Le Marxiste-Léniniste

Numéro 74 - 30 mai 2016

Controversée nouvelle constitution du Parti libéral

De quel genre de parti politique les Canadiens ont-ils besoin pour s'engager dans l'édification nationale contre l'édification d'empire?

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Controversée nouvelle constitution du Parti libéral
De quel genre de parti politique les Canadiens ont-ils besoin pour s'engager dans l'édification nationale contre l'édification d'empire?
Controversée nouvelle constitution du Parti libéral

Supplément

«Plus qu'un mouvement, moins qu'un parti»
Les tentatives de saboter le mouvement ouvrier pour l'empêcher
d'atteindre son but



Controversée nouvelle constitution du Parti libéral

De quel genre de parti politique les Canadiens ont-ils besoin pour s'engager dans l'édification nationale contre l'édification d'empire?

Le Parti libéral du Canada s'est donné une nouvelle constitution à son congrès biennal tenu à Winnipeg du 26 au 28 mai. Le Parti communiste du Canada (marxiste-léniniste) croit que tous ceux et celles qui se préoccupent de l'état de la politique au Canada aujourd'hui doivent prendre le temps d'étudier ce que propose la direction du Parti libéral sur ce front.

Le PCC(M-L) est d'avis que l'effort des libéraux pour fusionner mouvement et organisation est une forme d'antipolitique qui mène à une concentration encore plus grande du pouvoir politique et à une plus grande marginalisation du peuple. La manière frauduleuse par laquelle on s'y est pris pour imposer cette nouvelle constitution et l'échec à donner de la légitimité à la consultation qui a eu lieu ne sont pas les seuls aspects inquiétants de cette nouvelle aventure libérale. Au coeur du problème il y a la question de quel genre de parti politique le peuple a besoin. C'est une question essentielle pour le succès du mouvement du peuple pour s'investir du pouvoir de décider.

On ne résoudra pas la profonde crise du système de démocratie représentative dominée par les partis en prétendant tout simplement que les partis de masse, les partis dits « ouverts », les « grandes tentes », représentent le peuple de facto. Le mot « masse » lorsque joint à parti politique fait-il référence uniquement au nombre, ou fait-il référence à une qualité particulière ? La qualité en question n'a-t-elle pas à voir avec qui exerce le pouvoir politique et à quelles fins ? Peut-on escamoter la question en créant quelque chose de nouveau pour ensuite prétendre que parce que c'est nouveau, c'est ouvert, et parce que c'est ouvert, c'est démocratique ? En fait, les libéraux montrent eux-mêmes la fraude de leur prétention de modernisation du parti lorsqu'ils déclarent que le but est de gagner la prochaine élection fédérale.

Les Canadiens sont très préoccupés par la domination du processus politique par les partis de l'establishment. Ces partis fonctionnent d'une façon bien précise et sont plongés dans une grave crise précisément parce qu'ils préservent le privilège, servent une tout petite minorité riche et ont pour mission de maintenir le peuple apolitique, marginalisé et écarté du pouvoir.

Les partis politiques ne sont pas le problème comme tels, le problème est la crise du projet d'édification nationale de la bourgeoisie et de l'État-nation bourgeois qui se désintègre dans un monde où les plus grands monopoles établissent leurs intérêts comme suprêmes sur une base supranationale. La prétention qu'on peut faire de la politique sans partis politiques, pour que les politiques adoptées soient celles du peuple plutôt que celles imposées d'en haut, n'est qu'une tentative de cacher ce que manigancent les partis de l'establishment.

La question de quel genre de parti politique a besoin un corps politique moderne et une société qui requiert que le peuple soit investi du pouvoir souverain pour pouvoir progresser et, en définitive, la question du pouvoir politique lui-même, sont ce dont il faut discuter.

Dans ce numéro du Marxiste-Léniniste nous présentons un article d'information sur la nouvelle constitution du Parti libéral et un article intitulé « 'Plus qu'un mouvement, moins qu'un parti' : les tentatives de saboter le mouvement ouvrier pour l'empêcher d'atteindre son but ». Celui-ci a d'abord été présenté par le Comité central du PCC(M-L) en décembre 2007 lors d'un séminaire national sur l'évolution des partis politiques au Canada, tenu dans le cadre des préparatifs pour le VIIIe Congrès du Parti qui a eu lieu en août 2008. Le séminaire a réuni des activistes du Parti de partout au Canada et le texte qui y a été présenté a circulé parmi tous les membres du Parti en juin 2008.

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Controversée nouvelle constitution du Parti libéral

Un des points au programme du Congrès biennal du Parti libéral du Canada, qui s'est tenu à Winnipeg du 26 au 28 mai, était l'adoption d'une nouvelle constitution du parti. LML publie l'article qui suit, écrit avant l'adoption de la constitution à Winnipeg, qu'il juge utile pour montrer aux lecteurs le processus frauduleux choisi par le Parti libéral pour préparer l'ébauche de constitution et la controverse au sein du parti même à propose de cette façon de procéder.

* * *

Avant le congrès de Winnipeg, le directeur principal des communications du Parti libéral, Braeden Caley, a déclaré au journal The Hill Times que le projet de constitution vise à « moderniser, renforcer et ouvrir » le parti. La présidente du Parti libéral du Canada, Anna Gainey, a expliqué : « Je crois qu'en continuant de nous ouvrir, de nous moderniser et d'avoir davantage un mouvement qu'un parti politique traditionnel, il s'agit d'une progression naturelle de cela ».[1] Le chef du parti et premier ministre Justin Trudeau a dit : « Les Canadiennes et les Canadiens s'attendent à ce que nous continuions à bâtir et à moderniser notre mouvement et à rendre celui-ci plus ouvert. Nous ne les laisserons pas tomber ».[2]

Dans plusieurs articles, il était indiqué que le projet de nouvelle constitution du Parti libéral serait voté le 28 mai, le dernier jour du Congrès biennal libéral de Winnipeg. Tous les délégués présents auraient droit de vote. Pour être adopté, le projet de nouvelle constitution libérale devait recueillir l'appui d'au moins les deux tiers des délégués ayant droit de vote et présents à l'assemblée plénière.

« Actuellement, le Parti libéral a plus de 18 constitutions, notamment la constitution du parti fédéral, les constitutions des ailes fédérales du parti dans toutes les provinces et les territoires et celles des commissions comme la Commission des Jeunes libéraux du Canada, la Commission libérale féminine nationale, la Commission des peuples autochtones, la Commission des aînés libéraux », lit-on dans The Hill Times.

« La constitution proposée rend l'adhésion gratuite pour tout Canadien qui souhaite s'inscrire, elle met à jour la structure du parti et apporte des modifications importantes à la gestion financière et aux mécanismes de gouvernance des associations de circonscription et des commissions. Si la constitution du parti proposée est adoptée cette semaine, le parti aura une seule constitution ... et le Conseil national rédigera des règlements qui vont régir les opérations du parti, de ses ailes fédérales dans les provinces et les territoires et des associations de circonscription et des commissions », lit-on dans The Hill Times. Toujours selon The Hill Times, la nouvelle constitution « aura 17 pages au lieu des 77 pages actuelles ».

Après son adoption le 28 mai, certaines modifications vont entrer en vigueur immédiatement, d'autres d'ici à la fin de 2016 à mesure que le Conseil national adopte de nouveaux règlements, et d'autres le 1er janvier 2017.

Selon le Parti libéral du Canada, il s'agit de construire un nouveau mouvement libéral par le renouvellement et la consultation. Dans le même temps, les changements constitutionnels sont publicisés sous le slogan : « Un parti, un objectif : moderniser notre mouvement pour gagner en 2019 ».

Selon le Parti libéral du Canada, son nouveau projet constitutionnel « unit le parti sous une constitution et un Conseil national uniques, tout en maintenant et en garantissant la représentation des régions ». Ainsi, il « fait des associations de circonscription (ADC) l'unité centrale de mobilisation dans les communautés, et permet au parti d'offrir une assistance aux ADC sans devoir suivre 338 constitutions différentes et différentes règles de financement » et « fait en sorte que les conseils régionaux puissent se consacrer à leur mandat principal, soit de travailler avec les ADC pour se préparer aux élections et mobiliser la population, ainsi que participer à l'élaboration des politiques ».

Ce projet « maintient intacte la composition actuelle du Conseil national ; les fonctions de président des politiques et de secrétaire aux adhésions sont renommées respectivement secrétaire aux politiques et secrétaire du parti ; élimine les structures du parti tombées en désuétude ou ne remplissant plus leur fonction initiale ; élimine la structure juridique mixte en place dans les provinces de l'Atlantique (laquelle présentait des difficultés juridiques) et maintient le statu quo sur les plans de la dotation, de l'organisation et de la coopération dans ces provinces, car celui-ci fonctionne bien ; maintient en grande partie intactes les règles actuelles en matière de leadership ouvert, lesquelles ont permis d'obtenir l'appui de plus de 300 000 sympathisantes et sympathisants lors de la course à la chefferie libérale en 2012 et 2013 ».

Cependant, malgré la prétention de l'appareil central du Parti libéral que le projet de constitution a été largement discuté et a reçu l'approbation de la majorité des membres, la chose a provoqué la controverse. Tom Addison, président de l'association de la circonscription ontarienne de Kingston, a déclaré que ce projet constitutionnel visait à centraliser le pouvoir « au sein d'un cercle restreint autour du chef ».

Selon un article du Hill Times, Addison a dit que « les membres de base n'ont jamais été consultés au cours du processus de rédaction de cette constitution ». Il a dit que « le parti a envoyé un sondage pour connaître leur opinion alors que le processus de rédaction était déjà terminé. Et même après que ce sondage ait été envoyé, moins de 10 % des membres l'ont reçu et plusieurs présidents d'associations ne l'ont pas reçu. Deux autres présidents d'associations de la circonscription qui ont parlé au Hill Times sous le couvert de l'anonymat ont confirmé qu'un nombre important de membres et de cadres d'associations de circonscription n'avaient jamais reçu le sondage et étaient insatisfaits du processus de consultation ».

Ce qu'on entend par consultation et ses modalités est au coeur des préoccupations exprimées au sujet de la nouvelle constitution. Le site web de Tom Addison, Liberal Members Matter, vise à rallier le vote des opposants au projet de constitution :

- « Moins de 10 pour cent des membres ont reçu le sondage en premier lieu, et très peu d'entre eux ont répondu. Parmi ceux qui l'ont reçu, la majorité pouvait voir qu'il n'y avait rien d'équilibré dans ce sondage, il a été créé dans le but de parvenir à un résultat unique. Un député libéral de longue date, qui se trouve avoir passé toute sa carrière professionnelle avec une des firmes de sondage d'opinion publique importantes du Canada aurait dit : 'Si un de mes stagiaires m'avait amené un sondage comme celui-ci, il aurait été viré immédiatement.' »

- « Le Parti libéral a prétendu beaucoup de choses au sujet du récent sondage envoyé aux membres. Lors d'une conférence téléphonique nationale, la présidente nationale du PLC a dit qu'il y a eu deux sondages. Les sondages à eux deux ont obtenu environ 2000 réponses. Avec une participation de moins de 5 % du membership national et de moins de 0,5 % des membres 'supporters ', le PLC considère qu'il s'agit d'une consultation. »

La promotion que le directeur des Communications du Parti libéral a fait du processus comme étant légitime semble appuyer les accusations à l'effet que les résultats du sondage ne montrent pas qu'il y ait eu discussion sur les changements proposés. Il a dit au Hill Times que « plus de 2000 libéraux ont participé au sondage. Il a dit que 98 % des participants au sondage ont dit appuyer la modernisation du parti, 91 % ont dit que le parti devrait avoir une seule constitution comme les autres partis, 96 % ont dit vouloir que le parti soit plus ouvert et 99 % ont dit vouloir que le processus de développement des politiques soit plus innovateur et ouvert. »

Il a ajouté que les délégués « auront l'occasion au congrès, comme ils l'ont eue ces derniers mois, de donner leur opinion et c'est là un des objectifs importants du congrès... La valeur du processus démocratique au sein du Parti libéral se voit à ces discussions, et à la recherche continuelle de comment le parti peut améliorer son engagement envers les Canadiens, être plus ouvert à leurs idées et à leur engagement, et je sais que ce congrès va accorder une grande importance à cette question. »

Ce qu'ils ont dit

Voici le texte que propose le Parti libéral sous le slogan : « Un parti , un objectif : moderniser notre mouvement pour gagner en 2019 ».

Bâtir un nouveau mouvement libéral : renouvellement et consultation

Au début de l'année, Justin Trudeau a demandé à la présidente du PLC, Anna Gainey, ainsi qu'aux conseillères et conseillers constitutionnels du PLC de diriger un groupe de travail chargé de définir les modifications constitutionnelles qui seront présentées au congrès de Winnipeg en mai prochain.

Mis sur pied dans le but de réinventer le parti de A à Z, le groupe de travail avait comme mandat de créer un parti plus ouvert et accessible, de moderniser le parti à l'image du 21e siècle et de créer un parti uni régi par une seule constitution pour ainsi éliminer les obstacles nés des désaccords passés.

Le groupe du travail a sollicité directement les idées des membres et des sympathisantes et sympathisants au parti. De plus, 2 116 libéraux ont répondu à un sondage d'opinion en ligne, et 1 279 d'entre eux ont fourni des commentaires et des suggestions par écrit.[...]

Le travail accompli en 2016 s'inscrit dans le cadre d'une série de consultations approfondies menées au cours de la dernière décennie auprès des membres du parti. Ces consultations ont inspiré le groupe de travail de 2016 et ont déjà débouché sur des réformes importantes comme la création d'une nouvelle catégorie de sympathisants lors de la course à la chefferie de 2012-2013.

Voici quelques-unes des consultations menées dans le passé :

- Groupe d'étude du Ruban rouge (2006) Rapport de 30 pages ; Justin Trudeau présidait le groupe de travail axé sur la participation des jeunes

- Comité spécial sur le renouveau du parti (2009) Rapport de 46 pages

- Commission du changement (2009) Rapport de 39 pages et rapport de suivi de 17 pages deux ans plus tard

- Consultations de 2011 ayant débouché sur la création d'une nouvelle catégorie de sympathisants, Document d'information « Bâtir un Parti libéral moderne » de 79 pages.

Le site web « Liberal Members Matter »

Depuis que cette constitution omnibus a été dévoilée aux membres, je me suis demandé quel ordre du jour elle servait. La direction du Parti aime employer des termes comme « modernisation », mais tout leader expérimenté sait que c'est un mot politique passe-partout qui ne veut rien dire. Qu'elle soit une entité corporative ou un parti politique, une organisation n'entreprend pas sans raison une restructuration massive du pouvoir et du contrôle. Lors des discussions qui se sont tenues entre un grand nombre de libéraux à l'échelle du pays, j'ai souvent posé la question : « Pourquoi font-ils cela ? Quel est l'ordre du jour réel ? Il semble qu'un de mes collègues libéraux ait eu une idée de quoi il s'agit.

Avons-nous des preuves ou bien sommes-nous des théoriciens de la conspiration ? Nous avons tous l'avenir du parti à coeur alors mieux vaut faire preuve de patience. La direction est déterminée à imposer coûte que coûte une nouvelle constitution au parti. Que les membres l'appuient ou pas. Ce document déplace l'essentiel du contrôle du parti dans les mains de sa direction. Le chef ou les gens qu'il a nommés auront dans leurs mains le contrôle ultime du parti. Ce que signifie être un libéral, les valeurs et les principes, tout cela va disparaître. Une entité non élue aura l'autorité ultime sur le parti, et même le membership lors d'un Congrès peut être renversé par le Comité permanent d'appel.

La question qui se pose est quelle est la signification de tout cela ?

Une fois le contrôle aux mains de quelques personnes triées sur le volet, les règles peuvent être changées par le Conseil national d'administration sans que les membres ne puissent abroger ce changement avant deux ans ; une entité non élue possède le pouvoir de décision ultime sur toutes les affaires qui concernent le parti. Les principes qui nous guident disparaissent, ce que veut dire être un libéral au Canada disparaît et le contrôle ou le mot à dire à la base sont affaiblis ou éliminés.

Cela ressemble à un parti qui est parfaitement positionné en vue d'une fusion. Avec les Verts ? Le NPD ? Qui sait ? Cependant, une fois ces droits embêtants des membres disparus, la direction du parti aura le champ libre pour refaire notre parti à son image.

Une membre du parti de Calgary et ancienne candidate libérale, Jennifer Pollock

Une constitution n'est pas un document promotionnel. L'approbation n'est pas quelque chose qu'on laisse filer par la bande, surtout quand les conséquences d'une ratification prématurée vont avoir un impact négatif sur la culture du Parti libéral et la démocratie au Canada.

Une constitution doit déterminer nos valeurs, nos droits et nos obligations de manière générale. Les règlements doivent aller plus loin et fournir des détails qui doivent être conformes aux définitions générales contenues dans la constitution. Je ne peux donc pas appuyer une constitution qui n'établit pas les définitions qui sont requises puis déclare que ceux dont la tâche est de mettre en oeuvre la constitution pourront définir les valeurs à leur guise et définir qui a quelles obligations envers les membres.

La constitution qui est proposée est incomplète. Les termes, les valeurs centrales, et les unités du parti ne sont pas définis clairement. Ce ne sont pas les règlements qui doivent déterminer les composantes fondamentales. Ce n'est pas une question de confiance ou d'opinion mais de bonne gouvernance.

Chose de grande importance, un parti politique s'assure de l'inclusion des membres dans la prise de décision au moyen d'une communication ouverte et d'un processus décisionnel transparent reposant sur la meilleure information possible, la présentation de preuves et la science. Rien de tout cela ne s'est produit pendant le court laps de temps qui s'est déroulé depuis la présentation du projet de constitution jusqu'à aujourd'hui, alors que rien de substantiel n'a été mis de l'avant pour traiter des problèmes de processus et de fond que comporte le texte de la constitution. Un projet secret a été entrepris et les membres en ont été informés. On n'a pas pris note de la réaction des membres ni de la quantité des réponses alors qu'il n'y avait pas de place pour les amendements. C'est la communication à un seul sens à son plus fort.

Depuis le début, les promoteurs du projet de constitution ont eu recours à la tromperie et même aux mensonges pour appuyer leurs dires à l'effet qu'une nouvelle constitution de ce genre était nécessaire. On a fait des déclarations inexactes pour faire semblant qu'on répondait aux préoccupations qui avaient été soulevées. Tous les autres partis politiques canadiens ont de multiples constitutions. Éliminer entièrement les valeurs et les principes directeurs d'une constitution ne la rationalise pas, elle la vide de sa substance. Nulle part dans la constitution proposée ne trouve-t-on la mention que les Associations de circonscription (ADC) vont être les organisations principales au moyen desquelles les membres vont exercer leurs droits, comme c'est pourtant écrit dans les constitutions du Parti conservateur, du NPD et du Parti vert. Nulle part y lit-on que les comptes de banques, les dépenses et les rapports financiers des ADC sont la responsabilité des ADC ou que celles-ci peuvent maintenir ces responsabilités fondamentales, ce qui reflète notre démocratie au niveau local.

La constitution appartient aux membres et les règlements appartiennent à ceux qui doivent accomplir le travail de l'organisation. Le processus par lequel une constitution est développée doit mobiliser les membres. Le parti ne l'a pas fait. [...]

En plus, je n'appuie pas la tactique du parti de forcer les membres à ratifier la constitution de manière prématurée. On a clairement abusé de la popularité politique pour obtenir l'appui à une constitution qui permet la centralisation et la personnalisation du pouvoir au sein du Parti libéral du Canada. C'est pour cette raison que je n'appuierai pas le projet de constitution, en le défaisant ou en le référant à un comité représentatif ayant le mandat de s'assurer que la prochaine version comprend les éléments et les définitions appropriés et est écrite dans un langage non ambigu qui porte la marque de la participation des membres. Si l'on veut utiliser une approche simplifiée, alors le processus définissant le développement, l'approbation et les amendements aux règlements doit être inclus dans la constitution. On doit utiliser cette période de temps pour à la fois écrire la constitution et les règlements de mise en oeuvre de la nouvelle constitution. [...]

Je n'appuierai pas une constitution mal écrite et incomplète. On ne me forcera pas à être d'accord que la constitution proposée va moderniser le Parti libéral ou attirer plus de membres. Elle ne rendra pas le parti plus ouvert non plus, ni plus unifié ou innovateur. Je ne crois pas que le projet va permettre d'accomplir ces choses ou qu'elles ne peuvent être accomplies dans le cadre de la constitution actuelle.

Je suis en faveur d'une bonne gouvernance. Je crois qu'une constitution qui établit le cadre d'une bonne gouvernance égalise les chances pour quiconque décide de s'engager dans notre parti politique. Le projet de constitution crée un fossé dans la compréhension de ce que signifie participer au Parti libéral du Canada, ce qui va mener à une utilisation du pouvoir et à un abus de pouvoir de la part des dirigeants, des membres et du personnel. Cela va aussi réduire les opportunités de leadership et de développement de la capacité démocratique dans nos communautés à l'échelle du pays. En tant qu'Albertaine, je me vois obligée de dire que cela ne va pas mener à une utilisation des fonds qui est meilleure et plus efficace ni à plus de responsabilité. Ces choses nous tiennent tous à coeur et je pense qu'il en est de même pour les Canadiens. Pour toutes ces raisons, et pour d'autres encore, j'appelle tous les membres du Parti libéral du Canada à défaire le projet de constitution et à inviter les rédacteurs, ou un autre comité plus représentatif, à reprendre le travail avec nos membres à travers le pays.

La journaliste de iPolitics Tasha Kheiriddin

Les libéraux cherchent à se transformer en une entité politique parfaitement adaptée à la période digitalisée d'idées jetables.

Combiné avec la promesse des libéraux pour une réforme électorale, qui remplacerait le scrutin uninominal majoritaire à un tour par la représentation proportionnelle, un scrutin préférentiel ou une combinaison des deux, cela pourrait faire du Parti libéral le Parti ayant la mission de gouverner le Canada à jamais.

Cela revient à transformer votre parti en une page Facebook géante. Vous cliquez « j'aime » et vous faites partie du club.

Pour la génération du millénaire, qui est en ligne nuit et jour, chérit son indépendance et mène une vie de pigiste, c'est la formule parfaite. C'est la politique sans contrainte de temps et d'espace, sans demandes, sans engagement.

C'est exactement ce que Bernie Sanders et Donald Trump essaient de faire avec les partis démocrates et républicains aux États-Unis : transformer ces organisations de partis en mouvements représentés respectivement par Sanders et Trump. Ils veulent élargir la grande tente du parti en faisant appel aux électeurs indépendants qui sont désenchantés du processus politique.

Ce plan libéral d'un parti sans membres va engouffrer les électeurs dans une vaste et amorphe centrifugeuse au profit des libéraux.

Les autres partis seraient eux aussi à risque de tomber sous le contrôle d'intérêts spéciaux.

Les libéraux pourraient s'assurer de devenir le parti dominant de tout gouvernement de coalition, c'est-à-dire de tout gouvernement, puisque les gouvernements de coalition deviendraient la norme avec la représentation proportionnelle. Si le Canada devait commencer à élire des gouvernements fédéraux au moyen du scrutin préférentiel, les libéraux auraient un avantage encore plus marqué : ils pourraient devenir le « deuxième choix naturel » des supporters des autres partis, ce qui serait suffisant pour garantir des gouvernements majoritaires.

Les partis mettent l'accent sur la politique : les élections, le financement, le recrutement des candidats et la gouvernance. Les mouvements mettent l'accent sur les politiques : la création d'idées, la recherche, le débat et la promotion. Ils tendent à se tenir à l'écart l'un de l'autre.

La réforme proposée par les libéraux va faire tomber ces barrières et créer une nouvelle créature : un mouvement dont l'objectif est d'être élu. Moderne ? Pas vraiment. Cela s'appelle du populisme et c'est aussi vieux que la politique elle-même.

Note

1. « Trudeau veut modifier la constitution du PLC pour plus d'ouverture », Joan Bryden, La Presse Canadienne, Ottawa, le 03 avril 2016.

2. Lettre du chef sur les modifications, Justin Trudeau, Chef du Parti libéral du Canada.


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«Plus qu'un mouvement, moins qu'un parti»

Les tentatives de saboter le mouvement ouvrier pour l'empêcher d'atteindre son but


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