Loi antiouvrière du gouvernement
du Manitoba
Le projet de loi 16 s'attaque aux travailleurs et à leurs organisations de défense
La Fédération du Travail du Manitoba, les
cabinets d'avocats en droit du travail et les
syndicats des secteurs public et privé ont tous
dénoncé la législation antiouvrière du
gouvernement Pallister, en particulier le projet
de loi 16 présenté récemment, la Loi pour
amender les relations de travail, qui vise à
légaliser la négation des droits des travailleurs.
Le président du Syndicat national des employées et
employés généraux et du secteur public (SNEGSP),
Larry Brown, a déclaré que « le projet de
loi 16 est particulièrement insultant dans le
contexte de la pandémie de la COVID-19, alors que
les travailleurs de première ligne risquent leur
vie pour offrir des services publics essentiels
aux Manitobains ». Dans un communiqué de
presse du 27 novembre, l'Alliance de la Fonction
publique du Canada affirme que « le premier
ministre Brian Pallister s'inspire de l'ordre du
jour du premier ministre de l'Alberta, Jason
Kenney, pour qui attaquer les droits des
travailleurs est presque devenu un travail à temps
plein ».
Le gouvernement conservateur du Manitoba a
présenté 33 projets de loi le 14
octobre, dont plusieurs modifient la législation
du travail. Le plus important est le projet de
loi 16, la Loi pour amender les relations
de travail, qui apporte des changements
significatifs, tous conçus pour affaiblir et
paralyser les organisations des travailleurs et
rendre la vie plus facile aux employeurs et à
l'État pour qu'ils puissent attaquer le droit des
travailleurs de s'organiser collectivement à la
défense de leurs intérêts. La presque totalité des
projets de loi déposés le 14 octobre, à
l'exception de ceux dont les mesures visent à
contenir la pandémie de la COVID-19, n'ont pas été
adoptés ni discutés à l'Assemblée législative en
date du 4 décembre.
Le projet de loi 16 fait partie des efforts
des forces néolibérales pour restructurer les
arrangements de l'État au provincial et au fédéral
dans le but de faciliter les stratagèmes pour
payer les riches et démanteler les arrangements
existants qui sont perçus comme des obstacles à
leur pouvoir illimité. Dans un effort pour cacher
son intention, la législation du travail, qui
réduit la protection des droits des travailleurs
et sape leurs collectifs, parle de « choix »
et de « protection ». Les conservateurs de
Brian Pallister, comme tous les autres partis
cartellisés, prétendent que, parce qu'ils ont été
élus, ils ont un mandat de faire ce qui leur plaît
et ils disent appliquer la volonté populaire. Le
leader du gouvernement à la Chambre des communes,
Kelvin Goertzen, a dit aux médias : « Notre
gouvernement a reçu des Manitobains les plus
imposantes majorités consécutives en plus
de 100 ans et notre ordre du jour législatif
est conforme à notre mandat de protéger les
Manitobains. »
Le projet de loi 16 « amende » la Loi
sur les relations de travail du Manitoba en
apportant des changements qui accordent plus de
pouvoirs aux employeurs et à l'État lui-même pour
s'immiscer dans les affaires des organisations des
travailleurs, faire en sorte qu'il sera plus
difficile pour les travailleurs de s'organiser
collectivement, et accorde plus de pouvoir aux
employeurs pour dicter les conditions de travail
et agir en tant que juge, juré et bourreau, avec
le pouvoir de congédier des travailleurs à cause
d'activités menées pendant une grève que
l'employeur juge inappropriées. Le projet de
loi 16 comprend plusieurs clauses qui le
rapprochent de la législation antiouvrière du
gouvernement Kenney en Alberta et de la
législation adoptée au fédéral par les
conservateurs de Stephen Harper.
Traits saillants du projet de loi 16
-Les employeurs pourront congédier des
travailleurs pour des activités menées au cours
d'une grève, ce qui remplace la restriction
actuelle selon laquelle un travailleur peut être
congédié seulement s'il est accusé d'une
infraction pénale ;
- pour qu'un syndicat soit certifié par la
Commission des relations de travail, il doit avoir
l'appui, sur la base de cartes signées et d'un
vote secret, de 40 % de la «
main-d'oeuvre anticipée » (actuellement,
c'est 40 % de la main-d'oeuvre réelle).
Il n'y a aucune définition du mot «
anticipée », mais le changement pourrait
définitivement affecter le travail saisonnier sur
les chantiers de construction. Si la Commission
détermine que le syndicat n'a pas l'appui
de 40 % de la « main-d'oeuvre
anticipée », elle peut retarder le vote ou
refuser la demande de certification. Cette mesure
permettrait aussi aux employeurs dans plusieurs
endroits de travail de prétendre que la COVID-19 a
réduit la main-d'oeuvre actuelle à des nombres de
loin inférieurs à la « main-d'oeuvre
anticipée » ;
- le projet de loi réduit le pourcentage requis
pour les travailleurs qui veulent changer de
syndicat de 45 % à 40 % ;
- il réduit le pourcentage de votes requis pour
décertifier un syndicat de 50 %
à 40 % ;
- il élimine totalement l'exigence pour un
employeur de notifier les travailleurs de
changements technologiques qui pourraient affecter
un nombre important de travailleurs alors qu'une
notification de 90 jours est exigée
actuellement ;
- il élimine l'exigence pour un employeur qui a
acheté une entreprise de garder les mêmes
travailleurs, leur syndicat et leur convention
collective, si la Commission convient que « la
nature de l'entreprise a substantiellement
changé » ;
- il retire l'intervention automatique de la
Commission dans le règlement d'une première
convention collective par arbitrage et stipule que
la partie qui demande l'arbitrage doit avoir
négocié de bonne foi, et élimine la disposition
actuelle voulant que la Commission peut arbitrer
une convention collective éventuelle si une grève
ou un lockout a duré plus de 60 jours ;
- il exige que les syndicats du secteur public
fassent vérifier leurs états financiers par un
vérificateur indépendant et fournissent leur bilan
financier vérifié aux membres. Cela révélerait
l'état financier du syndicat aux employeurs. Une
loi semblable, qui a été abrogée ultérieurement, a
été adoptée au fédéral en 2015 par le
gouvernement Harper, ainsi que par le gouvernement
Kenney en Alberta.
Cette attaque du gouvernement contre les
travailleurs et leurs collectifs arrive juste
après la défaite devant les tribunaux du projet de
loi 29 du gouvernement Pallister
de 2017, la Loi sur la durabilité des
services publics, qui aurait imposé un gel
des salaires au secteur public. En juin 2020,
la juge Joan McKelvey de la Cour du banc de la
Reine a décidé que le projet de loi 29
constituait une violation des droits des
travailleurs en vertu de la charte et « éliminait
tout véritable processus de négociation d'une
convention collective sur des questions
essentielles pour les membres d'un
syndicat ».
Cet article est paru dans
Numéro 84 - Numéro 84 - 15 décembre 2020
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