Le Marxiste-Léniniste

Numéro 143 - 17 décembre 2016

Les résultats de l'élection présidentielle aux États-Unis

Ce que cela signifie pour
le mouvement ouvrier

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In Memoriam

Edward Alastair Haythornthwaite


13 mai 1952 - 14 décembre 2016

C'est avec beaucoup de chagrin que le Parti marxiste-léniniste du Canada vous informe que notre cher camarade Edward Alastair Haythornthwaite est décédé du cancer le 14 décembre 2016. Le Parti transmet ses sincères condoléances à sa famille et à ses camarades et amis devant cette perte immense.

Alastair était un travailleur industriel, machiniste pendant 35 ans. Il a été élu par ses pairs agent d'affaires de l'Association internationale des machinistes et des travailleurs et travailleuses de l'aérospatiale, district nord-ouest 250, un poste qu'il a occupé pendant neuf ans avant de retourner sur le plancher d'usine un peu avant sa retraite en 2015. Dans sa nécrologie on lit qu'Alastair « était le type de personne qui semble amadouer les machines, les appareils et les véhicules, les faire fonctionner mieux en se tenant tout simplement à côté d'eux. On entend parler de gens comme ça mais on n'en voit pas tous les jours.

« Dans son métier, il construisait et réparait avec beaucoup d'habilité des machines qui servaient ensuite à construire et à réparer d'autres machines. Il était un fier métallo. Il était aussi un enthousiaste des trains miniatures et avait une passion pour l'âge de la vapeur.

« Il a fait un bac en Études syndicales en 2013 grâce à un programme parrainé par son syndicat, réalisant ainsi un rêve de longue date. »

Une des réalisations dont il était le plus fier est le travail qu'il a fait en tant que fondateur et président du Comité commémoratif Joseph Mairs, qui tient une rencontre politique annuelle à Ladysmith, sur l'île de Vancouver, en hommage à Joseph Mairs, un martyr de la classe ouvrière de la région mort en prison pour sa participation à la Grande Grève du charbon de 1912-1914. La rencontre annuelle est l'occasion de discuter de sujets politiques contemporains du mouvement ouvrier sous la bannière : « Notre condition commune ».

Communiste toute sa vie adulte, Alastair était un homme politique, un combattant pour les droits des travailleurs et pour la politique indépendante de la classe ouvrière. Il a été candidat du Parti marxiste-léniniste du Canada pour la circonscription de Cowichan-Malahat-Langford à l'élection fédérale de 2015 durant laquelle il fait campagne contre la participation du Canada à la guerre impérialiste et pour le renouveau démocratique. « Il s'est très bien débrouillé dans cette campagne et il en a aimé chaque minute. »

Il manquera beaucoup à ses camarades, sa famille et ses collègues de travail et aux nombreux amis qu'il s'est faits au fil des années dans la lutte pour un monde meilleur.

***

 ...Il est allé dans le désert pour trouver son âme, a découvert qu'il n'avait pas d'âme à lui tout seul, a découvert que tout ce qu'il avait, c'était un petit bout d'une grande âme. Le désert et la solitude inutiles : il doit former un tout avec la grande âme. »

- John Steinbeck, Les raisins de la colère


Les résultats de l'élection présidentielle aux États-Unis
Ce que cela signifie pour le mouvement ouvrier
C'est en bâtissant le nouveau qu'on doit affronter le gouvernement des pouvoirs de police - L'Organisation marxiste-léniniste des États-Unis

Le programme de Trump pour «redonner sa grandeur à l'Amérique»
L'art de conclure un marché
La paix par la force
Le secteur manufacturier et l'industrie

À titre d'information
Résultats des élections
La position des syndicats
Multiplication des scénarios de guerre civile
Élimination du facteur humain/conscience sociale
Utilisation de robots du Web dans l'élection américaine

Le 26 décembre 1862
Le passé dans le présent


Les résultats de l'élection présidentielle aux États-Unis

Ce que cela signifie pour le mouvement ouvrier

Le 10 décembre, le Parti marxiste-léniniste du Canada a tenu une réunion à Hamilton, en Ontario, sur la signification des résultats de l'élection présidentielle américaines pour le mouvement ouvrier. La conférencière invitée était Kathleen Chandler de l'Organisation marxiste-léniniste des États-Unis. Rolf Gerstenberger, président du PMLC et ancien président de la section locale 1005 du Syndicat des Métallos, a également pris la parole.

C'est la plus récente d'une série de réunions à travers le pays organisées par le PMLC pour permettre aux membres, supporters et amis du Parti ainsi qu'aux collectifs de travailleurs de démêler ce qui se passe en ce moment et ce que la présidence Trump signifie pour les peuples des États-Unis, du Canada et du monde. La discussion a commencé à Calgary le 6 novembre, à la veille des élections du 8 novembre, suivie d'une réunion publique à Ottawa le 12 novembre pour examiner les déclarations émises par le Parti avant et après l'élection.[1] Il y a ensuite eu deux réunions à Montréal puis deux autres à Edmonton et Windsor, sans compter les réunions des organisations du Parti au niveau local. Toutes ses réunions servent à créer un espace pour une discussion sérieuse où les participants peuvent analyser les événements pour aborder la situation actuelle de façon proactive. Elles permettent de contrer la pression constante, durant et après l'élection, qui pousse tout le monde à réagir à chaque geste et commentaire de Trump, faisant ainsi de lui le problème en tant qu'individu tout en cachant la signification du recours à un gouvernement des pouvoirs de police par les cercles dominants aux États-Unis.

À Hamilton, la présentation principale par Kathleen Chandler a porté sur ce gouvernement des pouvoirs de police qui s'implante progressivement aux États-Unis et sur le besoin d'engager les forces populaires dans la discussion et la concrétisation de ce que veut dire établir un gouvernement antiguerre. Nous reproduisons le texte complet de cette présentation ci-dessous.

Rolf Gerstenberger a parlé de l'expérience des métallos de Hamilton à défendre leurs droits, leurs emplois et l'industrie de l'acier et a expliqué que cela leur donne une vue particulière des événements aux États-Unis. Il a donné l'exemple de la nomination par le président élu Donald Trump de Wilbur Ross au poste de secrétaire au Commerce. Il a rappelé qu'en combattant la fraude de faillite de Stelco en 2003, les métallos ont dû étudier toute l'industrie de l'acier au Canada et aux États-Unis. On leur avait dit que les métallos américains avaient « aidé » leurs compagnies et que c'était maintenant au tour des travailleurs de Hamilton d'aider Stelco. À l'époque, une quarantaine d'aciéries américaines s'étaient rangées sous la protection du Chapitre 11, plusieurs d'entre elles forcées à la fin de déclarer faillite, et cela a servi de prétexte pour réduire les pensions de 250 000 retraités de 10 % à 70 %. Quelque 190 000 de ces retraités se sont par la suite vus enlever leurs pensions et avantages sociaux, comme « dommage collatéral » de l'achat et de la revente de plusieurs de ces aciéries par nul autre que Wilbur Ross.

Rolf a expliqué que la section locale 1005 a catégoriquement rejeté toute utilisation fallacieuse de la procédure de faillite pour voler les travailleurs. Certains chefs syndicaux aux États-Unis avaient fait cette analogie fameuse : « La maison est en feu, vous avez quatre enfants, mais vous ne pouvez pas les sauver tous. Lesquels allez-vous sauver ? » Les métallos de Hamilton ont dénoncé cette position crapuleuse qui n'est rien de moins qu'une capitulation aux politiques néolibérales des riches. Ils ont répondu que jamais des parents et des intervenants de première ligne ne réagiraient à cette situation d'urgence avec de tels calculs. Les intervenants de première ligne font toujours tout en leur pouvoir pour sauver toutes les victimes d'un sinistre, a dit Rolf. La seule position acceptable, a dit Rolf, est de défendre les principes et de mettre toute l'organisation nécessaire en place et de mettre au point une stratégie et des tactiques pour réussir. Wilbur Ross avait prétendu qu'il fallait sacrifier les retraités aux États-Unis parce que c'était un impératif économique. Certains leaders syndicaux considèrent toujours Wilber Ross comme un ami des travailleurs et n'ont pas protesté contre sa nomination au poste de secrétaire au Commerce. Rolf a souligné que ce choix de Trump donne une idée des priorités du prochain gouvernement des États-Unis malgré ses prétentions de vouloir s'occuper des « gens ordinaires » et de soutenir les travailleurs.

Rolf a aussi parlé de la nomination au poste de secrétaire au Travail d'Andrew Puzder, cet oligarque de la restauration rapide et PDG du monopole qui possède les chaînes de restaurants Hardee's et Carl's Jr. Il est connu pour ses positions antiouvrières et favorables à l'utilisation de travailleurs « sans papier » comme main-d'oeuvre à bon marché. Rolf a expliqué que l'économie du sud-ouest de la Californie ne fonctionnerait pas sans l'exploitation de ces travailleurs vulnérables. Les positions ouvertement antiouvrières d'Andrew Puzder ont provoqué une levée de boucliers chez les syndicats américains. Puzder était contre l'établissement du salaire minimum à 10 $ l'heure par l'administration Obama et s'opposera certainement au salaire minimum à 15 $. Il sera aussi contre le maintien des pensions parce que, selon lui, plus aucune compagnie n'en veut et elles sont un poids pour la société.

Un représentant des travailleurs accidentés de l'Ontario a fait remarquer que ce que préconisent Trump et son cabinet est précisément ce qui est fait en Ontario sous le gouvernement libéral de Kathleen Wynne. Par exemple, le projet de loi 70 du gouvernement ontarien permettra aux employeurs de s'autorèglementer en matière de santé et sécurité. Il a expliqué que dans ce modèle d'affaire ceux qui ne sont pas considérés comme une valeur sont tout simplement abandonnés à leur sort.

Concernant la disposition de Trump envers les travailleurs et sa prétention de « redonner sa grandeur à l'Amérique » en ramenant les emplois aux États-Unis, Rolf a rappelé l'intervention du président élu à l'usine Carrier en Indiana, un fabricant de climatiseurs qui selon Trump aurait sauvé 1100 emplois d'un déplacement vers le Mexique. Trump a dit sur Twitter que c'est ce qu'il allait faire pour tous les travailleurs américains. Le représentant du syndicat des travailleurs de Carrier a fait remarquer que c'est seulement 800 emplois qui vont être épargnés et que c'est par centaines qu'ils seront déplacés vers le Mexique. Mais cela lui a coûté cher de dire cette vérité, car Trump et d'autres par la suite l'ont assailli de toutes parts avec des attaques personnelles et des menaces sur Twitter. Trump s'est servi de Twitter pour attaquer le président du syndicat. Il l'a traité de « bonze syndical » pour laisser entendre qu'il est une espèce de parasite et que les syndicats perçoivent beaucoup trop de cotisations de leurs membres. Le corps politique est ainsi mobilisé pour ou contre les gazouillis de Trump et cela devient le « tout le monde en parle » principal jusqu'à la prochaine attaque Twitter, contre quelqu'un d'autre. Les gens partout dans le monde, pas seulement aux États-Unis, sont censés spéculer sur chacun de ses tweets, aussi insignifiants soient-ils. Réduire la politique à des attaques personnelles et à des diffamations par les cercles dominants, voilà à quel niveau en est rendue la gouvernance aux États-Unis dans son désespoir de cause, a dit Rolf, précisant que c'est ainsi que fonctionnent les pouvoirs de police quand il n'y a plus de processus politique moderne, sans parler du respect de la loi.

La principale chose à faire dans cette situation, a poursuivi Rolf Gerstenberger, est de prendre des mesures pratiques pour changer la situation en faveur des travailleurs. À Hamilton, les métallos font face à la vente prochaine de leur usine et au recours à la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies pour attaquer les travailleurs actifs et à la retraite par des voies parfaitement légales. Comment les travailleurs peuvent-ils se défendre dans cette situation ? Le gouvernement et les députés fédéraux disent que personne ne peut rien faire puisque l'affaire est devant les tribunaux et que le gouvernement fédéral n'est pas un intervenant dans ces procédures. Par contre, une fois que la vente sera conclue, il pourra donner de l'argent au nouveau propriétaire. Encore une fois, on nous propose la logique honteuse de Wilber Ross que « pour sauver la compagnie » certains retraités doivent être sacrifiés. Les métallos de Hamilton ont vécu cette expérience amère et savent que rendre les riches plus riches ne va pas sauver la compagnie, a dit Rolf, et quiconque vous dit le contraire essaie de vous berner pour obtenir ce qu'il veut.


Rolf Gerstenberger lors de sa présentation à la réunion d'Edmonton le 15 novembre 2016

Rolf a ensuite parlé de la position de certaines des grandes centrales syndicales américaines. Certains chefs syndicaux disent qu'ils ne sont pas d'accord avec les valeurs de Trump, mais qu'ils sont tout de même disposés à travailler avec lui pour ce qui est des emplois. Ils ont écrit au président élu pour lui dire qu'il y a un terrain d'entente possible sur l'économie. Mais comment les valeurs peuvent-elles être séparées de l'économie, a demandé Rolf, quand on sait que toutes ces positions arriérées servent à diviser la classe ouvrière pour qu'elle ne soit pas en mesure de défendre ses intérêts de classe dans un front uni ? Il a rappelé à cet égard à quel point les médias ont tout fait pour créer l'impression qu'il n'existe pas de classe ouvrière unie aux États-Unis, que les travailleurs américains ne sont pas une seule classe et se divisent en fait en fonction de la race, du sexe, de la religion et ainsi de suite. Le peuple serait divisé en fonction d'intérêts disparates au sein de la classe ouvrière. Ils ont tout fait pour nier que la classe ouvrière est une seule classe avec des intérêts de classe distincts, que tous ont des droits du fait qu'ils sont des êtres humains et doivent sur cette base ouvrir une voie au progrès de la société.

Plusieurs thèmes de la présentation ont été repris dans les discussions qui ont suivi. Une jeune travailleuse a parlé de son expérience et dit qu'à mesure que la politique dégénère, les gens sont incités à voir les événements, comme les élections américaines, comme un divertissement. Le désir de mettre tout le monde en action pour défendre leurs droits a mené à des interventions intéressantes sur l'importance de la discussion collective et des prises de décisions collectives pour que les travailleurs puissent démêler les choses et avancer en toute confiance. Des métallos ont parlé de l'impunité des entreprises comme US Steel qui s'en prennent au moyen de subsistance des Canadiens et du cynisme de ce gouvernement qui prétend se soucier du bien-être des travailleurs. Les participants ont également abordé le sujet du rôle de Bernie Sanders dans les élections américaines, de l'intégration de l'économie et des structures politiques du Canada à celles des États-Unis et ce que cela signifie pour notre avenir, et de ce que Trump entend quand il dit qu'il veut administrer les États-Unis comme une entreprise. Un autre thème important soulevé par les travailleurs est la question de la guerre et de la paix et comment faire avancer le travail pour un gouvernement antiguerre.

Les participants ont noté que ces discussions permettent de clarifier les choses en apportant une conception du monde à partir de laquelle examiner la situation aux États-Unis et les développements qui s'y rapportent. Un participant a dit que ces discussions calmes, sérieuses et informées sont importantes et doivent continuer pour repousser la pression à toujours parler de ce que Trump fait et dit plutôt que de parler de nos propres intérêts et de développer notre ordre du jour.


Réunion publique à Ottawa sur la signification des résultats de l'élection américaine
le 12 novembre 2016


Réunion de Calgary à la veille des élections américaines le 6 novembre 2016

Note

1. Voir 2016: Élections présidentielles aux États-Unis: Déclarations du Parti communiste du Canada (marxiste-léniniste)

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C'est en bâtissant le nouveau qu'on doit affronter le gouvernement des pouvoirs de police

Nous reproduisons ci-dessous la présentation faite par Kathleen Chandler de l'Organisation marxiste-léniniste des États-Unis à une discussion organisée par le PCC(M-L) le 10 décembre 2016 à Hamilton, en Ontario, sur la signification du résultat des élections américaines pour le mouvement ouvrier.

* * *

L'aspect le plus significatif du résultat des élections présidentielles du 8 novembre est que les cercles dominants des États-Unis optent pour un gouvernement des pouvoirs de police. Ils tendent dans cette direction depuis longtemps, surtout depuis l'administration de Bill Clinton et en mode accéléré avec Bush et Obama. Il y a de toute évidence une grande rivalité dans le camp des cercles dominants aux États-Unis et il est clair que l'élection n'a pas permis d'aplanir les différends, comme elles sont censées le faire. Il n'en demeure pas moins qu'ils ont choisi Donald Trump pour étendre les pouvoirs de police, les rationaliser et leur enlever toute entrave, ouvertement et en toute impunité.

L'élection a également montré que les vieux arrangements du gouvernement des lois sont finis. Les partis politiques et le processus politique ne fonctionnent plus. Si les dirigeants impérialistes et leurs médias monopolisés cherchent à attirer l'attention de tout le monde et à faire réagir tout le monde à chaque tweet et commentaire de Donald Trump, à créer l'impression que ce sont les choix politiques de Trump qui sont le problème, ils le font pour priver le peuple de la conception du monde qui l'amènera à conclure que c'est à lui que revient la tâche de donner naissance au nouveau, qu'il ne peut pas s'appuyer sur un camp ou l'autre de la classe impérialiste pour résoudre les problèmes auxquels il fait face. Le fait que les peuples des États-Unis et du monde vont maintenant être accablés par un gouvernement des pouvoirs de police sans entrave aux États-Unis montre que les vieilles formes qui ont vu le jour aux XVIIIe, XIXe et XXe siècles ne parviennent plus à conférer une légitimité aux gouvernements. Elles ne parviennent plus à convaincre les Américains de se soumettre au pouvoir élitiste. Aujourd'hui ce pouvoir est perçu comme un appareil pour que les riches s'enrichissent et que les pauvres s'appauvrissent alors que le « rêve américain » gît en lambeaux. Pendant ce temps, l'agression gratuite et injustifiée est déclenchée contre tout pays qui refuse de se soumettre au diktat américain. Par conséquent, les cercles dominants veulent le gouvernement des pouvoirs de police mais ils veulent aussi le présenter comme étant un gouvernement des lois. Ainsi le soir des élections, les factions rivales se sont tout de suite engagées à opérer la transition dans le calme à la Maison-Blanche et ont tenu à louer les vertus de la démocratie américaine.

Cela crée une situation pleine de dangers pour les peuples au pays et à l'étranger. Nous devons être proactifs et nous en tenir à notre propre programme pour créer les nouvelles formes et donner naissance au nouveau. Nous devons réagir à toutes les attaques contre le peuple et le mouvement de résistance fera des progrès importants si nous sommes proactifs. La discussion politique et l'analyse de la signification des résultats de l'élection américaine sont le point de départ pour créer un mouvement politique en faveur du peuple.

Les cercles dirigeants sont confrontés au problème qu'ils veulent un gouvernement de pouvoirs de police tout en maintenant la résistance du peuple en échec et en préservant l'Union. Ils voient Donald Trump comme un dur négociateur qui peut faire en sorte que les États-Unis ne perdent pas leur place dans un monde où tout se joue à couteaux tirés. D'une part il va conclure des accords, sans doute en secret, en utilisant les pouvoirs exécutifs qui lui reviennent en tant que président. D'autre part, il utilisera la pleine force des pouvoirs de police sans se soucier de légitimité, au pays comme à l'étranger. C'est ainsi que, dans son désespoir de cause, la faction de la classe dominante représentée par Trump croit faire avancer les choses en sa faveur.

Les pouvoirs exécutifs du président comprennent le pouvoir de réguler l'immigration ; l'application (ou la non-application) des lois sur l'environnement ; la règlementation commerciale et frontalière en faveur de l'annexion nord-américaine, comme le Canada en fait déjà l'expérience ; le recours à la guerre par les drones, à la torture, aux forces spéciales, à la criminalisation de ceux qui résistent au pays et à l'étranger. Les pouvoirs de police seront appliqués sur le plan international, possiblement par la conclusion d'accords directement avec les forces militaires ou des leaders individuels de pays étrangers, en contournant les gouvernements légitimes. Il s'agira de rapports directs avec le président et les « négociations » se résumeront davantage à « des offres qui ne se refusent pas », puisque la menace des armes nucléaires restera sur la table.

Il est à noter que lorsque Trump a annoncé la nomination de la gouverneure Nikki Haley de la Caroline du Sud au poste d'ambassadrice à l'ONU, il a dit qu'elle était une « négociatrice qui a fait ses preuves ». C'était en référence aux accords qu'elle a conclus pour attirer les monopoles, dont plusieurs étrangers, en Caroline du Sud, habituellement en leur offrant des millions de dollars des fonds publics, le report des impôts, etc. Le récent accord conclu par Trump avec le monopole Carrier est un exemple de ce à quoi il faut s'attendre. Il a conclu l'accord secrètement avec le PDG de la compagnie, dans le dos du syndicat. L'État de l'Indiana, dont le gouverneur Mike Pence vient d'être nommé vice-président des États-Unis, a accepté de verser 7 millions $ au monopole. Puis lorsque le président du syndicat, Chuck Jones, a révélé les faits concernant le nombre d'emplois qui resteront, c'est-à-dire 800 et non pas 1100 comme l'a prétendu le président élu, Trump s'est attaqué à lui personnellement. Pour l'instant il s'est contenté de l'attaquer sur Twitter mais cela permet de voir ce qui arrivera quand les travailleurs, les gouvernements d'État et les gouvernements étrangers oseront faire obstacle à un accord conclu par Trump. Le rôle des attaques personnelles est d'attiser les passions et d'abaisser le niveau du discours politique, de manière à empêcher les gens de s'unir dans un mouvement politique pour l'habilitation du peuple, la paix et les droits.

Le mantra « jobs, jobs jobs » a permis aux monopoles d'obtenir plus de 80 milliards $ par année des fonds publics, ne serait-ce que des États et des villes. Au moins trois quart de l'argent en subvention des États et des villes est acheminé dans les coffres non plus des entreprises locales mais des monopoles comme Boeing, Intel, GM, Nike et Dow Chemical. Les entreprises étrangères comme Royal Dutch Shell et Nissan en reçoivent une bonne part elles aussi. Cela se fait souvent dans le cadre de « méga-ententes », comme le 5,6 milliards $ que l'État de New York a versé à Alcoa ou le près de 9 milliards $ que le monopole de guerre Boeing a soutiré à l'État de Washington. Les sommes versées par les gouvernements dans ces ententes colossales équivalent en moyenne à près de 500 000 $ par emploi. Et trop souvent, la promesse d'emploi ne se matérialise pas. Trump est maintenant en position d'y aller à fond de train dans ce genre de magouilles et il aura le plein poids de la présidence pour le faire.

Pendant que Trump parle d'emplois, l'accord avec Carrier sert les oligopoles et comprend vraisemblablement la promesse de contrats d'approvisionnement futurs, comme pour les projets d'infrastructures par exemple, ou les contrats de la défense. Durant la campagne électorale, Donald Trump a répété qu'il allait administrer le gouvernement comme une entreprise, ce qui revient à dire que les besoins et services sociaux ne feront plus partie des calculs. Dans son discours de victoire il a dit : « J'ai passé ma vie dans le monde des affaires et j'ai remarqué trop de projets et de gens au potentiel inexploité partout sur la planète. C'est ce que je m'engage à faire pour notre pays. »

Les entreprises sont gérées en fonction de la rentabilité et voient les êtres humains comme des choses, voire des produits, dont on peut disposer. Les métallos savent ce que veut dire être traités comme des choses -- d'être mis à pied et de perdre leur pension, de voir leur communauté être détruite. La nomination de Wilbur Ross au poste de secrétaire au Commerce nous rappelle que c'est l'homme qui a empoché des milliards de dollars avec l'achat d'aciéries en faillite aux États-Unis et l'élimination des prestations de retraite pour 190 000 métallos avant de remballer et de revendre les usines. La responsabilité envers la société et envers les besoins de la société ne sont pas des considérations prioritaires du gouvernement des pouvoirs de police.

En examinant tous ces développements, il est important de reconnaître que les pouvoirs de police sont par définition des pouvoirs arbitraires et élargis utilisés impunément. Il ne s'agit pas seulement des agissements des forces policières et militaires, mais bien d'un mode de gouvernance choisi dans une situation où les cercles dominants n'ont pas de solutions et se voient forcés de bloquer le désir de modernisation et de démocratisation. L'État américain est fondé depuis ses origines sur un pouvoir unitaire combinant deux aspects : le gouvernement des lois (Constitution, traités, législations, tribunaux, etc.) et les pouvoirs de police. Nous assistons aujourd'hui à l'élimination du gouvernement des lois et Trump s'apprête à le faire encore plus ouvertement et avec une plus grande impunité que les présidents qui sont passés avant lui.

Si le gouvernement des lois doit avoir au moins une apparence de légitimité et sembler répondre aux besoins sociaux, ce n'est pas le cas pour le gouvernement des pouvoirs de police. La mission de celui-ci est de punir et de criminaliser pour préserver l'État.

La légitimité du gouvernement n'est pas une grande priorité non plus. La mission des pouvoirs de police est de criminaliser et détruire quiconque se dresse sur leur chemin, même des pays au complet, de détruire les forces productives humaines si nécessaire. C'est ce qui s'est produit en Libye et c'est ce qui se produit maintenant en Irak et en Syrie. L'élection a montré par ailleurs que les cercles dominants ne sont plus préoccupés par le maintien des apparences d'un processus politique qui fonctionne aux États-Unis, avec des partis politiques qui fonctionnent, tout ce processus qui confère la légitimité de gouverner. Donald Trump est l'incarnation de cette réalité.

La problématique de la légitimité est très importante quand il s'agit d'établir nos tactiques de résistance et pour faire avancer notre propre programme de lutte pour des politiques d'habilitation du peuple dans le cours de la défense des droits de tous et toutes. Un gouvernement soucieux de la légitimité veut donner l'impression « d'être à l'écoute » du public et de défendre la constitution, notamment la liberté de parole, la liberté d'assemblée et le droit à la vie et à la liberté. Le gouvernement des pouvoirs de police n'a pas ce souci. Il criminalise la protestation et met cartes sur table : si, en tant qu'individus ou en tant que collectifs, vous ne faites pas ce qu'on vous dit, vous aurez affaire aux pouvoirs de police. La lutte actuelle à Standing Rock est un exemple à la fois d'un gouvernement qui se déchaîne et d'une résistance qui s'organise. Et rappelons que cela se fait sous l'administration de Barack Obama, pas sous celle de Trump.

Standing Rock

Malgré la prétention répétée du gouvernement fédéral et des médias que les protecteurs de l'eau à Standing Rock sont sur des terres fédérales, quand on examine la carte des États-Unis on voit bien qu'il s'agit d'un territoire sioux non cédé. Il y a aussi le fait que le gouvernement est tenu de faire une étude d'impact sur l'environnement, ce que le Army Corps of Engineers, le génie civil du département de la Défense, refuse de faire. Par ailleurs de nombreuses lois et obligations issues de traités sont violées et cela se fait ouvertement et de façon répétée. C'est le gouvernement fédéral qui a envoyé une lettre aux forces policières du Sud Dakota et aux forces municipales leur disant que les protecteurs de l'eau commettaient une intrusion sur la propriété.

Des centaines de personnes ont été arrêtées et il y a eu des blessures graves du côté des résistants, y compris des femmes et des enfants. Malgré l'institution de postes de contrôle de la Garde nationale sur des autoroutes publiques et l'utilisation répétée de chars d'assaut, de gaz lacrymogènes, de grenades incapacitantes et d'un canon à eau contre les résistants à des températures atteignant le point de congélation, Barack Obama dit qu'il va « laisser les choses suivre leur cours ». Il faudrait donc se faire à l'exercice des pouvoirs de police sans égard à la loi et continuer de se sacrifier jusqu'à ce que M. Obama, ou quiconque est président, décide que c'est assez.

Et si le Army Corps dit maintenant qu'il ne va pas émettre de permis pour l'oléoduc avant une étude d'impact, il n'a pas pour autant mis fin au projet. Les monopoles concernés, dont le canadien Enbridge, avec des lignes de crédit de milliards de dollars à leur disposition, affirment eux que l'oléoduc sera complété. Ils pourraient tout simplement poursuivre la construction et payer les amendes et soyez assurés qu'ils ne subiront pas une attaque armée de l'État. Les pouvoirs de police servent à protéger et à préserver l'État sans considération aucune pour les intérêts du peuple. C'est pourquoi beaucoup de protecteurs de l'eau ont décidé de rester et disent être prêts à rester tout l'hiver s'il le faut — pour protéger les intérêts du peuple.

C'est un exemple de résistance dans les conditions actuelles. Les Amérindiens engagés dans cette bataille, des Sioux principalement mais aussi des centaines d'autres tribus, appuyés par des gens partout au pays, rejettent l'appellation de « manifestants ». Pour les forces policières, un manifestant est quelque chose qu'on peut contrôler : on peut lui dire où, quand et comment manifester. Aux conventions démocrate et républicaine cet été, les gens qui manifestaient se sont fait dire qu'ils ne pouvaient pas avoir de sac à dos, de masque à gaz, de perche de métal pour les drapeaux ou de corde. Autrement dit, on nous réglemente comme des choses, pas comme des personnes ayant des droits.

Les gens de Standing Rock ont pris la décision qu'ils allaient être traités comme des êtres humains. Ils sont des protecteurs de l'eau, l'eau qui sert à des millions de personnes. Ils sont proactifs, ils manifestent là où il le faut et de différentes manières. Ils se sont arrangés pour avoir tout ce qui leur faut et pressent les gens partout au pays de les aider à cet égard. Ils ont mis au point leurs propres moyens de communication et ils organisent pour unir tout le monde dans l'action, tous fermement à la défense de leurs revendications légitimes : la souveraineté, pas d'oléoduc, la défense des droits de tous et toutes et la protection de la Terre Mère. Ils interviennent pour priver les oligopoles de leur capacité de priver le peuple de ce qui lui appartient de droit.

Plus récemment, des milliers d'anciens combattants sont venus se joindre à la résistance à Standing Rock et ont défendu le campement contre les menaces d'éviction du gouvernement. Cela a sûrement créé une peur parmi les cercles dirigeants. Ceux-ci ne veulent surtout pas que leurs soldats, actifs ou pas, soient insoumis. Ils ne veulent surtout pas qu'ils se joignent à la résistance. Ce sont les peuples autochtones, leur lutte résolue pour leur droit d'être et pour la protection de la terre et des droits, qui ont inspiré cette prise de position. Le niveau de conscience qui est généré au sujet de l'État et de l'imposition des pouvoirs de police est une importante contribution à la cause de tous ceux qui résistent.

Imposition du gouvernement des pouvoirs de police tout en maintenant la forme constitutionnelle de gouvernance

La lutte de Standing Rock montre également que les cercles dominants impérialistes américains veulent imposer et consolider un gouvernement des pouvoirs de police tout en maintenant la forme constitutionnelle de gouvernance. Ils veulent éviter de proclamer la loi martiale ou d'établir un gouvernement ouvertement militaire. Trump est un civil sans origine militaire. En tant que détenteur du pouvoir exécutif il a la responsabilité de préserver l'union tout en se libérant des entraves constitutionnelles. Cette responsabilité lui est conférée par la Constitution des États-Unis, notamment la clause sur le serment. Par son serment le président s'engage à faire deux choses : il jure solennellement « de remplir fidèlement les fonctions de président des États-Unis » et « dans toute la mesure de mes moyens, de sauvegarder, protéger et défendre la Constitution des États-Unis ». Les fonctions de la présidence comprennent l'utilisation des pouvoirs de police pour protéger l'État contre la Constitution.

Aujourd'hui les cercles dominants sont placés dans une situation où ils doivent éliminer les entraves de la Constitution, comme le fait que c'est le Congrès qui tient les cordons de la bourse, le fait que les traités sont la loi fondamentale et les arrangements qui découlent de la Déclaration des droits. Ils espèrent le faire en exigeant la soumission à leur version de la Constitution et à tout pouvoir d'urgence qu'ils proclament au nom de la sécurité nationale. Ces pouvoirs relèvent de l'exécution des fonctions de la présidence. Les cercles dominants veulent maintenir la forme constitutionnelle tout en se libérant des entraves de la Constitution comme telle.

Par exemple, Obama a récemment autorisé les Forces spéciales à se livrer à des assassinats, des bombardements, la torture et d'autres opérations clandestines partout dans le monde contre quiconque est considéré comme une « menace » par le gouvernement américain. Y compris contre des citoyens américains, comme on l'a vu avec les attaques au drone ordonnées par Obama. Nous savons que ces opérations clandestines sont tout à fait illégales et arbitraires et passent outre à l'application régulière de la loi. Des noms sont ajoutés à la liste de personnes à assassiner à la discrétion du président — en les plaçant dans une catégorie policière appelée « menace », sans égard à la loi. Des opérations de ce genre ont déjà été exécutées dans pas moins de 147 pays. Avec la nouvelle directive elles peuvent avoir lieu n'importe où.

Obama a essentiellement déclaré que l'ouverture du monde entier aux menées des Forces spéciales et à leurs opérations clandestines est la nouvelle norme. Il importe aussi de noter qu'il a restructuré la chaîne de commandement, entre autres en éliminant les commandants régionaux et en établissant essentiellement un lien direct entre le président et le général chargé du commandement du groupe opérationnel interarmées (Joint Special Operation Command). Il est aussi question d'un rapport direct entre ce commandement et les forces policières et militaires à l'étranger, comme en Grande-Bretagne, en Allemagne, en France et en Turquie, court-circuitant les canaux gouvernementaux habituels. Tout se fait entre les différentes composantes des forces militaires. Il ne fait pas de doute que cette restructuration, qui concentre aussi le pouvoir entre les mains du président et impose le commandement américain à des forces étrangères, va se poursuivre avec Trump.

Il faut un gouvernement antiguerre

Il a récemment beaucoup été question de la nomination de trois généraux dans le cabinet de Trump. Certains prétendent que c'est une rupture avec la tradition, que même le Pentagone est normalement sous la responsabilité d'un civil. On en fait une affaire constitutionnelle alors que ce ne l'est pas. Il y a eu des présidents qui étaient des généraux. Qu'on pense à George Washington ou à Dwight Eisenhower. Il y a eu des militaires au cabinet, comme Colin Powell. La réalité est qu'il existe une énorme bureaucratie militaire qui reste essentiellement la même de président en président. Cette bureaucratie, qui est tiraillée par d'importants conflits et des rivalités, comme on l'a vu durant la campagne électorale, doit être unie puisqu'il faut préserver l'union. Les nominations doivent être vues dans cette perspective.

Que ce soit ces généraux ou des civils, ce qu'il importe de voir est qu'on assiste à l'imposition d'un gouvernement des pouvoirs de police et que ces nominations concourent à cet objectif. Le débat sur le fait que certains sont des généraux a pour effet d'éclipser cette réalité, de détourner l'attention du fait que, comme on l'a vu durant la campagne, il n'y a aucune discussion sur la guerre et le besoin de cesser toutes les activités agressives des États-Unis, de ramener les soldats au pays. Là-dessus, c'est le silence.

Il appartient aux forces organisées comme nous d'attirer l'attention sur la question des guerres américaines, de soulever le besoin de s'organiser pour une alternative, pour établir un gouvernement antiguerre. C'est ce que nous allons faire dans les manifestations lors de l'assermentation du nouveau président. Tout comme le gouvernement des pouvoirs de police n'est pas une simple référence à des actions policières du gouvernement, le gouvernement de guerre ne fait pas seulement référence à l'opposition à une guerre en particulier, comme celle en Irak ou en Afghanistan. Il s'agit d'un gouvernement qui est contre l'économie de guerre permanente et la gouvernance de guerre à son service. C'est un gouvernement qui entreprend de donner suite au sentiment antiguerre de la majorité, d'établir les formes sociales et le processus électoral qui permettent d'aller dans cette direction. Quels seraient les traits caractéristiques du gouvernement constitué sur une base antiguerre ? Notre programme pour un gouvernement antiguerre a plusieurs défis à relever.

Les cercles dominants américains sont placés devant le fait que leur pouvoir économique supérieur d'autrefois est en déclin et que la puissance militaire n'est pas suffisante pour maintenir et étendre leur empire mondial. Ils doivent affronter tant leurs rivaux traditionnels que leurs alliés et tous ceux qui leur résistent. Ils peuvent le faire seulement en menaçant tout le monde et en faisant constamment monter les enchères, y compris la possibilité de recourir aux armes nucléaires. Cela a pour effet d'accroître la violence et d'intensifier les rivalités, comme on le voit déjà. Les États-Unis ne veulent pas renoncer à leur empire mondial et ils sont prêts à risquer une guerre mondiale et une guerre civile au pays qui pourrait entraîner le monde dans sa suite. Dans ces conditions, là où ils font face au déclin, où ils n'ont pas de solution et sont incapables de maintenir une processus politique qui confère une légitimité à leur pouvoir, le gouvernement des pouvoirs de police devient nécessaire, avec tous les dangers que cela représente pour les peuples du monde.

D'autre part, dans les conditions actuelles les cercles dominants sont incapables de prédire où mèneront leurs actions. C'était évident dans la guerre en Irak où les États-Unis ont déclaré « mission accomplie » en 2003 et pourtant leur guerre criminelle continue à ce jour. Ils ne peuvent pas prédire par exemple les conséquences s'ils devaient entreprendre des procédures pour destituer Trump, une idée qui a cours dans certains cercles. Il y a trop de forces en rivalité, au niveau fédéral comme au niveau des États, chacune avec son armée. La Californie, par exemple, conteste ouvertement le pouvoir de Donald Trump en matière d'immigration et elle est appuyée en cela par son assemblée législative et son sénat, plusieurs chefs de police et les maires de Los Angeles et de San Francisco. De même à Chicago, New York, Philadelphie, Boston et ailleurs. La mise en accusation de Trump pourrait provoquer l'éclatement des États-Unis en États et/ou en régions. L'abolition du collège électoral, qui est un mécanisme pour la préservation de l'union, est une possibilité, comme l'est l'abolition de la certification du vote du collège électoral par le Congrès. L'élimination de ces mécanismes pourrait provoquer la rupture. Et pour ceux qui se l'imaginent mal, ils n'ont qu'à penser à la vitesse avec laquelle s'est rompue l'Union soviétique. Ils n'ont qu'à se rappeler que plusieurs États, comme la Californie, ont une économie assez solide pour se constituer en pays. Il y a plusieurs autres scénarios de guerre civile aux conséquences imprévisibles.

Même chose concernant la menace par les États-Unis de recourir aux armes nucléaires. Qui sait quelles conséquences cela pourrait avoir non seulement du point de vue de l'éclatement d'une conflagration mondiale mais aussi du point de vue d'une guerre civile aux États-Unis. Les cercles dominants espèrent pouvoir se sortir de leur crise et de la crise de leur système par l'institution d'un gouvernement des pouvoirs de police.

Mais l'humanité, elle, ne peut affronter cette situation et la résoudre en sa faveur que sur la base de la lutte organisée des peuples pour leurs droits, y compris le droit de se gouverner et de décider.

Le conflit d'intérêt décisif oppose la classe dominante
à la classe ouvrière

Un autre sujet dont on parle beaucoup est que Donald Trump, à cause de ses nombreuses entreprises et ses liens d'affaires, est plus en « conflit d'intérêt » que les présidents passés. Ce cancan cache deux choses. D'abord il cache le fait que le conflit d'intérêt qu'il faut résoudre est celui qui oppose les cercles impérialistes et leur État qui protège et préserve les oligopoles à la classe ouvrière. C'est le conflit entre les intérêts de la classe dominante et les intérêts de la classe ouvrière et la bataille pour déterminer qui peut faire avancer la société et l'humanité entière aujourd'hui. Au lieu de centrer notre attention sur ces intérêts de la classe ouvrière et sur comment les défendre et les faire avancer, on nous invite à constamment réagir à tout ce que Trump dit ou fait et à s'intéresser à ses nombreuses propriétés.

La deuxième chose est que le problème à résoudre est de briser le silence entourant la voix de la classe ouvrière. Il faut trouver les moyens de développer et de renforcer nos institutions indépendantes, notre presse, nos instituts de recherche, notre discussion politique, pour développer notre matériel de penser pour être en mesure de défendre les intérêts de la classe ouvrière et bâtir nos propres institutions. Ce n'est pas notre responsabilité de soutenir une faction de la classe dominante contre une autre et ce n'est pas à nous de décider laquelle devrait sortir vainqueur de cette rivalité. La classe ouvrière a au contraire la responsabilité de diriger la lutte pour un tout autre renouveau, un renouveau qui sert ses intérêts et ceux des peuples.

C'est la défense des intérêts de la classe ouvrière, vers l'abolition de l'esclavage salarié et de tout esclavage en refusant d'être esclaves, en s'organisant pour défendre les droits de tous et toutes sur tous les fronts, qu'on trouvera une voie vers l'avant. Tout le bavardage à propos des « conflits d'intérêt » de Donald Trump détourne l'attention de cette tâche la plus pressante. Il masque la réalité des rapports sociaux et ne tient pas compte de la possibilité que les travailleurs s'organisent autour de leurs propres intérêts, de leur propre programme. Ces rapports sociaux ont produit une richesse abondante et un pouvoir énorme mais les êtres humains se voient refuser la possibilité de les mettre à profit pour garantir les droits de tous, au pays et à l'étranger. L'économie américaine, par exemple, est deux fois ce qu'elle était en 1970, pourtant plus de la moitié des familles américaines vivent au même niveau de revenu que cette année-là tandis que la richesse des oligopoles a plus que doublé et que les inégalités se sont accrues énormément. Cela est contraire aux intérêts de la classe ouvrière et le débat à propos de Trump ne contribue rien à la résolution de ce problème.

C'est à la classe ouvrière qu'incombe la tâche de diriger la lutte pour le nouveau, pour des rapports sociaux modernes, pour une démocratie moderne qui investit le peuple du pouvoir de se gouverner et de décider, pour des définitions modernes qui affirment les droits qui appartiennent à chacun du fait qu'il est un être humain. Nous ne pouvons pas imiter l'ancien ni rester pris dans les vieilles façons de faire, la vieille façon de tenir des élections, la vieille façon d'aborder les problèmes. Nous devons renforcer notre propre pensée, nos propres discussions sur nos intérêts et comment les faire avancer. Nous devons rallier le peuple autour de la tâche de renforcer sa capacité de refuser l'ancien et de commencer à conceptualiser des arrangements politiques modernes. Les métallos ici à Hamilton ont l'expérience des réunions du jeudi, un moyen qu'ils se sont donné pour activer le facteur humain/conscience sociale et prendre des positions politiques indépendantes. Cela élève le niveau de la discussion politique et unit les travailleurs autour de solutions à leur avantage plutôt qu'à celui des riches. C'est une réalisation importante et nous l'applaudissons. Nous croyons qu'elle doit être reproduite. Nous avons besoin d'autres formes de ce genre pour engager les travailleurs et les jeunes dans la défense de leur cause et pour leur habilitation.

Partout aux États-Unis les jeunes prennent déjà position par dizaines de milliers contre cette direction brutale et proclament : Trump n'est pas mon président ! Démocratie, pas oligarchie ! On ne réussira pas à les faire taire. Parmi les jeunes comme parmi les protecteurs de l'eau à Standing Rock, il y a une reconnaissance que le processus politique en place n'est pas acceptable.

Nous intervenons de manière proactive, pour avancer la lutte pour un processus politique qui investit le peuple du pouvoir, qui mène à l'établissement d'un gouvernement antiguerre, un gouvernement anti-esclavagiste, un gouvernement qui sert les intérêts de la classe ouvrière et du peuple au pays et à l'étranger. Nous agissons dans ce sens maintenant, nous organisons pour élever le niveau de la discussion politique, pour l'axer sur les intérêts des millions et des millions de travailleurs, pour engager plus de jeunes et de travailleurs dans cet effort, pour dire que nous avons besoin de notre propre démocratie, créée par nous-mêmes, pas la démocratie des cercles dominants. C'est une nécessité du présent et c'est la classe ouvrière qui peut faire avancer cette bataille.

Merci beaucoup de m'avoir invitée pour vous expliquer nos vues.

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Le programme de Trump pour «redonner sa grandeur à l'Amérique»

L'art de conclure un marché

Donald Trump a fait campagne avec le slogan « redonner sa grandeur à l'Amérique ». Dans sa discussion sur la signification des résultats des élections américaines, le PCC(M-L) a fait remarquer que selon les déclarations faites par Trump lui-même, celui-ci a l'intention de le faire en administrant les États-Unis comme une entreprise où « l'art de conclure un marché » devient un élément central. Dans cette vision énoncée par Trump, la personne de l'État et la personne de Trump deviennent une seule et même chose. Le slogan joue aussi un rôle important dans l'effort des cercles dominants pour propager le chauvinisme américain pour noyer la position antiguerre de la majorité. C'est fait pour convaincre les travailleurs surtout d'appuyer la guerre contre la Chine et d'autres pays pour «sauver des emplois».

Le PCC(M-L) a mentionné dans sa déclaration sur les résultats des élections que « les principaux arguments de sa campagne étaient que le système américain est brisé ou truqué, que la position des États-Unis dans le monde a été affaiblie et que seulement un président avec une personnalité forte comme lui peut remettre l'Amérique dans le droit chemin. Sa stratégie est d'être 'engagé' et que tout est dans l'art de conclure un accord. Le soir de la victoire il a dit : 'J'ai passé ma vie dans le monde des affaires et j'ai remarqué trop de projets et de gens au potentiel inexploité partout sur la planète' et 'c'est ce que je m'engage à faire pour notre pays'. » [1]

Ce que cela signifie a été amplement illustré au cours de la campagne et après celle-ci les méthodes de Trump sont en fait bien connues.

Le 23 juin 2015, lors d'un souper parrainé par le Parti républicain de Maryland pendant les primaires, Trump a dit que le problème d'Obama est qu'il « n'est pas un négociateur. Je ne veux pas qu'il négocie pour moi. Dans tout ce qu'il fait, il conclut de mauvais marchés. Il ne sait pas ce que c'est un bon marché ».

Pendant sa campagne, son mépris et ses commentaires cinglants à l'égard de l'ambassadrice des États-Unis au Japon, Caroline Kennedy, à l'effet qu'elle est une négociatrice faible, ont montré clairement ce qu'il entend faire une fois au pouvoir. Dans un discours à Mobile, en Alabama, le 21 août 2015, Trump a dit :

« Le Japon est de retour. Ils ont Abe, qui est le premier ministre, comme vous le savez. Et Abe est vraiment intelligent, je veux dire, je l'ai rencontré une fois et il est très futé. Et maintenant il négocie face à Caroline Kennedy. Dans nos relations avec le Japon, le rôle de l'ambassadeur est très important, parce que nous négocions avec eux, il faut quelqu'un de très futé. Quelqu'un avec un instinct de tueur, n'est-ce-pas ? Un tueur intelligent, pas un tueur stupide... [À l'émission 60 minutes], on lui a demandé 'comment êtes-vous devenue ambassadrice ?' Elle a répondu : 'Je ne sais pas trop, je cherchais un emploi, je n'avais rien à faire, je suis allée à la Maison-Blanche et je leur ai demandé si je pouvais avoir un emploi. Y a-t-il quelque chose que je peux faire ?' On lui a demandé si le poste d'ambassadrice au Japon l'intéressait. Elle a répondu 'Vraiment ? ...Ok, je le prends'. Elle n'arrivait pas à croire qu'elle avait le poste. Pour le reste, elle a passé son temps dans des soupers bien arrosés avec Abe et avec tous ces gens à l'instinct de tueur... Elle va faire tout ce qu'ils demandent. N'importe quoi. Moi, par contre, j'ai les individus les plus intelligents, les plus durs et les plus sans coeur et souvent les êtres humains les plus terribles du monde. Je les connais tous. Ce sont des tueurs, de vrais négociateurs. Certains sont des gens bien, mais ils ne sont pas nombreux. J'emploierai les plus astucieux et les plus intelligents, nous avons les meilleurs au monde mais nous ne les utilisons pas. Nous employons des amis politiques, des diplomates, qui ne connaissent rien aux affaires, des gens qui n'ont jamais conclu de marché [...] »

Il laisse entendre ici que les négociations se feront par des tueurs qui font des offres «qui ne peuvent pas être refusées», appuyées par la menace du recours aux armes nucléaires.

On l'a vu quand Trump a expliqué comment les relations avec la Chine (et le Japon) devraient être menées et qui devrait être mis en charge, et il a parlé de son proche associé le milliardaire Carl Icahn dont il a dit que « c'est un homme d'affaire incroyablement brillant et coriace. Je l'ai appelé. J'ai soupé avec lui l'autre soir. Je lui ai dit : 'Tu sais, Carl, je suis en avance, je mène dans tous les sondages'. Il me répond : 'Tes affaires vont vraiment bien.' Lui non plus n'en revient pas. Je lui dis : 'Si jamais je gagne, je veux que tu t'occupes des négociations avec la Chine'. Je pourrais même lui confier deux pays, la Chine et le Japon. Il me dit : 'Absolument ! Absolument !' (Trump poursuit en ouvrant grand la bouche et les yeux et en agitant des bras.) 'Je vais le faire.' C'est un négociateur hors-pair. Et ce n'est pas le seul. Je connais les meilleurs et je connais les pires. J'en connais dont la renommée est exagérée et d'autres dont vous n'avez jamais entendu parler qui sont encore meilleurs que tous les autres. »

Bloomberg a parlé de l'instinct d'Icahn en affaires et écrit qu'il « a quitté aux petites heures la soirée de la victoire de Trump pour aller miser près d'un milliard $ sur des actions américaines ».

Dans son édition du 15 novembre, le New York Times a rapporté que plusieurs dirigeants mondiaux ont appelé la réception du Trump Tower à New York pour essayer de parler au nouveau président élu, « faisant des pieds et des mains pour apprendre comment et quand contacter M. Trump ». Dans ses premières conversations avec les dirigeants mondiaux, il « agissait sans avoir avec lui de documents d'information du département d'État », ont rapporté les médias. Le 16 novembre, l'équipe de transition de Trump a publié une liste de 29 dirigeants mondiaux avec lesquels Trump et le vice-président Michael Pence se sont entretenus. Les premières communications ont été avec les dirigeants de l'Égypte et d'Israël.

Pendant toute la campagne les médias ont dit que les dirigeants mondiaux étaient terrifiés par Trump. En avril, un article d'Edward-Isaac Dovere et Bryan Bender pour Politico disait que Trump avait jeté les dirigeants mondiaux dans un « état de panique total ». « Ils ont peur et ils essaient de comprendre jusqu'à quel point tout cela est réel », aurait dit un haut fonctionnaire américain. « Tous posent des questions. Ils suivent notre politique dans ses moindres détails. Ils demandent : 'Qu'est-ce que c'est ce phénomène Trump ? Peut-il vraiment gagner ? Quel serait l'impact pour la politique des États-Unis ou pour l'engagement des États-Unis dans le monde ?' » Les médias en rajoutent sur la mystique de Trump soi-disant grand négociateur en décrivant ses faits et gestes comme étant amateurs, improvisés et irréfléchis.

Le 2 décembre, selon les médias, Trump aurait discuté au téléphone avec la présidente de Taïwan (officiellement la République de Chine, un État scissionniste de la Chine fondé par le gouvernement réactionnaire du Kuomintang de Chiang Kai-shek après sa défaite dans la guerre civile chinoise). C'était la première fois depuis 1979 qu'on fait mention d'un contact entre le président des États-Unis et un dirigeant de Taïwan. Les médias ont dit que Trump est naïf. Le 3 décembre, la Chine a déposé une plainte officielle et l'administration actuelle des États-Unis s'est fait rassurante en disant que la politique des États-Unis n'avait pas changé. Trump a réagi sur Twitter de façon cavalière, disant que c'est la présidente de Taïwan qui l'avait appelé et non le contraire. Quelques jours plus tard, le 5 décembre, les médias ont dit que cette communication avait été planifiée depuis plusieurs mois. Le Washington Post, le New York Times et le New York Daily News ont publié des articles qualifiant ce geste de « brillant », de « nouveau départ », de « la bonne chose à faire ».

Le 11 décembre, dans une entrevue avec Fox News, Trump a déclaré que la politique d'une seule Chine qui est celle des États-Unis depuis longtemps et selon laquelle Taïwan fait partie de la Chine pourrait être changée. Il a dit que cette question pouvait servir de levier dans les négociations avec la Chine sur d'autres questions. « Je ne vois pas pourquoi nous devons nous en tenir à une politique d'une seule Chine sauf si nous concluons un marché avec la Chine sur d'autres questions dont le commerce », a dit Trump. Il a parlé des « irritants » qui subsistent avec la Chine, comme la dévaluation de la monnaie, les taxes frontalières et son « comportement hostile » en mer de Chine méridionale. Le fait de provoquer la Chine de cette façon pourrait aussi être une façon de tester les eaux, au pays et à l'étranger, pour déterminer l'appui à une guerre contre la Chine. Trump a constamment attaqué la Chine durant la campagne pour promouvoir le chauvinisme aux États-Unis et préparer le terrain pour une possible agression.

Le 17 novembre, Trump a rencontré le président du Japon Shinzo Abe, à sa résidence du Trump Tower, sa première réunion avec un dirigeant étranger en tant que président élu. Selon les médias, la réunion a été « organisée à la dernière minute » et peu avant qu'elle ne se tienne « des choses comme l'heure, l'endroit et qui allait participer n'étaient pas encore décidées, ce qui n'a pas manqué de causer de l'anxiété parmi les hauts fonctionnaires japonais ». Un des conseillers d'Abe a dit qu'il avait discuté avec des conseillers de Trump depuis son arrivée aux États-Unis et qu'il avait appris que « nous ne devons pas prendre au pied de la lettre chaque déclaration publique de M. Trump ». Suite à la réunion, Abe a dit : « Il a pris le temps de me rencontrer bien qu'il soit très occupé. Je suis convaincu que le président élu Trump est un dirigeant en qui nous pouvons avoir confiance. » Les États-Unis ont occupé le Japon pendant longtemps et s'en servent comme base d'opérations pour des attaques possibles contre la Chine et la République démocratique populaire de Corée. Dans une situation où grandit l'opposition à la présence de bases militaires américaines en Corée et au Japon, il est important de «gagner la confiance» du Japon.

Trump a expliqué que ses déclarations publiques doivent être comprises comme une façon d'ouvrir les négociations. Dans un commentaire du 2 septembre suite à sa rencontre avec le président mexicain Enrique Pena Nieto, Trump avait dit que le président mexicain « n'est pas d'accord en ce qui concerne qui va payer pour le mur. Mais c'est ça une négociation et moi je vous dis que les États-Unis ne défrayeront pas les coûts de ce mur. C'est le Mexique qui va le faire. »

Dans un discours du 27 avril sur la politique étrangère, Trump a dit que les États-Unis doivent petre prêts à mettre leurs menaces à exécution quand ils sont contestés. « Dans une négociation, vous devez être prêt à quitter la table. L'accord avec l'Iran ... montre ce qui se produit lorsque vous n'êtes pas prêt à quitter la table. Lorsque votre adversaire sait que vous ne quitterez pas la table, cela devient absolument impossible de gagner. »

En ce qui a trait aux relations avec la Russie, L. Todd Wood, « un ancien pilote d'hélicoptère des opérations spéciales et courtier en titres de dettes de Wall Street discute du modus operandi de Donald Trump dans un article du 8 septembre du Washington Times.

« Quiconque a suivi de près le cycle électoral de 2016 est en mesure de comprendre que Donald Trump est toujours en négociation. Lorsque le candidat républicain parlait d'empêcher les musulmans d'entrer au pays 'jusqu'à ce qu'on puisse savoir ce qui se passe', il présentait une ligne dure de négociation qui pourrait être atténuée en cours de route si nécessaire [...]

« Lorsqu'il parle de déporter 12 millions d'immigrants illégaux, il fait la même chose. Maintenant qu'il semble prêt à adoucir sa position, il est perçu comme étant plus modéré et cela plaît à une plus grande partie de l'électorat. Je crois que M. Trump fera ce qui est bien pour l'Amérique sur la question de l'immigration, mais il faut comprendre que le négociateur commence à négocier bien avant que les médias annoncent que les négociations officielles ont débuté.

« Je pense que M. Trump suit exactement la même approche avec le président russe Vladimir Poutine. Il prépare le terrain pour le succès qu'il envisage dans ses négociations à venir avec Moscou. M. Trump a passé du temps en Russie. Il a fait des affaires avec les Russes. Il comprend leur façon de penser. Il comprend qu'ils respectent la force, pas la faiblesse. Il comprend aussi qu'ils veulent être respectés. Les commentaires de M. Trump faisant l'éloge de M. Poutine comme un dirigeant fort « dans un système différent » sont flatteurs pour l'égo du président russe et le moment est bien choisi. Les médias libéraux ont paniqué parce que M. Trump refuse de suivre la politique de l'administration Obama en ce qui concerne la Russie, mais il ne fait rien d'autre que de dire des paroles gentilles tout en tenant un gros bâton. [...]

Selon Todd, les Russes « ont un profond besoin de respect et un grand désir de prestige. M. Trump tient compte de ces besoins psychologiques. Il n'encense pas naïvement les Russes comme l'avait fait George W. Bush et il ne cherche pas à apaiser les Russes de façon incompétente comme l'ont fait constamment Hillary Clinton et le président Obama. Il ne ridiculise pas de façon narcissique la Russie comme si elle était une puissance de troisième ordre qui ne fabrique rien comme l'a insinué le président. Il ne se moque pas de Poutine comme étant écrasé sur sa chaise. Il traite le président de la Russie comme un dirigeant digne de respect, tout en veillant aux meilleurs intérêts des États-Unis. »

Il est important de garder à l'esprit que les négociations comprennent non seulement les accords d'affaires, comme l'indique la nomination de Rex Tiller, PDG de Exxon Mobile, par Trump, mais aussi les positionnements en cas de guerre contre la Chine ou la Russie. On tente présentement de dresser la Chine contre la Russie pour empêcher la formation d'une alliance entre elles contre les États-Unis.

Le 8 mai 2009, CBS News a publié une série d'articles sur « La psychologie de la négociation de Donald Trump ». L'auteur, Geoffrey James, y raconte l'histoire d'un de ses amis personnels qui venait de vendre sa compagnie à Trump :

« Plutôt que de rencontrer M. Trump immédiatement, ce qui était le plan original, mon ami a été dirigé vers une salle de conférence pour discuter des modalités finales avec quelques membres du personnel de Trump.

« Les participants à la réunion ont alors été informés que Trump allait arriver d'une minute à l'autre. Un membre du personnel a confié à mon ami : ' Vous devez comprendre que M. Trump ne serre jamais la main de personne. Alors il ne faut pas vous offusquer s'il ne vous tend pas la main, et ne tendez pas la vôtre '.

« Pendant que mon ami essayait de comprendre ce que cela voulait dire, le membre du personnel a ajouté : 'M. Trump est un homme très occupé et il préfère prendre des décisions rapidement. Donc, si la réunion ne dure que cinq minutes, ne vous en faites pas, parce que c'est normal pour lui d'agir ainsi'. Finalement, Trump arrive. Il se dirige directement vers mon ami et lui serre chaleureusement la main. Trump passe quarante minutes avec lui et ils discutent de leur affaire pour ensuite s'entendre sur les modalités finales.

« Et, comme vous l'avez sans doute deviné, ces modalités étaient moins avantageuses que mon ami ne l'avait espéré. »

Note


1. «Sur la signification de l'élection présidentielle aux États-Unis: La fin du 'business as usual', LML, 12 novembre 2016

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La paix par la force

Pour « redonner sa grandeur à l'Amérique », Donald Trump a aussi l'intention de dresser les pays les uns contre les autres et de rétablir l'hégémonie américaine en affaiblissant les autres. Tout porte à croire qu'il va reprendre à son compte la doctrine de «la paix par la force» de Ronald Reagan.

On le voit aux politiques mises de l'avant par Peter Navarro, le seul conseiller économique de Trump ayant des lettres de créance académiques. Navarro est professeur d'économie et de politique publique à l'École des affaires Paul Merage à l'Université de Californie à Irvine et diplômé de l'Université Harvard. Ses principales préoccupations en tant qu'économiste sont sa crainte que les États-Unis ne perdent leur position de domination mondiale et l'existence d'un conflit militaire imminent entre les États-Unis et la Chine. Il aime aussi à faire des prédictions sur comment faire des coups de fortune à la bourse.

Navarro est coauteur avec l'ancien conseiller économique de George W. Bush Glen Hubbard du livre Seeds of Destruction : Why the Path to Economic Ruin Runs Through Washington, and How to Reclaim American Prosperity (Les germes de la destruction : comment la voie vers la ruine économique passe par Washington et comment rétablir la prospérité américaine). Selon Navarro, le livre traite « du problème le plus important de notre époque », soit « le fait que l'économie américaine connaît depuis dix ans une croissance en deçà de son potentiel et les craintes que cela engendre au sujet de la prospérité future de la nation ».

Navarro a aussi écrit un livre en 2011, qui est devenu un film Netflix intituté Death by China (La mort aux mains de la Chine), qui décrit lui aussi la relation économique entre les États-Unis et la Chine comme étant « l'enjeu le plus crucial de notre temps ». Dans le livre suivant qu'il a écrit en 2015, intitulé Crouching Tiger : What China's Militarism Means for the World ( Tigre et dragon : ce que le militarisme de la Chine signifie pour le monde), il affirme que le livre « fournit l'examen le plus complet et le plus précis de la probabilité d'un conflit entre les États-Unis et la Chine » et « présente une analyse en profondeur des voies possibles de la paix ».

Le livre de Navarro « démontre l'importance de maintenir la puissance militaire américaine et son niveau de préparation et de renforcer les alliances tout en mettant en garde contre un optimisme complaisant qui repose sur l'engagement économique, les négociations et la dissuasion nucléaire pour garantir la paix ». Navarro dit que les prétentions de la Chine sur la mer de Chine méridionale, si elles sont maintenues, pourraient bien « mener à l'expulsion de la marine américaine de l'Asie-Pacifique ».

En 2016, Navarro a soulevé la question des cyberattaques alléguées des Chinois. Il a dit que les trois cyberattaques principales sont :

 1) Le vol des plans des entreprises américaines.

 2) Le vol des designs de matériel militaire et l' « invasion » de pièces contrefaites.

 3) Des attaques contre les « systèmes de contrôle industriels » des infrastructures essentielles comme les réseaux électriques, les systèmes d'épuration des eaux, le contrôle du trafic aérien, les métros et les télécommunications.

Avant d'être nommé au poste de conseiller de Trump, Navarro a salué les propositions de Trump pour des représailles aux cyberattaques, sous forme notamment « de sanctions commerciales sévères pour les pays qui font du piratage, de bannissement de toute entreprise étrangère qui pratique toute forme d'espionnage (cybernétique ou autre) et de l'abrogation de tout accord commercial qui ne fournit pas de protection adéquate de la propriété intellectuelle. Navarro demande que des pouvoirs additionnels soient conférés au FBI, dont la « délégation » aux secrétaires de cabinet de pouvoirs de police leur permettant d' « identifier et de punir ceux qui font de l'intrusion cybernétique et de donner carte blanche au FBI spécifiquement et au département de la Justice généralement pour poursuivre en justice les auteurs de crimes cybernétiques avec le plein poids de la loi ».

Dans une entrevue du 25 août à l'émission PBS Newshour, Navarro a expliqué la nature de la politique commerciale de Trump à l'égard de la Chine. Niant l'assertion que ces propositions sont « protectionnistes », il a dit que « s'il impose des tarifs à la Chine ou à tout autre pays qui triche, tout ce qu'il cherche à faire c'est défendre les États-Unis contre des pratiques commerciales inéquitables ». Il a ajouté que les tarifs ne sont pas la fin mais un « outil de négociation pour mener des pays comme la Chine à mettre fin à leurs pratiques commerciales déloyales ».

Navarro a dit que la « doctrine commerciale de Trump » est que « l'Amérique va faire du commerce avec tout pays en autant que les accords satisfassent à ces trois critères :

« - augmenter le taux de croissance du PIB;

« - diminuer le déficit commercial;

« - renforcer la base manufacturière. »

Dans un article du 7 novembre signé conjointement par Navarro et Alexander Gray, un autre conseiller de Trump, et intitulé « La vision de paix par la force de Trump en Asie-Pacifique », les auteurs parlent de l'échec du Pivot vers l'Asie et du Partenariat transpacifique (PTP) d'Obama-Clinton. Navarro et Gray y écrivent que « Obama et Clinton ont qualifié le PTP de mesure de sécurité nationale visant à contenir une Chine montante. Comme l'a dit Ash Carter, le secrétaire à la défense d'Obama, signer le PTP ' est aussi important pour moi que d'ajouter un porte-avions ' ».

Navarro et Gray expriment leurs frustrations envers la politique des États-Unis à l'égard de la République populaire démocratique de Corée, qu'ils qualifient de « patience stratégique », et leur échec à stopper les efforts des Coréens pour se défendre et défendre leurs système économique et politique. Ils parlent d'autres « défaites » comme l'élection d'un nouveau président aux Philippines qui a critiqué la politique étrangère des États-Unis. Navarro et Gray écrivent que « la déclaration sinistre d'Obama sur 'la ligne rouge' en Syrie a elle aussi été perçue dans toute la région de l'Asie-Pacifique comme une invitation ouverte à l'agression contre les alliés et les partenaires des États-Unis. »

Selon Navarro et Gray, les États-Unis « ont devant eux d'excellentes occasions de rétablir leur position géostratégique en Asie », qui proviennent selon eux « principalement des mauvais calculs faits par la Chine et de sa tendance à trop présumer des situations ». Ils disent que « la marine américaine est probablement la plus grande source de stabilité régionale en Asie » et que par conséquent « la seule mise en oeuvre du programme naval de Trump va suffire à rassurer nos alliés que les États-Unis demeurent fidèles dans le long terme à leur rôle traditionnel de garant de l'ordre libéral en Asie ».

Navarro et Gray décrivent en ces termes l'approche de Trump :

« Premièrement, Trump va faire en sorte que l'économie américaine ne sera jamais plus sacrifiée sur l'autel de la politique étrangère par la signature de mauvais traités de commerce comme l'Accord de libre-échange nord-américain, ou l'autorisation donnée à la Chine de se joindre à l'Organisation mondiale du commerce et l'adoption du projet de PTP. Ces accords ne font qu'affaiblir notre base manufacturière et notre capacité à nous défendre et à défendre nos alliés.

« Deuxièmement, Trump va poursuivre de façon soutenue une stratégie de paix par la force, qui était un axiome de Reagan que l'administration Obama a abandonné. »

Navarro et Gray terminent leur article en faisant l'éloge de Trump pour sa « claire compréhension des éléments constitutifs d'une politique étrangère victorieuse en Asie et dans le monde. Un de ses piliers est la force intacte des États-Unis en appui aux intérêts nationaux américains, où les mots veulent dire quelque chose et où alliés et concurrents savent que le président américain va faire ce qu'il dit. Dans une administration Trump, ces qualités vont contribuer à une Asie-Pacifique beaucoup plus stable, une Asie-Pacifique qui sert pleinement et pacifiquement les intérêts de l'Amérique et de ses alliés et partenaires. »

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Le secteur manufacturier et l'industrie

Un autre aspect du plan de Donald Trump pour « redonner sa grandeur à l'Amérique » consiste à ramener aux États-Unis les emplois perdus aux autres pays dans le cadre de la mondialisation. On dit que Trump a touché une corde sensible chez les électeurs américains en parlant du sort des communautés qui ont souffert des pertes d'emplois manufacturiers et de la perte d'industries. Trump blâme le Mexique et la Chine et dans certains cas les entreprises elles-mêmes et s'est engagé à empêcher les emplois manufacturiers de « quitter » le pays.

Depuis l'élection, Trump affirme avoir déjà « sauvé » des emplois à une usine Ford du secteur de l'automobile puis à l'usine de climatiseurs Carrier en Indiana. Selon un article du Wall Street Journal, des dirigeants de Ford ont dit que leur décision de ne pas déplacer la production de modèle Lincoln vers le Mexique et d'augmenter la production du modèle Escape au Kentucky était « une façon relativement peu coûteuse mais réelle de donner une victoire à M. Trump avant même qu'il entre à la Maison-Blanche ».

Le 29 novembre, Trump a annoncé que, sans doute à cause de son intervention personnelle, Carrier a gardé en Indiana 1100 des 1400 emplois qu'il allait relocaliser au Mexique. Dans un communiqué de presse émis le jour suivant, Carrier dit que « les avantages que l'État a consentis ont joué dans la balance » et que « les forces à l'oeuvre dans la mondialisation vont continuer à nous forcer à rechercher des solutions si nous voulons assurer la compétitivité à long terme des États-Unis et des travailleurs américains ». On a appris plus tard que ces avantages comprenaient des baisses d'impôts d'une valeur de 7 millions $ sur 10 ans pour la compagnie qui a fait 7,6 milliards $ de profits en 2015. La compagnie mère de Carrier, la United Technologies, dont Trump a rencontré le PDG, est également un fournisseur pour la Défense, alors il est possibles que des ententes aient été conclues sur ce front également.

Le président de la section locale 1999 du Syndicat des Métallos à Carrier, Chuck Jones, a dit que les travailleurs n'ont pas été mobilisés dans ce processus, que ce soit par la compagnie ou par Trump. Il a par la suite confirmé avec Carrier que la compagnie allait maintenir 730 emplois syndiqués et 70 emplois non syndiqués, et non pas 1100, et que 550 emplois syndiqués allaient être éliminés. Après que Jones ait fait remarquer que le chiffre de 1100 emplois avancé par Trump était faux, Trump l'a attaqué sur Twitter en disant que « Chuck Jones, le président de la section 1999 du Syndicat des Métallos, a très mal représenté les travailleurs. Pas surprenant que les emplois quittent les États-Unis ! », et si la section locale des métallos 1999 faisait son travail, elle aurait maintenu ces emplois en Indiana. Passez moins temps à parler et plus de temps à travailler. Réduisez les cotisations. »


Des travailleurs sur les lignes de piquetage à l'hôtel Trump à Las Vegas le 21 avril 2016

Jones a rapporté qu'une demi-heure après les Tweets de Trump, il s'est mis à recevoir des appels anonymes sans arrêt de gens qui lui disaient « on s'en vient te chercher », « me criant des noms, me demandant si j'ai des enfants ». « Je vais devoir faire attention à moi, ces gens-là savent quel genre d'auto je conduis, et faire attention à mes enfants », a dit Jones.

La meilleure indication de la manière dont Trump entend « sauver des emplois » est le rapport qu'il entretient avec ses travailleurs dans ses propres hôtels et casinos. Les employés qui travaillent à l'hôtel de Trump à Las Vegas se sont vus nier le droit de négocier leurs salaires et leurs conditions de travailleurs depuis qu'ils se sont syndiqués plus tôt dans l'année. À son hôtel à Washington, les travailleurs ont voté en faveur de se syndiquer en décembre 2015 et l'organisation de Trump a refusé d'accepter le résultat du vote. Les travailleurs du Casino Taj Mahal de Trump à Atlantic City, au New Jersey, ont déclenché la grève en juillet pour demander entre autres choses le rétablissement de leurs avantages sociaux et de leurs prestations de retraite qui avaient été éliminés lors des procédures de faillite de 2014. Carl Icahn, un proche associé de Trump qui a acheté le casino en 2014 a qualifié les demandes des travailleurs d' « obstacle à toute possibilité de rentabilité » et il a fermé l'entreprise le 10 octobre, privant 3000 travailleurs d'un gagne-pain.

On lit dans un rapport publié le 17 octobre dans Mother Jones que « l'entreprise de Trump a encouragé les employés à investir leur épargne-retraite dans les actions de la compagnie, selon un recours collectif déposé par les employés contre Hotels & Casino Resorts de Trump suite à la faillite de 2004. Lorsque le prix des actions est tombé à son plus bas, dans la période précédant la faillite, la compagnie a forcé les employés à vendre leurs actions avec des pertes substantielles. Selon le recours collectif, plus de 400 employés ont perdu plus de 2 millions $ de leurs épargnes pour la retraite. »

De même, celui que Trump a nommé secrétaire du Travail, Andrew Puzder, qui est le PDG du monopole de restauration rapide qui possède les chaînes Hardee's et Carl's Jr., est contre l'augmentation du salaire minimum et la réglementation relative aux heures supplémentaires et est décrit comme étant « antiréglementation ». Puzder a dit que des politiques comme le salaire minimum « encouragent l'automatisation » et que son monopole comme d'autres de la restauration rapide investissent de l'argent en ce moment pour mettre au point des machines qui vont remplacer la main-d'oeuvre humaine.

Le choix de Trump pour le poste de secrétaire au Commerce est Wilbur Ross, celui qui s'est mérité le titre de « roi de la banqueroute » et de « sauveur des industries américaines en faillite ». Il est devenu célèbre en achetant et en « restructurant » des entreprises en faillite pour les revendre une fois allégées de toute obligation envers les régimes de retraite et ayant extorqué des concessions aux travailleurs au moyen du chantage suivant : « Vous sauvez les emplois » ou vous vous retrouvez avec rien. » Ross a agi de la sorte dans le secteur du textile, minier et sidérurgique et il a récemment acheté des centaines de millions de dollars de dettes de compagnies du secteur de l'énergie par le biais de sa firme WL Ross & Co. dans une tentative de prise de contrôle d'entreprises pétrolières et gazières en difficulté advenant qu'elles doivent céder leur propriété à des créanciers.

Le Wall Street Journal écrit que la valeur sur le marché du International Textile Group Inc. de Ross, « un amalgame d'entreprises de textile en faillite, ne représente plus que quelques millions de dollars » et que « la tentative [de Ross] de faire revivre l'industrie textile des États-Unis a échoué à cause de la forte concurrence provenant de la Chine ». En 2004, Ross « s'est joint à A.T. Massey Coal Co. pour acheter les actifs de l'entreprise en faillite Horizon Natural Resources Co. en utilisant une combinaison d'argent comptant et de dette », écrit le Wall Street Journal . L'entreprise, renommée International Coal Group, s'est mise à acheter de plus petits producteurs de charbon et a été vendue à Arch Coal en 2011 pour la somme de 3,4 milliards $.

Dans le secteur de l'acier, on dit que Ross a « rabouté » les fabricants d'acier Bethlehem Steel, Acme Steel, Weirton Steel et LTV Steel pour former le International Steel Group en 2002. Il a placé le conglomérat en bourse en 2003 et l'a vendu au milliardaire indien Lakshmi Mittal deux ans plus tard pour la somme de 4,5 milliards $. Environ 250 000 métallos ont perdu leurs pensions.

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À titre d'information

Résultats des élections

Le collège électoral élira le président des États-Unis d'Amérique le 19 décembre : 538 grands électeurs sélectionnés par les candidats et les organisations républicaines et démocrates des États se réuniront dans leur État respectif et éliront, par bulletins séparés, le président et le vice-président.[1] Le nouveau Congrès comptera les votes électoraux le 6 janvier et doit certifier ou contester le vote des grands électeurs. La loi requiert que le représentant de la Chambre et du Sénat qui conteste le vote des États le fasse par écrit pour qu'une objection formelle soit inscrite au journal. Ce jour-là, le vice-président Joe Biden (agissant comme président du Sénat), présidera l'assemblée et nommera les personnes qui ont été élues président et vice-président et l'investiture du nouveau président aura lieu le 20 janvier 2017 à midi.

Donald Trump, le candidat du Parti républicain, a reçu la majorité des votes du collège électoral, soit 306 grands électeurs contre 232 pour Hillary Clinton, la candidate du Parti démocrate, suivant l'élection présidentielle du 8 novembre, ce qui fait de Trump le 45e président élu des États-Unis.[2]

Sur les 232 millions d'électeurs admissibles, plus de 95 millions (41 %) n'ont pas voté. Trois millions sont inadmissibles en raison de leur statut de criminels condamnés. Donald Trump a reçu environ 63 millions de votes, ou 27 % du vote admissible, alors qu'Hillary Clinton a reçu environ 65 millions de votes, ou 28 % du vote admissible.[3] Le candidat du Parti libertarien Gary Johnson a reçu 4 millions de votes et la candidate du Parti vert Jill Stein plus de 1 million de votes. Environ 2 millions de votes ont été répartis entre les autres candidats, y compris les votes « write-in » ( un vote où l'électeur écrit le nom d'un candidat qui n'apparaît pas sur le bulletin de vote) et parmi ces candidats on compte ceux du Parti du socialisme et de la libération, du Parti du monde des travailleurs, du Parti pour la paix et la liberté de même que des candidats indépendants.

Il s'agit de la cinquième élection américaine dans laquelle la personne qui a obtenu la majorité du vote national ne remporte pas le vote du collège électoral.

Des élections ont aussi eu lieu à la Chambre des représentants et au Sénat. Dans les deux cas, ce sont les candidats du Parti républicain qui ont remporté la majorité des sièges, soit 239 contre 193 pour le Parti démocrate pour la Chambre et 51 contre 48 pour le Sénat.

Les données des sondages à la sortie des bureaux de scrutin

Selon les sondages effectués à la sortie des bureaux de scrutin par CNN, 54 % des électeurs avaient une opinion défavorable d'Hillary Clinton et 60 % avaient une opinion défavorable de Donald Trump. Dix-huit pour cent avaient une opinion défavorable des deux candidats. Soixante-et-un pour cent ont dit que Hillary Clinton n'était « pas honnête et digne de confiance » et 63 % ont dit la même chose de Trump. Vingt-neuf pour cent des répondants ont dit que ni l'un ni l'autre était honnête. Cinquante-trois pour cent des personnes interrogées ont dit « craindre » ou être « préoccupées » par une victoire de Clinton alors que 56 % ont dit la même chose d'une victoire de Trump. Soixante-dix pour cent ont dit que l'attitude de Donald Trump envers les femmes les dérangeait « beaucoup » ou « un peu ». Quarante-quatre pour cent ont dit qu'ils seraient « enthousiastes » ou « optimistes » suite à une victoire de Clinton et 40 % ont dit la même chose de Trump.

Note 

1. Les électeurs qui ne votent pas pour les candidats qui ont reçu la majorité des voix dans leur État sont qualifiés d'« électeurs sans foi » et dans certains États ils peuvent être poursuivis en justice, habituellement pour des amendes relativement insignifiantes. Une telle chose ne s'est produite que quelques fois depuis un siècle. Le Congrès pourra renverser toute mesure du Collège électoral à sa session du 6 janvier.

2. Trump a été déclaré gagnant dans les États suivants : Alabama, Alaska, Arizona, Arkansas, Caroline du Nord, Caroline du Sud, Dakota du Nord, Dakota du Sud, Floride, Géorgie, Idaho, Indiana, Iowa, Kansas, Kentucky, Louisiane, Michigan, Mississippi, Missouri, Montana, Nebraska, Ohio, Oklahoma, Pennsylvanie, Tennessee, Texas, Utah, Virginie occidentale, Wisconsin et Wyoming. Clinton a été déclarée gagnante dans les États suivants : Californie, Colorado, Connecticut, Delaware, District de Columbia, Hawaï, Illinois, Maine, Maryland, Massachusetts, Minnesota, Nevada, New Hampshire, New Jersey, Nouveau-Mexique, New York, Oregon, Rhode Island, Vermont, Virginie et Washington.

3. En 2012, le candidat républicain a reçu 61 millions de votes et le candidat démocrate 66 millions. En 2008, le score a été de 60 millions de vote pour le candidat républicain et de 69 millions pour le candidat démocrate.

(Sources : National Popular Vote Tracker, United States Election Project, National Archives and Records Administration, CNN)

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La position des syndicats

Un des plus grands problèmes auxquels la classe ouvrière et le peuple américain font face c’est que la voix de la classe ouvrière est réduite au silence. Non seulement peu de travailleurs sont-ils syndiqués (le taux de syndicalisation est tombé de 20% à 11% depuis 1983), mais les centrales syndicales en général suivent la vieille politique consistant à se rallier à une faction de la classe dominante des États-Unis dans sa lutte pour le pouvoir, ce qui laisse la classe ouvrière divisée. À cet égard, la position des syndicats américains et des syndicats internationaux basés aux États-Unis est d’appuyer la démocratie américaine rongée par la crise et de dire que c'est la voix du peuple américain qui s'est exprimée dans l'élection de Trump. Certains syndicats suggèrent que l'élection présidentielle a donné au peuple américain l'occasion de décider de la direction du pays. Ils disent que c'est là l'essence-même de la démocratie américaine, d'en arriver à un verdict donné par le peuple. À cet égard, la plupart admettent que leurs membres ont été profondément divisés par cette élection et selon eux il s’agit d’une division idéologique droite-gauche. Ils ignorent les résultats qui démontrent qu'un nombre significatif de travailleurs n'ont voté ni pour Clinton ni pour Trump et ont plutôt choisi de ne pas participer dans une élection où les candidats républicain et démocrate étaient généralement considérés comme les « deux personnes les plus détestées ».

Certains syndicats disent que les élections et leurs résultats démontrent que le système économique et politique est brisé et qu'ils sont un réquisitoire contre le même « business as usual en politique » tout en rêvant de maintenir ce « business as usual ». Ce sentiment est bien exprimé dans la déclaration émise par la AFL-CIO, la centrale syndicale nationale qui représente un collectif de syndicats. Son président Richard Trumka y dit ceci :

« Donald Trump a été élu président. Les États-Unis sont un pays démocratique, et les électeurs ont parlé. L'AFL-CIO accepte le résultat de l'élection et félicite le président élu Donald Trump. Avant toute chose, cette élection est un réquisitoire contre le 'business as usual' en politique. »

Le peuple a parlé, dit l'AFL-CIO, et pourtant le décompte du vote national montre que Clinton a reçu deux millions de voix de plus que son adversaire. La centrale affirme que la victoire de Trump est en grande partie due aux travailleurs en colère qui font les frais d'une croissance qui se fait sans le secteur manufacturier, d'une faible création d'emplois et des emplois qui quittent les États-Unis, surtout dans ce qu'on appelle les « champs de bataille des États en déclin économique ». Selon l'AFL-CIO, les « élites » ont tourné le dos aux travailleurs, en particulier avec les accords de commerce mondiaux qui délocalisent le travail à l'étranger. Cela aurait fait pencher le vote au Collège électoral en faveur de Trump, avec des victoires dans les États fortement industrialisés de Pennsylvanie, de l'Ohio, de l'Indiana, du Wisconsin et même du Michigan, tous des États que les démocrates avaient remportés récemment. L'AFL-CIO n'explique pas et ne tente pas d'analyser comment le changement d'un oligarque de l'élite pour un autre pourrait favoriser la classe ouvrière. Elle n'analyse pas pourquoi les « travailleurs en colère » devraient voter pour une oligarque aussi virulemment antiouvrière que Clinton qui est une promotrice des ateliers de misère en Haïti ou pour Trump qui s'est personnellement attaqué à ses propres travailleurs d'hôtel et de casino.

La centrale syndicale évite toute discussion sérieuse qui pourrait expliquer pourquoi les travailleurs ne sont pas préparés pour se défendre face a une élection impérialiste ou pour aller de l'avant d'une manière qui favorise les intérêts des travailleurs et ne créée pas d'illusions à l'effet que Donald Trump va le faire. Comment le mouvement syndical organisé a-t-il contribué à laisser la classe ouvrière sans sa propre vision, laquelle lui fournit une base solide pour s'engager dans la lutte contre la démocratie impérialiste et son système électoral avec une conscience claire et des actions avec analyse ?

Certains dirigeants syndicaux semblent chercher une façon de maintenir leur rôle au sein de la société civile au moment même où Trump leur lance toutes sortes de menaces dans ses hôtels et ses casinos de même que dans ses discours où la rhétorique de l'État policier est omniprésente.

La plupart des dirigeants syndicaux des États-Unis souhaitaient la victoire de Clinton et ont fait campagne à l'échelle du pays auprès de leur membership pour qu'il vote pour elle. Les travailleurs canadiens membres des syndicats internationaux basés aux États-Unis ont même reçu des lettres de leurs dirigeants américains les exhortant à voter pour Clinton et à contester la vague de fond anti-Clinton qui existait parmi leurs propres membres.

Les syndicats ont reconnu que la classe ouvrière a été divisée pendant l'élection mais ils n'ont pas analysé que c'est précisément un des rôles principaux de ces institutions désuètes, qui n'investissent pas le peuple du pouvoir, que de diviser la classe ouvrière sur une base sectaire fondée sur l'appui à l'un ou l'autre des partis oligarchiques La division sectaire selon les lignes de partis place la classe ouvrière dans la position vulnérable d'appuyer telle ou telle faction dite de droite ou de gauche de l'oligarchie financière et ce jusqu'à la participation dans une guerre civile réactionnaire telle qu'elle est en train de germer aux États-Unis qui ne sont pas si unis que leur nom l'indique. Le fait de mobiliser la classe ouvrière dans la politique inter-impérialiste et inter-monopoliste des oligopoles et de l'oligarchie financière affaiblit beaucoup le mouvement de la classe ouvrière. La raison en est que cela obscurcit la division fondamentale qui existe entre les classes aux États-Unis, en particulier la lutte de classe entre la classe ouvrière et ceux qui possèdent et contrôlent la richesse et la propriété sociale comme c'est le cas des représentants des oligopoles Donald Trump et Hillary Clinton.

La Fraternité internationale des ouvriers en électricité (IBEW) ne voit que la division qui existe entre ses dirigeants et ceux qui les ont suivis en votant pour Clinton et les autres membres qui ont voté pour Trump.

« Cette élection a été longue et parfois source de divisions mais, en tant que confrères et consoeurs de l'IBEW, il y a plus de choses qui nous unissent que de choses qui nous divisent et il faut plus que jamais que nous travaillions ensemble dans les jours, les mois et les années qui viennent », a dit le président de la IBEW Lonnie R. Stephenson.

La question de comment réaliser cette unité et de l'unité dans quel but n'est pas abordée. On ne parle pas du besoin de la politique indépendante de la classe ouvrière organisée par et pour les travailleurs eux-mêmes avec leurs propres politiciens ouvriers.

L'IBEW dit plutôt : « Ce qui s'est passé mardi dernier a révélé l'anxiété profonde qui existe parmi l'électorat face à une classe moyenne en déclin, des salaires stagnants et le sentiment que notre système politique est truqué afin de servir le 1 % à la tête de la société. »

Une classe ouvrière consciente de sa politique indépendante ne se jetterait jamais dans les bras de gens comme Trump parce qu'elle fait face à des difficultés. Au lieu de tirer la conclusion qui s'impose et de reconnaître le besoin de renforcer le front organisé de la classe ouvrière, l'IBEW se déshonore par ses paroles de conciliation par lesquelles elle prétend qu'il y a un « terrain d'entente » entre les travailleurs et Trump.

« Dans la mesure où le président élu Donald Trump est sérieux lorsqu'il dit vouloir travailler à faire croître la classe moyenne et à fournir de véritables opportunités aux travailleurs américains, nous sommes prêts à travailler avec lui. Sur des sujets comme le commerce, l'infrastructure, les emplois et la sous-traitance, il peut exister un terrain d'entente entre nous et je m'engage à le trouver », déclare le communiqué.

Ces questions sont précisément celles sur lesquelles Trump et son nouveau cabinet, qui comprend Wilbur Ross comme secrétaire au Commerce, n'ont démontré aucun terrain d'entente avec la classe ouvrière. Pourquoi alors ne pas tirer la conclusion qui s'impose sur la base de la réalité dans laquelle se trouve le corps politique et discuter de ce que les travailleurs vont faire dans une telle situation ?

Certains dirigeants syndicaux américains tentent maintenant de se trouver une niche où ils peuvent retourner pour agir selon de manière « business as usual » alors que les élections et les nominations de Trump à son cabinet démontrent que l'élection américaine a plongé le système impérialiste d'États dominé par les États-Unis et le monde entier dans une situation où le « business as usual » n'existe plus.

La réalité existe telle qu'elle se présente et pourtant certains dirigeants syndicaux qui représentent les intérêts de la classe ouvrière semblent enclins à chercher un « terrain d'entente » avec le régime de Trump. Désespérés, ils imaginent qu'un terrain d'entente va apparaître de la promesse de Trump à l'effet qu'il va changer la situation que vivent les travailleurs en colère des États fortement industrialisés. Les dirigeants syndicaux demandent à Trump de remplir ses promesses et disent que les syndicats vont devoir démontrer leur capacité à négocier avec des gens avec lesquels ils ne sont pas d'accord. On en a un exemple dans la déclaration que l'Association internationale des machinistes et des travailleurs de l'aérospatiale (AIM) a émise. L'AIM essaie de faire bonne figure et dit : « En tant que syndicat de travailleurs, nous faisons affaire à chaque jour à la table de négociations avec des gens avec qui nous sommes en désaccord. Nous essayons de trouver un terrain d'entente. C'est exactement ce que nous avons l'intention de faire dans cette nouvelle situation. »

Le terrain d'entente, ce sont supposément les emplois et ce serait l'ordre du jour de Trump également. Les syndicats disent chercher un terrain d'entente avec Trump au sujet de « choses » comme les emplois tout en ajoutant qu'ils ont des divergences en ce qui concerne les « valeurs fondamentales » et que là-dessus ils ne feront pas de compromis. Il semble selon eux n'y avoir aucun lien entre les emplois et les valeurs fondamentales. Ils ne tiennent pas compte du fait que l'objectif de Trump et celui des travailleurs sont diamétralement opposés. Pour Trump, les emplois sont des choses et non des travailleurs ayant des droits et des intérêts de classe qui sont en contradiction avec les intérêts des gens qui possèdent et contrôlent la propriété sociale.

Les dirigeants syndicaux américains disent qu'ils font face à un dilemme et qu'ils doivent mettre en jeu leur capacité de négocier afin de trouver un terrain d'entente entre les emplois et leurs « valeurs fondamentales » sur lesquelles ils ne vont jamais faire de compromis. Dans ce dilemme, les « emplois » et la création d'emplois sont présentés comme des choses et non des relations dans lesquelles les gens s'engagent afin de gagner leur vie et qui permettent aux oligarques de s'emparer de la valeur ajoutée que les travailleurs produisent. Parce que les emplois sont considérés comme des choses et non des relations entre les gens, en particulier entre les employés et les employeurs, les dirigeants syndicaux présentent ces choses comme étant détachées de valeurs fondamentales concrètes qui reposent sur les droits de la classe ouvrière et son aspiration à un équilibre dans les relations entre les classes. Les emplois sont considérés comme étant des emplois, rien de plus, dénués d'idéologie et de quelque politique que ce soit, déconnectées même de la lutte de classe à la défense des droits et de la réalité qui nous dit que sous l'impérialisme les emplois existent au sein d'une relation sociale antagoniste dialectique entre la classe ouvrière et ceux qui possèdent et contrôlent la richesse sociale comme Trump et Clinton. Au sein de cette relation sociale difficile, la classe ouvrière lutte pour un équilibre qui à tout le moins reconnaît les droits et prépare le terrain à la construction du nouveau, en dehors de cette relation sociale.

Selon de nombreux dirigeants syndicaux, la direction dans laquelle Trump, ou Clinton, prennent l'économie n'a rien à voir avec les relations qui existent entre eux et la présidence Trump, en autant que des emplois sont créés et que leurs « valeurs fondamentales » sont respectées au moins en paroles sinon dans les faits dans le tohu-bohu de la lutte de classe. Les valeurs fondamentales demeurent déconnectées de la réalité et dénuées de contexte historique au sein du système impérialiste d'États et certainement pas connectées avec les conditions concrètes des luttes de la classe ouvrière à la défense de ses droits et des droits de tous.

Certains dirigeants syndicaux disent reconnaître qu'il existe une division entre eux-mêmes, qui ont fait campagne et voté pour Clinton comme l'ont fait une partie des membres, et les autres membres qui ont voté pour Trump. Ils ne semblent pas s'intéresser à ceux qui n'ont pas voté ni vouloir savoir pourquoi les gens votent d'une certaine façon ou ne votent pas. Le vote se produit supposément en dehors de tout contexte historique et on ne porte pas attention aux nombreuses personnes qui ont participé de leur mieux dans des actions avec analyse afin de s'opposer aux élections impérialistes et à leur frauduleux processus électoral et en luttant pour une alternative.

Les résultats de l'élection montrent que la très vaste majorité qui a voté directement contre Trump ou n'a pas voté se monte à environ 190 millions de personnes. Ce qu'il y a de commun à cette majorité c'est que sa décision de s'opposer à Trump ou au processus électoral impérialiste dans son ensemble ne compte pas dans le système politique américain. Cette majorité est désaffranchie du résultat, lequel est une présidence Trump et tout le pouvoir que cela comprend. Les travailleurs sont privés de pouvoir localement, régionalement et nationalement.

Le vote n'est pas le signe de l'existence d'un terrain d'entente entre les travailleurs et l'oligarchie financière. S'il révèle quelque chose, c'est plutôt la répudiation d'un processus électoral impérialiste qui a produit des candidats pro-guerre et racistes aussi détestés. Pourquoi ne pas le dire, puisque c'est la conclusion qui s'impose, et discuter de comment les travailleurs vont s'organiser en un front puissant qui est capable de défendre leurs droits par des actions avec analyse et qui développe de manière ininterrompue la conscience qu'ont les travailleurs de leur classe et leur unité dans la lutte pour une nouvelle direction prosociale de l'économie et de la société.

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La multiplication des scénarios de guerre civile

Les contradictions aux États-Unis entre ceux qui affirment les droits de l'État et ceux qui imposent les pouvoirs fédéraux et les prérogatives des autorités de divers niveaux sont si intenses que les scénarios de guerre civile se multiplient rapidement. Surtout depuis l'élection de Donald Trump à la présidence, plusieurs administrations déclarent qu'elles refuseront de suivre ses ordres sur des questions comme l'immigration, les expulsions, les services de police et même les opérations militaires à l'étranger. La police de Los Angeles a déclaré qu'elle ne coopérera pas avec les autorités fédérales et le maire de la ville de New York, Bill de Blasio et celui de Chicago, Rahm Emanuel, en ont fait de même. Divers responsables de ce qu'on appelle les villes sanctuaires, comme Boston, Philadelphie, San Francisco et Seattle ont dit la même chose. [1]

Récemment, le gouverneur de l'État de New York, Andrew Cuomo, a dit au sujet des déclarations de Trump sur les expulsions massives qu'il protégera les gens contre le racisme et la discrimination. New York est connu pour ses attaques racistes organisées par l'État, mais maintenant Cuomo tente de présenter l'État comme étant contre la discrimination et il le fait d'une manière qui défie directement le gouvernement fédéral.

Dans une lettre ouverte à tous les étudiants de l'État, Cuomo écrit : « Après les propos durs qu'on a entendus durant la campagne, beaucoup d'entre vous s'inquiètent de ce qui pourrait se passer. Soyons clairs : nous sommes dans l'État de New York, pas dans un État de peur. Nous ne tolérerons pas la haine et le racisme. » Il poursuit : « Tant que vous êtes ici, vous êtes New-Yorkais. Vous êtes membres de notre communauté et nous vous défendrons. » Il souligne que New York a des lois strictes contre les « crimes haineux » qui seront appliquées. Une ligne téléphonique spéciale a été créée pour signaler les cas de discrimination. Cuomo répète encore une fois, « notre responsabilité est de protéger tous ceux qui sont ici, natifs ou immigrants, avec ou sans papiers. »

Deux choses sont particulièrement importantes ici. L'une est l'affirmation de Cuomo, que « Tant que vous êtes ici, vous êtes New-Yorkais ». Il ne dit pas résidents de New York, ou que vous êtes des New-Yorkais et des Américains, mais simplement des New-Yorkais. Pourquoi souligner cela en particulier ? Étant donné qu'il est connu que les corps policiers de New York sont tous des instruments de la discrimination et du racisme du gouvernement, on ne peut pas y voir une défense des droits. C'est en fait plus une déclaration qu'il pourrait utiliser ces forces de police contre les organismes fédéraux. Ce ne sont pas les droits qu'il protégera, comme le montrent ses nombreuses actions de gouverneur contre les droits, mais plutôt son autorité comme gouverneur par rapport à l'autorité du gouvernement fédéral.

C'est ce que Cuomo indique lorsqu'il dit qu'il protégera tous ceux qui sont ici à New York, avec ou sans papiers. Cela ressemble à un défi direct à Trump qui ne cesse d'attaquer les immigrants sans papiers. Cela lui donne l'apparence d'un « protecteur » des sans papiers, alors qu'en réalité il s'agit davantage d'une déclaration pour affirmer ses pouvoirs de gouverneur, tout en faisant passer son gouvernement comme un appui dans la lutte contre la discrimination. Cuomo, comme le maire de New York qui a fait des commentaires similaires, indique qu'il a des forces armées considérables à sa disposition pour l'appuyer dans les négociations avec le pouvoir fédéral. C'est un jeu dangereux dont les gens doivent tenir compte dans leurs luttes de résistance.

L'idée promue par certains que le problème des attaques racistes organisées par l'État vient de Trump et que l'on peut compter sur les gouvernements des États pour protéger le peuple est dangereuse. Cuomo est un exemple représentatif de ceux qui font de telles déclarations dans le cadre des actes individuels de nature raciste qui se sont produits, notamment sur les campus. Alors que ces actes sont largement diffusées par les médias, ces mêmes médias restent généralement silencieux sur la réponse forte et unie à ces attaques des étudiants dans tout l'État. De la même manière, les différentes organisations qui agissent, bien avant et depuis l'élection de Trump, y compris celles qui réunissent musulmans et juifs pour défendre les droits, sont ignorées. Pour chaque attaque, il y a des dizaines et des dizaines d'actions pour soutenir les personnes ou les mosquées ciblées. En même temps qu'il s'oppose aux actions par lesquelles les gens défendent les droits de tous, donnant l'impression qu'une partie du peuple est raciste et que l'on peut s'appuyer sur le gouvernement pour protéger le peuple, il essaie d'unir les gens contre les incursions du pouvoir fédéral.

Les États racistes au niveau fédéral et au niveau des États sont responsables du racisme et de la discrimination contre le peuple, qui se manifestent par l'incarcération de masse raciste et la ségrégation des écoles et des quartiers. C'est également ce que montrent les tueries continuelles de la police, les brutalités policières, les attaques des gouvernements contre les musulmans au pays et à l'étranger. Les nombreuses enquêtes du département de la Justice sur 17 corps de police ont exposé la discrimination généralisée et l'usage abusif de la force, mais cela n'a rien fait pour faire cesser ces injustices.

La résistance de l'État et des forces locales à laquelle Trump fait face en ce qui concerne l'immigration et la répression montre les difficultés qu'ont les dirigeants impérialistes à imposer leur diktat. Les différentes autorités rivalisent pour le pouvoir et Trump pourrait ne pas réussir à les unir, surtout si l'on considère que les différents maires ont d'énormes forces de police à leur disposition.

La centralisation des pouvoirs de police entre les mains de la présidence est en partie conçue pour éviter la guerre civile en unifiant ou en détruisant les différents corps de police pour mettre fin à leur rivalité. Elle met en évidence un problème majeur des dirigeants impérialistes. Maintenir l'unité de la République est la responsabilité du président, chargé de préserver l'État des États-Unis. Diverses actions policières récentes, notamment celle de Standing Rock où de nombreux policiers de différents États et la Garde nationale ont été massés ensemble pour réprimer la résistance, font partie de ces efforts. Tout cela se fait au nom de Rendre sa grandeur à l'Amérique.

La nomination de Trump du sénateur de l'Alabama, Jefferson Beauregard Sessions, du nom du président de la Confédération, Jefferson Davis, et du général confédéré Pierre Gustave Toutant-Beauregard, au poste de procureur général dans son cabinet représente également un effort pour unifier les forces des dirigeants du Nord et du Sud alors que les scénarios de guerre civile sont déjà évidents. Le moyen qu'utilise Trump pour cela est d'intégrer ouvertement ceux qui soutiennent l'esclavagisme dans le Sud. Il reste à voir si cela réussira.

Sessions appuie aussi les plans de Trump de commencer rapidement l'expulsion des immigrants et de le faire encore plus rapidement qu'Obama. L'immigration est l'un des domaines où le pouvoir exécutif peut agir avec une grande impunité et prendre des mesures sans le Congrès.

Trump et Sessions soutiennent aussi l'expansion du fichier du gouvernement précédent, le registre des entrées et sorties (National Security Entry Exit Registry System - NSEERS). Le NSEERS cible les non-citoyens vivant légalement aux États-Unis ainsi que ceux qui y entrent légalement, beaucoup avec des visas étudiants, de 25 pays asiatiques et africains, en grande majorité des pays musulmans comme l'Afghanistan, l'Égypte, l'Iran, l'Irak, le Liban, la Libye, le Soudan et la Syrie. Ce registre a existé de 2002 à 2011, mais certaines parties en sont toujours en vigueur, notamment le fichier biométrique géant de toutes les personnes inscrites qui est utilisé par les nombreux organismes de police à tous les niveaux.

L'utilisation d'un registre spécial n'est pas une invention de Trump. Il fait partie de la direction de la gouvernance vers une gouvernance des pouvoirs de police qui a été développée et que Trump cherche à renforcer et à étendre. C'est aussi un moyen de rassembler au nom de la sécurité nationale les différents organismes concernés. Ces registres et les plans de créer d'autres fichiers d'identité biométrique pour les immigrants, puis de tous les travailleurs, sont des moyens de criminaliser les travailleurs et de permettre aux dirigeants impérialistes d'imposer plus facilement leur gouvernement de pouvoirs de police. C'est pourquoi intensifier la résistance générale à toutes ces mesures est essentiel.

Note

1. À la suite de nouvelles menaces de Trump d'expulsions massives suite à son élection, les maires de plusieurs « villes sanctuaires » ont déclaré explicitement qu'ils ne changeront pas leur politique de non-coopération avec le gouvernement fédéral en matière d'immigration. Il s'agit des maires de New York, Bill de Blasio, de Chicago, Rahm Emanuel, et de Seattle, Ed Murray. Trump a déclaré, qu'en tant que président, il retirera les financements fédéraux aux villes qui ne coopèrent pas avec les autorités fédérales pour les expulsions.

Aux États-Unis, 31 villes sont des « villes sanctuaires ». Bien que ce ne soit pas une désignation officielle, le terme indique que soit par la législation ou la pratique, les autorités policières locales ne coopèrent pas avec l'agence fédérale de contrôle de l'immigration (ICE). La non-coopération avec l'ICE varie d'un endroit à l'autre, et sans doute pour des raisons d'ordre pratique qui n'ont rien à voir avec la défense des droits, par exemple pour éviter des poursuites de la part des personnes injustement incarcérées. Dans certaines villes, les autorités policières ne remettent à l'ICE que les suspects accusés de crimes graves.

Le maire De Blasio dit que d'ici la fin de l'année, New York supprimera de sa base de données les noms de centaines de milliers d'immigrants sans papiers qui ont reçu une carte d'identité de la ville pour qu'ils ne puissent pas être identifiés ou expulsés.

Le 14 novembre, le chef de police de Los Angeles, Charlie Beck, a dit que le service de police de la ville ne changerait pas sa politique, en place depuis 1979, qui interdit aux policiers de faire des contrôles d'identité uniquement en vue de vérifier si quelqu'un est illégalement dans le pays. Sous Beck, le département de la police a également cessé de rapporter les suspects de délits mineurs aux autorités fédérales. De la même façon, le porte-parole de la Police de Denver, Doug Schepman, a déclaré dans un communiqué que : « l'immigration relève des autorités fédérales, pas des autorités policières locales. Le Service de police de Denver n'a pas participé à ces mesures dans le passé et n'entend pas y participer dans l'avenir. »

Cette situation soulève la possibilité d'un affrontement entre les grandes villes américaines, comme New York, Los Angeles et Chicago dont les importantes forces policières sont de plus en plus militarisées, et l'ICE, qui comme les autres agences fédérales a été également fortement militarisée.

(Sources : Voice of Revolution, Buffalo Forum et des agences de presse)

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Élimination du facteur humain/conscience sociale

Au lendemain de l'élection, on a beaucoup parlé du « choc » du camp Clinton devant la victoire de Trump. Avant l'élection on avait beaucoup parlé de la « supériorité sur le terrain » du camp Clinton et on nous disait que c'est grâce à cette supériorité que Clinton allait l'emporter parce que Trump était faible sur ce front. La « supériorité sur le terrain » d'Hillary Clinton était l'organisation en place dans les États clés et les régions appelées « Designated Market Areas » (les marchés désignés, cette expression inventée par la firme Nielsen Media Research pour identifier les stations de télévision qui réussissent le mieux à atteindre une région donnée et à attirer les téléspectateurs.[1]) Les marchés désignés étaient censés jouer un rôle crucial dans la victoire de Clinton. L'impression avait été créée qu'en tant que candidate du Parti démocrate, Clinton disposait d'une légion de bénévoles, d'une organisation forte et de beaucoup d'argent, mais elle a perdu malgré tout. Certains disent maintenant qu'elle a perdu parce que son équipe n'a pas «testé sur le terrain» ses décisions et qu'elle a déployé «l'effort sur le terrain» aux mauvais endroits

Cela vise à cacher le fait que « le système électoral américain, le système de partis politiques et de gouvernance, est épuisé », comme l'a fait remarquer Le Marxiste-Léniniste à la veille des élections. « Plutôt que de rétablir un nouvel équilibre dans le statu quo, les élections en cours sont utilisées pour achever la ‘transformation' de la façon de gouverner : vers un processus politique qui outrepasse les structures de parti et de gouvernement », disait LML qui mettait en garde que cette élection allait servir à instituer un gouvernement des pouvoirs de police pour remplacer le gouvernement des lois.

Les élections présidentielles américaines sont à cet égard un exemple de la destruction des partis politiques, un des traits saillants de la crise du système appelé démocratie représentative. La destruction des partis politiques a pour effet d'éliminer toute participation des membres du corps politique à la gouvernance. Une fois que les partis politiques ont cessé de fonctionner comme des organisations primaires, le lien entre les gouvernés et ceux à qui ils confient le gouvernement est rompu. Parler de participation citoyenne à la gouvernance ne veut rien dire. D'autre part, il ne peut être question d'égalité dans un système fondé sur le privilège, où le seul rôle véritable consenti à « nous le peuple » est de remettre le pouvoir décisionnel à un tout petit groupe de personnes. Aux États-Unis, comme au Canada, en Grande-Bretagne et dans les autres pays qui ont adopté ce système électoral, le processus est conçu pour que « nous le peuple » n'intervienne que durant une élection. L'appartenance à un parti politique était censée être le lien entre les membres individuels du corps politique et le pouvoir politique, et devait permettre aux membres individuels du corps politique d'avoir voix au chapitre sur la sélection des candidats et des représentants et sur la vision qu'ils défendent.

Ce lien avec les partis politiques a toujours été une façon de préserver le pouvoir de classe des propriétaires et au tournant du XXe siècle la nature élitiste de cette démocratie représentative qui ne fait que préserver les privilèges des riches est devenue évidente, surtout avec l'avénement du suffrage universel. Durant le XXe siècle elle a servi les monopoles et aujourd'hui elle est usurpée par les oligopoles qui ont pris le contrôle des gouvernements et par conséquent du processus politique et du système électoral.

La façon dont a été menée la campagne électorale de novembre montre que les différentes factions de la classe dominante se livrent une lutte féroce pour le pouvoir suivant les intérêts de puissants oligopoles. On a aussi vu encore une fois que le but de l'élection et de l'assaut médiatique est d'empêcher les gens de penser et d'agir comme faisant partie d'un mouvement politique du peuple qui change les choses en sa faveur.

La campagne Clinton

La stratégie de la campagne Clinton était basée sur la collecte de renseignements publics et privés et l'utilisation d'un algorithme sophistiqué appelé ADA, du nom de la mathématicienne du XIXe siècle Ada, comtesse de Lovelace.[2] Le système lui disait quoi faire et où miser les ressources.

On trouve l'explication suivante dans un article de John Wagner paru dans le Washington Post  : « Ada est un puissant algorithme informatique qui intervient dans pratiquement toutes les décisions stratégiques des directeurs de la campagne Clinton, y compris où et quand déployer les candidats et son bataillon de porteurs et où diffuser les annonces télévisées -- et où et quand il était moins risqué de rester dans l'ombre.

« Si tout le monde savait que la campagne Clinton utilisait des logiciels analytiques, le fonctionnement précis d'Ada est resté bien caché, selon les aides de campagne. L'algorithme tournait sur un serveur séparé du reste des opérations de campagne comme mesure de précaution et seuls quelques assistants proches du centre y avaient accès.

« Selon des aides de campagne, une masse de renseignements publics et privés résultant de sondages était injectée dans l'algorithme, en plus de renseignements sur les électeurs minutieusement recueillis par la campagne. Les données du vote anticipé ont également été ajoutées une fois le vote commencé.

« Avec toutes ces données, Ada a produit 400 000 simulations de la course contre Trump par jour. Les rapports produits donnaient au directeur de campagne Robby Mook un tableau détaillé du champ de bataille dans les États les plus susceptibles de créer un changement de direction, lui fournissant un guide précis sur où déployer les ressources.

« Les grands déploiements de ressources, comme les bureaux nationaux et les concerts très médiatisés avec des vedettes comme Jay Z et Beyoncé, dépendaient aussi en grande partie des simulations produites par ADA.

« Les aides de Clinton étaient convaincus que leur intervention, qui était beaucoup plus sophistiquée que celle de la campagne Obama ou de Mitt Romney en 2012, leur donnait un très grand avantage stratégique sur l'équipe Trump.

« Ils disent que la Pennsylvanie a été identifiée comme un État extrêmement important très tôt dans la course, ce qui explique pourquoi madame Clinton s'y est rendue si souvent et qu'elle ait choisi de tenir son avant-dernier rassemblement à Philadelphie le lundi soir. [...] [7 novembre]

« L'importance des autres États que Clinton allait perdre, dont le Michigan et le Wisconsin, n'a pas été évidente, ou elle est devenue évidente trop tard. Madame Clinton s'est rendue à plusieurs reprises au Michigan durant l'élection générale, mais ce n'est que durant les derniers jours de la campagne qu'elle, Barack Obama et son mari y ont déployé un effort concerté. »

La campagne Trump

Le 16 novembre, Fox News a interviewé le directeur de la campagne numérique de Trump, Brad Parscale, durant laquelle il a expliqué son rôle. Parscale est un partenaire de la firme de marketing Giles-Parscale. Selon le site Web de la firme, Brad Parscale « met au point des stratégies de marketing sur le Web et supervise tous les aspects techniques et fonctionnels de ces stratégies ».

Il a dit que les enfants de Donald Trump, Ivanka et Eric Trump, l'avaient embauché à l'origine pour gérer le site de promotion immobilière de la famille Trump. « Une fois que j'aie obtenu le site Web de l'immobilier, j'ai fait mon chemin chez les Trump. » Il a ajouté qu'à présent il a « un très bon rapport avec eux. Ils apprécient les gens qui travaillent fort, ils apprécient la loyauté, ils apprécient la réussite. »

Il affirme qu'il était « à 95 % certain » que Trump allait l'emporter. Son système informatique intervenait dans toutes les décisions, « de l'achat de publicité télévisée au choix des endroits pour le travail sur le terrain, dans toutes les différentes opérations. Disposant de toutes ces données, nous pouvions commencer là où se trouvaient les groupes cibles les plus susceptibles d'être persuadés, faire sortir le vote et tout ce que nous avions besoin de savoir. »

Il a donné l'exemple de la Pennsylvanie et du Michigan. « Nous sommes allés dans d'autres zones aussi et j'ai commencé à voir des données et à les localiser. Nous faisions des milliers d'appels réels, du web-tracking, nous avons déniché divers sondages et il en est sorti ce qu'on appelle des modèles et des univers. Nous avons commencé à constater que nous étions en vie en Pennsylvanie ainsi qu'au Michigan. Nous avons décidé d'acheter dans ces régions. Nous nous sommes dits, achetons aussi ces marchés désignés. Achetons ces électorats ciblés. Nous avons commencé à constater que notre situation s'améliorait. Le vendredi avant les élections, j'avais prédit que nous allions remporter 305 résultats électoraux. »

« Les résultats du vote anticipé ont commencé à indiquer où nous réussissions à atteindre nos cibles et où se trouvaient les résultats positifs pour nous dans les endroits où nous voulions faire sortir le vote.

« Les données ne mentent pas. Et c'est ça l'aspect intéressant de nos données. J'avais à mon service d'excellents scientifiques des données et nous avions des équipes de ces scientifiques qui recueillaient ces données de sorte à ce qu'elles puissent être digérées et nous permettre de comprendre où nous devions cibler les gens. »

« La seule erreur de calcul que j'ai faite est au Wisconsin et au Colorado, que j'ai invertis. C'était mon 305 ou mon 306. Cependant vous pouvez constater que nos achats médiatiques en Pennsylvanie et la façon différente de fonctionner étaient une bonne stratégie et une bonne utilisation de nos données. »

À la question à savoir comment l'intervention du directeur du FBI et son annonce à l'effet qu'il mènerait une nouvelle enquête sur le scandale des courriels de Clinton avait eu un impact sur la campagne, il a dit : « En fait, j'étais dans l'avion avec M. Trump cette nuit-là. Je lui ai montré tous les chiffres avant l'annonce de notre arrivée hâtive. Les indécis penchaient de notre côté. Les gens de ce pays étaient prêts pour un changement, prêts pour quelque chose de nouveau. Ils s'en allaient déjà dans cette direction. »

À la question au sujet de la vidéo d' Access Hollywood dans laquelle on peut entendre Trump parler de ses frasques auprès des femmes, il a dit : « Toute campagne a des points forts et des points faibles, n'est-ce pas ? Des hauts et des bas. Dans ces situations, il faut réévaluer tes données, retirer et bâtir de nouveaux univers pour créer de nouvelles cibles. Il faut alors être en mouvement, être dans le feu de l'action, échanger les gens en fonction des données.

« Mon objectif est d'être un porte-voix pour les gens, pour les entreprises, pour les candidats », a dit Parscale. Il a dit qu'à la lumière des campagnes précédentes : « Je pense que ce qui était absent de ces campagnes était la science, celle qui prend le digital, la télé, le travail sur le plancher, le porte-à-porte et tous ces gens pour en faire quelque chose de profitable. Jared (Kushner, le conjoint d'Ivanka Trump) et moi avons géré les données budgétaires. »[3]

« Il ne faudrait pas révéler tout cela. Il faudrait en conserver une partie pour nous pour faire davantage d'argent à le faire pour d'autres », Parscale a dit.

Comparaisons entre les campagnes de Trump et de Trudeau

S'adressant aux participants d'une conférence du chapitre canadien de l'Institut international des communications le 17 novembre, le « stratège numérique » en chef des libéraux de Trudeau, Tom Pitfield, a fait part de ses impressions sur la campagne de Trump et de Trudeau et a conclu que les deux campagnes avaient été menées de la même façon.

« Mon impression générale est que le président élu, Donald Trump, a mené une campagne semblable à celle que nous avons menée avec Trudeau et les raisons sont sans doute les mêmes. Nous n'avions pas les banques de données qui étaient disponibles aux autres partis à ce moment-là, donc nous avons dû faire la démarche pour aller nous-mêmes les chercher.

« Et pour ce faire, nous avons eu des conversations honnêtes et engagées avec des gens afin d'obtenir leur consentement, d'interagir avec eux, avec comme résultat que nos données étaient meilleures, plus fraîches, beaucoup plus d'actualité. »

Pitfield soutient que Hillary Clinton, contrairement à Trump et à Trudeau, a mené une campagne « hors-ligne » en s'appuyant sans doute trop sur les médias traditionnels.

« Je pense que le tout relève davantage de la chance que d'une intention délibérée. Je présume que le camp de Hillary avait acheté toutes les heures de grande écoute à la télévision », a-t-il dit.

« Trump a dû réagir et il s'est tourné vers les médias sociaux et y a découvert tous les avantages à mener une campagne en ligne. Je soutiens en effet que Hillary et son équipe ont remporté la campagne hors ligne. Les données actuelles révèlent, par contre, que, sans l'ombre d'un doute, Trump a dominé la campagne en ligne. « Cela a permis à ses gens, d'un point de vue de données, de faire des essais d'intervention -- je ne tiens pas vraiment à approfondir ce sujet -- mais lorsque vous menez une campagne comme celle de Hillary, c'est toujours la même chose. Vous n'apprenez pas vraiment grand-chose sur les gens que vous voulez interpeller parce que c'est figé dans une forme unique », a dit Pitfield.

« Lorsque vous avez un candidat comme Trudeau ou Trump -- qui ont joué les trouble-fête et qui ont eu le courage de dire ce qu'ils pensent -- cela crée des moments où on peut constater comment le scénario de base se compare aux changements. Et ces changements sont très précieux -- vous apprenez quant déployer des ressources de façon plus efficace, comment livrer un message, les répercussions de ces mesures sur les gens que vous avez ciblés et comment cette perspicacité est de loin plus efficace. »

Comme pour tenter de trouver un quelconque lien entre une telle campagne électorale et les êtres humains, Pitfield a prétendu que le succès du « scénario du changement » dépend directement de la crédibilité du candidat.

Notes 

1. Les Designated Market Areas (DMA) sont des groupes de pays qui forment une région géographique exclusive dans laquelle le marché domestique des réseaux de télévision contrôle l'ensemble du temps d'écoute. Il existe 210 régions DMA qui couvrent les États-Unis, Hawaï et une partie de l'Alaska. Les frontières DMA et les données DMA appartiennent exclusivement à la compagnie Nielsen.

Selon la compagnie Nielsen : « Nous étudions les consommateurs de plus de 100 pays afin d'offrir la perspective la plus complète des tendances et des habitudes à l'échelle mondiale. Et nous évoluons constamment, non seulement en termes des endroits que nous mesurons et qui nous mesurons, mais comment nos visions peuvent augmenter votre profitabilité. »

2. Augusta Ada King-Noel, comtesse de Lovelace (née le 10 décembre 1815 et décédée le 27 novembre 1852 à l'âge de 36 ans) était la fille du poète Lord Byron et mathématicienne et auteur britannique. Son travail a surtout porté sur le premier ordinateur mécanique tout-usage de Charles Babbage, la Machine analytique. Ses notes sur cette machine comprennent ce qui est reconnu comme étant le premier algorithme à être utilisé par une machine. On la considère souvent comme la première programmeure informatique.

3. Jared Kushner est le fils du milliardaire américain de l'immobilier Charles Kushner. Il a pris la relève comme PDG de la compagnie Kushner en 2008. Kushner possède le New York Observer et c'est lui qui aurait mis au point la campagne médiatique numérique de Trump. Selon les médias il est de la famille Trump et lui sert de conseiller durant la transition.

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Utilisation de robots du Web dans
l'élection américaine

Des études réalisées avant et après l'élection présidentielle du 8 novembre attestent de l'utilisation sans précédent des robots dans les médias sociaux connus sous le nom « agents numériques ».

Selon un article du The Atlantic du 1er novembre, dans l'élection « la taille, la stratégie et les effets potentiels de l'automatisation sociale sont sans précédent — jamais n'avons-nous vu une telle guerre totale des agents numériques ». The Atlantic rapporte que lors du dernier débat, si Trump et Clinton ont immédiatement condamné la Russie pour ses tentatives d'influencer l'élection par des cyberattaques, « aucun des candidats n'a mentionné les millions d'agents numériques qui travaillent pour manipuler l'opinion publique en leur nom ». Des chercheurs dans le domaine qui font partie du Project on Computational Propaganda of the Oxford Internet Institute à l'Université d'Oxford indiquent que « l'élection américaine a vu l'utilisation la plus répandue d'agents numériques dans les tentatives de manipuler l'opinion publique dans la courte histoire de ces outils politiques automatisés. » Les récentes découvertes du travail de Project on Computational Propaganda peuvent être consultés à  politicalbots.org.

Que sont les agents numériques ?

Un agent numérique est un robot logiciel qui automatise des tâches en ligne. Ils sont utilisés à des fins commerciales et aussi de plus en plus dans des campagnes électorales. Dans ce dernier cas, les agents numériques font référence aux comptes de médias sociaux qui automatisent l'interaction avec d'autres utilisateurs. Ils exploitent des comptes pour ressembler à de vraies personnes, produisent du contenu et interagissent avec de vrais utilisateurs. Les agents numériques sur les plateformes de médias sociaux sont capables de déployer rapidement des messages, se répliquer et se faire passer pour des utilisateurs humains.

Les agents numériques sont facilement programmables avec l'API Twitter (interface de programmation d'application) et peuvent être déployés par quiconque a une connaissance de base de la programmation. Leur utilisation dans les campagnes politiques est appelée « propagande automatisée » ou « propagande informatisée ».

Les gouvernements, les militaires, les candidats et leurs agences de commercialisation utilisent des agents numériques pour tout : pour créer des comptes factices qui attaquent des individus, dirigent les abonnés vers de fausses nouvelles, manipulent et déforment les sondages en ligne, gonfler artificiellement le trafic des médias-sociaux et la popularité des individus ou des campagnes, etc.

Alors qu'une personne pourrait publier sur les sites de médias sociaux au sujet d'une question plusieurs centaines de fois par jour au mieux, les agents numériques peuvent gazouiller des milliers et des milliers de fois par jour. Cela fait grimper le nombre d'éléments de conversation particuliers sur les médias sociaux, ce qui les fait se propager, « devenir viral ».

Les agents numériques sont aussi liés par ce qui est appelé des « réseaux de zombis » ou des réseaux d'agents numériques. Ce sont des comptes de réseaux sociaux contrôlés par des agents numériques liés les uns aux autres et construits pour envoyer des messages et se suivre les uns les autres. Ils peuvent faire partie de centaines de comptes uniques mais peuvent être contrôlés par un utilisateur à partir d'un seul ordinateur. Ils peuvent être utilisés pour lancer des attaques coordonnées contre des individus.

Les chercheurs indiquent que « les agents numériques politiques tendent à être développés et déployés dans des moments politiques sensibles où l'opinion publique est polarisée.

L'utilisation des agents numériques dans l'élection américaine

Une étude, Bots and Automation over Twitter during the U.S. Election, publiée le 17 novembre par les chercheurs de Project on Computational Propaganda[1], révèle dans quelle mesure les agents numériques ont été utilisés lors de l'élection présidentielle américaine de 2016.

Les auteurs indiquent que l'utilisation de comptes automatisés était délibérée et stratégique durant l'élection. Ils soulignent que les agents numériques attaquant la campagne Clinton étaient plus sophistiqués et ciblés que ceux ciblant la campagne Trump.

L'équipe de recherche conclut que plus d'un tiers des gazouillis pro-Trump et près d'un cinquième des gazouillis pro-Clinton entre le premier et deuxième débat présidentiel provenaient de comptes automatisés, qui ont produit plus d'un million de gazouillis au total.

Un agent numérique pro-Trump, @amrightnow, avait plus de 33 000 abonnés et a inondé Twitter avec des « théories de conspiration anti-Clinton ». Il a généré 1 200 publications lors du dernier débat.

@loserDonldTrump a regazouillé toutes les mentions de @realDonaldTrump qui incluaient le mot « perdant » — produisant plus de 2 000 gazouillis quotidiennement.

L'étude indique que pour les deux premiers débats présidentiels, il y avait quatre fois plus d'agents numériques pro-Trump que pro-Clinton. Au dernier débat, cette différence s'est accentuée — il y avait sept agents numériques pro-Trump pour chaque agent numérique pro-Clinton.

L'étude indique aussi que durant les heures d'éveil, les comptes grandement automatisés généraient entre 20 et 25 % du trafic sur Twitter au sujet de l'élection durant les jours précédents le vote.

Les auteurs notent que le rythme de campagne politique automatisée a chuté après le scrutin — « un rappel que les militants et les programmeurs derrière les comptes d'agents automatisés désactivent souvent leur automatisation lors de la victoire ».

Les résultats ont été basés sur une collecte d'environ 19,4 millions de messages Twitter recueillis durant les neuf premiers jours de novembre. Les gazouillis ont été sélectionnés en fonction des mots-clics[2] identifiant certains sujets et identifiés comme étant des publications automatisées en trouvant des comptes qui publiaient au moins 50 fois par jour. Ces comptes sont décrits comme des agents numériques qui sont « soit irrégulièrement organisés par des personnes ou activement gérés par des personnes qui utilisent des algorithmes de planification et d'autres applications pour automatiser les communications par les médias sociaux ».

« Par exemple, les 20 premiers comptes, qui étaient principalement des agents numériques et comptes grandement automatisés, avaient en moyenne plus de 1 300 gazouillis par jour et ils ont généré plus de 234 000 gazouillis, notent les chercheurs. Les 100 premiers comptes, qui utilisent toujours de hauts niveaux d'automatisation, ont généré environ 450 000 gazouillis à un rythme moyen de 500 gazouillis par jour. » Ils notent aussi qu'ils s'attendent à ce que le nombre d'agents numériques soit plus élevé ; plusieurs agents numériques, après tout, sont construits pour contourner les méthodes évidentes d'identification.

Les chercheurs notent qu'alors que l'élection continuait, l'étendue et la sophistication de l'utilisation des agents numériques a augmenté, en particulier ceux agissant contre Clinton ou pour Trump. Ils disent, par exemple, que les mots-clics pro-Trump ont été insérés dans de plus en plus de combinaisons de mots-clics « neutres et pro-Clinton », de sorte qu'au moment de l'élection, 81,9 % du contenu hautement automatisé comportait un message pro-Trump.

Ils ajoutent que les comptes automatisés gazouillant avec des mots-clics pro-Clinton ont également augmenté leurs activités au cours de la période de campagne, mais n'ont jamais atteint le niveau d'automatisation derrière le trafic pro-Trump.

Le 4 août, l'auteur pour Vanity Fair, Nick Bilton, a écrit au sujet des affirmations de Trump d'avoir plus de 22 millions abonnés Twitter, affirmant que beaucoup d'entre eux étaient en fait des agents numériques. Il a écrit : « Selon le site Status People, qui suit le nombre de comptes Twitter qui sont agents numériques, inactifs, ou réels, seulement 21 % des abonnés Twitter de Trump sont de vrais utilisateurs actifs sur la plate-forme. Les autres sont soit des agents numériques, des agents numériques morts ou de vraies personnes qui ne sont plus connectées à Twitter. »

Bilton a également rapporté des agents numériques utilisés pour ridiculiser Trump. « Un exemple d'un tel agent numérique a été créé par Brad Hayes, un roboticien et chercheur en intelligence artificielle au Massachusetts Institute of Technology, qui dirige un agent numérique appelé @DeepDrumpf. Ce petit agent numérique amusant, qui a 22 000 abonnés essentiellement réels, utilise un réseau neuronal qui a été formé à gazouiller basé sur les transcriptions passées du vrai Trump. En regardant quelques exemples, l'agent numérique @DeepDrumpf montre combien il est facile de faire paraître quelque chose de réel, ou au moins comme une vraie communication de Trump, même si c'est complètement faux. Un gazouilli, en réponse à Ted Cruz, notait : 'Si je suis élu président, croyez-moi. Je vais apporter une agression incroyable. J'amène cela en personne. @tedcruz # Trump2016.' Un autre gazouilli se lit comme suit : 'Je peux détruire la vie d'un homme en le tirant sur le mur. C'est toujours ce que je fais, tuer des gens et créer des emplois.' »

La campagne présidentielle de Hillary Clinton, Hillary For America, a créé un agent numérique pour texter aux utilisateurs des citations de Trump sur des questions choisies. Les gens qui se sont inscrits à « Text Trump » ont reçu des messages dans un style destiné à imiter Trump, leur demandant de remettre en question [l'agent numérique] sur des sujets comme l'économie, Hillary Clinton ou la Chine. Lorsqu'ils répondaient avec des citations de Trump lui-même, les utilisateurs pouvaient taper « Source », et recevoir des vidéos ou des preuves textuelles que Trump avait dit ces choses.

Il est à noter que bien que l'accent soit mis sur l'utilisation d'agents numériques sur Twitter, en particulier les agents numériques « pro-Trump », leur utilisation contre Trump a été moins médiatisée. Par exemple, l'auteur américain Sasha Issenberg a été interviewé par le stratège en chef des données des libéraux pour les élections fédérales de 2015, Tom Pitifield, lors d'un événement le 14 décembre intitulé « Que vient-il de se passer ? L'élection américaine de 2016 vue de l'intérieur », organisé par le think-tank néolibéral Canada 2020. Issenberg a noté que dans les élections précédentes, la campagne Obama avait un système par lequel ses partisans donnaient accès à la campagne à leur compte Facebook qui, à l'aide d'un agent numérique basé sur un algorithme, ils doivent contacter et comment (par les médias sociaux, appels téléphoniques, etc.) dans un effort pour les amener à voter pour Obama.

Dans un article du 1er novembre publié dans Atlantic, deux autres auteurs de l'étude, Samuel Woolley et Douglas Guilbeault, écrivent que les agents numériques « font taire les gens et les groupes qui pourraient autrement avoir un enjeu dans une conversation. En même temps ils font en sorte que certains utilisateurs semblent plus populaires, ils rendent les autres moins susceptibles de parler. Cette spirale de silence aboutit à moins de discussions et de diversité dans la politique. En outre, les agents numériques utilisés pour attaquer les journalistes pourraient les inciter à cesser de faire rapport sur des questions importantes parce qu'ils craignent les représailles et le harcèlement. »

Dans un article du 19 octobre dans le Washington Post intitulé « Un gazouilli de débat sur quatre vient d'un agent numérique. Voici comment les découvrir », Caitlin Dewey écrit : « Les agents numériques ne cherchent pas à changer les coeurs et les esprits - c'est une tâche ambitieuse pour un peu de code. Au lieu de cela, la plupart des agents numériques existent simplement pour embrouiller les faits, rendant difficile pour les spectateurs neutres de discerner la vérité et plus facile pour les partisans de rejeter tous les points de vue qui peuvent les heurter. »

Reformulant Philip Howard, dit-elle, « Les agents numériques, en particulier ceux pro-Trump, ont tendance à faire circuler des liens vers des sites persuasifs de conspiration - souvent, ils sont la principale force de maintien de ces liens en circulation. En fait, les agents numériques de Trump tendent à être plus sophistiqués que ceux de Clinton, en utilisant des mots-clics et en incluant des images qui les rendent plus convaincants.

« Au cours du premier débat, les agents numériques pro-Trump se sont concentrés sur le scandale des courriels de Clinton et Benghazi ; et pendant le second, ils se sont penchés sur la question du 'je l'envoie en prison'. Les agents numériques pro-Clinton, pendant ce temps, ont diffusé un certain nombre de messages au sujet des impôts de Trump pendant le premier débat, et ont pivoté vers son traitement des femmes dans le deuxième. »

Citant Howard, elle écrit : « En 2008 et même en 2012, les agents numériques Twitter étaient utilisés pour que quelqu'un ait l'air plus populaire. Maintenant, c'est plus à propos de garder une communication négative, la désinformation, la suspicion et même le discours haineux vivants. »

Notes 

1. Bence Kollanyi, Philip N. Howard et Samuel C. Woolley. « Bots and Automation over Twitter during the U.S. Election. » Data Memo 2016.4. Oxford, UK : Project on Computational Propaganda. www.politicalbots.org. Lié ici.

2. Un mot-clic est un commentaire ou une déclaration commençant par le carré (#) que les utilisateurs ajoutent à leurs publications des médias sociaux afin que tous ceux intéressés par le sujet auquel fait référence le mot-clic peuvent le suivre. Les utilisateurs voient généralement les publications des médias sociaux qui ont été republiées par d'autres, ou liées ou commentées par d'autres utilisateurs. Cela est fait par l'utilisation des algorithmes des sites de médias sociaux qui augmentent davantage la popularité du contenu.

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Le 26 décembre 1862

Le passé dans le présent

Le 26 décembre 1862, le président des États-Unis Abraham Lincoln a ordonné la pendaison sur la place publique de 38 Sioux pour avoir demandé de la nourriture pour leur peuple affamé dans un camp de concentration.

«Saint Paul le 27 décembre 1862. Monsieur le président, j'ai l'honneur de vous informer que les 38 Indiens dont vous avez ordonné l'exécution ont été pendus hier à Mankato, État du Minnesota, à 10 heures du matin. Tout s'est passé dans le calme, les autres prisonniers sont sous les verrous.

                                                     - Respectueusement, H.H Sibley, brigadier-général»

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