Forum ouvrier

Numéro 35 - 28 avril 2021

Journée nationale de commémoration le 28 avril

Le refus criminel de garantir un moyen de subsistance aux travailleurs exposés ou infectés au travail

L'indemnisation des travailleurs est un droit! - Christine Nugent
Déclaration du Syndicat des employés du gouvernement et des employés généraux de la Nouvelle-Écosse


Journée nationale de commémoration le 28 avril

Le refus criminel de garantir un moyen de subsistance aux travailleurs exposés ou
infectés au travail

Des dizaines de milliers de travailleurs au Canada et au Québec ont contracté la COVID-19 à leur endroit de travail. Plus de 600 travailleurs au centre de distribution d'Amazon dans la région de Peel, plus de 200 travailleurs au centre de tri postal à Mississauga, et près de 1 000 travailleurs à l'usine Cargill de transformation de la viande à High River, en Alberta, ont eu un test positif à la COVID-19. Il y a présentement des éclosions à 12 sites d'exploitation des sables bitumineux près ou autour de Fort McMurray avec 738 cas positifs confirmés en date du 26 avril.   Ce ne sont là que quatre exemples parmi des centaines d'éclosions du genre.

Les statistiques sur les éclosions aux endroits de travail n'incluent pas les établissements de santé où les éclosions affectent à la fois les travailleurs et les patients ou les résidents des centres de soins de longue durée ni les autres établissements d'habitations collectives et ne reflètent donc pas fidèlement le nombre de travailleurs infectés au travail.

http://www.cpcml.ca/francais/Images2020/Movement%20Ouvrier/20623-Ensemble%20luttonspoursante-securite-au%20travail-FTQ-ConstructionCr.JPGPour freiner la propagation de la COVID-19, des voix s'élèvent parmi les professionnels des soins de santé pour que les vaccinations soient prioritaires pour les travailleurs qui ne peuvent pas travailler de la maison et dont les endroits de travail sont toujours ouverts, en commençant par ceux qui sont les plus touchés. Une des raisons pour laquelle les gouvernements n'ont pas pris de telles décisions, c'est que s'ils le faisaient ce serait un aveu que le gouvernement, qui est responsable de la distribution des vaccins, a la responsabilité d'assurer la sécurité des travailleurs au travail et de mettre en place des lois et règlements que les employeurs doivent respecter pour garantir des endroits de travail sécuritaires. Cela voudrait dire poser des gestes qui donnent un sens aux belles paroles comme « nous sommes là pour vous, merci à vous, chers travailleurs essentiels » qui ressemblent de plus en plus à de l'ironie.

Pour ajouter à l'insulte, un grand nombre de rapports indiquent que les travailleurs se font dire par leurs employeurs de ne pas faire de demande d'indemnisation mais de plutôt demander la Prestation canadienne d'urgence (PCU) ou la Prestation canadienne de maladie pour la relance économique (PCNRE), et que bon nombre de demandes d'indemnisation sont refusées. Le taux d'acceptation des réclamations liées à la COVID-19 varie d'une province à l'autre, le plus élevé étant au Québec à 95 % et le plus bas au Manitoba à 60 %. Nombreux sont les travailleurs qui rapportent que leurs demandes sont refusées s'ils ont eu la COVID-19 mais ont eu un test négatif, même s'ils sont toujours malades et que leur médecin a confirmé qu'ils sont malades et incapables de travailler.

Le Globe and Mail a rapporté le 13 avril qu'à partir du 5 mars 2021, il y a eu plus de 20 100 demandes liées à la COVID-19 auprès de la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents de travail (CSPAAT) de l'Ontario et que les services de santé et de soins de longue durée représentent 58 % de ces demandes, alors que les travailleurs de l'agriculture, de la transformation alimentaire, de l'industrie manufacturière et du commerce au détail en représentent 25 %. [1] Selon les données de Santé publique Ontario, près de 1 900 éclosions se sont déclarées dans les endroits de travail en Ontario de mars 2020 au 5 mars 2021. Selon des représentants syndicaux, ces chiffres liés aux demandes et aux rapports sur des incidents d'exposition à la COVID sont très inférieurs aux chiffres réels.

http://www.cpcml.ca/francais/Images2019/Slogans/NotreDignite-ServicesPubliquesCr.jpgDavid Chezzi, un représentant national du Syndicat canadien de la Fonction publique (SCFP) et président des Cliniques de santé des travailleurs(ses) de l'Ontario Inc., est cité dans l'article du Globe and Mail : « ...Considérant que les endroits de travail ont représenté jusqu'à un tiers de toutes les éclosions pendant la deuxième vague en Ontario, le nombre de demandes et de rapports soulignant une exposition à la COVID soumis à la CSPAAT devrait être beaucoup plus élevé. » Par exemple, il y a eu plus de 900 cas dans les entrepôts d'Amazon mais pas un seul rapport d'incident d'exposition n'a été déposé à la CSPAAT pour Amazon. Selon le Globe and Mail jusqu'au 12 avril, selon les données de la CSPAAT, il y a eu moins de cinq demandes acceptées et moins de cinq demandes rejetées pour les travailleurs d'Amazon. Aucune sanction n'a été imposée à Amazon ni à d'autres employeurs qui n'ont pas respecté leurs obligations juridiques de veiller à ce que les rapports de demandes et d'incidents d'exposition soient notés.

Selon David Chezzi, « des dizaines et même des centaines de milliers de travailleurs auraient dû remplir un formulaire d'incident d'exposition. Pourquoi ? Parce qu'il s'agit d'une exposition potentielle. Il y a des centaines d'employés dans un établissement donné. Les taux d'exposition devraient être extrêmement élevés, puisque quiconque se rend à un travail où il y a la COVID a été exposé. Si un étudiant ou un collègue de travail va à l'école avec la COVID, les enseignants sont exposés. Maintenant, multipliez cela par le nombre d'écoles dans toute la province. Pensez à tous les paramédics, au personnel infirmier en première ligne, aux gardiens, aux commis d'épicerie et à ceux qui travaillent dans des environnements non syndiqués ».

La Colombie-Britannique est la seule province à avoir adopté des mesures législatives offrant une couverture basée sur la présomption pour la COVID-19, ce qui veut dire que les travailleurs ayant contracté la COVID-19  sont présumés l'avoir contractée au travail s'ils travaillent dans une industrie essentielle ou dans un environnement où ils sont à risque. Dans d'autres provinces, les travailleurs peuvent avoir à prouver qu'ils ont été infectés au travail. Même avec cette mesure législative, Worksafe (la Commission des accidentés du travail) de la Colombie-Britannique rapporte que des demandes sont refusées lorsqu'une personne a été exposée ou a dû se confiner mais a ultimement eu un test négatif, et le taux de refus est de près de 30 %.

Pour apprécier la nature antisociale des soi-disant régimes d'indemnisation, il suffit d'observer comment, sur une base quotidienne, on néglige les mesures de sécurité pour ne pas nuire aux taux de production. Dans le contexte de la COVID-19, des centaines de milliers de travailleurs travaillent dans des situations potentiellement mortelles et les employeurs jouent « à la roulette » avec leur vie. On dit aux travailleurs de demander une prestation fédérale d'urgence alors qu'ils devraient être couverts par une indemnisation qui devrait dans la plupart des cas empêcher qu'ils subissent une interruption de salaire. C'est une manoeuvre à double tranchant pour payer les riches par le biais de subsides aux travailleurs provenant du gouvernement plutôt que des employeurs. Les gouvernements fédéral et provincial sont des complices à part entière dans ces manigances.

Une société moderne centrée sur l'être humain doit reconnaître que tous les travailleurs ont le droit à un moyen de subsistance. Dans des situations d'urgence telles que la pandémie, il faut que le revenu des travailleurs soit garanti lorsqu'ils sont malades ou forcés de se confiner ou que leur endroit de travail est obligé de fermer ses portes. Personne ne devrait être obligé de se débrouiller seul.

Note

1. Les statistiques de réclamations liées à la COVID-19 de la CSPAAT jusqu'au 16 avril 2021 montrent que 21 133 demandes ont été acceptées (y compris 46 décès jusqu'au 31 mars 2021), 2 007 demandes ont été refusées, 259 demandes sont en attente d'une décision et 6 700 rapports d'incidents d'exposition à la COVID ont été reçus.

(Photos: FO,, FTQ, ONIWG)

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L'indemnisation des travailleurs est un droit!

Christine Nugent est la porte-parole du Groupe des travailleurs accidentés du district de Barrie

Le Réseau ontarien des groupes de travailleurs accidentés (ONIWG) a initié des campagnes basées sur de nombreuses discussions entre les travailleurs accidentés et leurs familles sur la façon de lutter contre les attaques contre leurs droits en Ontario. La campagne « L'indemnisation des travailleurs est un droit ! » a été lancée il y a plus de trois ans et traite de certaines questions qui sont vraiment pertinentes aujourd'hui durant la pandémie. Une d'entre elles est le problème de ce qu'on appelle le « deeming » [la pratique consistant à déclarer que le travailleur accidenté occupe un emploi même si ce n'est pas le cas- Note de FO]. Cette pratique prive de leurs prestations les travailleurs accidentés et leurs familles parce que la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail (CSPAAT), qui a pour mandat de fournir une assurance sans égard à la faute aussi longtemps que les séquelles d'une blessure durent, ne respecte pas ce mandat. La Commission met fin aux indemnisations des travailleurs, déclare qu'ils peuvent retourner au travail même lorsque leur médecin traitant affirme qu'ils ne sont pas aptes au travail. Elle utilise son propre service médical pour faire cela. Nous les appelons des « médecins sur papier ». Récemment, un député néodémocrate a présenté un projet de loi d'initiative parlementaire pour mettre fin à cette pratique. Il nous a fallu beaucoup de temps pour en arriver là. Les travailleurs accidentés de l'Ontario ont fait part de leurs préoccupations au Comité sur les droits des personnes handicapées des Nations unies, leur faisant valoir que la pratique du « deeming » constitue une violation des droits des travailleurs.

Dès que la pandémie a commencé, de nombreux travailleurs ont perdu leur emploi. Même dans ces conditions, cette pratique de « deeming » n'a pas changé. Les travailleurs accidentés se faisaient encore dire qu'ils devaient retourner au travail, même sur leur propre lieu de travail qui aurait pu être contaminé, fermé ou dangereux. Dans de nombreux cas, il n'y avait pas de travail là-bas pour un travailleur accidenté, alors la pratique du « deeming » l'a jeté dans la pauvreté, a entraîné des coupures des prestations et l'a obligé à s'inscrire à des programmes sociaux comme Ontario au travail et le Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées.

Ce qui est vraiment important maintenant, c'est la question de la reconnaissance de la maladie. Dans le cadre de la pandémie, si un travailleur contracte la COVID-19 ou si un membre de sa famille se fait transmettre la COVID-19 par un travailleur, il faut présumer qu'il s'agit d'une maladie professionnelle et elle doit être reconnue comme telle. Les pompiers se sont battus pendant des années sur la question du cancer. Désormais, il est considéré comme une maladie professionnelle. Personne, en particulier les travailleurs essentiels, ne devrait avoir à prouver qu'il a eu la COVID-19 à sa place de travail, mais c'est ce qui se produit. Les réclamations sont traitées au cas par cas et il y en a des milliers. Et on parle ici des travailleurs qui savent qu'ils peuvent et doivent déposer une réclamation. Des milliers de travailleurs qui devraient faire des réclamations ne le font pas. Les employeurs ont la responsabilité juridique de signaler et d'informer les travailleurs de leurs droits. La pratique des employeurs par le passé qui consistait à supprimer les réclamations pour éviter des augmentations de cotisations demeure en vigueur pendant la pandémie.

À cause de cette suppression et parce que nous n'avons pas de main-d'oeuvre éduquée sur ces questions, surtout avec 70 % des travailleurs qui sont non syndiqués, des milliers de travailleurs sont laissés à eux-mêmes. Même dans les endroits de travail syndiqués, il y a parfois confusion sur le moment où un lieu de travail a déclaré une éclosion parce que l'information est supprimée par les employeurs qui ne veulent pas être obligés de fermer leurs opérations. Lorsque les décisions sont entre les mains des employeurs et du gouvernement, les travailleurs ne sont pas capables de trouver leurs repères.

À l'heure actuelle, à l'Assemblée législative de l'Ontario, en plus du projet de loi d'initiative parlementaire pour mettre fin au « deeming », il y en a deux autres, un pour garantir que les travailleurs essentiels ont accès à une couverture par présomption pour les prestations de santé mentale de la CSPAAT et un autre pour la couverture de la CSPAAT pour les travailleurs des établissements en soins ou des foyers de groupe, dont bon nombre ne sont pas couverts par la CSPAAT. Environ 30 % des employeurs sont exemptés de la CSPAAT en Ontario.

Depuis son élection, les actions du gouvernement Ford visent à faire en sorte que l'Ontario soit « ouverte aux affaires ». L'une des premières choses qu'il a faite a été de réduire les cotisations les employeurs. Puis, l'année suivante, il les a de nouveau abaissées. On parle de milliards de dollars qui retournent dans les poches des entreprises. La Loi 238, la Loi modifiant la Loi de 2021 sur la sécurité professionnelle et l'assurance contre les accidents du travail, a été adoptée la semaine dernière. Elle assure les profits des entreprises de l'Ontario, en limitant encore une fois les augmentations des cotisations. Alors, comment cela affecte-t-il les travailleurs accidentés ou les travailleurs qui sont tombés malades à cause de la COVID-19 ? Vous ne pouvez pas continuellement distribuer des cadeaux aux employeurs et avoir un système qui répondra aux besoins des travailleurs accidentés et de leur famille, ce qui est le but de l'indemnisation depuis cent ans. Vous ne pouvez pas poursuivre votre employeur. C'est une assurance sans égard à la faute garantie aussi longtemps que la blessure dure et c'est cette partie qui a disparu avec le « deeming ».

Je vous donne un exemple. Nous avons eu une grande épidémie de l'un des nouveaux variants de la COVID-19 dans un foyer de soins à Barrie avec de nombreux décès. Plusieurs travailleurs qui étaient en poste depuis longtemps ne vont pas bien. S'ils sont déclarés négatifs, la CSPAAT les renvoie au travail, même si leur médecin déclare qu'ils ne sont pas aptes à travailler. Leurs prestations sont réduites. Sur l'enjeu de la présomption, il y a eu une grande bataille en Ontario, pour les mineurs rendus malades par la poudre McIntyre, pour les travailleurs de GE à Peterborough, les travailleurs du caoutchouc et d'autres. Nous disons que dans ces cas et dans le cas de la pandémie, chaque travailleur qui tombe malade devrait être indemnisé.

Je dois également mentionner le principe de précaution. Un de nos membres est une infirmière atteinte du SRAS. Elle a eu un accident en 2003 et depuis lors elle est malade et indemnisée. Elle veut que tout le monde sache que l'une des recommandations les plus fortes du rapport sur le SRAS était que le principe de précaution devrait être suivi. Donc, par exemple, s'il y a une possibilité que la maladie soit transmise par aérosol, alors il faut protéger les travailleurs en conséquence avec des masques N95. Depuis le début de la pandémie, le principe de précaution n'a pas été suivi.

(Photos : FO, Injured Workers Online)

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Déclaration du Syndicat des employés du gouvernement et des employés généraux
de la Nouvelle-Écosse

Forum ouvrier a reçu la déclaration suivante de Sandra Mullen, en son nom et au nom du président du NSGEU Jason Maclean.

À la veille de la Journée de commémoration, nous sommes et continuons d'être engagés dans une lutte à finir pour la sécurité de nos plus de 30 000 membres ici dans la province de la Nouvelle-Écosse. Alors que nous réfléchissons sur ce qui s'est passé depuis un an et sur la situation à laquelle nous faisons face afin de nous remettre de cette pandémie, voici notre mission :

Pour répondre aux préoccupations de sécurité de tous les travailleurs en première ligne, nous devons d'abord nous assurer que tous les endroits de travail ont des comités mixtes de santé et sécurité qui sont forts et fonctionnels, tel que le prescrit la Loi sur la santé et la sécurité du travail de la province. Ces comités doivent se rencontrer régulièrement pour faire en sorte que le personnel et les gestionnaires sont conscients des dangers potentiels et des questions liées à la santé dans les endroits de travail, pour qu'ils puissent travailler de façon proactive afin que tous les endroits de travail soient dotés des politiques, des procédures et des équipements adéquats, y compris l'équipement de protection individuelle.

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