Forum ouvrier

Numéro 32 - 7 mai 2020

Les travailleurs de Cargill défendent leurs droits

Réouverture de l'usine de Cargill
à High River

En hommage à Bui Thi Hiep


Les collègues de travail, les amis et la famille honorent la travailleuse de Cargill, Bui Thi Hiep, par une cérémonie et une vigile en ligne le 4 mai 2020.
Hiep est décédée de la COVID-19 le 20 avril.

La Commission des relations de travail de l'Alberta refuse d'agir pour défendre les droits des travailleurs - Peggy Morton

Colombie-Britannique
Les travailleurs rejettent les coupures dans le transport en commun - Brian Sproule et Barbara Biley


Les travailleurs de Cargill défendent leurs droits

Réouverture de l'usine de Cargill à High River


Le président de la section locale 401 des Travailleurs unis de l'alimentation et du commerce (TUAC), Thomas Hesse, prend la parole à l'extérieur de l'usine de Cargill, le 4 mai 2020, pour dénoncer la décision de l'entreprise de rouvrir l'usine. Le syndicat avait tenté en vain de forcer le gouvernement de l'Alberta à interdire la réouverture de l'usine.

Le monopole géant américain Cargill a rouvert son usine de High River le 4 mai en violation de la position très claire des travailleurs et de leur syndicat que l'usine ne doit pas rouvrir tant qu'ils ne considèrent pas que le travail y est sécuritaire. Au 4 mai, 981 des 2 000 travailleurs ont été déclarés atteints de la COVID-19 et les travailleurs ont souligné que plusieurs d'entre eux, qui ont contracté la maladie, n'ont jamais été testés.

Le président de la section locale 401 des TUAC, Thomas Hesse, a déclaré que Cargill est en probation. Le syndicat a conseillé aux travailleurs de se présenter à leur superviseur s'ils sont en santé, ont été déclarés aptes à travailler par un médecin et rappelés au travail. Cependant, a déclaré Hesse une fois de plus, si les travailleurs considèrent que l'usine est non sécuritaire, ils ont le droit de refuser un travail dangereux. « Si vous pensez que ce n'est pas sécuritaire de travailler, ne travaillez pas », a-t-il dit. Il a aussi conseillé aux travailleurs de contacter immédiatement le syndicat s'ils pensent que la compagnie ne les maintient pas en sécurité.

« Il est possible que les gouvernements nous déçoivent par leur refus de donner la priorité aux travailleurs ordinaires, mais faire partie d'un syndicat est la meilleure façon de riposter et de ne pas être forcé au silence. En tant que votre syndicat, nous ne permettrons jamais que vous deveniez invisibles. Nous ne vous laisserons jamais être privés d'une voix. Jamais ! », a dit Hesse.

« LA SITUATION À CARGILL EST SÉRIEUSE ET LES CHIFFRES NE MENTENT PAS. La COVID-19 est meurtrière. Elle a tué une travailleuse de Cargill et a rendu plusieurs désespérément malades. On évalue que 921 (981 maintenant- Note de FO) des quelque 2 000 travailleurs de l'usine de Cargill à High River ont maintenant été déclarés positifs à la COVID-19. Il existe maintenant 1 500 cas positifs liés à l'usine. Personne ne devrait être surpris que nous ayons demandé que l'usine soit fermée jusqu'à ce qu'elle soit clairement sécuritaire. Très peu de gens sont en désaccord avec nous. »

Les deux plus grandes usines de transformation du boeuf en Alberta sont le site des deux plus grandes éclosions de la COVID-19 au Canada, d'abord l'usine de Cargill, puis celle de JBS à Brooks.

Le 5 mai, il a été annoncé qu'une troisième usine en Alberta, Harmony Beef, située à Balzac, juste au nord de Calgary, compte 34 cas d'infection à la COVID-19. Le Syndicat de l'agriculture, qui représente les inspecteurs de viande de l'usine, a demandé qu'elle soit fermée. L'usine elle-même n'est pas syndiquée.

La Commission des relations de travail de l'Alberta a refusé de tenir une réunion d'urgence et de répondre de manière positive à la demande du syndicat de maintenir l'usine fermée jusqu'à ce que le syndicat détermine qu'il est sécuritaire pour les travailleurs d'y retourner. La Commission de la santé et de la sécurité du travail n'a pas voulu adopter la mesure immédiate requise et émettre une ordonnance d'arrêt de travail pour préserver la santé et la vie des travailleurs. L'audience en relations de travail débutera le 7 mai, trois jours après la réouverture de l'usine.

« Il y aura des comptes à rendre chez Cargill », a déclaré le président de la section locale 401 des TUAC, Thomas Hesse, le 6 mai. « Dans quelques mois, nos membres chez Cargill seront en position de grève légale, et il faudra traiter de l'anxiété et de la peur qu'ils ressentent en ce moment. La peur se transforme en colère. Tous les yeux sont tournés vers leur employeur et Cargill est en probation. »

Le 4 mai, le plancher d'abattage a été rouvert et le département de la fabrication, où se fait la transformation de la viande, a été réouvert le 6 mai. Des représentants de la section locale 401 des TUAC  ont été présents aux barrières chaque jour pour donner de l'information aux travailleurs qui rentraient au travail et leur distribuer des masques, et d'autres syndicats se sont joints à eux pour leur exprimer leur appui. Le 4 mai, entre 60 et 70 travailleurs se sont présentés au travail alors que l'usine en compte 2 000. Trois autobus scolaires, maintenant dotés de séparateurs de sièges  pour amener des travailleurs qui font normalement du covoiturage, sont aussi entrés sur le terrain de l'usine. Un n'avait que le chauffeur à bord alors qu'un autre n'avait qu'un seul passager. Le président de la section locale 401 a dit au réseau CBC que Cargill fonctionne sur une seule roue et non sur quatre comme il le prétend et que s'il faut habituellement 40 minutes pour découper une vache, il a fallu une heure 40 minutes pour le faire ce jour-là.

Hesse a dit que ce sont les travailleurs qui savent ce qui se passe à l'usine et ce qui s'y est produit. Cependant, le médecin hygiéniste en chef ne base pas sa décision que l'usine est sécuritaire sur les preuves fournies par les travailleurs, mais sur des preuves par ouï-dire qui ne permettent pas de tirer des conclusions. Les travailleurs ont dénoncé le fait qu'ils avaient été déclarés aptes à travailler même s'ils avaient des symptômes, qu'ils avaient été déclarés positifs à la COVID-19, n'avaient pas complété leur période d'isolement et avaient voyagé à l'étranger récemment.

Qui de ces personnes en position d'autorité pensent-elles tromper quand elles répètent sans arrêt que Cargill leur a garanti que l'usine est sécuritaire ? Les travailleurs ne sont pas rassurés par le représentant de la Santé publique, le docteur Hinshaw ou par tout autre haut représentant, a dit Thomas Hesse.

Il a aussi déclaré que le syndicat a tenté de travailler avec Cargill pour développer des procédures et des politiques rationnelles, mais la culture de la compagnie est de découper autant de bêtes qu'elle le peut. En temps normal, Cargill transforme environ 4 000 têtes de bétail par jour, ce qui représente 40 % de l'approvisionnement en boeuf du Canada.

Un membre de Migrante fait le tri de la nourriture pour les travailleurs étrangers temporaires de l'autre usine très touchée,  l'usine JBS Food à Brooks.

« Cargill est la propriété de la famille Cargill. Lorsque nous communiquons avec les propriétaires, nos communications se font avec Wichita au Kansas. Cargill appartient à une famille. Quinze des membres de la famille sont des milliardaires. C'est la quatrième famille la plus riche des États-Unis, m'a-t-on dit, et vous ne devenez pas aussi riche sans savoir comment faire de l'argent et chaque vache qui passe à l'abattoir est du profit, alors cette motivation est un élément naturel de l'entreprise. Mais il appartient à la société, aux décideurs politiques et aux gouvernements de faire en sorte que les endroits de travail soient sécuritaires et que le profit n'est pas l'unique moteur de la société, et c'est particulièrement important en ce moment-ci. »

« Selon nous, cette usine devrait fermer jusqu'à ce que Cargill ait prouvé qu'il se soucie de la santé et de la sécurité des travailleurs et que cela passe avant les profits. Malheureusement, nos demandes au gouvernement albertain et à la Commission de la santé et de la sécurité du travail sont tombées dans l'oreille d'un sourd jusqu'à maintenant », a dit Hesse. « Mais nous n'avons pas abandonné. Nous continuons de faire pression sur Cargill par tous les moyens possibles pour garantir votre sécurité.

« Il y a des choses positives qui se produisent. Il y a eu une expression massive de sympathie et d'appui pour les travailleurs de l'alimentation de l'Alberta. Beaucoup de groupes travaillent avec nous pour vous appuyer. Hier, par exemple, nous avons livré des certificats-cadeaux d'épicerie à Migrante, un groupe qui travaille fort pour bâtir la solidarité et livrer des biens essentiels à ceux qui sont dans le besoin. Chaque Albertain et chaque Canadien surveille Cargill en ce moment. Le public tient à savoir que vous êtes en sécurité lorsque vous mettez les pieds dans cette usine.

« Nous avons espoir les uns envers les autres. Les travailleurs peuvent eux-mêmes contrôler leur destinée en agissant en solidarité. En tant que votre syndicat, nous serons là pour appuyer chaque choix que vous ferez. »


Des représentants du SCFP-Alberta et de l'Association des sciences de la santé de l'Alberta (HSAA) se joignent  aux membres de la section locale 401 des TUAC devant l'usine de Cargill, le 5 mai 2020.

(Photos: TUAC 401, Bavan, Action Dignity)

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La Commission des relations de travail de l'Alberta refuse d'agir pour défendre les droits des travailleurs


La section locale 401 des TUAC accueille les travailleurs qui entrent à l'usine de Cargill
à High River, alors qu'elle rouvre le 4 mai 2020, avec des masques et de l'information.


Le 29 avril, la section locale 401 des Travailleurs unis de l'alimentation et du commerce a déposé une plainte pour pratique déloyale de travail, qui démontre que Cargill a violé deux articles du Code des relations de travail de l'Alberta en entravant la représentation des travailleurs par le syndicat et le droit des travailleurs à la représentation.

La plainte pour pratique déloyale de travail a révélé que depuis que les premiers cas de la COVID-19 ont été identifiés à l'usine, Cargill a toujours refusé de reconnaître le syndicat comme le représentant des travailleurs. Il a en outre donné aux travailleurs des informations fausses et trompeuses sur l'implication du syndicat, tentant ainsi de miner la confiance envers celui-ci, et il a suggéré à tort aux travailleurs que le syndicat avait accepté de rouvrir l'usine. La plainte montre que, bien au contraire, la direction de Cargill a toujours refusé de fournir des renseignements au syndicat, de répondre aux questions et même de répondre au syndicat concernant les enjeux soulevés dans la lettre du syndicat au premier ministre Jason Kenney.

La plainte fournit les informations sur la façon dont Cargill a réagi depuis la mort de Bui Thi Hiep le 20 avril. À chaque étape, la compagnie a refusé de mener des négociations de bonne foi avec le syndicat et a plutôt utilisé la désinformation, les menaces, l'intimidation et le diktat.

Par exemple, il a fallu près d'une semaine après le décès de Hiep et une ordonnance de la Commission de la santé et la sécurité au travail de l'Alberta (AOHS) avant que l'entreprise n'ouvre une enquête sur son décès, comme l'exige la loi. L'AOHS a finalement visité l'usine le 27 avril, mais n'a fait aucune entrevue avec les travailleurs. Les responsables de la Commission de la santé et de la sécurité au travail ont demandé à Cargill de fournir certains documents, mais l'entreprise ne s'y est même pas conformée. Le 28 avril, Cargill a tenu une assemblée virtuelle avec les travailleurs et n'a pas demandé au syndicat d'y participer. Cargill n'a pas informé le syndicat qu'il rouvrirait l'usine et n'a mené aucune discussion avec le syndicat. Malgré cela, Cargill a envoyé une lettre à chaque travailleur déclarant qu'il poursuivait les discussions avec le syndicat au sujet de la réouverture de l'usine, laissant l'impression que le syndicat approuvait la démarche.

Le syndicat a demandé à la Commission des relations de travail de l'Alberta (ALRB) de tenir une audience d'urgence et a demandé des « mesures provisoires », soulignant le préjudice irréparable qui serait causé si les travailleurs devaient retourner au travail sans que leur syndicat puisse déterminer s'ils pouvaient le faire en toute sécurité. Le pays tout entier a entendu les témoignages des travailleurs sur la façon dont l'entreprise les a obligés à venir travailler malades, a refusé de fournir une protection appropriée, a refusé de ralentir la ligne de production pour permettre une distanciation sociale et a montré autant d'indifférence et de mépris pour leur santé que leur vie. Le fait que la direction de Cargill ne puisse pas se voir confier la sécurité des travailleurs, qu'ils considèrent comme des choses et non des êtres humains, est évident pour tout le monde, tout comme le fait que c'est la santé et la vie même des travailleurs, de leur famille et des communautés qui sont en jeu. Tout le monde, sauf ceux qui constituent en paroles l'autorité publique, mais qui agissent plutôt comme les apologistes et les facilitateurs de Cargill.

Il est difficile d'imaginer une situation plus lourde de dangers ou de dommages irréparables avec la moitié des travailleurs déjà atteints de la COVID-19, la mort d'une travailleuse et proche collègue, et d'autres qui sont gravement malades à l'hôpital, certains aux soins intensifs. Malgré l'urgence manifeste de l'affaire et une situation où 85 % des travailleurs avaient indiqué qu'ils pensaient qu'il n'était pas sécuritaire de travailler, l'ALRB a fixé la date de l'audience au 7 mai, trois jours après la réouverture de l'usine, et a nommé un médiateur pour rencontrer les parties durant la fin de semaine.

La section locale 401 a demandé que la question soit réexaminée. La décision de la Commission des relations de travail disait :

« Le syndicat soulève une préoccupation de justice naturelle, affirmant que la décision l'a effectivement privé de la possibilité de demander des mesures provisoires. Ce que je retiens du résumé des raisons fournies, c'est que la Commission était préoccupée par la complexité du litige, compte tenu des circonstances actuelles. La plainte du syndicat contenait un contenu détaillé et n'a été déposée que vendredi. L'employeur n'a pas encore déposé sa réponse. La décision reflète un équilibre des intérêts qui n'est ni déraisonnable ni injuste en ces temps extraordinaires. »

Dans sa décision, la Commission ne dit pas ce qui est équilibré. Elle ne mentionne pas qu'elle « équilibre » la vie des êtres humains avec la cupidité et les intérêts étroits des milliardaires étrangers qui sont si déterminés à ouvrir l'usine. Le fait que l'employeur n'ait pas encore répondu est même déclaré comme ayant une certaine pertinence - un employeur qui n'a même pas encore présenté ses condoléances au mari de Bui Thi Hiep qui avait travaillé pour Cargill durant 23 ans, décédée de la COVID-19 le 20 avril.

Oui, beaucoup de choses sont révélées durant des temps extraordinaires. Ce qui est révélé surtout, c'est que les travailleurs ne peuvent compter que sur eux-mêmes et sur leur propre travail d'organisation et sur la force de leur nombre et de leur conviction pour défendre leurs droits, et que c'est cette lutte qui défend les droits de tous.

Tous en appui aux travailleurs les plus vulnérables des usines de transformation de la viande !


       À l'usine de Cargill à High River, le 4 mai 2020

(Photos: TUAC 401 )

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Colombie-Britannique

Les travailleurs rejettent les coupures dans le transport en commun

Près de 1 000 chauffeurs du transport en commun et 200 travailleurs d'entretien, employés de Coastal Mountain Bus Company (CMBC), ont reçu des avis de mise à pied le 20 avril, qui entreront en vigueur le 18 mai 2020. Le syndicat qui représente ces travailleurs a publié un communiqué de presse le 23 avril, affirmant qu'il va contester les mises à pied. Selon le communiqué de presse, « Unifor fera valoir que CMBC a enfreint le code des relations de travail en ne respectant pas l'avis de 60 jours. Le syndicat va tenter de faire annuler les mises à pied, ou du moins demander que les travailleurs soient rémunérés pendant les 60 jours. »

La nouvelle des mises à pied et de nouvelles coupures de services de transport en commun dans la vallée du bas Fraser en Colombie-Britannique est arrivée sans préavis. Le message enregistré du service automatisé de Translink pour les horaires indique simplement qu' « en raison du peu d'achalandage, Translink suspend certains de ses services de transport en commun ».

Translink est l'instance responsable du transport en commun — autobus, métro aérien (trains légers), service ferroviaire West Coast Express vers la Vallée du Fraser, et les traversiers de passagers dans le district régional du Grand Vancouver, soit par le biais de filiales ou de contrats privés. Suite aux compressions faites en mars, TransLink a récemment annoncé d'énormes compressions dans ses opérations, entrant en vigueur le 24 avril, de même que d'autres coupures de services en mai. Des centaines de chauffeurs du transport en commun, mécaniciens, membres du personnel administratif et d'autres travailleurs sont mis à pied « de façon temporaire ».

Selon un article du Vancouver Sun du 20 avril, la clientèle du transport en commun a baissé de 80 % depuis l'éclosion de la COVID-19 et TransLink perd 70 millions de dollars par mois. Le système de perception a été suspendu pour la durée de la pandémie et l'accès par la porte arrière est possible dans la plupart des autobus seulement pour encourager la distanciation physique et protéger les chauffeurs. Le PDG de TransLink, Kevin Desmond, prétend que TransLink « n'a pas d'autre option » et, selon l'organisme, d'autres options existent pour ces passagers pour la « plupart » des trajets. D'autres compressions sont attendues en mai. La fréquence du SkyTrain a été réduite. Le service de traversier pour passagers SeaBus entre Vancouver et Vancouver Nord fonctionne au ralenti et les circuits de fin de soirée ont été éliminés. Le service de chemin de fer de banlieue entre Vancouver et la Vallée du Fraser a été réduit de cinq à trois trains dans chaque direction.

Le système de transport en commun ne peut pas être géré comme une simple entreprise. Le gouvernement a la responsabilité sociale de fournir des services de transport en commun sécuritaires et adéquats pour les travailleurs, les étudiants, les jeunes, les aînés et les personnes handicapées. L'achalandage et les statistiques relatives aux revenus publiés par TransLink ne tiennent pas compte des besoins et de l'expérience réelle du peuple et de la société qui dépendent du système de transport en commun pour que les travailleurs puissent se rendre au travail. Les mesures de distanciation sociale réclamées par les chauffeurs d'autobus et leurs syndicats et mises en oeuvre par TransLink ont fait en sorte que les autobus ne roulent plus qu'à un tiers de leur capacité. Même avant les coupures de service nouvellement annoncées, en de nombreuses occasions les passagers ont vu les autobus leur passer sous le nez en raison de la capacité réduite des autobus, faisant en sorte que les travailleurs des services essentiels arrivent en retard à leur travail. Dans les hôpitaux et les résidences de soins de longue durée, des travailleurs sont obligés de rester au travail après la fin de leur quart de travail parce que les travailleurs du prochain quart ne sont pas arrivés à cause du ralentissement des services. Les temps de déplacement plus longs représentent un problème de taille pour les travailleurs essentiels qui ne peuvent pas être certains qu'ils vont aller prendre leurs enfants à l'heure voulue. Plusieurs personnes qui n'ont pas d'autres moyens de transport arrivent en retard à leurs rendez-vous médicaux. D'autres doivent transporter leur épicerie sur de longues distances en raison des arrêts d'autobus fermés. Ces difficultés sont encore plus grandes pour les aînés et les personnes ayant des problèmes de mobilité. Si les écoles ouvrent à nouveau, même partiellement, la pression sur le système de transport en commun sera encore plus grande.

Les syndicats représentant les travailleurs essentiels ont immédiatement condamné les coupures et les mises à pied. Jennifer Whiteside, la secrétaire-trésorière du Syndicat des employés d'hôpitaux (HEU), a dit : « Ces coupures de services engendrent un stress additionnel pour les travailleurs des soins de santé et les autres travailleurs essentiels aux premières lignes pour répondre à la pandémie en Colombie-Britannique. Les options de transport de nos membres sont limitées surtout qu'ils font déjà face à des temps de déplacement plus longs en raison des réductions de services déjà annoncées. Les dirigeants fédéraux et provinciaux doivent prendre des mesures d'urgence pour appuyer le transport en commun dans ce ralentissement dû à la pandémie. C'est une question essentielle pour les personnes en première ligne de cette crise de la santé publique. »

Dans un communiqué de presse du HEU du 20 avril, on souligne qu'un travailleur de la santé sur cinq dépend du transport en commun pour l'aller-retour au travail dans les hôpitaux, les résidences pour aînés, les agences communautaires, les centres de santé des Premières Nations, etc. Plusieurs font du temps supplémentaire ou ont un deuxième emploi pour faire vivre leur famille. La crise du logement a fait en sorte que les distances parcourues sont encore plus grandes pour un grand nombre de travailleurs.

Le directeur de la région de l'ouest d'Unifor, Gavin McGarrigle, dit des coupures qu'elles sont « une mesure irréfléchie et irresponsable. En ce moment, des dizaines de milliers de travailleurs ont recours au transport en commun parce qu'ils n'ont pas le choix. Ils s'assurent que les gens reçoivent les soins de santé dont ils ont besoin dans les résidences des soins de longue durée et dans les hôpitaux...et les épiceries...et la liste des services fournis par les travailleurs essentiels est très longue ».

David Black, le président de Move Up, le syndicat qui représente les travailleurs du secteur administratif employés par Translink et sa filiale, Coast Mountain Bus Company, a déclaré que 160 membres du syndicat ont été mis à pied avec seulement deux jours d'avis plutôt que l'avis de quatre semaines prescrit.  Il a dit que son syndicat exigera un financement d'urgence à court terme pour le transport en commun. Le premier ministre de la Colombie-Britannique, John Horgan, a réagi en refilant ses responsabilités au gouvernement fédéral. Hogan prétend que le gouvernement fédéral a « accès à des ressources qui peuvent être déployées dans tout le pays ». Il n'y a pas encore eu d'engagement en ce sens de la part du gouvernement fédéral.

Alors que les gouvernements refusent d'assumer leur responsabilité sociale, les travailleurs essentiels de première ligne prennent leurs responsabilités, faisant des sacrifices et mettant leur santé et leur vie à risque pour servir les autres. Les travailleurs du transport en commun et d'autres parlent en leur propre nom et exigent des autorités qu'elles fournissent l'équipement de protection individuelle et adoptent des mesures d'hygiène pour sauver des vies afin que les services comme le transport en commun, qui sont essentiels à la société, puissent continuer de fonctionner. C'est ainsi que l'activation du facteur humain est bloquée par le système politique qui marginalise les travailleurs et les exclut des prises de décision. À mesure que les travailleurs essentiels se rendent compte de leur rôle dirigeant dans la résolution des problèmes engendrés par la COVID-19, ils voient de plus en plus la nécessité de s'organiser pour s'investir du pouvoir.

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