Numéro 84 - 15 décembre 2020
Le gouvernement du Nouveau-Brunswick veut
imposer un gel salarial à tous les travailleurs
du secteur public
Non à la négation des droits
des travailleurs!
• Les
travailleurs du secteur public s'opposent au
diktat du gouvernement
- Entrevue avec Simon Ouellette
Loi
antiouvrière du gouvernement du Manitoba
• Le projet de loi 16
s'attaque aux travailleurs et à leurs
organisations de défense
Arrêtez de
payer les riches! Investissez dans les
programmes sociaux!
• Le démantèlement du
système de santé publique du Québec n'est pas
justifiable - Pierre Soublière
Balado
l'Éducation est un droit
• Pourquoi les
gouvernements sont-ils allergiques à des
solutions publiques à la pandémie?
Le gouvernement du
Nouveau-Brunswick veut imposer un gel salarial
à tous les travailleurs du secteur public
Les travailleurs de la santé du SCFP tiennent un
rassemblement à Fredericton à la défense de leur
droit de négocier des salaires et des conditions
de travail qu'ils jugent acceptables,
le 12 avril 2018.
Le 11 décembre, lors d'une rencontre, le
premier ministre du Nouveau-Brunswick Blaine Higgs
a informé les représentants du Syndicat canadien
de la fonction publique du Nouveau-Brunswick que
son gouvernement entend imposer un gel des
salaires suivi de restrictions salariales à tous
les travailleurs du secteur public de la province,
syndiqués et non syndiqués. Il a fait cette
annonce au beau milieu du stress et de
l'anxiété causés par les conditions de
travail pendant la pandémie. Cela fait plus de
douze ans que les travailleurs du
Nouveau-Brunswick luttent contre le gel de salaire
et les restrictions salariales que les
gouvernements successifs ont imposés en déclarant
avoir le « mandat de restreindre les
salaires ».
Pour justifier l'imposition de ce diktat en ce
qui a trait aux négociations des conventions
collectives des travailleurs du secteur public, le
premier ministre Higgs a dit aux médias : «
Ce que nous voulons faire, c'est gérer les
attentes et transformer cette négociation en une
réflexion différente sur ce que nous avons appris
de la COVID. Ne la transformons pas en beaucoup de
discussions sur les salaires que nous essayons de
protéger, mais discutons de ce que nous pouvons
faire différemment pour répondre à nos besoins et
ce que nous avons appris grâce à la COVID. »
L'importante leçon que les travailleurs ont tirée
de la pandémie, c'est qu'ils sont le facteur
essentiel pour préserver et faire progresser la
société, et que leurs conditions de vie et de
travail ainsi que leur mot à dire sur ces
conditions font la différence entre la vie et la
mort. Ils ont appris que la relance économique
doit être centrée sur l'être humain, bâtie autour
d'entreprises publiques qui sont sous le contrôle
du peuple et qui assurent le bien-être du peuple.
L'élimination de la capacité des travailleurs du
secteur public de négocier des salaires et des
conditions acceptables pour eux-mêmes aggrave tous
les problèmes du secteur et affecte la livraison
des services publics. Cette annonce va affecter la
rétention des travailleurs de la fonction publique
de même que l'attraction de nouveaux travailleurs.
La destruction du service public par l'engagement
d'entrepreneurs privés pour faire le travail des
travailleurs va détruire encore plus le tissu
social parce que tous sont abandonnés à eux-mêmes.
Le premier ministre semble croire que la COVID-19
fournit une « opportunité » d'imposer des
diktats au nom de grands idéaux sur la protection
de la santé des gens. C'est un délire derrière
lequel on voit les stratagèmes pour payer les
riches qu'exigent les intérêts privés étroits qui
se sont emparés du pouvoir décisionnel et du
fonctionnement des agences de l'État, en
commençant par le bureau du premier ministre. La
déclaration de Blaine Higgs sur « ce que nous
pouvons faire différemment pour répondre à nos
besoins » montre qu'il ne laisse planer aucun
doute sur la position de son gouvernement selon
laquelle les intérêts privés étroits sont la clé
de la relance post-pandémie et que toutes les
ressources de la société doivent être placées sous
leur contrôle et leur propriété.
Forum ouvrier soutient fermement les
travailleurs du Nouveau-Brunswick qui font face à
cette attaque renouvelée contre eux et appelle
tous les travailleurs canadiens à appuyer
résolument leur juste lutte. Il est clair comme de
l'eau de roche que notre avenir et notre sécurité
sont dans la lutte pour affirmer les droits de
tous.
- Entrevue avec Simon Ouellette -
Simon Ouellette est le
responsable des communications, bureau des
Maritimes du Syndicat canadien de la fonction
publique (Nouveau-Brunswick et
Île-du-Prince-Édouard)
Forum ouvrier : Dans son
communiqué du 11 décembre, le Syndicat
canadien de la fonction publique du
Nouveau-Brunswick (SCFP-NB) s'oppose à un
potentiel gel salarial imposé aux travailleurs du
secteur public par le gouvernement de Blaine
Higgs. Peux-tu nous en dire plus ?
Simon
Ouellette : Le SCFP-NB a
organisé une conférence dans l'après-midi
du 11 décembre tout de suite après avoir
rencontré le premier ministre. À notre demande, le
premier ministre de la province a accepté de
rencontrer les élus des grandes sections locales
provinciales, des grandes sections qui sont sans
convention collective en ce moment. Il y en a qui
sont sans convention depuis 2016, pour la
majorité cela fait depuis 2018 que leur
convention est échue. On parle
d'environ 20 500 travailleurs et
travailleuses qui sont aux prises avec un
gouvernement qui n'a pas voulu négocier avec eux
dans les dernières années, à la fois les libéraux
qui ont laissé traîner les négociations et les
conservateurs dans ce cas-ci.
Dans les jours qui ont précédé notre rencontre
avec le premier ministre, nous avons appris par
personnes interposées, par les journaux, que le
gouvernement a l'intention d'imposer un gel
salarial à l'ensemble de la fonction publique. Le
premier ministre nous a confirmé lors de notre
rencontre qu'il a l'intention d'imposer un gel des
salaires la première année et ensuite une
restriction salariale à l'ensemble de la fonction
publique, syndiquée et non syndiquée.
Cette déclaration ne se fait pas aux tables de
négociation. Elle se fait de manière publique,
dans les journaux, de manière politisée. C'est
choquant d'entendre cela, surtout en temps de
pandémie.
Il y a des négociations à l'heure actuelle, parmi
les travailleurs et travailleuses en santé
notamment, mais ce ne sont pas de vraies
négociations car le gouvernement leur a fait une
offre de gel salarial suivi de restrictions
salariales, soit exactement ce que nous avons
entendu à notre rencontre. Il n'y a pas vraiment
de place pour la négociation là-dedans.
FO : Quelle est la position du
SCFP-NB sur ces gestes du gouvernement ?
SO : Cela fait des années que
nous disons que les salaires stagnent depuis au
moins une douzaine d'années. Nous avons fait face
à des zéros d'augmentation, à des 1 %,
des mandats de restriction salariale de la part
des administrations précédentes. Les augmentations
de salaire depuis toutes ces années ont été bien
en dessous de l'augmentation du coût de la vie.
Tout cela a fait en sorte que nos membres ont
reculé en ce qui concerne leur pouvoir d'achat
réel. Nous voulons contrer cela.
Le coût de la vie augmente. Au Nouveau-Brunswick,
le coût des loyers est hors de contrôle en ce
moment, il y a une crise du logement dans la
province. Le Nouveau-Brunswick est la province au
Canada où les droits des locataires sont les plus
faibles. C'est un paradis pour les propriétaires
de logements. L'essence, le chauffage sont
extrêmement chers. La facture d'électricité est
beaucoup plus élevée au Nouveau-Brunswick qu'au
Québec par exemple. Nous avons des salaires de
petites provinces avec des factures de grandes
villes.
Selon nous, la meilleure manière de sortir de la
pandémie c'est par la stimulation d'une croissance
durable, qui va dans les poches de nos
travailleurs, dans nos infrastructures publiques,
nos systèmes publics. On ne peut pas stimuler la
croissance à coup de subventions corporatives.
C'est certain qu'au SCFP-NB on va se battre
contre cela.
Mais en fin de compte, les gens qui ont le
dernier mot ce sont nos membres. C'est à eux à
décider à chaque table de négociation de ce qu'ils
veulent faire.
On a affronté la pandémie, il y a de l'espoir au
bout du tunnel, on a été capable de se mettre
ensemble et de faire bloc contre ce virus-là. Si
on peut résister à un virus, on peut résister à ce
gouvernement également. C'est pour cela que nous
avons notre slogan « Nos héros en première ligne
méritent mieux que des zéros ».
Par travailleurs de première ligne, nous voulons
dire les travailleurs de la fonction publique et
j'inclus les travailleurs du secteur privé comme
ceux des épiceries, du commerce au détail et
d'autres qui font un travail phénoménal. Si on
peut avoir un salaire de base pour tous qui est
décent, c'est un peu comme la marée montante qui
fait lever tous les bateaux.
La situation ne peut plus durer comme elle est.
Nous avons des crises de rétention et de
recrutement dans presque tous les domaines des
services publics. Le gouvernement du
Nouveau-Brunswick ne reconnaît pas ce problème et
ce n'est pas son désir de le résoudre non plus.
Ce n'est pas un problème nouveau dans les
Maritimes. Beaucoup de gens qui ont voulu
améliorer leurs conditions de travail ont quitté
la province. Le Nouveau-Brunswick a même
enregistré des baisses de population dans les
dernières années. Les gens en âge de travailler
quittent en grand nombre, ceux qui restent sont
les gens plus âgés qui ont besoin de soins, mais
il y a moins de gens en âge de travailler qui
restent parce qu'ils ont voulu se faire une vie
ailleurs.
Les choses ont beaucoup
changé dans le secteur public. Avant, dans les
années 1970-1980, un travailleur voulait
finir sa carrière dans la fonction publique, avec
une bonne pension, un bon emploi, un bon salaire.
Cela comprend les travailleurs des métiers, comme
les soudeurs et autres. Les gens faisaient tout ce
qu'ils pouvaient pour avoir un emploi dans le
secteur public. Maintenant, c'est l'inverse. Le
secteur privé veut que la province s'occupe des
coûts de formation, qu'elle ramasse les jeunes qui
sortent des écoles et des collèges communautaires,
qui font leurs années d'apprentissage puis
finissent par se retrouver dans le secteur privé.
Les grands géants corporatifs comme Irving ont
fait beaucoup de pression sur le gouvernement
provincial pour inverser le rapport de force, pour
faire en sorte que ce soit le secteur privé qui
ramasse les travailleurs formés à même les fonds
publics. C'est une forme d'externalisation des
coûts de main-d'oeuvre des grandes entreprises.
Je pense que c'est un sujet de grande fierté de
travailler pour le secteur public. Mais les
conditions de travail et les salaires ont reculé.
Les travailleurs méritent de meilleurs salaires et
de meilleures conditions de travail. C'est ça la
question. Le SCFP-NB a dit très clairement au
premier ministre que nous ne sommes pas d'accord
avec le gel salarial et les restrictions
salariales que le gouvernement Higgs veut imposer
aux travailleurs du secteur public.
(Photos : FO)
Loi antiouvrière du gouvernement
du Manitoba
La Fédération du Travail du Manitoba, les
cabinets d'avocats en droit du travail et les
syndicats des secteurs public et privé ont tous
dénoncé la législation antiouvrière du
gouvernement Pallister, en particulier le projet
de loi 16 présenté récemment, la Loi pour
amender les relations de travail, qui vise à
légaliser la négation des droits des travailleurs.
Le président du Syndicat national des employées et
employés généraux et du secteur public (SNEGSP),
Larry Brown, a déclaré que « le projet de
loi 16 est particulièrement insultant dans le
contexte de la pandémie de la COVID-19, alors que
les travailleurs de première ligne risquent leur
vie pour offrir des services publics essentiels
aux Manitobains ». Dans un communiqué de
presse du 27 novembre, l'Alliance de la Fonction
publique du Canada affirme que « le premier
ministre Brian Pallister s'inspire de l'ordre du
jour du premier ministre de l'Alberta, Jason
Kenney, pour qui attaquer les droits des
travailleurs est presque devenu un travail à temps
plein ».
Le gouvernement conservateur du Manitoba a
présenté 33 projets de loi le 14
octobre, dont plusieurs modifient la législation
du travail. Le plus important est le projet de
loi 16, la Loi pour amender les relations
de travail, qui apporte des changements
significatifs, tous conçus pour affaiblir et
paralyser les organisations des travailleurs et
rendre la vie plus facile aux employeurs et à
l'État pour qu'ils puissent attaquer le droit des
travailleurs de s'organiser collectivement à la
défense de leurs intérêts. La presque totalité des
projets de loi déposés le 14 octobre, à
l'exception de ceux dont les mesures visent à
contenir la pandémie de la COVID-19, n'ont pas été
adoptés ni discutés à l'Assemblée législative en
date du 4 décembre.
Le projet de loi 16 fait partie des efforts
des forces néolibérales pour restructurer les
arrangements de l'État au provincial et au fédéral
dans le but de faciliter les stratagèmes pour
payer les riches et démanteler les arrangements
existants qui sont perçus comme des obstacles à
leur pouvoir illimité. Dans un effort pour cacher
son intention, la législation du travail, qui
réduit la protection des droits des travailleurs
et sape leurs collectifs, parle de « choix »
et de « protection ». Les conservateurs de
Brian Pallister, comme tous les autres partis
cartellisés, prétendent que, parce qu'ils ont été
élus, ils ont un mandat de faire ce qui leur plaît
et ils disent appliquer la volonté populaire. Le
leader du gouvernement à la Chambre des communes,
Kelvin Goertzen, a dit aux médias : « Notre
gouvernement a reçu des Manitobains les plus
imposantes majorités consécutives en plus
de 100 ans et notre ordre du jour législatif
est conforme à notre mandat de protéger les
Manitobains. »
Le projet de loi 16 « amende » la Loi
sur les relations de travail du Manitoba en
apportant des changements qui accordent plus de
pouvoirs aux employeurs et à l'État lui-même pour
s'immiscer dans les affaires des organisations des
travailleurs, faire en sorte qu'il sera plus
difficile pour les travailleurs de s'organiser
collectivement, et accorde plus de pouvoir aux
employeurs pour dicter les conditions de travail
et agir en tant que juge, juré et bourreau, avec
le pouvoir de congédier des travailleurs à cause
d'activités menées pendant une grève que
l'employeur juge inappropriées. Le projet de
loi 16 comprend plusieurs clauses qui le
rapprochent de la législation antiouvrière du
gouvernement Kenney en Alberta et de la
législation adoptée au fédéral par les
conservateurs de Stephen Harper.
Traits saillants du projet de loi 16
-Les employeurs pourront congédier des
travailleurs pour des activités menées au cours
d'une grève, ce qui remplace la restriction
actuelle selon laquelle un travailleur peut être
congédié seulement s'il est accusé d'une
infraction pénale ;
- pour qu'un syndicat soit certifié par la
Commission des relations de travail, il doit avoir
l'appui, sur la base de cartes signées et d'un
vote secret, de 40 % de la «
main-d'oeuvre anticipée » (actuellement,
c'est 40 % de la main-d'oeuvre réelle).
Il n'y a aucune définition du mot «
anticipée », mais le changement pourrait
définitivement affecter le travail saisonnier sur
les chantiers de construction. Si la Commission
détermine que le syndicat n'a pas l'appui
de 40 % de la « main-d'oeuvre
anticipée », elle peut retarder le vote ou
refuser la demande de certification. Cette mesure
permettrait aussi aux employeurs dans plusieurs
endroits de travail de prétendre que la COVID-19 a
réduit la main-d'oeuvre actuelle à des nombres de
loin inférieurs à la « main-d'oeuvre
anticipée » ;
- le projet de loi réduit le pourcentage requis
pour les travailleurs qui veulent changer de
syndicat de 45 % à 40 % ;
- il réduit le pourcentage de votes requis pour
décertifier un syndicat de 50 %
à 40 % ;
- il élimine totalement l'exigence pour un
employeur de notifier les travailleurs de
changements technologiques qui pourraient affecter
un nombre important de travailleurs alors qu'une
notification de 90 jours est exigée
actuellement ;
- il élimine l'exigence pour un employeur qui a
acheté une entreprise de garder les mêmes
travailleurs, leur syndicat et leur convention
collective, si la Commission convient que « la
nature de l'entreprise a substantiellement
changé » ;
- il retire l'intervention automatique de la
Commission dans le règlement d'une première
convention collective par arbitrage et stipule que
la partie qui demande l'arbitrage doit avoir
négocié de bonne foi, et élimine la disposition
actuelle voulant que la Commission peut arbitrer
une convention collective éventuelle si une grève
ou un lockout a duré plus de 60 jours ;
- il exige que les syndicats du secteur public
fassent vérifier leurs états financiers par un
vérificateur indépendant et fournissent leur bilan
financier vérifié aux membres. Cela révélerait
l'état financier du syndicat aux employeurs. Une
loi semblable, qui a été abrogée ultérieurement, a
été adoptée au fédéral en 2015 par le
gouvernement Harper, ainsi que par le gouvernement
Kenney en Alberta.
Cette attaque du gouvernement contre les
travailleurs et leurs collectifs arrive juste
après la défaite devant les tribunaux du projet de
loi 29 du gouvernement Pallister
de 2017, la Loi sur la durabilité des
services publics, qui aurait imposé un gel
des salaires au secteur public. En juin 2020,
la juge Joan McKelvey de la Cour du banc de la
Reine a décidé que le projet de loi 29
constituait une violation des droits des
travailleurs en vertu de la charte et « éliminait
tout véritable processus de négociation d'une
convention collective sur des questions
essentielles pour les membres d'un
syndicat ».
Arrêtez de payer les riches!
Investissez dans les programmes sociaux!
- Pierre Soublière -
Une des choses que la pandémie de la COVID-19
fait ressortir est à quel point des intérêts
privés ont la mainmise sur tous les aspects de
notre vie, y compris notre mode de gouvernance.
Cette situation a été mise en lumière de manière
tragique par l'incapacité des résidences privées
et des soins de longue durée pour aînés à faire
face à la pandémie et la nécessité de services
publics gérés et organisés pour répondre aux
besoins des patients et du personnel soignant. Par
exemple, l'un des problèmes qui est à nouveau
constamment soulevé durant cette deuxième vague
est la mobilité du personnel dans les résidences
en raison d'une pénurie de personnel et de la
dépendance sur les agences privées de placement
qui envoient les travailleurs d'un endroit de
travail à l'autre, ce qui accroît ainsi les
risques de contagion pour eux et pour les gens
qu'ils soignent.
Après les morts tragiques lors de la première
vague, le questionnement face aux résidences
gérées pour le profit au détriment du bien-être
des résidents était tel que le premier ministre du
Québec a vu la nécessité de laisser entendre que
le gouvernement envisagerait de «
nationaliser » les CHSLD privés. À peu près
au même moment, le ministre des Finances du Québec
commandait une étude de la part du Centre
interuniversitaire de recherche en analyse des
organisations (CIRANO) sur la place de la santé
dans la relance économique au Québec.
Fondé en 1994, le CIRANO est un organisme
subventionné, entre autres, par le gouvernement du
Québec, et dont les « partenaires » sont des
institutions des gouvernements fédéral et
québécois, telles la Banque de développement du
Canada et la Caisse de dépôt et de placement du
Québec, et de nombreuses grandes entreprises
privées, dont BMO Groupe Financier, Manuvie
Canada, Power Corporation du Canada, Bell Canada
et Rio Tinto.
Les études faites par ce centre d'analyse
abordent généralement les questions économiques et
sociales d'un point de vue qui encourage la
privatisation des services publics et des
programmes sociaux. En voici deux exemples :
« Les partenariats public-privé : une option
à découvrir », et « Le secteur privé dans un
système de santé public : France et pays
nordiques ». L'objectif explicite de cette
dernière est « de contribuer à crever et guérir
l'abcès le plus important empêchant l'amélioration
du système de santé québécois et canadien, à
savoir l'opposition irrationnelle de plusieurs
groupes politiques et groupes de pression à une
présence significative et intégrée
d'établissements et d'entreprises de soins de
santé, d'assurance et de fourniture directe, à but
lucratif ou non, dans notre système de
santé ».
C'est
exactement l'approche que prend cette étude
demandée par le gouvernement du Québec, intitulée
« La santé au coeur de la relance économique au
Québec » et publiée au mois de septembre
dernier. Sur la question des résidences pour
personnes âgées (RPA), faisant fi de toutes
preuves indiquant le contraire, les chercheurs
affirment : « Le gouvernement n'a pas les
moyens ni l'expertise nécessaires pour assumer
seul ce concept de RPA [...] Par RPA, nous
entendons des immeubles à logement privés destinés
à héberger des personnes âgées qui sont autonomes
ou semi-autonomes [...] Il existe dans le secteur
privé à but lucratif ou non une infrastructure et
des compétences pour réaliser ce projet pour
personnes aînées adaptées à leurs conditions de
santé. »
En plus, ayant déclaré que le gouvernement n'a
ni les moyens ni l'expertise, les auteurs du
rapport proposent tout de même que le gouvernement
subventionne les RPA pour l'équipement médical et
les services, c'est-à-dire que les fonds publics
doivent être mis à la disposition de propriétaires
privés et leurs actionnaires pour qu'ils puissent
continuer de faire le maximum de profit sur le dos
de nos aînés sans qu'ils aient eux-mêmes à
réinvestir les sommes arrachées aux aînés dans des
services qu'ils fournissent.
Sur la question des travailleurs de la santé,
ayant énuméré tous les problèmes bien connus dans
les services de santé, les auteurs du rapport
suggèrent comme « piste de solution »
l'amélioration de « l'organisation du
travail » par un ensemble de stratégies pour
« optimiser l'utilisation et la contribution des
travailleurs ». Ces « stratégies » se
résument généralement par « faire plus avec
moins ». Elles sont maintenant imposées par
le biais d'arrêtés ministériels qui sont
précisément ce qui a mené à la situation actuelle
et qui poussent littéralement les travailleurs de
première ligne à bout et permettent le
démantèlement incessant du système de santé
public. Grâce, en grande partie, aux efforts des
travailleurs et de leurs organisations pour faire
connaître les conditions de travail et les
conditions d'ensemble dans les milieux de la
santé, on peut prédire que ces « stratégies »
auront des conséquences tragiques pour le
bien-être du peuple. De toute évidence, les
travailleurs devront intensifier leur lutte pour
défendre leurs droits et les droits de tous, ainsi
que l'organisation politique pour proposer des
politiques indépendantes qui leur sont propres,
qui mettent fin au système de gouvernance des
partis qui servent les riches.
Balado l'Éducation est un droit
Dans cet épisode, le Dr Shane Miersch, ingénieur
biomédical au laboratoire Sidhu de l'Université de
Toronto, discute de l'état de la recherche en
laboratoire pour un traitement de la COVID-19
développé publiquement. Il donne aussi de
l'information sur le problème causé par les
gouvernements qui refusent d'élaborer des
solutions publiques à la pandémie afin de préparer
le Canada à faire face à de futures éclosions. Le
Dr Miersch décrit spécifiquement l'expérience
vécue par lui et ses collègues qui ont tenté
d'amener le gouvernement fédéral à reconnaître la
valeur qu'ils créent au lieu de distribuer de
grandes quantités de fonds publics à des monopoles
pharmaceutiques privés qui veulent profiter de la
pandémie. Écoutez le balado ici.
(Pour voir les articles
individuellement, cliquer sur le titre de
l'article.)
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