Forum ouvrier

4 avril 2019

Le premier ministre du Québec demande aux travailleurs d'ABI
de faire de nouvelles concessions

Tous à la défense des droits et de
la dignité des travailleurs d'ABI


Les travailleurs en lockout d'ABI devant l'Assemblée nationale, le 27 mars 2019

Les travailleurs marchent pour l'énergie et déclarent que le lockout n'est pas une force majeure et qu'Alcoa doit payer ce qu'elle doit
Le syndicat présente une contre-offre au cartel Alcoa/Rio Tinto 


Des actions résolues pour dénoncer les conditions intenables dans le système de santé

Les infirmières du Québec tiennent une journée d'action « sans temps supplémentaire obligatoire » le 8 avril
Les Néo-Écossais demandent un système de santé moderne et centré sur l'humain


Le premier ministre du Québec demande aux travailleurs d'ABI
de faire de nouvelles concessions

Tous à la défense des droits et de
la dignité des travailleurs d'ABI

Le 1er avril, le premier ministre François Legault a rencontré séparément les représentants des travailleurs en lockout de Bécancour et ceux de la direction d'Alcoa, dont le président de sa division d'aluminium venu directement de Pittsburgh. Il a affiché le tweet suivant à la suite de ces rencontres :

« Rencontres avec le président du syndicat d'ABI de Bécancour et avec le président d'Alcoa, propriétaire principal d'ABI. ABI est en conflit de travail depuis 15 mois. La direction offre un salaire moyen de 92 000 $ par année aux 900 employés. Le syndicat doit faire des compromis. »

Le syndicat et la direction n'ont jamais parlé des salaires comme étant une question en litige en ce moment. L'enjeu principal est l'objectif d'Alcoa de détruire toute norme négociée en ce qui a trait au régime de retraite et aux conditions de travail, en particulier le droit des travailleurs de préserver les emplois syndiqués plutôt que d'en perdre une grande partie à la sous-traitance selon la vision néolibérale de la flexibilité et de la concurrence mondiale. Alcoa cherche à détruire toute présence organisée des travailleurs à la défense de leurs droits et de ceux qui les remplacent quand ils partent à la retraite.

Le président de la section locale 9700 du Syndicat des Métallos, Clément Masse, a dit que le syndicat a présenté clairement sa cause au premier ministre et qu'il n'a jamais mentionné les salaires comme une question en litige. Le premier ministre n'a pas parlé des salaires lui non plus avec le syndicat ou de compromis à faire avec la compagnie. Malgré cela, le premier ministre a affiché son tweet et a déclaré à la presse que le syndicat n'était pas raisonnable et que des emplois à 92 000 dollars par année pourraient bien disparaître.

C'est inadmissible de la part du premier ministre de chercher à discréditer les justes positions du syndicat pour adopter la méthode de provocation et le diktat pour des concessions de l'oligopole étranger. Cela crée un déséquilibre encore plus grand entre les oligarques mondiaux d'Alcoa et les travailleurs et renforce le diktat de la compagnie au lieu de créer la possibilité de tenir des négociations. Cela démontre la situation difficile dans laquelle se trouvent les travailleurs d'ABI, la communauté, le Québec et, plus largement, les travailleurs du Canada et dans le monde.

En faisant ses commentaires sur les salaires, qu'il espère que les travailleurs au salaire minimum vont comparer avec ce qu'ils gagnent, le premier ministre du Québec essaie de miner le grand mouvement d'appui aux travailleurs d'ABI et de déformer les enjeux du conflit. Sa déclaration absurde sur les salaires chez ABI, qui sont essentiellement les mêmes salaires qu'on retrouve dans les autres alumineries du Québec et du Canada, n'a rien à voir avec le conflit actuel et constitue une abdication de sa responsabilité de guider les deux parties vers une résolution du conflit mutuellement avantageuse.

Le pragmatisme néolibéral requiert que toutes les normes soient détruites au nom de la flexibilité et de la concurrence. Alcoa veut transformer les conditions dans lesquelles la compagnie engage et utilise et déploie les travailleurs, sans être limitée par des ententes ayant une portée légale et ayant été négociées et approuvées par les travailleurs. Qu'on pense par exemple au protocole de retour au travail qu'Alcoa voulait dicter aux travailleurs et que ceux-ci ont massivement rejeté en assemblée générale le 11 mars dernier. Non seulement ce protocole étendait-il officiellement sur 10 mois la période pendant laquelle les travailleurs allaient rentrer au travail, mais il pouvait être suspendu ou même annulé par l'entreprise si elle le jugeait bon, selon des critères qu'elle-même invoquerait quand elle le voudrait. Autrement dit, il n'y avait pas de véritable protocole de retour au travail, seulement un diktat de la compagnie. Le conflit aurait été déclaré terminé, et les travailleurs théoriquement rappelés au travail, mais en fait ils pouvaient ne pas être rappelés du tout, sans parler du fait que pendant tout ce temps les cadres et les sous-traitants allaient faire leur travail comme s'il n'existait pas de main-d'oeuvre syndiquée protégée par des normes légales et une convention collective.

Alcoa a obtenu des arrangements semblables dans l'État de l'Australie occidentale. Le tribunal australien des relations de travail (le Fair Work Commission) a accueilli favorablement la demande d'Alcoa de mettre fin à la convention collective de 1 500 travailleurs sous prétexte qu'elle n'assurait pas à la compagnie la « flexibilité » néolibérale requise pour être compétitive sur les marchés mondiaux. Le syndicat et la convention collective de ces travailleurs ont été déclarés nuls et non avenus et ces travailleurs travaillent maintenant selon les seules normes minimales en vigueur dans les lois du travail en Australie, sans une protection organisée sous leur contrôle.[1] La position dominante qu'occupe Alcoa dans ce secteur à l'échelle mondiale lui permet de fermer certaines installations tout en maintenant sa production à partir d'autres installations, afin d'imposer son diktat, lequel est renforcé par les gouvernements néolibéraux qui servent ses intérêts privés.

Alcoa essaie de justifier son refus total de négocier avec les travailleurs d'ABI et leur syndicat, et ses demandes de concessions dans les conditions de travail et le rôle du syndicat au nom de la flexibilité et de la concurrence que le premier ministre vient maintenant d'appuyer publiquement.

L'intervention du premier ministre Legault ne doit pas passer. Elle place le peuple dans une position intenable d'absence de contrôle sur ses ressources et de voix au chapitre sur la direction de l'économie, ce qui, en dernière analyse, signifie toutes les affaires politiques. Elle place le gouvernement et les pouvoirs de police de l'État au service de l'oligarchie financière mondiale, en opposition aux droits et au bien-être du peuple.

Cette voie de pouvoir sans restriction de ces oligopoles et de leur dictature économique et politique n'est pas acceptable. Les travailleurs, les jeunes et les étudiants du Québec et du Canada appuient la lutte des travailleurs d'ABI à la défense de leurs droits et de leur dignité. Cette lutte et son résultat auront de grandes répercussions sur le peuple et la direction du pays.

Note

1. Lire « La résiliation 'légale' des conventions collectives - l'exemple australien », Pierre Chénier, dans le numéro du 28 février 2019 de Forum ouvrier.

(Photos: Chantier politique, Syndicat des Métallos)

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Les travailleurs marchent pour l'énergie et déclarent que le lockout n'est pas une force majeure et qu'Alcoa doit payer ce qu'elle doit


Devant l'Assemblée nationale à Québec le 27 mars 2019

Les 26 et 27 mars derniers, les travailleurs en lockout de l'aluminerie ABI à Bécancour ont organisé la Marche de l'énergie à Trois-Rivières et à Québec.

La marche avait comme but de demander au gouvernement Legault d'intervenir auprès des dirigeants d'ABI, le cartel Alcoa/Rio Tinto, pour que le lockout prenne fin d'une manière acceptable pour les travailleurs. Elle visait également à lui demander de rouvrir le contrat d'énergie entre Alcoa, le gouvernement du Québec et Hydro-Québec afin qu'Alcoa paie pour le bloc d'énergie qui lui est réservé à tarif préférentiel.

Les travailleurs ont dit clairement qu'en aucune façon ce lockout planifié et décrété par la compagnie ne peut constituer une « force majeure », un « Act of God » en anglais, qui la libère de ses responsabilités de payer pour son énergie. Alcoa doit payer ce qu'elle doit à Hydro-Québec et au peuple québécois !

Trois-Rivières, le 26 mars

Environ 200 travailleurs d'ABI ont fait une marche de deux heures vers le bureau de circonscription du ministre du Travail Jean Boulet à Trois-Rivières et une autre marche de deux heures dans les rues de la ville. Partout, ils ont reçu un très bon accueil de la part de la population alors que les gens klaxonnaient, saluaient de la main et venaient serrer la main des marcheurs, appréciant la prise de position déterminée des travailleurs d'ABI à la défense de leurs droits et des intérêts du Québec.

Le président de la section locale 9700 du Syndicat des Métallos, Clément Masse, s'est adressé aux marcheurs. Il leur a rappelé que pendant la campagne électorale, le premier ministre actuel François Legault avait dit que la position d'Alcoa n'était pas sérieuse en ce qui concerne ses demandes de concessions et son refus de négocier une convention acceptable pour les travailleurs. Si c'est le cas, pourquoi le premier ministre n'a-t-il pas fait appliquer le contrat d'électricité ? Il faut agir maintenant.

« Si le lockout est si long, plus de 14 mois maintenant, c'est parce qu'ABI ne subit pas pleinement les conséquences économiques de sa décision. C'est 165 millions qui ont ainsi été économisés par Alcoa en 2018 seulement, sur le dos d'Hydro-Québec et de tous les Québécois. Comme citoyens, c'est outrageux de voir notre gouvernement complice de ce lockout », a dit Clément. Au 30 mars 2019, Alcoa devait 275 millions de dollars à Hydro-Québec pour le bloc d'énergie qui lui est réservé à tarif préférentiel en vertu d'un contrat à long terme.

Québec, le 27 mars

Des centaines de travailleurs venus de Québec, de la Beauce, du Saguenay-Lac-Saint-Jean et d'aussi loin que Fermont sur la Côte-Nord ont accueilli avec enthousiasme les quelque 300 travailleurs d'ABI à leur arrivée devant l'Assemblée nationale le 27 mars.

Il y avait parmi eux des membres et des représentants de plusieurs syndicats, dont le Syndicat des Métallos, le Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes, les Teamsters et le Syndicat canadien de la fonction publique. Des retraités d'Arcelor Mittal à Contrecoeur y étaient aussi, de même que des étudiants de l'Université Laval qui ont fait un don de 600 $ aux travailleurs d'ABI.

Plusieurs orateurs se sont adressés à la foule. Clément Masse a dit que le premier ministre Legault a déclaré à la presse que le contrat d'énergie, avec sa clause de force majeure qui permet à Alcoa de ne pas assumer sa responsabilité de payer ce qu'elle doit à Hydro-Québec , est un contrat d'« enfant d'école ».

Quelqu'un a fait remarquer que des arrérages de 275 millions de dollars envers Hydro-Québec ne sont pas vraiment une affaire d' « enfant d'école ».

Le président du syndicat a dit qu'il va falloir que le premier ministre prenne ses responsabilités et « fasse preuve de leadership, modifie cette clause-là et rééquilibre le rapport de forces qu'on a avec notre employeur. » Le fait qu'Alcoa ne soit pas forcée de payer pour son bloc d'électricité explique en partie qu'elle soit capable d'adopter la ligne dure et demande toute une série de concessions antitravailleurs et antisyndicales et refuse systématiquement de négocier pour mettre fin au lockout, a-t-il ajouté.

On a appris lors des événements que le premier ministre Legault allait rencontrer le syndicat et des représentants de la compagnie le lundi 1er avril. Même avant que les rencontres aient lieu, le premier ministre a exprimé son point de vue antiouvrier de manière grossière. Il a laissé entendre dans les médias qu'il s'attendait à ce que le syndicat fasse d'autres concessions et qu'il ne touchera pas au contrat d'énergie. Ces déclarations sont inacceptables et démontrent que le gouvernement n'est pas le représentant du peuple québécois mais bien des intérêts privés étrangers cherchant à s'enrichir au détriment des travailleurs du Québec et des ressources naturelles de la nation.

Plusieurs ont fait remarquer que même si le contrat d'énergie est un contrat de diktat à sens unique, qui fournit aux monopoles comme Alcoa et à d'autres cartels industriels de l'électricité en dessous de son prix de production, il demeure que le contrat stipule qu'un lockout est une « force majeure » qui libère Alcoa de ses responsabilités de payer pour son énergie seulement s'il est un événement « imprévisible, irrésistible et échappant au contrôle d'une Partie qui retarde, interrompt ou empêche l'exécution, totale ou partielle par cette Partie de ses obligations en vertu du Contrat ».

Le lockout d'ABI a été planifié de a à z pour attaquer les travailleurs, la communauté et le syndicat. Il était entièrement prévisible et est contrôlé par Alcoa qui l'utilise pour extorquer des concessions antiouvrières qui sont inacceptables dans une société moderne.

Le lockout n'est pas une force majeure. Alcoa doit payer ce qu'elle doit !
Mettons fin au lockout d'ABI dans des termes qui sont acceptables aux travailleurs !

(Photos : Chantier politique, Syndicat des Métallos)

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Le syndicat présente une contre-offre
au cartel Alcoa/Rio Tinto


Marche de l'énergie à Trois-Rivières, le 26 mars 2019

Le cartel Alcoa/Rio Tinto maintient maintenant en lockout depuis plus de 14 mois les quelque 1030 travailleurs de son aluminerie de Bécancour, représentés par la section locale 9700 du Syndicat des Métallos. Le 21 mars, la section locale 9700 a présenté une contre-offre complète de convention collective au cartel Alcoa/Rio Tinto pour mettre fin au lockout. La contre-offre, de l'avis du syndicat, comprend des compromis significatifs tout en préservant des demandes essentielles du syndicat.

Les deux principaux compromis concernent le régime de retraite et les coupures de postes syndiqués par attrition. Le syndicat accepte la demande du cartel d'éliminer le régime de retraite à prestations déterminées qui serait remplacé par un régime à financement salarial comprenant des prestations déterminées. La différence essentielle entre les deux régimes, selon le syndicat, est que, alors que les prestations à la retraite des travailleurs demeurent déterminées dans le nouveau régime, la cotisation de l'employeur est fixe et les risques liés au financement du régime sont assumés par les travailleurs.

L'autre concession consiste en l'acceptation de coupures par attrition de 103 postes syndiqués, soit environ le dixième de la main-d'oeuvre syndiquée totale de l'entreprise. Selon le syndicat, en juillet 2018, c'est une coupure de l'ordre de 20 % des effectifs syndiqués que le cartel exigeait. Dans son communiqué au sujet de la contre-offre, le syndicat mentionne qu'il maintient sa demande du respect de l'ancienneté dans les affichages de postes et les mouvements de main-d'oeuvre à l'intérieur de l'usine.

Le syndicat a présenté cette contre-offre avec l'objectif d'amener l'employeur à la table de négociation pour mettre fin au lockout en signant une convention collective que les travailleurs jugeront acceptable dans les conditions actuelles. Les travailleurs se trouvent dans une situation très difficile parce que le cartel de propriétaires a refusé de négocier avec les travailleurs depuis le début du lockout et même bien avant. Il n'y a pas eu de négociations entre les deux parties depuis le début, juste un diktat à sens unique de la part de la direction d'ABI.

Le syndicat a rapporté que lors d'une séance de conciliation le 3 avril, ABI n'a même pas daigné répondre à la contre-offre du syndicat et a refusé de tenir des négociations avec le syndicat. Les travailleurs sont confrontés à la question de comment répondre à une telle arrogance. Il faut continuer à faire pression sur ceux qui sont en position de contrôle pour qu'ils abandonnent leur diktat anti-négociation, discutent et signent cette contre-offre à la table de négociation et mettent fin au lockout. La soumission complète aux demandes asservissantes des oligarques financiers n'est pas une option.


La Fédération interprofessionnelle de la Santé du Québec (FIQ) se joint aux travailleurs d'ABI en lockout sur leur ligne de piquetage pour exprimer leur solidarité, le 3 avril 2019.

Cela rend d'autant plus important que les travailleurs du Québec et d'ailleurs intensifient leur appui aux travailleurs en lockout d'ABI. Les travailleurs du Québec et du Canada et leurs alliés parmi les jeunes et les autres couches de la population doivent pendre position publiquement et demander que la direction d'ABI abandonne son diktat et négocie une convention collective qui est acceptable aux travailleurs de Bécancour. Il faut un effort concerté de tous pour lancer un clair message que le diktat anti-négociation du cartel, qui vise à écraser la défense organisée des travailleurs de la section locale 9700 pour détruire les conditions d'emploi et de travail, ne va pas passer !

(Photos: Syndicat des Métallos, FIQ)

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Des actions résolues pour dénoncer les conditions intenables
dans le système de santé

Les infirmières du Québec tiennent une journée d'action « sans temps supplémentaire
obligatoire » le 8 avril


Manifestation contre les mauvaises conditions de travail, dont le temps supplémentaire obligatoire, le 28 mars 2019, devant les bureaux des ressources humaines
en santé dans les Laurentides

Le 8 avril, les infirmières membres de la Fédération interprofessionnelle de la santé (FIQ) organisent une journée sans temps supplémentaire obligatoire (TSO). La journée se tient sous le thème « Le temps supplémentaire obligatoire, ç'a assez duré ». Lors d'une conférence de presse à Montréal, le 2 avril, la présidente de la FIQ, Nancy Bédard, a présenté l'objectif de la journée d'action : « Le 8 avril prochain, les professionnelles en soins veulent pouvoir choisir leur santé physique et mentale, leur vie personnelle et familiale. Elles veulent, comme la grande majorité de la population, vivre une journée normale de travail. Une journée où elles ne risquent pas d'être prises en otage. Voilà l'objectif de cette journée [d'action] sans précédent », a-t-elle dit.

La présidente de la FIQ a qualifié le recours systématique au temps supplémentaire obligatoire de violence organisationnelle contre les infirmières.

« Cette pratique est devenue un réel mode de gestion qui porte atteinte aux droits des professionnelles en soins et a un impact direct sur la qualité et la sécurité des soins. La journée du 8 avril doit servir d'électrochoc pour tous les gestionnaires du réseau. Quand le TSO est 'prévu' à l'avance, on n'appelle plus cela une urgence. Le temps supplémentaire obligatoire via le code de déontologie doit être utilisé selon des mesures d'exception et d'urgence, et ce n'est pas le cas actuellement. Ce qui devait être une mesure d'exception a été érigée, dans beaucoup d'établissements, en véritable système de gestion. C'est inhumain et dangereux tant pour les professionnelles en soins que pour les patient-e-s », a-t-elle dit.

Selon la FIQ, la pratique du temps supplémentaire obligatoire dépasse largement la question des relations de travail. Elle porte atteinte à la sécurité des soins et a un impact direct sur les patients. Les femmes sont les premières victimes des heures supplémentaires obligatoires puisqu'elles représentent 90 % de la fédération. Des milliers de mères, de conjointes, de proches aidantes se voient forcées de cumuler les quarts de travail. À ce jour, leur profession demeure l'une des seules où sévit cette pratique inhumaine, et ce, de façon quotidienne.

Dans un mémoire présenté au gouvernement du Québec en mai 2018, la FIQ mentionne qu'en 2014-2015, 4,5 millions d'heures supplémentaires ont été réalisées uniquement par les infirmières québécoises. L'épuisement professionnel des travailleurs et travailleuses du réseau de la santé a atteint un niveau inégalé ces dernières années. On assiste actuellement à une véritable explosion du nombre d'invalidités pour des diagnostics d'ordre psychologique chez les travailleurs et travailleuses du réseau de la santé, notamment une hausse de 47 % au Centre intégré de santé et de services sociaux de l'Estrie (CISSS) , de 35 % au Centre universitaire de santé McGill (CUSM) et de 31 % au CISSS de Montérégie-Est. Selon la FIQ, les heures supplémentaires et le nombre d'heures travaillées par semaine ont un impact significatif sur le nombre d'erreurs commises et l'utilisation systématique des heures supplémentaires augmente de manière significative le risque de mortalité en milieu hospitalier. En 2016-2017, uniquement dans les établissements québécois, une hausse de 4 % d'incidents et d'accidents lors de prestations de soins a été observée.

Un des objectifs de la journée est de lancer un appel pressant à la ministre de la Santé et des Services sociaux afin qu'elle aille au-delà des déclarations et pose des gestes concrets pour mettre fin au temps supplémentaire obligatoire

« Cependant, ce voeu demeurera pieux si elle n'exige pas de ses gestionnaires des changements profonds », a dit Nancy Bédard. « Elle doit envoyer le message clair que le temps où on faisait reposer tout le fonctionnement du réseau de la santé sur les épaules des professionnelles en soins est révolu. Il y a urgence d'agir ! Nous lui avons fait part d'une multitude de solutions dont celle du déploiement des ratios professionnels en soins/patient-e-s par l'entremise d'une loi. Nous souhaitons qu'il y ait un avant et un après 'le 8 avril 2019'. Espérons que cette journée en sera une de grand changement. Dans le cas contraire, nous allons poursuivre notre lutte et les prochains mois pourraient être chauds », de conclure la présidente.

La FIQ compte près de 76 000 membres infirmières, infirmières auxiliaires, inhalothérapeutes et perfusionnistes cliniques oeuvrant dans les établissements de santé aux quatre coins du Québec.

(Photos: FIQ)

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Les Néo-Écossais demandent un système de santé moderne et centré sur l'humain

Le 3 avril, le Syndicat des employés du gouvernement de la Nouvelle-Écosse (NSGEU) a organisé un « rassemblement pour sonner l'ALARME face à la crise dans les soins de santé pour tous les Néo-Écossais ». Quelques jours avant le rassemblement qui s'est tenu devant le parlement de la Nouvelle-Écosse, le président du NSGEU, Jason MacLean, a accordé une entrevue à Forum ouvrier sur le but de l'action.

***

Forum ouvrier  : Quel est le but du rassemblement que vous tenez le 3 avril ?

Jason MacLean : Nous avons organisé le rassemblement pour sonner l'alarme concernant l'état des soins de santé. Nos membres réclament que nous intensifiions nos actions et que nous soyons entendus à l'Assemblée législative. Le gouvernement McNeil a déposé son budget le 26 mars et nous espérions qu'il y aurait plus de fonds pour venir en appui à nos travailleurs de la santé qui sont sur les premières lignes et à nos travailleurs sociaux. Le budget est une énorme déception, avec vraiment pas beaucoup de nouvelles sommes pour les soins de santé et rien pour les soins de première ligne, rien pour gérer les problèmes dans les soins à domicile, dans les soins de longue durée et dans les services d'urgence des hôpitaux

En fin de compte, nous avons des problèmes dans tout le système de santé. Cela commence au service des urgences où nous avons encore beaucoup de personnes qui s'y présentent, à la fois parce que plus de personnes sont en moins bonne santé et beaucoup d'autres n'ont pas de médecin de famille. Cela surcharge les services d'urgence et les personnes sont déplacées vers d'autres parties de l'édifice, ce qui a pour résultat que nous nous retrouvons avec de la « médecine de corridor ».

Aussi, nous manquons de professionnels de la santé, dont des infirmières, et nous faisons face à un employeur qui a commencé à interpréter différemment les dispositions relatives aux heures supplémentaires lors de la dernière ronde de négociations. Ils ne paient pas aux employés les heures supplémentaires alors que le système dépend des heures supplémentaires. Il y a des personnes qui font constamment des heures supplémentaires mais qui sont rémunérées à taux simple car elles ont peut-être eu un jour de congé plus tôt durant la même période de paie.

Les employés sont dissuadés de travailler ; ils ne veulent pas travailler parce qu'ils ne se sentent pas valorisés au travail et ils sont épuisés. En outre, le nombre de cas sévères parmi les patients est si élevé que de plus en plus de personnes sont admises à l'hôpital. On n'a pas créé de nouveaux lits dans les centres de soins de longue durée. À cause de cela, les patients ne peuvent pas être transférés dans des établissements de soins de longue durée et ils occupent donc des lits dans les hôpitaux.

Lorsque des personnes sont renvoyées chez ekkes pour recevoir des soins à domicile, il n'y a pas assez d'assistants en soins de longue durée (ACC) ; il n'y a pas assez de préposés aux soins à domicile pour s'occuper de cet aspect des soins. On dit aux agences qu'elles ne peuvent pas avoir de liste d'attente mais la réalité est que les gens ne peuvent pas obtenir à temps les services dont ils ont besoin car il n'y a pas assez d'ACC. En plus, à cause de la façon dont les heures sont organisées et du taux de rémunération, les gens ont tendance à vouloir travailler dans un établissement de soins de courte durée ou de longue durée plutôt que de se rendre à domicile pour prodiguer des soins.

Nous avons un problème d'afflux de patients ; nous avons trop de patients et nulle part où les placer, et personne pour les soigner, car les travailleurs qui les prennent en charge sont malmenés par le gouvernement et l'employeur. La Nova Scotia Health Authority (NSHA), l'employeur dans le secteur de la santé, est un échec colossal créé par le premier ministre McNeil lors de son accession au pouvoir. Au sein de cette autorité de la santé, la main gauche ne sait pas ce que fait la main droite. Les autorités de la santé s'inquiètent davantage des résultats financiers que des soins aux patients ou du bien-être de leur personnel.

FO  : Quelles sont vos revendications ?

JM  : Nous voulons travailler avec le gouvernement. J'ai demandé au ministre de la Santé de venir passer une journée au service des urgences et de suivre les professionnels de la santé de n'importe quel service des urgences ou d'aller dans une unité et d'observer une infirmière pendant un jour pour voir ce qui se passe dans le système. Il essaie de régler les problèmes d'admission que nous rencontrons dans les hôpitaux où les ambulanciers paramédicaux sont bloqués dans des hôpitaux en attendant qu'un patient qu'ils ont amené soit pris en charge plutôt que d'être dans la communauté à aller chercher des patients chez eux. Les gens attendent entre 6 et 12 heures pour avoir une ambulance. Jusqu'à présent, le ministre n'a pas répondu. Il n'est pas allé dans un des services d'urgence pour voir ce qui se passe.

Nous disons qu'il nous faut plus de professionnels de la santé, plus d'infirmières, plus d'ACC, plus de lits de soins de longue durée. Nous avons besoin qu'une grande attention soit portée au système de soins de santé en général, mais vous ne serez jamais en mesure de résorber les retards qui s'accumulent sans y mettre du personnel. Nous avons également besoin de plus de médecins. Les professionnels et le système ont été privés d'investissements depuis si longtemps, c'est presque comme si l'employeur et le gouvernement agissent délibérément pour que le système de santé de notre province soit mûr pour la privatisation.

Je sais qu'il y a des problèmes. Je sais que le gouvernement sait qu'il y a des problèmes mais il ne les reconnaît pas. Ils n'ont jamais reconnu l'existence d'une crise dans les soins de santé. Vous ne pouvez pas parler à un médecin, à une infirmière, à un professionnel de la santé, à quiconque travaille dans un hôpital, sans vous faire dire que ce système est en crise. C'est pourquoi nous organisons un rassemblement de deux heures devant l'Assemblée législative et attirons l'attention sur la crise des soins de santé.


(Photos: NSGEU, NSFL)

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