14 février 2019
Des
défis
auxquels les
travailleurs du Québec
font face
L'élite
dirigeante cherche
à démanteler
les organisations de défense
collective des travailleurs
- Pierre
Chénier -
PDF
• Les
travailleurs de la fonderie de cuivre Horne s'opposent aux
mesures
disciplinaires injustes de Glencore
Territoires du
Nord-Ouest
• Les travailleurs du secteur public
annulent
la grève et acceptent la médiation
exécutoire
États-Unis
• Les enseignants de Los Angeles
défendent résolument le droit à
l'éducation
Des défis auxquels les
travailleurs du Québec font
face
- Pierre Chénier -
Dans un effort pour démanteler les
organisations
de défense
collective des travailleurs, on accuse la résistance
organisée des
travailleurs à la défense de leurs droits de
perturber
différents
secteurs de l'économie. Les organisations de
défense
collective des
travailleurs et leur lutte organisée à la
défense
de leurs droits sont
considérées comme
une attaque contre l'économie et contre les travailleurs
individuels
qui voudraient simplement travailler et ne s'occuper de rien
d'autre.
L'industrie de la construction est un des
secteurs
où les
gouvernements font des efforts concertés pour
écraser les
organisations
de défense collective des travailleurs. Les mesures prises
visent à
donner aux entreprises de la construction la liberté
d'agir en
toute
impunité sur les chantiers de construction pour maximiser
leurs
profits, quelles que
soient les conséquences pour la santé et la
sécurité des
travailleurs et la sécurité du public.
La vérité est tournée sens
dessus
dessous, et l'affirmation est
faite que l'intervention des syndicats sur les chantiers de
construction pour défendre la santé et la
sécurité est un geste
d'intimidation contre les employeurs et les travailleurs
individuels
qui « veulent juste travailler ». C'est
l'allégation qui a été portée
contre les grutiers du
Québec quand ils ont bravement refusé de se
présenter au travail
pendant une semaine en juin 2018 pour protester contre une
nouvelle
réglementation dangereuse qui dévalorisait leur
formation
professionnelle et menaçait la sécurité des
grutiers et du public.
C'est une calomnie de dire que les grutiers ont
fait de
l'intimidation contre leurs collègues qui voulaient juste
aller
travailler. Les grutiers s'opposaient à un régime
qui
leur demandait
d'obéir à toute réglementation que le
gouvernement
promulgue sans
considérer ou faire enquête sur ses impacts et sans
avoir
le
consentement des travailleurs
directement affectés et de leurs organisations. [1]
La Commission de la construction du Québec
(CCQ), l'agence
gouvernementale chargée de la gestion des relations de
travail,
de la
formation professionnelle et de la main-d'oeuvre dans le secteur,
dit
avoir pris note de plusieurs cas d'intimidation exercés
par le
syndicat
contre des grutiers. La CCQ n'a produit aucune preuve de cela
mais elle
a
dit qu'elle pourrait utiliser ces données pour poursuivre
les
travailleurs et leur syndicat.
La CCQ invoque constamment la
responsabilité qui
lui incombe de faire appliquer la loi R-20, la
Loi sur les relations du travail, la formation professionnelle et
la
gestion de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la
construction ,
une loi qui comprend plusieurs clauses sur l'intimidation. La loi
dit
notamment : « Quiconque use
d'intimidation ou de menace raisonnablement susceptible de
provoquer
une entrave, un ralentissement ou un arrêt des
activités
sur un
chantier commet une infraction et est passible d'une amende
de 1 137 $
à 11 370 $ pour chaque jour ou partie de
jour que
dure l'infraction. »
Elle dit aussi :
« Commet une infraction et est passible
d'une
amende de 1 541 $
à 15 373 $ quiconque use d'intimidation ou
de
menace raisonnablement
susceptible de contraindre un employeur à prendre une
décision à
l'égard de la gestion de la main-d'oeuvre dans l'industrie
de la
construction ou de l'empêcher de
prendre une telle décision ou autrement lui impose une
telle
décision. » En plus, tout représentant
syndical déclaré coupable selon
la loi peut se voir interdire de remplir ses fonctions pour une
période
pouvant atteindre cinq ans.
L'intention est claire : rendre de plus en
plus
difficile, voire
illégal, pour les organisations de défense
collective des
travailleurs
d'intervenir pour obtenir des conditions de travail
adéquates.
Il est frappant aussi que la Commission
Carbonneau ait
été utilisée
en partie pour dépeindre les organisations des
travailleurs de
la
construction comme des organismes de type criminel et
mafieux.
Le gouvernement libéral a
créé la
Commission Charbonneau en 2011 et
l'a chargée d'examiner et d'éradiquer la collusion
et la
corruption
dans l'octroi des contrats publics dans la construction, de
révéler les
liens possibles entre cette corruption et le financement des
partis
politiques et l'infiltration possible de l'industrie de la
construction
par le crime organisé.
La Commission Charbonneau a insinué que
les
collectifs de
travailleurs et les organisations alliées ont mené
des
actions
concertées de défense des droits des travailleurs
qui ont
parfois mené
à la perturbation des activités sur les chantiers
et sont
semblables à
des activités mafieuses. La Commission a fait cette
affirmation
sans
même examiner
l'objectif et les raisons pour lesquels les travailleurs
organisés ont
posé ces gestes, la cause qu'ils défendaient et le
résultat qu'ils
cherchaient à obtenir avec ces actions. Les opinions et
les
recommandations de la Commission Charbonneau ont
été
incorporées dans
certaines des modifications qui ont été
apportées
à la loi R-20.
Pendant ce temps, les activités et les
nombreux
problèmes qui
perturbent sérieusement la vie des travailleurs, causant
parfois
des
pertes de vie tragiques et des blessures sérieuses, ne
font pas
l'objet
d'examen et d'enquête. Ceux qui refusent d'agir pour
résoudre les
problèmes ne sont pas forcés de rendre des comptes.
L'élite dirigeante
veut
créer une situation où les grandes entreprises
peuvent
faire ce
qu'elles veulent aux travailleurs de la construction afin de
maximiser
leurs profits privés.
Le gouvernement Ford en Ontario suit une voie
semblable
à ce qui
est fait aux travailleurs québécois de la
construction en
s'attaquant
aux organisations professionnelles des infirmières, des
enseignants et
d'autres secteurs professionnels. En réduisant les membres
de
ces
organisations à l'état d'individus sans voix, il
les rend
tous sans
défense.
La situation à laquelle les travailleurs font face
aujourd'hui
rend
encore plus important de prendre la parole et de renforcer leurs
luttes
organisées pour bloquer ces attaques contre leurs
syndicats et
ouvrir
la voie à la défense des droits des travailleurs et
des
droits de tous.
Note
1. En Ontario, le gouvernement Ford
dénigre
lui aussi les travailleurs organisés de la construction en
les
accusant, avec son projet de loi 66, de mener à la
«
faillite » les
institutions publiques comme les conseils scolaires, les
collèges, les
universités, les hôpitaux et les
municipalités,
à cause des
mesures et des arrangements qu'on trouve dans leurs «
généreuses »
conventions collectives. Le projet de loi 66 a
été
déposé sans
consultation et sans le consentement des travailleurs directement
affectés. S'il est adopté, les travailleurs
organisés de la
construction qui sont employés sur des sites visés
vont
perdre leur
droit de travailler
sur les chantiers où ils travaillent à l'heure
actuelle
et sur d'autres
chantiers à l'avenir et leurs conventions collectives
négociées seront
déclarées nulles et non avenues. Ceci ouvre la voie
à l'engagement
massif de travailleurs individuels de la construction qui ne
seront pas
protégés par un syndicat ou une convention
collective. Ce
diktat
antiouvrier
du gouvernement Ford au service de l'oligarchie financière
n'est
rien
de moins que criminel.
Appuyons
les
travailleurs
de
la
fonderie
et
leur
liberté
de parole !
Les travailleurs de la fonderie Horne à
Rouyn-Noranda en Abitibi-Témiscamingue rapportent que la
direction a émis des sanctions disciplinaires contre dix
de
leurs collègues pour avoir participé à une
page
Facebook de Rouyn. Selon les travailleurs, cette page est
très
fréquentée par les résidents de
Rouyn-Noranda, y
compris par des
travailleurs de la fonderie.
Cette page Facebook a
récemment affiché une photo d'un jeune homme
souffrant
visiblement de problèmes de respiration, dont la vignette
disait
« ça doit être parce que j'ai travaillé
à la fonderie ». Le nom de la fonderie
n'était
pas donné. Des travailleurs ont répondu à ce
message en cliquant « J'aime » et d'autres ont
écrit
un
commentaire, ce que les gens font régulièrement
quand ils
visitent les pages de Facebook.
Des représentants de la compagnie ont
convoqué dix travailleurs qui avaient répondu au
message
Facebook et leur ont imposé des mesures disciplinaires
pour
avoir soi-disant enfreint le Code de conduite du monopole minier
et
métallurgique mondial. Les mesures disciplinaires vont de
journées de suspension à des avertissements
écrits
et
verbaux. Le Syndicat des travailleurs de la mine Noranda conteste
toutes ces mesures injustes et arbitraires.
Le Code de conduite de Glencore est un long
document
qui parle de toutes sortes de choses, notamment de la
santé et
de la sécurité, des droits humains, des
communautés, de l'environnement, de l'impôt des
entreprises, de la protection et du maintien des actifs, toujours
selon
le point de vue et la vision de la compagnie. Les travailleurs
rapportent qu'ils entendent parler de ce code seulement quand la
compagnie s'en prend à eux pour n'avoir pas fait preuve de
loyauté envers l'entreprise. Par loyauté, la
compagnie
veut dire que les travailleurs doivent garder le silence sur les
problèmes qui existent à la fonderie et sur les
opinions
qu'ils ont sur la manière de les régler.
La compagnie se permet même de surveiller
les
pages Facebook que les travailleurs et les résidents
visitent
régulièrement et de traquer les commentaires qu'ils
font
afin de prendre des mesures disciplinaires arbitraires contre les
travailleurs de la fonderie si elle juge qu'ils ont manqué
de
loyauté. Une simple mention de problèmes
liés
à la santé
et la sécurité des travailleurs est
considérée comme une attaque contre l'image
publique et
la réputation de la compagnie. Sous ce régime
dictatorial, le soi-disant manque de loyauté des
travailleurs
est un prétexte de la part de la compagnie pour refuser de
reconnaître que les problèmes existent et de
rectifier la
situation. C'est un prétexte pour priver
les travailleurs de leur liberté de parole et de leur
droit de
participer publiquement et ouvertement à l'identification
et
à la solution des problèmes. Facebook est un forum
où les gens affichent des commentaires. En suivant
à la
trace les commentaires des travailleurs sur Facebook et en
prenant des
mesures disciplinaires, Glencore étend son pouvoir
de monopole sur la vie des travailleurs et leur liberté de
parole et de conscience. C'est une situation dangereuse pour les
travailleurs et leur communauté parce que l'ojectif
visé
est de les contraindre au silence. Non seulement c'est une
attaque
contre leurs
droits mais cela pourrait bien devenir un cauchemar aux
conséquences désastreuses dans une installation de
production comme une fonderie.
Les travailleurs considèrent avec raison
que
cette attaque de Glencore est inacceptable et ils demandent que
la
compagnie retire les mesures disciplinaires contre leurs dix
collègues. Les travailleurs ont le droit de prendre la
parole
sur les questions qui les concernent aux endroits de travail,
dans la
communauté et dans la société. Utiliser son
pouvoir sur l'emploi pour priver les travailleurs de leur
liberté de parole et de conscience constitue un abus de
pouvoir
qui ne peut pas et ne doit pas être
toléré.
Territoires du Nord-Ouest
Dans un communiqué de presse du 10
février, le Syndicat des travailleurs du Nord annonce
qu'après deux jours de médiation il n'a pas
été possible d'en arriver à une entente de
principe entre le syndicat qui représente 4 000
travailleurs des services publics et le Gouvernement des
Territoires du
Nord-Ouest (GTNO). Le
syndicat et le GTNO se sont par ailleurs entendus pour soumettre
les
questions en litige aux recommandations exécutoires d'un
médiateur nommé par le gouvernement.
Selon le syndicat, la
médiation exécutoire a été
acceptée
en raison de certains progrès obtenus lors de la
séance
de médiation des 8 et 9 février. Les
salaires,
la durée de la convention et la sécurité
d'emploi
demeurent toutefois non résolus. Pendant les pourparlers
de la
fin de semaine, les travailleurs ont maintenu leurs
revendications de salaires qui leurs permettent de tenir
tête
à l'augmentation du coût de la vie et de la
création de plus d'emplois à temps plein
dotés d'
avantages sociaux et d'un régime de retraite. Les
travailleurs
considèrent aussi qu'une convention collective de cinq
ans,
telle que l'exige le gouvernement, est trop longue.
Plus tôt, le 8 février, le GTNO
a
voté à 11 contre 6 et une abstention pour
rejeter la proposition d'un député de Yellowknife
qui
demandait au gouvernement territorial d'accepter l'arbitrage
exécutoire. Le syndicat avait lui-même
proposé au
gouvernement de régler le conflit par l'arbitrage
exécutoire mais celui-ci l'avait
rejetée du revers de la main sous prétexte que le
processus de négociation devait suivre son cours. Le
syndicat
avait répliqué que l' offre du gouvernement
était
inacceptable pour les travailleurs il y a trois ans et l'est
toujours.
Ce n'est pas évident en ce moment pourquoi le gouvernement
a
accepté la médiation exécutoire, mais les
travailleurs, eux,
demandent au médiateur de tenir compte de leurs
principales
revendications et préoccupations.
Dans la période qui a
précédé l'annulation de la grève, qui
devait être déclenchée le 11
février,
le GTNO a agi de façon très provocatrice en faisant
parvenir des documents directement aux domiciles des travailleurs
dans
lesquels il donnait de fausses informations sur son offre et il a
appelé ouvertement les travailleurs à traverser les
lignes de piquetage pendant la grève.
Le GTNO prétend respecter les travailleurs
du
secteur public qui livrent des services vitaux et la valeur dont
la
population des territoires dépend pour vivre. En fait, il
donne
de fausses informations au public quant à la nature
économique du travail lié au service public et des
programmes sociaux. Il présente le travail du secteur
public
comme
étant sans valeur et l'argent versé par le
gouvernement
en échange de la capacité de travailler des
travailleurs
comme un coût débilitant qui siphonne les fonds
publics
destinés à des projets d'infrastructure qui sont
présentement à l'étude. Il faut
dénoncer
ces absurdités non scientifiques et les rejeter comme
étant intéressées, corrompues et au service
de l'oligarchie financière pour qui le Nord et ses
ressources ne
sont qu'une immense source de valeur sociale produite par les
travailleurs qu'elle peut exproprier.
Les travailleurs sont à la fois les
bâtisseurs des infrastructures et les créateurs de
la
valeur qu'elles contiennent. Ils sont des producteurs de richesse
sociale par leur livraison des services publics et des programmes
sociaux. Ils font une juste réclamation à la valeur
qu'ils créent dans tous les secteurs de l'économie
à un niveau de vie moderne
acceptable aux travailleurs. Forum Ouvrier se joint aux
travailleurs du secteur public des Territoires du Nord-Ouest pour
exiger que leurs justes revendications et préoccupations
soient
prises en compte.
États-Unis
Manifestation des enseignants devant l'hôtel de ville de
Los
Angeles, le 19 janvier 2019
Du 14 janvier au 23 janvier,
environ 34 000 enseignants et membres du personnel de
soutien
en éducation, dans plus de 900 écoles de Los
Angeles
qui comptent plus de 640 000 élèves dans
le
deuxième plus grand district scolaire du pays, ont fait la
grève du 14 au 23 janvier. Après
avoir occupé la rue et fait du piquetage quotidien devant
les
écoles ainsi que des manifestations massives de plus
de 50 000 personnes devant l'hôtel de ville, les
enseignants et le personnel ont obtenu des gains importants. Ils
ont
voté à 81 % pour accepter la nouvelle
convention collective et retourner au travail. Le conseil
scolaire unifié de Los Angeles a accepté
d'embaucher
davantage d'infirmières, de bibliothécaires et de
conseillers en orientation ; de réduire les tests
normalisés et les fouilles aléatoires des
élèves par la police ; de créer un
fonds de
défense des immigrants ; de remettre le
contrôle des
budgets de 30 écoles aux communautés
locales et de réduire la taille des classes.
Dès le premier jour de la grève,
une
énorme majorité d'enseignants se sont
présentés dans leurs écoles tous les matins
pour
tenir des lignes de piquetage aux côtés de parents
et
d'élèves. Les grévistes et leurs supporters
se
sont ensuite rendus au centre-ville pour des rassemblements
dépassant les 50 000 personnes le premier jour
et
qui n'ont cessé de croître par la suite. Les rues
étaient animées de la présence des
manifestants.
Il y avait beaucoup d'enthousiasme dans les rues. Toute la
semaine, il
y avait partout des chants, des danses, des créations
orales,
des fanfares et des mariachis. Les enseignants ne se sont pas
laissés décourager par la pluie abondante ;
ils ont
revêtu
des ponchos et ont plastifié leurs feuilles de chant et
leurs
pancartes. Comme l'indique une affiche sur une des pancartes,
« 45 est la limite de vitesse, pas la taille des
classes ». Ils se sont également assurés
que
partout dans la ville, les gens parlent de la grève et de
leurs
revendications , dans les cafés, les autobus et les
magasins.
Les enseignants ont assumé leur
responsabilité sociale, défendu les
intérêts
de la société pour des écoles publiques
entièrement subventionnées, avec le personnel
infirmier,
les bibliothécaires et les conseillers en orientation
nécessaires, ainsi que leurs intérêts
collectifs
pour de meilleures conditions de travail, comme des classes moins
nombreuses et des salaires qui correspondent au travail difficile
qu'ils accomplissent. Le Syndicat des enseignants unis de Los
Angeles
(UTLA) a organisé la grève qui a été
largement appuyée par les parents, les
élèves et
les organisations communautaires.
Plus de conseillers en orientation, plus
d'infirmières et des classes moins nombreuses sont une
façon concrète de briser le cycle qui mène
de
l'école à la prison. La Californie se classe
au 47e
rang des États-Unis en ce qui concerne l'accès aux
conseillers en orientation : il y a en moyenne un conseiller
en
orientation pour 682
étudiants, ce qui dépasse de loin le ratio
recommandé de un pour 250. En même temps, le
conseil
dépense 80 millions de dollars par an pour les
services
policiers. Le manque de conseillers en orientation,
d'infirmières et de travailleurs sociaux, le tout
associé
à des classes trop nombreuses, ne font qu'alimenter le
problème des jeunes
qui passent directement de l'école à la prison.
Amir
Whitaker, avocat auprès de la Ligue américaine des
droits
civils de la Californie du Sud, s'exprime ainsi : «
Cela a
tout à voir avec les enseignants qui ont de grandes
classes : si vous ne pouvez pas gérer quarante
étudiants et appeler à l'aide, et s'il n'y a pas de
soutien social et
émotionnel, seule la police est sur place. »
Los
Angles compte un grand nombre d'élèves
afro-américains et latinos qui souffrent le plus des
actions de
la police dans les écoles.
L'UTLA a également appelé à
un
moratoire sur les nouvelles écoles à charte dans le
district. Les écoles à charte sont
gérées
de manière privée et ne rendent pas de comptes au
public,
bien
qu'elles utilisent des fonds publics et soient souvent
hébergées dans des bâtiments d'écoles
publiques. À Los Angeles, un élève sur cinq
fréquente
maintenant une école à charte. On compte plus
de 200
écoles de ce type sur le territoire du district, une des
plus
grandes proportions au pays. Les écoles à charte
sont
utilisées pour miner les syndicats et éliminer
l'éducation publique ainsi que la responsabilité
sociale
du gouvernement de la fournir. Cependant, dans ce cas, les
enseignants
des
écoles à charte ont soutenu la grève et ont
planifié leur propre grève.
Lors d'un rassemblement public organisé
devant
l'hôtel de ville le 22 janvier, le président
d'UTLA,
Alex Caputo-Pearl, a déclaré à la
foule :
« Nous n'avons pas gagné à cause d'un seul
dirigeant. » Il a ajouté : « Nous
n'avons
pas gagné à cause d'un petit groupe de dirigeants.
Nous
avons gagné parce que vous avez
tenu des lignes de piquetage dans plus de 900 écoles
de
toute la ville, avec des parents, des étudiants et des
organisations communautaires. » Plus tard il a
souligné en entrevue : « La
créativité,
l'innovation, la passion, l'amour et les émotions de nos
membres
étaient présents partout dans les rues, parmi les
communautés, dans les
parcs, à la vue de tous. Et je suis si fier de nos membres
- -
enseignants, conseillers en orientation , infirmières,
bibliothécaires, psychologues, éducateurs de la
petite
enfance, enseignants aux adultes - qui se sont engagés en
nombre
record sur les lignes de piquetage à défendre
l'éducation publique et à demander au gouvernement
d'assumer sa
responsabilité de la fournir. »
Lors de la manifestation de masse du 22
janvier,
la secrétaire et présidente des
négociations,
Arlene Inouye, a passé en revue les points forts de
l'entente de
principe, qui a été intégralement
publiée
en ligne :
- une infirmière à plein temps dans
chaque école. Trois cents autres infirmières seront
embauchées au cours des deux prochaines
années ;
- un bibliothécaire à temps plein
dans
chaque école secondaire. Le conseil scolaire
embauchera 82
bibliothécaires supplémentaires ;
- plus de conseillers en orientation. Le district
engagera 17 conseillers supplémentaires pour assurer
qu'il
y ait un conseiller en orientation pour chaque tranche
de 500
élèves des écoles secondaires. Bien qu'une
charge
de travail de 500 soit bien supérieure au nombre
nécessaire de 1 pour 250 étudiants, cela
aidera. De plus, un financement supplémentaire a
été obtenu pour réduire les ratios relatifs
aux
travailleurs sociaux en psychiatrie, aux psychologues et aux
conseillers en assiduité scolaire ;
- un fonds de défense des immigrants, avec
une
ligne téléphonique d'urgence et un avocat
dédiés aux familles immigrantes ;
- moins de tests. Le conseil scolaire et le
syndicat
créeront un comité chargé de réduire
de
moitié le nombre de tests normalisés ;
- une réduction de la taille des classes.
L'article 1.5 tant détesté permettant au
conseil
scolaire d'ignorer les limites contractuelles relatives à
la
taille des classes est retiré. Des plafonds de taille de
classe
peuvent maintenant être appliqués, et lorsqu'une
classe
dépasse le plafond, une nouvelle classe doit être
formée. En outre, pour les
classes allant de la 4e à la 12e année,
les
limites de classe seront réduites de quatre
élèves
au cours des trois prochaines années ;
- un progrès sur la question des
écoles
à charte. Le conseil scolaire appuiera un moratoire
à
l'échelle de l'État sur les écoles à
charte
- ce qui constitue une étape politique positive,
même s'il
ne s'agit pas d'un moratoire à Los Angeles. Le syndicat a
également gagné en fait de préavis et de
voix au
chapitre dans le processus lorsque des écoles à
charte sont localisées près des écoles
publiques
de quartier ;
- une augmentation salariale de 6 %,
dont 3 % appliqué rétroactivement
à
l'année scolaire 2017-2018 et 3 % pour
cette
année, rétroactivement au 1er
juillet 2018. Il
sera possible de renégocier les salaires dans les
années
à venir ;
- moins de fouilles de jeunes sur une base
aléatoire. Le nombre d'écoles qui ne feront pas de
fouilles aléatoires des élèves doublera,
passant
de 14 à 28.
- des écoles communautaires. Trente
écoles obtiendront cette appellation ainsi qu'un
financement
supplémentaire. Un conseil formé de
résidents
locaux va gérer le budget de chaque école, en
collaboration avec le coordonnateur communautaire (un nouveau
poste
syndical).
- un effort commun du syndicat, du conseil
scolaire et
du maire en faveur d'un financement supplémentaire des
écoles par le comté et l'État. Le maire Eric
Garcetti a accepté d'appuyer avant le scrutin de 2020
l'Initiative Les écoles et les communautés avant
tout
, qui supprimera l'échappatoire fiscale en matière
d'imposition du
secteur immobilier commercial en Californie et rétablira
un
financement de 11 milliards de dollars pour les
écoles et
les autres services publics ;
- de l'espace vert. Un groupe de travail pour
développer davantage d'espaces verts sera
créé
dans les écoles.
Après le rassemblement, les enseignants
sont
retournés à leur école respective pour
examiner et
discuter avec leurs collègues des détails de
l'entente,
puis pour voter sur l'acceptation de cette entente et leur retour
au
travail le lendemain matin. Certains enseignants de la ville ont
été frustrés par un processus qui, à
leur
avis, avait été précipité.
La grande majorité a voté en faveur de l'entente et
les
enseignants sont retournés le 23 janvier dans leurs
salles
de classe.
La grève bloque les efforts
d'éliminer
les conseils scolaires publics
Los Angeles possède le plus grand conseil
scolaire américain administré par des commissaires
élus. (Le plus grand conseil scolaire, New York et le
troisième plus grand, Chicago, sont tous
administrés par
des personnes nommées par le maire.)
Année
après
année, les élections au conseil scolaire ont battu
des
records de dépenses. Les forces qui représentent
les
monopoles et qui cherchent à éliminer
l'éducation
publique ont dépensé 13 millions de dollars
lors de
la dernière élection des commissaires au conseil
scolaire
de Los Angeles. La plupart des fonds provenaient de la
famille Walton (les propriétaires de Walmart) et d'Eli
Broad,
deux des plus importants bailleurs de fonds au niveau national
des
écoles à charte, des allocations liées
à
chaque école et de la privatisation. Les forces
anti-publiques
des écoles ont remporté la majorité des
sièges au conseil scolaire. Et après la
démission
de l'ancien surintendant au début
de l'année dernière pour des raisons de
santé,
cette majorité a choisi le surintendant actuel, Austin
Beutner.
Beutner n'a aucune formation en éducation et est un
multimillionnaire de Wall Street. Son plan, appuyé par
Broad,
consistait à éliminer le conseil scolaire
unifié
de Los Angles et à faire en sorte qu'au moins la
moitié
des élèves aillent dans
des écoles à charte privées financées
par
des fonds publics. Beutner a été auparavant mis
à
contribution pour démanteler les conseils scolaires
publics de
Détroit et de la Nouvelle-Orléans, qui ne disposent
plus
d'écoles publiques ni de district scolaire central. La
grève à Los Angeles a permis à ce moment-ci
de
mettre un frein à cette tendance.
Comme l'explique Arlene Inouye : «
Nous
sommes un syndicat qui s'est engagé il y a quatre ans dans
cette
voie. Cela ne s'est pas produit par hasard, vous savez, au cours
des 21 derniers mois pendant lesquels nous avons
été
en négociation. Mais il y a quatre ans de cela, nous avons
mis
en place un programme pour organiser nos
écoles, faire participer les parents et les
communautés
et nous doter d'un programme de justice sociale, un programme de
justice en éducation pour tous nos
élèves. »
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