Les travailleurs de Cargill défendent leurs droits

Réouverture de l'usine de Cargill à High River


Le président de la section locale 401 des Travailleurs unis de l'alimentation et du commerce (TUAC), Thomas Hesse, prend la parole à l'extérieur de l'usine de Cargill, le 4 mai 2020, pour dénoncer la décision de l'entreprise de rouvrir l'usine. Le syndicat avait tenté en vain de forcer le gouvernement de l'Alberta à interdire la réouverture de l'usine.

Le monopole géant américain Cargill a rouvert son usine de High River le 4 mai en violation de la position très claire des travailleurs et de leur syndicat que l'usine ne doit pas rouvrir tant qu'ils ne considèrent pas que le travail y est sécuritaire. Au 4 mai, 981 des 2 000 travailleurs ont été déclarés atteints de la COVID-19 et les travailleurs ont souligné que plusieurs d'entre eux, qui ont contracté la maladie, n'ont jamais été testés.

Le président de la section locale 401 des TUAC, Thomas Hesse, a déclaré que Cargill est en probation. Le syndicat a conseillé aux travailleurs de se présenter à leur superviseur s'ils sont en santé, ont été déclarés aptes à travailler par un médecin et rappelés au travail. Cependant, a déclaré Hesse une fois de plus, si les travailleurs considèrent que l'usine est non sécuritaire, ils ont le droit de refuser un travail dangereux. « Si vous pensez que ce n'est pas sécuritaire de travailler, ne travaillez pas », a-t-il dit. Il a aussi conseillé aux travailleurs de contacter immédiatement le syndicat s'ils pensent que la compagnie ne les maintient pas en sécurité.

« Il est possible que les gouvernements nous déçoivent par leur refus de donner la priorité aux travailleurs ordinaires, mais faire partie d'un syndicat est la meilleure façon de riposter et de ne pas être forcé au silence. En tant que votre syndicat, nous ne permettrons jamais que vous deveniez invisibles. Nous ne vous laisserons jamais être privés d'une voix. Jamais ! », a dit Hesse.

« LA SITUATION À CARGILL EST SÉRIEUSE ET LES CHIFFRES NE MENTENT PAS. La COVID-19 est meurtrière. Elle a tué une travailleuse de Cargill et a rendu plusieurs désespérément malades. On évalue que 921 (981 maintenant- Note de FO) des quelque 2 000 travailleurs de l'usine de Cargill à High River ont maintenant été déclarés positifs à la COVID-19. Il existe maintenant 1 500 cas positifs liés à l'usine. Personne ne devrait être surpris que nous ayons demandé que l'usine soit fermée jusqu'à ce qu'elle soit clairement sécuritaire. Très peu de gens sont en désaccord avec nous. »

Les deux plus grandes usines de transformation du boeuf en Alberta sont le site des deux plus grandes éclosions de la COVID-19 au Canada, d'abord l'usine de Cargill, puis celle de JBS à Brooks.

Le 5 mai, il a été annoncé qu'une troisième usine en Alberta, Harmony Beef, située à Balzac, juste au nord de Calgary, compte 34 cas d'infection à la COVID-19. Le Syndicat de l'agriculture, qui représente les inspecteurs de viande de l'usine, a demandé qu'elle soit fermée. L'usine elle-même n'est pas syndiquée.

La Commission des relations de travail de l'Alberta a refusé de tenir une réunion d'urgence et de répondre de manière positive à la demande du syndicat de maintenir l'usine fermée jusqu'à ce que le syndicat détermine qu'il est sécuritaire pour les travailleurs d'y retourner. La Commission de la santé et de la sécurité du travail n'a pas voulu adopter la mesure immédiate requise et émettre une ordonnance d'arrêt de travail pour préserver la santé et la vie des travailleurs. L'audience en relations de travail débutera le 7 mai, trois jours après la réouverture de l'usine.

« Il y aura des comptes à rendre chez Cargill », a déclaré le président de la section locale 401 des TUAC, Thomas Hesse, le 6 mai. « Dans quelques mois, nos membres chez Cargill seront en position de grève légale, et il faudra traiter de l'anxiété et de la peur qu'ils ressentent en ce moment. La peur se transforme en colère. Tous les yeux sont tournés vers leur employeur et Cargill est en probation. »

Le 4 mai, le plancher d'abattage a été rouvert et le département de la fabrication, où se fait la transformation de la viande, a été réouvert le 6 mai. Des représentants de la section locale 401 des TUAC  ont été présents aux barrières chaque jour pour donner de l'information aux travailleurs qui rentraient au travail et leur distribuer des masques, et d'autres syndicats se sont joints à eux pour leur exprimer leur appui. Le 4 mai, entre 60 et 70 travailleurs se sont présentés au travail alors que l'usine en compte 2 000. Trois autobus scolaires, maintenant dotés de séparateurs de sièges  pour amener des travailleurs qui font normalement du covoiturage, sont aussi entrés sur le terrain de l'usine. Un n'avait que le chauffeur à bord alors qu'un autre n'avait qu'un seul passager. Le président de la section locale 401 a dit au réseau CBC que Cargill fonctionne sur une seule roue et non sur quatre comme il le prétend et que s'il faut habituellement 40 minutes pour découper une vache, il a fallu une heure 40 minutes pour le faire ce jour-là.

Hesse a dit que ce sont les travailleurs qui savent ce qui se passe à l'usine et ce qui s'y est produit. Cependant, le médecin hygiéniste en chef ne base pas sa décision que l'usine est sécuritaire sur les preuves fournies par les travailleurs, mais sur des preuves par ouï-dire qui ne permettent pas de tirer des conclusions. Les travailleurs ont dénoncé le fait qu'ils avaient été déclarés aptes à travailler même s'ils avaient des symptômes, qu'ils avaient été déclarés positifs à la COVID-19, n'avaient pas complété leur période d'isolement et avaient voyagé à l'étranger récemment.

Qui de ces personnes en position d'autorité pensent-elles tromper quand elles répètent sans arrêt que Cargill leur a garanti que l'usine est sécuritaire ? Les travailleurs ne sont pas rassurés par le représentant de la Santé publique, le docteur Hinshaw ou par tout autre haut représentant, a dit Thomas Hesse.

Il a aussi déclaré que le syndicat a tenté de travailler avec Cargill pour développer des procédures et des politiques rationnelles, mais la culture de la compagnie est de découper autant de bêtes qu'elle le peut. En temps normal, Cargill transforme environ 4 000 têtes de bétail par jour, ce qui représente 40 % de l'approvisionnement en boeuf du Canada.

Un membre de Migrante fait le tri de la nourriture pour les travailleurs étrangers temporaires de l'autre usine très touchée,  l'usine JBS Food à Brooks.

« Cargill est la propriété de la famille Cargill. Lorsque nous communiquons avec les propriétaires, nos communications se font avec Wichita au Kansas. Cargill appartient à une famille. Quinze des membres de la famille sont des milliardaires. C'est la quatrième famille la plus riche des États-Unis, m'a-t-on dit, et vous ne devenez pas aussi riche sans savoir comment faire de l'argent et chaque vache qui passe à l'abattoir est du profit, alors cette motivation est un élément naturel de l'entreprise. Mais il appartient à la société, aux décideurs politiques et aux gouvernements de faire en sorte que les endroits de travail soient sécuritaires et que le profit n'est pas l'unique moteur de la société, et c'est particulièrement important en ce moment-ci. »

« Selon nous, cette usine devrait fermer jusqu'à ce que Cargill ait prouvé qu'il se soucie de la santé et de la sécurité des travailleurs et que cela passe avant les profits. Malheureusement, nos demandes au gouvernement albertain et à la Commission de la santé et de la sécurité du travail sont tombées dans l'oreille d'un sourd jusqu'à maintenant », a dit Hesse. « Mais nous n'avons pas abandonné. Nous continuons de faire pression sur Cargill par tous les moyens possibles pour garantir votre sécurité.

« Il y a des choses positives qui se produisent. Il y a eu une expression massive de sympathie et d'appui pour les travailleurs de l'alimentation de l'Alberta. Beaucoup de groupes travaillent avec nous pour vous appuyer. Hier, par exemple, nous avons livré des certificats-cadeaux d'épicerie à Migrante, un groupe qui travaille fort pour bâtir la solidarité et livrer des biens essentiels à ceux qui sont dans le besoin. Chaque Albertain et chaque Canadien surveille Cargill en ce moment. Le public tient à savoir que vous êtes en sécurité lorsque vous mettez les pieds dans cette usine.

« Nous avons espoir les uns envers les autres. Les travailleurs peuvent eux-mêmes contrôler leur destinée en agissant en solidarité. En tant que votre syndicat, nous serons là pour appuyer chaque choix que vous ferez. »


Des représentants du SCFP-Alberta et de l'Association des sciences de la santé de l'Alberta (HSAA) se joignent  aux membres de la section locale 401 des TUAC devant l'usine de Cargill, le 5 mai 2020.

(Photos: TUAC 401, Bavan, Action Dignity)


Cet article est paru dans

Numéro 32 - Numéro 32 - 7 mai 2020

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