Attaques méprisables du gouvernement Kenney contre les enseignants
- Kevan Hunter -
Rassemblement pour l'éducation à Calgary, le 29 novembre 2019
Pendant que les enseignants, les étudiants et les
parents de l'Alberta intensifient leur résistance aux attaques contre
l'éducation publique, le gouvernement albertain et ses alliés dans les
médias ont accéléré leur campagne d'insultes et de menaces contre les
éducateurs et leur désinformation sur ce qui se passe dans les salles
de classe de l'Alberta.
Lors d'une période de questions
le 27 novembre, le député du Parti conservateur uni (PCU) de
Calgary-Fish Creek, Richard Gotfried, a demandé à la ministre de
l'Éducation son opinion sur le test de 10e année en Études
sociales qu'un parent lui avait envoyé, qui faisait preuve d'une «
rhétorique anti-pétrole et anti-gaz troublante » et de ce qu'il a
qualifié d'« idéologie de gauche radicale ».
La ministre de l'Éducation Adriana LaGrange, qui était
visiblement préparée, a dit que c'était très troublant. « Nos
éducateurs ont le devoir de dire la vérité au sujet de notre industrie
énergétique responsable. Nous avons dit que nous allons exclure la
politique des salles de classes, et c'est exactement ce que nous allons
faire », a-t-elle dit à l'Assemblée législative.
Dans un article publié dans le Calgary Herald et
le Edmonton Journal, l'ancienne chef du Parti Wildrose Danielle
Smith a poussé plus loin le discours de LaGrange. Il semble que ce même
parent anonyme lui ait aussi envoyé une copie de ce test de 10e année
en Études sociales. Après une diatribe contre le communisme, l'Union
soviétique et « les enseignants en Études sociales de l'école publique
qui semblent avoir une propension au marxisme », Smith a
dit : « Ceci n'est pas de l'éducation. C'est de l'endoctrinement.
Et ça doit arrêter. » Elle a dit qu'au lieu de préserver les
emplois des 300 enseignants des écoles publiques de l'Alberta qui
doivent être mis à pied, les conseils scolaires devraient commencer à
congédier les enseignants dont les méthodes ne lui plaisent pas.
Ce ne sont pas les enseignants de l'Alberta le problème,
mais bien la ministre de l'Éducation qui est inapte à occuper sa
position. Le curriculum d'Études sociales de 10e année prévoit que
les étudiants doivent être capables de comprendre différents points de
vue à propos de la mondialisation, y compris les perspectives
environnementales.[1] C'est
précisément ce que les questions du test permettent d'évaluer. Les
étudiants devraient être capables d'associer un argument spécifique à
une position politique plus large, et de comprendre différentes
perspectives sur les enjeux, celles des travailleurs, des propriétaires
d'entreprises, des peuples autochtones, des gouvernements et des
groupes environnementaux.
Comme d'autres personnes l'ont fait remarquer sur des
médias sociaux, la suggestion de la ministre d'« exclure la
politique » d'un cours consacré à l'étude des questions politiques
est aussi absurde et risible que de vouloir « exclure la chimie de la
science » ou « exclure l'exercice de l'éducation physique ».
Si la ministre est incapable de faire la différence entre comprendre le
point de vue de quelqu'un et se faire dire quoi penser, peut-être
devrait-elle démissionner ou reprendre ses cours d'Études sociales au
secondaire.
On s'attendrait normalement à ce qu'une ministre de
l'Éducation connaisse le programme scolaire qui est enseigné aux
étudiants, puisque c'est là-dessus que porte la discussion. Mais nous
faisons face à une nouvelle normalité, où l'objectif est de fournir un
prétexte au saccage de l'éducation publique et de menacer et de faire
taire les enseignants et toute opposition.
Depuis sa création en 2017, le PCU,
les progressistes-conservateurs qui l'ont précédé et le Parti Wildrose
avant lui ont répandu la désinformation au sujet de l'éducation
publique, des enseignants et de leur organisation, l'Association des
enseignants de l'Alberta (ATA). En 2013, on a utilisé une faible baisse
des résultats dans un test standardisé de compétences en mathématiques
dans les pays de l'OCDE pour suggérer que l'enseignement des
mathématiques était en crise et que la faute en revenait à des méthodes
nouvelles d'enseignement basées sur l'« investigation scientifique » et
la « découverte » utilisées par les enseignants.[2][3] Cela
a servi également à détourner l'attention de
l'augmentation de la taille des classes à cause du sous-financement de
l'éducation.
En 2016, la députée du Wildrose Leela Aheer,
aujourd'hui ministre de la Culture, du Multiculturalisme et du Statut
de la femme, a commencé à demander qu'on révèle le nom des 400
enseignants qui ont été mobilisés dans le remaniement du programme
scolaire (dont certains aspects remontaient aux années 1980).
Cette demande et l'accusation sans fondement que l'examen du programme
scolaire avait été fait en secret ont été reprises par Jason Kenney
lorsqu'il était dans l'opposition comme chef du Parti
progressiste-conservateur et plus tard du PCU. Après l'élection
provinciale, le gouvernement a arbitrairement déchiré une entente qui
donnait un rôle prédominant aux enseignants de l'Alberta dans le
développement du programme scolaire et a créé un panel d'examen du
programme dominé par des partisans des écoles privées, des écoles à
charte et des écoles confessionnelles, tous sans aucune expérience
d'enseignement en ce siècle.[4]
La proposition d'exclure la politique des salles de
classe est une diversion. Ce que fait le PCU n'est pas de la politique.
Le pouvoir de l'oligarchie financière par le recours aux pouvoirs
arbitraires ou pouvoirs de police n'est pas de la politique. Dire, à
l'exemple de George Bush, qu'ou bien vous êtes avec le PCU et Jason
Kenney, ou bien vous êtes un ennemi de l'Alberta et tout ce que vous
dites est illégitime, ce n'est pas de la politique. C'est le diktat. La
ministre de l'Éducation utilise le pouvoir de l'État pour diviser le
corps politique sur la base de l'idéologie et pour forcer les
enseignants à accepter, par exemple, que la seule opinion qui peut être
discutée au sujet de l'environnement est que l'Alberta possède une «
industrie énergétique responsable ». Cela vise aussi à discréditer
la résistance qui grandit contre les coupures à l'éducation. Cela ne
passe pas.
Cette dernière attaque semble aussi avoir servi de
munition à l'ordre du jour du congrès d'orientation du PCU qui s'est
tenu du 29 novembre au 1er décembre. L'énoncé politique
numéro 15 stipule que le gouvernement albertain « doit mettre en place
un 'système de bons d'étude' qui garantira un financement égal par
étudiant, quel que soit le choix de l'école. » L'effet désastreux
du système de bons d'étude aux États-Unis a été amplement démontré et
cela ne doit pas passer. Il crée un système d'éducation à deux paliers,
un système pour ceux qui ont les moyens de fréquenter les écoles
privées et à charte et un système pour tous les autres.
En défendant l'honneur et la dignité de leur profession,
les enseignants défendent leurs droits, ceux de leurs étudiants et les
intérêts de notre société. En continuant d'intensifier notre
résistance, de parler en notre propre nom, de présenter nos points de
vue publiquement et de nous lier aux forces engagées dans la défense de
l'éducation publique, nous allons être une force incontournable.
Notes
1. On peut lire ici
le programme scolaire en Études sociales de 10e année, mis à jour
pour la dernière fois en 2005. Les sections les plus importantes
sont aux pages 21 à 25.
2. En 2013, les étudiants
canadiens étaient au 13e rang dans les pays de l'OCDE. Si on
compare les étudiants de l'Alberta à ceux des autres pays de l'OCDE,
ils étaient au 11e rang alors qu'ils avaient fini huitième
en 2009.
3. Pour une discussion sur les
méthodes d'enseignement reposant sur l'« investigation » et la
distinction importante entre la « découverte » et l'«
investigation », cliquer ici.
4. Pour en savoir plus sur les changements apportés par
le renouvellement du programme scolaire, cliquer ici.
Cet article est paru dans
Volume 49 Numéro 34 - 7 décembre 2019
Lien de l'article:
Attaques méprisables du gouvernement Kenney contre les enseignants - Kevan Hunter
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