Forum ouvrier

Numéro 67 - 9 août 2021

Les travailleurs de Rio Tinto en grève à Kitimat,
en Colombie-Britannique

Les travailleurs tiennent tête à
l'offensive antisociale et à la destruction nationale de Rio Tinto


Les Albertains se mobilisent contre les actions irresponsables du gouvernement
Protégeons la santé! Sauvons les vies!- Peggy Askin et Peggy Morton


Les travailleurs de Rio Tinto en grève à Kitimat, en Colombie-Britannique

Les travailleurs tiennent tête à l'offensive antisociale et à la destruction nationale de Rio Tinto

Depuis le 25 juillet à minuit une seconde, les 950 travailleurs de l'usine d'aluminium de Rio Tinto à Kitimat et de la centrale d'énergie électrique de Kemano qui alimente l'usine en énergie hydroélectrique sont en grève pour leurs revendications et contre les demandes de concessions de Rio Tinto. Les membres de la section locale 2301 d'Unifor qui ont pris part au vote ont voté à 100 % en faveur de la grève.

La section locale indique sur son site Web et sur sa page Facebook (Unifor Kitimat) que les travailleurs ont entamé des négociations avec Rio Tinto en vue d'une nouvelle convention collective en présentant des demandes qu'ils considèrent importantes pour l'intégrité du syndicat en tant que collectif organisé capable de défendre efficacement tous les travailleurs, actifs et retraités.

Un message publié le 27 juillet sur leur page Facebook se lit comme suit : « La section locale 2301 d'Unifor est en grève chez Rio Tinto Alcan depuis le 25 juillet 2021. Nous luttons pour nos retraités, nos bons emplois, nos pensions, nos avantages sociaux, notre santé et notre sécurité, notre avenir et notre communauté. Nous croyons que Rio Tinto Alcan profite injustement des ressources que les citoyens de la Colombie-Britannique lui fournissent. Cette installation a été construite sur le dos de nos retraités et nous n'accepterons pas de les laisser sur le carreau. Les jeunes travailleurs de nos communautés méritent de gagner les salaires et les avantages que notre syndicat a négociés, et non ce système à deux vitesses à salaires inférieurs que Rio Tinto a créé par la sous-traitance. Venez sur les lignes de piquetage et appuyez les travailleurs locaux qui appuient notre communauté. »

Quelques jours avant le début de la grève, Unifor a publié une déclaration dans laquelle il dit notamment :

« Dans ses pourparlers avec la compagnie, le syndicat a demandé des changements raisonnables et attendus depuis longtemps concernant les revenus de retraite et les niveaux de prestations des travailleurs, qui sont tous restés inchangés depuis plus d'une décennie. En particulier, le syndicat cherche à améliorer la sécurité de la retraite des jeunes travailleuses et travailleurs en faisant passer les nouveaux employés du régime à cotisations définies de la compagnie à un régime à prestations définies.

« Les négociations portent également sur un arriéré de plus de 300 griefs, dont certains remontent à plus de quatre ans, créés par le recours inéquitable et dangereux de la compagnie à des entrepreneurs pour effectuer le travail des membres du syndicat et par son refus d'embaucher des travailleurs à temps plein, ce qui entraîne une dépendance excessive à l'égard des employés temporaires. Rio Tinto n'a pas voulu s'attaquer à son utilisation agressive et croissante d'entrepreneurs, faisant de cette question un point central des négociations. »

Unifor souligne également que « malgré une chute mondiale des prix de l'aluminium d'avril à juin de l'année dernière, l'année 2020 a été la troisième plus rentable pour Rio Tinto en deux décennies, avec des revenus nets dépassant 9,8 milliards de dollars US ».

Les travailleurs rapportent que Rio Tinto fait fonctionner l'usine d'électrolyse avec des effectifs très insuffisants et de manière dangereuse, peu disposé à embaucher des travailleurs à temps plein, poussant à la limite les travailleurs à temps plein actuels, les surchargeant et les épuisant par le temps supplémentaire. La compagnie viole également la convention collective actuelle en embauchant davantage de travailleurs contractuels qui travaillent côte à côte avec les travailleurs membres de la section locale, effectuant le même travail pour des salaires beaucoup plus bas et dans des conditions de travail inférieures à celles que les travailleurs syndiqués ont négociées au fil des décennies.

Lorsque les travailleurs ont donné à leur comité de négociation le mandat de présenter leurs demandes, Rio Tinto Alcan les a rejetées du revers de la main. Il a présenté les siennes, mettant l'accent sur l'imposition de conditions à deux vitesses.

Après le début de la grève, la direction de Rio Tinto a lancé une attaque publique contre le syndicat, accusant la direction locale de mal informer les travailleurs et le public sur les demandes de l'entreprise. La direction a affirmé qu'elle ne proposait pas de réduction des prestations après-retraite ou des prestations de survivant.

Le syndicat s'est également adressé au public et a prouvé, en citant directement l'offre écrite de Rio Tinto, que c'est précisément ce que demande l'entreprise. Entre autres choses, Rio Tinto exige que, dans le cadre du régime de soins de la vue, aucune couverture des soins de la vue ne soit offerte à la retraite aux employés embauchés à partir du 24 juillet 2021. En vertu du régime de soins dentaires, aucune couverture dentaire ne serait offerte à la retraite aux employés embauchés après le 24 juillet 2021. Si un travailleur retraité décède avant son 70e anniversaire, la couverture du régime de soins de la vue et du régime de soins dentaires pour son conjoint survivant se poursuivrait pendant 48 mois supplémentaires. Selon la proposition de l'entreprise, cette couverture ne serait pas offerte aux conjoints des travailleurs embauchés après le 24 juillet 2021. En outre, selon l'offre de l'entreprise, les travailleurs temporaires, qui doivent actuellement travailler 1 500 heures pour bénéficier des avantages sociaux, devraient désormais travailler 2 080 heures pour y accéder. L'entreprise exige également que les travailleurs temporaires ayant travaillé moins de 1 040 heures normales au cours d'une période de six mois perdent leurs avantages pour les six mois suivants.

Les travailleurs mènent la lutte pour tous les travailleurs actifs et retraités actuels et pour les générations futures de travailleurs et le bien-être des communautés.

Les syndicats, les entreprises locales et les organisations communautaires apportent leur soutien au piquet de grève des travailleurs de Rio Tinto, le 3 août 2021.

En faisant valoir leurs revendications pour défendre la dignité et les droits de tous les travailleurs et de leur communauté, les travailleurs défient le diktat de Rio Tinto. L'entreprise considère que Kitimat et la région, ses ressources naturelles et humaines, sont un avant-poste de son empire mondial, dans lequel il peut commander un grand bassin de main-d'oeuvre qui est remplaçable. La quasi-totalité de l'aluminium produit à la fonderie de Kitimat est expédiée sur les marchés étrangers, principalement aux États-Unis, au Japon et en Corée du Sud.

Alcan, avant son rachat par Rio Tinto en 2007, ne cachait pas qu'elle avait construit son usine à Kitimat pour avoir accès aux ressources en eau de la région dont elle avait besoin pour produire de l'électricité pour sa production d'aluminium. Le gouvernement de la Colombie-Britannique a accordé à Alcan des droits sur les terres et l'eau afin qu'elle puisse construire un barrage et un réservoir pour détourner le débit de la rivière Nechako afin d'alimenter l'usine en énergie hydroélectrique. Ces droits ont été étendus à Rio Tinto, en dépit des contestations judiciaires de la part des Premières Nations et des gouvernements régionaux fondées sur les titres et les droits autochtones et sur des préoccupations environnementales.

La centrale d'énergie électrique de Kemano génère de l'hydroélectricité continue à faible coût qui est transmise à l'usine d'électrolyse par une ligne de transmission de 80 km. La centrale de Kemano est reliée au réservoir de Nechako par un tunnel vieux de plus de 65 ans. En 2017, Rio Tinto a annoncé un investissement de 600 millions de dollars canadiens pour un deuxième tunnel.

Le gouvernement fédéral et le gouvernement de la Colombie-Britannique ont tous deux signé des accords avec Alcan, qui ont été étendus à Rio Tinto, qui permettent à la compagnie de détourner l'eau pour produire ce qu'on appelle de l'« énergie excédentaire », qui est ensuite vendue à BC Hydro. On estime que pour la seule année 2015, Rio Tinto a gagné 130 millions de dollars par la vente d'« énergie excédentaire ».

Avec leur grève, les travailleurs de Rio Tinto à Kitimat défient le diktat antiouvrier et antisocial de Rio Tinto de même que le refus des gouvernements provincial et fédéral de défendre les droits ancestraux des peuples autochtones. L'avenir des travailleurs et du peuple de la Colombie-Britannique est dans la lutte pour les droits de tous et de toutes. Eux seuls peuvent changer la direction de l'économie afin qu'elle favorise leurs intérêts et non ceux d'une oligarchie financière internationale qui n'a pas le moindre souci pour le peuple ou le pays.

Forum ouvrier appelle tous les travailleurs à se tenir fermement aux côtés des travailleurs de Kitimat et à leur apporter tout le soutien possible.

(Photos : Unifor, J. Woods, L. Oke)

Haut de page


Les Albertains se mobilisent contre les actions irresponsables du gouvernement

Protégeons la santé! Sauvons les vies!

Les Albertains sont passés à l'action aussitôt que le gouvernement du Parti conservateur uni (PCU) a annoncé qu'il démantelait les mesures de santé publique en Alberta en réponse à la COVID-19. Des rassemblements quotidiens ont eu lieu depuis le 30 juillet devant l'Assemblée législative à Edmonton et le centre McDougall à Calgary. Le nombre de personnes qui y participent augmente à chaque jour et des rassemblements ont maintenant lieu à Red Deer et Lethridge. Les actions débutent chaque jour à midi, et se poursuivront au moins jusqu'au 16 août, date à laquelle le gouvernement a annoncé qu'il ne fera plus de tests pour la COVID-19 et n'exigera plus que les gens qui ont un test positif se confinent.

À la mi-août, l'Alberta cessera à toutes fins pratiques toutes les mesures de santé publique, y compris le traçage des contacts, le port du masque dans le transport en commun, le confinement pour les personnes qui ont un test positif et les tests pour les personnes asymptomatiques ou ayant des symptômes légers. Les gens ayant des symptômes sévères ne peuvent avoir un test que via leur médecin ou une clinique, mais les médecins n'ont pas encore été informés de comment ils obtiendront les test requis, sans parler du fait que ces décisions violent tous les principes reliés au contrôle des maladies infectieuses et aux normes de la santé publique. Les hôtels désignés pour le confinement seront fermés et il n'y aura aucune mesure d'appui pour le confinement. En somme, la réponse du gouvernement au nombre croissant de cas a été de ne plus les compter. C'est une manifestation choquante de négligence et d'indifférence envers le bien-être du peuple.

Le gouvernement du PCU prétend se baser sur la « science », même s'il ne met de l'avant aucune preuve scientifique pour appuyer ses actions. Les médecins, la santé publique et les experts du contrôle des infections sont unis et prennent la parole comme jamais auparavant pour exiger que le gouvernement fasse marche arrière immédiatement et cesse de mettre à risque la vie et la santé des gens. Les travailleurs de la santé et leurs syndicats, les enseignants, les étudiants et les parents, les travailleurs de plusieurs secteurs de l'économie, les aînés et les gens de tous les horizons prennent la parole, participent aux rassemblements, écrivent ou téléphonent à leurs députés et au médecin-hygiéniste en chef, discutent au sein de leurs syndicats et organisations pour évaluer quelles mesures il faut prendre.

Aux rassemblements, tous les participants sont encouragés à s'exprimer, à partager leurs préoccupations, leurs expériences et leurs connaissances. Il en résulte que les gens sont en mesure de créer une opinion informée sur les dangers que posent les actions du gouvernement, et assument leur responsabilité de parler aux autres, de partager l'information et d'encourager amis, familles, voisins et collègues de travail à participer ensemble à ces actions.

Des personnes de tous les horizons viennent aux actions pour réclamer que le gouvernement renverse sa décision. Elles demandent que Jason Kenney démissionne et que le PCU soit congédié. Chose très importante, les participants discutent de ce que nous pouvons faire ensemble face aux actions irresponsables et dangereuses du gouvernement. Ils parlent des personnes vulnérables dans leur famille qui vont être affectées si les tests et le confinement sont arrêtés. Ils parlent de la nécessité d'appuyer et de défendre les travailleurs de la santé qui sont épuisés et qui n'ont pas la réserve d'énergie nécessaire pour faire face à une nouvelle vague. Ils expriment leurs préoccupations pour les enfants en bas de 12 ans qui ne peuvent être vaccinés, pour les autres qui ne peuvent être vaccinés ou qui sont immunodéprimés. La propagation dans les endroits de travail est aussi une grande préoccupation, alors que les tests ne sont pas disponibles, qu'il n'y a pas de revenu pour les travailleurs qui se confinent, et que les employeurs sont libres d'exercer la pression sur les travailleurs pour qu'ils viennent travailler même si eux ou un proche contact sont symptomatiques. La plus grande préoccupation est que personne ne saura vraiment si une personne est infectée ou non sauf si elle devient sérieusement malade.

En vertu du Code criminel, est coupable de négligence criminelle quiconque soit en faisant quelque chose, soit en omettant de faire quelque chose qu'il est de son devoir d'accomplir, montre une insouciance déréglée ou téméraire à l'égard de la vie ou de la sécurité d'autrui. Aucun cas n'est plus flagrant que celui du gouvernement Kenney, qui démantèle la réponse de la santé publique de l'Alberta à la COVID-19 au moment même où la province entre dans sa quatrième vague, où une partie importante de la population n'est pas vaccinée et où le nombre de nouveaux cas actifs continue d'augmenter. Le nombre de cas actifs de COVID-19 augmente rapidement en Alberta. En date du 5 août, l'Alberta avait le nombre le plus élevé de cas actifs au Canada et représente plus d'un cas actif sur quatre au Canada. Les nouveaux cas, les taux de cas positifs et le facteur-R (le nombre de gens qui seront infectés par chaque nouveau cas de COVID-19) sont tous à la hausse, alors que les tests positifs augmentent en flèche.

Le gouvernement albertain ne reconnaît pas qu'il a une responsabilité sociale envers le peuple. Son programme est de satisfaire aux exigences des riches qui considèrent eux aussi que le peuple est sacrifiable. Il déclare ouvertement que tout le monde doit subvenir à ses propres besoins. Même le confinement, une mesure qui a été comprise et pratiquée depuis au moins le XIVe siècle, a été abandonné. Le gouvernement présente ses décisions comme étant la « politique Hinshaw », d'après le nom du médecin-hygiéniste en chef de la Santé de l'Alberta, la docteure Deena Hinshaw, un geste grossier pour faire dévier le blâme si la situation se détériore davantage.

Les Albertains demandent entre autres choses que les tests soient rétablis et financés dans leur intégralité et que chaque personne qui doit se confiner ou s'isoler reçoive tout l'appui nécessaire et ne perde aucun revenu. Ils disent aussi que les enseignants, les parents et les étudiants eux-mêmes savent comment rendre les écoles sécuritaires et qu'ils doivent être la voix décisive en ce qui concerne comment elles seront rendues sécuritaires.

Le fait que le gouvernement ne peut être accusé de responsabilité criminelle pour son refus d'assumer ses responsabilités sociales, qui constitue de la négligence criminelle, en dit long sur la nécessité du renouveau démocratique et de nouvelles formes par lesquelles les gens peuvent exercer un contrôle sur leur vie, y compris les décisions critiques comme celles-ci. Cela met en lumière l'urgente nécessité de mettre fin à cette situation où les dirigeants se placent au-dessus du peuple et font des lois qui leur permettent d'agir en toute impunité. Voilà ce qui est devenu la question décisive à laquelle font face les Canadiens et qui exige une solution.

Edmonton

Calgary

(Photos : Forum ouvrier, RCM)

Haut de page


(Pour voir les articles individuellement, cliquer sur le titre de l'article.)

PDF

NUMÉROS PRÉCÉDENTS | ACCUEIL

Site web : www.pccml.ca   Email : forumouvrier@cpcml.ca