Le Marxiste-Léniniste

Numéro 25 - 29 juin 2019

152e anniversaire de la Confédération

Tout en oeuvre pour doter le Canada
d'une constitution moderne et d'une définition moderne des droits

Le 1er juillet est le 152e anniversaire de la Confédération. À cette date en 1867, l'Acte de l'Amérique du Nord britannique (AANB) unissait quatre colonies distinctes de l'empire britannique en Amérique du Nord au Dominion du Canada. Les nations et les peuples autochtones étaient soumis à la Loi sur les Indiens adoptée quelque temps après, une loi coloniale et raciste, et à un génocide à grande échelle. Les Métis ont également été sujets à un traitement raciste et la nation métisse n'a pas été reconnue. Le droit de la nation du Québec à l'autodétermination a été nié et les Québécois ont été une cible de la confédération. Par l'AANB, les Britanniques ont imposé un état autonome et des institutions qui leur ont procuré de grands avantages. En plus d'être soumis au pillage de ses ressources, le Canada a payé pour la défense de l'empire britannique en argent, en main-d'oeuvre et en chair à canon. Le monarque britannique a été nommé chef de l'État canadien et il le demeure à ce jour. Ce n'est pas une position strictement titulaire. En vertu des arrangements britanniques dont le Canada a hérité, une personne d'État artificielle est créée qui se voit investie de la souveraineté – le pouvoir décisionnel. Les gouvernements élus sont censés être représentatifs de la volonté des électeurs, mais ils gouvernent en fait au nom du souverain qui, en tant que personne d'État, existe au-dessus d'eux et est censé représenter l'intérêt national. Selon le site Web du Parlement:

« La Couronne joue un rôle clé dans le système parlementaire canadien. On considère que l’ensemble du pouvoir exécutif a pour origine le souverain, qui est officiellement le chef d’État du Canada. Le souverain incarne l’État, de sorte que tous les députés du pays doivent lui prêter serment d’allégeance. Cela explique également pourquoi, au Canada, on appelle souvent l’État 'la Couronne'. »

L'Acte de l'Amérique du Nord britannique de 1867 demeure le cadre constitutionnel du Canada malgré les nombreux amendements apportés au fil des années, que ce soit lorsque le Canada a acquis son indépendance formelle, lorsque le suffrage a été étendu au-delà des hommes de propriété de race blanche, à la suite du développement d'une base industrielle socialisée, ou après la formation à l'échelle du pays d'une classe ouvrière forte et instruite constituée de gens provenant de tous les coins du monde.

Cela appelle à la réflexion. Après plus de 150 ans, deux guerres mondiales et la fin de la division bipolaire du monde, la constitution et la définition des droits qui en découle doivent être modernisées pour répondre aux exigences de l'époque. Au lieu de reconnaître cette réalité, en 2017, le gouvernement libéral de Justin Trudeau a lancé un programme pour « célébrer nos valeurs communes, nos réalisations, la richesse de notre environnement et notre place dans le monde ». Cela s'est avéré un programme de promotion du néolibéralisme au pays et à l'étranger qui accélère l'intégration du Canada à la machine de guerre de l'impérialisme américain. La profession de « la diversité et l'inclusion, la réconciliation avec les peuples autochtones, l'environnement et la jeunesse » s'est avérée une phrase creuse et une tentative d'invoquer de grands idéaux pour cacher un ordre du jour néolibéral.

Cette année, une grande fête est organisée le même jour où commence la soi-disant période préélectorale. Il s'agit avant tout de promouvoir ce que le gouvernement libéral considère comme ses réalisations des quatre dernières années pour se faire réélire. Tout est fait de manière à laisser entendre que ceux qui adhèrent à une vision différente ne partagent pas les « valeurs communes » des Canadiens. Pendant ce temps, les conservateurs et les autres partis qui forment le système de partis de cartel vont se plaindre que les libéraux profitent de la tribune des festivités du 1er juillet à des fins électoralistes.

Le Parti communiste du Canada (marxiste-léniniste) saisit l'occasion pour mettre de l'avant son programme pour le renouveau démocratique. Il appelle à la modernisation de la Constitution suivant le principe que les droits nous appartiennent du fait que nous sommes des êtres humains et que le Québec, les nations autochtones et le reste du Canada doivent établir entre eux une union libre et égale.

Le PCC(M-L) croit qu'il s'agit d'une tâche historique, pas une affaire de choix de politique. Cette modernisation est nécessaire pour que ceux et celles qui produisent toute la richesse puissent occuper la place qui leur revient au centre de l'histoire et apporter les changements nécessaires pour surmonter les problèmes auxquels la société est confrontée aujourd'hui sur le plan de l'économie et sur le plan de l'environnement naturel et social.

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À titre d'information

Le Canada a besoin d'une constitution moderne

Une constitution moderne du Canada doit mettre fin à l'injustice coloniale qui étouffe les peuples autochtones et suivre le principe de relations de nation à nation avec eux. Elle doit reconnaître le droit du Québec à l'autodétermination, garantir les droits qui appartiennent aux citoyens et résidents du fait qu'ils sont des êtres humains et créer les conditions pour le renouveau démocratique du processus politique, pour que tous les résidents du Canada puissent décider directement des questions qui les concernent et qui ont un impact sur leur vie et sur la vie des peuples du monde en raison de la politique étrangère du Canada.

L'histoire appelle les peuples du Canada et du Québec et les peuples autochtones à établir entre eux des arrangements modernes basés sur une union libre et égale d'entités souveraines. Sur cette base, ils pourront affronter les défis du XXIe siècle en tant que souverains, maîtres des décisions qui les concernent et décideurs des institutions d'État et de la direction du pays.

Où réside la souveraineté

La Constitution du Canada fondée sur les arrangements du XIXe siècle de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique (AANB) considère toujours la reine d'Angleterre comme souveraine et chef de l'État du Canada. Selon la Codification administrative des lois constitutionnelles de 1867 à 1982 préparée par le ministère de la Justice : « À la Reine continueront d'être et sont par la présente attribués le gouvernement et le pouvoir exécutifs du Canada. » Lorsque l'AANB, une loi du parlement britannique, a été rapatrié au Canada en 1982, ni le premier ministre canadien d'alors Pierre Trudeau ni les premiers ministres provinciaux n'ont cru bon d'en profiter pour éliminer cet anachronisme de la loi fondamentale du Canada. Puis, durant les pourparlers qui ont mené à l'Accord du lac Meech en 1987 et dans le consensus entre le premier ministre du Canada et les dix premiers ministres provinciaux qui a mené à l'Accord de Charlottetown de 1992, personne n'a songé à recommander l'abolition de cette clause.

Transférer la souveraineté du monarque au peuple n'est pas une affaire sans importance : c'est une rupture radicale avec le pouvoir des quelques-uns qui imposent leurs intérêts étroits, pour établir le pouvoir de la multitude et faire prévaloir le grand intérêt public. À cette étape-ci de l'histoire, il est impossible d'avoir une constitution moderne conforme aux aspirations et revendications du peuple sans une définition claire et l'affirmation que c'est le peuple qui est souverain. Le pouvoir souverain décide de tous les aspects fondamentaux de la loi du pays et de tout ce qui en découle.

Cet anachronisme qui fait de la Reine d'Angleterre la souveraine du Canada n'a pas été aboli parce qu'en pratique le pouvoir souverain de l'État a été transféré au premier ministre du Canada et aux premiers ministres provinciaux en tant que Reine-en-Parlement, aux assemblées législatives et, dans le cas du Québec, à l'Assemblée nationale. Maintenir la Reine d'Angleterre comme chef de l'État à titre nominal permet à l'élite dominante de cacher ce fait. L'autorité des premiers ministres est absolue dans la tradition anglaise de concentration de pouvoir entre les mains de la couronne-en-parlement.

Lorsque le premier ministre du Canada et les premiers ministres provinciaux affirment avoir le mandat de gouverner pendant une période de temps déterminée, la Constitution canadienne leur donne le pouvoir de le faire d'une manière absolue dans le cadre de la séparation des pouvoirs fédéraux et provinciaux. Cependant, si la Constitution stipulait que la souveraineté réside dans le peuple, il lui faudrait stipuler quels droits et devoirs le peuple accorde à son gouvernement, comment le gouvernement est choisi et comment il est tenu responsable envers le peuple. Un changement à cet égard qui reconnaîtrait la souveraineté du peuple rendrait nécessaire d'établir les moyens légaux par lesquels le peuple exerce sa souveraineté. Cette modernisation d'envergure historique, qui définit l'époque, n'est pas quelque chose que l'élite dominante et ses partis cartellisés sont disposés ou aptes à accomplir.

Une démocratie qui ne donne pas aux citoyens du pays les moyens d'exercer un contrôle sur les politiques et les décisions des instances élues suivant une loi fondamentale qu'ils ont eux-mêmes adoptée est une forme de pouvoir autoritaire et absolutiste.

Les arrangements constitutionnels des quelques 150 dernières années n'ont jamais investi le peuple de la souveraineté. Au contraire, la Confédération de 1867 était un arrangement sur le partage des pouvoirs entre la Grande-Bretagne et l'élite dominante du Canada et s'intéressait principalement au partage des pouvoirs entre le gouvernement central et les provinces. La promesse de soumettre à l'approbation du peuple l'entente qui allait regrouper quatre provinces en un dominion a vite été abandonnée, puisqu'il était devenu évident qu'elle allait être rejetée. Ni le rapatriement de la Constitution de 1982 et l'ajout d'une Charte des droits et libertés, ni aucune des modifications apportées au fil des ans depuis 1867 n'ont pu remédier au fait que la Constitution du Canada n'émane pas du peuple et que la Confédération n'est pas une union libre et égale de peuples souverains.

Le Québec serait un des deux « peuples fondateurs » du Canada, mais n'est pas signataire de la Loi constitutionnelle de 1982

Le Québec n'a pas signé la Loi constitutionnelle de 1982 à cause du refus obstiné de l'élite dominante de reconnaître son droit à l'autodétermination. Toutes les tentatives de résoudre le problème de la place du Québec dans la Confédération ont échoué parce que l'élite dominante continue de maintenir les arrangements anglo-américains anachroniques qui refusent de reconnaître la souveraineté du Québec.

Un des obstacles à la résolution de la place du Québec à l'intérieur ou à l'extérieur de la Confédération, et un des moyens pratiques utilisés pour priver le peuple québécois de ses droits durant toute cette période historique, est le fait que dès le départ les aspirations du peuple à être maître de ses décisions ont été éclipsées par l'imposition de divisions basées sur des considérations relatives à l'origine nationale, la langue et la religion. Cela a commencé avec le Rapport Durham de 1839, qui déclarait que le problème au Canada était l'apparition d'une « haine mortelle qui divise les habitants du Bas-Canada en deux groupes hostiles : Français et Anglais » et que le conflit était « une lutte, non de principes, mais de races ».

Il s'agissait d'une interprétation délibérément fausse de ce qui s'était produit durant la rébellion de 1837-1838 contre le pouvoir britannique dans le Bas-Canada. C'était une application de la fameuse tactique de diviser pour régner des bâtisseurs d'empire britannique. Ils ont fait la même chose en Inde quelques décennies plus tard. Ils ont proclamé que le problème en Inde était que les musulmans et les hindous se détestent. En fait, les Indiens de toutes les origines et de toutes les religions s'étaient unis contre le pouvoir britannique durant la Guerre d'indépendance de 1857. Le mensonge goebbelsien à propos de la haine au sein du peuple a permis aux colonialistes britanniques de se présenter comme les pacificateurs et de répandre la doctrine de la « tolérance » propre à l'empire britannique. Justin Trudeau évoque cette même tolérance aujourd'hui. C'est fait pour stigmatiser ceux qui contestent les arrangements constitutionnels actuels comme étant intolérants et ignorants.

Pour s'assurer que le ressentiment fondé sur les différences ethniques et linguistiques s'empare des colonies canadiennes, le Rapport Durham recommandait ouvertement l'assimilation des « Canadiens français », qu'il qualifiait de « peuple sans histoire et sans littérature ». C'est dans cet objectif que les bâtisseurs de l'empire britannique ont imposé une union législative du Haut et du Bas-Canada et un système factionnel de gouvernement de partis. Cela allait mener à l'institutionnalisation de la politique de l'antagonisme au sein du peuple et à la division en fonction des lignes de parti basées sur leurs prétendues valeurs.

Le Parti libéral d'aujourd'hui est né d'une scission du Parti rouge créé par les patriotes pour poursuivre leur cause après l'écrasement des rébellions de 1837-1838. Certains dans le Parti rouge furent séduits par la politique de la division comme moyen de se hisser au pouvoir tandis que ceux qui s'y opposèrent et continuèrent de défendre les idées républicaines des patriotes furent persécutés, pendus, isolés, emprisonnés, abandonnés et même ostracisés par l'Église qui interdisait la lecture de leurs écrits. Les champions de la politique de division allaient créer le Parti libéral du Canada après la Confédération.

La lutte pour la république dans le Bas-Canada contre le pouvoir colonial antidémocratique et l'élite dominante représentée par la Clique du Château, constituée de riches et puissants marchands, avait réuni toutes les personnes éprises de démocratie toutes origines confondues. Cette lutte s'accompagna d'un soulèvement parallèle dans le Haut-Canada mené par William Lyon Mackenzie contre les privilèges et l'emprise de la clique dominante appelée le Family Compact.

La politique de division a été utilisée depuis pour accabler le peuple québécois et comme instrument d'oppression de la nation québécoise. Elle a des adhérents à l'intérieur comme à l'extérieur du Québec, et même à l'intérieur du mouvement nationaliste. La motion adoptée en 2006 par le gouvernement de Stephen Harper « reconnaissant la nation du Québec » stipule que la Chambre « reconnaît que les Québécois forment une nation au sein d'un Canada uni ». Le mot « québécois » est utilisé en anglais également, pour signifier un groupe particulier de Québécois. La motion de 2006 limite la nation du Québec à un groupe ethnique dont la langue est le français. Elle n'inclut pas les Québécois qui parlent une autre langue ou qui ont une autre origine nationale et ne prévoit pas un rapport de nation à nation avec les peuples autochtones dont les territoires non cédés sont habités. Elle introduit une notion diffuse de Québécois sans un territoire précis et éparpillés dans des communautés de gens d'origine canadienne-française partout au Canada. Avec cette définition alambiquée, la « nation du Québec » ne peut jamais être conçue comme étant souveraine et ayant le droit à l'autodétermination, et surtout pas le droit de sécession. Comme pour tout mariage, seule une union d'égaux librement consentie permet l'épanouissement de chacun des éléments de l'union.

La stratégie de confiner la nation du Québec à un groupe ethnique était également celle de Pierre-Elliott Trudeau pour nier son existence et pour enlever au peuple québécois ses droits nationaux. Dans les années 1960, Pierre Trudeau a proclamé que le nationalisme était « arriéré » et un ennemi de l'État moderne, imposant sa définition irrationnelle et intéressée de la nation. Il affirmait que la nation du Québec n'existait pas et qu'il s'agissait uniquement d'un vaste groupe ethnique au sein du Canada. Le « biculturalisme » a été proclamé politique officielle de l'État canadien comme moyen de contourner les revendications et aspirations de la nation du Québec et aussi des nations autochtones et pour affaiblir l'unité de tous les peuples du Canada et d'origine autochtone et leur demande de nouveaux arrangements pour résister au projet d'empire et d'annexion de l'impérialisme américain.

Après l'élection fédérale d'octobre 2015, Justin Trudeau a appliqué un concept semblable au Canada : « Aujourd'hui, il n'y a pas d'identité profonde ou de courant dominant au Canada, a-t-il dit. Il y a des valeurs qui sont partagées — l'ouverture, le respect, la compassion, la volonté de travailler dur, être là les uns pour les autres, rechercher l'égalité et la justice. » Il a ajouté que « ce sont ces qualités qui font de nous le premier État postnational ».

En ce qui concerne le Québec, Justin Trudeau a dit à plusieurs occasions que « le nationalisme est une vieille idée du XIX siècle » basée « sur une petitesse d'esprit qui construit des barrières entre les gens ».

Ce désir de Trudeau fils de faire du Canada le « premier État postnational » aide à mettre en perspective les dissertations de Trudeau père sur le nationalisme dans les années 1960 et 1970. L'attaque des Trudeau père et fils contre ce qu'ils appellent le nationalisme étroit d'esprit se résume au fond à une attaque contre le droit du peuple de bâtir son pouvoir décisionnel à son niveau, contre la concentration du pouvoir entre les mains de la toute petite minorité privilégiée qui s'exerce aujourd'hui au niveau supranational dans l'ensemble économique néolibéral mondial. La lutte pour l'affirmation de ce droit commence avec la rébellion contre le contrôle colonial et l'emprise des riches marchands de la Clique du château au XIXe siècle et comprend la lutte pour mettre fin au pouvoir de puissants oligopoles supranationaux qui agissent au niveau mondial et disposent d'un bras armé, l'OTAN.

Il y a un refus obstiné de reconnaître le droit du Québec à l'autodétermination et le droit du peuple d'exister et de se gouverner avec des institutions modernes. Ce refus s'accompagne de tentatives constantes de diviser le peuple sur toutes les questions. L'élite dominante est incapable de doter le Canada de la perspective moderne d'une union libre et égale des peuples du Canada et du Québec et des peuples autochtones. Dans le fédéralisme canadien fondé sur les notions libérales des bâtisseurs d'empire, le peuple est sujet et le pouvoir souverain réside dans le monarque.  C'est aujourd'hui une façade pour la concentration du pouvoir dans le bureau du premier ministre agissant pour le compte des monopoles les plus puissants, à la base du système impérialiste d'États dominé par les États-Unis.

La nécessité de mettre fin à l'injustice coloniale et à la
négation des droits et de bâtir des relations de nation à nation
avec les peuples autochtones

La Constitution canadienne ne reconnaît pas les droits ancestraux inhérents et les droits issus de traités des peuples autochtones et ne reconnaît pas la souveraineté de leurs nations. Les droits ancestraux des peuples autochtones sont leur droit d'être et leur droit de vivre sur leurs territoires traditionnels selon ce que leur enseigne leur matériel de pensée, la façon dont eux-mêmes définissent leurs besoins et ce dont ils ont besoin en ce XXIe siècle pour concrétiser leurs droits et leur donner pleine expression. L'invasion coloniale a été un effort pour nier les droits ancestraux et les autres droits et le développement des peuples qui habitaient l'Île de la Tortue, l'Abya Yala et d'autres territoires des Amériques depuis des temps immémoriaux. Pour que justice soit faite, cette négation des droits doit elle-même être niée et des relations de nation à nation doivent être établies de manière concrète pour que les peuples autochtones puissent s'épanouir.

La Constitution ne reconnaît pas les responsabilités fiduciaires du Canada en tant que pays qui s'est bâti par l'appropriation coloniale, l'occupation et l'exploitation des territoires et du travail des autochtones et les tentatives génocidaires d'éliminer les autochtones en tant que peuples. En vertu de ces responsabilités fiduciaires, le niveau de vie le plus élevé doit être garanti aux peuples autochtones et tous les services requis doivent leur être fournis, au niveau le plus élevé possible. Le renouvellement sur une base moderne des relations entre des nations autochtones souveraines, un Québec souverain, un Canada souverain, des peuples souverains en tant qu'individus et collectifs, est essentiel au renouveau de la Confédération et à la modernisation des conditions de vie elles-mêmes.

Les politiques du gouvernement libéral et la négation par l'opposition conservatrice, qui rivalisent pour former le prochain gouvernement, sont dénuées de principe. Le sous-ministre adjoint de Justin Trudeau aux affaires de traités et au gouvernement autochtone, Joe Wild, l'a bien exprimé quand il a dit au sujet des moyens d'« insuffler une nouvelle vie » à la Constitution canadienne et des relations du Canada avec les Premières Nations et leur souveraineté : « Il y a une notion de souveraineté qui peut encore exister d'une manière qui ne menace pas le tissu de la nation. Il peut y avoir quelques domaines où vous devez être un peu prudent, comme mettre en place une armée, la frontière du pays par rapport aux autres pays, mais le reste ? Vous pourriez probablement trouver des moyens où cela pourrait fonctionner et ne menacerait pas le statut du Canada en tant que Canada. »[1]

Wild a aussi dit que son gouvernement allait traiter avec chaque communauté ou nation autochtone comme une entité séparée, dans le but d'en arriver à une entente avec chacune d'entre elles séparément.

Ces propos illustrent bien la continuation de la relation coloniale d'oppression que réitère le gouvernement Trudeau aujourd'hui lorsqu'il dit qu'il va continuer de prendre des décisions qui affectent les peuples autochtones sans leur consentement. La lutte des nations autochtones pour la souveraineté sur leurs terres et dans toute prise de décision n'a pas à répondre à un pouvoir au-dessus d'elles qui décide pour elles et prétend représenter le tissu social de la nation. Être souverain veut dire que ce sont les peuples autochtones qui décident et que les relations entre elles et le Canada sont des relations entre entités souveraines et que cette relation moderne est enchâssée dans la Constitution. Le renouveau de la Constitution doit éliminer tout vestige des relations coloniales et bannir les expressions passe-partout comme « approche de collaboration » qui en pratiquent servent à maintenir le statu quo.

La demande d'une constitution moderne est une lutte de plus qui vient renforcer l'unité d'action entre les peuples autochtones, canadien et québécois qui réclament leurs droits. La lutte de tous ces peuples est essentiellement une seule lutte pour le renouveau politique et constitutionnel pour que les droits de tous puissent être garantis dans une constitution moderne qui reconnaît, soutient et garantit les droits de tous. L'État colonial raciste du XIXe siècle et sa constitution régressive font obstacle à l'avancement auquel tous les peuples aspirent, comme individus et comme collectifs.

C'est le temps maintenant que les femmes et les jeunes, avec tous les travailleurs et leurs alliés dans les autres couches et classes de la société au Canada et au Québec, travaillent avec les peuples autochtones pour renouveler en profondeur les arrangements politiques de la société et priver les autorités de leur pouvoir de priver le peuple de ses droits. Ce sont les peuples eux-mêmes qui doivent être investis du pouvoir de prendre contrôle de leurs affaires économiques, politiques et sociales. Le renouveau constitutionnel et politique est une condition préalable à une réconciliation véritable entre les peuples autochtones, le Canada et le Québec.

La Constitution de 1982 ne garantit pas les droits
des citoyens et des résidents

L'histoire récente du Canada témoigne d'une offensive généralisée contre les droits et les libertés des citoyens et des résidents au nom de la « sécurité nationale », de la « lutte contre le terrorisme » et de la « prospérité économique ». Les droits des électeurs seront niés lors des prochaines élections sous prétexte d'empêcher l'ingérence de puissances étrangères qui mèneraient une « guerre hybride » contre les élections canadiennes. Au nom de la protection de la démocratie, la liberté d'expression est autorisée seulement dans la mesure où la police politique considère qu'elle n'est pas préjudiciable à l'intérêt national. Le principe que les personnes ont des droits en tant qu'êtres humains dans toutes les conditions et que l'État a l'obligation de garantir ces droits ne guide pas l'action du gouvernement. La Trans Mountain Corporation a été rachetée et le projet d'agrandissement de l'oléoduc Trans Mountain a été approuvé en utilisant les prérogatives du gouvernement, au mépris des graves préoccupations exprimées au sujet de l'environnement et de l'obligation d'obtenir le consentement de nombreux peuples autochtones.

La Charte canadienne des droits et libertés a été incorporée à la Constitution rapatriée en 1982. L'article 1 de la Charte affirme que les droits et libertés « ne peuvent être restreints que par une règle de droit, dans des limites qui soient raisonnables et dont la justification puisse se démontrer dans le cadre d'une société libre et démocratique ». La Charte est maintenant rongée par la crise et le discrédit parce que les limites raisonnables ont été usurpées par les pouvoirs arbitraires de l'État, des pouvoirs de police qui permettent de dicter quels droits le peuple peut et ne peut pas avoir, comme l'a fait Lord Durham au XIXe siècle au nom du pouvoir de police colonial. Cette usurpation a mené à un processus arbitraire de criminalisation sans fin de la conscience et d'attaques contre les luttes que mène le peuple contre l'offensive antisociale et les plans de guerre et de changement de régime de l'élite dirigeante du côté des impérialistes américains et de l'alliance de l'OTAN dominée par les États-Unis.

Les attaques contre les droits, menées sous prétexte de circonstances exceptionnelles, sont devenues la norme, et des communautés, comme la communauté musulmane, font face au profilage et sont la cible d'attaques sans qu'elles aient un droit de recours. L'absence d'une constitution qui prescrit des droits inaliénables et rend cette question justiciable est profondément ressentie dans tout le pays.

En plus, les arrangements qui sont à la base de la Confédération sont en train d'être détruits alors que des intérêts mondiaux ont pris le contrôle des gouvernements à tous les niveaux — fédéral, provincial et municipal. Ceux-ci sont devenus les instruments de prises de décision sur une base supranationale, que ce soit par le G7, le G20, le FMI, l'OTAN ou autres.

L'élite dirigeante ne considère plus les vieux arrangements de partage des pouvoirs entre les gouvernements fédéral et provinciaux comme étant utiles aux aventures des intérêts mondiaux les plus puissants. Ceux-ci ne reconnaissent ni juridiction ni limitation au droit de monopole et à leur course à la domination mondiale. Les contradictions sur les ententes de partage de pouvoirs fédéraux et provinciaux ont dégénéré en combats acharnés entre gouvernements servant différents intérêts privés à l'échelle mondiale. On le voit dans les conflits sur la taxe sur le carbone et les oléoducs, les paiements de transfert en santé, l'allocation des fonds aux projets d'infrastructure et plusieurs autres questions.

Au cours de la dernière année, le cabinet du premier ministre et certains hauts fonctionnaires se sont fait prendre à s'immiscer dans le prétendu pouvoir judiciaire indépendant au nom du monopole mondial SNC-Lavalin - un fait de corruption au sens strict du terme, une violation de la séparation des pouvoirs censée caractériser les « États de droit », ce que les libéraux ne se lassent jamais de répéter. Ils ont également été exposés comme des violateurs en série de l'état de droit sur le plan international par leur participation ouverte à des conspirations avec les États-Unis pour déstabiliser et renverser les gouvernements visés par des interventions de changement de régime et, dans le cas de la République bolivarienne du Venezuela, infliger une punition collective à sa population sous forme de sanctions économiques.

Le besoin de renouveler la Constitution afin d'investir le peuple de la souveraineté et de garantir ses droits en tant que fondement de la souveraineté canadienne n'a jamais été si grand. Loin d'être quelque chose dépassée ou une source de « division », comme le prétend l'élite dirigeante, le renouveau politique et constitutionnel est vital pour ouvrir la voie au progrès de la société. À cet égard, la classe ouvrière et les autres classes et couches de la population doivent saisir l'occasion de l'anniversaire de la Confédération pour examiner l'évolution des institutions démocratiques du Canada, les intérêts qu'elles servent, quelle direction elles prennent et ce qu'on doit faire pour donner forme et contenu aux aspirations du peuple à la souveraineté, à l'habilitation politique, aux idées éclairées et au droit de décider et de contrôler les affaires politiques, économiques et sociales qui affectent leur vie. Cette initiative est à la fois opportune et nécessaire pour que nous puissions tracer notre destinée à notre avantage.

Les constitutions et les questions constitutionnelles ne doivent pas être le monopole d'une élite dirigeante qui les exploite pour ses propres intérêts étroits. Elles appartiennent au peuple qui lutte pour défendre ses droits. Les Canadiens veulent enchâsser et codifier dans une Constitution les définitions modernes auxquelles ils aspirent et qui correspondent aux conditions concrètes. La lutte pour renouveler la Confédération sur une base moderne est un instrument que le peuple a dans ses mains pour faire progresser l'intérêt public, ouvrir une voie vers l'avant et faire échec à l'arbitraire, à la régression, à l'anarchie, à la violence et aux guerres que l'élite dirigeante nous impose.

Poursuivons notre travail organisé pour établir une constitution moderne et une union libre et égale de peuples souverains dont les droits sont reconnus et garantis.

Note

1. 4 juin 2017

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