Numéro 24 - 10 mai 2023
À la défense de la dignité du travail !
Les retraités de la section locale 598 d'Unifor deSudbury
viennent appuyer les travailleurs du sel sur la ligne de
piquetage, 30 avril 2023.
• Les prétextes farfelus de l'entreprise pour ne pas négocier
• La convention
collective des mineurs du sel de l'État
de New York arrive à terme le 31 mai
Nouvelles percées dans l'utilisation du sodium pour les batteries électriques
• Le contrôle des ressources minérales essentielles du Canada
• Les batteries sodium-ion versus les batteries lithium-ion
• Sources stratégiques de sodium en Amérique du Nord
À la défense de la dignité du travail !
La grève à Sel Windsor entame sa treizième semaine et le soutien s'accroît face aux coups bas de l'entreprise
Rassemblement du Premier Mai sur le piquet de grève de Sel Windsor
Les travailleurs de Windsor-Essex et d'ailleurs continuent d'exprimer concrètement leur soutien aux travailleurs en grève de Sel Windsor, à Windsor, en Ontario. Les travailleurs sont en grève depuis le 17 février pour défendre les réclamations qu'ils sont en droit de faire, surtout contre la sous-traitance des emplois à une main-d'oeuvre non syndiquée. Les propriétaires de Sel Windsor, la société américaine Stone Canyon Industries Holdings Inc., sont connus pour leurs pratiques antisyndicales et leurs tactiques dans cette grève vont dans ce sens. Le soutien continue de s'élargir et de croître parce que la cause des travailleurs est juste et défend la dignité du mouvement syndical lui-même, non seulement au Canada mais aussi aux États-Unis. Aux États-Unis les travailleurs mènent des luttes sans précédent contre les tentatives de briser les syndicats et de rendre la syndicalisation impossible pour la majorité des travailleurs. Pendant ce temps, l'entreprise ne se présente même pas à la table des négociations à Windsor depuis le 27 avril.
Des travailleurs actifs et retraités sont venus sur le piquet
de grève d'aussi loin que Sudbury, Oshawa, Toronto et Hamilton
pour manifester leur soutien aux travailleurs et leur apporter
aussi une aide financière pour qu'ils puissent soutenir le
mouvement de leur grève. Les enseignants de l'Ontario continuent
d'exiger des administrateurs de leur caisse de retraite que
leurs économies ne soient pas utilisées pour financer les
activités antisociales et antisyndicales de Stone Canyon[1].
Des retraités de Sudbury Mine/Mill de la section locale 598 d'Unifor (à gauche) rendent visite aux grévistes et leur apportent un soutien financier, tandis que des membres de la section locale 143 du SEFPO viennent les soutenir sur la ligne de piquetage.
Le 29 avril et le 1er mai, des rassemblements ont eu lieu sur la ligne de piquetage où de nombreux contingents du mouvement syndical de Windsor et du comté d'Essex sont venus soutenir les grévistes. Le 29 avril, une magnifique fresque murale a été dévoilée, peinte par deux artistes locaux pour exprimer leur soutien. Elle comprend un panneau qui encourage le public à venir à la ligne de piquetage et à signer son nom pour montrer qu'on est aux côtés des travailleurs dans cette lutte. La vidéo de l'inauguration est disponible ici.
Le 1er mai, un grand rassemblement organisé par le Conseil du travail de Windsor et du district a réuni de grands contingents du mouvement syndical ainsi que des étudiants de l'université[2].
La réaction de la communauté montre à l'entreprise que ses coups bas ne suffiront pas à briser le soutien aux travailleurs ou leur moral. Loin de là, de plus en plus de gens voient d'eux-mêmes ce pour quoi les travailleurs se battent et pourquoi il est important qu'ils tiennent bon, et ils intensifient leur soutien pour leur prêter main forte.
Rassemblement du Premier Mai sur la ligne de piquetage de Sel Windsor
Notes
1. « It's High Time the Ontario Teachers' Pension Fund Divests from the Union-Busting Firm Stone Canyon Industries Holdings Inc. », Enver Villamizar, Empower Yourself Now !, 2 mai 2023
2. « May Day 2023 : Powerful Workers' Movement in Windsor-Essex Stands as One », Empower Yourself Now !, 8 mai 2023
Les prétextes farfelus de l'entreprise
pour ne pas négocier
Stone Canyon Holdings Inc, la société propriétaire de la mine de sel de Windsor, donne toutes sortes de raisons pour expliquer pourquoi elle ne se présente pas à la table de négociation. Le 27 avril, elle a publié un communiqué dans lequel elle affirme : « Vers minuit la nuit dernière, trois individus masqués et armés de bâtons de baseball ont pénétré illégalement dans les installations de la mine Ojibway de la société. Les intrus armés ont brutalement tendu une embuscade à l'un des employés de Sel Windsor, le frappant à plusieurs reprises avec les bâtons. » La société offre 50 000 dollars « à toute personne qui fournira à la police des informations permettant d'arrêter et de poursuivre les agresseurs ».
L'entreprise n'a présenté aucune preuve impliquant le syndicat ni aucune information substantielle sur ladite agression. D'après ce que savent les travailleurs, toute enquête de la police est close sans qu'aucune accusation ne soit portée. Il est ensuite apparu que le directeur en question avait été emmené à l'hôpital et relâché peu de temps après sans grand bruit. Les travailleurs ont dénoncé les méthodes utilisées pour insinuer que le syndicat avait quelque chose à voir avec l'incident, sans parler de la nécessité d'interrompre les négociations pendant que l'employeur enquête sur l'incident. L'entreprise a déclaré dans son communiqué qu'elle « entendait concentrer ses efforts sur l'identification des auteurs et de toute personne ayant agi de concert avec eux ».
Les travailleurs ont depuis appris qu'une société d'enquêteurs privés qui, selon eux, sont des officiers de police de Toronto à la retraite, a été embauchée par on ne sait qui pour se rendre au domicile des grévistes afin de les interroger un par un et de leur rappeler que la récompense pour toute information s'élève à 50 000 dollars. Pendant ce temps les négociations sont rompues[1]. Les travailleurs se sont informés de leurs droits et 1) demandent qui a donné à ces enquêteurs privés les informations privées sur leur lieu de résidence, ce qui est contraire à la loi sur le droit à la vie privée, et 2) ne leur adressent plus la parole.
Par ailleurs, la police a arrêté et inculpé au pénal 12 travailleurs en grève et un représentant national d'Unifor pour avoir désobéi à une ordonnance de la cour. Les travailleurs ont été arrêtés pour avoir empêché, le 11 avril, les camions d'entrer dans l'installation d'évaporation pendant quatre heures, soit au-delà des 15 minutes autorisées par l'injonction. Ce jour-là, le chef du NPD fédéral, Jagmeet Singh, s'est rendu sur les lignes et l'entreprise a rompu les négociations, déclarant avec arrogance qu'elle avait besoin de temps pour former ses cadres de l'équipe de sauvetage afin de maintenir la production pendant la grève.
Les travailleurs ont bloqué tout mouvement de camions entrant ou sortant de l'usine pendant quatre heures. Malgré la présence de centaines de travailleurs ce jour-là, 13 d'entre eux ont été choisis et inculpés. Comme condition de leur libération, ils ne doivent pas se trouver à moins de 600 mètres du piquet de grève, ce qui les empêche de s'acquitter de leurs devoirs de grève. Ils ont été convoqués au tribunal pour répondre aux accusations portées contre eux.
Alors que l'entreprise peut maintenir les travailleurs en grève pendant des semaines en retardant les négociations pour n'importe quel motif arbitraire qu'il lui plaît d'annoncer au hasard, les tribunaux n'ont pas exigé que l'entreprise négocie ! En réponse, les travailleurs continuent de tenir la ligne de piquetage 24 heures sur 24, 7 jours sur 7. Tous ceux qui le peuvent sont encouragés à se rendre sur les lieux autant que possible et à soutenir financièrement les sections locales 1959 et 240 d'Unifor, qui représentent les travailleurs de la mine et le personnel de bureau de l'usine d'évaporation.
Les grévistes de la fonction publique apportent leur soutien au piquet de grève des travailleurs de Sel Windsor le 27 avril 2023.
Note
1. « Comment on Windsor Salt Ltd. Public Statement », Empower Yourself Now !, 27 avril 2023
La convention collective des mineurs du sel de l'État de New York arrive à terme le 31 mai
Usine de Morton Salt àSilver Springs, New York
La convention collective des travailleurs de l'usine de sel Morton de Stone Canyon Industries Holdings Inc. (SCIH) à Silver Springs, dans l'État de New York, arrivera à terme le 31 mai. Il s'agit d'une autre usine d'évaporation de sel dont le propriétaire est SCIH qui n'a pu s'entendre sur une convention collective avec sa main-d'oeuvre syndiquée. Les travailleurs sont représentés par la section locale 625 des Métallos.
L'usine de Silver Springs emploie près de 150 travailleurs et produit du sel à partir de puits de saumure. La classe ouvrière de Silver Springs y extrait du sel depuis plus de 139 ans. Silver Springs a une population de moins de 900 personnes et, par conséquent, tout le monde a quelque chose à voir avec Morton Salt – soit parce qu'ils y travaillent, y ont déjà travaillé, connaissent quelqu'un qui y travaille ou connaissent quelqu'un qui y a déjà travaillé – selon un ancien maire de la ville. Morton Salt est le plus important employeur du coin et attire des travailleurs dans un rayon de 20 milles (32 km), jusque dans le comté de Wyoming County et chez son voisin, le comté Allegany.
L'usine produit des blocs de sel pour les animaux de ferme, des comprimés d'adoucisseur d'eau et du sel de table. On y emballe le sel kascher de l'Ohio et du Kansas. Le sel de table représente les deux tiers de ce qui est fabriqué à l'usine. Selon les rapports en ligne, le salaire de base pour le travail non spécialisé à l'usine est de 21,38 dollars US, et augmente à 24,90 dollars US après une période de probation de 90 jours.
L'extraction de saumure à Silver Springs a débuté en 1994 lorsque la compagnie Duncan Salt a été fondée. Elle a été achetée par la compagnie Worcester Salt au début du XXe siècle et a poursuivi ses opérations depuis son achat par Morton Salt en 1944.
SCIH ayant acheté Morton Salt en 2021, il fait usage de son monopole dans la production du sel pour attaquer les syndicats des travailleurs et les normes à la fois au Canada et aux États-Unis. En ce moment, les travailleurs à l'usine d'évaporation de Sel Windsor, à Windsor, en Ontario, sont en grève et aucune production significative n'a été possible dans l'usine depuis que la grève a été déclenchée le 17 février. Ce qui voudrait dire que SCIH pourrait être privé de deux usines d'évaporation s'il tente d'imposer des conditions de travail au syndicat des travailleurs américains de Silver Springs et que le syndicat refuse de plier et décide d'aller en grève.
L'expérience des travailleurs canadiens démontre que la compagnie s'organise pour provoquer une grève bien à l'avance et que ses « offres » sont un piège. Il se pourrait aussi que la compagnie tente de faire de l'intimidation pour forcer les travailleurs à accepter quelque chose. Mais les travailleurs ont leur propre perspective sur ces questions, fondée sur plus d'un siècle d'expérience à affronter l'antisyndicalisme et les pouvoirs de police déployés par les employeurs et les gouvernements dans tous les secteurs de l'économie. En réalité, la compagnie est vulnérable devant les actions unifiées de la classe ouvrière du Canada et des États-Unis lorsqu'elle est en mesure d'être solidaire à la défense de ses droits. À cet égard, les travailleurs des deux côtés de la frontière sont vigilants face aux efforts de la compagnie pour inciter une section contre l'autre pour les déstabiliser. Dans cette optique, ils peuvent établir des tactiques qui sont favorables au mouvement ouvrier dans son ensemble en Amérique du Nord et inspirer confiance aux travailleurs qu'ils ne sont pas que de choses dont on peut disposer et qu'on peut inciter les uns contre les autres, et que leur Non ! collectif à l'antisyndicalisme veut dire Non !
Les travailleurs du sel à Windsor font preuve d'une résistance soutenue depuis 13 semaines face à tous les coups bas. Leur lutte à la défense de leurs justes revendications dans les négociations contractuelles a exposé les tactiques de la compagnie et s'est méritée de plus en plus d'appui parmi la classe ouvrière dans la région de Windsor-Essex et ailleurs. Cela contribue à l'expérience générale du mouvement ouvrier, en particulier ceux-là qui travaillent pour des compagnies sans scrupule comme Stone Canyon Industries Holdings Inc.
(EmpowerYouselfNow.ca. Photo : EYN)
Nouvelles percées dans l'utilisation du sodium pour les batteries électriques
Le contrôle des ressources minérales essentielles du Canada
Murale de l'usine de sel de Windsor peinte par des artistes locaux en appui aux travailleurs en grève
Les documents de l'industrie parlent beaucoup de nouvelles percées dans l'utilisation du sodium pour les batteries électriques. Il existe d'énormes gisements de sel au Canada, dont certains des plus importants sont les mines de sel de Goderich et d'Ojibway situées dans le sud-ouest de l'Ontario. La mine de Goderich appartient à la société Compass Minerals, basée au Kansas, tandis que la mine de sel Ojibway Windsor, située à Windsor (Ontario), et une mine similaire à Detroit (Michigan), en face de Windsor, appartiennent à la société californienne Stone Canyon Industries Holdings Inc. (SCIH).
SCIH est devenu le plus grand propriétaire en ce qui a trait à la capacité de production de sel en Amérique du Nord après avoir acheté Morton Salt, qui possédait Sel Windsor, en 2021, en partie grâce à des investissements du Régime de retraite des enseignantes et des enseignants de l'Ontario. Elle a entrepris de restructurer ses activités dans le secteur du sel en fermant la production en Alberta et en s'attaquant aux syndicats des travailleurs. Les travailleurs de la mine et de l'usine d'évaporation d'Ojibway sont en grève depuis le 17 février pour défendre leurs revendications contre la volonté de l'entreprise d'accroître la sous-traitance en faisant appel à des travailleurs non syndiqués.
Il faut souligner que depuis que Stone Canyon a acheté la mine et l'usine d'évaporation d'Ojibway, elle a augmenté leur capacité de production en ajoutant un nouveau niveau à la mine et de nouveaux puits de saumure pour le sel évaporé. Les installations de Sel Windsor, où les travailleurs sont actuellement en grève à Windsor, se trouvent presque à mi-chemin entre la future usine de batteries sodium-ion de Clarios Meadowbrook, dans le Michigan, et l'usine de batteries de Volkswagen qui sera bientôt construite à St. Thomas, en Ontario, et qui est également financée par le gouvernement canadien[1].
Cela signifie que SCIH contrôle désormais une source précieuse de sel canadien, qui est appelée à devenir encore plus précieuse compte tenu de son rôle dans l'électrification. Cela ajoute une toute nouvelle dimension aux tentatives de l'entreprise d'imposer la sous-traitance dans le contrat actuel que les travailleurs tentent de négocier à Sel Windsor. La sous-traitance à des travailleurs non syndiqués affaiblira de fait l'organisation de défense des travailleurs, leur syndicat, ce qui augmentera les problèmes de santé et de sécurité, exercera une pression à la baisse sur les salaires des travailleurs syndiqués et sera utilisé pour créer des conflits dans les rangs de la main-d'oeuvre.
Avec le soutien des gouvernements à tous les niveaux et les subventions accordées dans le cadre des stratagèmes pour payer les riches, présentés comme bons pour la prospérité, la stabilité et la sécurité, les profits augmenteront. L'augmentation de la demande de sel et de la capacité de production à la mine de sel de Windsor est essentielle au succès de ces projets. Ainsi, la lutte des travailleurs pour réclamer ce qui leur appartient de droit et défendre leur syndicat et le droit de négocier une nouvelle convention collective sans avoir à composer avec l'impunité de l'entreprise est une lutte qui défend le droit de tous les travailleurs et du Canada lui-même à un projet d'édification nationale qui garantit que la valeur de cette ressource naturelle canadienne profite au Canada et n'est pas arrachée du pays pour verser des dividendes aux propriétaires de la SCIH.
Note
1. Voir « Les difficultés des projets d'« énergie verte » &ndash ; Nouvelle subvention massive pour la construction d'une usine de batteries de Volkswagen à St. Thomas, en Ontario », Le Marxiste-Léniniste mensuel, avril 2023
Les batteries sodium-ion versus
les batteries lithium-ion
Les batteries sodium-ion (Na-ion) sont une alternative
émergente aux batteries lithium-ion traditionnelles (Li-ion)
actuellement utilisées dans la plupart des véhicules électriques
(VE). Les rapports indiquent qu'elles sont potentiellement plus
sécuritaires et plus respectueuses de l'environnement, car elles
ne contiennent pas de matériaux toxiques ou inflammables. Bien
que les batteries Li-ion soient connues pour leur densité
énergétique élevée et leur durée de vie relativement longue,
elles présentent plusieurs inconvénients. Il s'agit notamment du
coût élevé, des préoccupations environnementales et de la
disponibilité limitée de matériaux clés tels que le cobalt, le
nickel et le manganèse. Dans certains modèles de piles Na-ion,
le cuivre comme collecteur de courant est remplacé par
l'aluminium, un métal moins cher et plus abondant. (Voir le
graphique ci-contre)
Schéma d'une pile Na-ion montrant une cathode (A) composée de sel fondu dans une matrice faite de laine d'aluminium. Les ions de sodium (B) voyagent dans un électrolyte semi-conducteur (C) entre l'anode (D) et la cathode (A). |
Ces dernières années, des scientifiques de l'Université Central South de Changsa, en Chine, ont mis au point des batteries rechargeables sodium-ion pour remplacer les batteries lithium-ion. Le fabricant chinois de batteries Hina et Sehol – une marque commune de Anhui Jianghuai Automobile Group Corp (JAC) et de Volkswagen Anhui – ont construit ensemble un véhicule d'essai équipé de batteries sodium-ion, sur la base du modèle Sehol E10X de ce dernier. « La technologie et les performances des batteries sodium-ion pourraient être utilisées dans des VE de taille moyenne à grande, à mesure qu'elles gagneront en maturité », aurait déclaré un cadre de Hina.
Selon JAC, son nouveau véhicule électrique est équipé d'une batterie sodium-ion de 53,6 kilowattheures (kWh) qui offre une autonomie de 500 kilomètres en une seule charge. La batterie peut être rechargée rapidement à 80 % de sa capacité en une heure seulement. Le JAC a également souligné que les piles Na-ion peuvent fonctionner dans des conditions météorologiques extrêmes, de -40 degrés Celsius à +70 degrés Celsius. Ce n'est pas le cas des piles Li-ion, ce qui constitue un autre de leurs inconvénients.
Dans un article récent publié dans le New York Times, on peut lire que « le sodium, que l'on trouve partout dans le monde dans le sel, se vend entre 1 et 3 % du prix du lithium et est chimiquement très similaire. Grâce à de récentes avancées, les batteries au sodium peuvent désormais être rechargées quotidiennement pendant des années, ce qui réduit l'un des principaux avantages des batteries au lithium. La capacité énergétique des batteries au sodium a également augmenté. Les batteries au sodium présentent également un grand avantage : elles conservent la quasi-totalité de leur charge lorsque les températures descendent bien en dessous du point de congélation, ce qui n'est généralement pas le cas des batteries au lithium [1]. »
La possibilité d'utiliser du sodium provenant du sel est importante étant donné que l'un des principaux problèmes dans la transition vers les véhicules électriques et l'électrification en général est le coût des batteries et leur fonctionnement dans des environnements difficiles. Si les monopoles mondiaux de l'automobile, en particulier, peuvent réduire le coût des batteries en utilisant des subventions publiques et du sel plutôt que du lithium, et réduire considérablement leur main-d'oeuvre parce que les véhicules électriques nécessitent beaucoup moins de pièces, ils pourront faire plus de profits[2].
Le plus grand fabricant mondial de batteries pour voitures électriques est le fabricant chinois CATL. Il ouvrira bientôt une base de production de batteries sodium-ion appelée Cheliwan Production Base à Ningde, dans le centre de la Chine. CATL est également très impliqué dans la fabrication de batteries rechargeables pour le stockage de masse de l'énergie en Chine. À l'heure actuelle, l'entreprise a mis au point une technologie permettant d'associer des batteries lithium-ion à des batteries sodium-ion dans ce qu'elle appelle son bloc-batterie AB. Ce bloc-batterie est capable de supporter une autonomie de 500 kilomètres pour les véhicules électriques, a déclaré Huang Qisen, vice-président de l'institut de recherche CATL, lors d'un forum organisé en novembre 2022. Avec son système de batterie AB, CATL a réussi à combiner les deux types de batteries électriques, ce qui leur permet de se compléter et d'augmenter ainsi la densité énergétique du système de batterie. Les batteries sodium-ion sont moins denses en énergie que les batteries lithium-ion, ce qui signifie qu'il faut plus de masse pour obtenir la même énergie, ce qui augmente le poids et l'encombrement. En mélangeant les deux types de batteries, CATL est en mesure d'obtenir les avantages de chaque type dans un seul module.
Dans deux ans, la Chine disposera de près de 95 % de la capacité mondiale de production de batteries sodium-ion. Sur les 20 usines de batteries sodium-ion actuellement prévues ou déjà en construction dans le monde, 16 se trouvent en Chine, selon la société de conseil Benchmark Minerals. Même si la production de batteries au lithium dominera encore le marché des batteries rechargeables, les progrès dans le domaine du sodium s'accélèrent, selon Benchmark Minerals. Les entreprises nord-américaines tentent de rattraper leur retard.
Dans un communiqué de presse daté du 4 mai 2022, Natron Energy, concepteur américain de NIB, et Clarios International, « une filiale de Brookfield Business Partners », ont annoncé que, dans une course pour surpasser le fabricant géant chinois CATL, ils collaborent pour mettre en place ce qu'ils appellent la « première fabrication de masse de batteries sodium-ion au monde »[3].
L'usine de production de batteries sodium-ion de Natron-Clarios
sera située sur le site de l'usine Meadowbrook de Clarios, qui
produit déjà des batteries rechargeables lithium-ion. L'usine
Natron-Clarios est située à Holland, Michigan, aux États-Unis.
Natron indique que la similitude des exigences de fabrication
permet aux deux entreprises d'utiliser une partie de l'usine
lithium-ion de Clarios pour la production de batteries au
sodium-ion. Cela devrait permettre de réduire les coûts et
d'accélérer la mise sur le marché par rapport à la construction
d'une nouvelle usine. Le projet de réoutillage de l'usine
existante est financé par l'Agence pour les projets de recherche
avancée du département américain de l'Énergie (ARPA-E) dans le
cadre du programme SCALEUP (Seeding Critical Advances for
Leading Energy Technologies With Untapped Potential Program).
Carte de localisation des mines de carbonate de sodium dans le Wyoming (à gauche), de l'usine de batteries sodium-ion de Natron-Clarios dans le Michigan (au centre-droit) et de la mine de sel d'Ojibway à Windsor, en Ontario (à droite).
Notes
1. « Why China Could Dominate the Next Big Advance in Batteries », Keith Bradsher, New York Times, 12 avril 2023
2. « Les gouvernements à tous les niveaux paient pour les grandes transformations de l'industrie automobile », Enver Villamizar, Forum ouvrier, 16 février 2023
3. Dans un article paru dans le numéro du 6 mars 2012 de Ontario Political Forum, Supplément du TML Daily, intitulé « McGuinty Opens Space for Brookfield Vultures » (McGuinty pave la voie aux vautours de Brookfield), Jim Nugent écrit ce qui suit au sujet de Brookfield :
« Brookfield est un monopole international agressif basé à Toronto et à New York. Il est bien connu des travailleurs canadiens pour avoir détruit des entreprises productives, provoqué des pertes d'emploi et pillé les régimes de retraite des travailleurs. Brookfield a joué un rôle déterminant dans le démantèlement de Stelco et la cession de ce trésor national à U.S. Steel. Il s'est spécialisé dans la fermeture de papeteries et de scieries dans les Maritimes, au Québec et dans tout le pays pour voler l'énergie des centrales hydroélectriques reliées aux usines et pour aider à financer ses gros coups en pillant les régimes de retraite des travailleurs qu'elle jette à la rue.
« Aujourd'hui, Brookfield se développe rapidement dans le secteur public de l'hydroélectricité en Ontario pour occuper l'espace du secteur privé créé par [Mike] Harris et [Dalton] McGuinty. L'association avec Hydro One sur le projet de distribution d'électricité EWT [East-West Tie] servira la stratégie de Brookfield qui consiste à devenir une force mondiale dominante dans le domaine de la production d'énergie renouvelable. Une semaine avant la soumission de l'offre pour le projet EWT, Brookfield a consolidé toutes ses participations dans le secteur de l'électricité en une seule société, Brookfield Renewable Energy Partners, afin de se préparer à affronter la concurrence sur les marchés canadiens et mondiaux ».
(Avec des informations du LML, New York Times, Brighter Side of News, CNEVPost, Benchmark Minerals, U.S. Department of Energy, Natron Energy, Clarios International. Photos: Unifor Local 240)
Sources stratégiques de sodium
en Amérique du Nord
Le sel gemme, également connu sous le nom de halite, et la
soude, connue sous le nom de trona, sont les deux principales
sources de sodium en Amérique du Nord. Un procédé industriel
permettant d'extraire le sodium métallique du sel gemme a été
inventé dans les années 1920. Il est connu sous le nom de
procédé de Down. La partie principale de ce procédé est
l'électrolyse du sel fondu qui sépare ses deux ingrédients
principaux : le sodium et le chlore. Un appareil spécial, appelé
cellule de Down, est utilisé. Il s'agit d'un récipient
rectangulaire en acier dans lequel le sodium (Na) et le chlore
(Cl) sont séparés du sel fondu par une réaction électrochimique
à haute température.
Quant à la soude, qui est une forme de carbonate de sodium, elle est principalement extraite dans le Green River Basin, dans le sud-ouest du Wyoming, sous la forme d'un minéral appelé trona. C'est dans le bassin de Green River d'où est extrait le minerai par quatre grands exploitants miniers que se trouvent les plus grandes réserves de minerai de trona au monde, [1].
Que le processus industriel d'extraction du sodium à partir du carbonate de soude soit le même que celui du sel gemme ne change rien au fait que l'énorme distance qui sépare les mines de carbonate de soude du Wyoming de la future usine de batteries sodium-ion de Holland, Michigan (2 200 kilomètres) désavantage les exploitants du Green River Basin par rapport à l'emplacement de la mine de sel de Windsor, qui n'est qu'à 300 kilomètres de l'usine de batteries du Michigan et à 180 kilomètres de l'usine de batteries Volkswagen de Saint-Thomas, soit près de 10 fois plus proche (voir la carte ci-dessous). Toute la région du Michigan-Ontario est également desservie par de grandes autoroutes, des lignes ferroviaires et des voies de navigation fluviales reliant St. Thomas et Holland à Windsor. La mine de sel de Windsor, en particulier, dispose d'un port en eau profonde capable de charger des navires de 30 000 tonnes de sel gemme qui peuvent être transportés sur le lac Huron jusqu'au lac Michigan pour atteindre l'installation de Holland (Michigan) ou d'autres installations qui pourraient être construites.
Carte de localisation des mines de carbonate de sodium dans le Wyoming (à gauche), de l'usine de batteries sodium-ion de Natron-Clarios dans le Michigan (au centre-droit) et de la mine de sel d'Ojibway à Windsor, en Ontario (à droite)
La demande des travailleurs du Canada et des États-Unis que l'électrification soit au service de la population et de la protection de l'environnement naturel est le facteur le plus important pour garantir que les progrès technologiques actuels soient mis au service de l'humanisation de l'environnement naturel et social. À cet égard, la grève des travailleurs de Sel Windsor à Windsor, en Ontario, pour défendre leur syndicat et ses normes, représente une ligne dans le sable tracée par les travailleurs canadiens qui affirment que les ressources minérales essentielles devraient être extraites d'une manière durable qui respecte la santé, la sécurité et la dignité des travailleurs et contribue au bien-être de la population et de l'environnement.
La possibilité d'utiliser le sel dans la production de batteries électriques plutôt que le lithium, qui est beaucoup plus difficile à extraire, est une évolution positive. Les travailleurs des États-Unis et du Canada apporteront une contribution importante en déterminant comment cette ressource peut être développée et sous le contrôle de qui, afin qu'elle puisse être mise à la disposition de l'édification nationale plutôt que de détruire les normes que les travailleurs ont créées dans le secteur minier.
Le sel est retiré du Sel Windsor par des briseurs de grève lors de la lutte des mineurs de sel pour défendre leurs droits.
Note
1. Les quatre principales sociétés minières qui extraient du minerai de trona dans le Wyoming ont produit environ 11,1 millions de tonnes de carbonate de soude en 2005. Il s'agit de :
- Genesisalkali, propriété de Genesis Energy, basée à Houston au Texas, qui produit annuellement 3,6 millions de tonnes de carbonate de soude et de produits dérivés pour différentes formes de verre.
- Sisecam Wyoming, propriété de Sisecam, un conglomérat d'entreprises basé en Turquie, qui a également des activités dans les Balkans et aux États-Unis. Il est principalement spécialisé dans la production de variétés de produits en verre fabriqués à partir de carbonate de soude, mais il est également présent dans le secteur de l'énergie électrique et sur le marché du gaz naturel en Turquie. Son site web indique que « Sisecam est le deuxième producteur mondial de carbonate de soude ». Actuellement, ses activités aux États-Unis ont une capacité de production annuelle totale de 5 millions de tonnes, qui devrait passer à 10 millions de tonnes grâce au rachat de Ciner Resources en 2021.
- Solvay Chemicals, propriété de Solvay S.A., est un conglomérat de fabrication de produits chimiques basé à Bruxelles, en Belgique, spécialisé dans les composites thermoplastiques appliqués aux industries automobile et aérospatiale. Sa production américaine de carbonate de soude et de produits dérivés est principalement destinée aux industries du verre et des produits chimiques, aux secteurs agroalimentaire et pharmaceutique, ainsi qu'à l'alimentation du bétail. Elle a commencé à produire en 2021.
- Tata Chemicals Soda Ash Partners, propriété du conglomérat indien monopole Tata, qui exploite une mine dans la région de Green River dans le Wyoming, avec plus de 4,5 millions de tonnes par an de minerai de trona qui est transformé en carbonate de soude dans son usine de raffinage de surface.
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