. Quatre-vingt-un pour cent des travailleurs qui ont répondu à un sondage ont dit qu'ils ne se sentaient pas en sécurité au travail et 87 % ont appuyé une fermeture temporaire. La section locale 401 revendique aussi une réunion commune immédiate avec des représentants du syndicat, un ou des experts indépendants en santé et des représentants gouvernementaux de la Santé et de la Sécurité au travail (OH&S) et des Services de santé de l'Alberta.

« Nous vous enjoignons d'agir sur ces trois points avec la plus grande urgence. Chaque infection porte en elle le risque de la mort ou de sérieuses et durables conséquences que nous commençons à peine à comprendre. Nous ne pouvons pas nous permettre d'attendre », lit-on dans la lettre du président Thomas Hesse et de la secrétaire-trésorière Richelle Stewart de la section 401 à la direction d'Olymel.

Les travailleurs d'Olymel fondent leur conclusion qu'ils ne sont pas en sécurité sur les conditions auxquelles ils font face à chaque jour. La lutte que les travailleurs ont menée a conduit à des mesures telles que la fourniture d'équipement de protection individuelle adéquat, des barrières en plexiglass et une augmentation du nettoyage, mais elles ne sont pas suffisantes pour arrêter une large éclosion alors que 1 850 travailleurs travaillent très près les uns des autres et à une très grande vitesse.

Plus de trois semaines après le début d'une « nouvelle grappe » de cas de COVID-19, le porte-parole d'Olymel dit que l'entreprise est toujours en train d'enquêter sur comment la « grappe » est apparue, mais qu'elle « espère que le nombre diminue cette semaine pour le bien de nos employés ». Autant l'AHS que l'OH&S continuent d'affirmer que la situation est « sous contrôle ».

Les travailleurs n'acceptent pas ces assurances tout comme les travailleurs de Cargill ne les ont pas acceptées lorsqu'ils ont finalement forcé leur usine à fermer en mai dernier, après s'être fait dire de façon répétée que l'usine était sécuritaire alors même que le nombre de cas augmentait rapidement. Lors de cette éclosion, 950 travailleurs ont été infectés et trois ont perdu la vie. Les travailleurs d'Olymel prennent la parole et demandent des mesures concrètes dont une fermeture immédiate et un plein salaire.

L'expérience des travailleurs des usines de transformation de la viande et d'autres industries a démontré que ce sont les efforts des travailleurs eux-mêmes et leur action collective qui ont permis de contenir des éclosions et de protéger les travailleurs. C'est la raison pour laquelle ils doivent avoir le dernier mot pour déterminer si leurs conditions de travail sont sécuritaires ou non et le droit d'avoir une voix effective et le pouvoir de décider de ce qui sert les intérêts des travailleurs et les intérêts généraux de la société.

(Photo : TUAC)

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Le Canada doit accorder un statut à tous et à toutes

L'Alliance des travailleurs migrants pour
le changement réclame des mesures
pour protéger les travailleurs migrants

Le 11 janvier, l'Alliance des travailleurs migrants pour le changement a demandé que le gouvernement de l'Ontario réponde par des mesures d'urgence au nombre grandissant de cas de COVID-19 en portant une attention particulière aux endroits des plus grandes éclosions : les lieux d'habitation collective et les endroits de travail. L'Alliance a émis la déclaration suivante :

« Les centres de soins de longue durée, les fermes où travaillent des travailleurs migrants, les sites manufacturiers, les entrepôts, les boulangeries et les prisons sont l'épicentre de la crise. Un grand nombre des travailleurs et de ceux qui y sont logés ou détenus sont des personnes à bas salaire, racialisées ou des migrants. Nous avons besoin de changements immédiats.

« Nous avons besoin de congés de maladie payés et d'une interdiction des évictions. TOUS les travailleurs méritent de plus hauts salaires, un soutien au revenu d'urgence et l'accès universel aux soins de santé – les migrants ne doivent pas être laissés pour compte.

« À titre d'exemple : en juin 2020, nous avons proposé des changements spécifiques pour arrêter les éclosions dans les fermes. Plus de six mois plus tard, rien n'a été fait, mais les éclosions se poursuivent AUJOURD'HUI.

« Nous demandons au premier ministre Doug Ford de garantir la justice pour les travailleurs et les migrants au lieu de garantir le profit de quelques-uns. »

(Photo : Debout pour la dignité. Citations traduites par FO)

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Mépris flagrant du gouvernement Trudeau pour la vie humaine : mettons fin aux renvois!

En dépit des restrictions sur les vols vers le Mexique et les Caraïbes, la mise en quarantaine forcée des voyageurs de retour et les appels répétés du premier ministre et d'autres responsables gouvernementaux et de la santé publique que ce n'est pas le moment de faire des voyages internationaux, l'Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) a intensifié ses expulsions depuis la fin novembre. Ceci a mis fin à la suspension temporaire de la plupart des expulsions qui a été instituée par l'ASFC en mars 2020. Les avocats en droit de l'immigration ont été avisés le 30 novembre 2020 de la reprise immédiate des renvois pour tous les ressortissants étrangers interdits de territoire au Canada. L'annonce est intervenue le jour où 7681 infections à la COVID-19 ont été signalées à travers le pays, le nombre le plus élevé en un jour depuis le début de la pandémie, et 98 personnes sont décédées, le nombre de morts quotidien le plus élevé en près de six mois.

De mars à décembre, l'ASFC a affirmé qu'elle avait accordé la priorité aux expulsions pour des raisons d'interdictions de territoire « graves », celles qui sont visées aux articles 34 (sécurité), 35 (violations des droits de la personne) et 36 (criminalité) de la Loi de l'Immigration et la protection des réfugiés. Le dernier rapport sur les renvois au cours de l'exercice 2020-2021 (exercice se terminant le 31 mars 2021) sur le site Web de l'ASFC indique qu'au 30 juillet, quatre mois depuis le début de l'année fiscale, le nombre total de renvois forcés était de 2 438. Le nombre total de renvois forcés en 2019-2020 était de 11 465. En 2018, l'ASFC a fixé un objectif de 10 000 renvois pour 2018-2019, avec des cibles encore plus élevées pour les années subséquentes, visant 15 500 d'ici 2022. Elle subit donc des pressions pour augmenter le nombre de renvois d'ici la fin de l'année fiscale le 31 mars.

Le rapport de la vérificatrice générale présenté au Parlement le 8 juillet de l'an dernier critiquait l'incapacité de l'ASFC à augmenter le nombre de renvois et proposait diverses « améliorations », notamment des incitatifs accrus pour les « renvois volontaires ». Les médias signalent que le nombre de « renvois volontaires » a considérablement augmenté. Les incitatifs comprennent le billet d'avion payé par le gouvernement à un prix souvent gonflé qui doit être remboursé si la personne renvoyée souhaite revenir au Canada à l'avenir.

L'une des raisons pour lesquelles l'ASFC a mis de l'avant son changement de politique était « l'émergence d'options de vaccination viables » malgré le fait que lorsqu'elle a repris les renvois à la fin de novembre, aucun vaccin n'avait été approuvé au Canada. Elle a également déclaré que la décision d'arrêter de nombreux renvois pendant la pandémie « était une mesure exceptionnelle qui n'était pas partagée par la communauté internationale ».

Les organisations de défense des droits des migrants, l'Association du Barreau canadien, l'Association canadienne des avocats et avocates en droit des réfugiés et bien d'autres se sont prononcées contre la reprise des renvois et ont demandé au gouvernement de rétablir le moratoire. Elles soulignent le danger que cela représente pour les personnes renvoyées du Canada et pour les employés de l'ASFC qui doivent voyager avec certaines personnes jusqu'à leur destination. Les personnes visées par des mesures de renvoi doivent se présenter, parfois plus d'une fois, aux bureaux de l'ASFC et se rendre dans la collectivité pour prendre d'autres dispositions pour quitter le Canada, ce qui les expose à un risque accru de contracter la COVID-19. Le voyage n'est pas moins dangereux pour ces personnes et les employés de l'ASFC qui les accompagnent, dans les aéroports, dans les avions et à leur destination, que pour tout Canadien qui a été averti de ne pas voyager à l'étranger. L'Association du Barreau canadien demande que « l'ASFC ... adopte et suive une politique claire jugeant que toutes les mesures de renvoi sont inapplicables en raison de risques pour la santé publique ».

Les travailleurs sans papiers sont souvent signalés à l'ASFC par la police et doivent éviter les situations dans lesquelles ils pourraient devoir présenter une pièce d'identité à la police. Au Québec, le couvre-feu imposé par le gouvernement Legault a créé une situation impossible pour de nombreux travailleurs qui sont légitimement dans la rue pour aller à leur travail mais dont la vie pourrait être bouleversée si la police les arrête.

Joignons-nous tous aux organisations et aux défenseurs des droits des migrants pour réclamer la fin des expulsions et la fin des dénis injustes du droit des travailleurs migrants au statut de résident permanent au Canada !

(Photo : FO, CAC ; citations traduites par FO)

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L'Association des avocats et avocates
en droit des réfugiés s'oppose à l'expulsion des réfugiés pendant la pandémie

Dans une lettre adressée à Bill Blair, ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, et à John Ossowski, président de l'Agence des services frontaliers du Canada (ASFC), l'Association canadienne des avocats et avocates en droit des réfugiés (ACAADR) déclare que la décision de l'ASFC d'abandonner unilatéralement sa politique relative aux expulsions « est mal fondée et met la santé publique en péril ». Elle note en outre que l'agence n'a pas identifié « de changement important de circonstances qui justifierait une décision de recommencer les renvois de tous les ressortissants étrangers – en particulier ceux qui font l'objet d'interdictions de territoire non graves – alors que le pays traverse les pires jours de la pandémie[1] ».

L'ACAADR fait remarquer qu'« il est dangereux et inutile de contraindre légalement des personnes à embarquer sur des vols internationaux à ce moment-ci et les obliger à rester dans des espaces fermés avec des centaines d'autres personnes pendant des heures dans de nombreux cas  ».

Le deux poids deux mesures du gouvernement libéral de Justin Trudeau va comme ceci : il conseille à ses propres citoyens et résidents permanents d'éviter les voyages non essentiels à l'extérieur du Canada jusqu'à nouvel ordre et reprend le renvoi d'un nombre record de personnes.

Dans un article publié le 11 décembre dans The Lawyer's Daily, la présidente de l'ACAADR, Maureen Silcoff écrit que « la plupart des personnes qui font l'objet de mesures de renvoi en vertu de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés (LIPR) ne présentent aucun risque pour la société. Ce sont simplement des personnes dont le statut au Canada a expiré. Il s'agit des visiteurs, des demandeurs d'asile déboutés, des travailleurs étrangers temporaires et des étudiants internationaux. Peut-être qu'ils déposaient de l'épicerie sur votre perron ou nettoyaient les urgences d'un hôpital avant qu'on leur dise de quitter le Canada ».

Maureen Silcoff ajoute que lorsqu'une personne fait l'objet d'une mesure de renvoi, elle n'a d'autre choix que de le signaler et le site Web de l'ASFC indique clairement ce qui se passe si une personne décide que cela est trop risqué pour sa santé ou celle des personnes avec qui elle vit. Le site Web de l'ASFC mentionne que « Si vous ne vous présentez pas à une entrevue préalable au renvoi ou à un renvoi du Canada à la date prévue, l'ASFC diffusera un mandat d'arrêt à votre endroit dans l'ensemble du Canada. Lorsque vous avez été arrêté, l'ASFC peut vous placer en détention dans un centre de détention avant que vous soyez renvoyé. Afin de s'assurer que vous quittiez le Canada, l'ASFC peut assigner un agent d'escorte pour vous accompagner lors de votre départ. »

En réponse à l'allégation de l'ASFC selon laquelle les individus ont recours « aux appels, aux contrôles judiciaires et aux demandes de résidence permanente pour des motifs d'ordre humanitaire », Maureen Silcoff fait remarquer que « de nombreuses personnes à qui l'ASFC ordonne de se présenter pour un renvoi ne peuvent pas engager un avocat. Elles sont arrivées au bout de leur processus d'immigration, avec peu d'argent pour des frais juridiques supplémentaires. Pourtant, sans avocat, l'expulsion est pratiquement impossible à arrêter. La demande de 'report' du renvoi pour suspendre l'expulsion est une mesure discrétionnaire qui n'est pas connue de la plupart des personnes non représentées, et si elle est faite correctement, elle implique des observations écrites accompagnées de preuves. Demander un sursis de renvoi devant la Cour fédérale est encore plus hors de portée pour une personne non représentée. »

La présidente de l'ACAADR conclut que « la solution est claire. Jusqu'à ce que la COVID-19 soit sous contrôle, l'ASFC doit revenir à sa politique initiale en matière de pandémie », c'est-à-dire, la politique de renvois limités, mise en place en mars 2020.

Notes

1. Association canadienne des avocats et avocates en droit des réfugiés (ACAADR), lettre (en anglais) adressée au ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile et au président de l'ASFC, le 2 décembre 2020.

(Traduction des citations par FO - Photo : FO)

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