Les travailleurs de Rio Tinto en grève à Kitimat, en Colombie-Britannique

Les travailleurs tiennent tête à l'offensive antisociale et à la destruction nationale de Rio Tinto

Depuis le 25 juillet à minuit une seconde, les 950 travailleurs de l'usine d'aluminium de Rio Tinto à Kitimat et de la centrale d'énergie électrique de Kemano qui alimente l'usine en énergie hydroélectrique sont en grève pour leurs revendications et contre les demandes de concessions de Rio Tinto. Les membres de la section locale 2301 d'Unifor qui ont pris part au vote ont voté à 100 % en faveur de la grève.

La section locale indique sur son site Web et sur sa page Facebook (Unifor Kitimat) que les travailleurs ont entamé des négociations avec Rio Tinto en vue d'une nouvelle convention collective en présentant des demandes qu'ils considèrent importantes pour l'intégrité du syndicat en tant que collectif organisé capable de défendre efficacement tous les travailleurs, actifs et retraités.

Un message publié le 27 juillet sur leur page Facebook se lit comme suit : « La section locale 2301 d'Unifor est en grève chez Rio Tinto Alcan depuis le 25 juillet 2021. Nous luttons pour nos retraités, nos bons emplois, nos pensions, nos avantages sociaux, notre santé et notre sécurité, notre avenir et notre communauté. Nous croyons que Rio Tinto Alcan profite injustement des ressources que les citoyens de la Colombie-Britannique lui fournissent. Cette installation a été construite sur le dos de nos retraités et nous n'accepterons pas de les laisser sur le carreau. Les jeunes travailleurs de nos communautés méritent de gagner les salaires et les avantages que notre syndicat a négociés, et non ce système à deux vitesses à salaires inférieurs que Rio Tinto a créé par la sous-traitance. Venez sur les lignes de piquetage et appuyez les travailleurs locaux qui appuient notre communauté. »

Quelques jours avant le début de la grève, Unifor a publié une déclaration dans laquelle il dit notamment :

« Dans ses pourparlers avec la compagnie, le syndicat a demandé des changements raisonnables et attendus depuis longtemps concernant les revenus de retraite et les niveaux de prestations des travailleurs, qui sont tous restés inchangés depuis plus d'une décennie. En particulier, le syndicat cherche à améliorer la sécurité de la retraite des jeunes travailleuses et travailleurs en faisant passer les nouveaux employés du régime à cotisations définies de la compagnie à un régime à prestations définies.

« Les négociations portent également sur un arriéré de plus de 300 griefs, dont certains remontent à plus de quatre ans, créés par le recours inéquitable et dangereux de la compagnie à des entrepreneurs pour effectuer le travail des membres du syndicat et par son refus d'embaucher des travailleurs à temps plein, ce qui entraîne une dépendance excessive à l'égard des employés temporaires. Rio Tinto n'a pas voulu s'attaquer à son utilisation agressive et croissante d'entrepreneurs, faisant de cette question un point central des négociations. »

Unifor souligne également que « malgré une chute mondiale des prix de l'aluminium d'avril à juin de l'année dernière, l'année 2020 a été la troisième plus rentable pour Rio Tinto en deux décennies, avec des revenus nets dépassant 9,8 milliards de dollars US ».

Les travailleurs rapportent que Rio Tinto fait fonctionner l'usine d'électrolyse avec des effectifs très insuffisants et de manière dangereuse, peu disposé à embaucher des travailleurs à temps plein, poussant à la limite les travailleurs à temps plein actuels, les surchargeant et les épuisant par le temps supplémentaire. La compagnie viole également la convention collective actuelle en embauchant davantage de travailleurs contractuels qui travaillent côte à côte avec les travailleurs membres de la section locale, effectuant le même travail pour des salaires beaucoup plus bas et dans des conditions de travail inférieures à celles que les travailleurs syndiqués ont négociées au fil des décennies.

Lorsque les travailleurs ont donné à leur comité de négociation le mandat de présenter leurs demandes, Rio Tinto Alcan les a rejetées du revers de la main. Il a présenté les siennes, mettant l'accent sur l'imposition de conditions à deux vitesses.

Après le début de la grève, la direction de Rio Tinto a lancé une attaque publique contre le syndicat, accusant la direction locale de mal informer les travailleurs et le public sur les demandes de l'entreprise. La direction a affirmé qu'elle ne proposait pas de réduction des prestations après-retraite ou des prestations de survivant.

Le syndicat s'est également adressé au public et a prouvé, en citant directement l'offre écrite de Rio Tinto, que c'est précisément ce que demande l'entreprise. Entre autres choses, Rio Tinto exige que, dans le cadre du régime de soins de la vue, aucune couverture des soins de la vue ne soit offerte à la retraite aux employés embauchés à partir du 24 juillet 2021. En vertu du régime de soins dentaires, aucune couverture dentaire ne serait offerte à la retraite aux employés embauchés après le 24 juillet 2021. Si un travailleur retraité décède avant son 70e anniversaire, la couverture du régime de soins de la vue et du régime de soins dentaires pour son conjoint survivant se poursuivrait pendant 48 mois supplémentaires. Selon la proposition de l'entreprise, cette couverture ne serait pas offerte aux conjoints des travailleurs embauchés après le 24 juillet 2021. En outre, selon l'offre de l'entreprise, les travailleurs temporaires, qui doivent actuellement travailler 1 500 heures pour bénéficier des avantages sociaux, devraient désormais travailler 2 080 heures pour y accéder. L'entreprise exige également que les travailleurs temporaires ayant travaillé moins de 1 040 heures normales au cours d'une période de six mois perdent leurs avantages pour les six mois suivants.

Les travailleurs mènent la lutte pour tous les travailleurs actifs et retraités actuels et pour les générations futures de travailleurs et le bien-être des communautés.

Les syndicats, les entreprises locales et les organisations communautaires apportent leur soutien au piquet de grève des travailleurs de Rio Tinto, le 3 août 2021.

En faisant valoir leurs revendications pour défendre la dignité et les droits de tous les travailleurs et de leur communauté, les travailleurs défient le diktat de Rio Tinto. L'entreprise considère que Kitimat et la région, ses ressources naturelles et humaines, sont un avant-poste de son empire mondial, dans lequel il peut commander un grand bassin de main-d'oeuvre qui est remplaçable. La quasi-totalité de l'aluminium produit à la fonderie de Kitimat est expédiée sur les marchés étrangers, principalement aux États-Unis, au Japon et en Corée du Sud.

Alcan, avant son rachat par Rio Tinto en 2007, ne cachait pas qu'elle avait construit son usine à Kitimat pour avoir accès aux ressources en eau de la région dont elle avait besoin pour produire de l'électricité pour sa production d'aluminium. Le gouvernement de la Colombie-Britannique a accordé à Alcan des droits sur les terres et l'eau afin qu'elle puisse construire un barrage et un réservoir pour détourner le débit de la rivière Nechako afin d'alimenter l'usine en énergie hydroélectrique. Ces droits ont été étendus à Rio Tinto, en dépit des contestations judiciaires de la part des Premières Nations et des gouvernements régionaux fondées sur les titres et les droits autochtones et sur des préoccupations environnementales.

La centrale d'énergie électrique de Kemano génère de l'hydroélectricité continue à faible coût qui est transmise à l'usine d'électrolyse par une ligne de transmission de 80 km. La centrale de Kemano est reliée au réservoir de Nechako par un tunnel vieux de plus de 65 ans. En 2017, Rio Tinto a annoncé un investissement de 600 millions de dollars canadiens pour un deuxième tunnel.

Le gouvernement fédéral et le gouvernement de la Colombie-Britannique ont tous deux signé des accords avec Alcan, qui ont été étendus à Rio Tinto, qui permettent à la compagnie de détourner l'eau pour produire ce qu'on appelle de l'« énergie excédentaire », qui est ensuite vendue à BC Hydro. On estime que pour la seule année 2015, Rio Tinto a gagné 130 millions de dollars par la vente d'« énergie excédentaire ».

Avec leur grève, les travailleurs de Rio Tinto à Kitimat défient le diktat antiouvrier et antisocial de Rio Tinto de même que le refus des gouvernements provincial et fédéral de défendre les droits ancestraux des peuples autochtones. L'avenir des travailleurs et du peuple de la Colombie-Britannique est dans la lutte pour les droits de tous et de toutes. Eux seuls peuvent changer la direction de l'économie afin qu'elle favorise leurs intérêts et non ceux d'une oligarchie financière internationale qui n'a pas le moindre souci pour le peuple ou le pays.

Forum ouvrier appelle tous les travailleurs à se tenir fermement aux côtés des travailleurs de Kitimat et à leur apporter tout le soutien possible.

(Photos : Unifor, J. Woods, L. Oke)


Cet article est paru dans

Numéro 67 - 9 août 2021

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