Numéro 59 - 8 novembre 2023

Première journée de grève dans le secteur public

Se dévoile un gouvernement en contradiction avec les besoins d'un Québec moderne


Les travailleurs rejettent les offres salariales cul-de-sac

Participation militante à la première journée de grève

Journées de grève dans les semaines à venir

Lettre à la rédaction



Première journée de grève dans le secteur public

Se dévoile un gouvernement en contradiction avec les besoins d'un Québec moderne


 Îles-de-la-Madeleine, grève du 6 novembre 2023

Les 420 000 travailleuses et travailleurs du secteur public du Québec, membres du Front commun, ont participé à une militante journée de grève le lundi 6 novembre contre le refus du gouvernement de défendre le droit des Québécoises et des Québécois à des services publics, ce qui inclut offrir aux travailleuses et travailleurs du secteur public les conditions de travail et les salaires qu'ils tentent de négocier face à un gouvernement qui privatise et qui dicte. Il y a eu des piquets de grève partout au Québec, dans les grandes et petites villes et dans les régions rurales, et les travailleurs ont exprimé leur rejet de la position intransigeante du gouvernement qui fait du tort au secteur public. La présidente du Conseil du trésor du Québec, Sonia LeBel, qui est également ministre responsable de l'Administration gouvernementale, cherche à faire croire que c'est par conscience sociale que son gouvernement retarde la résolution du conflit dans le secteur public.

Le 29 octobre, la ministre LeBel a déposé ce qu'elle appelle une « nouvelle offre », dans laquelle l'offre d'augmentation salariale passe de 9 % à 10,3 % sur cinq ans. Les syndicats l'ont rejeté comme une insulte et ont maintenu le mot d'ordre de grève entre autres parce que la « nouvelle offre » maintient les hausses salariales en-deçà du taux d'inflation prévu. Cela voudrait dire que les travailleuses et travailleurs du secteur public vont continuer de s'appauvrir alors qu'il y a plusieurs années de rattrapage à faire côté salarial. Les syndicats du Front commun demandent des augmentations d'environ 20 % sur trois ans.

Maintenant la ministre dit que, puisqu'elle a déposé une « nouvelle offre », c'est aux syndicats à déposer une contre-offre s'ils ne sont pas satisfaits ! Elle dit également que ce n'est pas juste une affaire de salaires et de conditions de travail, « il faut aussi améliorer l'organisation du travail dans nos réseaux ». Il s'agit d'amener les syndicats à accepter l'imposition d'horaires de travail «flexibles » qui rendent les conditions de travail intenables et la vie personnelle de ceux qui travaillent dans la santé et l'éducation également insoutenable.

En déclenchant des journées de grève interposées, le Front commun donne au gouvernement une chance de retourner à la table de négociation et de négocier de bonne foi. Comme la très grande majorité de la population, les travailleuses et travailleurs de tout le Québec, qui font aussi partie de ce qu'on appelle « le public », s'opposent catégoriquement à toute tentative d'accroître les pouvoirs ministériels afin que les gouvernements puissent agir en toute impunité alors que la main-d' uvre est considérée comme jetable. Il y a au moins 600 000 travailleuses et travailleurs dans ces secteurs qui sont pleinement engagés à faire connaître la situation, avec des familles et des entourages qui savent ce qui se passe réellement, et le Québec tout entier connaît l'état des services de santé, des écoles, des cégeps et des services sociaux. Chaque jour, des reportages révèlent les dommages causés par les lois adoptées pour servir des intérêts privés étroits. Ils révèlent le tort causé à la société lorsque tout est soumis au dictum que c'est la recherche du profit privé qui est le moteur du développement des programmes sociaux, et non le bien-être de la population.

Le gouvernement Legault prétend que, dans l'équation des négociations du secteur public, c'est lui qui défend les services publics et le bien-être de la population, alors que les travailleuses et travailleurs du secteur public ne s'intéresseraient qu'à leurs salaires et conditions de travail. En réponse à la première journée de grève du Front commun, le ministre de l'Éducation, Bernard Drainville, a publié sur X « une pensée pour les parents et les élèves qui verront leur horaire chamboulé. On souhaite tous qu'une entente soit rapidement conclue. »  Il s'agit là d'un exemple typique des tentatives du gouvernement de monter le public contre la section de la population qui travaille dans les secteurs de la santé et de l'éducation. Il espère que les désagréments subis par l'ensemble de la société lorsque les services ne sont pas disponibles l'emporteront sur la sympathie pour les travailleurs et leurs revendications.

En règle générale, les ministres et les porte-paroles des gouvernements, ainsi que les médias à leur disposition, se contentent de diffamer et de calomnier les travailleurs et refusent de discuter de leurs conditions de travail, et surtout des solutions qu'ils proposent pour améliorer les systèmes de santé et d'éducation et de services sociaux. Et la raison est bien évidente : le gouvernement n'a aucunement l'intention de répondre aux besoins en matière de services publics et compte utiliser le trésor public pour garantir des contrats et des profits aux fournisseurs de services privés.

Les travailleuses et travailleurs, avec ou sans la grève, sont les premiers défenseurs des intérêts du peuple québécois. Tous ensemble en appui à leur juste cause !

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Les travailleurs rejettent les offres
salariales cul-de-sac


Montréal, 6 novembre 2023

Malgré l'écrasant vote de grève par l'ensemble des travailleurs de l'éducation, de la santé et des programmes sociaux, du Front commun ou pas, la ministre responsable de l'Administration gouvernementale et présidente du Conseil du trésor, Sonia LeBel, a déposé ce qu'elle appelle une nouvelle offre aux 600 000 travailleurs de ce secteur, le 29 octobre passé, faisant passer l'augmentation de l'offre salariale de 9 % à 10,3 % sur cinq ans.

Le Front commun demande depuis plus d'un an des augmentations salariales représentant environ 20 % en trois ans. « Encore une fois, le gouvernement démontre son incapacité à comprendre les difficultés vécues dans les services publics et à réaliser l'urgence de sauver le bateau qui est en train de couler. Il prouve de plus sa déconnexion complète face à la colère des travailleuses et des travailleurs qui, épuisés, portent sur leurs épaules des services publics plus que jamais fragilisés. [...] Nous ne voyons rien dans ce dépôt qui permettrait de lever la grève. Nous devons nous rendre à l'évidence. La grève est la seule solution pour que le gouvernement comprenne. Puisqu'il le souhaite, on va l'exercer haut et fort le 6 novembre prochain », a publié le Front commun dans un communiqué de presse en réponse à cette annonce.

Le vice-président de la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ) qui va débrayer les 8 et 9 novembre en a dit : « Deux sentiments nous habitent actuellement : déception et colère. »

La Fédération autonome de l'enseignement (FAE), qui a déposé une version élaguée de ses demandes syndicales en septembre, dit : « Nous avons déjà démontré notre volonté de régler rapidement et avons tout tenté pour faire débloquer l'impasse dans laquelle s'est retrouvée notre négociation. Nous sommes toujours prêts à discuter, mais notre confiance s'effrite de plus en plus et il sera difficile pour nos membres de garder leur calme devant les offres actuelles, qui ressemblent davantage à des offres de départ. L'écart entre la nouvelle proposition du gouvernement et les besoins de nos membres est encore très grand. » La FAE a annoncé que le 23 novembre sera la première journée de grève générale illimitée.

Souhaitant désespérément créer l'illusion que ces négociations sont des discussions ouvertes et sérieuses sur l'avenir des services publics, la ministre LeBel a dit en présentant les offres du gouvernement : « Aujourd'hui, nous avons soumis aux syndicats des propositions significatives qui pourraient avoir un impact très positif sur les discussions en cours. Il ne faut pas oublier que cette négociation doit mener à des gains, de part et d'autre, puisque c'est ultimement un contrat de travail. Oui, on doit mieux rémunérer les employés de l'État, mais j'ai aussi la responsabilité que chaque dollar issu des poches des contribuables soit maximisé et ait un impact à long terme dans nos réseaux, et non pas un effet temporaire. C'est pour cette raison que nous devons impérativement aborder les enjeux reliés à l'organisation du travail. »

La mention des « enjeux reliés à l'organisation du travail » est une autre tentative désespérée du gouvernement du Québec de faire croire qu'une organisation du travail viable qui n'est pas basée sur l'expérience directe des travailleurs de ce secteur et de leurs demandes est possible.

Le Front commun dit que « Malgré tous les signaux envoyés à ces tables [sectorielles], dont l'élagage mené récemment, nos vis-à-vis patronaux répondent qu'ils n'ont aucun mandat pour parler même de leurs propres demandes. Nous sommes rendus à nous questionner sur la volonté et la capacité du gouvernement à convenir d'ententes satisfaisantes prochainement. »

Pour lire le communiqué de Front commun, cliquer ici.

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Participation militante à la première
journée de grève


Québec

Les 420 000 travailleurs du secteur public réunis en Front commun ont entamé le lundi 6 novembre leur première journée de grève. Des centaines et centaines de piquetage ont eu lieu dans tout le Québec devant les établissements de santé et d'éducation. Du Nord du Québec jusqu'en Gaspésie, les travailleuses et travailleurs du secteur public ont défendu leurs demandes sur les lignes de piquetage et reçu un accueil chaleureux de la population : klaxons, poings levés, reprise des slogans, etc. Des passants, des familles ou d'autres travailleurs du secteur public ne faisant pas partie du Front commun, se joignent à eux à plusieurs endroits.

Montréal



Hôpital Maisonneuve-Rosemont
Centre hospitalier de l'Université de Montréal
Hôpital de réadaptation Villa Medica

Hôpital Notre-Dame

Cégep Maisonneuve
Bureau du Centre de service scolaire de Montréal
École primaire Saint-Anselme
École secondaire Pierre-Dupuy
École F.A.C.E.

Laval

Saint-Eustache

Estrie

Saint-Hyacinthe


Lanaudière

Abitibi

Chaudière-Appalaches


Jonquière


Rimouski

Gaspésie

(Photos : PMLQ, CSN, CSQ, APTS)

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Journées de grève dans les semaines à venir

Trois autres journées de grève ont été annoncées pour les 21, 22 et 23 novembre pour les travailleuses et travailleurs membres du Front commun. Les 80 000 membres de la Fédération interprofessionnelle de la Santé du Québec (FIQ) vont débrayer les 8 et 9 novembre et encore les 23 et 24 novembre, tandis que les 66 5000 enseignantes et enseignants de la Fédération autonome de l'enseignement (FAE) vont débuter une grève générale le 23 novembre.

Dans le secteur de la santé, les services se donneront selon la Loi sur les services essentiels. Quant au milieu de l'éducation, les centre de services scolaires du Québec ont eu le temps nécessaire pour aviser les parents que les cours et les services de gardes reprendront dès 11 h ou en après-midi.

La Fédération interprofessionnelle de la santé (FIQ) a avisé le gouvernement et a informé la population qu'elle a aussi en main un mandat de grève générale illimitée, après les débrayages des 7 et 8 novembre déjà annoncés.

Rappelons que depuis les mois d'octobre et novembre 2022 – voilà un an – ces organisations de travailleurs ont déposé leurs demandes au gouvernement Legault et ont offert leur temps et énergie pour en arriver à un nouveau contrat de travail qui tienne compte des responsabilités qu'ils ont face à la population. Depuis un an, ils exercent différents moyens de pression pour faire connaître au gouvernement leur détermination à améliorer leurs conditions de travail, qui sont les conditions de soins et de services qu'ils dispensent à tous et toutes.

Il est clair que les travailleurs du secteur public et la population ne font qu'un en ce qui concerne qui doit être au coeur des décisions prises en santé, en éducation et en programmes sociaux, pour que les soins nécessaires soient disponibles en qualité et en quantité. C'est cette unité qui frappe de plein fouet l'arrogance du gouvernement Legault qui a déclaré le 17 octobre passé, « Les syndicats pensent toujours qu'ils doivent faire la grève pour s'assurer de faire le plus de gains possibles. Donc on va attendre la grève [...] »

Le Front commun y a justement répondu : « Le gouvernement est-il en train de nous dire que s'il refuse d'avancer aux tables depuis un an, s'il persiste avec ses offres déconnectées, avec ses attaques contre nos conditions de travail et avec son arrogance, c'est parce qu'il attendait une grève ? Toutefois, si notre message n'était pas entendu, une deuxième séquence pourrait être exercée, laquelle constituerait le plus grand mouvement de grève qu'ait connu le secteur public depuis 50 ans. »

Tous à la défense des services publics !
D'une seule voix en appui aux travailleurs et travailleuses de la santé, de l'éducation et des programmes sociaux !

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Lettre à la rédaction

De récentes divulgations médiatiques ont attiré l'attention sur la pointe de l'iceberg en ce qui concerne qui sont les vrais décideurs des orientations du réseau de la santé au Québec. À la fin d'octobre, les médias ont publié une lettre signée par six anciens premiers du Québec faisant valoir qu'il y a plusieurs groupes de puissants intérêts privés qui se disputent le contrôle des décisions en matière de livraison des services de santé. Ces grands intérêts privés sont regroupés dans plusieurs grandes fondations caritatives qui ont une solide mainmise sur les principaux centres universitaires hospitaliers et qui se sentent menacés dans leurs prérogatives par le projet de loi de réforme de la santé qui veut retirer des prises de décisions des centres hospitaliers universitaires.

L'affaire de la lettre des six anciens premiers ministres a vite disparu des reportages médiatiques quand il est devenu évident que la réforme de la santé du gouvernement Legault est également conçue pour concentrer davantage le pouvoir de décision entre les mains de puissants intérêts privés. Il y a ceux des centres hospitaliers universitaires que représentent les six anciens premiers ministres mais il y a aussi ceux dont le gouvernement Legault se fait le champion. Il s'agit de qui décide de l'orientation de la santé, quelles sont les priorités, quels équipements médicaux acheter de quel fabriquant, quel « marché de la santé » viser, quels médicaments institutionnaliser, etc. Dans tout cela, les salaires et les conditions de travail n'ont aucune autre représentation politique que les intérêts représentés par les travailleuses et travailleurs en grève et tous ceux qui soutiennent la justesse de leur cause.

Un lecteur de Montréal

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