Numéro 25 - 29 juin 2019
152e
anniversaire de la Confédération
Tout en oeuvre
pour doter le Canada
d'une constitution moderne et d'une définition moderne des droits
Le 1er juillet est le 152e anniversaire de la
Confédération. À cette date en 1867, l'Acte
de
l'Amérique
du
Nord
britannique (AANB) unissait quatre colonies
distinctes de l'empire britannique en Amérique du Nord au
Dominion du Canada. Les nations et les peuples autochtones
étaient soumis à la Loi sur les Indiens adoptée
quelque
temps
après, une
loi coloniale et raciste, et à un génocide
à grande échelle. Les Métis ont également
été sujets à un traitement raciste et la nation
métisse n'a pas été reconnue. Le droit de la
nation du Québec à l'autodétermination a
été nié et les Québécois ont
été une cible de la confédération. Par
l'AANB, les
Britanniques ont imposé un état autonome et des
institutions qui leur ont procuré de grands avantages. En plus
d'être soumis au pillage de ses ressources, le Canada a
payé pour la défense de l'empire britannique en argent,
en main-d'oeuvre et en chair à canon. Le monarque britannique a
été nommé chef de l'État canadien et il le
demeure à ce
jour. Ce n'est pas une position strictement titulaire. En vertu des
arrangements
britanniques dont le Canada a hérité, une personne
d'État artificielle est créée qui se voit investie
de la souveraineté – le pouvoir décisionnel. Les
gouvernements élus sont censés être
représentatifs de la volonté des électeurs, mais
ils gouvernent en fait au nom du souverain qui, en
tant que personne d'État, existe au-dessus d'eux et est
censé représenter l'intérêt national. Selon
le site Web du Parlement:
« La Couronne joue un rôle clé dans
le système parlementaire canadien. On considère que
l’ensemble du pouvoir exécutif a pour origine le souverain, qui
est officiellement le chef d’État du Canada. Le souverain
incarne l’État, de sorte que tous les députés du
pays doivent lui prêter serment d’allégeance. Cela
explique également pourquoi, au Canada, on appelle souvent
l’État 'la Couronne'. »
L'Acte de
l'Amérique du Nord britannique de 1867 demeure le cadre
constitutionnel du Canada malgré les nombreux amendements
apportés au fil des années, que ce soit lorsque le Canada
a acquis son indépendance formelle, lorsque le suffrage a
été étendu au-delà des hommes de
propriété de race blanche, à la suite du
développement d'une base industrielle socialisée, ou
après la formation à l'échelle du pays d'une
classe ouvrière forte et instruite constituée de gens
provenant de tous les coins du monde.
Cela appelle à la réflexion. Après
plus de 150 ans, deux guerres mondiales et la fin de la division
bipolaire du monde, la constitution et la définition des droits
qui en découle doivent être modernisées pour
répondre aux exigences de l'époque. Au lieu de
reconnaître cette réalité, en 2017, le
gouvernement libéral de Justin Trudeau a
lancé un programme pour « célébrer nos
valeurs communes, nos réalisations, la richesse de notre
environnement et notre place dans le monde ». Cela s'est
avéré un programme de promotion du
néolibéralisme au pays et à l'étranger qui
accélère l'intégration du Canada à la
machine de guerre de l'impérialisme américain. La
profession de « la
diversité et l'inclusion, la réconciliation avec les
peuples autochtones, l'environnement et la jeunesse » s'est
avérée une phrase creuse et une tentative d'invoquer de
grands idéaux pour cacher un ordre du jour
néolibéral.
Cette année, une grande fête est
organisée le même jour où commence la soi-disant
période préélectorale. Il s'agit
avant tout de promouvoir ce que le gouvernement libéral
considère comme ses réalisations des quatre
dernières années pour se faire réélire.
Tout est fait de manière à laisser entendre que ceux qui
adhèrent à une vision différente ne partagent pas
les «
valeurs communes » des Canadiens. Pendant ce temps, les
conservateurs et les autres partis
qui forment le système de partis de cartel vont se plaindre que
les
libéraux profitent de la tribune des festivités
du 1er juillet à des fins électoralistes.
Le Parti communiste du Canada
(marxiste-léniniste) saisit l'occasion pour mettre de l'avant
son programme pour le renouveau démocratique. Il appelle
à la modernisation de la Constitution suivant le principe que
les droits nous appartiennent du fait que nous sommes des êtres
humains et que le Québec, les nations autochtones et le reste du
Canada doivent établir entre eux une union libre et égale.
Le PCC(M-L) croit qu'il s'agit d'une tâche
historique, pas une affaire de choix de politique. Cette modernisation
est nécessaire pour que ceux et celles qui produisent toute la
richesse puissent occuper la place qui leur revient au centre de
l'histoire et apporter les changements nécessaires pour
surmonter les problèmes auxquels la société est
confrontée aujourd'hui sur le plan de l'économie et sur
le plan de l'environnement naturel et social.
Pour vous tenir au courant des activités et des
écrits du PCC(M-L) durant l'année qui vient,
écrivez à bureau@cpcml.ca.
À titre d'information
Le Canada a besoin d'une constitution moderne
Une constitution moderne du Canada doit mettre
fin à l'injustice coloniale qui étouffe les peuples
autochtones et suivre le principe de relations de nation à
nation avec eux. Elle doit reconnaître le droit du Québec
à l'autodétermination, garantir les droits qui
appartiennent aux citoyens et résidents du fait qu'ils sont des
êtres humains et créer
les conditions pour le renouveau démocratique du processus
politique, pour que tous les résidents du Canada puissent
décider directement des questions qui les concernent et qui ont
un impact sur leur vie et sur la vie des peuples du monde en raison de
la politique étrangère du Canada.
L'histoire appelle les peuples du Canada et du
Québec et les peuples autochtones à établir entre
eux des arrangements modernes basés sur une union libre et
égale d'entités souveraines. Sur cette base, ils pourront
affronter les défis du XXIe siècle en tant que
souverains, maîtres des décisions qui les concernent et
décideurs des institutions d'État
et de la direction du pays.
Où réside la souveraineté
La Constitution du Canada fondée sur les
arrangements du XIXe siècle de l'Acte de l'Amérique
du Nord britannique (AANB) considère toujours la reine
d'Angleterre comme souveraine et chef de l'État du Canada. Selon
la Codification administrative des lois constitutionnelles
de 1867 à 1982 préparée par le
ministère de la Justice : « À la Reine
continueront d'être et sont par la présente
attribués le gouvernement et le pouvoir exécutifs du
Canada. » Lorsque l'AANB, une loi du parlement britannique,
a été rapatrié au Canada en 1982, ni le
premier ministre canadien d'alors Pierre Trudeau ni les premiers
ministres provinciaux n'ont
cru bon d'en profiter pour éliminer cet anachronisme de la loi
fondamentale du Canada. Puis, durant les pourparlers qui ont
mené
à l'Accord du lac Meech en 1987 et dans le consensus entre
le premier ministre du Canada et les dix premiers ministres provinciaux
qui a mené à l'Accord de Charlottetown de 1992,
personne n'a songé à
recommander l'abolition de cette clause.
Transférer la souveraineté du monarque au
peuple n'est pas une affaire sans importance : c'est une rupture
radicale avec le pouvoir des quelques-uns qui imposent leurs
intérêts étroits, pour établir le pouvoir de
la multitude et faire prévaloir le grand intérêt
public. À cette étape-ci de l'histoire, il est
impossible d'avoir une constitution moderne conforme aux aspirations et
revendications du peuple sans une définition claire et
l'affirmation que c'est le peuple qui est souverain. Le pouvoir
souverain décide de tous les aspects fondamentaux de la loi du
pays et de tout ce qui en découle.
Cet anachronisme qui fait de la Reine d'Angleterre la
souveraine du Canada n'a pas été aboli parce qu'en
pratique le pouvoir souverain de l'État a été
transféré au premier ministre du Canada et aux premiers
ministres provinciaux en tant que Reine-en-Parlement, aux
assemblées législatives et, dans le cas du Québec,
à l'Assemblée nationale.
Maintenir la Reine d'Angleterre comme chef de l'État à
titre nominal permet à l'élite dominante de cacher ce
fait. L'autorité des premiers ministres est absolue dans la
tradition anglaise de concentration de pouvoir entre
les mains de la couronne-en-parlement.
Lorsque le premier ministre du Canada et les premiers
ministres provinciaux
affirment avoir le mandat de gouverner pendant une période de
temps déterminée, la Constitution canadienne leur donne
le pouvoir de le faire d'une manière absolue dans le cadre de la
séparation des pouvoirs fédéraux et provinciaux.
Cependant, si la Constitution stipulait que la souveraineté
réside dans le peuple, il lui faudrait stipuler quels droits
et devoirs le peuple accorde à son gouvernement, comment le
gouvernement est choisi et comment il est tenu responsable envers le
peuple. Un changement à cet égard qui reconnaîtrait
la souveraineté du peuple rendrait nécessaire
d'établir les moyens légaux par lesquels le peuple exerce
sa souveraineté. Cette modernisation d'envergure historique,
qui définit l'époque, n'est pas quelque chose que
l'élite dominante et ses partis cartellisés sont
disposés ou aptes à accomplir.
Une démocratie qui ne donne pas aux citoyens du
pays les moyens d'exercer un contrôle sur les politiques et les
décisions des instances élues suivant une loi
fondamentale qu'ils ont eux-mêmes adoptée est une forme de
pouvoir autoritaire et absolutiste.
Les arrangements constitutionnels des quelques 150
dernières années n'ont jamais investi le peuple de la
souveraineté. Au contraire, la Confédération
de 1867 était un arrangement sur le partage des pouvoirs
entre la Grande-Bretagne et l'élite dominante du Canada et
s'intéressait principalement au
partage des pouvoirs entre le gouvernement central et les provinces. La
promesse de soumettre à l'approbation du peuple l'entente qui
allait regrouper quatre provinces en un dominion a vite
été abandonnée, puisqu'il était devenu
évident qu'elle allait être rejetée. Ni le
rapatriement de la Constitution de 1982 et l'ajout d'une Charte
des
droits
et
libertés, ni aucune des modifications
apportées au fil des ans depuis 1867 n'ont pu
remédier au fait que la Constitution du Canada n'émane
pas du peuple et que la Confédération n'est pas une union
libre et égale de peuples souverains.
Le Québec serait un des deux « peuples
fondateurs » du Canada, mais n'est pas signataire de la Loi
constitutionnelle
de 1982
Le Québec n'a pas signé la Loi
constitutionnelle de 1982 à cause du refus
obstiné de l'élite dominante de reconnaître son
droit à l'autodétermination. Toutes les tentatives de
résoudre le problème de la place du Québec dans la
Confédération ont échoué parce que
l'élite dominante continue de maintenir les arrangements
anglo-américains anachroniques qui refusent de reconnaître
la souveraineté du Québec.
Un des obstacles à
la résolution de la place du Québec à
l'intérieur ou à l'extérieur de la
Confédération, et un des moyens pratiques utilisés
pour priver le peuple québécois de ses droits durant
toute cette période historique, est le fait que dès le
départ les
aspirations du peuple à être maître de ses
décisions ont été éclipsées par
l'imposition de divisions basées sur des considérations
relatives à l'origine nationale, la langue et la religion. Cela
a commencé avec le Rapport Durham de 1839, qui
déclarait que le problème au Canada était
l'apparition d'une « haine mortelle qui divise les habitants du
Bas-Canada en deux groupes hostiles : Français et
Anglais » et que le conflit était « une lutte,
non de principes, mais de races ».
Il s'agissait d'une interprétation
délibérément fausse de ce qui s'était
produit durant la rébellion de 1837-1838 contre le pouvoir
britannique dans le Bas-Canada. C'était une application de la
fameuse tactique de diviser pour régner des bâtisseurs
d'empire britannique. Ils ont fait la même chose en Inde quelques
décennies plus tard. Ils ont proclamé que le
problème en Inde était que les musulmans et les hindous
se détestent. En fait, les Indiens de toutes les origines et de
toutes les religions s'étaient unis contre le pouvoir
britannique
durant la Guerre d'indépendance de 1857. Le mensonge
goebbelsien à propos de la haine au sein du peuple a permis aux
colonialistes britanniques de se présenter comme les
pacificateurs et de répandre la doctrine de la «
tolérance » propre à l'empire britannique.
Justin Trudeau évoque cette même tolérance
aujourd'hui. C'est fait pour
stigmatiser ceux qui contestent les arrangements constitutionnels
actuels comme étant intolérants et ignorants.
Pour s'assurer que le ressentiment fondé sur les
différences ethniques et linguistiques s'empare des colonies
canadiennes, le Rapport Durham recommandait ouvertement l'assimilation
des « Canadiens français », qu'il qualifiait de
« peuple sans
histoire et sans littérature ». C'est dans cet
objectif que les bâtisseurs de l'empire britannique ont
imposé une union législative du Haut et du Bas-Canada et
un système factionnel de gouvernement de partis. Cela allait
mener à l'institutionnalisation de la politique de l'antagonisme
au sein du peuple et à la division en fonction des lignes de
parti basées sur leurs prétendues valeurs.
Le Parti libéral d'aujourd'hui est né
d'une scission du Parti rouge créé par les
patriotes pour poursuivre leur cause après l'écrasement
des rébellions de 1837-1838. Certains dans le Parti rouge
furent séduits par la politique de la division comme moyen de se
hisser au pouvoir tandis que ceux qui s'y opposèrent et
continuèrent de
défendre les idées républicaines des patriotes
furent persécutés, pendus, isolés,
emprisonnés, abandonnés et même ostracisés
par l'Église qui interdisait la lecture de leurs écrits.
Les champions de la politique de division allaient créer le
Parti libéral du Canada après la
Confédération.
La lutte pour la
république dans le Bas-Canada contre le pouvoir colonial
antidémocratique et l'élite dominante
représentée par la Clique du Château,
constituée de riches et puissants marchands, avait réuni
toutes les personnes éprises de démocratie toutes
origines confondues. Cette lutte s'accompagna d'un soulèvement
parallèle dans le
Haut-Canada mené par William Lyon Mackenzie contre les
privilèges et l'emprise de la clique dominante appelée le
Family Compact.
La politique de division a été
utilisée depuis pour accabler le peuple québécois
et comme instrument d'oppression de la nation québécoise.
Elle a des adhérents à l'intérieur comme à
l'extérieur du Québec, et même à
l'intérieur du mouvement nationaliste. La motion adoptée
en 2006 par le gouvernement de Stephen Harper « reconnaissant la
nation du Québec » stipule que la Chambre «
reconnaît que les Québécois forment une
nation au sein d'un Canada uni ». Le mot «
québécois » est utilisé en anglais
également, pour signifier un groupe particulier de
Québécois. La motion de 2006 limite la nation du
Québec à un groupe ethnique dont la langue est le
français. Elle n'inclut pas les Québécois qui
parlent une autre langue ou qui ont une autre origine nationale et ne
prévoit pas un rapport de nation à nation avec les
peuples autochtones dont les territoires non cédés sont
habités. Elle introduit une notion diffuse de Québécois
sans un territoire précis et éparpillés dans des
communautés de gens
d'origine canadienne-française partout au Canada. Avec cette
définition alambiquée, la « nation du
Québec » ne peut jamais être conçue
comme étant souveraine et ayant le droit à
l'autodétermination, et surtout pas le droit de
sécession. Comme pour tout mariage, seule une union
d'égaux librement consentie permet l'épanouissement de
chacun des éléments de l'union.
La stratégie de confiner la nation du
Québec à un groupe ethnique était également
celle de Pierre-Elliott Trudeau pour nier son existence et pour enlever
au peuple québécois ses droits nationaux. Dans les
années 1960, Pierre Trudeau a proclamé que le
nationalisme était « arriéré » et
un ennemi de l'État moderne, imposant sa
définition irrationnelle et intéressée de la
nation. Il affirmait que la nation du Québec n'existait pas et
qu'il s'agissait uniquement d'un vaste groupe ethnique au sein du
Canada. Le « biculturalisme » a été
proclamé politique officielle de l'État canadien comme
moyen de contourner les revendications et aspirations de la nation du
Québec et
aussi des nations autochtones et pour affaiblir l'unité de tous
les peuples du Canada et d'origine autochtone et leur demande de
nouveaux arrangements pour résister au projet d'empire et
d'annexion de l'impérialisme américain.
Après l'élection fédérale
d'octobre 2015, Justin Trudeau a appliqué un concept
semblable au Canada : «
Aujourd'hui, il n'y a pas d'identité profonde ou de courant
dominant au Canada, a-t-il dit. Il y a des valeurs qui sont
partagées — l'ouverture, le respect, la compassion, la
volonté de travailler dur, être là les uns pour les
autres, rechercher l'égalité et la justice. »
Il a ajouté que « ce sont ces qualités qui font de
nous le premier État
postnational ».
En ce qui concerne le Québec, Justin Trudeau a
dit à plusieurs occasions que « le nationalisme est une
vieille idée du XIX siècle » basée
« sur une petitesse d'esprit qui construit des barrières
entre les gens ».
Ce désir de Trudeau fils de faire du Canada le
« premier État postnational » aide à
mettre en perspective les dissertations de Trudeau père sur le
nationalisme dans les années 1960 et 1970. L'attaque
des Trudeau père et fils contre ce qu'ils appellent le
nationalisme étroit d'esprit se résume au fond à
une attaque contre le droit
du peuple de bâtir son pouvoir décisionnel à son
niveau, contre la concentration du pouvoir entre les mains de la toute
petite minorité privilégiée qui s'exerce
aujourd'hui au niveau supranational dans l'ensemble économique
néolibéral mondial. La lutte pour l'affirmation de ce
droit commence avec la rébellion contre le contrôle
colonial et l'emprise
des riches marchands de la Clique du château au XIXe
siècle et comprend la lutte pour mettre fin au pouvoir de
puissants oligopoles supranationaux qui agissent au niveau mondial et
disposent d'un bras armé, l'OTAN.
Il y a un refus obstiné de reconnaître le
droit du Québec à l'autodétermination et le droit
du peuple d'exister et de se gouverner avec des institutions modernes.
Ce refus s'accompagne de tentatives constantes de diviser le peuple
sur toutes les questions. L'élite dominante est incapable de
doter le Canada de la perspective moderne d'une union
libre et égale des peuples du Canada et du Québec et des
peuples autochtones. Dans le fédéralisme canadien
fondé sur les notions libérales des bâtisseurs
d'empire, le peuple est sujet et le pouvoir souverain réside
dans le monarque. C'est aujourd'hui une façade pour la
concentration du pouvoir dans le bureau du premier ministre agissant
pour le
compte des monopoles les plus puissants, à la base du
système impérialiste d'États dominé par les
États-Unis.
La nécessité de mettre fin à
l'injustice coloniale et à la
négation des droits et de bâtir des relations de nation
à nation
avec les peuples autochtones
La Constitution canadienne
ne reconnaît pas les droits ancestraux inhérents et les
droits issus de traités des peuples autochtones et ne
reconnaît pas la souveraineté de leurs nations. Les droits
ancestraux des peuples autochtones sont leur droit d'être et leur
droit de vivre sur leurs territoires traditionnels selon ce que leur
enseigne leur matériel de
pensée, la façon dont eux-mêmes définissent
leurs besoins et ce dont ils ont besoin en ce XXIe siècle pour
concrétiser leurs droits et leur donner pleine expression.
L'invasion coloniale a été un effort pour nier les droits
ancestraux et les autres droits et le développement des peuples
qui habitaient l'Île de la Tortue, l'Abya Yala et d'autres
territoires
des Amériques depuis des temps immémoriaux. Pour que
justice soit faite, cette négation des droits doit
elle-même être niée et des relations de nation
à nation doivent être établies de manière
concrète pour que les peuples autochtones puissent
s'épanouir.
La Constitution ne reconnaît pas les
responsabilités fiduciaires du Canada en tant que pays
qui s'est bâti par l'appropriation coloniale, l'occupation et
l'exploitation des territoires et du travail des autochtones et les
tentatives génocidaires d'éliminer les autochtones en
tant que peuples. En vertu de ces responsabilités fiduciaires,
le niveau de vie le plus élevé doit être garanti
aux peuples autochtones et tous les services requis doivent leur
être
fournis, au niveau le plus élevé possible. Le
renouvellement sur une base moderne des relations entre des nations
autochtones souveraines, un Québec souverain, un Canada
souverain, des peuples souverains en tant qu'individus et collectifs,
est essentiel au renouveau de la Confédération et
à la modernisation des conditions de vie elles-mêmes.
Les politiques du gouvernement libéral et la
négation par l'opposition conservatrice, qui rivalisent pour
former le prochain gouvernement, sont dénuées de
principe. Le sous-ministre adjoint de Justin Trudeau aux affaires de
traités et au gouvernement autochtone, Joe Wild, l'a bien
exprimé quand il a dit au sujet des moyens d'« insuffler
une
nouvelle vie » à la Constitution canadienne et des
relations du Canada avec les Premières Nations et leur
souveraineté : « Il y a une notion de
souveraineté qui peut encore exister d'une manière qui ne
menace pas le tissu de la nation. Il peut y avoir quelques domaines
où vous devez être un peu prudent, comme mettre en place
une
armée, la frontière du pays par rapport aux autres pays,
mais le reste ? Vous pourriez probablement trouver des moyens
où cela pourrait fonctionner et ne menacerait pas le statut du
Canada en tant que Canada. »[1]
Wild a aussi dit que son gouvernement allait traiter
avec chaque communauté ou nation autochtone comme une
entité séparée, dans le but d'en arriver à
une entente avec chacune d'entre elles séparément.
Ces propos illustrent bien la continuation de la
relation coloniale d'oppression que réitère le
gouvernement Trudeau aujourd'hui lorsqu'il dit qu'il va continuer de
prendre des décisions qui affectent les peuples autochtones sans
leur consentement. La lutte des nations autochtones pour la
souveraineté sur leurs terres et dans toute prise de
décision
n'a pas à répondre à un pouvoir au-dessus d'elles
qui décide pour elles et prétend représenter le
tissu social de la nation. Être souverain veut dire que ce sont
les peuples autochtones qui décident et que les relations entre
elles et le Canada sont des relations entre entités souveraines
et que cette relation moderne est enchâssée dans la
Constitution. Le
renouveau de la Constitution doit éliminer tout vestige des
relations coloniales et bannir les expressions passe-partout comme
« approche de collaboration » qui en pratiquent
servent à maintenir le statu quo.
La demande d'une constitution moderne est une lutte de
plus qui vient renforcer l'unité d'action entre les peuples
autochtones, canadien et québécois qui réclament
leurs droits. La lutte de tous ces peuples est essentiellement une
seule lutte pour le renouveau politique et constitutionnel pour que les
droits de tous puissent être garantis dans une
constitution moderne qui reconnaît, soutient et garantit les
droits de tous. L'État colonial raciste du XIXe siècle et
sa constitution régressive font obstacle à l'avancement
auquel tous les peuples aspirent, comme individus et comme collectifs.
C'est le temps maintenant que les femmes et les jeunes,
avec tous les travailleurs et leurs alliés dans les autres
couches et classes de la société au Canada et au
Québec, travaillent avec les peuples autochtones pour renouveler
en profondeur les arrangements politiques de la société
et priver les autorités de leur pouvoir de priver le peuple de
ses
droits. Ce sont les peuples eux-mêmes qui doivent être
investis du pouvoir de prendre contrôle de leurs affaires
économiques, politiques et sociales. Le renouveau
constitutionnel et politique est une condition préalable
à une réconciliation véritable entre les peuples
autochtones, le Canada et le Québec.
La Constitution de 1982 ne garantit pas les droits
des citoyens et des résidents
L'histoire récente du Canada témoigne
d'une offensive généralisée contre les droits et
les libertés des citoyens et des résidents au nom de la
« sécurité nationale », de la «
lutte contre le terrorisme » et de la «
prospérité économique ». Les droits des
électeurs seront niés lors des prochaines
élections sous prétexte d'empêcher
l'ingérence de puissances étrangères qui
mèneraient une « guerre hybride » contre les
élections canadiennes. Au nom de la protection de la
démocratie, la liberté d'expression est autorisée
seulement dans la mesure où la police politique considère
qu'elle n'est pas préjudiciable à l'intérêt
national. Le principe que les personnes ont des droits en
tant qu'êtres humains dans toutes les conditions et que
l'État a l'obligation de garantir ces droits ne guide pas
l'action du gouvernement. La Trans Mountain Corporation a
été rachetée et le projet d'agrandissement de
l'oléoduc Trans Mountain a été approuvé en
utilisant les prérogatives du gouvernement, au mépris des
graves préoccupations
exprimées au sujet de l'environnement et de l'obligation
d'obtenir le consentement de nombreux peuples autochtones.
La Charte canadienne des droits
et libertés a été incorporée à
la Constitution rapatriée en 1982. L'article 1 de la
Charte affirme que les droits et libertés « ne peuvent
être restreints que par une règle de droit, dans des
limites qui soient raisonnables et dont la justification puisse se
démontrer dans le cadre d'une société libre et
démocratique ». La Charte est maintenant
rongée par la crise et le discrédit parce que les limites
raisonnables ont été usurpées par les pouvoirs
arbitraires de l'État, des pouvoirs de police qui permettent de
dicter quels droits le peuple peut et ne peut pas avoir, comme l'a fait
Lord Durham au XIXe siècle au nom du pouvoir de police colonial.
Cette usurpation a mené à un processus arbitraire de
criminalisation sans fin de la conscience et d'attaques contre les
luttes que mène le peuple contre l'offensive antisociale et les
plans de guerre et de changement de régime de l'élite
dirigeante du côté des impérialistes
américains et de l'alliance de l'OTAN dominée par les
États-Unis.
Les attaques contre les droits, menées sous
prétexte de circonstances exceptionnelles, sont devenues la
norme, et des communautés, comme la communauté musulmane,
font face au profilage et sont la cible d'attaques sans qu'elles aient
un droit de recours. L'absence d'une constitution qui prescrit des
droits inaliénables et rend cette question
justiciable est profondément ressentie dans tout le pays.
En plus, les arrangements qui sont à la base de
la Confédération sont en train d'être
détruits alors que des intérêts mondiaux ont pris
le contrôle des gouvernements à tous les niveaux —
fédéral, provincial et municipal. Ceux-ci sont devenus
les instruments de prises de décision sur une base
supranationale, que ce soit par le G7, le G20, le FMI,
l'OTAN ou autres.
L'élite dirigeante ne considère plus les
vieux arrangements de partage des pouvoirs entre les gouvernements
fédéral et provinciaux comme étant utiles aux
aventures des intérêts mondiaux les plus puissants.
Ceux-ci ne reconnaissent ni juridiction ni limitation au droit de
monopole et à leur course à la domination mondiale.
Les contradictions sur les ententes de partage de pouvoirs
fédéraux et provinciaux ont
dégénéré en combats acharnés entre
gouvernements servant différents intérêts
privés à l'échelle mondiale. On le voit dans les
conflits sur la taxe sur le carbone et les oléoducs, les
paiements de transfert en santé, l'allocation des fonds aux
projets d'infrastructure et
plusieurs autres questions.
Au cours de la dernière année, le cabinet
du premier ministre et certains hauts fonctionnaires se sont fait
prendre à s'immiscer dans le prétendu pouvoir judiciaire
indépendant au nom du monopole mondial SNC-Lavalin - un fait de
corruption au sens strict du terme, une violation de la
séparation des pouvoirs censée caractériser les
« États de
droit », ce que les libéraux ne se lassent jamais de
répéter. Ils ont également été
exposés comme des violateurs en série de l'état de
droit sur le plan international par leur participation ouverte à
des conspirations avec les États-Unis pour déstabiliser
et renverser les gouvernements visés par des interventions de
changement de régime et, dans le
cas de la République bolivarienne du Venezuela, infliger une
punition collective à sa population sous forme de sanctions
économiques.
Le besoin de renouveler la Constitution afin d'investir
le peuple de la souveraineté et de garantir ses droits en tant
que fondement de la souveraineté canadienne n'a jamais
été si grand. Loin d'être quelque chose
dépassée ou une source de « division »,
comme le prétend l'élite dirigeante, le renouveau
politique et constitutionnel est vital
pour ouvrir la voie au progrès de la société.
À cet égard, la classe ouvrière et les autres
classes et couches de la population doivent saisir l'occasion de
l'anniversaire de la Confédération pour examiner
l'évolution des institutions démocratiques du Canada, les
intérêts qu'elles servent, quelle direction elles prennent
et ce qu'on doit faire pour donner
forme et contenu aux aspirations du peuple à la
souveraineté, à l'habilitation politique, aux
idées éclairées et au droit de décider et
de contrôler les affaires politiques, économiques et
sociales qui affectent leur vie. Cette initiative est à la fois
opportune et nécessaire pour que nous puissions tracer notre
destinée à notre avantage.
Les constitutions et les questions constitutionnelles ne
doivent pas être le monopole d'une élite dirigeante qui
les exploite pour ses propres intérêts étroits.
Elles appartiennent au peuple qui lutte pour défendre ses
droits. Les Canadiens veulent enchâsser et codifier dans une
Constitution les définitions modernes auxquelles ils aspirent et
qui
correspondent aux conditions concrètes. La lutte pour renouveler
la Confédération sur une base moderne est un instrument
que le peuple a dans ses mains pour faire progresser
l'intérêt public, ouvrir une voie vers l'avant et faire
échec à l'arbitraire, à la régression,
à l'anarchie, à la violence et aux guerres que
l'élite dirigeante nous impose.
Poursuivons notre travail organisé pour
établir une constitution moderne et une union libre et
égale de peuples souverains dont les droits sont reconnus et
garantis.
Note
1. 4 juin 2017
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