Numéro 49 - 11 septembre 2023
Les négociations en éducation en Ontario
Tentatives répétées d'éliminer le droit de grève en éducation de la maternelle au secondaire
• Proposition du syndicat des enseignantes et enseignants du secondaire pour éviter la grève
• Le gouvernement Ford forcé de négocier de nouveaux tests de lecture normalisés
Les négociations en éducation en Ontario
Tentatives répétées d'éliminer le droit de grève en éducation de la maternelle au secondaire
En ce début d'année scolaire, les travailleurs de tout le pays sont grandement préoccupés par les tentatives du gouvernement Ford de faire pression sur les syndicats de l'éducation pour qu'ils abandonnent leur droit de grève. Ceux-ci sont plutôt encouragés à se tourner vers un processus d'arbitrage de différends exécutoire qui fait en sorte que c'est un arbitre qui décide de toutes questions n'ayant pu être réglées par des négociations de bonne foi, lesquelles n'existent plus.
Les enseignants et les travailleurs de l'éducation sont sans contrat depuis le 31 août 2022. Seulement les travailleurs de l'éducation représentés par le Comité de coordination des conseils scolaires de l'Ontario (CCCSO) du SCFP ont réussi à en arriver à une entente qui leur est acceptable à l'issue d'une lutte résolue contre le gouvernement Ford sur la question de leur droit de grève.
Au moins un syndicat, la Fédération des enseignantes-enseignants des écoles secondaires de l'Ontario (FEESO), soumet actuellement le processus d'arbitrage de différends exécutoire à l'approbation de ses membres. Antérieurement, le CCCSO a annoncé qu'il y aurait des votes de grève en septembre si le gouvernement refusait de négocier. Les réunions où les membres discuteront de la proposition du CCCSO face à l'arbitrage exécutoire auront lieu en septembre. Pendant ce temps, les autres syndicats de l'éducation poursuivent leurs négociations, et l'un d'entre eux, la Fédération des enseignantes et des enseignants de l'élémentaire de l'Ontario (FEEEO), a demandé la conciliation.
L'arbitrage exécutoire en tant que processus pour résoudre les conflits avec le gouvernement a plusieurs contrecoups. Il est présenté comme étant un processus légitime permettant d'en arriver à des ententes avant l'ultime recours à la grève, et même comme une alternative au droit de grève des travailleurs. L'arbitrage a déjà été promu par certains syndicats comme étant une façon de résoudre les conflits avec le gouvernement. Les enseignants de la Colombie-Britannique, par exemple, y ont eu recours en 2014 suite à une grève pendant laquelle les travailleurs avaient réussi à mobiliser l'opinion publique en faveur de leurs revendications.
Certains prétendent maintenant que le fait d'avoir à faire à un bon arbitre qui n'est pas trop antisyndical serait favorable aux travailleurs lorsque le gouvernement refuse de négocier. Ainsi, les travailleurs sont incités à compter sur le régime de relations de travail existant et sur un arbitre prétendument neutre pour déterminer leurs salaires et leurs conditions de travail. C'est ce qui se passe présentement alors que jusqu'ici le gouvernement a refusé de négocier et apporte d'importants changements aux conditions de travail des éducateurs par le biais de changements législatifs.
Ces efforts du gouvernement Ford pour bloquer tout recours à la grève plutôt que de négocier arrivent suite à ses vaines tentatives d'imposer une convention aux 55 000 travailleurs de l'éducation du SCFP CCCSO en novembre 2022, en utilisant la disposition de dérogation à la Charte des droits et des libertés pour essayer de criminaliser la grève prévue par les travailleurs. Mais lorsque les travailleurs de l'éducation ont refusé de se soumettre et ont débrayé à l'échelle de la province, avec l'appui de la presque totalité du mouvement syndical, le gouvernement Ford a dû faire marche arrière.
Les travailleurs du SCFP CCCSO dressent une ligne de piquetage à Queens Park au cours de la journée d'action politique, le 4 novembre 2022, défiant les tentatives du gouvernement Ford d'imposer un contrat.
Par contre, il refuse toujours de revenir sur son diktat visant à empêcher la grève des enseignants et des travailleurs de l'éducation et insiste présentement sur le recours à l'arbitrage exécutoire comme façon d'y arriver.
La situation à laquelle on assiste présentement est que le gouvernement tente de forcer les syndicats à compter sur l'État pour régler leurs différends avec lui plutôt que sur leurs propres membres et les autres travailleurs qui appuient leur juste cause. La question n'est pas d'être pour ou contre l'arbitrage exécutoire, mais plutôt qui doit décider de leurs conditions de travail : l'État, ou les travailleurs par le biais de leurs syndicats et de leurs propres actions. Si les gouvernements refusent de négocier, peut-on se fier à l'État pour affirmer les droits des travailleurs ?
L'expérience de la classe ouvrière en ce moment est que de telles mesures sont prises de façon systématique par les gouvernements néolibéraux pour éliminer le droit des travailleurs d'avoir un mot à dire sur leurs salaires et leurs conditions de travail. C'est ce qui se produit en particulier lorsqu'il s'agit de la prestation de programmes sociaux provinciaux et nationaux tels que l'éducation et la santé. Au même moment, des milliards de dollars sont siphonnés de ces programmes et détournés vers divers stratagèmes intéressés.
Depuis que le gouvernement libéral de McGuinty a adopté le projet de loi 115 en 2012 pour tenter d'imposer des conventions collectives à l'éducation de la maternelle au secondaire, les gouvernements successifs en Ontario ont adopté des mesures pour tenter de limiter – et, maintenant, d'éliminer – le droit des enseignants et des travailleurs de l'éducation d'aller en grève à l'échelle locale et provinciale.
D'abord, les négociations provinciales ont été imposées par un processus formel sans négociations avec les syndicats et les commissions scolaires, avec l'engagement de préserver les négociations locales et de laisser les questions plus importantes comme les salaires et les avantages sociaux aux instances centrales.
Ensuite, la Commission des relations de travail de l'Ontario a décrété que toute question négociable reliée à des sommes d'argent était à toute fin pratique retirée des négociations locales et reviendrait aux instances centrales advenant que le gouvernement et le syndicat provincial ne peuvent s'entendre sur l'instance où cette question doit être réglée. Cela voulait dire que le gouvernement pouvait opposer son veto à tout ce qu'il voulait au niveau local.
Rassemblement du 26 janvier 2013 contre les tentatives du gouvernement McGuinty d'imposer des conventions collectives aux enseignants en vertu du projet de loi 115
Ultérieurement, une grève locale d'enseignants du secondaire a été déclarée illégale par la Commission des relations de travail sous prétexte qu'elle était « teintée » de revendications centrales et qu'elle ne pouvait être qualifiée de locale.
Maintenant, le gouvernement Ford espère établir un précédent qui éliminera encore la possibilité pour les enseignants et les travailleurs de l'éducation d'avoir leur mot à dire sur leurs conditions de travail, qui sont en fait les conditions d'apprentissage des étudiants, en préconisant le recours à l'arbitrage exécutoire. Il laisse planer la possibilité qu'un arbitre accordera des augmentations salariales intéressantes pour soutenir le recrutement et la rétention du personnel, ainsi qu'un montant forfaitaire pour remédier au projet de loi 124, celui-ci ayant plafonné les salaires du secteur public à 1 % pendant 4 ans et ayant été déclaré non constitutionnel.
Les gouvernements partout au Canada surveillent la situation de près au cas où ils pourraient utiliser de tels mécanismes pour eux-mêmes éliminer le droit de grève. En cette fête du Travail, le défi posé aux enseignants et aux travailleurs de l'éducation et à tous les travailleurs qui font face à la même situation en Ontario est de mener la discussion sur ce qui leur est favorable dans ces conditions et sur comment empêcher les tentatives de diviser leurs rangs et en étouffant ainsi la discussion. En discutant ouvertement sur quoi faire et ce qui leur sera favorable, pour eux et pour l'éducation dans son ensemble, les enseignants et les travailleurs de l'éducation trouveront les moyens d'aller de l'avant.
Proposition du syndicat des enseignantes et enseignants du secondaire pour éviter la grève
Lors d'une réunion spéciale le 25 août, les présidents des unités de négociation de la Fédération des enseignantes et des enseignants des écoles secondaires de l'Ontario (FEESO) et les négociateurs en chef des districts locaux de l'Ontario ont voté en faveur de la recommandation d'un processus de négociation avec le gouvernement de l'Ontario qui éliminerait le droit du syndicat de faire la grève au niveau central ou local au cours de la présente ronde de négociations. Toutes les questions locales et centrales en suspens qui ne peuvent être résolues à la table de négociation d'ici le 27 octobre seront soumises à ce que l'on appelle l'arbitrage d'intérêt exécutoire. Les membres de la FEESO voteront sur le processus proposé en septembre pour dire s'ils acceptent cette orientation. Dans un communiqué de presse, le syndicat a précisé que « la proposition n'est pas un accord de principe, mais qu'elle établit clairement la voie à suivre pour ce cycle de négociations ».
Le syndicat affirme que la proposition « garantit également que les membres d'OSSTF/FEESO recevront une réparation pour les salaires perdus en vertu du projet de loi 124, la loi sur la suppression des salaires du gouvernement Ford » qui a injustement ciblé les personnes travaillant dans le secteur public dominé par les femmes. « Les membres recevront cette réparation sans avoir à attendre que les tribunaux se prononcent sur la constitutionnalité du projet de loi 124 », a déclaré le syndicat. Cela fait référence au fait que le gouvernement Ford a fait appel de la décision d'un tribunal inférieur qui avait conclu que le projet de loi 124 violait les droits des enseignants, des travailleurs de l'éducation et des travailleurs du secteur public en général, qui sont tous touchés par cette décision.
Si les membres de la FEESO votent en faveur du processus proposé, les négociations centrales se poursuivront jusqu'au 27 octobre, et toutes les questions qui n'auront pas été réglées à cette date seront soumises à l'arbitrage obligatoire. Cette forme d'arbitrage est décrite dans la Loi sur la négociation collective dans les conseils scolaires (LNCCS), qui régit les négociations centrales et locales en Ontario. Cette loi a également été imposée sans négociation par le gouvernement libéral de l'Ontario en 2014. Cela faisait suite à la violation du droit de grève des enseignants et des travailleurs de l'éducation en 2012 avec le projet de loi 115, dans le but de retirer aux éducateurs plus d'un milliard de dollars en jours de maladie accumulés. La LNCCS stipule :
« Pour régler des questions en litige concernant la négociation centrale, un arbitre désigné ou un conseil d'arbitrage constitué en vertu de l'article 40 de la Loi de 1995 sur les relations de travail prend en considération tous les facteurs qu'il juge pertinents, notamment les critères suivants :
« 1. La capacité de payer des conseils scolaires compte tenu de leur situation financière.
« 2. La mesure dans laquelle des services devront peut-être être réduits, compte tenu de la décision ou de la sentence arbitrale, si les niveaux de financement et d'imposition actuels ne sont pas relevés.
« 3. La situation économique prévalant en Ontario.
« 4. La comparaison, établie entre les employés et des employés comparables des secteurs public et privé, des conditions d'emploi et de la nature du travail exécuté.
« 5. La capacité des conseils scolaires d'attirer et de garder des employés qualifiés. »
Selon diverses rumeurs, le syndicat et le gouvernement se seraient mis d'accord sur un arbitre, William Caplan. Caplan a été nommé par la Commission des relations du travail de l'Ontario comme médiateur auprès des travailleurs de l'éducation de l'Ontario du Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP) lors de leur dernier cycle de négociations centrales avec le gouvernement. Malgré cette médiation, le gouvernement Ford a adopté le projet de loi 28. Cette loi aurait imposé une convention collective et invoqué la disposition autorisant la dérogation à la Charte des droits et libertés, ce qui aurait rendu illégale la possibilité pour les travailleurs de prendre des mesures d'ordre professionnel en réponse ou même pour le Conseil du travail ou les tribunaux d'examiner ou de remettre en question l'action du gouvernement. Cette mesure a été bloquée par les protestations massives des travailleurs de l'éducation du SCFP et du Syndicat des employés de la fonction publique de l'Ontario, ainsi que par la menace d'une action similaire de la part des syndicats à travers le Canada.
Si les membres votent contre le processus, les négociations se poursuivront sans qu'aucune date arbitraire ne soit fixée. Cela signifierait également que le syndicat conserverait le droit de grève pour défendre ses intérêts et ceux de l'éducation publique, le gouvernement conservant également le droit de mettre les travailleurs en lockout. Rien n'empêcherait le gouvernement et le syndicat de convenir d'un arbitrage obligatoire à une date ultérieure, avant, pendant ou après une grève ou un lockout. Le fait que la FEESO présente la proposition aux membres pour qu'ils décident de la marche à suivre indique qu'il appartient aux membres de délibérer et de décider de ce qui les favorisera et de ce qui favorisera l'éducation publique dans son ensemble.
La présidente d'OSSTF, Karen Littlewood, a déclaré : « L'accord d'aujourd'hui représente un point critique dans cette ronde de négociations. Depuis le début des négociations il y a 13 mois, OSSTF/FEESO se bat pour améliorer les conditions d'apprentissage et de travail dans les écoles de l'Ontario, mais le gouvernement Ford et les conseils scolaires ont refusé d'être des partenaires équitables dans ces négociations. Ce processus n'est pas un accord de principe, mais il promet de sortir de toute impasse en faisant appel à un arbitre tiers pour rechercher une résolution juste et équitable.
« En tant qu'organisation démocratique, a-t-elle ajouté, il est essentiel que nous permettions aux membres d'avoir le dernier mot en votant sur la question de savoir si OSSTF/FEESO doit accepter cette proposition. Les négociations se poursuivront au niveau central et local tout au long du processus de vote. »
Karen Littlewood a ajouté que la stabilité dans l'éducation viendrait du fait que les enseignants et les travailleurs de l'éducation ne feraient pas valoir leurs droits par des actions de grève. Elle a ajouté que si le processus est approuvé, « cela signifiera également que nous, en tant que professionnels de l'éducation dévoués, serons en mesure de continuer à assurer la stabilité pour les élèves de l'Ontario tout en recherchant la meilleure entente possible pour les membres d'OSSTF/FEESO. »
Qui a dit quoi ?
Gouvernement de l'Ontario
Malgré la clarté du message de la présidente de la FEESO, le ministre de l'Éducation du gouvernement Ford, Stephen Lecce, a publié, à la suite de l'annonce du syndicat, un communiqué de presse intitulé « L'Ontario conclut un accord provisoire avec la Fédération des enseignantes-enseignants des écoles secondaires de l'Ontario afin d'offrir de la stabilité aux écoles secondaires publiques ».
Stephen Lecce a déclaré : « Je suis très heureux d'annoncer que nous avons conclu un accord provisoire de quatre ans avec la Fédération des enseignantes-enseignants des écoles secondaires de l'Ontario (FEESO) portant sur un processus qui, s'il est ratifié par les membres du syndicat, permettra aux élèves de rester en classe, comme il se doit.
« Si cet accord est ratifié, les élèves qui sont entrés en 9e année dans une école secondaire de langue anglaise financée par les fonds publics en septembre dernier auront vécu leur entière expérience scolaire sans la menace de grèves d'enseignants. C'est une chose dont nous pouvons tous nous réjouir. »
Utilisant l'accord avec la FEESO comme une arme contre les autres syndicats de l'éducation, Stephen Lecce a déclaré : « Afin de veiller à la stabilité de l'ensemble du système d'éducation, nous invitons tous les syndicats d'enseignants à rencontrer le gouvernement dès lundi afin de conclure des accords de principe avant la rentrée scolaire. Allons de l'avant et concluons ces accords pour que les enfants reprennent leur apprentissage en paix et en toute confiance. »
Les syndicats de l'enseignement
L'Association des enseignantes et des enseignants franco-ontariens (AEFO), la Fédération des enseignantes et des enseignants de l'élémentaire de l'Ontario (ETFO) et l'Ontario English Catholic Teachers' Association (OECTA) ont publié le 25 août la déclaration suivante en réponse à l'annonce que la Fédération des enseignantes et enseignants des écoles secondaires de l'Ontario (OSSTF/FEESO) pourrait entamer une procédure d'arbitrage exécutoire avec le gouvernement de l'Ontario :
« L'annonce faite aujourd'hui par le ministre de l'Éducation Stephen Lecce et OSSTF/FEESO, selon laquelle les parties se soumettront à un arbitrage exécutoire, n'est pas une solution que l'AEFO, l'ETFO et l'OECTA peuvent envisager à nos tables de négociations respectives pour le moment.
« Le recours à l'arbitrage exécutoire à ce stade n'aiderait pas les élèves – en particulier celles et ceux qui fréquentent des écoles élémentaires et secondaires – car l'arbitrage exécutoire garantirait pratiquement que les questions clés que nous avons soulevées à nos tables de négociations respectives, et qui sont essentielles à l'apprentissage et aux conditions de travail dans nos écoles, ne seraient pas abordées.
« La décision de recourir à un arbitrage exécutoire pourrait avoir un impact sur la négociation de questions clés pour nos communautés scolaires lors des négociations locales.
« Le gouvernement conservateur de Ford a toujours refusé d'engager des discussions de fond avec nos syndicats, malgré nos nombreuses tentatives pour progresser à nos tables de négociations respectives. Nous demandons une fois de plus au gouvernement de respecter notre droit à une négociation collective libre et équitable, et de se présenter à nos tables de négociations respectives prêts à engager des discussions sérieuses sur les questions critiques auxquelles est confrontée l'éducation financée par les fonds publics en Ontario – des questions telles que l'augmentation de la violence dans les écoles, les ressources et les soutiens pour la santé mentale des élèves, l'utilisation par les enseignantes et les enseignants de leur jugement professionnel, et la lutte contre la pénurie du personnel en éducation.
« Les travailleuses et les travailleurs en éducation représentés par l'AEFO, l'ETFO et l'OECTA continueront leurs efforts pour obtenir des accords négociés et équitables qui défendent et protègent l'éducation financée par les fonds publics et qui soutiendront tous les élèves, le personnel et les familles de cette province. »
Le 29 août, l'ETFO a déposé une demande de conciliation, ce qui signifie qu'un conciliateur nommé par la Commission des relations du travail tentera de faire avancer les négociations avec le gouvernement. Le syndicat a déclaré dans un communiqué de presse : « À ce stade, l'ETFO ne pense pas que [l'arbitrage obligatoire] soit viable, compte tenu de certaines des questions que la Fédération souhaiterait voir abordées pendant les négociations, notamment : la violence dans les écoles, la crise du recrutement et de la rétention des éducateurs, le modèle d'apprentissage hybride, l'indicateur de lecture précoce et les mesures de soutien à l'éducation spéciale pour nos élèves du primaire les plus vulnérables. »
Elle a ajouté que « si l'ETFO a été en mesure de faire des progrès significatifs à la table centrale des travailleurs de l'éducation, les négociations à cette table sont au point mort depuis des mois. L'expérience de l'ETFO à la table centrale des enseignants/occasionnels a été moins constructive. Aucun progrès n'a été réalisé à cette table sur des questions clés telles que les salaires, le soutien à l'éducation spéciale, la violence dans les écoles, l'apprentissage hybride, les avantages sociaux ou la résolution de la crise de la rétention et du recrutement dans le système d'éducation. En outre, l'équipe de négociation gouvernementale de l'Ontario Public School Boards' Association a refusé de retirer les modifications qu'elle avait déposées sur des questions telles que les droits aux congés de maladie, les avantages sociaux et le jugement professionnel.
« Le gouvernement Ford exige actuellement des coupures importantes dans les congés de maladie, les avantages sociaux et le jugement professionnel. L'arbitrage obligatoire signifierait que l'arbitre contrôlerait à 100 % ce qu'il adviendrait de ces éléments. »
La Fédération organise des réunions centrales de vote de grève dans toute la province de la mi-septembre à la mi-octobre.
Milieu universitaire
Dans un article paru dans The Conversation, Larry Savage, professeur d'études sociales à l'Université Brock, et Stephanie Ross, professeur associé d'études sociales à l'Université McMaster, écrivent :
« L'arbitrage des intérêts est un mécanisme qui permet de résoudre les questions de négociation en suspens. Il est le plus souvent utilisé dans les cas où des travailleurs essentiels comme les pompiers ou les infirmières se voient refuser légalement le droit de grève. Plus rarement, les syndicats et les employeurs recourent à l'arbitrage de différends exécutoire pour conclure une première convention collective ou résoudre une grève litigieuse.
« Lorsque les parties négocient dans une impasse, une tierce partie neutre – l'arbitre – est appelée à régler les questions en suspens. Le résultat est contraignant pour les deux parties.
« Dans le cas de l'accord récent entre la FEESO et la province, la FEESO n'avait pas négocié jusqu'à l'impasse, et encore moins organisé un vote de grève pour tester la détermination des membres et tenter de modifier la position de l'employeur.
Les auteurs ajoutent :
« L'arbitrage des intérêts est séduisant pour les syndicats, compte tenu des décisions récentes qui ont accordé d'importantes augmentations salariales aux infirmières et autres travailleurs de la santé de l'Ontario pour compenser les effets de la loi 124, qui plafonnait les augmentations salariales dans le secteur public à 1 % par an et qui a été jugée inconstitutionnelle.
« Pour les travailleurs dont les salaires sont en retard depuis de nombreuses années, la perspective de rattraper leur retard sans avoir à préparer une grève potentielle est alléchante. »
Cependant, il y a au moins quatre raisons pour lesquelles l'acceptation prématurée de l'arbitrage obligatoire des intérêts est très problématique pour les syndicats : « Tout d'abord, elle normalise l'idée que l'arbitrage de différends exécutoire est une pratique courante dans le monde du travail.
« Premièrement, cela normalise l'idée que le droit de grève n'est pas nécessaire. Ce type de raisonnement démobilise les syndicats et rend les membres passifs. La décision de l'arbitre étant exécutoire, les membres n'ont pas la possibilité de voter sur le règlement final et deviennent donc de simples spectateurs. En bref, l'arbitrage exécutoire ignore la clé du pouvoir des syndicats : des membres organisés et mobilisés.
« Deuxièmement, le recours à l'arbitrage exécutoire peut en fait accroître les impasses de négociation en réduisant l'incitation à négocier des conditions acceptables pour les deux parties. Si une tierce partie doit décider de ce que dit la convention collective pourquoi revenir sur sa position de négociation initiale ? »
Les chercheurs appellent cela « l'effet narcotique », car les syndicats et la direction deviennent dépendants de l'de différends contraignant pour décider des termes de la convention collective. Le problème est que les règlements imposés résolvent rarement les conflits sous-jacents.
« L'arbitrage exécutoire est un processus intrinsèquement conservateur. Il n'y a aucune garantie que les augmentations de salaires dans un secteur seront reproduites dans d'autres. En outre, l'arbitrage est un mauvais mécanisme pour aborder des questions plus profondes telles que le manque d'investissement dans les services publics, qui sous-tend les véritables problèmes auxquels sont confrontés tant de travailleurs du secteur public. »
L'article conclut :
« Ces dernières années, les syndicats ont remporté des batailles acharnées contre les tentatives des gouvernements de priver les travailleurs de leurs droits de négociation et de grève.
« Après tous ces efforts, il semble impensable de renoncer volontairement à ces droits et de confier tous les pouvoirs à un arbitre. Les gouvernements antisyndicaux n'ont pas à se soucier de restreindre le droit de grève si les syndicats sont simplement prêts à renoncer à ce droit en échange de la béquille de l'arbitrage de différends exécutoire. »
Le gouvernement Ford forcé de négocier de nouveaux tests de lecture normalisés
Le 23 août, la Fédération des enseignantes et seignants de l'élémentaire de l'Ontario (FEEEO) et le Ontario English Catholic Teachers' Association (OECTA) ont informé qu'ils avaient réglé une plainte de pratique déloyale de travail avec la Commission des relations de travail de l'Ontario. Ils avaient porté plainte suite à l'imposition unilatérale du gouvernement d'un nouveau test de lecture normalisé, dit outil de dépistage précoce en lecture. Le nouveau test a été imposé sans négociations aux enseignants de l'élémentaire et sans aucune formation ou ressource pour aider à atteindre son objectif déclaré de dépister les élèves ayant des difficultés en lecture – plusieurs en raison de la pandémie.
En outre, le test n'a pas été appuyé par un investissement de ressources permettant aux élèves dépistés d'avoir l'aide dont ils ont besoin. Le test allait à l'encontre du jugement professionnel des éducateurs parce qu'il a été imposé sans leur participation et sans leur expertise. À quoi peuvent et ne peuvent pas servir les tests, et comment les utiliser, a aussi été un point discuté à la table de négociations. De toute évidence, le gouvernement n'est pas sérieux sur ces questions car il veut que tout soit réglé en dehors du processus de négociation – sous forme de diktat, soit le sien ou celui de la Commission des relations de travail par le biais de l'arbitrage.
La semaine où la plainte a été examinée, le gouvernement a fait une offre de règlement. Il a dit clairement que les enseignants doivent faire preuve de jugement professionnel afin de déterminer les meilleures façons de dépister et d'aider les élèves qui éprouvent des difficultés à lire, ce que les enseignants font déjà, mais avec de moins en moins de supports.
Dans un communiqué de presse, les syndicats ont dit : « Le 22 août, la FEEEO et l'OECTA en sont arrivés à un règlement avec le gouvernement. Dans ce règlement, le gouvernement confirme que le recours à l'outil de dépistage précoce par les enseignants n'est plus obligatoire pour l'année scolaire 2023-2024 – les éducateurs continueront de se fier à leur expertise pour dépister et répondre aux besoins particuliers des élèves. Le gouvernement s'engage aussi à retourner à la table de négociations pour résoudre cette question de bonne foi. Le gouvernement publiera une note de service aux commissions scolaires pour aviser de tout changement d'orientation. »
« Nous appelons le gouvernement conservateur de Ford à apprendre de son erreur de jugement et de négocier de bonne foi. Notre message au gouvernement est clair : les questions négociables doivent être réglées à la table de négociations, sans quoi nous continuerons d'agir rapidement pour protéger les droits de négociation de nos membres ainsi que l'éducation publique. Nos deux associations continueront d'oeuvrer pour atteindre une entente équitable et négociée qui vient appuyer tous les étudiants, les éducateurs et les familles », lit-on dans le communiqué de presse.
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