Numéro 100 - 27 octobre 2021
Oui à la base manufacturière! Non à la destruction nationale!
Opposons-nous aux stratagèmes pour payer les riches !
Opposons-nous aux stratagèmes pour payer les riches!
• Essar Steel Algoma complète sa fusion avec Legato
- K.C. Adams
• Le versement de fonds à Algoma est de l'arrogance politique pleine de mépris pour les travailleurs et les communautés
- Pierre Chénier
• La corruption criminelle aux plus hauts niveaux
• Ce que les travailleurs ont à dire
Opposons-nous aux stratagèmes pour payer les riches!
- K.C. Adams -
Essar Steel Algoma Inc dont les installations sidérurgiques sont
situées à Sault Ste. Marie, en Ontario, emploie 2 700
travailleurs qui produisent annuellement 2,8 millions de tonnes de
tôles d'acier laminées à chaud et à froid. Le 19 octobre, Algoma
Inc a annoncé la réalisation d'une fusion avec le cartel international
d'investissement Legato. Cette fusion associe l'entreprise de propriété américaine
Essar Steel Algoma et la société Legato Merger Corp, basée à New York.
Il semble que le
cartel mondial Essar, basé en Inde, qui avait acheté Algoma Steel
en 2007, aurait cédé les installations sidérurgiques d'Algoma à des
investisseurs américains en 2017, bien que l'on ne sache pas
grand-chose de la transaction, celle-ci ayant été classée comme une
affaire privée conclue derrière des portes closes. La fusion actuelle
des installations sidérurgiques avec Legato donnerait aux propriétaires
américains d'Essar Steel Algoma plus de 1,1 milliard de dollars de
nouvelles actions dans Legato et un gain net de 306 millions de
dollars. Les anciennes actions de propriété privée secrètes d'Algoma
deviendront désormais des actions ouvertement négociées sur les
bourses du NASDAQ et de Toronto.
Bien que la fabrication de l'acier soit essentielle aux économies
modernes et qu'elle soit au coeur de l'industrie manufacturière, du
transport aérien, ferroviaire et routier, de la construction
résidentielle et commerciale, de l'infrastructure et de la défense, les
trois principaux producteurs d'acier au Canada sont détenus et contrôlés
à l'extérieur du
pays. Stelco à Hamilton et Algoma appartiennent à des investisseurs
mondiaux basés aux États-Unis et ArcelorMittal Dofasco à Hamilton est
détenu principalement par des propriétaires indiens et européens.
Aucune économie moderne ne peut être considérée comme autosuffisante
et maîtresse de ses affaires économiques sans un contrôle national
indépendant de son industrie sidérurgique. Cette absence est
particulièrement choquante pour le Canada, qui dispose de toutes les
matières premières, de l'énergie, de l'expertise scientifique et des
travailleurs qualifiés nécessaires à un secteur sidérurgique florissant,
capable de contribuer à l'ensemble d'une économie stable et
autosuffisante, sous le contrôle des Canadiens et qui répond à leurs
besoins.
L'absence de contrôle
canadien est particulièrement inquiétante étant
donné que le secteur sidérurgique canadien semble
très instable et subit régulièrement des crises
dans des cycles d'expansion et de contraction de
l'économie presque continus. Algoma Steel
elle-même a été placée sous la protection de la Loi
sur les arrangements avec les
créanciers des compagnies (LACC)
en 1991, 2001 et à nouveau en 2015,
et a connu de nombreux changements de
propriétaires privés. Les perturbations causées
par les faillites causent beaucoup de tension à la
main-d'oeuvre, notamment les retraités, aux
entrepreneurs et fournisseurs locaux, et aux
consommateurs de
l'industrie qui ont besoin d'un approvisionnement
stable et constant en moyens de production faits
d'acier.
L'élite dirigeante et les gouvernements du Canada n'abordent pas ce
problème du point de vue de la construction d'un secteur de l'acier
stable et autonome sous le contrôle des Canadiens pour répondre aux
besoins de l'économie canadienne d'abord et avant tout et s'engager dans
le commerce international pour un avantage réciproque. Au lieu
de cela, ils permettent aux cartels de propriété étrangère d'utiliser
les installations sidérurgiques du Canada pour leurs intérêts privés,
notamment en se plaçant sous la protection de la faillite,
en fermant des installations et en vendant des parties ou l'ensemble
lorsque cela leur convient. En plus de cela, les gouvernements canadiens
donnent à ces propriétaires privés étrangers des millions de dollars en
fonds publics et des accords favorables sur les infrastructures, comme
de bas tarifs pour l'électricité.
Les Canadiens, en particulier ceux qui travaillent dans le secteur de
l'acier, trouvent la situation inquiétante et ont besoin d'une nouvelle
direction. Les tractations mondiales avec les aciéries canadiennes et
tous ces fonds publics qui se déversent dans les poches d'oligarques
étrangers n'apportent pas de stabilité au secteur de l'acier et ne
résolvent pas le problème du contrôle par les Canadiens de leur
industrie sidérurgique, une base importante d'une économie stable, sûre
et qui subvient à ses besoins.
Note
Legato Merger Corp. est une société dite inactive (« blank check
company ») organisée dans le but d'effectuer des fusions, des échanges
de capital-actions, des acquisitions d'actifs ou tout autre regroupement
d'entreprises similaire avec une ou plusieurs entreprises ou entités.
Les actions ordinaires, les unités et les bons de souscription de Legato
se négocient sur le Nasdaq Capital Market sous les symboles « LEGO », «
LEGOU » et « LEGOW », respectivement.
- Pierre Chénier -
Le 5 juillet, François-Philippe Champagne, ministre de
l'Innovation, des Sciences et de l'Industrie du du gouvernement Trudeau
d'alors, et d'autres étaient à Sault Ste. Marie pour
annoncer que le gouvernement fédéral versait 420 millions de
dollars de fonds publics à Algoma Steel. Cette annonce faisait partie
d'une série
de séances de photos dans de nombreuses villes du pays où des fonds
publics ont été distribués par Justin Trudeau et les membres de son
cabinet. Ces cadeaux aux monopoles privés mondiaux des secteurs de
l'aérospatiale et de l'acier ont été annoncés quelques semaines
seulement avant que Trudeau déclenche les élections fédérales.
L'annonce
du 19 octobre de la fusion d'Algoma Steel avec le cartel
d'investissement international Legato fait de ce versement de 420
millions de dollars du gouvernement Trudeau au groupe de propriétaires
américains qui possède et contrôle Essar Algoma Steel une affaire
louche. Cela s'est produit au beau milieu de la manoeuvre
secrète pour réaliser la fusion avec Legato ou lui vendre le complexe
sidérurgique. Le versement comprend 200 millions de dollars du
Fonds stratégique pour l'innovation et un 200 millions additionnel
de la Banque de l'infrastructure du Canada. La manoeuvre pour payer les
riches d'une valeur totale de 420 millions dépasse le
gain net de 306 millions que le groupe de propriétaires américains
dit avoir obtenu de la fusion avec Legato.
Ces gestes d'arrogance politique de la part du parti au pouvoir au
Parlement ne visaient pas seulement à obtenir des votes. Ils visaient
aussi à dire aux travailleurs que leur sort et celui de leurs industries
dépendent de la fortune électorale des partis du cartel au Parlement,
en particulier du Parti libéral, et non de leur propre lutte pour leurs
droits
et pour la construction d'industries qui servent le bien-être de la
population.
Lors de son passage à Sault Ste. Marie, Justin Trudeau n'a pas
mentionné que les travailleurs d'Algoma ont subi trois faillites
frauduleuses en vertu de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies (LACC).
Il n'a pas non plus mentionné que l'État canadien, qu'il représente,
est l'auteur et l'exécuteur de cette
législation et de son processus qui prive les travailleurs de ce qui
leur appartient de droit. L'annonce pleine de clinquant de l'injection
de fonds publics dans Algoma Steel, sous couvert d'emplois et d'un
avenir plus propre, montre du mépris pour les préoccupations des
travailleurs, notamment l'utilisation de ces fonds par les propriétaires
d'Algoma
pour s'enrichir et se lancer dans une autre combine qui pourrait mener à
une nouvelle incursion dans la LACC.
Forum ouvrier félicite les travailleurs d'Algoma et la section
locale 2251 du Syndicat des Métallos pour avoir refusé de
participer à cette séance de photos et pour avoir maintenu leur demande
d'avoir un mot décisif sur le sort de l'usine et sur les conditions de
travail et la protection des moyens de subsistance des travailleurs
actifs
et retraités.
Leur avenir réside dans leur lutte pour les droits de tous sans laquelle ils sont à la merci des dieux de la peste.
Algoma Steel s'est placée sous la protection de la faillite
en 1991, en 2001 et à nouveau en 2015 en vertu de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies
pour soulager ses investisseurs de leurs obligations financières et
autres envers les métallos, le public et certains intérêts privés. Le
cartel
mondial basé en Inde Essar Group a pris le contrôle d'Algoma Steel
en 2007 et l'a exploité en tant que filiale portant le nom d'Algoma
Inc. Dans le cadre d'une entente entre oligarques en mai 2021, le
cartel international d'investissement Legato basé à New-York est apparu
sur la scène. L'accord entre les oligarques fusionne Algoma
et Legato et accorde à Essar plus de 1,1 milliard de dollars de
nouvelles actions dans Legato. Au beau milieu de tout cela, en juillet,
le gouvernement Trudeau a versé à Algoma 420 millions de dollars en
fonds publics.
Les fonds publics doivent servir à des fins publiques pour humaniser
l'environnement social et naturel et renforcer l'autosuffisance et la
stabilité du Canada. Les entreprises productives centrées sur l'humain
sont une façon très efficace de générer des fonds publics à des fins
publiques. Les fonds publics ne doivent jamais être offerts à des
intérêts privés pour protéger et agrandir leurs entreprises privées et
accroître leur contrôle sur l'économie canadienne.
Comme toujours, Trudeau a prononcé des paroles qui sonnent bien pour
faire oublier la corruption liée au fait qu'il profite de sa position au
gouvernement pour donner des fonds publics aux riches. Pour donner un
vernis à cette pratique corrompue, Trudeau a déclaré que l'argent versé
aux oligarques mondiaux d'Essar « créerait des emplois et
un avenir plus propre ».
Évidemment,
il est possible que l'argent donné aux riches crée des emplois. Acheter
la capacité de travailler des travailleurs et les faire travailler dans
leurs entreprises privées est une façon par laquelle les riches deviennent plus
riches, en expropriant la valeur ajoutée que les travailleurs
produisent. Et c'est là le but de l'élite dirigeante. Pour elle, les
fonds publics doivent servir à consolider le contrôle, la domination et
le privilège des riches et miner la capacité de la classe ouvrière de
défendre ses droits et d'avoir le contrôle de son travail et de sa vie.
Le contrôle mondial par les oligarques n'engendre aucune stabilité ni
aucune sécurité pour l'économie, comme les Canadiens ont pu le constater
à de maintes reprises.
Les fonds publics doivent, au contraire, être investis dans les
programmes sociaux pour répondre aux besoins et garantir les droits du
peuple, et pour créer des entreprises sociales stables centrées sur
l'humain qui mettent les travailleurs au travail pour la création de
valeur ajoutée pour le bien commun et non pour enrichir davantage
les
milliardaires. La valeur ajoutée des entreprises sociales centrées sur
l'humain peut être réinvestie dans l'économie canadienne pour la
protéger des crises économiques et ouvrir des possibilités permettant
aux Canadiens de consolider leur contrôle de l'économie et de sa
direction.
Le fait que les gouvernements paient les riches met en lumière la
nécessité d'une nouvelle direction de l'économie. L'économie socialisée
doit être contrôlée par les Canadiens, la valeur ajoutée que les
travailleurs produisent étant réinvestie dans l'économie.
Dénonçons la corruption du gouvernement Trudeau ! Arrêtez de payer les riches, augmentez les investissements dans les programmes sociaux !
Lorsque le gouvernement Trudeau a remis des fonds publics à Algoma
Steel en juillet, la section locale 2251 du Syndicat des Métallos, avec raison,
n'a pas assisté à la séance de photos. Justin Trudeau a annoncé que l'argent était destiné à aider Algoma à
faire la transition vers la fabrication d'acier par four à arc
électrique (FAE). Forum ouvrier s'est entretenu avec Mike Da Prat, le président de la section locale, pour connaître son opinion sur l'accord.
Mike Da Prat : L'accord avec le gouvernement a été
conclu sans aucune consultation avec les travailleurs. Le libellé de
notre convention collective stipule que nous sommes censés être
impliqués de manière consultative dès le début. Le gouvernement fédéral
aurait dû dire qu'il doit parler aux travailleurs parce qu'ils ont
fait face trois fois à la protection de la faillite en vertu de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies (LACC).
Ils nous le devaient. Pourquoi le gouvernement intervient-il sans
penser à exiger de l'entreprise qu'elle protège au moins les
emplois ? Certains d'entre nous, toujours présents à l'usine, ont
vécu ces trois
épisodes de la LACC.
À l'heure actuelle, Algoma Steel fait de l'argent et elle a décidé
qu'elle va de l'avant avec le financement du gouvernement. Le
gouvernement aurait dû communiquer avec nous, entendre nos
préoccupations. Ce que nous aurions pu faire, en utilisant les prêts
comme levier, c'est obtenir des garanties sur les affectations de
travail et sur la façon
dont se fera le mouvement des travailleurs une fois que les changements
vont entrer en vigueur. Cela ne s'est pas produit. Le ministre Champagne
était présent lors de l'annonce. Il n'est pas inquiet des réductions
d'emplois mais nous le sommes. Nous n'avons pas assisté à l'annonce car,
selon nous, il s'agissait d'une simple séance de photos entre
le gouvernement et l'entreprise.
Ce processus n'est pas comme un interrupteur qui s'allume et
s'éteint : nous sommes en ce moment une aciérie intégrée, on éteint
l'interrupteur et on allume le FAE. Ce n'est pas comme ça que cela
fonctionne. Il y aura une période de transition. Ils devront faire
fonctionner les deux processus simultanément pendant un certain temps.
De
nouvelles personnes vont arriver pour être formées au nouveau processus.
Les travailleurs plus âgés qui sont formés au processus actuel ne
peuvent pas être laissés sur le carreau et abandonnés lorsque le FAE va
fonctionner à plein régime. Ils auront besoin d'un emploi. Nous parlons
ici d'un grand nombre de travailleurs. Cela pourrait être un
gâchis et l'entreprise veut nous impliquer dans cette affaire afin de
pouvoir dire que nous avons participé alors qu'ils ne nous ont pas
consultés sur le projet.
Des déclarations ont été faites selon lesquelles nous devenons verts,
mais il n'y a aucune preuve de cela. Si nous voulons parler de prendre
le virage vert, quel critère utilisons-nous ? Utilisons-nous les
calculs d'émissions effectués à l'époque où Algoma était nouvelle ?
Mesurent-ils les émissions réelles qu'ils produisent maintenant,
alors que certaines pièces d'équipement ne sont pas entretenues de façon
optimale ? Nous avons du mal à maintenir l'entretien de
l'équipement environnemental maintenant. Avec la décision qui a été
prise de passer au FAE, les chances qu'ils investissent de l'argent dans
l'équipement existant pour prévenir la pollution sont nulles.
Allons-nous émettre encore plus de pollution à court terme ?
On ne nous a même pas donné la possibilité de discuter des raisons
pour lesquelles nous ne modernisons pas notre équipement existant.
Maintenant, quand ils disent que la réduction des émissions de gaz à
effet de serre qui sera créée par ce projet est égale à ce que
produisent 900 000 véhicules de passagers, je ne pense pas qu'ils
ont
réellement mesuré quoi que ce soit. Si nous parlons d'une réduction
théorique des émissions brutes d'une quantité x, est-ce vraiment le
résultat net si vous avez augmenté les émissions de diesel parce que la
ferraille pour le FAE va maintenant nous arriver par transport ? On
doit également tenir compte de cette augmentation des
émissions.
Chez Algoma, nous avons vécu trois épisodes de LACC. La direction
nous a présenté des décisions dont elle a dit qu'elles étaient des
solutions à long terme à nos problèmes. Tout ce que la direction déclare
être à notre avantage ne l'est pas. Ils font beaucoup d'argent, ils
accumulent des dettes, ils ne mettent pas l'argent manquant dans le
régime de retraite et ensuite ils ne sont plus capables de continuer.
Ils ne sont pas capables de payer ce qu'ils doivent, disent-ils. Puis,
on repart à zéro aux dépens des travailleurs et des contribuables, et
plus tard ça recommence. Ils nous disent que ce nouveau projet va être
bon pour le long terme. C'est exactement la même chose qu'ils nous ont
dit à chaque fois. Certains des travailleurs qui étaient là pendant tout
ce temps là sont encore là aujourd'hui. Pas les PDG - ils sont passés à
autre chose.
À mon avis, c'était une séance photo à des fins électorales.
L'entreprise obtient l'argent et le gouvernement obtient la séance de
photos. C'était ça l'entente.
C'est la raison pour laquelle nous n'y avons pas participé.
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