Forum ouvrier

21 février 2019

Ce que signifie « être ouvert aux affaires »

Les travailleurs rejettent la politique
de l'«ouverture aux affaires»
de l'élite dirigeante

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La destruction du secteur manufacturier se poursuit en Ontario

Le lockout à l'Aluminerie de Bécancour
L'appui des travailleurs se poursuit alors que le cartel Alcoa/Rio Tinto interrompt brutalement les négociations

Les travailleurs municipaux du Québec luttent pour leurs droits et leur dignité
Les employeurs du secteur public placent les travailleurs devant une impasse

Entrevue
Les travailleurs d'entretien de la Société de transport de Montréal demandent une convention négociée qui leur est acceptable - Gleason Frenette, président du Syndicat du transport de Montréal (STM-CSN)

À la défense des droits des travailleurs migrants
Journée nationale d'action pour des soins de santé pour tous

Condamnons l'appui du Canada au coup d'État au Venezuela orchestré par les États-Unis
Déclaration - Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes


Ce que signifie « être ouvert aux affaires »

Les travailleurs rejettent la politique de l'«ouverture aux affaires» de l'élite dirigeante

Les représentants des monopoles et des gouvernements à leur service mettent de l'avant le mot d'ordre « ouvert aux affaires » comme étant le guide obligatoire de toute activité économique. Ce mot d'ordre a été introduit par Mike Harris en Ontario au milieu des années 1990 et est maintenant devenu le credo du gouvernement Ford en Ontario et du gouvernement Legault au Québec. Les travailleurs rejettent la vision, la politique et les pratiques derrière ce mot d'ordre.

Ce concept d'être ouvert aux affaires part de la fausse prémisse que les entreprises sont les créateurs de la richesse. Dans l'économie socialisée, c'est l'acte collectif des travailleurs avec les moyens de production déjà produits par d'autres travailleurs qui crée toute la richesse sociale.

Bien que les travailleurs ne possèdent pas et ne contrôlent pas la richesse sociale qu'ils créent, il n'en reste pas moins qu'ils en sont les créateurs. La richesse sociale est expropriée par de puissants intérêts privés qui possèdent les immenses moyens de production que les travailleurs ont déjà produits et dont l'économie, le peuple et la société dépendent. L'affirmation que les grands intérêts privés sont les créateurs de la richesse et que l'économie et la société doivent être « ouvertes aux affaires » et servir leurs intérêts étroits est non seulement non scientifique et fausse mais ridicule et irrationnelle.

On assiste en ce moment dans le monde à une destruction sans précédent de la richesse sociale produite par le travail collectif des humains, sous la forme de famines, de déplacements de populations entières, de destruction des économies régionales et nationales, de guerres menées par les impérialistes pour détruire ce qu'ils ne peuvent pas contrôler et d'autres calamités.

Tout récemment, en Ontario, l'annonce soudaine de la fermeture illégale de l'usine GM d'Oshawa a montré à tous que ce ne sont pas ceux qui ont créé la richesse sociale, sous la forme des moyens de production, qui sont en train de les détruire. Les forces de destruction sont ces mêmes investisseurs dont les intérêts sont servis par la politique d' « être ouverts aux affaires » et qui créent le chaos dans la vie des travailleurs et dans l'économie.

Ce mot d'ordre irrationnel mystifie ce qu'est l'économie socialisée et vise à maintenir la classe ouvrière dans une position subordonnée, pour qu'elle soit incapable d'accomplir sa mission de défendre les droits de tous et de les garantir en donnant une direction nouvelle à l'économie qui est sous le contrôle des travailleurs et de leurs alliés.

« Ouvert aux affaires » signifie multiplier les stratagèmes pour payer les riches sous toutes les formes possibles. Des quantités énormes de richesse sociale sont déversées dans les coffres des riches et dilapidées selon leur bon vouloir. Là aussi on en a vu le résultat. Des milliards de dollars de fonds publics ont été versés à GM au Canada et aux États-Unis en 2009, et on se retrouve maintenant avec une fermeture brutale qui prive de leur gagne-pain des milliers de travailleurs de l'usine d'Oshawa et de son réseau de fournisseurs et va grandement endommager l'économie locale interconnectée. La société ne dispose plus de ces vastes montants de richesse sociale sous la forme de fonds publics versés à GM. Ils sont disparus au profit de ces mêmes intérêts privés qui réclament une économie ouverte aux affaires, une économie ouverte au pillage, devrait-on plutôt dire. L'économie et le peuple sont privés à la fois de la richesse sociale publique engouffrée dans les machinations mondiales de GM et de la richesse sociale de propriété privée représentée par les moyens de production fixes dans le sud de l'Ontario. Cela ne doit pas passer parce que cette richesse devrait servir à l'économie et au peuple pour que les droits, la sécurité et le bien-être de tous puissent être garantis.

Les promoteurs du mot d'ordre de la politique d'être « ouvert aux affaires » vouent une haine mortelle à toute réglementation de nature prescriptive, à tout arrangement de l'État qui fournit une mesure de santé, de sécurité ou de normes de travail aux travailleurs. À titre d'exemple, le gouvernement Ford en Ontario a adopté une loi, au nom d'un « Ontario ouvert aux affaires », qui affaiblit les normes minimales du travail en Ontario sur la question notamment des heures de travail. Il veut maintenant adopter une loi qui va désyndiquer le travail de construction dans les institutions publiques, forçant ceux qui oeuvrent dans la construction dans ces secteurs à travailler sans la protection d'un syndicat ou d'une convention collective.

On connaît l'exemple des gouvernements fédéraux libéraux et conservateurs successifs qui ont déréglementé l'industrie ferroviaire sous le mot d'ordre que les entreprises sont celles qui connaissent le mieux leurs affaires. Cet abandon de d'autorité publique a mené à des tragédies, telle celle qui est survenue le 4 février, dans laquelle trois travailleurs ferroviaires du Canadien Pacifique ont tragiquement perdu la vie lorsque leur convoi de trains a plongé dans la rivière Kicking Horse. Les travailleurs refusent avec mépris qu'au nom d'être « ouvert aux affaires » on livre les travailleurs et leurs communautés au chaos et à l'insécurité.

Sous le mot d'ordre d'être « ouvert aux affaires » se cache le désir rapace des riches oligarques et de leurs gouvernements de priver les travailleurs des moyens de s'organiser collectivement et légalement à la défense de leurs droits et des droits de tous. La politique d'être « ouvert aux affaires » vise à criminaliser les luttes des travailleurs pour leurs droits. Elle tourne la vérité sens dessus dessous en dépeignant les travailleurs comme des ennemis de l'économie et de la production de la richesse sociale. Elle les dépeint comme des privilégiés qui veulent s'en tenir à certains « privilèges » qui leur viennent d'être une force collective organisée. Les oligarques et leurs gouvernements réclament que ces « privilèges » et ces collectifs soient démantelés pour que tous soient à la merci des aventures irresponsables des riches au service de leur profit privé et de leur édification d'empire.

Les travailleurs n'ont pas mené leurs luttes de masse à la défense de leurs droits et pour faire avancer la société pour accepter une politique et un mot d'ordre qui renient tout ce pour quoi ils se sont battus dans le passé et auquel ils aspirent dans l'avenir. Les travailleurs ne s'opposent pas à ce qu'on fasse des affaires, mais celles-ci doivent contribuer au bien-être de tous et se faire sur la base d'une production qui repose sur des normes modernes approuvées par les travailleurs et défendues par une autorité publique sous leur contrôle.

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La destruction du secteur manufacturier
se poursuit en Ontario


Les travailleurs manifestent devant l'usine Erwin Hymer à Cambridge pour demander des comptes, le 19 février 2019.

Le 15 février, ceux qui contrôlent en ce moment le Groupe Erwin Hymer-Amérique du Nord, dont le siège social est à Cambridge en Ontario, ont annoncé que la compagnie se mettait sous séquestre et cessait ses opérations le même jour, jetant à la rue près de 900 travailleurs dans la région de Kitchener-Waterloo, dont 850 à son usine de Cambridge. Comme si ce traitement de choc ne suffisait pas, les travailleurs ont aussi été informés qu'ils recevraient leur salaire de leur dernière semaine de travail et leur paie de vacances mais pas leur prime de séparation. Voilà un exemple du caractère socialement irresponsable et brutal des relations de production aujourd'hui entre la classe ouvrière canadienne et l'oligarchie financière mondiale.

Les travailleurs des usines de Cambridge et de Kitchener fabriquent des véhicules récréatifs (VR) depuis 1974. Jusqu'en 2011, les usines ont été exploitées par leur propriétaire local, Roadtrek, qui, n'ayant jamais pu se remettre de la récession de 2009, a vendu l'entreprise à la firme d'investissement américaine Industrial Opportunity Partners. Les travailleurs n'en avaient pas fini du chaos et de l'insécurité car les nouveaux propriétaires ont vendu une partie de la compagnie à d'autres oligarques et celle-ci a atterri dans les mains du Groupe Erwin Hymer-Amérique du Nord, basé en Allemagne, en 2016.

Ce système rongé par la crise a connu une nouvelle péripétie lorsque les Industries Thor, basées aux États-Unis, se sont emparées du Groupe Hymer. Les oligarques ont complété l'achat le 31 janvier, et c'est un autre groupe de propriétaires basé au États-Unis, Corner Flag, qui en a pris le contrôle. Cependant, les deux usines ontariennes n'ont pas fait partie de la transaction et elles ont été mises sous séquestre le 15 février puis fermées sans préavis. Certains des employés y travaillaient depuis 30 ou 40 ans. Les usines étaient non syndiquées. La firme financière Alvarez & Marsal Canada Inc.a été nommée administratrice judiciaire de la compagnie.

Aucune autorité politique, fédérale ou provinciale, n'a levé le petit doigt pour intervenir et défendre les travailleurs canadiens et l'économie canadienne pendant toutes ces tribulations. Au contraire, le premier ministre Doug Ford a déclaré que l'Ontario était ouvert aux affaires et a donné carte blanche à l'oligarchie financière pour qu'elle fasse tout ce qui sert ses intérêts étroits.

Les bouleversements et la fermeture éventuelle des usines de VR du Groupe Erwin Hymer-Amérique du Nord, suite à des années d'échange de mains entre firmes d'investissement étrangères, sont une nouvelle preuve que l'économie a besoin d'une nouvelle direction qui favorise et sert les travailleurs et l'économie canadienne.

(Sources : Cambridge Times, CBC)

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Le lockout à l'Aluminerie de Bécancour

L'appui des travailleurs se poursuit alors que le cartel Alcoa/Rio Tinto interrompt brutalement les négociations


Les travailleurs de la section locale 175 d'Unifor à Montréal viennent appuyer les travailleurs en lockout d'ABI à Bécancour le 19 février 2019. (M. Bedard)

L'appui pour les travailleurs en lockout d'ABI se poursuit alors que les propriétaires ont brutalement interrompu les négociations le 15 février dernier. Une ronde de négociations avait débuté le 31 janvier, mais les représentants de la compagnie ont annulé les pourparlers sans même un mot d'explication. Ils ont dit aux représentants du syndicat qu'ils voulaient « réfléchir » et qu'ils donneraient des nouvelles quand ils auraient quelque chose à dire.

Les travailleurs sont très en colère contre cette arrogance et ce mépris pour des travailleurs mis en lockout sans raison il y a plus de 13 mois et pour une région qui souffre des séquelles du lockout. Alcoa/Rio Tinto demandent toutes sortes de privilèges, hydroélectriques et autres, pour leur présence ici, mais ils ne se reconnaissent aucune responsabilité envers les travailleurs qui créent la valeur qu'ils convoitent et envers la communauté locale et la société.

Les travailleurs du Québec considèrent le lockout chez ABI comme étant méprisable et insensé. En réponse au diktat des propriétaires, ils intensifient leur appui aux travailleurs d'ABI et à la communauté. Ils viennent de partout au Québec pour les appuyer sur leurs lignes de piquetage et les reçoivent aussi dans leur région pour en apprendre davantage sur le conflit et exprimer leur appui.

Des travailleurs qui ont eux-mêmes vécu un lockout ou appartiennent à une région qui en a vécu un, se font un devoir d'appuyer les travailleurs d'ABI. Le mardi 19 février, ceux-ci ont reçu la visite d'une délégation de la section locale 175 d'Unifor représentant les quelque 260 travailleurs de la raffinerie Suncor de Montréal. Ces travailleurs ont vécu 14 mois de lockout en 2007-2008 et savent d'expérience comment la mobilisation de l'ensemble des travailleurs est importante pour mener ces luttes. Ils étaient accompagnés de présidents de syndicats d'autres raffineries dont la raffinerie géante Valéro à Lévis.

Le 15 février, les 73 syndiqués du chemin de fer Roberval-Saguenay membres de la section locale 9190 des Métallos ont renouvelé à l'unanimité leur contribution récurrente de 10 $ par semaine par travailleur, pour une période de six mois supplémentaires. Ces travailleurs ont maintenant envoyé 38 700 $ à Bécancour depuis le début du lockout.

« C'est un effort de guerre qu'on fait tout le monde ensemble. Dans une proportion de 25 %, ABI est une propriété de Rio Tinto. Nous avons le même employeur et évoluons dans le même type de milieu industriel. En 2012, il y a eu un lockout dans la région à Alma et en 2015, nous avons subi quelques affronts dans notre négociation et nous retournons négocier en 2020. Nous voulons lancer un message à ces grandes compagnies : quand elles se battent contre les travailleurs, elles se battent contre tous les travailleurs en même temps, pas juste un groupe », a dit le président de la section locale 9190, Daniel Girard.

Parmi les travailleurs qui ont reçu des représentants des travailleurs d'ABI récemment, il y a le comité des jeunes d'Unifor et les membres du Syndicat des travailleurs de la Fonderie Bibby Ste-Croix, affilié à la Fédération de l'industrie manufacturière de la CSN. Les travailleurs d'ABI seront réunis en assemblée générale le samedi 23 février pour faire le point sur la situation.

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Les travailleurs municipaux du Québec luttent pour leurs droits et leur dignité

Les employeurs du secteur public placent les travailleurs devant une impasse


Manifestation des travailleurs de l'entretien de la Société de transport de Montréal, 13 septembre 2018

Les employés municipaux luttent courageusement contre la situation intenable dans laquelle le gouvernement du Québec et certains employeurs municipaux cherchent à les placer. Ils confrontent une attaque concertée contre leur droit de négocier leurs conditions d'emploi afin d'obtenir des conditions qui leur sont acceptables, sans menace, sans criminalisation et sans lois arbitraires qui dictent et aggravent leurs conditions et nient leurs droits.

L'exemple le plus immédiat est celui des travailleurs d'entretien de la Société de transport de Montréal (STM) qui jouent un rôle très important pour la sécurité du public en entretenant les autobus et les wagons de métro ( voir l'entrevue ci-contre avec le président du syndicat ). Dans leur négociation actuelle pour une nouvelle convention collective, ils font face à une impasse créée par le gouvernement du Québec, la Société de transport de Montréal et le Tribunal administratif du travail.

Ces travailleurs sont sous le coup de deux lois, l'une qui élimine pratiquement leur droit de négocier les conditions de leur régime de retraite, et l'autre qui permet le décret de leurs conditions de travail par le gouvernement si celui-ci juge que les négociations ne se déroulent pas comme il le veut. Cette menace de diktat est combinée aux congédiements de travailleurs et à d'autres mesures disciplinaires qui se multiplient pendant les négociations. S'ajoutent à cela les poursuites contre les travailleurs devant le Tribunal administratif du travail pour de fausses accusations de sabotage de l'entretien et de moyens de pression illégaux pour faire pression sur l'employeur.

Dans ce contexte, la Société de transport de Montréal a annoncé hier qu'elle avait présenté une « offre globale et finale » après 2 ans de négociations, et elle blâme les travailleurs pour le fait qu'aucune convention collective n'a encore été signée. Les travailleurs se demandent : quelle est la signification de cette offre menaçante dite globale et surtout finale ? Est-ce que la Société de transport s'apprête à demander à ce que le gouvernement intervienne pour finalement décréter les conditions de travail si les travailleurs n'acceptent pas cette offre « globale et finale » ?

Les travailleurs sont en droit de se poser la question et de discuter et de remettre en cause, ouvertement et collectivement, la situation à laquelle ils font face. Comment cette épreuve de deux ans peut-elle se terminer par une « offre globale et finale » inacceptable ou par un décret gouvernemental et être considérée comme un exemple de négociation collective équitable ? Quel est l'espace légal qui leur reste pour présenter les revendications et les préoccupations qu'ils jugent importantes pour eux et le service, et pour en arriver à un arrangement acceptable ?

Les travailleurs ne considèrent pas acceptable que les gouvernements qui se disent démocratiques attaquent avec impunité le droit des travailleurs municipaux de négocier leurs conditions de travail, leurs salaires et leurs pensions. Il est également inacceptable d'éliminer les négociations, ou ce qu'on avait coutume d'appeler la libre négociation collective, sous prétexte de grands idéaux. Le droit des travailleurs d'avoir un mot décisif à dire sur ce qu'ils reçoivent en échange de leur capacité de travailler et sur les conditions de travail leur appartient parce que c'est un droit. En ce qui concerne les travailleurs de la STM, leurs conditions de travail sont directement liées à la livraison de services publics au niveau dont la population et la société ont besoin et auquel elles s'attendent.

Les travailleurs de la STM ne sont pas les seuls dans cette situation intenable. Les employés municipaux à l'échelle du Québec ont perdu des sommes gigantesques, parfois plus de 10 000 $ pour un seul travailleur, à cause de la loi sur les régimes de retraite qui les a forcés à renflouer les déficits des régimes de retraite, alors qu'ils y avaient toujours mis les montants requis en vertu de leur convention collective. Ce n'est pas le cas cependant de nombre d'administrations municipales qui avaient refusé de verser les cotisations requises et détourné ces montants vers d'autres secteurs avec l'autorisation du gouvernement. On ne peut qualifier cela autrement que comme un vol de ce qui revient de droit aux travailleurs, qui avait été négocié légalement en échange de leur capacité de travailler. Non seulement ce vol est-il énorme, mais l'espace légal pour négocier la fin de ces pratiques anti-travailleurs a été pratiquement éliminé.

En plus, les attaques contre les travailleurs municipaux préparent le terrain à la privatisation accélérée des services municipaux dans le contexte des accords impérialistes de libre-échange tels l'Accord économique et commercial global (AÉCG) entre le Canada et l'Union européenne des monopoles et l'Accord États-Unis-Mexique-Canada (AÉUMC), qui a remplacé l'ALÉNA. Ces accords commerciaux supranationaux sous le contrôle des monopoles réduisent le contrôle local sur l'économie, abaissent les réclamations des travailleurs à la valeur qu'ils produisent, permettent à l'entreprise privée d'exproprier la valeur nouvelle que créent les travailleurs, et ouvrent la voie à des frais d'usagers plus élevés et à des subsides gouvernementaux aux monopoles qui possèdent et contrôlent l'infrastructure publique actuelle et à venir.

Forum ouvrier se tient fermement aux côtés des employés municipaux du Québec et de tout le Canada qui persistent à défendre leurs droits et les services publics qu'ils dispensent. Le refus de l'élite dirigeante de reconnaître les droits de la classe ouvrière à son mot à dire et son contrôle sur ses conditions d'emploi n'a rien à voir avec « la libre négociation collective » et tout à voir avec la négation des droits des travailleurs. Pour la classe ouvrière, la liberté est la reconnaissance de la nécessité de changement de manière à priver l'élite dirigeante de son pouvoir de priver les travailleurs du pouvoir d'affirmer leurs droits.

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Entrevue

Les travailleurs d'entretien de la Société de transport de Montréal demandent une convention négociée qui leur est acceptable

Gleason Frenette s'adresse aux travailleurs d'entretien de la STM le 3 mai 2018.

Forum ouvrier : La négociation actuelle concerne combien de travailleurs et quel travail font-ils à la Société de transport de Montréal (STM) ?

Gleason Frenette : Le syndicat représente environ 2400 membres. La majorité, environ les trois-quarts, sont des gens de métier, électriciens, plombiers, maçons, ferblantiers, etc., et à peu près 550 préposés à l'entretien. La convention collective est échue depuis janvier 2018, et nous avons commencé les négociations huit mois avant la fin de la convention. Nous en sommes à 22 mois de négociation.

FO : Quels sont les traits principaux de cette négociation ?

GF : La STM nous est arrivée avec une centaine de reculs dans son offre. Il a fallu négocier pour aménager des changements majeurs dans les horaires de travail, dans plusieurs aspects de la convention. Ce n'est pas habituel qu'on se fasse demander tant de changements dans les négociations. Normalement, l'employeur essaie de changer quelques aspects dans la convention en donnant autre chose en échange. Ils sont arrivés avec toutes ces demandes en pensant probablement qu'avec la loi 24 [1], advenant qu'ils ne s'entendent pas avec nous, que le gouvernement allait décréter nos conditions de travail. Ils ont demandé que nos horaires soient basés sur des quarts de travail de douze heures, au lieu de huit heures comme c'est le cas à l'heure actuelle. Ils veulent que plus d'employés travaillent la fin de semaine et sur les quarts de soir et de nuit. Ils appellent cela la flexibilité opérationnelle. Ils nous ont poussé dans une situation où si on réussit à faire quelques gains, et à défaire la majorité de leurs demandes de reculs, les membres vont être satisfaits. Notre cahier de demandes à nous, c'est de maintenir les acquis.

Nous avons aussi une revendication en ce qui concerne le régime de retraite. Nous demandons une compensation en lien avec la loi 15 qui nous force à cotiser 3 % de plus dans le régime de retraite. [2] En vertu de la loi 15, nos membres vont devoir cotiser 3 % de plus dans le régime et l'employeur 3 % de moins. Il a fallu faire deux volets à notre régime de retraite, un volet avant la loi 15 et un volet après. La loi oblige les parties à cotiser 50-50 dans le régime de retraite. Avant la loi, nous cotisions 6 % de notre masse salariale dans notre régime de retraite et l'employeur mettait le double. Nous appelions cela une cotisation 12-6. Nous avions négocié tout cela. C'était stipulé dans notre contrat. Nous avions fait des concessions dans le passé pour obtenir le 12-6, nous avions accepté des zéro pour cent d'augmentation salariale pour maintenir ce taux dans notre régime de retraite. Avec une loi, le gouvernement a permis de défaire cet aspect de la convention collective. Nous demandons une compensation monétaire pour notre augmentation de cotisation.

FO : Peux-tu nous expliquer comment la loi 24 affecte votre négociation ?

GF : La loi 24 prévoit que dans certaines conditions, si nous n'arrivons pas à nous entendre, le gouvernement pourrait à la limite décréter nos conditions de travail. Nous sommes maintenant en médiation depuis le mois de septembre 2018. Nous avons eu deux prolongations de 60 jours de médiation, comme la loi le prévoit. La deuxième période de prolongation s'est terminée le 12 janvier. Si le médiateur veut prolonger la médiation une nouvelle fois, il faut selon la loi que l'employeur et le syndicat soient d'accord. En ce moment, l'employeur tolère la présence du médiateur. S'il le souhaite, il peut demander la nomination d'un mandataire spécial, ce qui serait la prochaine étape. La négociation se poursuivrait pendant ce temps-là, mais le mandataire préparerait son rapport pour le gouvernement, et le gouvernement pourrait décréter le contrat de travail en suivant les conseils du mandataire.

FO : Où en sont les négociations maintenant ?

GF : Sur la question de la flexibilité, nous avons accepté plusieurs de leurs changements d'horaires mais pas l'ensemble de leurs demandes à ce sujet. Nous demandons en contre-partie une compensation salariale afin d'obtenir le rattrapage salarial pour les gens de métier que nous demandons depuis des années. Il y a plusieurs de nos corps de métier qui retardent de beaucoup du point de vue salaire sur le privé et les secteurs comparables. Nous voulons une augmentation de salaire d'ensemble qui nous permet au moins de maintenir notre pouvoir d'achat.

En plus, nous attendons, au moment où je te parle, une décision du Tribunal administratif du travail. L'employeur nous accuse d'avoir fait des moyens de pression illégaux qui ont endommagé les services à la population, par exemple en diminuant la disponibilité des autobus sur la route. Nous rejetons cette accusation, nous n'avons pas fait de moyens de pression illégaux. Nous, on dit que ce sont des mauvaises décisions de gestion qui font en sorte que nous en sommes rendus là. Ils ont pris beaucoup de mauvaises décisions en ce qui concerne l'entretien des autobus. L'employeur est le seul à blâmer pour les services inadéquats à la population.

Cela ne lâche pas depuis deux ans. Le quotidien continue, nous n'avons pas seulement à nous occuper de la négociation, nous avons des membres qui se font congédier, nous avons des membres qui ont des accidents de travail et tombent sur l'assurance-salaire.

Les congédiements sont en hausse, et ce sont des congédiements qui sont largement punitifs, qui ont comme objectif de nous faire peur. Ils s'en prennent à ceux qui leur tiennent tête le moindrement. Par exemple, ils ont congédié un travailleur et suspendu un autre pendant six mois, pour avoir confronté un directeur de la STM qui s'en est pris physiquement à un de nos travailleurs. Cela a failli dégénérer. Ces deux travailleurs n'ont pas touché au directeur. Les travailleurs sont aussi excédés des sorties médiatiques du directeur général de la STM qui accuse les travailleurs de sabotage et de moyens de pression illégaux. Ils en ont assez d'entendre le directeur général discréditer nos travailleurs et les accuser de toutes sortes de choses, d'intimider les gestionnaires, et même de causer des pannes de carburant sur les autobus. Qu'un directeur général fasse des sorties publiques pour dénigrer les travailleurs, c'est quelque chose qu'on n'a jamais vu dans toute l'histoire de la STM.

Notes

1. Loi 24, Loi concernant le régime de négociation des conventions collectives et de règlement des différends dans le secteur municipal, adoptée par l'Assemblée nationale le 2 novembre 2016

2. Loi 15, Loi favorisant la santé financière et la pérennité des régimes de retraite à prestations déterminées du secteur municipal, adoptée par l'Assemblée nationale le 4 décembre 2014. En septembre 2018, une dizaine de syndicats ont entrepris en Cour supérieure une contestation de la loi pour la faire déclarer anticonstitutionnelle. Selon les syndicats, cette loi contrevient à la liberté de négociation collective, qui fait partie de la liberté d'association protégée par l'article 2 de la Charte canadienne des droits et libertés.

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À la défense des droits des travailleurs migrants

Journée nationale d'action pour
des soins de santé pour tous


Toronto, Ontario

Le 12 février, des travailleurs de la santé, des étudiants en médecine et plusieurs autres personnes ont participé à une Journée nationale d'action, organisée dans plus de 15 villes partout au pays, pour demander au gouvernement fédéral de cesser de refuser des soins de santé aux migrants en raison de leur statut d'immigration.

La campagne s'est amorcée après que le Conseil des droits de l'homme des Nations unies (CDHNU) ait émis une décision en août 2018 qui condamnait le Canada pour son refus d'accorder l'accès à des soins de santé essentiels selon le statut de la personne. La décision touchait spécifiquement au cas de Nell Toussaint à qui on a refusé des soins de santé parce qu'elle était sans-papiers. Nell est une des quelque cinq cent mille personnes, en Ontario seulement, à qui on refuse la couverture des soins de santé et l'accès à des soins sur la base de leur statut, ce qui met leur santé en péril.

Le CDHNU a accordé au gouvernement 180 jours, jusqu'au 9 février, pour faire rapport suite à une étude de la législation nationale, « afin de veiller à ce que les migrants puissent accéder aux soins de santé essentiels pour prévenir un risque raisonnablement prévisible qui pourrait avoir comme conséquence une perte de vie ». Le jour de la date limite, le gouvernement canadien n'avait toujours pas répondu à la demande du comité.

À la lumière de cette décision de l'ONU, plus de 1 500 individus et 80 organisations ont signé une lettre ouverte adressée au gouvernement fédéral et revendiquant que celui-ci :

1) Respecte l'ordre du CDHNU d'étudier les lois et les politiques existantes en matière de couverture des soins de santé pour les migrants irréguliers.

2) Assure l'affectation de ressources nécessaires pour que tout le monde au Canada puisse avoir accès à des soins des santé universels et équitables, sans égard au statut d'immigration.

3) Accorde à Nell Toussaint une indemnisation adéquate pour le préjudice sérieux dont elle a été victime pour n'avoir pas pu bénéficier de soins de santé essentiels.

Sherbrooke, Québec


Montreal, Québec



Toronto, Ontario


Saskatoon, Saskatchewan


Edmonton, Alberta



Vancouver, Colombie-Britannique


(Photos : N, Kansal, Q052, Caring for Social Justice, Sanctuary Health)

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Condamnons l'appui du Canada au coup d'État
au Venezuela orchestré par les États-Unis

Déclaration


Une délégation canadienne dont fait partie Don Foreman (2e à partir de la gauche) du Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes, a participé en tant qu'observateur aux élections au Venezuela, le 8 mai 2018.

Le STTP condamne la décision du gouvernement du Canada de reconnaître le chef de l'opposition vénézuélienne, Juan Guaido, comme le président légitime du Venezuela, sans égard au président élu Nicolas Maduro.

Il est très inquiétant de voir le gouvernement canadien soutenir ce coup de force orchestré par les États-Unis et contraire au droit international. En emboîtant le pas aux États-Unis, le Canada s'aligne sur les régimes de droite du Groupe de Lima et de Donald Trump. Leur intervention s'apparente à celles réalisées par d'anciens gouvernements américains dans le but de perturber des gouvernements démocratiquement élus dans les Amériques et ailleurs dans le monde. Il s'agit d'une situation inacceptable.

Un gouvernement légitime

Le peuple vénézuélien a créé la constitution bolivarienne en partant de zéro et a tenu plusieurs élections démocratiques. Les Vénézuéliens sont en mesure de diriger leur pays sans ingérence ni harcèlement de la part des États-Unis et de leurs alliés, dont fait partie le Canada.

Le Venezuela fait face à des difficultés économiques, dont bon nombre sont directement attribuables aux sanctions économiques que lui imposent les États-Unis afin de provoquer un changement de gouvernement.

Une usurpation du pouvoir

Le 23 janvier dernier, Juan Guaido, chef de l'opposition, s'est autoproclamé président intérimaire. Rapidement (et illégalement), il a été reconnu par le Canada, les États-Unis et d'autres alliés des Américains. La situation au Venezuela n'est rien de moins qu'une usurpation du processus démocratique.

Selon des observateurs du monde entier, dont faisait partie un délégué du STTP, les élections présidentielles du 20 mai 2018 se sont déroulées de manière libre, transparente, fiable, sûre et conforme à la loi.

Le président Maduro a remporté les élections avec près de 67,84 % des voix. Aucun des autres candidats briguant la présidence n'a contesté les résultats. Malgré les déclarations de nombreux observateurs assurant que le processus électoral était légitime, le Canada et les États-Unis soutiennent qu'il ne l'était pas. En réalité, ils affirment que les élections n'ont pas donné les résultats qu'ils espéraient.

Le STTP n'appuie pas les coups d'État

Ne nous méprenons pas : l'appui des États-Unis à ce coup d'État se résume au pétrole. Le Venezuela possède les plus grandes réserves de pétrole brut au monde. Le conseiller américain à la sécurité nationale, John Bolton, a déclaré publiquement que les États-Unis ont beaucoup à perdre dans la crise politique du Venezuela, mentionnant expressément le pétrole du pays et les avantages qu'il pourrait apporter aux États-Unis.

« Si nous pouvons faire en sorte que les sociétés pétrolières américaines investissent vraiment dans le Venezuela et y produisent le pétrole dont les États-Unis ont besoin, cela fera une grande différence pour notre pays sur le plan économique », a déclaré M. Bolton.

Le STTP appuie le peuple et les travailleuses et travailleurs des postes du Venezuela

Mike Palecek, président national du STTP, à un rassemblement contre le Groupe de Lima à Ottawa le 4 février 2019

Pendant ce temps, le Canada continue d'entretenir de bonnes relations avec des régimes horribles, comme l'Arabie saoudite. Le STTP affirme sa solidarité avec le peuple vénézuélien et ses travailleurs et travailleuses des postes. Selon la constitution bolivarienne, les droits, la santé et la sécurité et l'accès aux soins de santé des fonctionnaires vénézuéliens ont été grandement améliorés. Le STTP est solidaire de ses consoeurs et confrères dans leur lutte pour la démocratie et la protection de leurs droits contre les attaques des gouvernements étrangers.

Solidarité,

Mike Palecek, président national

(7 février 2019)

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