Travailleurs
d'entretien à la Société de transport de
Montréal
Maintenir les travailleurs informés et mobilisés pour que les normes sanitaires soient appliquées
- Entrevue avec Gleason Frenette -
Manifestation des employés d'entretien de la
Société de transport de Montréal, le 13 septembre
2018, pendant les négociations pour le
renouvellement de leur convention collective où
ils ont repoussé les demandes de concessions de
leur employeur
Gleason Frenette est le président du
Syndicat du transport de Montréal (STM-CSN)
Forum ouvrier : Quelle est la
situation à la Société de transport de Montréal
(STM) en ce qui concerne les cas d'infection à la
COVID-19 ?
Gleason Frenette : À la STM,
nous en sommes à environ 221 cas d'infection
depuis le début de la pandémie. Pendant la
première vague, nous avons eu environ 130 cas
d'infection. Et il y en a près de 100 depuis
le début de la deuxième vague. Environ soixante
pour cent des cas sont des
chauffeurs, 30 % des employés
d'entretien et l'autre 10 % est réparti
dans les autres accréditations incluant les
gestionnaires. Nous sommes
environ 10 500 employés à la STM, et
plus de 3 000 d'entre eux sont en
télétravail.
FO : Quel travail fait le
syndicat pour mobiliser les travailleurs dans la
lutte pour freiner la COVID-19 ?
GF : Nous avons dû annuler les
instances normales. Normalement, on tient un
conseil syndical ou une assemblée générale à
toutes les trois semaines en présentiel,
maintenant on ne peut plus le faire. Maintenant
nous tenons nos instances sur la plateforme zoom,
de façon virtuelle. Nous avons tenu un Conseil
syndical en octobre, nous tenons une assemblée
générale le 10 novembre.
Nous maintenons les processus habituels, comme si
les gens étaient présents. Nous présentons des
rapports sur la situation, les membres votent sur
les résolutions.
Nous avons ajusté nos services en conséquence.
Nous nous sommes mis en télétravail. Tous les
travailleurs du bureau sont en télétravail à la
maison. Nous sommes très actifs du point de vue
des communications. Nous avons encouragé nos
membres à se joindre à notre groupe privé sur
Facebook. Nous sommes passés d'un peu plus
de 1000 participants au début de la pandémie
à plus de 1900 participants maintenant. Les
membres s'inscrivent sur la page et nous vérifions
qui fait la demande pour nous assurer qu'il s'agit
bien de nos membres. Nous acceptons les retraités.
Nous les informons notamment en ce qui concerne le
régime de retraite. Plusieurs posent des questions
là-dessus, comment se comportent les placements
pendant la pandémie et ils sont inquiets aussi de
savoir si la STM va maintenir les rentes.
Sur notre page Facebook je fais des suivis
réguliers, nous avons 76 suivis de faits à
l'heure actuelle. Le suivi informe les
travailleurs sur toutes les questions dans la vie
du syndicat. L'information sur la pandémie est
importante dans ces suivis. Il y a des rapports
réguliers sur quels nouveaux cas ont été déclarés,
dans quel secteur ils sont, s'il s'agit d'un de
nos membres, sur quel quart de travail cela s'est
produit. Le but est de sensibiliser le monde à
rester vigilants et à accentuer la vigilance
lorsque plusieurs cas s'ajoutent.
À chaque fois qu'un suivi est publié sur la page
Facebook, il peut y avoir une centaine de
commentaires, des questions auxquelles on répond,
sur tous les aspects, le régime de retraite, la
vie syndicale, la pandémie, tous les sujets.
FO : Comment ça va en ce qui
concerne les normes sanitaires pour lesquelles
vous vous êtes battus ?
GF :
Cela va assez bien mais il y a un hic. C'est que
normalement on participe aux enquètes quand il y a
un accident de travail, on fait des enquêtes
paritaires. La STM, pour les cas positifs à la
COVID-19, fait une enquête à chaque fois. Ce
devrait être l'INSPQ (Institut national de santé
publique du Québec) qui le fait, mais ils n'ont
pas les ressources alors ils ont délégué cela à la
STM. Selon nous, la STM était dans une situation
de conflit d'intérêts parce que quand une enquête
relative à la COVID est faite, s'il y a une
personne infectée qui a été en contact avec
d'autres, ils doivent être envoyés en quarantaine,
rémunérés. En tout cas chez nous, ils sont
rémunérés. Nous voulons que l'enquête soit
paritaire, mais la STM ne l'a jamais accepté,
alors nous sommes en arbitrage là-dessus. Ce
serait normal que nous participions aux enquêtes
parce que cela touche la santé et la sécurité des
travaillleurs, comme si c'était un accident de
travail.
Nous avons fait des ententes avec la STM pour
ajouter des ressources pour la désinfection. Au
début, c'était une entente pour engager des
étudiants plus tôt que prévu. D'habitude c'est à
la fin juin, mais nous nous sommes entendus pour
les engager au mois de mai parce que les étudiants
n'allaient pas à l'école. On s'est entendu pour
que les autres accréditations syndicales, les
employés de bureau, les professionnels, même les
ingénieurs, viennent prêter main forte à la
désinfection. Après la première vague, alors que
les étudiants allaient retourner à l'école à la
fin-août, nous avons fait une entente pour une
embauche rapide massive de préposés pour faire la
désinfection. Nous avons fait voter l'entente par
les membres par courriel parce que cela modifiait
la convention collective et que cela prenait
l'approbation des membres.
Pendant la première vague, nous avons mis
l'accent sur la santé et la sécurité avec notre
comité de santé-sécurité et les membres de
l'exécutif qui prenaient des informations chaque
jour auprès de la structure syndicale dans tous
les secteurs. C'était pour savoir comment cela se
passait afin de mettre en place le plus rapidement
possible les mesures de distanciation sociale, les
mesures de protection, les équipements de
protection. Il a fallu mettre de la pression sur
l'employeur parce que cela ne marchait pas au
rythme où on voulait. Nous avons fait des refus de
travail collectifs et individuels pour inciter
l'employeur à mettre les mesures en place. Nous
avons fait beaucoup de pression sur l'employeur
pour que les mesures de sécurité soient prises
rapidement. Nous avons fait des dénonciations
auprès de la CNESST (Commission des normes, de
l'équité, de la santé et de la sécurité du
travail) qui nous a donné raison à plusieurs
reprises et auprès de la Santé publique qui a
aussi mis de la pression sur l'employeur quand on
lui donnait l'information que les mesures
n'étaient pas mises en place assez rapidement.
Nous avons fait de la pression médiatique dans les
médias traditionnels et les médias sociaux. et de
la pression politique, notamment sur la ville de
Montréal pour qu'elle fasse pression sur la STM
pour qu'elle adopte les mesures sanitaires
rapidement.
Nous continuons ce travail pendant la deuxième
vague. Notre grande force c'est de tenir notre
monde informé. C'est comme cela qu'on réussit à
les mobiliser pour qu'ils prennent les précautions
nécessaires et s'assurent que les normes
sanitaires soient appliquées. On doit les informer
de tout ce qui se passe car on fait moins
d'instances que d'habitude. Il faut des suivis
réguliers. Ils sont au courant de ce qui se passe,
ils n'ont pas peur d'aller revendiquer auprès de
l'employeur la mise en place de mesures parce
qu'ils se sentent appuyés et qu'ils connaissent
leurs droits, comme le droit de refus de travail.
Nous les informons comment suivre la procédure
pour qu'ils ne fassent pas l'objet de mesures
disciplinaires. Tout cela est très apprécié des
membres, ils trouvent qu'ils ont même plus
d'information qu'en temps normal et ils
participent plus.
(Photos: STM-CSN, SCFP)
Cet article est paru dans
Numéro 77 - Numéro 77 - 12 novembre 2020
Lien de l'article:
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