Les mesures pour établir un nouvel ordre mondial en opposition à l'ordre « fondé sur des règles » des États-Unis
- Pauline Easton -
Les peuples du monde exigent des actions lors de
la COP-26 à Glasgow, le 5 novembre 2021.
À la fin de l'année 2021, l'incapacité des
Nations unies à exercer une autorité sur les
relations entre les pays, sur la base des
principes consacrés par la Charte des Nations
unies, a été
un sujet de grave préoccupation pour les peuples
du monde. Il est beaucoup question de « relations
stratégiques » et de « partenariats stratégiques »
et il y a beaucoup d'interprétations du
type de nouvel ordre mondial dont le monde a
besoin.
Tout le monde propose des formulations
différentes autour des partenariats stratégiques,
des relations et de la stratégie. Selon certains,
l'« ordre international fondé sur des règles » des
États-Unis est la base d'un « paradigme
stratégique » qui structure la « pensée
stratégique ». Une telle pensée est différente de
celle qui consiste à avoir un objectif de
politique. Pour leur
part, la Chine et la Russie dans leurs
déclarations sur le partenariat stratégique et
l'Union européenne (UE)dans ses déclarations sur
l'« autonomie stratégique » parlent de stratégie
par
rapport à un certain type d'ordre mondial. Les
Chinois et les Russes affirment qu'il s'agit d'une
« nouvelle ère », mais la manière dont elle est
définie n'est pas encore claire.
Le partenariat stratégique Chine-Russie
Alors que les États-Unis et des pays comme le
Canada parlent sans cesse de l'établissement d'un
« ordre international fondé sur des règles », dans
lequel les États-Unis fixent les règles
et décident qui les enfreint et qui ne les
enfreint pas, un développement important en 2021 a
été l'annonce par la Chine et la Russie de la
prolongation du traité d'amitié Chine-Russie qui
soutient l'état de droit international tel qu'il
est inscrit dans la Charte des Nations unies[1].
Le traité actuel de cinq ans est la continuation
du traité d'amitié de 20 ans qu'ils ont signé en
2001. Ce traité expose leur notion de «
partenariat stratégique » qui, selon eux, est
fondée
sur la Charte des Nations unies et le droit
international. Comme l'indique un reportage, leur
amitié vise à « développer un partenariat
stratégique global de coordination pour une
nouvelle
ère, dans le but de porter les liens bilatéraux à
un niveau supérieur et de mieux servir les peuples
des deux pays et du monde entier »[2].
La Chine et la Russie disent que les deux pays
développent des relations qui ne seront ni un bloc
militaire ni un bloc économique contre quiconque,
mais se concentrent plutôt sur une «
stratégie d'un nouveau type ». Le traité et les
accords n'ont pas pour but de faire d'eux des
alliés, au sens d'alliés militaires ou politiques
tels qu'ils ont été établis précédemment pendant
la
guerre froide. Le traité et sa prolongation vont
au-delà de cette ancienne façon d'avoir des
relations, disent-ils. Ces relations sont
également très différentes de celles que les
États-Unis
encouragent dans le cadre de leur « ordre
international fondé sur des règles », dans lequel
tout le monde doit se soumettre aux États-Unis en
tant que dirigeant indispensable.
Le président chinois Xi Jinping et le président
russe Vladimir Poutine ont annoncé conjointement
la prolongation du traité de bon voisinage et de
coopération amicale
Chine-Russie, le 28
juin 2021.
L'autonomie stratégique européenne
Pour sa part, l'UE poursuit ce qu'elle appelle «
l'autonomie stratégique européenne ». À l'heure où
la Chine et la Russie s'occupent des
développements en Eurasie, l'UE ne veut pas
être laissée de côté. En même temps, l'autonomie à
laquelle l'UE fait référence n'est pas celle de
l'Allemagne ou de la France, mais celle de l'UE,
ce qui soulève alors le problème de
l'existence de l'OTAN et de ses relations avec de
nombreux pays européens. La conception tente
néanmoins de fournir une rationalisation pour que
l'UE dispose de sa propre force de
défense dans le cadre de la proposition d'établir
un « Concert mondial des puissances », dont
certaines forces aux États-Unis font la promotion.
Ce concert mondial des puissances comprend
l'UE, et non l'Allemagne ou la France, ainsi que
la Russie, la Chine, l'Inde et le Japon[3][4].
Les États-Unis s'inquiètent de la poursuite et du
développement du partenariat entre la Chine et la
Russie d'une manière qui ne correspond pas à leur
propre conception d'un monde
tripolaire, un monde tel que préconisé par
l'ancien président des États-Unis, Donald Trump,
dans lequel les États-Unis doivent jouer la Russie
et la Chine l'une contre l'autre tout en
établissant les règles auxquelles tout le monde
doit se soumettre. Malgré la promotion de l'«
ordre international fondé sur des règles » des
États-Unis, il existe une confusion et une
incohérence considérables à tous les niveaux du
gouvernement des États-Unis en matière de
politique étrangère.
Le rôle du secret
Ce que l'on sait, c'est que l'élaboration de leur
politique repose sur le secret. Les affirmations
concernant la cyberguerre et les cyberattaques,
par exemple, et le fait que les États-Unis
les attribuent à la Russie ou à la Chine, ne
peuvent être confirmés par des preuves. Il n'est
pas possible d'attribuer des attaques spécifiques
à la Chine, par exemple, étant donné la facilité
avec laquelle on peut faire croire que les
attaques viennent d'un certain endroit ou qu'elles
sont lancées par telle ou telle force spécifique
alors qu'il n'y a aucune preuve de cela, comme
l'ont montré divers exemples. Les États-Unis ne
cessent de répéter que cela « ressemble » à
quelque chose que Poutine ou les Chinois feraient,
qu'il « semble » que ce soit eux qui le
fassent, etc. Il n'y a aucune preuve à l'appui de
ces affirmations.
Les États-Unis tentent d'imposer une norme pour
ce qui est et n'est pas la cyberguerre en donnant
à leurs affirmations une légalité, comme quelque
chose de valable en termes de droit.
Cela ressemble à ce qu'ils ont fait avec les armes
nucléaires en affirmant que les informations
permettant de construire une bombe nucléaire
étaient secrètes et en prétendant ensuite qu'il y
avait de l'espionnage.
Lorsque la Russie et la Chine affirment dans leur
accord de partenariat qu'il s'agit d'une nouvelle
ère, elles disent en partie qu'il faut maintenant
un ordre mondial différent. De leur
côté, les États-Unis sont déterminés à pousser le
scénario d'une guerre majeure maintenant pour
éviter de perdre l'ordre mondial actuel où les
États-Unis dominent.
Notes
1.Traité d'amitié
Chine-Russie, article I :
« Conformément aux principes et normes
universellement reconnus du droit international et
sur la base des cinq principes de respect mutuel
de la souveraineté des États et de l'intégrité
territoriale, de non-agression mutuelle, de
non-ingérence mutuelle dans les affaires
intérieures de l'autre, d'égalité et de bénéfice
mutuel et de coexistence pacifique, les parties
contractantes
développeront le partenariat de coopération
stratégique de bon voisinage, d'amitié et de
coopération et d'égalité et de confiance entre les
deux pays dans une perspective à long terme et de
manière globale. »
Pour consulter le texte intégral du traité, cliquez ici.
2. Un
exemple de la façon dont on parle des relations
pour une nouvelle ère : « La Chine et la Russie
conviennent d'élever leurs relations au niveau
d'un partenariat » Xinhua, 6
juin 2019.
3. «
Le sommet en crise d'une alliance en crise »,
Pauline Easton, Le Marxiste—Léniniste Supplément,
11 juin 2021.
4. «
La proposition impérialiste américaine de
ressusciter le 'concert
des puissances' pour servir la quête de
domination des États-Unis », Kathleen
Chandler, Le
Marxiste—Léniniste Supplément ,11 juin 2021
Cet article est paru dans
Volume 52 Numéro 1 - 13 janvier 2022
Lien de l'article:
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