Forum ouvrier

29 janvier 2020

Opposition à la criminalisation de la lutte des travailleurs
de la Co-op de Regina

Un vaste appui pour la juste lutte des travailleurs de FCL à la défense
de leurs pensions


Le 24 janvier 2020, une délégation de travailleurs de la raffinerie Co-op appartenant à la section locale 594 d'Unifor rencontre le maire de Regina pour discuter de leurs justes revendications.

La lutte des travailleurs du secteur public en Alberta
Les infirmières de l'Alberta opposent un non! ferme aux demandes de reculs massifs et de gel salarial
Les travailleurs du secteur public de l'Alberta continuent de bâtir leur résistance à la démolition Kenney - Peggy Morton
Une lutte incessante pour des effectifs suffisants et des lieux de travail sécuritaires - Peggy Askin
Tenons les gouvernements redevables de la mort des intervenantes en service social! Pas un décès de plus!


Opposition à la criminalisation de la lutte des travailleurs de la Co-op de Regina

Un vaste appui pour la juste lutte des travailleurs de FCL à la défense de leurs pensions


Le président canadien du Syndicat international des débardeurs et magasiniers, Rob Ashton, sur la ligne de piquetage à Regina, le 25 janvier 2020

Depuis une semaine, des travailleurs de différents syndicats dans tout le pays se joignent aux membres de la section locale 594 d'Unifor sur leurs lignes de piquetage devant la raffinerie de Coopératives fédérées (FCL) de Regina. Des déclarations en appui aux revendications des travailleurs dans les négociations et condamnant la violence policière contre les travailleurs qui s'est produite le 20 janvier, ont été émises par la Fédération du travail de la Saskatchewan, le Congrès du travail du Canada, le Syndicat international des débardeurs et magasiniers, le Syndicat canadien de la fonction publique, la Fédération canadienne des syndicats d'infirmières/infirmiers, le Syndicat des employés de la fonction publique de l'Ontario et plusieurs autres. Les plus de 800 travailleurs de la raffinerie sont en lockout depuis le 5 décembre 2019, soit deux jours après que le syndicat ait envoyé un préavis de grève. La compagnie a continué à faire fonctionner l'usine avec des travailleurs de remplacement et des cadres et a obtenu une injonction provisoire qui limite à 10 minutes la période pendant laquelle les grévistes peuvent empêcher les véhicules d'entrer sur le terrain de la raffinerie ou en sortir. Le 20 janvier 2020,  des membres d'Unifor de tout le pays se sont joints à la ligne de piquetage pour bloquer toute entrée ou sortie de la raffinerie. La police de Regina a violemment attaqué la ligne de piquetage et arrêté 14 personnes. Le 22 janvier, le juge Timothy Keene de la Cour du Banc de la Reine a déclaré Unifor coupable d'outrage au tribunal après avoir contrevenu à l'injonction et condamné le syndicat à une amende de 100 000 dollars.


Des membres du Syndicat des employés provinciaux de l'Alberta (à gauche) et des
Infirmières et infirmiers unis de l'Alberta se joignent aux lignes de piquetage des travailleurs
de la raffinerie Co-op.

L'enjeu de cette lutte déterminée des travailleurs de la Co-op de Regina est leur régime de retraite à prestations déterminées qui existe depuis longtemps. La compagnie a déclaré que ce régime n'est pas « viable » et elle demande que les travailleurs « choisissent » entre un régime qui augmente de manière significative la contribution des travailleurs et un régime qui remplace le régime actuel par un régime à cotisations déterminées. En refusant ces concessions, les travailleurs défendent à la fois leurs droits et les droits de tous face à une attaque concertée des employeurs, tant du secteur privé que du secteur public, et du gouvernement fédéral contre les pensions, en ce qui concerne la législation sur les pensions, les régimes de retraite lorsque les entreprises se mettent sous la protection de la faillite et le Régime de pensions du Canada.

Dans un Canada moderne, les pensions sont un droit qui appartient aux travailleurs en vertu de leur contribution à l'économie. En fait, tous les Canadiens ont le droit à une pension en tant qu'êtres humains, pour la sécurité à la retraite. Dans une économie moderne socialisée, le gouvernement a la responsabilité sociale de garantir les pensions de tous. Les employeurs et les gouvernements, dans le cadre de leur offensive antisociale, s'attaquent au droit des travailleurs à des pensions adéquates et même à leur droit de préserver les conditions de travail qu'ils ont négociées, dont les pensions. Les employeurs le font en affirmant que pour être concurrentiels, ils doivent priver la classe ouvrière d'une portion encore plus grande de la valeur qu'elle produit par son travail et les gouvernements déclarent qu'ils doivent satisfaire les réclamations des riches et non celles des travailleurs. Ces dernières années, les régimes de retraite de nombreux travailleurs, comme les travailleurs municipaux du Labrador, de la ville de Québec et de Saskatoon de même que ceux des travailleurs industriels de nombreux secteurs ont été attaqués et la classe ouvrière est bien consciente que c'est le droit de tous à une retraite en sécurité qui est attaqué. La lutte des travailleurs de la Co-op de Regina à la défense de leurs pensions est une lutte pour les pensions de tous.

Le 24 janvier, les travailleurs en lockout et leurs sympathisants ont dressé une ligne de piquetage secondaire au terminal de carburants de FCL à Carseland en Alberta, bloquant l'entrée et la sortie de camions chargés d'essence destinée aux stations d'essence de Co-op en Alberta et en Colombie-Britannique. Les travailleurs demandent que FCL revienne à la table de négociation et négocie une convention collective qu'ils jugent acceptable et ne peut donc comprendre la destruction de leur régime de retraite qui fait déjà l'objet d'un accord. La compagnie a déclaré qu'elle ne reviendra pas à la table tant que le syndicat « enfreint la loi » et bloque l'accès et la sortie de l'usine. Le syndicat a répliqué qu'il démantèlera ses barricades lorsque la compagnie cessera d'avoir recours à des scabs pour continuer de faire fonctionner la raffinerie.


Des travailleurs des différents secteurs et régions se joignent aux travailleurs de la raffinerie Co-op sur une ligne de piquetage devant des installations secondaires de la raffinerie Co-op à Carseland, le 24 janvier 2020.

La compagnie se sert de l'injonction des tribunaux et de la violence policière pour dépeindre les travailleurs en lockout comme des criminels afin de tromper l'opinion publique et saper l'appui aux travailleurs. Elle essaie aussi de diviser la classe ouvrière en disant que le fait qu'un nombre toujours plus grand de travailleurs aient dû accepter des pensions inférieures à celles des travailleurs de la raffinerie doit pousser ceux-ci à être « équitables » et accepter un plan inférieur. La mobilisation massive des travailleurs de tous les secteurs en appui aux travailleurs de Co-op montre que la réponse des travailleurs est l'unité dans l'action de la classe ouvrière à la défense des pensions des travailleurs et du droit de tous à une retraite en sécurité.

(Photos : Section locale 594 d'Unifor,, AUPE, UNA)

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La lutte des travailleurs du secteur public en Alberta

Les infirmières de l'Alberta opposent un non! ferme aux demandes de reculs massifs et de gel salarial


Rassemblement à l'Université de l'Alberta, le 25 janvier 2020

Les infirmières et infirmiers unis de l'Alberta (UNA) rapportent que les négociations ont débuté en vue d'une nouvelle convention collective provinciale entre l'UNA et les Services de santé de l'Alberta (AHS) le 15 janvier. L'AHS a rapidement déposé une série de « propositions » dans lesquelles elle s'attaque aux salaires et aux conditions de travail des infirmières. L'AHS demande un gel de salaire de quatre ans aux infirmières, qui n'ont pas reçu d'augmentation depuis 2016. Dans sa proposition d'ouverture, l'UNA demande une augmentation de salaire de 2 % par année sur deux ans.

Au lieu de mettre fin au gel de l'embauche, de remplir les postes vacants et de fournir des effectifs adéquats pour garantir le bien-être des patients et du personnel, l'AHS veut éliminer les jours de repos désignés des employés à temps partiel, forcer les employés à temps partiel à travailler des quarts de travail complets, sabrer dans les taux de rémunération des heures supplémentaires et forcer à volonté les infirmières à se déplacer d'un endroit de travail à un autre. D'autres propositions comprennent l'élimination des primes pour les employés détenant un baccalauréat, une maîtrise ou un doctorat, l'élimination des primes de soir, de nuit et de fin de semaine, et le ralentissement de la progression des employés dans l'échelle salariale qui doivent travailler neuf ans en ce moment pour atteindre leur salaire maximal.

Le gouvernement Kenney a inventé quelque chose qu'il appelle le « standard Ontario-Ouest » par lequel il détourne l'attention de son programme de destruction en prétendant que « l'Alberta dépense trop d'argent » dans la santé comparativement aux autres provinces. L'objectif est de détourner l'attention des réclamations que font les Albertains à leur droit aux soins de santé et du droit des travailleurs qui fournissent les soins à des salaires et des conditions de travail qu'ils jugent adéquats, compte tenu du travail qu'ils font et de leur contribution à la société. Même si c'est l'AHS qui siège à la table, c'est le gouvernement Kenney qui contrôle chacun des gestes de l'AHS et de tout employeur de la province qui reçoit un certain niveau de financement public. Le gouvernement Kenney a illégalisé la divulgation par un employé des instructions que le gouvernement lui a données.

Ces demandes outrageantes du gouvernement du PCU sont accompagnées de menaces de pertes d'emploi massives par le biais de la privatisation et de coupures de postes d'infirmières à l'échelle de la province.

Les infirmières et les autres travailleurs de la santé prennent en main leur responsabilité sociale quand ils refusent de se soumettre à cette offensive antisociale et au recours aux pouvoirs arbitraires et au diktat au lieu de négociations. L'Association des infirmières et infirmiers du Canada écrit : « Les preuves abondent qui lient des effectifs infirmiers plus bas et le mélange des compétences à des résultats néfastes pour les patients comme une augmentation de la mortalité, les chutes, les infections et une hospitalisation plus longue. » Si l'offensive antisociale du gouvernement Kenney prévaut, cela aggravera des conditions de travail déjà intenables et les soins aux patients.

En ce qui concerne la question d' « épargner de l'argent », l'intention du gouvernement Kenney est claire. En tant que gouvernement de l'oligarchie financière, son objectif n'est pas de satisfaire les besoins des Albertains, mais de maximiser les profits de l'oligarchie financière. C'est la raison pour laquelle il a annoncé qu'il ouvrira davantage le secteur des soins de santé au profit privé. De cette façon, la richesse créée par la classe ouvrière et sur laquelle le gouvernement présente sa réclamation sera remise aux riches. Les fonds retirés des soins de santé vont eux-mêmes aux riches.

La présidente de l'UNA Heather Smith a bien répondu à tout cela : « La dernière fois que l'employeur a proposé des reculs d'une telle ampleur était en 1988, et nous savons tous ce qui s'est passé », a-t-elle dit. Elle faisait allusion à la dernière grève provinciale des infirmières de l'Alberta qui a eu lieu en 1988.[1] Un des traits saillants de la grève de 1998 a été la détermination à soutenir le principe que les infirmières ont le droit de décider quels sont les salaires et les conditions de travail qu'elles trouvent acceptables et cette détermination leur a valu un fort appui du public.

Note

1. En 1988, plus de 14 000 infirmières de 98 hôpitaux en Alberta se sont mises en grève. Le gouvernement de l'Alberta avait déclaré les grèves dans les établissements de santé publique illégales à la suite de la grève des infirmières de 1982. Pendant dix-neuf jours, les infirmières se sont unies en un non ! puissant aux reculs et aux concessions. Le gouvernement a lancé une attaque après l'autre contre elles pour briser leur résistance. La tenue d'un vote de grève a été déclarée geste illégal, l'UNA a été accusée d' « outrage criminel au tribunal » et menacée d'amendes de 1 million de dollars, de la saisie des avoirs du syndicat et de l'arrêt de la collecte des cotisations syndicales. Des infirmières individuelles ont été accusés d'outrage civil au tribunal, ont reçu des amendes et des menaces de licenciement. À la fin, l'UNA a été forcée de payer des amendes atteignant 424 000 dollars et le mouvement syndical s'est mobilisé pour l'aider à le faire. Mais les infirmières ont tenu bon et lorsqu'elles sont retournées au travail après 19 jours, leur convention collective est demeurée intacte.


Rassemblement durant la grève des infirmières qui a commencé le 25 janvier 1988

(Photos : AUPE, UNA)

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Les travailleurs du secteur public de l'Alberta continuent de bâtir leur résistance
à la démolition Kenney


Rassemblement à midi des infirmières de l'Alberta à Claresholm, le 21 janvier 2020

Au cours de la semaine du 20 janvier, des rassemblements ont eu lieu à midi à Edmonton, Lethbridge et Claresholm, où les travailleurs de la santé et d'autres travailleurs du secteur public ont été rejoints par des travailleurs d'autres syndicats et des membres de leur communauté. Ils ont dénoncé les menaces du gouvernement de privatiser de vastes secteurs des services publics et ont exigé que le gouvernement améliore, et non détruise, les soins de santé et les autres services publics. Ils ont également exprimé un non ! ferme aux attaques contre leurs salaires et leurs conditions de travail.

Le gouvernement du PCU a déclaré qu'il réduirait le nombre de travailleurs dans le secteur public de plus de 7 % d'ici 2023. Fin novembre, le gouvernement a envoyé des lettres aux syndicats qui représentent les travailleurs du secteur public disant qu'il envisageait de sous-traiter une large gamme de services publics, des services d'ambulance et des laboratoires médicaux publics aux services d'entretien ménager et de blanchisserie des hôpitaux, à la transcription médicale, aux soins infirmiers à domicile et aux emplois dans les services sociaux et communautaires. Cela représenterait une perte potentielle d'ici 2023 de 6 400 à 7 400 emplois syndiqués dans le secteur public, dont 3 900 à 4 900 dans les soins de santé.

Dans une récente entrevue avec CTV Edmonton, Kenney a dit : « Personne n'est mis à pied à l'heure actuelle, soyons clairs à ce sujet. Il s'agit de réductions potentielles des niveaux d'emploi sur quatre ans si nous ne pouvons pas trouver d'autres économies.

L'intention de ces déclarations semble claire. Kenney suggère que la privatisation est une forme d' « économie d'argent » et que si les travailleurs se soumettent à l'agression intensifiée contre leurs salaires et leurs conditions de travail, « économisant ainsi de l'argent », il pourrait épargner les services publics de sa privatisation.

Les travailleurs de l'Alberta sont déjà passés par là et ont appris de leur expérience amère que c'est de la fraude et du chantage du début à la fin. Les travailleurs soulignent que le gouvernement sert les grandes entreprises avec ses menaces de privatisation. La privatisation n'a rien à voir et n'a jamais eu rien à voir avec « économiser de l'argent ». Elle est une façon de transférer une plus grande partie de la richesse créée par les travailleurs et réclamée par les gouvernements entre les mains de riches intérêts privés. La privatisation des services publics effectuée au cours des années Klein a en fait réduit les revenus du gouvernement, car la valeur ajoutée créée par les travailleurs a été transférée à des intérêts privés (par exemple, les bureaux d'enregistrement et les points de vente d'alcool). Le gouvernement Klein a ensuite utilisé la baisse des revenus comme prétexte pour intensifier l'assaut contre les services publics et les travailleurs qui les assuraient.

Par leurs lignes de piquetage, les travailleurs prennent l'initiative d'unir leurs propres rangs et de développer l'opinion publique pour un programme prosocial qui défend les droits de tous. Afin de s'opposer à l'objectif du profit maximum pour l'oligarchie financière, il faut donner une nouvelle direction à l'économie pour combler les besoins du peuple. Forum ouvrier appelle les travailleurs à discuter avec leurs pairs de ce qui est en jeu et à se joindre aux lignes de piquetage et aux rassemblements dans leurs communautés.


Ligne de piquetage des travailleurs de la santé dans la région de Peace River contre les coupures, le 22 janvier 2020

(Photos : AUPE)

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Une lutte incessante pour des effectifs suffisants et des lieux de travail sécuritaires


Rassemblement à l'hôtel de ville de Calgary, le 17 novembre 2019, pour réclamer justice pour Debbie Onwu, tuée au travail en octobre 2019

Les intervenants en service social de l'Alberta mènent la lutte depuis longtemps pour des conditions de travail sécuritaires, face à l'indifférence des gouvernements successifs. Depuis le début des années 2000, quatre intervenantes en service social sont décédées au travail en Alberta. Plus récemment, le 25 octobre 2019, Debbie Onwu a perdu la vie alors qu'elle travaillait dans un foyer de groupe pour jeunes ayant des problèmes de santé mentale et géré par Wood's Homes.

Après la mort tragique de Debbie, les intervenants en service social pour les jeunes, les anciens intervenants et leur syndicat ont commencé à s'organiser pour exiger justice pour Debbie et éviter de futures tragédies. Le 17 novembre 2019, des amis, des membres de la famille et des collègues de la section locale 4731 du SCFP, ainsi que des travailleurs d'autres sections locales du SCFP et d'autres syndicats se sont rassemblés à l'hôtel de ville de Calgary pour réclamer justice pour Debbie Onwu. Tous ceux qui ont pris la parole et qui étaient présents au rassemblement ont exigé que le gouvernement prenne des mesures pour fournir le soutien nécessaire aux intervenantes en service social afin d'assurer leur sécurité sur les lieux de travail. Ils ont également exigé des installations appropriées pour les jeunes et les adultes qui ont des besoins de soins complexes.

« Vous devez cesser de nous ignorer. L'abus du personnel au sein de diverses agences doit cesser maintenant car nos vies comptent et nous ne tolérerons plus l'intimidation et les abus », a déclaré Rebecca Opoku, une travailleuse sociale et amie de Debbie. Les amis au rassemblement ont demandé aux personnes présentes d'interpeller leur député respectif pour que cet enjeu soit abordé. « Debbie n'a plus sa voix, mais nous avons la nôtre », a expliqué Opoku. « Cela ne fait pas partie de notre travail d'y perdre la vie. »

Ivana Niblett, représentante du Syndicat des Métallos, s'est également adressée au rassemblement. « Nos efforts aujourd'hui, par solidarité et au nom de Debbie Onwu, visent à augmenter les normes et réglementations de sécurité pour tous les employés qui peuvent être à risque, en particulier ceux qui travaillent avec des populations à risque élevé et occupent diverses fonctions », a-t-elle dit. « Personne ne devrait avoir à aller travailler et se demander s'il ou elle va revenir à la maison en sécurité pour retrouver ses proches. Obtenons justice pour Debbie ! »

Un porte-parole du SCFP-Alberta a expliqué qu'une partie du problème est le manque de soutien pour les jeunes vulnérables pris en charge. « Dans notre société, ils ne veulent pas se concentrer sur les personnes vulnérables et nous ne voulons pas nous concentrer sur les personnes qui ont besoin de l'aide la plus soutenue », a déclaré Rory Gill, président du SCFP-Alberta.

Debbie Onwu travaillait de nuit lorsqu'elle est décédée et était seule avec un homme gravement atteint d'un handicap mental et qui est accusé de son meurtre. Le Syndicat canadien de la fonction publique, qui représente les travailleurs de Wood's Homes, rapporte que l'homme a été classé comme nécessitant la présence d'au moins 2 intervenants, avait des besoins complexes en santé mentale et des antécédents de violence. Au moment de sa mort, sa collègue avait été appelée à un autre étage. Lou Arab, représentant des communications de la division du SCFP de l'Alberta, a dit aux médias que le syndicat avait soulevé depuis des années des préoccupations au sujet du niveau des effectifs et des problèmes de sécurité. Il a déclaré que le financement et l'environnement de travail doivent être améliorés.

Debbie est la quatrième intervenante en service social à être tuée au travail en Alberta depuis le début des années 2000. Sharla Collier, une travailleuse de 20 ans de Lethbridge, a été agressée sexuellement et tuée par un jeune dont elle avait la garde en 2002. L'intervenante chez Camrose, Valerie Wolski, 41 ans, a été tuée par un jeune dont elle avait la garde en 2011. Une intervenante aussi de Camrose, Dianne McClements, 61 ans, a également été tuée en 2012 par un jeune dont elle avait la charge alors qu'elle travaillait dans un foyer géré par Camrose Community Connections. Lors de toutes ces morts tragiques, comme celle de Debbie Onwu, les femmes étaient seules lorsqu'elles ont été tuées.

Erin Northey, une ancienne intervenante auprès des jeunes qui a lancé une pétition exigeant des actions du gouvernement provincial, a dit qu'elle connaissait très bien les dangers de travailler avec les populations vulnérables.

Alors qu'elle travaillait en 2016 dans un environnement à risque élevé, elle a été agressée par un patient et a souffert d'une commotion cérébrale, entraînant un syndrome post-commotion cérébrale, de l'anxiété et un SSPT (symptôme de stress post-traumatique). Elle se considère chanceuse d'être toujours en vie.

« Il est temps que ça change », a déclaré Northey. « Nous exigeons que des actions soient prises. » La pétition qui exige des actions pour améliorer la sécurité des personnes travaillant dans un environnement à risque élevé, a recueilli près de 14 000 signatures. On accède à la pétition ici. Northey souligne que les travailleurs de première ligne savent quels changements sont nécessaires et que les gouvernements doivent les écouter. Tout, du financement, à la législation et aux ressources pour les employés qui réintègrent le secteur, doit être évalué, a-t-elle déclaré.

Il est inadmissible que les intervenantes en service social, les travailleurs sociaux et tous les travailleurs dévoués et qualifiés dans ce secteur difficile ne soient pas dotés des ressources et des conditions de travail sécuritaires dont ils ont besoin pour effectuer leur travail. Les travailleurs et les professionnels de ce domaine sont inestimables pour la société et essentiels à la guérison et au bien-être de ceux dont ils s'occupent. Ils savent ce qui est nécessaire et ils ont droit à des conditions de travail décidées par eux qui fourniront un environnement sécuritaire afin qu'ils ne se blessent pas et ne meurent pas au travail. C'est le minimum qu' on puisse demander.

(Photos : I. Niblett, K. Ka-Pow)

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Tenons les gouvernements redevables de la mort des intervenantes en service social! Pas un décès de plus!

Deux enquêtes publiques ont eu lieu en Alberta sur le décès d'intervenantes en service social à leur lieu de travail. Elles révèlent le refus total des gouvernements de fournir ce qui est nécessaire pour assurer la sécurité des femmes qui dispensent des soins aux jeunes et aux adultes ayant des besoins complexes, et assurer le bien-être de ceux dont elles s'occupent. Au coeur de la question se trouve l'escalade de l'offensive antisociale et la détermination à réduire le financement des programmes sociaux, y compris les soins aux personnes gravement handicapées, et celles souffrant de maladies mentales.

Les foyers de groupe sont devenus le modèle pour les jeunes pris en charge, qu'ils soient adéquats ou bénéfiques ou non, ou qu'ils puissent on non fournir les services de façon sécuritaire. Les foyers de groupe peuvent être gérés par des organisations communautaires organisées sur une base « sans but lucratif » ou par des entreprises créées dans le but de réaliser des profits privés. La plupart des intervenants en service social sont des femmes et les enquêtes publiques ont révélé qu'il était trop difficile de recruter des hommes pour des salaires aussi bas. Ces femmes s'occupent de jeunes vulnérables et d'adultes gravement handicapés, souvent seules et sans soutien. Les familles et les proches des femmes décédées ont tous parlé de leur dévouement à leur travail et de leur préoccupation pour les jeunes ou les jeunes adultes dont elles prennent soin.

Le petit nombre de résidents et les effectifs réduits dans chaque foyer et le grand nombre d'agences et d'organisations impliquées rend l'organisation difficile à gérer par le personnel, et les résidents et le personnel deviennent moins « visibles ». La plupart des membres du personnel ne sont pas organisés et un bon nombre d'entre eux reçoivent des salaires de misère, la norme étant une pénurie de personnel et un manque de ressources. Ce modèle est également plus difficile à défendre pour les familles, comme elles l'ont fait avec succès en forçant le gouvernement de l'Alberta à reculer et à garder le Centre Michener ouvert. La province a sous-traité les soins comme moyen de se départir de la responsabilité d'offrir des conditions de travail sécuritaires et les conditions que requièrent les personnes soignées.

Les constatations de l'enquête publique sur le décès des intervenantes en service social

En 2002, Sharla Marie Collier, 20 ans, a été agressée sexuellement et tuée par un jeune dont elle avait la garde alors qu'ils étaient seuls. Une enquête publique sur la mort de Collier a eu lieu en 2007 et un rapport a été publié en 2008, six ans après sa mort. Dans son rapport, le juge Lloyd P. Malin a recommandé que les intervenantes en service social ne soient affectées qu'aux soins d'un résident que le soignant peut gérer physiquement. Il a également souligné que tous les dossiers concernant un résident devraient être mis à la disposition des soignants et qu'une formation spécifique devrait être dispensée sur les conditions des résidents dont ils ont la garde. Il a noté que les règlements de la province en matière de santé et de sécurité au travail (SST) sur le travail seul ne traitaient pas de la situation des intervenants oeuvrant auprès de personnes potentiellement violentes. Dix-huit ans après la mort de Sharla, c'est toujours le cas.

Valerie Wolski, intervenante en service social, a été tuée en 2011. Six ans plus tard, en 2017, le rapport de l'enquête publique sur sa mort, rédigé par le juge Bart Rosborough, a été rendu public. Dans l'intervalle, une autre intervenante, Diane McClement, 61 ans, avait été tuée en 2012 alors qu'elle travaillait dans un foyer géré par Camrose Community Connections. Un jeune dont elle avait la garde a été accusé de son meurtre. Aucune enquête publique n'a été ouverte. À l'époque, Santé et sécurité au travail ne confirmait même pas s'il menait une enquête. Le gouvernement n'a jamais publié de rapport public concernant sa mort.

Lorsque le rapport d'enquête sur la mort de Wolski a finalement été rendu public, la culpabilité du gouvernement était stupéfiante. Wolski avait accepté de prendre en charge un jeune homme qui avait une déficience intellectuelle profonde dans un foyer géré par l'Association canadienne pour la santé mentale (ACSM). Ni Wolski ni l'ACSM n'ont été informés qu'il avait des antécédents de comportement violent, en particulier à l'égard des intervenantes en service social, ni reçu un historique précis ou une évaluation de ses besoins en matière de soins. En fait, ils ont reçu des informations complètement trompeuses, selon lesquelles le jeune homme était « doux comme un agneau ». Le personnel de l'ACSM a d'ailleurs déclaré qu'il n'aurait pas pris soin de lui s'il avait été au courant des antécédents de violence, car il n'était pas équipé pour le faire.

Le juge Rosborough a fait référence au rapport Collier et a réitéré ses recommandations. Il a écrit qu' « il semblerait évident qu'une travailleuse de soutien de petite taille comme Wolski n'aurait pas dû se voir confier la responsabilité des soins d'un homme jeune et de très forte taille » (qui mesurait 6 pieds et 5 pouces et pesait entre 250 et 300 livres, soit 1,96 m de taille et entre 113 et 135 kilos), en particulier lorsqu'il y a des antécédents de violence. Le rapport réitère les recommandations du rapport Collier et ajoute que les femmes soignantes ne devraient pas se voir confier les soins exclusifs des résidents qui ont déjà exprimé ou démontré une agression envers les femmes.

Le rapport a en outre noté que le thème sous-jacent de l'enquête était que le gouvernement n'avait pas d'établissements adaptés aux soins des personnes ayant une déficience intellectuelle et des besoins complexes. De nombreuses personnes qui ont témoigné ont parlé de cet échec du gouvernement et ont noté la détermination du gouvernement à fermer le centre Michener et imposer un modèle de foyer de groupe même lorsqu'il est totalement inadéquat et inadapté. Le juge Rosborough a conclu qu'il n'y avait aucune ressource communautaire à la disposition du ministère pour des personnes ayant une déficience intellectuelle et qui était en mesure d'assurer le niveau sécuritaire requis.

Le juge Rosborough a demandé si Valerie Wolski serait toujours en vie si les recommandations du précédent rapport Collier avaient été mises en oeuvre. Malgré tous leurs efforts, ni lui ni l'avocat rattaché à l'enquête n'ont pu savoir ce que le gouvernement avait fait, aussi minime que cela puisse être, en réponse à l'enquête publique précédente. Il a fait remarquer que si un avocat expérimenté et un juge nommé en vertu de la Loi sur les enquêtes sur les personnes tuées ne peuvent obtenir d'informations, il est peu probable que quiconque puisse en obtenir. En Alberta, les gouvernements ne sont pas tenus de rendre publique leur réponse à une enquête médico-légale d'un coroner. Les rapports d'enquête sur les décès peuvent simplement être mis sur une étagère et oubliés. Est-ce toujours le cas après la mort de quatre femmes ?

En 2012, Santé et sécurité au travail a constaté que le ministère responsable des personnes ayant une déficience intellectuelle avait enfreint les normes de santé et sécurité et a émis des ordonnances de conformité exigeant que le ministère prenne des mesures pour protéger les travailleurs contre le danger associé au travail avec des personnes à risque élevé. Mais ces ordonnances ne changent pas le fait que les directives en matière de santé et de sécurité au travail concernant le travail seul ne concernent pas les intervenantes en service social dans les foyers de groupe ou des situations similaires. Le danger pour leur santé et leur sécurité demeure.

Les travailleuses prennent l'initiative de demander Pas un décès de plus ! et de tenir le gouvernement responsable de son refus de faire tout ce qui est nécessaire pour assurer la sécurité des intervenantes en service social. Leur vie est précieuse et elle n'est pas sacrifiable ! Les femmes travailleuses sont aux premières lignes en menant leurs actions sur la base que c'est à nous ! de nous organiser et de lutter pour créer les changements nécessaires.

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