Numéro 74 - 30 mai 2016
Controversée nouvelle
constitution du Parti libéral
De quel genre de parti politique les
Canadiens ont-ils besoin pour s'engager dans l'édification
nationale contre l'édification d'empire?
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Controversée
nouvelle
constitution
du
Parti
libéral
• De quel genre
de parti politique les Canadiens ont-ils besoin pour s'engager dans
l'édification nationale contre l'édification d'empire?
• Controversée
nouvelle
constitution
du
Parti libéral
Supplément
«Plus
qu'un
mouvement,
moins
qu'un
parti»
• Les tentatives
de saboter le
mouvement ouvrier pour l'empêcher
d'atteindre son but
Controversée nouvelle constitution
du Parti libéral
De quel genre de parti politique les Canadiens ont-ils
besoin pour s'engager dans l'édification nationale contre
l'édification d'empire?
Le Parti libéral du Canada s'est donné
une nouvelle constitution à son congrès biennal tenu
à Winnipeg du 26 au 28 mai. Le Parti communiste du
Canada (marxiste-léniniste) croit que tous ceux et celles qui se
préoccupent de l'état de la politique au Canada
aujourd'hui doivent prendre le temps d'étudier ce que propose la
direction du Parti libéral sur ce front.
Le PCC(M-L) est d'avis que
l'effort des libéraux pour fusionner mouvement et organisation
est une forme d'antipolitique qui mène à une
concentration encore plus grande du pouvoir politique et à une
plus grande marginalisation du peuple. La manière frauduleuse
par laquelle on s'y est pris pour imposer cette nouvelle constitution
et l'échec à
donner de la légitimité à la consultation qui a eu
lieu ne sont pas les seuls aspects inquiétants de cette nouvelle
aventure libérale. Au coeur du problème il y a la
question de quel genre de parti politique le peuple a besoin. C'est une
question essentielle pour le succès du mouvement du peuple pour
s'investir du pouvoir de décider.
On ne résoudra pas la profonde crise du
système de démocratie représentative
dominée par les partis en prétendant tout simplement que
les partis de masse, les partis dits « ouverts », les
« grandes tentes », représentent le peuple de
facto. Le mot « masse » lorsque joint à parti
politique fait-il référence uniquement au nombre, ou
fait-il référence à une qualité
particulière ? La
qualité en question n'a-t-elle pas à voir avec qui exerce
le pouvoir politique et à quelles fins ? Peut-on escamoter
la question en créant quelque chose de nouveau pour ensuite
prétendre que parce que c'est nouveau, c'est ouvert, et parce
que c'est ouvert, c'est démocratique ? En fait, les
libéraux montrent eux-mêmes la fraude de leur
prétention de modernisation du parti lorsqu'ils déclarent
que le but est de gagner la prochaine élection
fédérale.
Les Canadiens sont très préoccupés
par la domination du processus politique par les partis de
l'establishment. Ces partis fonctionnent d'une façon bien
précise et sont plongés dans une grave crise
précisément parce qu'ils préservent le
privilège, servent une tout petite minorité riche et ont
pour mission de maintenir le peuple apolitique,
marginalisé et écarté du pouvoir.
Les partis politiques ne sont pas le problème
comme tels, le problème est la crise du projet
d'édification nationale de la bourgeoisie et de
l'État-nation bourgeois qui se désintègre dans un
monde où les plus grands monopoles établissent leurs
intérêts comme suprêmes sur une base supranationale.
La prétention qu'on peut faire de la politique
sans partis politiques, pour que les politiques adoptées soient
celles du peuple plutôt que celles imposées d'en haut,
n'est qu'une tentative de cacher ce que manigancent les partis de
l'establishment.
La question de quel genre de parti politique a besoin
un corps politique moderne et une société qui requiert
que le peuple soit investi du pouvoir souverain pour pouvoir progresser
et, en définitive, la question du pouvoir politique
lui-même,
sont ce dont il faut discuter.
Dans ce numéro du Marxiste-Léniniste
nous présentons un article d'information sur la nouvelle
constitution du Parti libéral et un article intitulé
« 'Plus qu'un mouvement, moins qu'un parti' : les tentatives
de saboter le mouvement ouvrier pour l'empêcher d'atteindre son
but ». Celui-ci a d'abord été
présenté par le Comité
central du PCC(M-L) en décembre 2007 lors d'un
séminaire national sur l'évolution des partis politiques
au Canada, tenu dans le cadre des préparatifs pour le VIIIe
Congrès du Parti qui a eu lieu en août 2008. Le
séminaire a réuni des activistes du Parti de partout au
Canada et le texte qui y a été présenté a
circulé parmi tous les
membres du Parti en juin 2008.
Controversée nouvelle constitution du Parti
libéral
Un des points au programme du Congrès biennal du
Parti libéral du Canada, qui s'est tenu à Winnipeg
du 26 au 28 mai, était l'adoption d'une nouvelle
constitution du
parti. LML publie l'article
qui suit, écrit avant l'adoption de la constitution à
Winnipeg, qu'il juge utile pour montrer aux lecteurs le processus
frauduleux choisi par le Parti libéral pour préparer
l'ébauche de constitution et la controverse au sein du parti
même à propose de cette façon de procéder.
* * *
Avant le congrès de Winnipeg, le directeur
principal des communications du Parti
libéral, Braeden Caley, a déclaré au journal The
Hill
Times que le projet de constitution vise à «
moderniser,
renforcer et ouvrir » le parti. La présidente du
Parti libéral du Canada, Anna Gainey, a expliqué :
« Je crois qu'en continuant de nous ouvrir, de nous moderniser et
d'avoir davantage un mouvement qu'un parti politique traditionnel, il
s'agit d'une progression naturelle de cela ».[1] Le chef
du parti et premier ministre Justin Trudeau a dit : « Les
Canadiennes et les Canadiens s'attendent à ce que nous
continuions à bâtir et à moderniser notre mouvement
et à rendre celui-ci plus ouvert. Nous ne les laisserons pas
tomber ».[2]
Dans plusieurs articles, il était indiqué
que le projet de nouvelle constitution du Parti libéral serait
voté le 28 mai, le dernier jour du Congrès biennal
libéral de Winnipeg. Tous les délégués
présents auraient droit de vote. Pour être adopté,
le projet de nouvelle constitution libérale devait recueillir
l'appui d'au moins les deux tiers des
délégués ayant droit de vote et présents
à l'assemblée plénière.
« Actuellement, le Parti libéral a plus
de 18 constitutions, notamment la constitution du parti
fédéral, les constitutions des ailes
fédérales du parti dans toutes les provinces et les
territoires et celles des commissions comme la Commission des Jeunes
libéraux du Canada, la Commission libérale
féminine nationale, la Commission des
peuples autochtones, la Commission des aînés
libéraux », lit-on dans The Hill Times.
« La constitution proposée rend
l'adhésion gratuite pour tout Canadien qui souhaite s'inscrire,
elle met à jour la structure du parti et apporte des
modifications importantes à la gestion financière et aux
mécanismes de gouvernance des associations de circonscription et
des commissions. Si la constitution du parti proposée est
adoptée cette
semaine, le parti aura une seule constitution ... et le Conseil
national rédigera des règlements qui vont régir
les opérations du parti, de ses ailes fédérales
dans les provinces et les territoires et des associations de
circonscription et des commissions », lit-on dans The
Hill Times. Toujours selon The Hill Times, la nouvelle
constitution « aura 17 pages au lieu des 77 pages
actuelles ».
Après son adoption le 28 mai, certaines
modifications vont entrer en vigueur immédiatement, d'autres
d'ici à la fin de 2016 à mesure que le Conseil
national adopte de nouveaux règlements, et d'autres le 1er
janvier 2017.
Selon le Parti libéral du Canada, il s'agit de
construire un nouveau mouvement libéral par le renouvellement et
la consultation. Dans le même temps, les changements
constitutionnels sont publicisés sous le slogan : «
Un parti, un objectif : moderniser notre mouvement pour gagner
en 2019 ».
Selon le Parti libéral du Canada, son nouveau
projet constitutionnel « unit le parti sous une constitution et
un Conseil national uniques, tout en maintenant et en garantissant la
représentation des régions ». Ainsi, il
« fait des associations de circonscription (ADC) l'unité
centrale de mobilisation dans les communautés, et permet au
parti
d'offrir une assistance aux ADC sans devoir suivre 338
constitutions différentes et différentes règles de
financement » et « fait en sorte que les conseils
régionaux puissent se consacrer à leur mandat principal,
soit de travailler avec les ADC pour se préparer aux
élections et mobiliser la population, ainsi que participer
à l'élaboration des
politiques ».
Ce projet « maintient intacte la composition
actuelle du Conseil national ; les fonctions de président
des politiques et de secrétaire aux adhésions sont
renommées respectivement secrétaire aux politiques et
secrétaire du parti ; élimine les structures du
parti tombées en désuétude ou ne remplissant plus
leur fonction initiale ;
élimine la structure juridique mixte en place dans les provinces
de l'Atlantique (laquelle présentait des difficultés
juridiques) et maintient le statu quo sur les plans de la dotation, de
l'organisation et de la coopération dans ces provinces, car
celui-ci fonctionne bien ; maintient en grande partie intactes les
règles actuelles en matière de
leadership ouvert, lesquelles ont permis d'obtenir l'appui de plus
de 300 000 sympathisantes et sympathisants lors de la course
à la chefferie libérale en 2012
et 2013 ».
Cependant, malgré la prétention de
l'appareil central du Parti libéral que le projet de
constitution a été largement discuté et a
reçu l'approbation de la majorité des membres,
la chose a provoqué la controverse. Tom Addison,
président de l'association de la circonscription ontarienne de
Kingston, a déclaré que ce projet constitutionnel
visait à centraliser le pouvoir « au sein d'un cercle
restreint autour du chef ».
Selon un article du Hill Times, Addison a
dit que « les membres de base n'ont jamais
été consultés au cours du processus de
rédaction de cette constitution ». Il a dit que
« le parti a envoyé un sondage pour connaître leur
opinion alors que le processus de rédaction était
déjà terminé. Et même après que ce
sondage ait été
envoyé, moins de 10 % des membres l'ont reçu
et plusieurs présidents d'associations ne l'ont pas reçu.
Deux autres présidents d'associations de la circonscription qui
ont parlé au Hill Times sous le couvert de l'anonymat
ont
confirmé qu'un nombre important de membres et de cadres
d'associations de circonscription n'avaient jamais
reçu le sondage et étaient insatisfaits du processus de
consultation ».
Ce qu'on entend par
consultation et ses modalités est au coeur des
préoccupations exprimées au sujet de la nouvelle
constitution. Le site web de Tom Addison, Liberal Members Matter,
vise
à
rallier
le
vote
des
opposants au projet de
constitution :
- « Moins de 10 pour cent des membres ont
reçu le sondage en premier lieu, et très peu d'entre eux
ont répondu. Parmi ceux qui l'ont reçu, la
majorité pouvait voir qu'il n'y avait rien
d'équilibré dans ce sondage, il a été
créé dans le but de parvenir à un résultat
unique. Un député libéral de longue date, qui se
trouve avoir passé toute
sa carrière professionnelle avec une des firmes de sondage
d'opinion publique importantes du Canada aurait dit : 'Si un
de mes stagiaires m'avait amené un sondage comme celui-ci, il
aurait été viré immédiatement.' »
- « Le Parti libéral a prétendu
beaucoup de choses au sujet du récent sondage envoyé aux
membres. Lors d'une conférence téléphonique
nationale, la présidente nationale du PLC a dit qu'il y a eu
deux sondages. Les sondages à eux deux ont obtenu
environ 2000 réponses. Avec une participation de moins
de 5 % du
membership national et de moins de 0,5 % des membres
'supporters ', le PLC considère qu'il s'agit d'une
consultation. »
La promotion que le directeur des Communications du
Parti libéral a fait du processus comme
étant légitime semble appuyer les accusations à
l'effet que les résultats du sondage ne montrent pas qu'il y ait
eu discussion sur les changements proposés. Il a dit au Hill
Times que « plus de 2000 libéraux ont
participé
au sondage. Il a dit que 98 % des participants au sondage ont
dit appuyer la modernisation du parti, 91 % ont dit que le
parti devrait avoir une seule constitution comme les autres
partis, 96 % ont dit vouloir que le parti soit plus ouvert
et 99 % ont dit vouloir que le processus de
développement des
politiques soit plus innovateur et ouvert. »
Il a ajouté que les
délégués « auront l'occasion au
congrès, comme ils l'ont eue ces derniers mois, de donner leur
opinion et c'est là un des objectifs importants du
congrès... La valeur du processus démocratique au sein du
Parti libéral se voit à ces discussions, et à la
recherche continuelle de comment le parti peut améliorer son
engagement
envers les Canadiens, être plus ouvert à leurs
idées et à leur engagement, et je sais que ce
congrès va accorder une grande importance à cette
question. »
Ce qu'ils ont dit
Voici le texte que propose le Parti libéral
sous le slogan : « Un parti , un objectif : moderniser
notre mouvement pour gagner en 2019 ».
Bâtir un nouveau mouvement
libéral : renouvellement et consultation
Au début de l'année, Justin
Trudeau a demandé à la présidente du PLC, Anna
Gainey, ainsi qu'aux conseillères et conseillers
constitutionnels du PLC de diriger un groupe de travail chargé
de définir les modifications constitutionnelles qui seront
présentées au congrès de Winnipeg en mai prochain.
Mis sur pied dans le but de réinventer le parti
de A à Z, le groupe de travail avait comme mandat de
créer un parti plus ouvert et accessible, de moderniser le parti
à l'image du 21e siècle et de créer un parti
uni régi par une seule constitution pour ainsi éliminer
les obstacles nés des désaccords passés.
Le groupe du travail a sollicité directement les
idées des membres et des sympathisantes et sympathisants au
parti. De plus, 2 116 libéraux ont répondu
à un sondage d'opinion en ligne, et 1 279 d'entre eux
ont fourni des commentaires et des suggestions par écrit.[...]
Le travail accompli en 2016 s'inscrit dans le
cadre d'une série de consultations approfondies menées au
cours de la dernière décennie auprès des membres
du parti. Ces consultations ont inspiré le groupe de travail
de 2016 et ont déjà débouché sur des
réformes importantes comme la création d'une nouvelle
catégorie de
sympathisants lors de la course à la chefferie de 2012-2013.
Voici quelques-unes des consultations menées
dans le passé :
- Groupe d'étude du Ruban rouge (2006) Rapport
de 30 pages ; Justin Trudeau présidait le groupe de
travail axé sur la participation des jeunes
- Comité spécial sur le renouveau du
parti (2009) Rapport de 46 pages
- Commission du changement (2009) Rapport de 39
pages et rapport de suivi de 17 pages deux ans plus tard
- Consultations de 2011 ayant
débouché sur la création d'une nouvelle
catégorie de sympathisants, Document d'information «
Bâtir un Parti libéral moderne » de 79
pages.
Le site web « Liberal Members
Matter »
Depuis que cette constitution omnibus a
été dévoilée aux membres, je me suis
demandé quel ordre du jour elle servait. La direction du Parti
aime employer des termes comme « modernisation », mais
tout leader expérimenté sait que c'est un mot politique
passe-partout qui ne veut rien dire. Qu'elle soit une entité
corporative ou un
parti politique, une organisation n'entreprend pas sans raison une
restructuration massive du pouvoir et du contrôle. Lors des
discussions qui se sont tenues entre un grand nombre de libéraux
à l'échelle du pays, j'ai souvent posé la
question : « Pourquoi font-ils cela ? Quel est l'ordre
du jour réel ? Il semble qu'un de mes
collègues libéraux ait eu une idée de quoi il
s'agit.
Avons-nous des preuves ou bien sommes-nous des
théoriciens de la conspiration ? Nous avons tous l'avenir
du parti à coeur alors mieux vaut faire preuve de patience. La
direction est déterminée à imposer coûte que
coûte une nouvelle constitution au parti. Que les membres
l'appuient ou pas. Ce document déplace l'essentiel du
contrôle
du parti dans les mains de sa direction. Le chef ou les gens qu'il a
nommés auront dans leurs mains le contrôle ultime du
parti. Ce que signifie être un libéral, les valeurs et les
principes, tout cela va disparaître. Une entité non
élue aura l'autorité ultime sur le parti, et même
le membership lors d'un Congrès peut être renversé
par le Comité
permanent d'appel.
La question qui se pose est quelle est la signification
de tout cela ?
Une fois le contrôle aux mains de quelques
personnes triées sur le volet, les règles peuvent
être changées par le Conseil national d'administration
sans que les membres ne puissent abroger ce changement avant deux
ans ; une entité non élue possède le pouvoir
de décision ultime sur toutes les affaires qui concernent le
parti. Les principes
qui nous guident disparaissent, ce que veut dire être un
libéral au Canada disparaît et le contrôle ou le mot
à dire à la base sont affaiblis ou éliminés.
Cela ressemble à un parti qui est parfaitement
positionné en vue d'une fusion. Avec les Verts ? Le
NPD ? Qui sait ? Cependant, une fois ces droits
embêtants des membres disparus, la direction du parti aura le
champ libre pour refaire notre parti à son image.
Une membre du parti de Calgary et ancienne
candidate libérale, Jennifer Pollock
Une constitution n'est pas un document
promotionnel. L'approbation n'est pas quelque chose qu'on laisse filer
par la bande, surtout quand les conséquences d'une ratification
prématurée vont avoir un impact négatif sur la
culture du Parti libéral et la démocratie au Canada.
Une constitution doit déterminer nos valeurs,
nos droits et nos obligations de manière générale.
Les règlements doivent aller plus loin et fournir des
détails qui doivent être conformes aux définitions
générales contenues dans la constitution. Je ne peux donc
pas appuyer une constitution qui n'établit pas les
définitions qui sont requises puis
déclare que ceux dont la tâche est de mettre en oeuvre la
constitution pourront définir les valeurs à leur guise et
définir qui a quelles obligations envers les membres.
La constitution qui est proposée est
incomplète. Les termes, les valeurs centrales, et les
unités du parti ne sont pas définis clairement. Ce ne
sont pas les règlements qui doivent déterminer les
composantes fondamentales. Ce n'est pas une question de confiance ou
d'opinion mais de bonne gouvernance.
Chose de grande importance, un parti politique s'assure
de l'inclusion des membres dans la prise de décision au moyen
d'une communication ouverte et d'un processus décisionnel
transparent reposant sur la meilleure information possible, la
présentation de preuves et la science. Rien de tout cela ne
s'est produit pendant le court laps de temps
qui s'est déroulé depuis la présentation du projet
de constitution jusqu'à aujourd'hui, alors que rien de
substantiel n'a été mis de l'avant pour traiter des
problèmes de processus et de fond que comporte le texte de la
constitution. Un projet secret a été entrepris et les
membres en ont été informés. On n'a pas pris note
de la réaction des membres ni
de la quantité des réponses alors qu'il n'y avait pas de
place pour les amendements. C'est la communication à un seul
sens à son plus fort.
Depuis le début, les promoteurs du projet de
constitution ont eu recours à la tromperie et même aux
mensonges pour appuyer leurs dires à l'effet qu'une nouvelle
constitution de ce genre était nécessaire. On a fait des
déclarations inexactes pour faire semblant qu'on
répondait aux préoccupations qui avaient
été soulevées. Tous les autres partis
politiques canadiens ont de multiples constitutions. Éliminer
entièrement les valeurs et les principes directeurs d'une
constitution ne la rationalise pas, elle la vide de sa substance. Nulle
part dans la constitution proposée ne trouve-t-on la mention que
les Associations de circonscription (ADC) vont être les
organisations principales au moyen
desquelles les membres vont exercer leurs droits, comme c'est pourtant
écrit dans les constitutions du Parti conservateur, du NPD et du
Parti vert. Nulle part y lit-on que les comptes de banques, les
dépenses et les rapports financiers des ADC sont la
responsabilité des ADC ou que celles-ci peuvent maintenir ces
responsabilités fondamentales, ce
qui reflète notre démocratie au niveau local.
La constitution appartient aux membres et les
règlements appartiennent à ceux qui doivent accomplir le
travail de l'organisation. Le processus par lequel une constitution est
développée doit mobiliser les membres. Le parti ne l'a
pas fait. [...]
En plus, je n'appuie pas la tactique du parti de forcer
les membres à ratifier la constitution de manière
prématurée. On a clairement abusé de la
popularité politique pour obtenir l'appui à une
constitution qui permet la centralisation et la personnalisation du
pouvoir au sein du Parti libéral du Canada. C'est pour cette
raison que je n'appuierai
pas le projet de constitution, en le défaisant ou en le
référant à un comité représentatif
ayant le mandat de s'assurer que la prochaine version comprend les
éléments et les définitions appropriés et
est écrite dans un langage non ambigu qui porte la marque de la
participation des membres. Si l'on veut utiliser une approche
simplifiée, alors le
processus définissant le développement, l'approbation et
les amendements aux règlements doit être inclus dans la
constitution. On doit utiliser cette période de temps pour
à la fois écrire la constitution et les règlements
de mise en oeuvre de la nouvelle constitution. [...]
Je n'appuierai pas une constitution mal écrite
et incomplète. On ne me forcera pas à être d'accord
que la constitution proposée va moderniser le Parti
libéral ou attirer plus de membres. Elle ne rendra pas le parti
plus ouvert non plus, ni plus unifié ou innovateur. Je ne crois
pas que le projet va permettre d'accomplir ces choses ou qu'elles ne
peuvent être accomplies dans le cadre de la constitution actuelle.
Je suis en faveur d'une bonne gouvernance. Je crois
qu'une constitution qui établit le cadre d'une bonne gouvernance
égalise les chances pour quiconque décide de s'engager
dans notre parti politique. Le projet de constitution crée un
fossé dans la compréhension de ce que signifie participer
au Parti libéral du Canada, ce qui va mener à une
utilisation du pouvoir et à un abus de pouvoir de la part des
dirigeants, des membres et du personnel. Cela va aussi réduire
les opportunités de leadership et de développement de la
capacité démocratique dans nos communautés
à l'échelle du pays. En tant qu'Albertaine, je me vois
obligée de dire que cela ne va pas mener à une
utilisation des fonds
qui est meilleure et plus efficace ni à plus de
responsabilité. Ces choses nous tiennent tous à coeur et
je pense qu'il en est de même pour les Canadiens. Pour toutes ces
raisons, et pour d'autres encore, j'appelle tous les membres du Parti
libéral du Canada à défaire le projet de
constitution et à inviter les rédacteurs, ou un autre
comité plus
représentatif, à reprendre le travail avec nos membres
à travers le pays.
La journaliste de iPolitics Tasha Kheiriddin
Les libéraux cherchent à se transformer
en une entité politique parfaitement adaptée à la
période digitalisée d'idées jetables.
Combiné avec la promesse des libéraux
pour une réforme électorale, qui remplacerait le scrutin
uninominal majoritaire à un tour par la représentation
proportionnelle, un scrutin préférentiel ou une
combinaison des deux, cela pourrait faire du Parti libéral le
Parti ayant la mission de gouverner le Canada à jamais.
Cela revient à transformer votre parti en une
page Facebook géante. Vous cliquez « j'aime »
et vous faites partie du club.
Pour la génération du millénaire,
qui est en ligne nuit et jour, chérit son indépendance et
mène une vie de pigiste, c'est la formule parfaite. C'est la
politique sans contrainte de temps et d'espace, sans demandes, sans
engagement.
C'est exactement ce que Bernie Sanders et Donald Trump
essaient de faire avec les partis démocrates et
républicains aux États-Unis : transformer ces
organisations de partis en mouvements représentés
respectivement par Sanders et Trump. Ils veulent élargir la
grande tente du parti en faisant appel aux électeurs
indépendants qui sont
désenchantés du processus politique.
Ce plan libéral d'un parti sans membres va
engouffrer les électeurs dans une vaste et amorphe centrifugeuse
au profit des libéraux.
Les autres partis seraient eux aussi à risque de
tomber sous le contrôle d'intérêts spéciaux.
Les libéraux pourraient s'assurer de devenir le
parti dominant de tout gouvernement de coalition, c'est-à-dire
de tout gouvernement, puisque les gouvernements de coalition
deviendraient la norme avec la représentation proportionnelle.
Si le Canada devait commencer à élire des gouvernements
fédéraux au moyen du scrutin préférentiel,
les
libéraux auraient un avantage encore plus marqué :
ils pourraient devenir le « deuxième choix
naturel » des supporters des autres partis, ce qui serait
suffisant pour garantir des gouvernements majoritaires.
Les partis mettent l'accent sur la politique : les
élections, le financement, le recrutement des candidats et la
gouvernance. Les mouvements mettent l'accent sur les politiques :
la création d'idées, la recherche, le débat et la
promotion. Ils tendent à se tenir à l'écart l'un
de l'autre.
La réforme proposée par les
libéraux va faire tomber ces barrières et créer
une nouvelle créature : un mouvement dont l'objectif est
d'être élu. Moderne ? Pas vraiment. Cela s'appelle du
populisme et c'est aussi vieux que la politique elle-même.
Note
1. « Trudeau veut modifier
la constitution
du PLC pour plus d'ouverture », Joan Bryden, La Presse
Canadienne, Ottawa, le 03 avril 2016.
2. Lettre du chef sur les
modifications, Justin
Trudeau, Chef du Parti libéral du Canada.
Supplément
«Plus
qu'un
mouvement,
moins
qu'un
parti»
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Courriel: redaction@cpcml.ca
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