Forum ouvrier

Numéro 105 - 10 novembre 2021

Arrêté d'urgence au Nouveau-Brunswick pour forcer les travailleurs de la santé en grève à reprendre le travail

Utilisation irresponsable de la pandémie pour imposer un ordre du jour
antiouvrier et antisocial

Nouvelle-Écosse
Des mesures sont réclamées pour attirer et retenir les travailleurs
en soins continus

Les mineurs de la mine de sel de Pugwash en grève


Arrêté d'urgence au Nouveau-Brunswick pour forcer les travailleurs de la santé en grève à reprendre le travail

Utilisation irresponsable de la pandémie pour imposer un ordre du jour antiouvrier et antisocial


Conférence de presse du SCFP devant l'Assemblée législative du Nouveau-Brunswick pour demander que le gouvernement négocie une juste solution au conflit, le 5 novembre 2021

Le 5 novembre, le ministre de la Justice et de la Sécurité publique du gouvernement du Nouveau-Brunswick a décrété un arrêté obligatoire pour forcer les travailleurs de la santé en grève à reprendre le travail. Les travailleurs font partie des 22 000 travailleurs de dix sections locales du Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP) en grève pour des salaires qu'ils jugent acceptables et essentiels à la crise d'attraction et de rétention dans les services publics de la province. Le 31 octobre, le gouvernement Higgs avait déjà mis en lockout les quelque 3 000 travailleurs de l'éducation du SCFP qui participent à la grève, fermant les écoles et imposant l'apprentissage en ligne au détriment des intérêts et de la volonté des familles et des jeunes.

Il est frappant que les travailleurs de la santé sont forcés de reprendre le travail et que leur grève est déclarée illégale par un arrêté signé par le ministre responsable de la sécurité publique. La juste lutte des travailleurs, qui ont tout fait pour éviter d'avoir à déclencher la grève pour obtenir un règlement négocié qu'ils jugent acceptable, est considérée comme une menace à la sécurité publique. L'arrêté obligatoire va si loin qu'il prévoit même que si les travailleurs ne reprennent pas le travail tel qu'ordonné, les employeurs sont autorisés à les congédier et à les remplacer par des employés non syndiqués ou même à offrir leurs emplois en sous-traitance. Le diktat antiouvrier et anti-services publics de l'exécutif gouvernemental est déclaré nécessaire à la sécurité publique, mais il est difficile d'imaginer quelque chose de moins sécuritaire que de se débarrasser de travailleurs expérimentés et organisés pour les remplacer par on ne sait qui, probablement des agences privées. C'est une question de grande préoccupation pour les travailleurs du Nouveau-Brunswick et de tout le pays et il devient d'autant plus urgent de s'opposer à l'ordre du jour rétrograde et dangereux du gouvernement du Nouveau-Brunswick.

L'arrêté ministériel qui force le retour au travail des travailleurs de la santé a été adopté à la suite du refus du gouvernement Higgs de considérer la dernière offre soumise par le syndicat. Dans la soirée du 4 novembre, le premier ministre Blaine Higgs, accompagné d'une petite délégation, a rencontré quelques membres de l'équipe de négociation centralisée du syndicat. Il a présenté une offre que la délégation a par la suite présentée à l'ensemble de l'équipe centralisée de négociation. L'équipe a soumis une contre-offre à laquelle le gouvernement n'a jamais répondu. C'est la troisième fois que le gouvernement Higgs se retire des négociations en quelques mois, cette fois-ci pour adopter un arrêté ministériel pour briser la grève des employés de la santé.

Le syndicat a indiqué que les deux parties étaient très près d'une entente. La négociation centralisée devait porter sur les salaires uniquement, et la différence était de 0,50 $ pour un contrat de cinq ans. Mais le gouvernement a délibérément saboté toute possibilité d'entente, comme il l'a fait depuis le début, en maintenant ses demandes de concessions sur les régimes de retraite de deux des 10 sections locales, pour transformer leur régime à prestations déterminées en un régime inférieur à risques dits partagés auquel les travailleurs s'opposent. Dans un tel régime, les travailleurs peuvent subir des réductions de prestations si le régime est déclaré sous-financé. En plus du fait que les pensions ne devaient pas faire partie de la négociation centralisée, le syndicat rapporte que le gouvernement a essayé d'imposer sa concession en plaidant que le régime de retraite actuel de ces travailleurs était sous-financé. C'est exact qu'il est sous-financé, mais seulement parce que le gouvernement n'a pas mis l'argent qu'il devait mettre légalement depuis des années dans le régime.[1]

L'arrêté ministériel d'urgence a été adopté en vertu de la Déclaration d'urgence sanitaire adoptée par le gouvernement Higgs le 24 septembre dernier en réponse à l'aggravation de la pandémie de COVID-19 dans la province. L'arrêté décrète que tous les travailleurs de la santé en grève du SCFP sont maintenant considérés comme occupant des positions désignées comme essentielles et doivent reprendre le travail à partir de minuit le 6 novembre. Il décrète que toute personne qui n'obéira pas au décret se verra imposer une amende d'un minimum de 480 $ et d'un maximum de 20 400 $ pour chaque journée et partie de journée, et il en sera de même pour toute personne qui conseillera à une personne de ne pas retourner au travail. L'organisation dont le travailleur fait partie devra payer une amende minimum de 100 000 $ pour chaque journée ou partie de journée de l'infraction au décret et l'arrêté décrète qu'il n'y a pas d'amende maximum.

Le syndicat a fermement dénoncé l'arrêté ministériel comme une attaque à son droit de négocier des conditions qu'il juge acceptables. Le syndicat a aussi été informé par ses membres que bien que le décret vise tous les employés de la santé en grève, de nombreux travailleurs ont été refusés lorsqu'ils se sont présentés au travail.

« Nos membres étaient bouleversés, mais prêts à retourner au travail ce matin », a déclaré Brent Wiggins, président de la section locale 1190 du SCFP et membre de l'équipe de négociation centralisée, dans un communiqué du syndicat. Maintenant, on leur dit que leurs services ne sont pas nécessaires. Utiliser des tactiques oppressives pour attaquer les droits des membres au lieu de signer une convention collective est insensé. »

« Monsieur Higgs, vous ne briserez pas notre solidarité. Nous ne serons pas divisés », a dit dans le même communiqué Norma Robinson, présidente de la section locale 1252 du SCFP et membre de l'équipe de négociation centralisée.

Le syndicat a annoncé qu'il intentera des actions en justice pour défendre ses membres.

Forum ouvrier se joint à tous les travailleurs et résidents du Nouveau-Brunswick pour dénoncer un tel abus de pouvoir de la part du gouvernement. Le fait d'utiliser une crise comme la pandémie comme occasion de poursuivre un sale ordre du jour contre ceux et celles qui défendent et protègent la population met en danger toute la population du Nouveau-Brunswick. En blâmant les travailleurs pour les impacts de la grève sur les services, le gouvernement masque sa responsabilité pour les décennies d'attaques des gouvernements successifs contre les programmes sociaux et les services publics qui ont saccagé la capacité de la société à faire face à une crise comme la COVID-19. Ce sont les travailleurs qui ont tenu et tiennent encore le système à bout de bras au péril de leur santé, de leur sécurité et de leur vie.

Exigeons tous la fin de cet ordre du jour antiouvrier et antisocial en défendant les droits et la dignité des travailleurs et en plaçant leurs revendications au centre de la solution des problèmes auxquels les services publics et la société sont confrontés.

Note

1. Le premier ministre Blaine Higgs est bien connu pour avoir imposé aux travailleurs de la raffinerie Irving un régime de retraite « à  risques partagés » lorsqu'il faisait partie de la direction de la compagnie. Il était ministre des Finances du gouvernement conservateur lorsque celui-ci a adopté une loi en 2013 imposant la transformation des régimes de retraite à prestations déterminées des travailleurs du secteur public en régimes à risques partagés. Plusieurs syndicats sont toujours engagés dans des poursuites en cour contre cette attaque à leur régime de retraite.

(Photos : SCFP NB)

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Nouvelle-Écosse

Des mesures sont réclamées pour attirer et retenir
les travailleurs en soins continus

Les travailleurs et leurs organisations en Nouvelle-Écosse réclament que des mesures spécifiques soient prises pour attirer et retenir les travailleurs en soins continus. Bien qu'il reconnaisse que le gouvernement provincial compte embaucher des recruteurs afin d'embaucher plus de travailleurs en soins de santé, le Syndicat des employés du gouvernement et des employés généraux de la Nouvelle-Écosse (NSGEU) écrit dans un communiqué de presse du 1er novembre que le plan ne garantit pas un financement et un personnel suffisants pour ce secteur dans le cadre d'une amélioration du système de santé dans son ensemble. Les travailleurs des soins continus s'occupent des gens en dehors des hôpitaux, dans leur maison et dans les centres de soins de longue durée.

« En ce moment, nos dirigeants élus doivent faire un pas de géant pour appuyer les travailleurs en soins continus », a dit le président du NSGEU, Jason MacLean. « Vous pouvez embaucher tous les recruteurs que vous voulez, mais si les salaires et les avantages sociaux ne sont pas compétitifs par rapport à ce qui est offert dans d'autres secteurs, les travailleurs ne choisiront pas de faire partie du secteur en soins continus de la Nouvelle-Écosse. »

Selon le NSGEU, les deux premiers gestes que le gouvernement doit poser sont de mettre en oeuvre le minimum recommandé de 4,1 heures de soins par jour pour chaque résident des centres de soins de longue durée, une norme préconisée par de nombreuses organisations de soins de santé, et établir des quarts de travail normaux pour alléger le stress qui pèse sur les travailleurs des soins à domicile.

Dans le communiqué de presse, on souligne que dans le secteur des soins à domicile, en l'absence d'horaires de travail normaux, les travailleurs peuvent devoir être disponibles de 12 à 14 heures par jour mais n'être payés que pour quelques heures. Dans certaines agences, lorsqu'une visite chez un client est annulée, l'employé doit être prêt à accepter les visites qui se présentent sur une période de 7 à 14 jours pour qu'il soit payé. Les horaires peuvent changer sans avertissement, ce qui force les familles à s'organiser à la hâte pour faire garder leurs enfants, force les employés à rater des rendez-vous qui avaient été préalablement fixés et empêche les employés de respecter leurs engagements envers leurs familles et leurs communautés.

La mise en oeuvre d'horaires à caractère standard serait un pas important pour enlever l'immense stress auquel font face les travailleurs en soins à domicile, apporterait une stabilité à leurs horaires de travail et améliorerait l'attraction et à la rétention dans le secteur. Le NSGEU souligne aussi qu'un aspect important de la rétention et du recrutement des travailleurs en soins continus dans le secteur des soins à domicile est que les agences soient financées adéquatement afin qu'elles puissent offrir des horaires stables et normaux aux employés du secteur.

Un problème connexe, selon le NSGEU, est que la capacité des agences d'offrir des garanties de revenus est entravée par leur financement insuffisant.

Le syndicat souligne que les soins aigus dans les hôpitaux, les soins de longue durée à domicile et les soins à domicile se font la concurrence pour les travailleurs parce que les niveaux de rémunération ne sont pas égaux. Il propose que le gouvernement accorde un financement qui permette des niveaux de rémunération équivalents pour tous les travailleurs en soins continus.

« Le premier ministre s'est engagé à régler les problèmes en santé, et il est crucial de rappeler que les soins de longue durée et les soins à domicile font partie du système de santé. Ils ne peuvent pas être négligés plus longtemps », a dit Jason MacLean.

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Les mineurs de la mine de sel de Pugwash en grève

Les 140 travailleurs syndiqués de la mine de sel Windsor à Pugwash en Nouvelle-Écosse, membres de la section locale 823 d'Unifor, ont déclenché la grève le 5 novembre. Leur convention collective a pris fin en octobre 2020. Le 26 août dernier, les travailleurs ont massivement rejeté l'offre de la compagnie. Les travailleurs disent que pendant les négociations, la compagnie a commencé à faire des réserves de sel à Halifax et à l'Île-du-Prince-Édouard afin de se préparer à poursuivre ses activités au cas où il y aurait une grève ou un lockout de longue durée.

Selon le syndicat, les principaux points litigieux sont les demandes de concessions liées aux heures de travail, aux clauses de mise à pied et au régime de retraite. Les travailleurs ont déjà connu deux périodes de mise à pied cette année. La première a eu lieu durant l'hiver, lorsque la compagnie a utilisé le prétexte de l'hiver clément pour mettre à pied un grand nombre de travailleurs, en disant que le besoin de sel de déglaçage des routes, une des utilisations principales du sel extrait de la mine, serait moins grand. La deuxième mise à pied a eu lieu en été, pendant une fermeture pour remplacer le chevalement de la mine. Le chevalement est l'armature située en haut de la mine qui permet de hisser la machinerie, le personnel ou les matériaux.

La mine Windsor a été achetée récemment par Stone Canyon Industries Holding, basé aux États-Unis, qui a acquis cette mine à Pugwash dans le cadre de son acquisition des actifs nord-américains de la division du sel du propriétaire précédent, K+S Aktiengesellschaft AG basé en Allemagne. Les dirigeants syndicaux de la mine Pugwash ont rapporté qu'ils ont communiqué avec les représentants syndicaux d'autres installations nord-américaines de l'entreprise qui les ont informés que la compagnie a fait des demandes de concessions similaires aux travailleurs de ces usines.

Avec cette nouvelle acquisition, l'entreprise de sel de Stone Canyon, SCI Salt, est considérée comme un des plus importants producteurs de sel au monde. Sur son site web, la compagnie informe que SCI Salt est le producteur et fournisseur d'une variété d'industries, y compris le déglaçage et l'entretien d'hiver des routes, les aliments, la nourriture pour animaux, les produits pharmaceutiques, l'adoucissement de l'eau et les fournitures de piscine, entre autres. Elle a une capacité annuelle de production de plus de 29 millions de tonnes dans 24 sites de production de sel, desservant 15 usines de transformation et 130 lieux d'entreposage partout en Amérique du Nord, en Amérique du Sud et dans les Caraïbes.

(Photos : Unifor)

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