Arrêtez de payer les riches! Investissez dans les programmes sociaux!

Le démantèlement du système de santé publique du Québec n'est pas justifiable

Une des choses que la pandémie de la COVID-19 fait ressortir est à quel point des intérêts privés ont la mainmise sur tous les aspects de notre vie, y compris notre mode de gouvernance.

Cette situation a été mise en lumière de manière tragique par l'incapacité des résidences privées et des soins de longue durée pour aînés à faire face à la pandémie et la nécessité de services publics gérés et organisés pour répondre aux besoins des patients et du personnel soignant. Par exemple, l'un des problèmes qui est à nouveau constamment soulevé durant cette deuxième vague est la mobilité du personnel dans les résidences en raison d'une pénurie de personnel et de la dépendance sur les agences privées de placement qui envoient les travailleurs d'un endroit de travail à l'autre, ce qui accroît ainsi les risques de contagion pour eux et pour les gens qu'ils soignent.

Après les morts tragiques lors de la première vague, le questionnement face aux résidences gérées pour le profit au détriment du bien-être des résidents était tel que le premier ministre du Québec a vu la nécessité de laisser entendre que le gouvernement envisagerait de « nationaliser » les CHSLD privés. À peu près au même moment, le ministre des Finances du Québec commandait une étude de la part du Centre interuniversitaire de recherche en analyse des organisations (CIRANO) sur la place de la santé dans la relance économique au Québec.

Fondé en 1994, le CIRANO est un organisme subventionné, entre autres, par le gouvernement du Québec, et dont les « partenaires » sont des institutions des gouvernements fédéral et québécois, telles la Banque de développement du Canada et la Caisse de dépôt et de placement du Québec, et de nombreuses grandes entreprises privées, dont BMO Groupe Financier, Manuvie Canada, Power Corporation du Canada, Bell Canada et Rio Tinto.

Les études faites par ce centre d'analyse abordent généralement les questions économiques et sociales d'un point de vue qui encourage la privatisation des services publics et des programmes sociaux. En voici deux exemples : « Les partenariats public-privé : une option à découvrir », et « Le secteur privé dans un système de santé public : France et pays nordiques ». L'objectif explicite de cette dernière est « de contribuer à crever et guérir l'abcès le plus important empêchant l'amélioration du système de santé québécois et canadien, à savoir l'opposition irrationnelle de plusieurs groupes politiques et groupes de pression à une présence significative et intégrée d'établissements et d'entreprises de soins de santé, d'assurance et de fourniture directe, à but lucratif ou non, dans notre système de santé ».

C'est exactement l'approche que prend cette étude demandée par le gouvernement du Québec, intitulée « La santé au coeur de la relance économique au Québec » et publiée au mois de septembre dernier. Sur la question des résidences pour personnes âgées (RPA), faisant fi de toutes preuves indiquant le contraire, les chercheurs affirment : « Le gouvernement n'a pas les moyens ni l'expertise nécessaires pour assumer seul ce concept de RPA [...] Par RPA, nous entendons des immeubles à logement privés destinés à héberger des personnes âgées qui sont autonomes ou semi-autonomes [...] Il existe dans le secteur privé à but lucratif ou non une infrastructure et des compétences pour réaliser ce projet pour personnes aînées adaptées à leurs conditions de santé. »

En plus, ayant déclaré que le gouvernement n'a ni les moyens ni l'expertise, les auteurs du rapport proposent tout de même que le gouvernement subventionne les RPA pour l'équipement médical et les services, c'est-à-dire que les fonds publics doivent être mis à la disposition de propriétaires privés et leurs actionnaires pour qu'ils puissent continuer de faire le maximum de profit sur le dos de nos aînés sans qu'ils aient eux-mêmes à réinvestir les sommes arrachées aux aînés dans des services qu'ils fournissent.

Sur la question des travailleurs de la santé, ayant énuméré tous les problèmes bien connus dans les services de santé, les auteurs du rapport suggèrent comme « piste de solution » l'amélioration de « l'organisation du travail » par un ensemble de stratégies pour « optimiser l'utilisation et la contribution des travailleurs ». Ces « stratégies » se résument généralement par « faire plus avec moins ». Elles sont maintenant imposées par le biais d'arrêtés ministériels qui sont précisément ce qui a mené à la situation actuelle et qui poussent littéralement les travailleurs de première ligne à bout et permettent le démantèlement incessant du système de santé public. Grâce, en grande partie, aux efforts des travailleurs et de leurs organisations pour faire connaître les conditions de travail et les conditions d'ensemble dans les milieux de la santé, on peut prédire que ces « stratégies » auront des conséquences tragiques pour le bien-être du peuple. De toute évidence, les travailleurs devront intensifier leur lutte pour défendre leurs droits et les droits de tous, ainsi que l'organisation politique pour proposer des politiques indépendantes qui leur sont propres, qui mettent fin au système de gouvernance des partis qui servent les riches.

(Photos : FIQ, F. Couto)


Cet article est paru dans

Numéro 84 - Numéro 84 - 15 décembre 2020

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Arrêtez de payer les riches! Investissez dans les programmes sociaux!: Le démantèlement du système de santé publique du Québec n'est pas justifiable - Pierre Soublière


    

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