L'indemnisation des travailleurs est un droit!

Christine Nugent est la porte-parole du Groupe des travailleurs accidentés du district de Barrie

Le Réseau ontarien des groupes de travailleurs accidentés (ONIWG) a initié des campagnes basées sur de nombreuses discussions entre les travailleurs accidentés et leurs familles sur la façon de lutter contre les attaques contre leurs droits en Ontario. La campagne « L'indemnisation des travailleurs est un droit ! » a été lancée il y a plus de trois ans et traite de certaines questions qui sont vraiment pertinentes aujourd'hui durant la pandémie. Une d'entre elles est le problème de ce qu'on appelle le « deeming » [la pratique consistant à déclarer que le travailleur accidenté occupe un emploi même si ce n'est pas le cas- Note de FO]. Cette pratique prive de leurs prestations les travailleurs accidentés et leurs familles parce que la Commission de la sécurité professionnelle et de l'assurance contre les accidents du travail (CSPAAT), qui a pour mandat de fournir une assurance sans égard à la faute aussi longtemps que les séquelles d'une blessure durent, ne respecte pas ce mandat. La Commission met fin aux indemnisations des travailleurs, déclare qu'ils peuvent retourner au travail même lorsque leur médecin traitant affirme qu'ils ne sont pas aptes au travail. Elle utilise son propre service médical pour faire cela. Nous les appelons des « médecins sur papier ». Récemment, un député néodémocrate a présenté un projet de loi d'initiative parlementaire pour mettre fin à cette pratique. Il nous a fallu beaucoup de temps pour en arriver là. Les travailleurs accidentés de l'Ontario ont fait part de leurs préoccupations au Comité sur les droits des personnes handicapées des Nations unies, leur faisant valoir que la pratique du « deeming » constitue une violation des droits des travailleurs.

Dès que la pandémie a commencé, de nombreux travailleurs ont perdu leur emploi. Même dans ces conditions, cette pratique de « deeming » n'a pas changé. Les travailleurs accidentés se faisaient encore dire qu'ils devaient retourner au travail, même sur leur propre lieu de travail qui aurait pu être contaminé, fermé ou dangereux. Dans de nombreux cas, il n'y avait pas de travail là-bas pour un travailleur accidenté, alors la pratique du « deeming » l'a jeté dans la pauvreté, a entraîné des coupures des prestations et l'a obligé à s'inscrire à des programmes sociaux comme Ontario au travail et le Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées.

Ce qui est vraiment important maintenant, c'est la question de la reconnaissance de la maladie. Dans le cadre de la pandémie, si un travailleur contracte la COVID-19 ou si un membre de sa famille se fait transmettre la COVID-19 par un travailleur, il faut présumer qu'il s'agit d'une maladie professionnelle et elle doit être reconnue comme telle. Les pompiers se sont battus pendant des années sur la question du cancer. Désormais, il est considéré comme une maladie professionnelle. Personne, en particulier les travailleurs essentiels, ne devrait avoir à prouver qu'il a eu la COVID-19 à sa place de travail, mais c'est ce qui se produit. Les réclamations sont traitées au cas par cas et il y en a des milliers. Et on parle ici des travailleurs qui savent qu'ils peuvent et doivent déposer une réclamation. Des milliers de travailleurs qui devraient faire des réclamations ne le font pas. Les employeurs ont la responsabilité juridique de signaler et d'informer les travailleurs de leurs droits. La pratique des employeurs par le passé qui consistait à supprimer les réclamations pour éviter des augmentations de cotisations demeure en vigueur pendant la pandémie.

À cause de cette suppression et parce que nous n'avons pas de main-d'oeuvre éduquée sur ces questions, surtout avec 70 % des travailleurs qui sont non syndiqués, des milliers de travailleurs sont laissés à eux-mêmes. Même dans les endroits de travail syndiqués, il y a parfois confusion sur le moment où un lieu de travail a déclaré une éclosion parce que l'information est supprimée par les employeurs qui ne veulent pas être obligés de fermer leurs opérations. Lorsque les décisions sont entre les mains des employeurs et du gouvernement, les travailleurs ne sont pas capables de trouver leurs repères.

À l'heure actuelle, à l'Assemblée législative de l'Ontario, en plus du projet de loi d'initiative parlementaire pour mettre fin au « deeming », il y en a deux autres, un pour garantir que les travailleurs essentiels ont accès à une couverture par présomption pour les prestations de santé mentale de la CSPAAT et un autre pour la couverture de la CSPAAT pour les travailleurs des établissements en soins ou des foyers de groupe, dont bon nombre ne sont pas couverts par la CSPAAT. Environ 30 % des employeurs sont exemptés de la CSPAAT en Ontario.

Depuis son élection, les actions du gouvernement Ford visent à faire en sorte que l'Ontario soit « ouverte aux affaires ». L'une des premières choses qu'il a faite a été de réduire les cotisations les employeurs. Puis, l'année suivante, il les a de nouveau abaissées. On parle de milliards de dollars qui retournent dans les poches des entreprises. La Loi 238, la Loi modifiant la Loi de 2021 sur la sécurité professionnelle et l'assurance contre les accidents du travail, a été adoptée la semaine dernière. Elle assure les profits des entreprises de l'Ontario, en limitant encore une fois les augmentations des cotisations. Alors, comment cela affecte-t-il les travailleurs accidentés ou les travailleurs qui sont tombés malades à cause de la COVID-19 ? Vous ne pouvez pas continuellement distribuer des cadeaux aux employeurs et avoir un système qui répondra aux besoins des travailleurs accidentés et de leur famille, ce qui est le but de l'indemnisation depuis cent ans. Vous ne pouvez pas poursuivre votre employeur. C'est une assurance sans égard à la faute garantie aussi longtemps que la blessure dure et c'est cette partie qui a disparu avec le « deeming ».

Je vous donne un exemple. Nous avons eu une grande épidémie de l'un des nouveaux variants de la COVID-19 dans un foyer de soins à Barrie avec de nombreux décès. Plusieurs travailleurs qui étaient en poste depuis longtemps ne vont pas bien. S'ils sont déclarés négatifs, la CSPAAT les renvoie au travail, même si leur médecin déclare qu'ils ne sont pas aptes à travailler. Leurs prestations sont réduites. Sur l'enjeu de la présomption, il y a eu une grande bataille en Ontario, pour les mineurs rendus malades par la poudre McIntyre, pour les travailleurs de GE à Peterborough, les travailleurs du caoutchouc et d'autres. Nous disons que dans ces cas et dans le cas de la pandémie, chaque travailleur qui tombe malade devrait être indemnisé.

Je dois également mentionner le principe de précaution. Un de nos membres est une infirmière atteinte du SRAS. Elle a eu un accident en 2003 et depuis lors elle est malade et indemnisée. Elle veut que tout le monde sache que l'une des recommandations les plus fortes du rapport sur le SRAS était que le principe de précaution devrait être suivi. Donc, par exemple, s'il y a une possibilité que la maladie soit transmise par aérosol, alors il faut protéger les travailleurs en conséquence avec des masques N95. Depuis le début de la pandémie, le principe de précaution n'a pas été suivi.

(Photos : FO, Injured Workers Online)


Cet article est paru dans

Numéro 35 - 28 avril 2021

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