Le Marxiste-Léniniste

Numéro 49 - 9 décembre 2017

Journée internationale des droits de l'homme

La lutte pour les droits nécessite des définitions modernes

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10 décembre: Journée internationale des droits de l'homme
La lutte pour les droits nécessite des définitions modernes
Bas les pattes de Jérusalem! Appuyons tous l'affirmation des droits
du peuple palestinien!


Notre sécurité est dans la défense des droits de tous et toutes!
Le gouvernement cherche à éviter la discussion sur son projet de loi étendu touchant à la sécurité nationale
Nomination au Comité des parlementaires sur la sécurité nationale
et le renseignement

Une policière et espionne nommée à la tête du Secrétariat du Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement

À titre d'information
Extraits du débat sur la motion visant à renvoyer en comité le projet
de loi C-59, Loi concernant des questions de sécurité nationale


États-Unis
Rejetons la criminalisation de la dissidence en intensifiant la lutte pour les droits - Voice of Revolution
Les manifestants arrêtés lors de l'investiture de Trump luttent contre les accusations criminelles portées contre eux
La résistance reprend pour arrêter la construction de l'oléoduc Keystone XL
L'intimidation s'accroît au Camp White Pine alors que les protecteurs de la terre luttent contre le gazoduc Mariner East 2 - Jen Deerinwater
Un activiste du climat qui a fermé l'oléoduc de sables bitumineux du Montana est reconnu coupable de crime grave - Shut It Down-Climate Direct Action
La police de Los Angeles arrête des gens pour avoir parlé 20 secondes de plus que le temps alloué aux réunions de la ville - Emily C. Bell

Honduras
Le Canada doit cesser d'essayer d'empêcher les peuples d'autres pays de décider de leur destinée

80e anniversaire du massacre de Nankin
L'une des pages les plus sombres de l'histoire de la civilisation
humaine moderne


Supplément
10 décembre: Journée internationale des droits de l'homme

Les droits : une définition moderne - Hardial Bains


10 décembre: Journée internationale des droits de l'homme

La lutte pour les droits nécessite
des définitions modernes

La Journée des droits de l'homme est observée chaque année le 10 décembre -- c'est le jour où, en 1948, l'Assemblée générale des Nations unies a adopté la Déclaration universelle des droits de l'homme. C'est le document le plus traduit au monde ; il existe en plus de 500 langues.[1]

Aujourd'hui, ceux qui ont usurpé le pouvoir par la force foulent aux pieds les droits comme jamais auparavant. Ils le font parce qu'ils contrôlent le pouvoir et l'exercent à leur avantage. Ils utilisent aussi leur pouvoir pour priver les autres d'une conception du monde qui pourrait leur servir de guide dans leur vie. Cela comprend la définition des droits sur une base civile, une définition dans laquelle les droits sont soumis à des « limites raisonnables » et peuvent être accordés et retirés. Les droits civils sont accordés comme les privilèges étaient accordés par une puissance supérieure à l'époque médiévale. La puissance supérieure pouvait les accorder et les retirer à volonté. Cela se produit à nouveau aujourd'hui.

Pour cette raison, les travailleurs et les peuples doivent baser la lutte pour l'affirmation de leurs droits sur l'énonciation claire que les droits leur appartiennent du fait qu'ils sont des êtres humains, du fait qu'ils ont besoin de ces droits pour accomplir leur devoir envers la société et s'épanouir en tant qu'êtres humains. Une définition moderne des droits affirme que tous ont des droits du fait qu'ils sont des êtres humains. La lutte pour affirmer cette définition pour toute l'humanité est au centre de l'époque actuelle.

Dans la situation actuelle, les pouvoirs en place accordent des droits seulement dans la mesure où cela n'empiète pas sur les droits de propriété et les droits héréditaires de ceux qui possèdent et contrôlent les forces productives et l'État. La classe ouvrière peut faire valoir ses réclamations et les faire respecter seulement par des actions avec analyse soutenues et déterminées, basées sur ses efforts, sa pensée, sa théorie et ses institutions indépendants, qu'elle crée elle-même. Elle doit développer sa conception du monde et sa conception des droits dans la lutte de classe, en confrontation avec les idéaux dominants et la conception du monde de la classe impérialiste qui possède et contrôle les forces productives socialisées et l'État.

La classe ouvrière ne peut parvenir à s'affranchir et à conquérir et maintenir le contrôle des forces productives socialisées pour garantir le bien-être et les droits de tous et toutes que si elle parvient à affranchir l'humanité tout entière du privilège et de l'oppression de classe, que si elle parvient à détruire tous les vestiges des rapports fondés sur la propriété, en faveur de rapports humains entre les êtres humains et entre les êtres humains et la nature. Cette nécessité objective d'affranchir toute l'humanité pour que la classe ouvrière puisse se libérer et libérer la société des conséquences du privilège de classe fait appel à la définition moderne qui dit que tous ont des droits du fait qu'ils sont des êtres humains.

Les êtres humains ne peuvent accepter que leurs droits soient niés ou limités. C'est par leur affirmation qu'ont lieu les transformations qui humanisent l'environnement naturel et social. La bourgeoisie soutient que la sécurité exige la limitation des droits. Elle soutient que la prospérité nécessite la subordination du pouvoir décisionnel à la demande des riches de s'enrichir. C'est irrationnel, c'est par désespoir de cause. Elle essaie de contrôler ce qui lui échappe en utilisant la force, en criminalisant la conscience, la parole, l'association et la lutte des travailleurs pour ce qui leur appartient de droit en tant que producteurs et reproducteurs de la vie sociale.

À l'approche du Nouvel An, plus que jamais les travailleurs individuellement et dans leurs collectifs doivent assumer leur responsabilité sociale de bâtir le nouveau, une responsabilité envers eux-mêmes et envers les autres. Un front crucial de ce travail est de baser cette lutte sur une définition moderne des droits qui révèle clairement que la vieille définition qui défend le privilège de classe n'est d'aucune utilité pour l'humanité aujourd'hui.

Joignons nos efforts en basant la lutte pour les droits sur des définitions modernes qui reconnaissent le droit d'exister. La tâche fondamentale aujourd'hui est d'humaniser l'environnement naturel et social comme alternative à la destruction que les pouvoirs en place imposent au monde entier au nom du libre marché, d'une démocratie multipartite et des droits de la personne.

Note

 1. Pour le texte de la Déclaration universelle des droits de l'homme adoptée par l'Assemblée générale de l'ONU le 10 décembre 1948, cliquer ici.

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Bas les pattes de Jérusalem! Appuyons tous l'affirmation des droits du peuple palestinien!


Le peuple palestinien, appuyé par les peuples du monde, s'est soulevé dans une puissante tempête contre la déclaration du président des États-Unis, Donald Trump, que désormais les États-Unis considèrent Jérusalem comme la capitale d'Israël. Nous nous tenons unis avec l'héroïque peuple palestinien et sa résistance à l'occupation sioniste et aux tentatives des États-Unis de contrôler les affaires de tous les peuples ou de détruire ce qu'ils ne peuvent contrôler. Des grèves et des journées de colère ont lieu partout en Palestine où des hommes, des femmes et des jeunes affrontent courageusement les forces d'occupation israéliennes. Partout dans le monde, des manifestations de solidarité ont lieu devant les ambassades et les consulats des Etats-Unis.

Prenez-y part !

Palestine

Khan Younis, 8 décembre


Camp de réfugiés de Jabaliya, Gaza, 8 décembre


Point de contrôle de Beit El, 8 décembre


Ramallah, 7 décembre



Naplouse, 7 décembre



La mosquée Al-Aqsa, Jérusalem, 7 décembre



Gaza, 7 décembre


Hébron, 7 décembre


Gaza, 6 décembre


Grève à Jérusalem Est, 6 décembre

Turquie

Istanbul


Diryarbakir

Liban

Beyrouth


Camp de réfugiés d'Ain al-Hilweh

Jordanie

Amman

Yémen

Sanaa

Iran

Téhéran

Pakistan

Karachi


Multan


Peshawar


Islamabad


Lahore

Bangladesh

Gazipur


Dhaka


Chittagong

Malaisie

Kuala Lumpur

Indonésie

Jakarta

Canada

Montréal



Ottawa


Toronto


Windsor


London

Calgary


Vancouver


États-Unis

Los Angeles


Chicago


New York

Irlande

Derry; Dublin

Grande-Bretagne

 Manchester


Londres

Pays-Bas

Allemagne

Bremen


Berlin

Danemark

Copenhagen

Suède

Malmö

Autriche

Vienne

Tunisie

Tunis

Parlement tunisien


Somalie

(Photos: khnmedia, Xinhua, Shebab News, B. Naim, Maan News Agency, PNN, M. Salem, S. Ceylan, TeleSUR, A. Abo Yasser, N. Dal, 24.com.eg, Al Manar, Tansim News Agency, F. Razzaqi, F. Aziz, M. Khant, M. Sohtaoglu, ANSWER, Takvim, Palestine Solidarity Association at Hunter College, Palestine Action, Palestine Solidarity Campaign, Sinn Fein, S. Duffy, Hamas, S. Zouissi, R. Samir.)


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Notre sécurité est dans la défense des droits de tous et toutes!

Le gouvernement cherche à éviter
la discussion sur son projet de loi
étendu touchant à la sécurité nationale


Manifestation contre le projet de loi C-51 sur la colline du Parlement le 14 mars 2015, une des très nombreuses actions à grande mobilisation contre l'expansion des pouvoirs policiers
au nom de la sécurité.

L'effort du gouvernement Trudeau pour cacher dans quelle direction vont ses mesures pour étendre et renforcer les pouvoirs de police au nom de la sécurité nationale a quelque chose de très préoccupant.

Le 27 novembre 2017, les libéraux ont utilisé leur majorité à la Chambre des communes pour renvoyer le projet de loi C-59, Loi concernant des questions de sécurité nationale, au débat en comité avant le débat en deuxième lecture à la Chambre des communes. Le projet de loi modifie les pouvoirs mis en place pour les agences policières et d'espionnage par le gouvernement Harper et sa Loi antiterroriste de 2015 (Loi C-51) et introduit de nouvelles lois qui élargissent les pouvoirs du Centre de la sécurité des télécommunications, lui accordant notamment le pouvoir de se livrer à la guerre cybernétique. La motion renvoyant le projet de loi directement au comité a été adoptée à 164 contre 118 : les libéraux et le Parti vert ont voté pour tandis que les conservateurs, le NPD, le Bloc québécois et le Parti vert ont voté contre.

Le 20 juin, quand les libéraux ont déposé le projet de loi C-59, le PCC(M-L) a fait remarquer :

« Le gouvernement libéral prétend que sa 'modernisation' des agences d'espionnage du Canada accroît la 'transparence' et la 'reddition de comptes'. Pour duper les naïfs, il masque son objectif d'étendre les pouvoirs de police à l'extérieur et en opposition à tout État de droit, en mettant de l'avant deux demandes différentes et opposées, comme si elles étaient sur le même plan et qu'on pouvait les équilibrer, la demande des agences de l'État pour des pouvoirs plus étendus, et la demande des Canadiens pour défendre les droits.

« Ils écrivent : 'Les commissaires du CST ont, à tour de rôle, demandé au gouvernement en place de clarifier les ambiguïtés dans la loi qui régit le CST et de rendre les activités de l'organisme plus transparentes. De plus, les Canadiens ont exprimé leur désir de voir les organismes de la sécurité et du renseignement faire l'objet d'une plus grande transparence et d'obligations accrues en matière de reddition de comptes.'

« De la même manière, l'établissement de nouvelles agences de l'État en vertu des pouvoirs de prérogative du premier ministre -- un commissaire au renseignement pour autoriser différentes mesures, un 'Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement' chargé de l'objectif tant recherché de mettre fin à l'information 'en silo' entre les agences, et un 'Centre d'expertise en partage de l'information' -- est présenté comme la prise de mesures qui renforce la reddition de comptes alors qu'il représente la concentration plus poussée des pouvoirs de police au détriment de la paix, de la liberté et de la démocratie.

« Les Canadiens se sont opposés de façon non équivoque aux pouvoirs conférés par la Loi C-51 de même qu'à ceux contenus dans les lois 'antiterroristes' antérieures, lesquelles n'ont jamais défini sérieusement le terrorisme ou ce qui fait de quelqu'un un terroriste. Poussant plus loin ce qu'on trouve dans la Loi C-51, le gouvernement libéral, avec son projet de loi C-59, peut dépeindre comme terroriste quiconque s'oppose 'au système constitutionnel de gouvernement établi au Canada' ou une menace potentielle qui sera déclarée en vertu des 'objectifs stratégiques plus larges du gouvernement'. Ceux qui vont être ciblés vont être sujets aux mesures de police contenues dans les mandats des agences de sécurité nationale. Parmi ces cibles il y aura les mouvements politiques du peuple contre la guerre et les violations des droits, les gens qui s'opposent aux institutions illégitimes du système impérialiste d'États comme l'OTAN, le G7, etc. qui servent l'intérêt national selon le gouvernement, et les institutions indépendantes de la classe ouvrière organisée pour défendre ses droits aux endroits de travail et pour diriger la lutte pour le nouveau. »[1]

Les libéraux ont déposé le projet de loi et la motion le renvoyant en comité le 20 juin, soit juste avant l'ajournement du parlement pour l'été. La Chambre des communes n'a pas commencé à en débattre avant le 23 novembre, mais avec la motion de renvoi en comité, le débat en Chambre n'a porté que sur la motion comme telle. Après le vote sur la motion le 27 novembre, le projet de loi a été saisi par le Comité de la Chambre sur la sécurité publique où il a fait l'objet de trois audiences jusqu'à présent. Le NPD a accusé les libéraux de se servir de leur motion pour outrepasser une procédure parlementaire introduite par les libéraux eux-mêmes qui permet au président de la Chambre de diviser un projet de loi dit omnibus en sections. Quand ils ont fait adopter cette procédure, les libéraux disaient que cela empêcherait que des projets de loi contenant des modifications à plusieurs lois introduisent discrètement des modifications importantes aux lois du pays sans un débat adéquat, comme avait l'habitude de le faire le gouvernement Harper. Le président a été forcé de concéder que même si le projet de loi modifie plusieurs autres lois, la motion comme telle ne porte que sur son renvoi en comité.

Les libéraux ont montré leur mauvaise conscience quand ils ont déposé le projet de loi. Le ministre de la Sécurité publique, Ralph Goodale, n'a pas daigné parler de ce qu'il contenait, se contentant de répéter la fraude que c'est pour apporter « plus de transparence et de reddition de compte » aux agences d'espionnage qui utilisent déjà les pouvoirs élargis accordés par la Loi antiterroriste 2015 pour intensifier leurs opérations occultes et le terrorisme d'État contre les Canadiens et contre les peuples du monde. Il a également présenté le projet de loi comme répondant aux préoccupations des Canadiens au sujet de la Loi C-51 pour désinformer et contrer la revendication claire d'abrogation de cette loi et des pouvoirs qu'elle contient.

« Ensemble, le nouvel office de surveillance complète, le commissaire au renseignement et le nouveau comité de parlementaires offriront au Canada des mécanismes de responsabilisation d'une étendue et d'une portée sans précédent. Les Canadiens réclament de telles mesures depuis longtemps, et ces demandes se sont accrues lorsque l'ancien projet de loi C-51 a été présenté. Nous avons bien compris ces demandes lors des consultations, et ce sont ces mesures de responsabilisation que nous mettons présentement en place », a dit le ministre.

Les libéraux sont très conscients que les Canadiens, y compris bon nombre au sein de leur propre parti, détestent qu'on place les agences policières et d'espionnage en position de décider quel discours ou activité politique est légitime ou pas et qu'est-ce qui représente une menace pour le Canada. Cette opposition aux violations du droit de conscience et de la liberté d'expression a été exprimée fort et clair à la dernière élection fédérale, des gens de toutes les régions et de tous les milieux ayant exigé en grands nombres l'abrogation de la Loi antiterroriste 2015. Les libéraux ont maintenant entrepris de détruire l'opinion publique établie à ce sujet  et prétendent qu'on peut confier à ce même État, qui a pour raison d'être de maintenir le privilège de classe et déjouer tout mouvement populaire pour l'habilitation et pour une démocratie véritable, la tâche de défendre les droits démocratiques des citoyens par le renforcement des pouvoirs de police utilisés contre eux. C'est irrationnel.

Le ministre Goodale a ajouté que « la primauté de la Charte des droits et libertés constitue un principe fondamental du projet de loi C-59 ». Il fait ici référence au fait que les agents du Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS) doivent obtenir une approbation préalable pour toute mesure portant atteinte aux droits des Canadiens et Canadiennes tels qu'énoncés dans la Charte. « Nous créons actuellement une liste exhaustive de mesures que le SCRS sera autorisé à prendre pour gérer les menaces, dit-il. Si une activité limite un droit garanti par la Charte, le SCRS devra se présenter devant un juge. L'activité ne sera autorisée que si le juge est convaincu qu'elle est conforme à la Charte. »


Manifestation sur la colline du Parlement le 8 décembre 2017 pour marquer le 15e anniversaire de l'arrestation de Mohamed Harket sous certificat de sécurité la Journée internationale des droits de l'homme de 2002

On voit bien la manoeuvre pour détourner l'attention des enjeux de fond que touche ce projet de loi, car en fait la Charte des droits et libertés ne garantit pas les droits, justement. Si elle les garantissait, il n'y aurait pas de violations si répandues des droits fondamentaux des Canadiens, une situation qui ne fait qu'aller de mal en pis. On pourrait citer des milliers d'exemples de violations impunies de la loi et des droits par les agences policières et d'espionnage, de leur organisation d'actes terroristes et de groupes terroristes au nom de la défense de la sécurité nationale. La Charte dit que les droits sont soumis à des « limites raisonnables » et c'est précisément l'échappatoire qui permet toutes ces violations. Les Canadiens savent d'expérience que dans les opérations clandestines de l'État canadien, tout peut se justifier au nom de la « sécurité nationale », qui est la raison invoquée pour imposer des « limites raisonnables » aux droits. C'est contraire à la notion moderne des droits qui veut que les droits soient garantis. L'exemple cité par M. Goodale montre que, loin d'affirmer les droits, les libéraux cherchent en fin de compte à légitimer leur négation.

Les objectifs derrière la manoeuvre procédurale


Piquet contre le projet de loi C-59 à Montréal le 5 juillet 2017

Avec cette manoeuvre, les libéraux ont fait en sorte qu'il n'y aura pas de débat en deuxième lecture. Il y aura un débat sur les buts et principes. Le gouvernement prétend qu'en renvoyant le projet de loi directement en comité, cela donne plus de flexibilité pour apporter des changements tout en évitant de revoir les principes. Il dit agir par souci de « transparence » et de « reddition de compte » alors qu'en réalité il cherche à contourner les normes parlementaires et à éliminer le rôle du débat public dans l'information des élus et du public.

La première journée d'audiences du Comité a été dominée par les interventions des chefs des agences d'espionnage canadiennes et de la GRC, les mêmes qui demandent que les nouveaux pouvoirs qui leur ont été donnés soient maintenus et non entravés.[2] Le fait que ces agences, qui ont entre autres comme mandat de mener des campagnes de désinformation contre ceux qu'elles considèrent des extrémistes ou des ennemis, soient les premières à venir « informer » le Comité montre que les libéraux n'ont aucune honte à laisser la police donner le ton au discours politique.

Tous ceux qui se sont opposés à l'adoption de la Loi antiterroriste de 2015 doivent maintenant dire clairement que Non c'est Non! en ce qui concerne le projet de loi C-59. Nous appelons tous ceux qui ont élevé la voix contre le projet de loi C-51 à tout mettre en oeuvre durant la nouvelle année pour que la version libérale de cette loi de Harper fasse l'objet d'autant d'opposition et de dénonciation.

LML publiera d'autres articles d'information sur le projet de loi C-59 et en particulier les clauses qui vont au-delà de la Loi C-51, notamment celles qui accordent de nouveaux pouvoirs au Centre de la sécurité des communications pour se livrer à la guerre cybernétique contre les Canadiens et contre des pays étrangers.

Notes

1. « Opposons-nous au projet de loi d'État policier du gouvernement Trudeau ! », LML, 22 juin 201

2. Le projet de loi C-59 est présentement à l'étude du Comité permanent de la sécurité publique et nationale. Trois séances y ont été consacrées jusqu'à présent : le 30 novembre, le 5 décembre et le 7 décembre.

Témoins du 30 novembre le matin : Ralph Goodale, ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile ; Vincent Rigby, ministre adjoint ; David Vigneault, directeur du Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS) ; Kevin Brosseau, commissaire adjoint pour les politiques autochtones de la GRC ; Greta Bossenmaier, directrice du Centre de la sécurité des communications (CSC) ; Douglas Breithaupt, directeur et conseiller général en matière de droit criminel du ministère de la Justice

Témoins du 30 novembre en après-midi : Vincent Rigby, sous-ministre délégué du ministère de la Sécurité publique et de la Protection civile ; Monik Beauregard, sous-ministre adjointe principale pour le secteur de la sécurité et de la cybersécurité nationale du ministère de la Sécurité publique et de la Protection civile ; David Vigneault, directeur du SCRS ; Tricia Geddes, directrice adjointe du SCRS pour les partenariats stratégiques ; Kevin Brosseau, sous-commissaire aux services de police contractuels et autochtone de la GRC ; James Malizia, commissaire adjoint pour la sécurité nationale et la protection policière de la GRC ; Dominic Rochon, chef adjoint pour les politiques et communications (CSC) ; Greta Bossenmaier, directrice CSC ;

Témoins du 5 décembre : Alex Neve, secrétaire général d'Amnistie internationale Canada. À titre personnel : Stephanie Carvin, professeure adjointe de la Norman Paterson School of International Affairs de l'Université Carleton ; Craig Forcese, professeur de la Faculté de droit de l'Université d'Ottawa ; Wesley Wark, professeur de l'École supérieure d'affaires publiques et internationales de l'Université d'Ottawa.

Témoins du 7 décembre : Pour le Commissariat à la protection de la vie privée du Canada : Daniel Therrien, commissaire à la protection de la vie privée du Canada ; Patricia Kosseim, avocate générale principale et directrice générale, direction des services juridiques, des politiques, de la recherche et de l'analyse des technologies ; Lara Ives, directrice générale par intérim, Vérifiation et revue. Pour l'Association canadienne des libertés civiles : Brenda McPhail, directrice, Projet sur la confidentialité, la technologie et la surveillance ; Cara Zwibel, avocate générale par interim ; Lex Gill, représentante, Programme de la sécurité nationale. À titre personnel : Christian Leuprecht, professeur, Collège militaire royal du Canada, Département de Sciences politiques ; Hayley McNorton, adjointe de recherche, Collège militaire royal du Canada, Département de Sciences politiques

2. « Opposons-nous au projet de loi d'État policier du gouvernement Trudeau ! », LML, 22 juin 2017

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Nomination au Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement

Le 6 novembre, le premier ministre Trudeau a annoncé les noms des membres du nouveau Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement. Le Comité est créé en vertu de la Loi sur le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement , qui a reçu la sanction royale le 22 juin 2017. La création d'un comité de parlementaires chargés d'examiner les ministères et organismes gouvernementaux qui ont des responsabilités en matière de sécurité nationale est aussi un engagement formulé dans les lettres de mandat du leader du gouvernement à la Chambre des communes et du ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile.[1]

Lors de l'annonce, le Cabinet du premier ministre a tenté de dépeindre la mise sur pied du comité et les pouvoirs octroyés par la Loi C-51 aux agences d'espionnage et de police, que le premier ministre maintient, comme quelque chose que les Canadiens ont demandé alors que c'est tout à fait le contraire. « Les Canadiens ont clairement exprimé la nécessité pour les groupes chargés de la sécurité nationale et du renseignement de continuer d'agir de manière responsable et de respecter pleinement les droits et libertés garantis à tous les citoyens », dit le Cabinet dans son communiqué. L'utilisation de mots trompeurs tels que « continuer d'agir de manière responsable et de respecter pleinement les droits et libertés garantis à tous les citoyens » montre à quel point le gouvernement est devenu irrationnel. C'est justement l'expérience des Canadiens, et c'est aussi inscrit dans la loi, que les libertés et les droits fondamentaux ne sont pas garantis au Canada mais sont sujets à des « limites raisonnables » définis par le gouvernement et les pouvoirs de police. C'est conforme à la conception impérialiste de la démocratie et des droits humains où l'État et son pouvoir sont éternels alors que les gens vont et viennent.

Le Cabinet du premier ministre a aussi souligné en ce qui a trait au comité qu'il « sera composé de membres de la Chambre des communes et du Sénat qui représentent plusieurs partis ». Ce qu'il omet de mentionner est que cela ne les rend pas représentatifs des Canadiens. Ses membres ont d'ailleurs tous été choisis par le premier ministre en fonction d'un quelconque « examen approfondi » et de critères établis pour décider si on peut se fier à un représentant élu ou nommé qui aurait accès aux secrets odieux liés à des activités de l'État canadien au nom de la sécurité nationale.

« La création d'un comité fort, multipartite, chargé de rendre des comptes et constitué de parlementaires dévoués, nous aidera à veiller à ce que les organismes chargés de notre sécurité nationale assurent la sécurité des Canadiens, tout en protégeant nos valeurs, nos droits et nos libertés, dit Justin Trudeau. Ce groupe indépendant contribuera à renforcer la reddition des comptes en ce qui concerne nos travaux en matière de sécurité nationale et de renseignement. Dans notre système de gouvernement responsable, rien ne peut se substituer à l'examen approfondi par nos parlementaires. »

Le comité sera présidé par David McGuinty, député d'Ottawa-Sud. Il aura l'autorité d'examiner plutôt que de surveiller « les activités menées en lien avec la sécurité nationale et le renseignement à travers le gouvernement du Canada, lit-on dans le communiqué. Cela comprend les activités menées par le Service canadien du renseignement de sécurité, le Centre de la sécurité des télécommunications, la Gendarmerie royale du Canada et l'Agence des services frontaliers du Canada, entre autres. Le mandat du Comité lui permettra de procéder à un examen d'une profondeur sans précédent et contribuera à la reddition de comptes à travers le gouvernement. »

Il ajoute que « le Comité présentera au premier ministre des rapports annuels de ses examens, ainsi que ses constatations et recommandations éventuelles. Ces rapports seront déposés dans les deux chambres du Parlement et renvoyés aux comités permanents concernés. Des rapports spéciaux pourraient aussi être préparés, au besoin. » Ce qui n'est pas mentionné est que le premier ministre peut garder secrète l'information qu'il ne veut pas que le Comité révèle, au nom de la protection de la « sécurité nationale » ou des entités étrangères qui ont fourni l'information. Même le Comité sera soumis à la discrétion du premier ministre en ce qui a trait à ce qu'il peut ou ne peut pas examiner.

Le communiqué annonce aussi que le comité sera appuyé par « un secrétariat indépendant qui sera dirigé par un directeur exécutif dont la nomination aura lieu prochainement ». Depuis cette annonce, le secrétariat a été désigné et le directeur est loin d'être indépendant des agences d'espionnage et de police du Canada ; il est en fait issu directement de ces agences.

Note

1. Les noms de ceux désignés au Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement sont :

De la Chambre des communes :

Libéraux

David J. McGuinty (Ottawa South, Ontario) (président) -- Sera nommé au Conseil privé de la Reine. Avocat et médiateur et négociateur « formé » à Harvard. Ancien président-directeur de la Table ronde nationale du premier ministre sur l'environnement et l'économie sous Jean Chrétien et conseiller auprès de la Fondation Rockefeller.

Hedy Fry (Vancouver Centre, C-B) -- Conseil privé de la Reine, médecin, députée depuis 1993. A occupé des positions dans le Cabinet du premier ministre Jean Chrétien.

Brenda Shanahan (Châteauguay--Lacolle, Quebec) -- Ancienne chroniqueuse au Montreal Gazette et ancienne « banquière, travailleuse sociale et éducatrice en matière financière ».

Emmanuel Dubourg (Bourassa, Québec) -- Professeur de cégep et ancien député de l'Assemblée nationale du Québec.

Gudie Hutchings (Long Range Mountains, Terre-Neuve-et-Labrador). Chef de petite entreprise. Secrétaire parlementaire à la Petite entreprise et au Tourisme.

Conservateurs

Tony Clement (Parry Sound--Muskoka, Ontario)-- Conseil privé de la Reine, Ministre du Cabinet Harper et du Cabinet Harris en Ontario.

Gordon Brown ( Leeds--Grenville--Thousand Islands and Rideau Lakes)-- PDG de la « plus grande entreprise de restauration et d'hébergement » des Mille-Îles. Vice-président du Groupe interparlementaire Canada-États-Unis et membre de la Commission trilatérale. La Commission joue un rôle clé dans la promotion de l'intégration des États des États-Unis, du Canada et du Mexique et elle a lancé en 2005 l'idée de créer une Communauté nord-américaine avec le Conseil mexicain des affaires étrangères et le Conseil canadien des chefs d’entreprise. Brown a aussi présidé le Comité spécial établi par les libéraux pour examiner la Loi antiterroriste suite aux événements du 11 septembre 2001. 

NDP

Murray Rankin (Victoria) -- Avocat diplômé de Harvard. Il a fait sa thèse de graduation à Harvard sur la liberté d'information et les problèmes de sécurité nationale. Dans les années 1980, il a travaillé à l'Organisation de coopération et de développement économiques à Paris sur la question des flots de l'information transfrontalière. Rankin a été désigné « avocat spécial », un arrangement qui a été établi dans le cadre du régime des certificats de sécurité en vertu desquels certains avocats sont nommés par l'État pour recevoir de l'information hautement classifiée que l'État veut garder secrète. Rankin est un ancien avocat-conseil du Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité. En 1994, il a été nommé par le premier ministre Mike Harcourt négociateur en chef de traités pour la province de Colombie-Britannique.

Du Sénat 

Percy E. Downe -- Nommé sénateur de l'Î-P-E par le premier ministre Jean Chrétien en 2003. Ancien chef de cabinet du premier ministre du Canada entre mai 2001 et juin 2003.

Frances Lankin -- Nommée sénatrice de l'Ontario par le premier ministre Justin Trudeau. Députée provinciale NPD de 1990 à 2001. Membre du Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité de 2009 à 2016. Ancienne présidente-directrice de la United Way de Toronto. Lankin a été nommée co-présidente de la Commission d'examen de l'aide sociale du gouvernement ontarien de Dalton McGuinty dont le rapport a recommandé la réduction des prestations d'aide sociale par la restructuration de la façon dont les fonds étaient alloués.

Vernon White -- Nommé sénateur de l'Ontario par le premier ministre Stephen Harper en 2012. Ancien chef de police de la ville d'Ottawa et du Service de police régional de Durham. Agent de la GRC pendant 20 ans, il en était commissaire adjoint quand il l'a quittée. Détenteur d'une maîtrise en études de conflits à l'Université Royal Roads.

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Une policière et espionne nommée à la tête du Secrétariat du Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement

Le 7 décembre, le premier ministre Trudeau a annoncé la nomination d'une policière et espionne de la GRC au poste de directrice générale du Secrétariat du Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement.

Justin Trudeau a annoncé que Rennie Marcoux devenait directrice générale à compter du 11 décembre 2017. Marcoux est actuellement dirigeante principale de la planification et des politiques stratégiques, pour la Gendarmerie Royale du Canada et, selon les notes biographiques de source gouvernementale, a aussi travaillé aux niveaux supérieurs du Service canadien de renseignement de sécurité (SCRS) et au Conseil privé.[1] Elle a débuté sa carrière en tant qu'« analyste » pour le Centre de sécurité des télécommunications entre 1983 et 1988. Il faut noter que cette période coïncide avec l'attentat à la bombe d'Air India dans lequel le rôle joué par l'État canadien et les agences d'espionnage n'a pas encore été dévoilé. Pendant ce temps, l'attentat sert toujours à diviser les Canadiens sur une base raciste.[2]

Selon le projet de loi C-22 qui est à l'origine de ce comité, le rôle du Secrétariat est d'assister le comité à réaliser son mandat.

Selon le projet de loi, la directrice générale est nommée par le gouvernement en conseil et exerce sa charge à titre amovible « jusqu'à la dissolution du Parlement qui suit sa nomination ». Elle peut être nommée à nouveau à la fin d'un premier ou d'un mandat subséquent. La directrice générale est aussi responsable du Secrétariat, qu'elle contrôle et gère sur toutes questions connexes. La directrice générale peut conclure des contrats, des protocoles d'entente et d'autres arrangements y compris des contrats pour solliciter les services de conseillers juridiques ou d'autres personnes ayant la compétence professionnelle, technique ou spécialisée requise pour conseiller ou assister le comité ou l'un de ses membres.

Le fait d'avoir une telle personne comme directrice générale est conforme aux objectifs du gouvernement qui veut que le comité maintienne la confidentialité de ses travaux, y compris les informations qu'il recueillera sur les sales activités menées par les agences d'espionnage et policières contre les Canadiens et d'autres. La question n'est pas tellement Marcoux elle-même mais le fait que de plus en plus de policiers et d'espions se font nommer à des postes très puissants. Aussi le fait que ces mêmes policiers et espions proviennent d'institutions de l'État canadien qui ont été exposées à maintes reprises comme ayant joué un rôle dans des actes terroristes, y compris l'organisation de tels actes, montre-t-il le dilemme de l'élite dominante canadienne qui fait des pieds et des mains pour prêter un semblant de légitimité au terrorisme d'État et à la répression du peuple au nom duquel elle prétend gouverner.

Notes

1. Notes biographiques sur Rennie Marcoux fournies par le Bureau du premier ministre:

Études

Maîtrise ès arts, Affaires internationales, Carleton University
Baccalauréat ès sciences, Science politique, Université de Montréal

Expérience professionnelle

Depuis janvier 2013: Dirigeante principale de la planification et des politiques stratégiques, Gendarmerie royale du Canada

2006-2013: Secrétaire adjointe du Cabinet, Sécurité et renseignement, Bureau du Conseil privé

2002-2006: Directrice adjointe, Secrétariat, Service canadien du renseignement de sécurité

2001-2002: Greffière adjointe du Conseil privé, Secrétariat de la réglementation et des décrets du Conseil, Bureau du Conseil privé

1998-2000: Agente du Bureau du Conseil privé, Secrétariat de l'appareil gouvernemental, Bureau du Conseil privé

1991-1998: Agente du Bureau du Conseil privé, Secrétariat de la sécurité et du renseignement, Bureau du Conseil privé

1988 - 1990: Analyste des politiques, Centre national de coordination de la sécurité, Secrétariat du ministère du Solliciteur général

1983-1988: Analyste, Centre de la sécurité des télécommunications

2. L'attentat à la bombe du vol 182 d'Air India a eu lieu le 22 juin 1985.

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À titre d'information

Extraits du débat sur la motion visant à renvoyer
en comité le projet de loi C-59, Loi concernant
des questions de sécurité nationale

Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Ralph Goodale : « Il importe de noter que le projet de loi C-59 précise la définition d'activités 'portant atteinte à la sécurité du Canada'. Par exemple, il dispose explicitement que les activités de défense d'une cause, de protestation, de manifestation d'un désaccord ou d'expression artistique ne sont pas visées. La nouvelle mesure législative précise également la définition de 'propagande terroriste' afin qu'elle corresponde à une infraction déjà connue, c'est-à-dire conseiller la commission d'une infraction. »

Au Comité : « De la façon dont la loi est écrite en ce moment, la Loi C-51 est si large et si vague qu'elle est à toute fin pratique inutilisable et n'a d'ailleurs pas été utilisée. Le projet de loi C-59 propose une terminologie qui est claire et communément utilisée en droit canadien. Elle interdit de conseiller à une autre personne de commettre une infraction à caractère terroriste. Elle ne requiert pas qu'un conseil soit donné à un individu particulier de commettre une infraction particulière. Le simple fait d'en encourager d'autres à s'engager dans des actes non spécifiques de terrorisme va faire entrer en jeu cette section du Code criminel. »

Le secrétaire parlementaire du ministre de la Famille, des Enfants et du Développement social (Logement et Affaires urbaines), Adam Vaughan : « ...étant donné que le projet de loi a reçu l'aval de M. Forcese et de M. Roach, deux des plus éminents spécialistes qui ont critiqué le projet de loi C-51, et que Craig Forcese a dit lui-même que le projet de loi actuellement à l'étude permettrait véritablement de mettre de l'ordre dans les pouvoirs accordés au SCRS et de réparer les torts que le projet de loi C-51 a causés en ce qui concerne l'indépendance et le pouvoir d'enquête du SCRS, les néo-démocrates vont-ils, à l'instar de ces éminents spécialistes du milieu universitaire — les mêmes qu'ils ont cités en critiquant le projet de loi C-51 —, appuyer toutes les dispositions de ce projet de loi et cesser de se plaindre qu'il s'agit d'un projet de loi omnibus ? »

Le ministre de la Défense Harjit Sajjan sur les nouveaux pouvoirs en matière de cyberguerre : « Comme le CST [Centre de la sécurité des télécommunications] a une compréhension pointue du cyberespace, la ministre des Institutions démocratiques a fait appel à lui pour évaluer les cybermenaces qui pèsent sur les processus démocratiques canadiens. Elle lui a aussi demandé de fournir à tous les partis politiques de la Chambre des conseils sur les meilleures cyberpratiques.

« La confiance du public envers les processus démocratiques est essentielle au bon fonctionnement de la démocratie. Nous avons tous vu comment nos processus démocratiques sont des cibles attrayantes pour les États-nations et les acteurs non étatiques qui cherchent à influencer notre pays. [Note du LML : Cette affirmation ne tient pas la route. Même le CST, dans ses échanges avec les partis politiques, a admis qu'il n'y a pas eu d'ingérence étrangère dans les élections canadiennes en termes de cyberattaques pendant les élections ou contre le processus électoral lui-même. L'affirmation de Sajjan vise manifestement à masquer toute évaluation de ce que le CST a le pouvoir de faire et pour quels objectifs.]

« Tout au long de ses 70 années d'existence, le CST a servi son pays avec fierté en s'adaptant aux énormes changements qui touchent la technologie et la façon de l'utiliser dans le contexte de la sécurité internationale et des menaces à la sécurité. Aujourd'hui, le cyberespace fait évidemment partie des sources de menaces. Le CST s'est avéré un chef de file novateur et un partenaire digne de confiance dans la lutte contre les cybermenaces. »

[...]

« ...la Loi sur la défense nationale ne permettait pas au Centre de la sécurité des télécommunications de mettre à profit son expertise ni d'offrir directement son soutien aux Forces armées canadiennes, mais grâce à la nouvelle loi, il le pourra. En fait, les Forces armées canadiennes seront mieux protégées alors que, de son côté, le Centre de la sécurité des télécommunications pourra mieux protéger les Canadiens qui prennent part aux opérations. »

Parti conservateur

James Bezan (Selkirk--Interlake--Eastman)  :« Ce qui est incroyable, c'est que, dans cette cyberguerre, au titre des 'autorisations de cyberopérations' prévues dans la Loi sur le Centre de la sécurité des télécommunications proposée, selon le paragraphe 30(2), un droit de veto serait accordé au ministre des Affaires étrangères. Le Centre de la sécurité des télécommunications et le Service canadien du renseignement de sécurité ont toujours collaboré étroitement avec le ministre de la Sécurité publique et le ministre de la Défense nationale et, dans une certaine mesure, avec le ministre de la Justice. Désormais, le ministre des Affaires étrangères aurait un droit de veto sur l'espionnage de particuliers ou d'organisations. Il aurait un droit de veto sur le lancement de cyberattaques ou d'opérations défensives visant à contrer des cyberattaques menées par des particuliers ou des organisations, qu'il s'agisse d'organisations criminelles ou terroristes, de cartels de la drogue ou de simples pirates informatiques. C'est tout simplement incompréhensible.

« La ministre des Affaires étrangères n'a pas accès aux mêmes mécanismes de renseignement au sein de son ministère que le ministre de la Sécurité publique et le ministre de la Défense nationale. Je ne vois pas du tout pourquoi nous donnerions une autorisation à la ministre des Affaires étrangères. Il suffit de penser à l'ancien ministre des Affaires étrangères, Stéphane Dion, qui avait été chargé d'apaiser la Russie -- certainement la plus grande menace pour le Canada et les alliés du Groupe des cinq. En ce qui concerne nos partenaires du Groupe des cinq, nous veillons à ce que le système de cybersécurité et les activités de collecte de renseignement sur la Fédération de Russie soient rigoureux, tout particulièrement en ce qui concerne les kleptocrates du Kremlin et ceux qui souhaitent nuire à notre alliance par le biais de l'OTAN.

« Nous savons que la Russie nous espionne et nous savons que la Chine nous espionne elle aussi. Stéphane Dion, lorsqu'il était encore ministre des Affaires étrangères, avait cru pouvoir apaiser les Russes et avait refusé d'autoriser de telles activités d'espionnage. On ne peut pas laisser cela se produire.

« Le gouvernement actuel tente de conclure un accord commercial avec la Chine. Le gouvernement autoriserait-il des activités d'espionnage et de cyberdéfense contre le gouvernement de la Chine ? Le gouvernement tient-il à tout prix à faire des échanges commerciaux avec la Chine, malgré le bilan environnemental épouvantable de ce pays et les atrocités qu'il commet contre ses propres citoyens, dont ceux qui pratiquent le Falun Gong ? Je suis convaincu que le gouvernement chercherait à apaiser la Chine.

« Nous devons nous assurer de bien faire les choses, et c'est pourquoi le projet de loi doit être renvoyé au comité dès maintenant. Nous devons apporter des changements afin que le projet de loi serve au mieux l'intérêt du Canada. Il ne doit pas servir, par l'intermédiaire de la ministre des Affaires étrangères, à apaiser certains pays qui représentent les plus grandes menaces pour notre sécurité nationale. Le projet de loi doit servir à assurer notre sécurité et non les ambitions politiques du gouvernement. »

Peter Kent (Thornhill) : « ...le projet de loi dont nous sommes saisis, le projet de loi C-59, est un immense projet de loi. Il va bien au-delà des promesses électorales des libéraux de supprimer imprudemment un certain nombre de dispositions du projet de loi C-51, qu'ils avaient par ailleurs appuyé lorsqu'ils étaient le troisième parti à la Chambre. J'en dirai plus à ce propos dans quelques instants. Le projet de loi C-59 est une tentative de procéder sur plusieurs fronts à la plus grande, la plus vaste et la plus profonde réforme, restructuration, refonte ou consolidation, peu importe comment on l'appelle, des lois nationales en matière de sécurité du Canada en plus de 30 ans. Le projet de loi est par définition et à tous les points de vue un projet de loi omnibus. Le projet de loi C-59 créera trois nouvelles lois et modifiera cinq lois existantes. »

NPD

Matthew Dubé (Beloeil--Chambly)  : Le ministre « n'a pas parlé des changements au Centre de la sécurité des télécommunications Canada ni des cyberarmes, des préoccupations qu'elles soulèvent ou des conséquences qu'elles pourraient avoir dans nos vies. Quand je vois les changements que l'on se propose d'apporter au mandat de cet organisme et tout ce qui, dans le projet de loi, se rapporte à la cybersécurité, je me dis qu'on ne peut faire autrement que d'inclure aussi la Loi sur la défense nationale  ».

Alexandre Boulerice (Rosemont--La Petite-Patrie)  : « En novembre 2016, donc l'année dernière, la Cour fédérale a rendu une décision au sujet d'une collecte massive de données par le SCRS. Ce dernier avait illégalement conservé des données électroniques personnelles pendant plus de 10 ans. Dans une décision et un jugement assez cinglant et assez clair, le juge Simon Noël a dit que le SCRS avait manqué à son devoir avec ce programme de collecte de données puisque les renseignements étaient recueillis à l'aide de mandats judiciaires et qu'il n'avait pas informé le tribunal de cela.

« Le SCRS n'aurait pas dû conserver les renseignements puisqu'ils n'étaient pas directement liés à des menaces à la sécurité du Canada. C'est important. C'est le genre d'exemple très concret qui vient mettre en lumière toutes les préoccupations des gens qui se demandent quel genre de renseignements on va aller chercher sur eux, qui va avoir accès à ces renseignements, à qui on va les communiquer et les transférer. En novembre 2016, la Cour fédérale a rappelé dans un jugement qu'il peut y avoir des exagérations. Ce n'est pas une lubie. C'est arrivé chez nous.

« Le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile réagit rapidement et dit que le gouvernement en prend acte et ne portera pas cette décision en appel. Ah bon. C'est bon signe. C'est peut-être un pas dans la bonne direction. Oh que non. Surprise, au sein du projet de loi C-59, le gouvernement libéral répond à cette décision de la Cour fédérale d'une manière assez étrange en ce qui concerne la protection de notre vie privée. La nouvelle loi va permettre la collecte massive par le SCRS de métadonnées qui contiennent des renseignements confidentiels concernant les Canadiens qui ne sont pas pertinentes pour les enquêtes.

« Le jugement de la Cour fédérale de novembre 2016 disait que le SCRS n'avait pas le droit de faire cela et que c'était illégal. Or, le projet de loi C-59 rend cela légal. Que les gens nous comprennent bien : si le projet de loi C-59 est adopté, le SCRS pourra recueillir massivement des métadonnées qui contiennent des renseignements confidentiels concernant des Canadiens qui ne sont pas pertinents pour des enquêtes. Ce sont des choses comme cela qui, pour nous, font en sorte que cela devient impossible de suivre le gouvernement libéral dans sa démarche. Oui, nous sommes contents de pouvoir étudier plus en profondeur le projet de loi C-59, mais nous lançons un signal d'alarme.

« Nous disons aux citoyens canadiens et québécois de faire attention, car il y a des éléments dans ce projet de loi qui vont augmenter la surveillance policière. Nous allons nous faire espionner encore plus et nous ne savons pas à qui nous allons donner ces renseignements.

[...]

« J'aimerais attirer l'attention de mon collègue, ainsi que celle de tout le monde qui nous écoute, sur le fait que dans le projet de loi C-59, dans le passage qui concerne la définition d'activité portant atteinte à la sécurité du Canada' , on inclut 'entraver de manière considérable ou à grande échelle le fonctionnement d'infrastructures essentielles' .

« Au NPD, nous craignons que le fait d'entraver le fonctionnement des infrastructures essentielles viendrait faire en sorte qu'on autoriserait des services secrets à espionner des gens qui se préparent à manifester contre l'arrivée de nouveaux pipelines. Avec un gouvernement qui vient d'accorder son appui à Kinder Morgan et à Keystone XL, nous sommes préoccupés par le fait que des manifestants pacifiques, écologistes ou autochtones puissent être visés par les dispositions du projet de loi C-59. »

François Choquette (Drummond)  : « Nous demandons que le ministre de la Sécurité publique et la Protection civile abroge et remplace la directive ministérielle de 2010 sur la torture pour veiller à ce que le Canada défende l'interdiction absolue de la torture et, particulièrement, qu'on utilise en aucun cas des renseignements que d'autres pays auraient pu obtenir sous la torture ni qu'on communique des renseignements susceptibles de donner lieu à de la torture.

« Ici, au Canada, on dit qu'on ne torturera pas, mais d'autres pays tortureront pour nous. Ensuite, on prendra ces renseignements et on va appliquer des sanctions.

« Cela n'a pas de sens. La torture doit être dénoncée partout, il ne faut jamais utiliser les informations obtenues sous la torture. De toute façon, on sait très bien que lorsqu'on est sous la torture, on va dire n'importe quoi. Cela ne fonctionne pas et c'est immoral. »

Parti vert

Elizabeth May (Saanich--Gulf Islands) : « Je pense que le projet de loi C-59 prévoit des améliorations importantes. Je crois que nous pouvons tous en convenir. Toutefois, je suis toujours très préoccupée par les vastes pouvoirs qui seraient conférés aux agents du SCRS et qui leur permettraient de demander une ordonnance auprès d'un seul juge pour obtenir un mandat les autorisant à violer la Constitution. J'ai soulevé cette question au cours des séances d'information que nous ont présentées des responsables du gouvernement. Ces derniers prétendent que, selon le libellé du projet de loi C-59, les agents du SCRS ne pourraient pas obtenir de mandat leur permettant de porter atteinte à la Constitution et à la Charte. Toutefois, le libellé du projet de loi laisse plutôt entendre le contraire. Il semble que les dispositions du projet de loi permettraient encore aux agents du SCRS d'obtenir des mandats les autorisant à violer la Charte canadienne des droits et libertés.

« Je sais que je suis en train d'entrer dans les détails du projet de loi, mais il y a tout lieu d'étudier en profondeur les dispositions en question. De nombreux articles ont été grandement améliorés -- et le gouvernement mérite toutes nos félicitations à cet effet --, mais les dispositions dont je viens de parler me font craindre au plus haut point qu'on nuise à la démocratie canadienne si on permet aux agents du SCRS d'obtenir des mandats les autorisant à violer la Constitution. »

Bloc Québécois

Aucun député du Bloc québécois ne s'est exprimé sur la motion.


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États-Unis

Rejetons la criminalisation de la dissidence en intensifiant la lutte pour les droits


Grand déploiement policier lors des actions contre l'assermentation du président Trump à Washington le 20 janvier 2017

Un aspect important du recours aux pouvoirs de police arbitraires par le gouvernement est sa criminalisation de la dissidence. Alors que les efforts visant à faire taire la dissidence par des actions policières contre des manifestants sont monnaie courante depuis longtemps, notamment l'utilisation de gaz lacrymogènes et d'arrestations, le châtiment collectif des manifestants et des organisations est devenu plus fréquent dans la période actuelle. Il s'est également étendu aux médias sociaux, comme le montrent les attaques contre un serveur qui a accueilli une des actions de protestation contre l'investiture. Le gouvernement s'efforce à la fois d'intimider et de perturber la dissidence, tout en rendant cette criminalisation « légale ».

Par exemple, lors de l'investiture de Trump plus de 200 manifestants ont été encerclés en masse par la police, empêchés de partir et ensuite arrêtés. Ils sont tous inculpés de crimes tels inciter les autres à l'émeute et complot en vue d'une émeute alors qu’ils étaient jadis passibles de délits mineurs comme refus de disperser ou résister à l'arrestation. Les 200 ne sont pas inculpés à cause d'actions individuelles, mais le simple fait d'être présents dans le groupe est utilisé comme motif de l'inculpation de complot en vue d'une émeute. Le gouvernement demande des peines de prison de 60 ans. Les manifestants visés incluent des observateurs juridiques, des journalistes et des paramédics .

L'insistance de porter des accusations criminelles et de demander de longues peines pour avoir simplement manifesté est un moyen pour intimider ces manifestants et tous les futurs manifestants, tout en rendant « légale » l'impunité de ce gouvernement par ces actions judiciaires.


Des anciens combattants se joignent aux autochtones et aux autres protecteurs de l'eau contre le pipeline Dakota Access à Standing Rock, Dakota du Sud, en décembre 2016.

Ceux qui organisent pour protéger l'eau et la Terre Mère font également face à la répression policière contre les manifestants, mais également à des accusations criminelles contre les personnes et les organisations. Par exemple, Chase Iron Eyes de la tribu sioux de Standing Rock est poursuivi dans le Dakota du Sud pour son rôle lors des actions de protection de l'eau contre l'oléoduc Dakota Access. Il est également inculpé d'avoir initié une émeute.

Iron Eyes est le principal conseiller juridique du Lakota People's Law Project (pour faire un don à la défense juridique des résistants du #NoDAPL, voir le site du Lakota People's Law Project). Lui et d'autres accusés entendent utiliser l'état de nécessité comme moyen de défense à cause de la menace imminente à leur seule source d'eau et de la façon dont l'oléoduc et les actions de l'administration Trump sapent la loi. Il était nécessaire pour eux de protester parce qu'il n'y avait pas d'alternative. Mais c'est le juge qui devra autoriser cette défense.

En plus de poursuites criminelles, les manifestants de #NoDAPL font également face à des poursuites civiles pour extorsion. Energy Transfer Partners a engagé une société de sécurité qui a également rassemblé des informations en vue de poursuites pour complot de masse et des accusations ont été déposées par la suite contre les organisations environnementales. Dans ce contexte de répression de la dissidence, ces actions forcent les organisations à consacrer beaucoup de temps et de ressources humaines à leur défense et à la défense de tous ceux qui sont ciblés. Cela crée l'idée que ce sont les manifestants qui sont les criminels, tandis que le gouvernement est le protecteur. La résistance résolue devant les tribunaux et sur le terrain montre que c'est tout le contraire qui est vrai. Les luttes contre les oléoducs montrent également la nécessité de renforcer l'unité entre les travailleurs américains et canadiens, car les deux font face à ces attaques et à l'impunité du gouvernement.

De plus, des efforts sont faits pour restreindre de plus en plus l'utilisation de l'espace public en tant qu'espace où le public peut exprimer son opinion. Les manifestants sur les terres privées ou tribales, comme à Standing Rock et dans d'autres régions où ont lieu des luttes contre les oléoducs, sont harcelés et arrêtés pour les crimes des monopoles. À Los Angeles, les fonctionnaires de police veulent faire adopter une ordonnance qui ferait qui toute personne qui dépasse le temps de parole permis commet un crime. À Los Angeles, par exemple, le temps permis au conseil municipal est de deux minutes. Des gens ont été arrêtés pour avoir parlé vingt secondes de plus, mais libérés, car ce n'est pas un crime. Cette ordonnance a pour but d'en faire un crime, et ceux qui condamnent les abus et les tueries de la police sont particulièrement ciblés. Elle est également formulée de manière à ce qu'elle puisse être élargie à d'autres espaces publics.

Ces actions policières n'ont rien à voir avec la sécurité et la protection du public. Au contraire, elles visent à intimider le public et à imposer l'acceptation de l'impunité policière pendant les manifestations, dans les rues et lors d'audiences publiques. L'utilisation de plus en plus fréquente d'accusations de félonie, les sentences de longue incarcération, le châtiment collectif et la criminalisation de la parole font tous partie de la destruction de l'opinion publique et de l'espace public pour exprimer cette opinion. On a recours à la désinformation pour prétendre que défendre les droits et agir de façon politique dans l'intérêt du peuple sont des crimes. Malgré ces attaques, le peuple continue de résister et de défendre ses droits. Notre sécurité est dans l'intensification de cette lutte pour les droits et dans la défense de tous les individus et de toutes les organisations.

(Voice of Revolution est une publication de l'Organisation marxiste-léniniste des États-Unis. Traduit de l'anglais par LML)

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Les manifestants arrêtés lors de l'investiture de Trump luttent contre les accusations criminelles portées contre eux

Environ 200 manifestants, journalistes et observateurs juridiques qui ont manifesté lors de l'assermentation de Donald Trump font un travail de mobilisation pour rejeter les accusations de félonie et les longues peines de prison qui les accompagnent. Le 15 novembre 2017 s'est ouvert le procès du premier groupe d'accusés et celui du second groupe doit débuter le 11 décembre 2017. Les chefs accusations sont portés avant même qu'une enquête indépendante sur l'inconduite policière le jour de l'assermentation soit terminée. Les arrestations, dont celles des 200, sont parmi les sujets qui font l'objet de l'enquête.

Les manifestants ont été pris en souricière et arrêtés en masse lors des grandes manifestations organisées contre Trump et les élections antidémocratiques en général, sous des slogans comme « Pas notre président, pas notre démocratie ». Ce groupe particulier s'était provisoirement séparé de la manifestation principale. La police les a alors encerclés, les a empêchés de partir et les a tous arrêtés.

Généralement, les manifestants qui sont arrêtés sont accusés individuellement d'infractions mineures comme conduite désordonnée ou refus de se disperser, qui souvent sont abandonnées ou punies d'une amende minimale. Dans ce cas-ci, le bureau du procureur des États-Unis pour le district de Columbia maintient les accusations criminelles de portée générale comme incitation à l'émeute et complot pour commettre une émeute contre les 200 personnes et il exige des peines de 60 ans pour chaque personne. Ce sont ces accusations criminelles de portée générale et les longues peines de prison demandées que les avocats qualifient de sans précédent et conçues clairement pour étouffer et criminaliser la dissidence.

Tous les 200 accusés sont également tenus responsables de choses comme avoir brisé des vitres, ce qui, selon plusieurs qui étaient à l'action, est l'oeuvre de provocateurs policiers, comme ce fut le cas souvent par le passé. Le Washington Post a rapporté en avril que la police du district avait infiltré le groupe avant la manifestation prévue en janvier. La police utilise les fenêtres brisées pour justifier les arrestations massives. Elle ne porte pas d'accusation contre des personnes spécifiques mais contre tout le groupe.

Un des accusés du 20 janvier a dit : « Des accusations comme celles-ci visent à faire taire les communautés quand vient le temps pour elles de résister. » Il a ajouté : « Comment peut-on s'attendre à ce que les gens trouvent le courage de résister quand les conséquences peuvent être une incarcération à vie ? C'est encore plus sérieux que les raclées aux mains de la police. Ces accusations visent à maintenir les gens dans la crainte, chez eux et obéissants. Et cette cause devant les tribunaux a comme objectif d'établir un précédent pour que de telles mesures se poursuivent. » Malgré cela, lui et d'autres persistent à résister et sont rejoints par de nombreux sympathisants au palais de justice et en ligne.

Le gouvernement a également émis une énorme assignation à comparaître concernant les métadonnées provenant du serveur qui hébergeait le site Web DisruptJ20 (Disrupt January 20). Les téléphones cellulaires des personnes arrêtées ont été saisis et fouillés pour leurs données. DreamHost a été assigné par le gouvernement à comparaître en août pour avoir hébergé DisruptJ20.org. Selon l'Union américaine pour les libertés civiles (ACLU), le mandat a visé les enregistrements de la base de données du site Web, ce qui peut impliquer plus d'un million d'utilisateurs et inclure « les adresses IP de plus de 1,3 million de visiteurs sur le site », car les procureurs fédéraux veulent les adresses IP de quiconque a accédé à disruptj20.org. De plus, les informations personnelles des administrateurs et des milliers de personnes ayant interagi avec le site sont aussi demandées. « Aucune explication plausible n'existe pour un mandat de perquisition de cette ampleur », a déclaré un avocat opposé à la citation à comparaître.

Le mois dernier, le juge en chef Robert E. Morin, de la Cour supérieure du district de Columbia, a partiellement réduit le mandat. Il en a cependant maintenu des parties importantes. Un avocat de Public Citizen, également engagé dans la contestation de l'assignation à comparaître, a dit : « Le juge a décidé de permettre une fouille des courriels des utilisateurs anonymes (sans leurs informations d'identification) même si le gouvernement n'a jamais montré qu'il avait une bonne raison de lire ces courriels. » Il a ajouté : « Le juge refuse à Public Citizen et à DreamHost l'opportunité d'expliquer pourquoi les arguments du gouvernement pour un protocole de perquisition ou pour l'accès à un enregistrement particulier devraient être rejetés. »

La police se rend coupable de répression violente

Alors que les manifestants sont injustement accusés de conspiration en vue d'une émeute — pas une émeute comme telle, juste une conspiration--, les policiers ne sont pas forcés de rendre des comptes de leur violence contre les manifestants. L'ACLU fait mention du recours étendu au poivre de cayenne, aux grenades à répercussion, y compris contre les personnes détenues, à la détention de gens à l'extérieur pendant des périodes de temps excessives sans accès à la nourriture, à l'eau ou à des toilettes. La police du district a utilisé des armes à 191 occasions durant l'assermentation, dont 74 grenades de pastilles à caoutchouc (des grenades explosives de type 'balles de caoutchouc'), tiré six rondes de balles de caoutchouc Stinger de 40 mm, utilisé cinq matraques extensibles et tiré une ronde d'armes à impact de 40 mm. Même après que les manifestants aient été capturés dans l'opération de souricière, les images de caméras-piétons ont montré les policiers en train de continuer d'utiliser des gaz lacrymogènes contre eux. Le gaz lacrymogène est une arme chimique dont l'utilisation est proscrite dans une guerre.

L'ACLU a aussi intenté une action en cour en janvier dans laquelle elle accuse la police d'abus sexuel comme forme de punition contre quatre personnes qui ont été arrêtées lors des manifestations. En point de presse suite aux manifestations, le reporter-photo Shay Horse, qui a été détenu, a dit qu'il avait été amené à un « centre de formation » où on lui a ordonné de baisser ses culottes et où un officier lui a « saisi » les testicules et « introduit son doigt, qu’il remuait, dans l’anus de chaque personne ». Horse a dit avoir ressenti « qu'ils s’étaient servis de la molestation et du viol comme d’une punition. Ils ont eu recours à ces tactiques pour infliger douleur et humiliation à des gens qui sont censés être innocents jusqu'à ce qu'ils soient trouvés coupables ».

Les accusations et les sentences excessives sont aussi un moyen de pousser des manifestants à plaider coupable à des accusations moindres et/où à témoigner contre d'autres manifestants de façon à diviser et à démoraliser ceux qui résistent.

Un membre de l'Association nationale des avocats a expliqué ce qui suit : « L'aspect nouveau de ce cas est le fait que tous ceux qui ont été pris en souricière sont accusés de conspiration et de toutes les félonies à caractère général sans discernement. Cela coïncide avec ce que la poursuite a fait contre des individus qui comptent aussi parmi les accusés. » Elle a dit qu'environ 95 % des affaires criminelles se terminent par des ententes sur plaidoyer parce que les dés sont souvent pipés contre les accusés qui sont poussés à prendre de telles ententes plutôt que de tenter leur chance dans un système biaisé. Dans ce cas-ci, le gouvernement prétend que quiconque a été pris en souricière et arrêté sans discernement cette journée-là est coupable de manière inhérente de toute conspiration et donc coupable de tous les chefs d'accusation. Elle a fait remarquer que la plupart des accusés ne sont liés entre eux que par la poursuite en cour et l'arrestation massive.

(Voice of Revolution. Traduit de l'anglais par LML. Photos: Unicorn Riot, J. Brusky)

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La résistance reprend pour arrêter
la construction de l'oléoduc Keystone XL

Le 20 novembre, la Commission des services publics du Nebraska a décidé par un vote de 3 contre 2 d'approuver la construction de l'oléoduc Keystone XL de TransCanada, qui doit acheminer 800 000 barils de sables bitumineux de l'Alberta vers les raffineries de la côte américaine du Golfe du Mexique. L'oléoduc sera construit selon un tracé alternatif à celui proposé initialement par l'entreprise.

Immédiatement, une large coalition de nations et de dirigeants autochtones, d'éleveurs de bovins, d'agriculteurs, d'écologistes, de scientifiques et de personnes d'autres secteurs ont écrit une lettre ouverte qui demande à tous de « s'engager à protéger » et de participer à une action collective organisée pour arrêter la construction de l'oléoduc.

Dans leur lettre du 20 novembre, les organisateurs déclarent : « Nous - dirigeants autochtones, fermiers et éleveurs, étudiants, scientifiques, chefs religieux et autres - offrirons une résistance pacifique à plusieurs endroits le long du tracé proposé de l'oléoduc ; ce sera une expression résolue de notre opposition continue à un plan qui met en péril les eaux du Midwest et le climat de notre unique Terre : l'eau est la vie, le climat est la vie - ce seront nos cris de ralliement contre un projet qui va mettre en danger les deux. »

La lettre note que la construction de l'oléoduc Keystone menace la vie et les moyens de subsistance de ceux qui vivent le long du tracé proposé et qui seront confrontés aux conséquences de la destruction de l'environnement causée par le pipeline. La coalition et ses partisans sont déterminés à ce qu'il ne soit jamais construit.

La lettre s'inspire du « campement à Standing Rock il y a un an. Nous avons vu le pouvoir de plus de 400 tribus qui se sont tenues ensemble à Standing Rock pour leur droit inhérent, moral et légal à la souveraineté et pour le désinvestissement financier des banques qui appuient le projet. »

La lettre mentionne que pendant la bataille à Standing Rock qui a duré plusieurs mois, l'État américain et son appareil de police, de concert avec l'entreprise qui construisait l'oléoduc Dakota Access, ont tenté d'appâter les manifestants dans des actes de violence par le recours à la force, avec des chiens d'attaque et des canons à eau par exemple, mais les manifestants ont tenu bon. Le lettre mentionne aussi que des poursuites-bâillons (SLAPP) ont été entamées contre des individus et des organisations dans le but d'empêtrer les manifestants dans un litige.

Gardant cela à l'esprit, la lettre demande à tous ceux qui veulent participer à la résistance à l'oléoduc de s'inscrire, de s'engager à être formés et de se soumettre à la direction et à la discipline des peuples autochtones, des fermiers, des éleveurs et des autres qui résistent à ce méga-projet depuis le début. La lettre appelle chacun à s'engager dans des actions pacifiques mais résolues, en déclarant : « Si nous prenons position maintenant, cela va améliorer nos chances dans mille autres luttes similaires qui se déroulent maintenant et se dérouleront dans les années à venir. »

On rapporte qu'en moins de 24 heures, plus de 8 000 personnes se sont inscrites pour participer, exprimant la détermination des peuples autochtones, des agriculteurs et des travailleurs, des étudiants, des vétérans de l'armée et d'autres à s'unir pour empêcher la construction de l'oléoduc Keystone et protéger la Terre Mère maintenant et dans l'avenir. Pour de plus amples informations ou participer à ce travail, visiter : https://nokxlpromise.org/


Action à San Francisco contre le pipeline Keystone XL en novembre 2017

(www.commondreams.org, nokxlpromise.org. Traduit de l'anglais par LML. Photos: No Keystone XL, B. Chan)

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L'intimidation s'accroît au Camp White Pine alors que les protecteurs de la terre luttent contre le gazoduc Mariner East 2

Le camp White Pine (CWP) - un camp de résistance formé par des gens qui luttent contre le gazoduc Mariner East 2 - se trouve sur 11 hectares de terres privées dans le comté de Huntingdon, en Pennsylvanie dont la population est de 45 634 personnes. Les protecteurs de la terre au CWP se sont rassemblés pour lutter contre ce gazoduc et contre la fracturation hydraulique source de crise en Pennsylvanie et contre l'industrie des ressources minérales dans son ensemble.

S'il est complété, le Mariner East 2 (ME2) ajoutera deux gazoducs au Mariner East 1 déjà en fonction pour transporter du gaz naturel liquéfié hautement explosif. Le tracé proposé traverse 563 kilomètres de l'Ohio, de la Virginie occidentale et du sud de la Pennsylvanie, et se termine à la raffinerie de Marcus Hook sur la rivière Delaware. Malgré les affirmations de l'industrie selon lesquelles ME2 est nécessaire pour combler les besoins énergétiques des États-Unis, le gaz naturel liquéfié transporté par le gazoduc sera en fait expédié en Écosse où la société britannique INEOS va l'utiliser pour fabriquer des produits en plastique.

Le Mariner East 2 est un projet de Sunoco Logistics, qui a fusionné le 28 avril 2017 avec l'entreprise tristement célèbre Energy Transfer Partners (ETP), la société qui est derrière l'oléoduc Dakota Access. ETP a l'un des pires bilans de sécurité parmi les entreprises de cette industrie et est la source des violences brutales et des violations des droits humains à Standing Rock et contre ceux qui résistent à d'autres projets actuels de pipelines, comme l'oléoduc Bayou Bridge en Louisiane.

Bien qu'il ne soit pas encore terminé, le ME2 est déjà responsable des déversements de 765 000 litres de liquides de forage qui se sont produits en 90 épisodes sur 42 sites en Pennsylvanie, ce qui a entraîné la contamination de l'eau des puits pour de nombreux résidents de la région. À la suite de ces déversements, le département de la Qualité de l'Environnement de Pennsylvanie a imposé des interdictions de fracturation hydraulique horizontale ou de forage directionnel horizontal (FDH) et a établi d'autres restrictions de sécurité pour le gazoduc que l'ETP a aussitôt enfreintes. Le département de la Protection de l'Environnement de la Pennsylvanie a publié une déclaration le 15 novembre 2017 au sujet d'un nouveau déversement causé par le FDH dans le comté de Berks. L'ETP n'avait pas les permis requis pour forer.

ETP a récemment annoncé une date d'achèvement du ME2 pour le deuxième trimestre de 2018, environ 18 mois plus tard que la date initialement prévue. Ce retard est dû en partie au succès de la résistance des résidents de Pennsylvanie, dont les gens du camp White Pine.

Ciblés par la police pour avoir campé dans les arbres

Le CWP est situé sur les terres d'Ellen et Steven Gerhart, une enseignante à la retraite et un artiste. Depuis qu'elles ont appris en mars 2015 l'existence du projet de gazoduc ME2, Ellen et sa fille Elise Gerhart ont organisé de nombreuses actions - dont des actions directes, un recours collectif et une poursuite au civil -- pour protéger leur maison contre les effets dévastateurs de l'extraction des ressources .

La création du CWP en février 2017 a été inspirée par les camps de Standing Rock. Le camp se compose de trois « cabanes dans des arbres » - des plates-formes et des petites maisons qui fournissent un abri sûr aux protecteurs de la terre. Les « cabanes dans des arbres » ont été construites en février 2016 et placées stratégiquement afin d'empêcher l'abattage de centaines d'arbres sur la servitude d'un peu plus d'un hectare du projet de gazoduc pour lequel il faut procéder par FDH. Si elles sont complétées, les conduites du gazoduc installées par forage directionnel horizontal vont traverser un petit étang sur les terres de Gerhart alimenté par un cours d'eau qui se déverse dans le ruisseau Little Trough, un affluent de la rivière Juniata. La région du comté de Huntingdon se compose de terres humides, de maisons familiales et de petites fermes d'élevage et de cultures.

En 2016, la maison de Gerhart a été envahie à trois reprises par des équipes d'abattage d'arbres et la police, avant même que l'ETP n'obtienne ses permis de construire. Le 29 mars 2016, des équipes de coupe d'arbres et des policiers sont entrés, sans préavis, à l'arrière du terrain des Gerhart. Elise Gerhart et ses amis occupaient à l'époque trois arbres et empêchaient certains arbres d'être abattus. [...] Gerhart a dit que pendant qu'elle était juchée dans l'un des arbres, d'autres arbres tombaient tout autour d'elle, y compris dans les filets de sécurité qui l'empêchaient de tomber de l'arbre d'une hauteur de15 mètres dans les airs. Gerhart et les protecteurs de la terre postés au sol ont rapporté que les policiers sont restés les bras croisés à regarder la situation dangereuse se développer.

La police a fait deux arrestations ce jour-là sur la propriété de Gerhart : les résidents de Pennsylvanie Alex Lotorto et Elizabeth Glunt, tous les deux présents pour observer toute infraction à la sécurité et à la loi, ont été placés en détention. Ils ont été accusés d'inconduite et d'outrage criminel.

Lotorto a été détenu moyennant une caution de 200 000 $ pour sa libération. L'arrestation de Glunt est survenue après qu'elle soit passée sur la servitude pour dire aux équipes de coupe qu'elles s'approchaient trop près des arbres qui abritent les cabanes. Elle a bien vu que les policiers ne faisaient rien pour protéger les personnes présentes dans les cabanes et elle s'est inquiétée pour leur sécurité. Elle a été arrêtée et détenue moyennant une caution de 100 000 $. Lorsqu'on lui a demandé comment elle avait été traitée par la police, Glunt a dit : « Ils vous traitent comme si vous étiez une personne terrible, même si vous êtes simplement là et que vous ne faites rien de mal. »

Le 30 mars 2016, les équipes de coupe et les forces de l'ordre sont revenues une deuxième fois. Deux personnes ont été arrêtées : Nate Irvin et Ellen Gerhart. Ellen Gerhart dit qu'elle a dit aux députés du shérif, « Vous devez faire quelque chose parce qu'ils se rapprochent trop de l'arbre dans lequel se trouve Elise. » Leur réponse a été de l'arrêter pour avoir « créé une situation dangereuse ». Elle a ensuite été libérée en se portant garante d'elle-même.

Le 7 avril 2016, les équipes d'abattage et d'application de la loi sont retournées au domicile des Gerhart. Cette action n'était pas autorisée par la loi. Grâce au Service américain de la Protection de la faune, des oiseaux migrateurs et de la chauve-souris de l'Indiana, toutes les entreprises de coupes forestières ont été interdites d'entrée sur certaines portions des terres protégées (dont les terres de Gerhart) après le 31 mars et avant le 14 novembre 2016. Bien qu'ils connaissaient cette loi, les équipes de coupe d'arbres et les forces de l'ordre sont retournées au domicile des Gerhart.

Ces mesures de protection ont pris fin le 15 novembre 2017. Elise Gerhart a rapporté lors d'une conférence téléphonique qu'à compter du 14 novembre 2017, il y a eu une augmentation significative de la surveillance aérienne, qui comprend maintenant un hélicoptère et un avion non identifié. Elle a dit avoir entendu de sa chambre à coucher le bruit des tronçonneuses et elle s'est précipitée de nouveau vers une des cabanes situées dans les arbres.

Les arrestations et les accusations ont repris. Ellen Gerhart a été arrêtée et détenue en prison pendant trois jours pour avoir dit à la police que les équipes de coupeurs s'approchaient trop près de la cabane que sa fille occupait dans les arbres. On lui a refusé l'accès à un téléphone, à un avocat et à des soins médicaux pendant une partie de son séjour en prison. Alors qu'elle était interrogée par un agent des services correctionnels de l'établissement de détention du comté de Centre, elle a refusé de répondre aux questions et a de nouveau demandé un avocat. L'agent lui a alors dit que le refus de répondre aux questions était une « infraction de niveau un ». Elle n'a pas eu accès à son avocat avant trois jours après son arrestation.

Également le 7 avril, Elise Gerhart a été accusée d'inconduite mais n'a pas été arrêtée tandis que les autres personnes campées dans les arbres n'ont pas été inculpées. Les documents déposés par Gerhart à la cour des poursuites civiles affirment que les défendeurs ont visé Elise « non pas dans la poursuite de la justice mais pour envoyer arbitrairement et malicieusement un message à la famille Gerhart et à ses supporters pour les décourager dans leur opposition au gazoduc. ». Les chefs d'accusation contre Elise ont finalement été abandonnés.

Ce n'est que le 13 février 2017 que l'ETP a pu obtenir un permis pour commencer la construction du gazoduc ME2. Cependant, bien avant cela, l'ETP avait déjà obtenu des ordonnances de protection et des brefs de mise en possession, qui traitaient essentiellement les Gerhart comme des locataires sur leurs propres terres et ETP comme leur propriétaire. Un bref de mise en possession est habituellement donné à un propriétaire afin d'expulser des locataires et faire appel à des agents pour faire appliquer la loi. Le fait que cela ait été accordé à l'ETP montre comment l'entreprise et l'État conçoivent la terre et ceux qui y vivent

Les Gerhart sont présentement engagés dans un recours collectif intenté par le Clean Air Council pour obtenir la révocation des permis de l'ETP. Ils ont également une cause devant les tribunaux contre l'utilisation du pouvoir d'expropriation qui permet de saisir leurs terres pour les fins du gazoduc ME2. Il se peut que cette affaire soit entendue par la Cour suprême du Commonwealth de Pennsylvanie. En outre, le 25 septembre 2017, Ellen et Elise Gerhart, Alex Lotorto et Elizabeth Glunt ont intenté une action au civil contre ETP, Sunoco Logistics, TigerSwan, le professionnel des médias sociaux Nick Johnson (qui a été embauché par TigerSwan) et les shérifs du comté de Huntingdon et les State troopers de la Pennsylvanie pour arrestation injustifiée et harcèlement. Le CWP et Elise Gerhart sont également membres de la coalition Arrêtons ETP, qui a été créée dans le seul but d'arrêter les projets de l'entreprise pipelinière.

Depuis le début, CWP, les Gerhart et les protecteurs de la terre du camp ont été la cible de harcèlement, de surveillance, d'infiltration et de menaces de mort et de viol. Elise Gerhart, de même que plusieurs protecteurs de la terre, ont été suivis à de nombreuses occasions et des photos d'eux-mêmes, de leurs voitures et de leurs informations personnelles ont été prises et affichées sur le groupe Facebook PA Progress, créé par Nick Johnson, un professionnel des médias sociaux engagé par Tiger Swan, une entreprise à la solde d'ETP (Le groupe n'existe plus.)

De plus, de nombreux hélicoptères de surveillance et des drones ont survolé la propriété et le camp des Gerhart. L'utilisation du pouvoir d'expropriation pour les projets d'extraction est une pratique routinière du gouvernement des États-Unis. La terre volée aux Gerhart à des fins d'extraction est la même terre volée à mes ancêtres autochtones afin de faire croître la consommation capitaliste et colonialiste de la Terre. Malgré les dangers liés à la protection de la terre, de nombreux activistes dans les arbres et ceux qui les soutiennent au sol ont déclaré qu'ils ne se laisseront pas détourner de cette mission. [...]

(Truthout, November 29, 2017. Traduit de l'anglais par LML. Photos: J. Deerinwater, Camp White Pine, State Impact)

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Un activiste du climat qui a fermé l'oléoduc
de sables bitumineux du Montana est
reconnu coupable de crime grave

Dans un procès qui a duré à peine un jour et demi au Tribunal du district du comté de Chouteau au Montana, un jury a trouvé Leonard Higgins, un travailleur de l'Oregon à la retraite devenu activiste du climat qui a fermé un oléoduc de sables bitumineux pour lutter contre les changements climatiques, coupable de méfait criminel grave et d'intrusion criminelle. La condamnation comporte une peine maximale de 10 ans d'emprisonnement et une amende pouvant aller jusqu'à 50 000 $US. Une audience pour déterminer la peine doit se tenir le 2 janvier.

Higgins admet ouvertement que le 11 octobre 2016, il a coupé deux chaînes pour pénétrer dans une enceinte clôturée autour de l'oléoduc de sables bitumineux d'Enbridge à Coal Banks Landing, au Montana, et a actionné la vanne d'arrêt d'urgence. En fait, lui et d'autres ont appelé l'entreprise pour la prévenir afin d'éviter tout problème de sécurité, et un sympathisant l'a filmé et a diffusé l'action en direct, après quoi ils ont tous les deux attendu d'être arrêtés.

L'affaire a fait les manchettes nationales. L'action de Higgins fait partie d'un effort coordonné par lequel les oléoducs des sables bitumineux dans quatre États ont été fermés simultanément, ce qui a interrompu temporairement tout flot aux États-Unis de pétrole des sables bitumineux, cette forme de pétrole la plus forte en carbone et la plus dommageable pour le climat. En plus d'être poursuivis en justice, Higgins et ses collègues « actionneurs de vannes » ont récemment été la cible d'une lettre signée par 84 membres du Congrès adressée au département de la Justice, dans laquelle ils demandent pourquoi le département ne les a pas poursuivis en vertu de la loi fédérale, et si leurs actions répondaient à la définition de terrorisme domestique en vertu du Patriot Act.

Higgins, un homme affable de 65 qui dit avoir agi par conscience pour aider à prévenir les dommages climatiques pour le bien de ses enfants et petits-enfants, est tout sauf un adepte de la confrontation. Il a exprimé sa gratitude pour sa journée en cour, pour la chance de partager son histoire et de passer l'Action de Grâces avec des amis et des sympathisants qui ont assisté au procès, « dans un si bel endroit ». Il a plaidé coupable de délit d'intrusion et ne conteste pas les faits qui lui sont imputés. Il dit que l'impératif de prévenir les dommages à l'environnement a justifié son action. Toutefois, il n'a pas été autorisé à présenter cet argument devant les tribunaux.

« Je suis heureux d'avoir l'occasion de partager pourquoi j'ai dû fermer cet oléoduc et j'apprécie vraiment le temps et le dévouement du jury et du juge », a déclaré Higgins. « J'ai été déçu et surpris par le verdict, mais encore plus déçu de ne pas avoir eu droit d'invoquer ' l'état de nécessité ' ou de parler des changements climatiques qui m'ont poussé à agir. Lorsque j'ai tenté de parler des raisons qui m'ont poussé à faire ce que j'ai fait, j'ai été réduit au silence. »

« Nous sommes déçus que M. Higgins n'ait pas eu l'occasion de présenter une défense complète et d'expliquer au jury pourquoi il a fait cette action courageuse », a dit Kelsey Skaggs, directeur général du Climate Defense Project et membre de l'équipe juridique de Higgins. « En raison de l'énorme influence de l'industrie des combustibles fossiles, les militants qui luttent pour un avenir meilleur sont condamnés alors que les véritables criminels environnementaux sont en liberté. »

Avant le procès, Higgins et son équipe de défense ont déposé une requête devant le Tribunal du district du comté de Chouteau et une requête auprès de la Cour suprême du Montana, pour être autorisés à présenter une défense basée sur « l'état de nécessité » et plaider devant le jury que cette action était nécessaire pour prévenir des dommages environnementaux beaucoup plus graves que les conséquences de l'intrusion et d'avoir actionné la vanne d'urgence de l'oléoduc. Cela aurait permis à l'équipe des avocats de la défense d'amener des témoins experts et des preuves sur les changements climatiques et les impacts environnementaux causés par le pétrole des sables bitumineux. Une telle défense basée sur « l'état de nécessité » environnemental a été récemment accordée aux collègues actionneurs de valve de Higgins, Emily Johnston et Annette Klapstein, dont le procès est en cours devant un tribunal du Minnesota et dans une cause similaire à Spokane, dans l'État de Washington.

Mais le juge Daniel Boucher qui a présidé le procès, a refusé sans audience les requêtes de Higgins pour plaider l'état de nécessité, les qualifiant d' « effort déplacé » de « mettre en cause la politique énergétique des États-Unis ». Cette décision a empêché le jury au procès de Higgins d'entendre ou d'examiner des preuves concernant les dommages à l'environnement qui l'ont poussé à agir.

En cour, Higgins lui-même a été empêché de discuter des changements climatiques ou d'expliquer qu'il était motivé par la nécessité de prévenir les dommages causés à l'environnement. En fait, chaque fois qu'il a utilisé le mot « climat » dans son témoignage, le procureur s'est objecté et le juge a soutenu l'objection. [...]

Dans la foulée de Standing Rock, d'autres manifestations contre les oléoducs ont vu le jour partout au pays dont celles contre le prolongement de l'oléoduc de la ligne 3 au Minnesota, contre l'oléoduc Bayou Bridge en Louisiane, l'oléoduc Trans-Pecos dans l'ouest du Texas, l'oléoduc Diamond à Memphis, l'oléoduc Sabal Trail en Floride, et d'autres. En même temps, la répression des manifestations s'intensifie. Jusqu'à présent cette année, plusieurs États ont adopté des lois qui vont criminaliser et durcir les peines pour des manifestations pacifiques et des actions directes non violentes. Vingt autres États envisagent de telles mesures.

Les procès de Higgins et de ses compagnons militants du climat deviennent donc des précédents importants. D'autres procès du genre vont bientôt se tenir dans lesquels des chefs d'accusation et des amendes encore plus sérieux sont en jeu. Higgins a souligné que plus les gens vont prendre position, d'autres « vont ressentir la même urgence, le même devoir d'agir, de faire ce qui est juste ».

(22 novembre 2017. Traduit de l'anglais par LML)

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La police de Los Angeles arrête des gens
pour avoir parlé 20 secondes de plus que
le temps alloué aux réunions de la ville


Assemblée des commissaires de police de Los Angeles, juillet 2016

Le département de police de Los Angeles (LAPD) a apparemment arrêté des résidents pour avoir parlé 20 secondes de plus que leur temps accordé lors des audiences publiques. Maintenant, l'American Civil Liberties Union (ACLU) du sud de la Californie se bat contre une ordonnance qui pourrait rendre encore plus difficile pour les résidents de s'exprimer - en particulier ceux qui s'opposent aux pratiques du LAPD. Si elle est adoptée, l'ordonnance fera en sorte que toute opposition sera considérée comme « une infraction passible de violation des règles affichées dans les installations publiques » et permettra aux forces de l'ordre d'émettre des accusations criminelles d'intrusion, de restreindre les délais de parole et de faire taire les critiques lors des réunions. L'ACLU fait circuler une pétition adressée aux membres du conseil. Une lettre a également été envoyée au maire de Los Angeles, Eric Garcetti, et aux membres du conseil municipal de Los Angeles. Elle les invite à « rejeter l'ordonnance proposée » car « bien que qualifiée d'ordonnance de sécurité publique, elle ne ferait rien pour améliorer la sécurité publique ».

Le LAPD a connu le plus grand nombre de « meurtres commis par des officiers » en 2015 et 2016, selon le Guardian. Lorsque les données sont comparées à des villes ayant des populations similaires, le « taux de confrontations fatales » a été plus élevé l'année dernière à Los Angeles qu'à Chicago et à New York.

La lettre poursuit en faisant référence à deux cas précis dans lesquels des résidents ont été escortés à l'extérieur des réunions publiques du Conseil des commissaires de police. Il donne l'exemple de Tut Hayes, âgé de 81 ans. Une vidéo montre Hayes qui s'exprime lors d'une réunion en 2016, avant d'être expulsé de force de la salle, tandis que des membres de l'auditoire crient à la police de le laisser tranquille.

L'organisatrice de Black Lives Matter et professeure, Melina Abdullah, a également été expulsée de plusieurs réunions du Conseil des commissaires de police. Comme l'a rapporté le Los Angeles Times en mai 2016, un porte-parole du LAPD a déclaré qu'Abdullah « avait été expulsée de la salle par des officiers et arrêtée plus tard parce qu'elle a été soupçonnée d'avoir résisté à son arrestation ». Selon l'ACLU, elle « a été arrêtée pour avoir parlé 20 secondes au delà de la limite de 2 minutes permise pour des commentaires publics ». Ni Hayes, ni Abdullah n'ont été inculpés à la suite des expulsions et des arrestations de 2016. Abdullah, ainsi que plusieurs autres membres de la communauté, a également été arrêtée en août 2017 lors d'une réunion sur le meurtre de Carnell Snell Jr. Ils ont ensuite été libérés.

Cependant, comme le déclare la lettre de l'ACLU, les personnes arrêtées n'ont pas été « inculpées pour un crime car elles n'ont enfreint aucune loi. Cette ordonnance vise à changer cela ». Elle soulève également des préoccupations sur le fait que l'ordonnance sera appliquée de manière sélective, en fonction du contenu des remarques faites en public. Il est également possible que l'ordonnance soit utilisée de manière générale pour inclure d'autres espaces publics, par exemple lorsque des manifestations ont lieu en dehors des salles du conseil.

(alternet.org, October 25, 2017. Traduit de l'anglais par LML. Photo: F. Stoltze)

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Honduras

Le Canada doit cesser d'essayer d'empêcher les peuples d'autres pays de décider de leur destinée


Manifestation à Tegucigalpa au Honduras pour dénoncer les résultats de l'élection présidentielle, le 3 décembre 2017 

Le 26 novembre, une élection générale a eu lieu au Honduras pour élire le président du pays, les représentants au Congrès et les maires de même que les représentants au parlement centraméricain. Le Tribunal électoral suprême (TSE) a commencé à publier les résultats partiels pour l'élection présidentielle après que plus de 57 % des bulletins aient été dépouillés. Les résultats indiquaient une tendance persistante montrant que Salvador Nasralla, de l'Alliance de l'opposition à la dictature, devançait le président sortant Juan Orlando Hernandez du Parti national qui cherche à être réélu. L'Alliance de l'opposition est constituée du parti Libre dirigé par l'ancien président Manuel Zelaya et deux autres partis.

Les résultats préliminaires et la déclaration d'un gagnant ont été initialement promis à minuit le 26 novembre, mais ont été retardés d'abord pendant des heures puis pendant plus d'une journée. Lorsque les mises à jour partielles ont commencé à réapparaître le 29 novembre, la tendance qui semblait établie a été inversée, avec Hernandez maintenant en tête et se distançant de son rival. Ce changement a coïncidé avec la fermeture supposément inopinée pendant plusieurs heures de l'équipement de décompte électronique. Avec des accusations de falsification des votes et des fraudes d'autres types qui se sont répandues en raison des retards et des divers rapports contradictoires émis par le TSE, les accusations de fraude et les demandes de produire les résultats sont devenues plus insistantes et plus répandues. Les gens sont descendus dans la rue en grand nombre pour dénoncer ce qu'ils considéraient comme un coup d'État électoral qui se déroulait sous leurs yeux - une continuation du coup d'État militaire soutenu par les États-Unis qui a renversé le président Manuel Zelaya en 2009.

Hernandez a répondu aux protestations populaires par l'imposition de l'état d'urgence, la suspension des droits constitutionnels et la mise en place d'un couvre-feu de l'aube au crépuscule. La police et les forces militaires ont eu carte blanche pour attaquer les gens en toute impunité. À ce jour, au moins 14 personnes, dont la plupart participaient à des manifestations de rue ou se trouvaient près d'elles, auraient été tuées et des centaines d'autres blessées alors que les forces de sécurité ont tiré des balles réelles et ciblé directement d'autres personnes.

Dans son dernier rapport publié plus d'une semaine après les élections, le TSE a déclaré que Hernandez avait gagné avec 42,98 % des voix contre 41,38 % pour Nasralla. Il a rapporté que la participation des électeurs a été de 53 %. Il a déclaré que les résultats ne sont pas encore officiels, car le processus n'est pas terminé. Pour sa part, l'Alliance de l'opposition exige un recomptage complet, bulletin par bulletin, ou la tenue d'une nouvelle élection, tout en insistant sur le fait que son candidat a été le choix du peuple et que le TSE s'est livré à des fraudes. D'autres demandent une comparaison manuelle des bulletins de vote avec les feuilles de pointage des bureaux de scrutin qui sont considérées comme étant marquées du plus grand nombre d'irrégularités. Les missions d'observateurs de l'Organisation des États américains et de l'Union européenne n'ont pas non plus donné leur approbation et appellent également à des recomptages et à d'autres mesures d'enquête. Hernandez a dit qu'il est d'accord pour un recomptage complet si c'est ce qu'il faut pour prouver qu'il a gagné l'élection.

Deux jours après l'élection, au milieu d'accusations généralisées de fraudes et des manifestations de rue des Honduriens protestant contre le vol d'une autre élection, les États-Unis ont mis leur poids dans la balance. Le secrétaire d'État Rex Tillerson a signé un document qui atteste que le gouvernement hondurien a combattu la corruption et appuyé les droits de la personne, des conditions qu'il avait dû remplir pour recevoir des millions de dollars en aide des États-Unis.

Le 8 décembre, le TSE a procédé à un recomptage des voix à partir de seulement 4 753 des plus de 18 000 bureaux de vote du pays. Il a jusqu'au 26 décembre pour produire les résultats officiels.

Une continuation du coup de 2009


Manifestation à Tegucigalpa pour dénoncer les résultats de l'élection présidentielle,
le 3 décembre 2017

En 2009, le président démocratiquement élu du Honduras Manuel Zelaya a été kidnappé, renversé par la force et chassé du pays par un coup d'État militaire orchestré par les États-Unis. [1] Les forces ayant organisé le coup ont rapidement installé un président de facto. Quelques mois plus tard, à la faveur d'une élection frauduleuse boycottée par la majorité des Honduriens, un représentant du Parti national, chargé par les impérialistes américains de mettre de l'avant leur ordre du jour pour le pays, a été porté au pouvoir.

En 2013, un coup électoral soutenu par les États-Unis a porté au pouvoir le président actuel du Parti national, Jose Orlando Hernandez. [2] Lui-même un des organisateurs du coup de 2009 contre Zelaya, Hernandez a été chargé par les États-Unis de faire en sorte que le Honduras, son territoire et ses ressources naturelles et humaines continuent d'être à la disposition des monopoles mondiaux et que l'armée américaine puisse maintenir fermement sa mainmise sur le pays pour en faire une base de subversion dans la région.

On doit se rappeler que ceux qui ont perpétré le coup contre Zelaya en 2009 ont essayé de le justifier en ayant recours au prétexte que Zelaya avait mené une « activité anticonstitutionnelle » en appelant à un référendum sur une proposition de modification de la constitution pour permettre à un président de se présenter pour un deuxième mandat. Le même Hernandez qui avait pris part à cette activité sinistre a demandé au Tribunal constitutionnel, en préparation de l'élection actuelle, une « ré-interprétation » de la même constitution qui lui permettrait de solliciter un second mandat, laquelle lui a été accordée par le Tribunal.


Déploiement de la police anti-émeute contre les manifestants qui dénoncent les résultats de l'élection du 26 novembre 2017 au Honduras

La réponse du Canada

Le Canada a été le premier pays à reconnaître les résultats de l'élection tenue dans l'ombre du coup de 2009. Une fois de plus en 2013, en dépit des nombreuses preuves d'achat de votes, d'intimidation et d'autres pratiques frauduleuses, le gouvernement Harper s'est joint à l'administration Obama pour entériner rapidement les résultats même si des observateurs canadiens lui demandaient de ne pas reconnaître les résultats avant qu'une enquête ne soit tenue à cause des « nombreux rapports d'irrégularités, d'intimidation et de menaces de la part des autorités. »

L'approbation rapide des États-Unis et du Canada en 2013 a certainement contribué au fait que les demandes de recomptage et d'enquête sur les pratiques frauduleuses de nombreux Honduriens sont restées lettre morte. Cela a sûrement plu aux intérêts privés basés au Canada qui exploitent les ressources naturelles du pays. Certains d'entre eux ont été impliqués dans des violations de droits de la personne et des meurtres de défenseurs de l'environnement et de la terre, de journalistes, d'avocats et d'autres qui mettent en lumière les activités sinistres auxquelles plusieurs de ces entreprises prennent part.

Peu après le coup de 2009, le Canada a amorcé des négociations de libre-échange avec le nouveau gouvernement du Parti national. En 2010, le ministre d'État aux Affaires étrangères (Amériques), Peter Kent, a dirigé une délégation de dirigeants de sociétés minières canadiennes au Honduras et a promis que des centaines de millions de dollars seraient investis si le gouvernement hondurien abrogeait les règlements que le gouvernement du président destitué Manuel Zelaya avait imposé aux entreprises minières. En 2011, Stephen Harper a lui aussi visité le Honduras à la tête d'un groupe de hauts fonctionnaires et de dirigeants d'entreprises des secteurs minier, du tourisme et du vêtement. Un accord de libre-échange Canada-Honduras a été ratifié en 2014 et le Honduras est vite devenu le plus important récipiendaire de l'aide canadienne en Amérique centrale. Selon un rapport de 2016 du Conseil sur les affaires de l'hémisphère, l'activité minière des entreprises basées au Canada représente à peu près 90 % de tout l'investissement étranger au Honduras et se monte à plus de 600 millions $US.

La réponse du Canada à l'élection de 2017

Le gouvernement Trudeau qui a qualifié l'Assemblée nationale constituante du Venezuela d' « illégitime », dit ne pas reconnaître les résultats des élections du mois d'octobre pour les gouverneurs des États et blâme à tort le gouvernement bolivarien pour la violence et les tueries qui ont été clairement perpétrées à l'appel des forces putschistes qu'il appuie contre ceux qu'elles ont identifiés de « Chavistas », prend une approche entièrement différente en ce qui a trait à la situation au Honduras. Un communiqué émis par la ministre des Affaires étrangères Chrystia Freeland déclare simplement que le Canada est « vivement préoccupé par les informations faisant état d'une escalade des tensions et de la violence au Honduras depuis les élections nationales tenues le 26 novembre 2017, y compris la suspension de certaines garanties constitutionnelles décrétée le 1er décembre ». Le communiqué poursuit en disant que « notant les retards persistants dans la publication des résultats définitifs des élections, le Canada insiste auprès des autorités électorales pour qu'elles achèvent le dépouillement du scrutin, à l'abri de toute ingérence ». Freeland ne se réfère certainement pas aux impérialistes américains ou au Canada qui sont notoires pour leur ingérence dans l'élection précédente dans le but d'en déterminer les résultats. Le communiqué se termine par un appel au calme et « exhorte toutes les parties à régler tout désaccord de manière pacifique, transparente et conforme aux normes les plus strictes en matière de démocratie et de droits de la personne. Les processus électoraux participatifs, transparents et crédibles constituent les pierres angulaires de la démocratie. »

Pendant que le gouvernement se dit « vivement préoccupé » par les « informations faisant état d'une escalade des tensions et de la violence » sans assigner de blâme, au moins une des unités de la police militarisée formée par les États-Unis qui ont reçu l'ordre d'attaquer les gens dans les rues et même de commettre des assassinats ciblés en vertu de l' « état d'exception » décrété par le président s'est dite opposée au fait d'être utilisée pour réprimer le peuple et a déclaré ne pas vouloir avoir recours aux armes contre lui. Certaines ont accompagné le peuple dans la rue pendant le couvre-feu en défi du décret présidentiel.


Piquetage à Toronto le 6 décembre 2017 en appui au peuple du Honduras

Depuis le coup de 2009, les forces populaires ont résisté aux violations systématiques de leurs droits et ont affirmé que c'est le peuple du Honduras qui a le droit souverain de décider des affaires du pays, en matière électorale ou autre, et non les États-Unis ou le Canada ou quiconque agit au nom d'intérêts étrangers. Ils ont souffert pour cela de la répression brutale de la part de l'État et des forces militaires et des forces policières militarisées formées par les États-Unis et d'autres assassins.

Au lieu d'avoir recours à ces paroles trompeuses pour cacher les crimes qui continuent d'être perpétrés suite au coup d'État orchestré par les États-Unis il y a huit ans, que le Canada a appuyé, le Canada devrait présenter ses excuses au peuple du Honduras et cesser de s'ingérer dans ses affaires. Il devrait dénoncer le recours à la force et à la violence par l'État hondurien contre ceux qui demandent le respect de leurs droits et il devrait préconiser des solutions sociales et politiques à des problèmes de caractère social et politique. Les Canadiens n'acceptent pas que les intérêts monopolistes basés au Honduras décident de l'ordre du jour comme ils l'ont fait au Honduras au détriment du peuple du pays. Les Canadiens veulent que le Canada soit un facteur de paix qui contribue à faire de toutes les Amériques une zone pour la paix et non un territoire où l'on bafoue les droits du peuple au nom de grands idéaux.

Notes

1. « Non au coup d'État au Honduras ! Le président démocratiquement élu par le peuple, Manuel Zelaya. doit être rétabli dans ses fonctions ! » Le Marxiste-Léniniste, numéro du 29 juin 2009

2. « Un autre coup d'État électoral crasse des États-Unis » - Le Marxiste-Léniniste , Numéro du 5 décembre 2013

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80e anniversaire du massacre de Nankin

L'une des pages les plus sombres de l'histoire
de la civilisation humaine moderne


Cérémonie commémorative en hommage aux victimes du massacre de Nankin
le 13 décembre 2016

L'année 2017 est le 80e anniversaire du massacre de Nankin. Nankin est la capitale de la province de Jiangsu dans la Chine de l'Est. Plus de 300 000 Chinois ont été tués par les envahisseurs japonais qui ont occupé Nankin le 13 décembre 1927, le premier jour d'un siège de six semaines de destruction, de pillage, de viol et de massacre dans la ville. Ce massacre est considéré comme une des pages les plus sombres de l'histoire de la civilisation humaine moderne.


Section de la muraille commémorative au musée consacré aux victimes du massacre à Nankin

En Chine, le massacre de Nankin est perçu comme l'événement le plus tragique d'une époque où le pays a été intimidé et humilié par les puissances étrangères. En février 2014, la plus haute instance législative de la Chine a désigné le 13 décembre comme Journée nationale en hommage aux victimes du massacre de Nankin. Cette année, depuis le 3 décembre à Nankin, les membres des familles des victimes du massacre ont entrepris une série d'activités commémoratives telles que déposer des fleurs, faire brûler de l'encens et lire des lettres devant le mur de la salle commémorative où sont gravés les noms des victimes.


Vue aérienne du complexe du musée de Nankin

Les Japonais ont commis des crimes horrifiques en Chine dans leurs tentatives de contrôler l'Asie du Sud-Est et d'autres régions. Nankin est devenu la cible des Japonais après qu'ils ont vaincu les troupes chinoises à Pékin et à Shanghai. Dans la Guerre de résistance de la Chine contre l'agression japonaise (1937-1945), près de 35 millions de Chinois ont été tués ou blessés et les dommages directs et indirects ont atteint 100 milliards $ et 500 milliards $ respectivement.

En cette occasion, LML publie un extrait du livre Scorched Earth (1941) d'Edgar Snow.

Le viol de Nankin
- Edgar Snow -


Tableau du massacre de Nankin par l'artiste chinois Li Zijian

Les Japonais sont entrés à Nankin le 12 décembre alors que les troupes et les civils chinois tentaient toujours de battre en retraite sur la rive nord de la rivière Yangtze en passant par l'unique issue atteignable. Une situation de grande confusion a suivi. Des centaines de personnes ont été tuées à la mitraillette à partir d'avions japonais ou se sont noyées en tentant de traverser la rivière. Des centaines de personnes ont été prises dans l'engorgement à la barrière de Hsia-kuan, où les corps se sont amoncelés d'une hauteur de quatre pieds...

Toute jeune fille ou femme entre 10 et 70 ans a été violée. Les personnes laissées pour compte étaient achevées à coups de baïonnette par des soldats ivres. Souvent des mères ont vu leur bébé décapité après quoi elles ont été violées. Une mère a raconté qu'elle a été violée par un soldat qui, parce qu'il était agacé par les cris de son bébé, a placé une couverture par-dessus la tête du petit et l'a étouffé afin de pouvoir terminer son acte en paix. Certains officiers, qui menaient ces incursions, ont transformé leur quartier général en harem en changeant de victime à toutes les nuits. La copulation en plein air était fréquente. Près de 50 000 troupes ont été relâchés dans la ville pour plus d'un mois en une orgie de viols, de meurtres, de pillage et de débauche générale qui n'a jamais connu son égal à l'époque moderne.

Douze mille magasins et maisons ont été délestés de leurs approvisionnements et de leurs meubles et incendiés. Les civils se sont fait enlever tous leurs biens personnels et des soldats et des officiers japonais ont volé sur une base personnelle des autos et des rickshaws et d'autres moyens de transport pour mieux transporter leur butin à Shanghai. Les pilleurs sont aussi entrés dans les domiciles de diplomates étrangers où ils ont tué les serviteurs...

Un observateur étranger écrivait : « Presque chaque édifice de la ville a été pillé sans relâche par des soldats, y compris les ambassades américaines, britanniques et allemandes...La plupart des boutiques, après avoir été cambriolées et pillées, ont été complètement dévalisées par des bandes de soldats au moyen de camions, le tout sous l'oeil bienveillant des officiers. »

La Zone internationale de « sécurité » était en fait devenue une zone périlleuse pour les non combattants et a eu l'effet contraire pour ses organisateurs bien intentionnés...Jour après jour, les Japonais entraient dans la zone pour capturer des femmes pour apaiser l'appétit insatiable des vainqueurs. Des jeunes filles étaient arrachées d'écoles missionnaires américaines et britanniques et placées dans des bordels au service des troupes, pour disparaître à tout jamais. Un jour, en lisant une lettre rédigée par un des missionnaires de la zone, j'ai pris connaissance d'un étrange acte de patriotisme posé par un certain nombre de courtisanes qui avaient cherché à se réfugier auprès de leurs soeurs vertueuses. Le missionnaire apprit qu'elles se trouvaient dans le campement et, encouragé par certaines des matrones, demanda aux courtisanes si elles voulaient servir les Japonais de façon volontaire afin que des femmes non professionnelles soient épargnées. Ces courtisanes détestaient les Japonais autant que toutes les autres mais après quelques délibérations elles se sont portées volontaires. Ces femmes ont sans doute racheté la vertu qu'elles sont réputées avoir perdue et certaines d'entre elles ont perdu la vie de cette façon, mais à ma connaissance elles n'ont jamais reçu une reconnaissance posthume ni même un ordre du Jade.

À Shanghai quelques Japonais ont éprouvé un profond sentiment de honte et d'humiliation. Je me souviens, par exemple, d'avoir parlé un soir avec un ami japonais, un journaliste libéral qui avait survécu en gardant ses opinions pour lui, et dont je ne révélerai pas le nom par souci de protection. « Oui, ils sont tous véridiques », m'avait-il avoué contre toute attente lorsque je lui demandai au sujet de certains comptes-rendus touchant aux atrocités. « En fait », m'avait-il dit, « les faits sont encore plus atroces que tout ce qui a été publié à leur sujet. » Il en avait les larmes aux yeux et j'ai raison de croire que sa peine était sincère.

Note

1. Edgar Snow (17 juillet 1905-15 février 1972) est un journaliste américain bien connu pour ses reportages en Chine avant la Deuxième Guerre mondiale et surtout pour son livre publié en 1937, Red Star over China. Il a été l'un des premiers journalistes occidentaux à faire des entrevues avec les dirigeants de la Révolution chinoise, y compris avec Mao Zedong, et à offrir des reportages impartiaux sur le mouvement communiste en Chine. Snow a fait un compte rendu du Viol de Nankin et a continué de travailler en Chine au cours des années suivant la Deuxième Guerre mondiale.

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