Numéro 31 - 19 novembre 2019
D'importants anniversaires
Trente ans après la chute du
mur de Berlin
• L'exigence
des peuples d'exercer un contrôle sur leur vie
est plus grande que jamais
- Pauline Easton -
134e anniversaire de la pendaison de Louis Riel
• Jour
d'infâmie dans l'histoire du Canada
• La
pendaison de Louis Riel et les excuses libérales
Trente ans après la chute du mur
de Berlin
- Pauline Easton -
À Berlin le jour de la chute du mur, le 9 novembre
1989
Le 9 novembre 2019 marquait le 30e
anniversaire de la chute du mur de Berlin.
En 1989, la chute du mur de Berlin a été l'un
d'une série d'événements qui a captivé
l'imagination du monde entier. Cette année-là, il
y a eu d'abord en Pologne l'accord entre le
gouvernement et le syndicat anticommuniste
Solidarnosc. Puis, en novembre, le mur de Berlin a
été démoli et en décembre, en Roumanie, Nicolae
Ceausescu et sa femme ont été brutalement
exécutés. Au cours des deux années qui ont suivi,
l'Union soviétique s'est effondrée et la carte du
monde a été transformée.
En 1990, l'Organisation pour la sécurité et
la coopération en Europe (OSCE), les États-Unis et
le Canada ont adopté la Charte de Paris pour une
nouvelle Europe dans laquelle ils déclaraient que
les valeurs communes étaient la seule démocratie
qu'ils accepteraient dans la nouvelle situation.
Désormais, tout pays qui n'adopterait pas une
économie de marché, un système multipartite et la
définition impérialiste américaine des droits de
l'homme devait être la cible d'un « changement de
régime ». Sur cette base, les forces
contre-révolutionnaires ont établi des systèmes
politiques dans lesquels les capitalistes
triomphants ont mis au gouvernement des «
radicaux » et des « conservateurs »,
tandis que la politique anti-ouvrière et
antipeuple restait la même. Des « révolutions de
couleur » ont été lancées, suivies d'une
agression militaire quand elles échouaient à
provoquer les changements que les forces
contre-révolutionnaires exigeaient.
De l'euphorie, de l'euphorie et encore plus
d'euphorie était l'ordre du jour de la bourgeoisie
il y a trente ans. Tout sera remis sur la bonne
voie. Une campagne d'une ampleur sans précédent a
été lancée contre le communisme.
Mais l'euphorie qui a accompagné la chute du mur
de Berlin s'est vite évaporée et la classe
ouvrière tant dans les pays d'Europe de l'Est que
dans ceux d'Europe occidentale et dans le monde
entier a pu voir que les changements qui ont eu
lieu n'ont pas favorisé les travailleurs.
En l'espace de cinq ans, le résultat a été la
guerre en Bosnie, l'invasion de la Tchétchénie par
la Russie, les revendications de la Géorgie sur
l'Abkhazie, le conflit entre Arméniens et Azéris à
propos du Haut-Karabagh, le chômage massif ainsi
que l'accumulation de la pauvreté à un pôle et de
la richesse à l'autre.
Manifestation contre la guerre de l'OTAN dirigée
par les États-Unis contre la Yougoslavie,
Ottawa, 17 avril 1999
Au cours de ces trente années écoulées depuis la
chute du mur de
Berlin, la prétendue libération de l'Europe de
l'Est et l'effondrement
de l'Union soviétique, le repli de la révolution a
ouvert la voie au
déferlement de l'offensive antisociale
néolibérale. Pour soutenir leur
effort de domination mondiale, les États-Unis ont
augmenté le nombre de
pays membres de l'alliance militaire de l'OTAN et
élargi sa portée au-delà
des frontières de l'Atlantique Nord. Avec l'aide
de ses alliés de
l'OTAN, les États-Unis ont lancé de multiples
guerres d'agression et
d'occupation, causant des centaines et des
milliers de morts et de
la destruction. Au nom de la guerre au
terrorisme, le
changement de régime, la destruction et l'état
d'exception sont
présentés comme la « nouvelle normalité ».
Dans tous les pays prétendument démocratiques où
règne l'oligarchie financière internationale, les
travailleurs sont soumis aux pires traitements par
les monopoles, les oligopoles et les gouvernements
que ceux-ci contrôlent. Cette offensive contre la
classe ouvrière, contre le mouvement communiste et
ouvrier, contre les larges masses populaires
d'Asie, d'Afrique, d'Amérique latine et des
Caraïbes, est facilitée par la désinformation de
l'État, de ses organes et de tous ceux qui
cherchent à conserver des positions de pouvoir et
de privilèges dans l'ordre capitaliste mondial.
Aujourd'hui, l'oligarchie financière
internationale a usurpé les pouvoirs des États
nationaux pour imposer des intérêts privés
supranationaux étroits. Elle gouverne avec des
cartels et des coalitions déguisés en
gouvernements. Plus elle usurpe le pouvoir et
essaie d'établir son hégémonie sur ses rivaux tout
en contrôlant le peuple, plus elle gouverne en
recourant à des pouvoirs d'exception au nom de la
sécurité nationale et de l'intérêt national, plus
vaines sont ses tentatives de manipuler les
élections pour éviter les guerres civiles qui font
rage dans ses propres rangs et plus il est clair
que leur pouvoir est superflu. Il faut des
institutions modernes pour réaliser les
aspirations des peuples d'humaniser
l'environnement naturel et social et de vivre dans
la paix.
Il y a trente ans,
la bourgeoisie, l'impérialisme et la réaction
mondiale ont manipulé le mécontentement général
des peuples contre le
pseudo-socialisme dans l'ancienne Union soviétique
et les démocraties
populaires d'Europe de l'Est pour installer un
système capitaliste.
Aujourd'hui, le mécontentement des masses du monde
entier contre
l'ordre capitaliste néolibéral est tel que la
bourgeoisie,
l'impérialisme et la réaction mondiale font encore
une fois tout en leur pouvoir pour manipuler le
mécontentement afin de sauver
leurs institutions démocratiques libérales en
faillite pour
conjurer les conséquences de l'anarchie qui existe
et qu'ils ne peuvent
contrôler.
Une fois de plus, les reportages des médias qui
parlent de l'importance de la chute du mur de
Berlin ont pour but de noyer toute discussion sur
les problèmes réels qui exigent des solutions
réelles. La nécessité du renouveau démocratique
est oubliée dans un faux débat qui juxtapose
l'interprétation dogmatique du socialisme et
l'interprétation dogmatique du capitalisme. Cela
ne fait que souligner l'absurdité et la
superficialité du discours de la bourgeoisie. Cela
met en évidence son arrogance et sa déconnexion
des problèmes réels qui ont nécessité des
solutions il y a trente ans et auxquels il faut
s'attaquer encore aujourd'hui plus que jamais. Il
ne peut en être autrement, car ce qui est célébré
au nom de la « liberté » et de la «
démocratie », c'est l'usurpation du mouvement
des travailleurs et des peuples pour exercer un
contrôle sur leur vie.
La promesse de « liberté » s'est
transformée en guerres d'occupation et d'agression
menées
par les impérialistes américains et leurs alliés
de l'OTAN avec d'autres grandes puissances. Elle
prend la forme de
sanctions meurtrières, de mise en cage d'enfants,
de la violence
contre les femmes et les familles, des meurtres
brutaux des peuples
autochtones comme nous le voyons en Bolivie, de la
traite des
êtres humains comme main-d'oeuvre à bon marché et
d'un nouvel ordre mondial où les prérogatives sont
utilisées pour imposer des arrangements qui n'ont
pas le
consentement des peuples. L'intérêt national et la
sécurité nationale sont invoqués pour justifier le
pillage, l'exploitation et la criminalisation
accrues. Le discours
politique rationnel qui unifie le corps politique
et ouvre la voie au
progrès est absent parce que les partis politiques
sont devenus
un système de partis cartellisés sans membres, les
assemblées législatives ne sont plus des véhicules
généralement considérés comme exprimant la
souveraineté nationale et les organes politiques
sont
détruits au nom de grands idéaux. Le résultat,
c'est l'anarchie, la violence et la
marginalisation accrue des citoyens
du processus décisionnel.
Les seules
réussites, nous dit-on, sont celles d'une poignée
de milliardaires qui, en fait, ne sont que des
exemples de la tendance que les riches sont de
plus en plus riches et les pauvres de plus en plus
pauvres. Les gens de l'ancienne Allemagne de l'Est
disent ouvertement que la liberté qu'ils ont
obtenue est « la liberté d'acheter des biens de
consommation » alors que leur désir profond
d'exercer un contrôle sur leur vie est plus
lointain que jamais et que l'Allemagne unifiée,
qui rivalise avec la France et la Grande-Bretagne,
est devenue, avec les États-Unis, le principal
concurrent pour la domination de l'Europe, de
l'Afrique et de l'Asie.
Trente ans après la chute du mur de Berlin, toute
l'euphorie autour de la chute du communisme et de
la victoire du capitalisme a disparu. Pour
détourner l'attention de l'état du monde
capitaliste-impérialiste, l'élite dirigeante, en
plus d'assimiler le pseudo-socialisme au
communisme, attaque l'idéologie communiste comme
étant une idéologie de haine qui pousse à la
violence. Pour empêcher les gens de s'exprimer par
peur des représailles, la propagande est toujours
fondée sur la perspective de la guerre froide
selon laquelle « l'économie de marché » et le
pluralisme idéologique et politique sont
supérieurs au communisme. Quelle est la réalité à
l'échelle mondiale ? Qu'est-ce que cette
réalité nous dit ? Que faut-il faire pour
résoudre les graves problèmes auxquels font face
les sociétés et l'humanité ?
La réalité est que partout dans le monde, les
gens exigent des changements ; une
désaffection générale existe partout. Quel est le
contenu du renouveau démocratique qui est
l'exigence fondamentale des peuples et quelle
forme doit-il prendre ?
Le but de la propagande de l'échec du communisme
est d'encourager les gens à se ranger soit du côté
de ceux qui disent que le communisme est mauvais,
soit du côté de ceux qui prétendent que les
institutions démocratiques libérales peuvent
fonctionner sans corruption. Comme c'est le cas
dans toutes les autres sphères, une diversion est
créée entre deux faux contraires.
L'humanité a appris de la période très
tumultueuse qu'elle a traversée que les problèmes
auxquels elle fait face ne sont pas une question
de lutte entre les dogmes. Il s'agit de savoir ce
qui se passe dans ce monde. Quel est le stade de
son développement et que faut-il faire ?
Le renouveau démocratique est le contenu
principal de cette période. Il surpasse toutes les
autres considérations et est l'étendard qui amène
de nouvelles forces au centre de l'histoire. Des
millions et des millions de personnes ont une
expérience directe de leurs conditions de vie et
de travail et elles perçoivent leur réalité non
pas à travers le prisme des dogmes mais par leur
activité pratique.
La
diversion de la « victoire de la démocratie »
sur le « communisme » a été utilisée il y a
trente ans pour créer l'euphorie et aujourd'hui
elle sert à maintenir les anciennes forces et les
vieux contenus au pouvoir même si dans les
conditions d'aujourd'hui il n'y a pas de place
pour ces anciennes formes et ces vieux contenus.
Depuis 1989, des gouvernements dits «
radicaux », « conservateurs », « de
droite », « de gauche » et «
centristes » ont tout fait pour saboter le
renouveau démocratique et jeter leur peuple droit
dans les bras des plus grands ennemis du monde.
La nouvelle période qui a été irrésistiblement
inaugurée par les changements qui se sont produits
en succession rapide il y a trente ans a montré
qu'aucune force ne pouvait continuer à agir de
l'ancienne manière. Les conditions ont dépassé la
nécessité d'anciennes formes qui ont disparu,
alors que de nouvelles formes n'ont pas encore vu
le jour. Les nouvelles conditions engendrent un
ordre du jour indépendant de la volonté de
quiconque, sous la forme de la revendication des
peuples d'exercer un contrôle sur leur vie en tant
que peuples et en tant qu'individus et sur leur
destin en tant que nations. C'est la lutte pour le
droit d'être des individus, des collectifs, des
sociétés et de nations entières, y compris celui
des États-nations opprimés, que nous voyons
aujourd'hui. Depuis 1989, la conscience des
peuples du monde rejette toutes ces mesures qui
forcent les gens à se débrouiller seuls, rejette
l'exclusion du peuple du processus de prise de
décision et la suppression du droit des nations à
l'autodétermination.
C'est le renouveau démocratique qui est à l'ordre
du jour des peuples du monde. C'est l'exigence de
millions et de millions de personnes dans le monde
entier, dans les pays en développement mais aussi
et surtout dans les soi-disant économies avancées
qui sont plongées dans la crise et où le poids des
vieux arrangements épuise l'être humain comme
jamais auparavant.
Pour humaniser
l'environnement naturel et social!
Tout en oeuvre pour le renouveau
démocratique !
134e anniversaire de la pendaison
de Louis Riel
Le leader métis Louis Riel (au centre) entouré de
conseillers de l'Assemblée législative métisse
d'Assiniboia.
Le 16 novembre 1885, le pouvoir
colonial britannique a pendu le grand dirigeant
métis Louis Riel. Ce dernier avait été trouvé
coupable de haute trahison après la défaite des
Métis à la bataille de Batoche en mai de la même
année. L'exécution de Louis Riel était une façon
de frapper la conscience de la nation métisse,
mais le pouvoir colonial ne parvint pas à mettre
fin à sa lutte pour ses droits et sa dignité en
tant que nation. La lutte des Métis pour affirmer
leur droit d'être et assumer la direction de leurs
affaires politiques continue à ce jour.
Les deux grands soulèvements de la rivière Rouge
(1869-1870) et du Nord-Ouest (1885) ne sont pas
des événements isolés. Ils ont eu lieu à une
époque où les nations autochtones et la nation du
Québec cherchaient à s'affirmer, une époque
d'effervescence révolutionnaire en Europe. Ils
traduisent une réponse au projet colonial
britannique qui cherchait à reproduire l'État
britannique en Amérique du Nord et à tenir en
échec les aspirations légitimes des nations qui
composent le Canada.
L'Acte de l'Amérique du Nord britannique de 1867
et l'achat des Terres de Rupert de la Compagnie de
la Baie d'Hudson par le gouvernement canadien
en 1869-1870, juxtaposés au déclin de
l'économie métisse traditionnelle fondée sur la
chasse du bison, ont contraint les Métis à se
doter d'un rapport de force avec les autorités
coloniales et à négocier l'entrée du Manitoba dans
la Confédération grâce à la mise sur pied
d'une Assemblée législative. L'esprit qui anime
Riel et les membres du gouvernement provisoire à
cette époque est contenu dans la Déclaration
des habitants de la Terre de Rupert et du
Nord-Ouest qui affirme la souveraineté des
Métis sur leurs terres. Ces derniers refusent
également de reconnaître l'autorité du Canada, «
[...] qui prétend avoir le droit de venir nous
imposer une forme de gouvernement encore plus
contraire à nos droits et à nos intérêts ».
Alors que la Loi du Manitoba est votée
au parlement fédéral en mai 1870, Riel est
contraint à s'enfuir aux États-Unis. Le
gouvernement ne tardera pas à vouloir affirmer sa
souveraineté sur son nouveau territoire comme en
font foi l'expédition militaire de Wolseley (1870)
et la création de la Police montée du Nord-Ouest
(1873) et de l'Indian Act (1876).
Avec la politique nationale qu'il promeut à partir
de 1878, John A. Macdonald se fait le
champion de la colonisation de l'Ouest et du
développement de l'agriculture. Avec l'aide des
Oblats, les autorités chercheront à sédentariser
et à forcer les Métis à adopter le mode de vie
agricole. Face à ce cadre contraignant et sous la
force des spéculateurs, certains Métis vendirent
les terres qui leur avaient été octroyées pour
aller s'établir en Saskatchewan.
C'est aussi l'époque où les nationalismes
s'expriment au Canada. L'épisode du Manitoba fit
prendre conscience aux Québécois de la fragilité
de la situation des Métis ; l'abolition de
l'enseignement en français au Nouveau-Brunswick
en 1871, celui du besoin d'organisation. Les
sociétés nationales, telles que les Sociétés
Saint-Jean-Baptiste, se répandent à travers le
continent en raison des vagues migratoires partant
de la vallée du Saint-Laurent. La Convention
nationale de Montréal en 1874 et les fêtes de
la Saint-Jean-Baptiste à Québec en 1880 et à
Windsor en 1883 rassemblent des délégations
de toute l'Amérique française afin de démontrer
avec force la vitalité de la « famille
canadienne-française ». Les Acadiens tiennent
leur première Convention en 1881 où ils se
dotent d'une célébration et d'une doctrine
nationale.
Victoire des Métis à la bataille de Fish Creek le
24 avril 1885. Lithographie de Fred Curzon.
Les chefs métis, sous l'influence du clergé, ne
vont pas à contrecourant. Dès les lendemains de la
Résistance de la rivière Rouge, est fondée à
Saint-Boniface la Société Saint-Jean-Baptiste du
Manitoba. Son vice-président n'est nul autre que
Louis Riel. Cette association regroupe à ses
débuts autant les Canadiens français que les Métis
francophones.
Toutefois, conscients de leur identité distincte,
les chefs métis vont façonner leur nationalisme.
Louis Riel en viendra à articuler un nationalisme
proprement métis, doté d'une fête et de symboles
nationaux propres. Ce processus culminera avec la
création à Batoche en septembre 1884 de
l'Association nationale des Métis afin de
promouvoir le développement de leur conscience
politique.
Les Métis prennent les armes encore une fois
durant la rébellion du Nord-Ouest de 1885. Du
9 au 12 mai 1885, 250 Métis
affrontent vaillamment 916 soldats des Forces
canadiennes à Batoche mais sont vaincus et Riel se
rend.
Macdonald et son cabinet adoptent la ligne dure à
l'endroit de Riel et de ses compagnons. Louis Riel
est jugé à Régina en juillet 1885. Le procès
dure cinq jours. Le jury le reconnaît coupable
le 31 juillet, après seulement une demi-heure
de délibérations, mais demande la clémence. Or, le
juge Hugh Richardson qui préside au procès le
condamne à mort. De septembre 1885 à
octobre 1886, plusieurs de ses camarades,
tous autochtones, seront condamnés au même sort.
Louis Riel s'adresse au jury au tribunal de
Régina, juillet 1885.
Si les temps ont changé, l'État canadien a tout
de même hérité du pouvoir colonial et persiste à
vouloir nier la nation métisse, les nations
autochtones et la nation du Québec. La fière
histoire de la lutte des Métis pour affirmer leurs
droits en tant que nation n'est pas que pour les
bouquins qui amassent la poussière, elle continue
d'éclairer le présent. La lutte pour l'affirmation
des droits qui appartiennent à tous du fait qu'ils
sont humains est précisément la lutte pour des
arrangements modernes centrés sur l'être humain.
La vie de Louis Riel représente la lutte pour la
reconnaissance des droits sur une base moderne.
La vie de Louis Riel est d'autant plus pertinente
aujourd'hui que l'État canadien se lance dans une
nouvelle offensive pour nier les droits des Métis,
des Premières Nations et de la nation du Québec,
de même que les droits des travailleurs, des
femmes, des jeunes, des minorités nationales et de
tous les collectifs de la société, tout cela au
nom de la sécurité, de l'équilibre, de l'austérité
et d'autres faux idéaux.
Commémoration annuelle de Louis Riel sur sa tombe
par la Fédération métisse du Manitoba à
l'anniversaire de sa mort le 16 novembre 2018 (Fédération
métisse du Manitoba)
Le 16 novembre 2019 est le 134e
anniversaire de la lâche pendaison en 1885 du
grand dirigeant du peuple métis Louis Riel, dans
ce qu'on appelle aujourd'hui le Manitoba, la
patrie de la nation métisse. D'une part, la nation
métisse luttait dans cette région pour sa propre
souveraineté contre la Compagnie de la Baie
d'Hudson qui imposait son autorité sur tous les
territoires des peuples autochtones. De l'autre,
selon la vision de John A. Macdonald, cette région
était primordiale pour que le Canada se développe
d'un océan à l'autre. La région devait servir de
passage à la colonisation de l'Ouest et de plaque
tournante au chemin de fer transcontinental. Les «
pères de la Confédération » ont créé la
Police montée du Nord-Ouest, qui deviendra la GRC,
pour réprimer la nation dirigée par Louis Riel,
faisant du Manitoba la province à qui on attribue
l'honneur douteux d'avoir contribué à la
consolidation des forces « de la loi et de
l'ordre » au Canada.
Durant la semaine du 9 au 13
décembre 1996, le parlement fédéral a débattu
du projet de loi privé C-297 qui demande la
révocation du verdict de culpabilité prononcé
contre Louis Riel qui fut pendu pour «
trahison » à la suite de l'écrasement
en 1885 de la rébellion du Nord-Ouest.
La loi d'initiative parlementaire, présentée par
la député Suzanne Tremblay (Bloc Québécois :
Rimouski-Témiscouata) le 21
octobre 1996, a été rejetée par une faible
majorité. Suzanne Tremblay avait présenté un
projet de loi semblable en novembre 1994,
mais il avait été également rejeté. En fait, en
décembre 1996, il s'agissait de la septième
fois depuis 1983 qu'un tel projet de loi
était présenté au parlement puis rejeté.
Lorsqu'il a été rejeté la septième fois, la
plupart des députés libéraux ont voté contre le
projet de loi. Pas un seul membre du Cabinet n'a
voté en faveur du projet de loi et plusieurs
ministres libéraux connus se seraient précipités
vers les escaliers afin d'éviter que leur vote
soit enregistré. Se trouvaient parmi les opposants
au projet de loi un grand nombre de députés
libéraux du Manitoba. Lorsqu'on a demandé à l'un
d'eux, John Harvard (Winnipeg-St-James), pourquoi
il avait voté contre la mesure, en dépit d'un
appui quasi universel parmi les Manitobains,
celui-ci a affirmé que c'était parce que le Bloc
Québécois avait un « ordre du jour caché » et
qu'il comptait se servir du projet de loi pour
susciter de l'appui au « séparatisme ». Il a
aussi prétendu que le gouvernement libéral
comptait présenter à nouveau le projet de loi lors
de la première session, et que Louis Riel y serait
clairement identifié comme « Père de la
Confédération » et défenseur de l'unité
canadienne.
LML avait écrit à ce moment-là :
« Louis Riel ne fut pas un 'père de la
confédération'. Bien au contraire, il a passé sa
vie à combattre la Confédération et les tentatives
de l'État canadien d'éliminer la nation métisse et
les droits ancestraux des peuples autochtones.
Dans les conditions historiques de l'époque, il a
combattu pour la souveraineté des peuples et pour
l'unité des Métis, des peuples autochtones et des
habitants contre l'État colonial anglo-canadien.
Il fut à la tête des populations de l'ouest dans
leur lutte pour établir leur propre État qui
défendrait leurs intérêts contre les visées
expansionnistes à la fois du Canada et des
États-Unis. Prétendre que Louis Riel fut un
combattant pour la Confédération ou une
quelconque 'unité canadienne' abstraite,
c'est déformer l'histoire et nier complètement la
contribution de Riel aux luttes des Métis et des
autres peuples autochtones pour leurs droits.
« Il est on ne peut plus étrange de vouloir
appeler Louis Riel un 'père fondateur' quand
celui-ci a été pendu par les 'pères
fondateurs' et leurs descendants ! Les
tentatives dégoûtantes du gouvernement libéral de
défendre le legs colonial de l'État canadien, de
justifier l'assassinat de Riel et la dévastation
de la nation métisse sous prétexte que quelqu'un
d'autre à un 'ordre du jour caché' prouvent
que ce gouvernement est incapable de se
réconcilier avec les meilleurs accomplissements du
dix-neuvième siècle, sans parler de vouloir
conduire le Canada dans le vingt-et-unième
siècle. »
Les déclarations de 1996-1997 au sujet de
Louis Riel montrent clairement que c'était bel et
bien les libéraux de Chrétien qui avaient un ordre
du jour caché. LML avait souligné à cette
époque que le Parti libéral tentait de se
distancer de l'édification d'empire qui à ses yeux
n'était pas « politiquement acceptable » tout
en défendant la politique du pouvoir colonial. La
politique libérale n'est aucunement différente
aujourd'hui avec Justin Trudeau. Encore
aujourd'hui, les libéraux ne peuvent envisager le
monde moderne du renouveau démocratique. Au
Canada, leurs belles paroles au sujet de la
réconciliation et de la restauration des relations
de nation à nation visent à dissimuler le maintien
des relations coloniales enchâssées dans une
constitution qui n'investit pas les citoyens du
pouvoir souverain. Ces relations coloniales sont
au coeur des actes de racisme haineux commis par
le Canada pour déposséder les Premières Nations au
pays et à l'étranger, comme ses tentatives de
renverser l'État plurinational de Bolivie où le
premier président autochtone avait rétabli la
dignité des peuples autochtones après des
centaines d'années de discrimination et
d'oppression sous l'égide de lois racistes dites Lois
sur les Indiens.
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