Numéro 77 - 12 novembre 2020
Les travailleurs intensifient leur lutte
pour freiner la COVID-19
Les revendications des travailleurs
doivent être satisfaites!
Les infirmières et les préposées aux
bénéficiaires de Gatineau manifestent contre les
décrets ministériels du gouvernement du Québec qui
bafouent leurs droits, le 6 novembre 2020.
Soins de santé
• Les travailleurs de la
santé demandent l'équipement de protection
individuelle qu'ils jugent approprié
• Luttons pour un système
de santé moderne et humain! - Pierre
Soublière
• Le droit des
travailleurs à des conditions sécuritaires est
essentiel pour contrôler la COVID-19 -
Entrevue avec Jason MacLean
Travailleurs d'entretien à la Société de transport
de Montréal
• Maintenir les
travailleurs informés et mobilisés pour que les
normes sanitaires soient appliquées -
Entrevue avec Gleason Frenette
Les travailleurs intensifient leur
lutte pour freiner la COVID-19
Rassemblement en appui aux travailleurs de la
santé devant le Centre McDougall à Calgary, le 2
novembre 2020
Alors que la deuxième vague d'infections se
propage à l'échelle du pays, les travailleurs de
tous les secteurs et leurs organisations mettent
de l'avant leurs revendications et intensifient
leurs actions pour freiner la pandémie. Ce numéro
de Forum ouvrier fournit des exemples qui
montrent clairement que les revendications des
travailleurs du Canada et du Québec reposent sur
les leçons apprises de la première vague de la
pandémie et sont essentielles au développement de
guides qui doivent être mis en oeuvre pour éviter
les ravages de l'infection. Par exemple, les
travailleurs et travailleuses de la santé des
centres de soins de longue durée et d'autres
établissements de santé luttent pour garantir que
les désastres de la première vague ne se répètent
pas dans les centres de soins de longue durée.
Les conclusions de la Commission d'enquête sur le
SRAS de 2006, confirmées par l'expérience de
la première vague de la pandémie, soulignent qu'il
est nécessaire d'appliquer le principe de
précaution selon lequel le plus haut niveau de
protection doit être fourni aux travailleurs de la
santé. En se basant sur la science et sur leur
expérience, les travailleurs demandent que les
équipements de protection individuelle (ÉPI)
adéquats comprennent des masques N95 qui doivent
être fournis à tous les travailleurs qui en ont
besoin, selon ce que les travailleurs eux-mêmes
décident.
Au lieu d'établir des guides en ce moment crucial
en collaboration avec les travailleurs et de
combler leurs besoins en conditions de travail qui
leur permettent d'accomplir leur devoir et de
protéger la population, les gouvernements de tous
niveaux écartent du revers de la main les
revendications des travailleurs et invoquent
plutôt des « mesures d'urgence » qui servent
de prétexte à la violation des conventions
collectives et à l'adoption de lois, au nom des
intérêts privés, qui attaquent des droits
fondamentaux des travailleurs.
Les travailleurs ripostent et mènent des actions
à l'échelle du pays, des pétitions, des grèves,
des sit-in, des blocus de ponts et plusieurs
autres actions de résistance. Les travailleurs
affirment ainsi qu'ils n'ont d'autre choix que
d'alerter la société tout entière que l'enjeu est
l'avenir d'un système de santé publique moderne
qui est capable de garantir le bien-être du
peuple.
(Photo: FO)
Soins de
santé
Les travailleurs de la santé des centres de
soins de longue durée, des résidences offrant des
services et des résidences pour personnes âgées
ont été aux premières lignes de la lutte pour les
conditions nécessaires pour protéger la santé et
la vie des patients, des résidents et du
personnel. Depuis le début de la pandémie, les
travailleurs de la santé ont pris les devants dans
la lutte pour ce qui est nécessaire sur leur lieu
de travail, y compris le dépistage des patients et
du personnel, l'accroissement du travail à plein
temps sur un site, l'arrêt des déplacements du
personnel entre les sites, la fourniture de
l'équipement de protection individuelle (ÉPI) et
la formation dans son utilisation, et de
nombreuses autres mesures.
Alors que les cas de COVID-19 montent en flèche à
travers le Canada pendant la deuxième vague, un
nombre alarmant d'éclosions ont déjà eu lieu.
Au 14 octobre, il y avait des éclosions de
COVID-19 dans 120 centres de soins de longue
durée et plus de 100 maisons de retraite à
l'échelle du Canada. Le nombre des éclosions et
des décès dans les centres de soins de longue
durée a augmenté de manière significative depuis
cette date. Les travailleurs de la santé et leurs
organisations demandent de nouvelles mesures qui
doivent être prises de toute urgence pour
maîtriser la transmission dans les hôpitaux et les
centres de soins de longue durée.
La
Fédération canadienne des syndicats d'infirmières
et infirmiers (FCSII) a publié un résumé mis à
jour de la recherche sur la COVID-19 sur son site
Web le 16 octobre. La Fédération demande au
gouvernement canadien de reconnaître la science
émergente sur la transmission de la COVID-19 et de
modifier son guide des conseils aux professionnels
de la santé « pour qu'ils reconnaissent que le
virus se propage à la fois par l'inhalation de
particules en aérosol à courte distance (moins de
deux mètres) et par transmission aérienne sur de
longues distances ». La FCSII a fourni des
preuves que les guides actuels qui limitent le
besoin de masques N95 aux travailleurs de la santé
qui effectuent seulement certaines procédures
doivent être remplacés et que les masques N95
devraient être la norme pour tout le personnel qui
travaille là où des cas de COVID-19 sont suspectés
ou confirmés. Cela comprendrait non seulement les
infirmières, mais aussi ceux et celles qui
fournissent des soins directs aux résidents des
centres de soins de longue durée, ainsi qu'aux
autres travailleurs des hôpitaux et des autres
établissements de soins de santé.
Le principe de précaution
Depuis le début de la pandémie, la FCSII et
d'autres syndicats qui représentent les
travailleurs de la santé ont demandé aux
gouvernements de mettre en oeuvre les conclusions
du Rapport final (2006) de l'enquête de la
Commission ontarienne sur le SRAS. Une des
conclusions les plus importantes de cette enquête
a été la nécessité de respecter le principe de
précaution, qui prescrit le niveau de protection
le plus élevé aux travailleurs de la santé.
Dans sa prise de position sur la COVID-19
publiée le 23 mars 2020, la FCSII cite
la déclaration du juge Campbell, président de la
Commission sur le SRAS, dans le rapport final de
la Commission dans lequel il souligne que la
question n'est pas de savoir qui a raison et qui a
tort au sujet de la transmission par voie
aérienne. Il écrit que lorsqu'il est question de
la sécurité des travailleurs, la politique adoptée
devrait être guidée par « le principe de
précaution selon lequel des mesures raisonnables
pour réduire les risques ne devraient pas attendre
la certitude scientifique ».
La FCSII soutient qu'il existe désormais des
preuves substantielles que la transmission par
aérosol n'est pas rare mais constitue une source
importante de transmission de la COVID-19. Les
recherches montrent que le risque est le plus
élevé dans les espaces intérieurs mal ventilés et
surpeuplés, comme les établissements de soins de
longue durée plus anciens, où ces précautions sont
encore plus urgemment requises compte tenu de leur
population vulnérable.
La FCSII conclut que « par conséquent, le Canada
doit modifier ses directives à l'intention des
professionnels de la santé pour reconnaître que le
virus se propage à la fois par l'inhalation de
particules en aérosol à courte distance (moins
de 2 mètres) et par transmission aérienne sur
de longues distances ».
L'Agence de la santé publique du Canada (ASPC) a
finalement mis à jour ses guides relatifs à la
transmission de la COVID-19, le 4 novembre. Elle
écrit:
« Le SRAS-CoV-2, le virus responsable de la
COVID-19, se transmet d'une personne infectée à
d'autres par des gouttelettes respiratoires et des
aérosols créés lorsqu'une personne infectée
tousse, éternue, chante, crie ou parle.
« La taille des gouttelettes est variable, allant
de grosses gouttelettes qui tombent rapidement au
sol (en quelques secondes ou minutes) près de la
personne infectée, à des gouttelettes plus
petites, parfois appelées aérosols, qui restent
dans l'air dans certaines circonstances. »
Bien que l'ASPC reconnaisse la transmission par
aérosols, elle recommande uniquement que des
masques à trois couches soient utilisés par les
Canadiens et elle garde le silence sur le besoin
d'élever le niveau d'ÉPI pour les travailleurs de
la santé, notamment par les masques N95, de même
que sur l'urgence d'améliorer la ventilation.
Chaque décès évitable est un décès de trop.
Chaque infection et maladie évitable est une de
trop. Pour les gouvernements, ignorer à la fois la
science et les solutions proposées par les
travailleurs de la santé qui savent ce qui est
nécessaire n'est pas seulement le reflet qu'ils
abdiquent leur responsabilité sociale mais c'est
aussi de la négligence grave. Forum ouvrier
demande à tous les travailleurs du Canada et du
Québec de donner leur entier appui aux demandes
des travailleurs de la santé pour les masques N95
et d'autres mesures essentielles qu'ils jugent
nécessaires sur la base de leur expérience et de
leur expertise.
(Photo: Association des
infirmières et infirmiers du Canada)
- Pierre Soublière -
Les infirmières et les préposées aux
bénéficiaires manifestent devant
l'hôpital de Gatineau, le 6 novembre 2020
Des centaines d'infirmières et de préposées aux
bénéficiaires ont manifesté devant les hôpitaux de
Hull et de Gatineau vendredi le 6 novembre.
Elles dénoncent vivement les récentes mesures du
CISSSO (Centre intégré de santé et de services
sociaux de l'Outaouais) qui imposent aux personnes
à temps partiel de travailler des horaires à temps
complet. Ces mesures de l'employeur sont rendues
possibles par un arrêté ministériel du mois de
mars dernier stipulant que les dispositions de
conventions collectives dans le réseau de la santé
peuvent être modifiées. Cela permet, entre autres,
à la direction des CISSS d'annuler les vacances
des employées et de forcer celles-ci à travailler
à temps complet malgré la volonté de certaines de
conserver un horaire à temps partiel. L'arrêté
prévoit même des sanctions, par exemple, des
amendes allant de 1 000
à 6 000 dollars.
Le CISSSO invoque la
nécessité de répondre « aux besoins grandissants
des hôpitaux de Hull et Gatineau pour desservir
les besoins liés notamment à la COVID-19 ».
Il invoque aussi la pénurie de main-d'oeuvre qui
est particulièrement aigüe dans l'Outaouais,
quoique pas unique à la région. Les syndicats,
depuis bien avant la pandémie, et maintenant aux
tables de négociation, ont mis de l'avant une
série de mesures qui doivent être prises pour
remédier à ce problème, mesures qui ont tout à
voir avec l'amélioration de leurs conditions de
travail. Les mesures imposées présentement par le
CISSSO sont précisément pourquoi les gens
abandonnent, soit parce qu'ils tombent malades, ou
sont au bout du rouleau et démissionnent. Par
exemple, au moins 41 employés du CISSSO sont
présentement atteints du virus de la COVID-19.
Devant cette situation, la semaine dernière
c'était au tour des travailleurs de la santé de
Trois-Rivières de manifester sur le pont Lejeune
pour alerter la population sur la situation des
démissions et le refus du gouvernement d'agir pour
remédier à la situation. Comme d'autres, ils se
font dire dans leur milieu de travail que s'ils ne
sont pas contents, ils n'ont qu'à aller travailler
ailleurs. Ils ont fait valoir qu'ils luttaient
pour l'avenir de la santé, car ils craignent un
bris total du système de santé si les choses ne
changent pas.
Pour montrer à quel point les employeurs en santé
refusent de collaborer avec les travailleurs de la
santé, même lorsqu'il est question de la sécurité
des employés, des patients et des résidents des
centres, la FIQ (Fédération interprofessionnelle
de la santé du Québec) annonçait le 28
octobre qu'elle a dû faire des démarches auprès de
la Cour supérieure pour que les syndicats puissent
avoir accès aux lieux de travail pour inspecter
les systèmes de ventilation et analyser la qualité
de l'air. La démarche avait été faite par rapport
au CHSLD Lionel-Émond dans l'Outaouais et au CHSLD
Vigi Mont-Royal. Dans ce dernier, tous
les 223 résidents ont été infectés et 68
sont décédés, et un grand nombre de travailleurs
de la santé ont aussi été déclarés positifs à la
COVID-19. Suite à cette démarche, le Tribunal
administratif du travail a ordonné à Vigi Santé
Ltée et au CISSS de l'Outaouais de donner aux
syndicats l'accès aux lieux de travail pour
inspecter les systèmes de ventilation et analyser
la qualité de l'air. Le tribunal a réaffirmé
l'importance du partenariat entre les syndicats et
les employeurs pour éliminer les dangers à la
source, comme le prévoit la Loi sur la santé
et la sécurité du travail.
La société d'aujourd'hui, avec son économie
hautement socialisée, est basée sur une
collaboration entre les travailleurs d'un secteur
et entre secteurs. Cette collaboration est
d'autant plus nécessaire en ce moment en temps de
pandémie où la préoccupation générale est de
veiller à la sécurité des gens qui travaillent et
des gens dont ils s'occupent.
Pourquoi le gouvernement, lui, avec ses appels à
« se serrer les coudes » pour surmonter la
pandémie, refuse-t-il de collaborer pour le
bien-être de tous et pour le bien commun ?
(Photos: FIQ)
- Entrevue avec Jason MacLean -
Jason MacLean est le président du Syndicat
des employés du gouvernement de la
Nouvelle-Écosse
Forum ouvrier : Il y a des
flambées virulentes de COVID-19 partout au pays.
Peux-tu nous dire quelle est la situation en
Nouvelle-Écosse ?
Le président du NSGEU Jason MacLean en
conférence de presse sur la deuxième vague
de la COVID-19, en novembre 2020
|
Jason Maclean : Nous avons
ici la bulle atlantique qui rend notre région un
peu unique par rapport aux autres régions du
Canada. La bulle atlantique comprend les résidents
du Nouveau-Brunswick, de la Nouvelle-Écosse, de
l'Île-du-Prince-Édouard et de
Terre-Neuve-et-Labrador. Ils peuvent se déplacer
librement dans les quatre provinces sans avoir à
s'isoler. Ils peuvent se déplacer librement comme
s'ils se déplaçaient dans leur propre province.
Mais si un Néo-Écossais, par exemple, se rend au
Québec, en Colombie-Britannique, en Ontario ou
dans toute autre province à l'extérieur de la
bulle, ou dans tout autre pays, il doit
s'auto-isoler à son retour.
Présentement, nous avons des éclosions dans
toutes les provinces de l'Atlantique.
Par exemple, en ce moment, en Nouvelle-Écosse,
nous avons quelques zones d'éclosions dans la zone
centrale, qui est la région d'Halifax, et dans la
zone nord. Hier, (9 novembre), sur Youtube, le
premier ministre de la Nouvelle-Écosse et le
médecin hygiéniste en chef ont fait le point sur
deux concentrations d'infections différentes que
nous connaissons présentement en Nouvelle-Écosse.
On craint que ce soit une propagation au sein de
la communauté. Hier, nous avons eu 16 cas
actifs qui ont été comptabilisés dans ces deux
zones d'infections. Ils ont identifié plusieurs
zones de contamination possible par contact. Il y
a une concentration de cas d'infection dans la
région appelée Clayton Park à Halifax. Dans tout
le centre-ville d'Halifax et dans quelques autres
endroits, ils disent aux gens que si vous vous
trouviez dans certaines régions entre telle ou
telle heure et telle ou telle date, vous devez
passer un test de dépistage. Ils font leur
recherche de contacts et tout le reste. De plus,
Santé Nouvelle-Écosse a envoyé un message à tout
son personnel selon lequel s'ils se trouvaient
dans ce secteur, ils ne doivent pas aller
travailler et doivent se faire dépister. Il existe
également une autre concentration de cas dans la
région nord de la province. Toute la province
attend des mises à jour parce que je crois qu'il y
aura de nouveaux cas d'infections dans les
prochains jours, car ceux qui étaient dans ces
régions seront testés. À l'heure actuelle, les
données semblent indiquer que ces cas sont causés
par des travailleurs provenant d'autres provinces
ou des travailleurs des provinces atlantiques qui
ont voyagé à l'extérieur et sont revenus sans
s'isoler, principalement parce que la province n'a
pas fait respecter les procédures
d'auto-isolement.
FO : Comment le syndicat
réagit-il à ces flambées qui se produisent afin de
freiner la propagation de la COVID-19 ?
JM : Nous devons être prêts
pour la deuxième vague de la pandémie. Nous venons
de faire une demande à Santé Nouvelle-Écosse pour
connaître leurs inventaires d'équipement de
protection individuelle (ÉPI), comme le masque N95
et d'autres équipements. Nous allons tenir une
réunion avec eux pour voir quels sont leurs
inventaires afin de nous assurer que l'ÉPI
nécessaire est disponible. Nous réitérons à nos
membres que ce n'est pas fini et que nous devons
être vigilants.
Il existe de nouvelles
études qui parlent de la propagation du virus sous
forme d'aérosols. Nous voulons nous asseoir avec
les employeurs et avoir cette discussion.
Allons-nous utiliser davantage les masques
N95 ? Que peut-on faire d'autre pour réduire
le risque que des personnes contractent le virus
et le propagent ? Lorsque nos membres ont
besoin de cet équipement, nous exigeons qu'il leur
soit fourni. Nous informons nos membres du droit
de refuser un travail dangereux. Nous l'avons fait
tout au long de cette pandémie et nous le faisons
maintenant pendant la deuxième vague. Nous
travaillons avec les comités de santé et de
sécurité au travail. Ils sont essentiels pour
faire avancer les choses dans les endroits de
travail où il y une tendance à vouloir contourner
les mécanismes de santé/sécurité. Nous nous
appuyons sur les comités de santé et de sécurité
au travail si nous estimons qu'un employeur
néglige la santé et la sécurité. Les gens doivent
aller au travail, ils doivent être en sécurité au
travail et l'employeur doit faire tout ce qui est
possible pour assurer leur sécurité ; -
visières, masques adéquats, blouses et ainsi de
suite. Les gens ont besoin de tout cela. Nous
continuons à mettre de l'avant ces enjeux à mesure
qu'ils surgissent.
En ce moment, nous voyons des entités comme Santé
Nouvelle-Écosse dire à leurs employés de ne pas se
présenter au travail s'ils travaillent dans ces
secteurs. Mais nous n'entendons rien de la part du
secteur des soins de longue durée ou du secteur
des soins à domicile qui sont des secteurs clé
pour freiner la propagation. Une seule
organisation de la province a envoyé un message à
ses employés. C'est un bon geste de la part de
Santé Nouvelle-Écosse, mais qu'en est-il des
employeurs qui devraient transmettre des messages
similaires et démontrer qu'ils se soucient des
travailleurs des soins de longue durée, des soins
à domicile et d'autres types de soins de
santé ?
Nous devons transmettre le message aux gens que
la COVID-19 ne disparaîtra pas de si tôt, nous
devons donc rester vigilants.
En Nouvelle-Écosse, nous faisons tout ce que nous
pouvons pour être très au fait de la situation.
(Photos: FO, NSGEU)
Travailleurs
d'entretien à la Société de transport de
Montréal
- Entrevue avec Gleason Frenette -
Manifestation des employés d'entretien de la
Société de transport de Montréal, le 13 septembre
2018, pendant les négociations pour le
renouvellement de leur convention collective où
ils ont repoussé les demandes de concessions de
leur employeur
Gleason Frenette est le président du
Syndicat du transport de Montréal (STM-CSN)
Forum ouvrier : Quelle est la
situation à la Société de transport de Montréal
(STM) en ce qui concerne les cas d'infection à la
COVID-19 ?
Gleason Frenette : À la STM,
nous en sommes à environ 221 cas d'infection
depuis le début de la pandémie. Pendant la
première vague, nous avons eu environ 130 cas
d'infection. Et il y en a près de 100 depuis
le début de la deuxième vague. Environ soixante
pour cent des cas sont des
chauffeurs, 30 % des employés
d'entretien et l'autre 10 % est réparti
dans les autres accréditations incluant les
gestionnaires. Nous sommes
environ 10 500 employés à la STM, et
plus de 3 000 d'entre eux sont en
télétravail.
FO : Quel travail fait le
syndicat pour mobiliser les travailleurs dans la
lutte pour freiner la COVID-19 ?
GF : Nous avons dû annuler les
instances normales. Normalement, on tient un
conseil syndical ou une assemblée générale à
toutes les trois semaines en présentiel,
maintenant on ne peut plus le faire. Maintenant
nous tenons nos instances sur la plateforme zoom,
de façon virtuelle. Nous avons tenu un Conseil
syndical en octobre, nous tenons une assemblée
générale le 10 novembre.
Nous maintenons les processus habituels, comme si
les gens étaient présents. Nous présentons des
rapports sur la situation, les membres votent sur
les résolutions.
Nous avons ajusté nos services en conséquence.
Nous nous sommes mis en télétravail. Tous les
travailleurs du bureau sont en télétravail à la
maison. Nous sommes très actifs du point de vue
des communications. Nous avons encouragé nos
membres à se joindre à notre groupe privé sur
Facebook. Nous sommes passés d'un peu plus
de 1000 participants au début de la pandémie
à plus de 1900 participants maintenant. Les
membres s'inscrivent sur la page et nous vérifions
qui fait la demande pour nous assurer qu'il s'agit
bien de nos membres. Nous acceptons les retraités.
Nous les informons notamment en ce qui concerne le
régime de retraite. Plusieurs posent des questions
là-dessus, comment se comportent les placements
pendant la pandémie et ils sont inquiets aussi de
savoir si la STM va maintenir les rentes.
Sur notre page Facebook je fais des suivis
réguliers, nous avons 76 suivis de faits à
l'heure actuelle. Le suivi informe les
travailleurs sur toutes les questions dans la vie
du syndicat. L'information sur la pandémie est
importante dans ces suivis. Il y a des rapports
réguliers sur quels nouveaux cas ont été déclarés,
dans quel secteur ils sont, s'il s'agit d'un de
nos membres, sur quel quart de travail cela s'est
produit. Le but est de sensibiliser le monde à
rester vigilants et à accentuer la vigilance
lorsque plusieurs cas s'ajoutent.
À chaque fois qu'un suivi est publié sur la page
Facebook, il peut y avoir une centaine de
commentaires, des questions auxquelles on répond,
sur tous les aspects, le régime de retraite, la
vie syndicale, la pandémie, tous les sujets.
FO : Comment ça va en ce qui
concerne les normes sanitaires pour lesquelles
vous vous êtes battus ?
GF :
Cela va assez bien mais il y a un hic. C'est que
normalement on participe aux enquètes quand il y a
un accident de travail, on fait des enquêtes
paritaires. La STM, pour les cas positifs à la
COVID-19, fait une enquête à chaque fois. Ce
devrait être l'INSPQ (Institut national de santé
publique du Québec) qui le fait, mais ils n'ont
pas les ressources alors ils ont délégué cela à la
STM. Selon nous, la STM était dans une situation
de conflit d'intérêts parce que quand une enquête
relative à la COVID est faite, s'il y a une
personne infectée qui a été en contact avec
d'autres, ils doivent être envoyés en quarantaine,
rémunérés. En tout cas chez nous, ils sont
rémunérés. Nous voulons que l'enquête soit
paritaire, mais la STM ne l'a jamais accepté,
alors nous sommes en arbitrage là-dessus. Ce
serait normal que nous participions aux enquêtes
parce que cela touche la santé et la sécurité des
travaillleurs, comme si c'était un accident de
travail.
Nous avons fait des ententes avec la STM pour
ajouter des ressources pour la désinfection. Au
début, c'était une entente pour engager des
étudiants plus tôt que prévu. D'habitude c'est à
la fin juin, mais nous nous sommes entendus pour
les engager au mois de mai parce que les étudiants
n'allaient pas à l'école. On s'est entendu pour
que les autres accréditations syndicales, les
employés de bureau, les professionnels, même les
ingénieurs, viennent prêter main forte à la
désinfection. Après la première vague, alors que
les étudiants allaient retourner à l'école à la
fin-août, nous avons fait une entente pour une
embauche rapide massive de préposés pour faire la
désinfection. Nous avons fait voter l'entente par
les membres par courriel parce que cela modifiait
la convention collective et que cela prenait
l'approbation des membres.
Pendant la première vague, nous avons mis
l'accent sur la santé et la sécurité avec notre
comité de santé-sécurité et les membres de
l'exécutif qui prenaient des informations chaque
jour auprès de la structure syndicale dans tous
les secteurs. C'était pour savoir comment cela se
passait afin de mettre en place le plus rapidement
possible les mesures de distanciation sociale, les
mesures de protection, les équipements de
protection. Il a fallu mettre de la pression sur
l'employeur parce que cela ne marchait pas au
rythme où on voulait. Nous avons fait des refus de
travail collectifs et individuels pour inciter
l'employeur à mettre les mesures en place. Nous
avons fait beaucoup de pression sur l'employeur
pour que les mesures de sécurité soient prises
rapidement. Nous avons fait des dénonciations
auprès de la CNESST (Commission des normes, de
l'équité, de la santé et de la sécurité du
travail) qui nous a donné raison à plusieurs
reprises et auprès de la Santé publique qui a
aussi mis de la pression sur l'employeur quand on
lui donnait l'information que les mesures
n'étaient pas mises en place assez rapidement.
Nous avons fait de la pression médiatique dans les
médias traditionnels et les médias sociaux. et de
la pression politique, notamment sur la ville de
Montréal pour qu'elle fasse pression sur la STM
pour qu'elle adopte les mesures sanitaires
rapidement.
Nous continuons ce travail pendant la deuxième
vague. Notre grande force c'est de tenir notre
monde informé. C'est comme cela qu'on réussit à
les mobiliser pour qu'ils prennent les précautions
nécessaires et s'assurent que les normes
sanitaires soient appliquées. On doit les informer
de tout ce qui se passe car on fait moins
d'instances que d'habitude. Il faut des suivis
réguliers. Ils sont au courant de ce qui se passe,
ils n'ont pas peur d'aller revendiquer auprès de
l'employeur la mise en place de mesures parce
qu'ils se sentent appuyés et qu'ils connaissent
leurs droits, comme le droit de refus de travail.
Nous les informons comment suivre la procédure
pour qu'ils ne fassent pas l'objet de mesures
disciplinaires. Tout cela est très apprécié des
membres, ils trouvent qu'ils ont même plus
d'information qu'en temps normal et ils
participent plus.
(Photos: STM-CSN, SCFP)
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