Le Marxiste-Léniniste

Numéro 136 - 5 novembre 2016

Élections présidentielles le 8 novembre aux États-Unis

Quand les personnages les plus détestés rivalisent pour la présidence

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Élections présidentielles le 8 novembre aux États-Unis
Quand les personnages les plus détestés rivalisent pour la présidence - Parti communiste du Canada (marxiste-léniniste)
Une campagne pour éliminer les partis politiques et saper la lutte du peuple pour s'investir du pouvoir - Organisation marxiste-léniniste des États-Unis
Le discrédit des élections présidentielles accroît les possibilités d'une intervention fédérale et d'une guerre civile
Le département de la Justice réduit le nombre d'observateurs fédéraux dans les bureaux de scrutin

Résistance courageuse du peuple aux États-Unis
La désobéissance et la résistance à Standing Rock se poursuivent
Les prisonniers américains continuent de dénoncer le système carcéral esclavagiste moderne
Convergence à la frontière mexicaine à la défense des droits, contre la militarisation et la politique étrangère des États-Unis - School of the Americas Watch

Guerre criminelle contre le Yémen
Les États-Unis coupables de crimes de guerre - Voice of Revolution
On cache le rôle des États-Unis dans le massacre au Yémen pour que le bombardement soit présenté comme de l' « autodéfense » - Adam Johnson
Les États-Unis et le Royaume-Uni continuent de participer activement aux crimes de guerre saoudiens, ciblant les civils yéménites - Glenn Greenwald


Élections présidentielles le 8 novembre aux États-Unis

Quand les personnages les plus détestés
rivalisent pour la présidence

Le 8 novembre est jour d'élection aux États-Unis. Il y a l'élection à la présidence mais aussi l'élection des 435 membres votants de la Chambre des représentants et de 34 des 100 membres du Sénat. La Chambre des représentants et le Sénat forment ensemble le Congrès américain.[1]

L'élection 2016 arrive à un moment où de grandes inquiétudes sont soulevées par la crise générale dans laquelle s'enfonce la société américaine et par le rôle que jouent les États-Unis dans le monde, en particulier leur intervention militaire dans les affaires mondiales, car la guerre et la violence semblent s'imposer comme moyen de règlement des conflits aux dépens de la paix et de toute notion de neutralité positive. Sur le front économique, si en 1960 les États-Unis contrôlaient 40 % de la production mondiale, aujourd'hui ils n'en contrôlent que 22 %. La crise environnementale et l'appauvrissement de la classe ouvrière américaine se font sentir. La militarisation de la police, l'occupation policière de différentes communautés et la violence que subissent les Américains inquiètent également. Le fait que de plus en plus de prisonniers aux États-Unis se retrouvent dans des institutions privées, gérées pour le profit, qu'on y vive des conditions de quasi-esclavage et qu'on y subisse un traitement très abusif, comme le recours fréquent à l'isolement cellulaire pour une période indéterminée, ont provoqué un tollé de protestations et un mouvement de grève de la faim et de révolte dans le système carcéral américain.

Le nombre croissant de déportations et l'utilisation de camps d'internement sont également des phénomènes qui prennent de l'ampleur et qui inquiètent, comme aussi le refus de répondre aux revendications de la nation Sioux à Standing Rock sur la base d'un rapport politique de nation à nation. La guerre à la terreur maintenant devenue permanente sert à justifier les assassinats ciblés, la torture et la répression des mouvements de résistance. La classe ouvrière américaine a besoin de ses institutions indépendantes et de sa voix indépendante pour défendre ses droits et ouvrir une voie vers l'avant.

Aucun de ces problèmes n'a été soulevé dans la campagne électorale, aucune solution n'a été proposée. Au contraire, le niveau du discours politique est plus bas que jamais, à commencer avec les primaires. Le hooliganisme des primaires a si complètement siphonné l'oxygène de l'air ambiant qu'il est devenu impossible de penser. Il est tout de suite devenu évident que les élections ne vont pas permettre de résoudre les contradictions dans les rangs des cercles dominants comme elles sont censées le faire. Au contraire, la campagne a révélé à quel point l'État et le système de gouvernance américains opèrent par la corruption et la coercition et à quel point le peuple est privé de pouvoir politique. C'est l'autre aspect très important du pouvoir d'État entre les mains de l'oligarchie financière. L'élite impérialiste dominante parvient à priver le peuple du pouvoir en le privant d'une conception du monde, d'une façon de voir l'ensemble des problèmes posés pour qu'on puisse calmement les démêler et leur trouver des solutions.

C'est le contenu principal de la désinformation, le fait de détruire les grands mouvements populaires contre la guerre, la violence, les déportations, le non-respect des droits ancestraux, l'expropriation des terres et le génocide des peuples autochtones, l'incarcération en masse et la négation des droits. La désinformation et la suppression de la résistance de ceux qui réclament leurs droits sont liées au fait que le peuple est privé d'une conception du monde conséquente, dont il a besoin pour bâtir le nouveau à partir des conditions sociales. Au nom de la sécurité, on a inventé la nécessité de débarrasser le pays, voire le monde, de « fauteurs de trouble », quels qu'ils soient : ceux qui résistent, ceux qui militent contre la guerre, les militants syndicaux, les combattants pour la justice, etc. Ceux-ci ne sont pas considérés comme des citoyens ayant des droits égaux, qui agissent dans la sphère politique. Se débarrasser des « fauteurs de trouble » est une autre façon de priver le peuple d'une conception du monde moderne.

La désinformation de l'opinion publique n'est pas un objectif auquel le peuple peut se rallier. Elle laisse le corps politique américain sans but. La promotion du racisme, du sexisme, de la guerre, du chauvinisme, des scandales et du salissage qui divisent le corps politique et brisent les mouvements de résistance du peuple font d'autant plus ressortir l'absence d'une conception du monde à partir de laquelle les gens puissent s'orienter et démêler les choses. L'histoire appelle le peuple à changer la situation. L'antidote est la négation de la négation, de bâtir les institutions et la pensée qui permettent d'établir une conception du monde moderne et d'approfondir et élargir les mouvements de résistance pour les droits et un avenir prosocial.

Les électeurs américains sont appelés à choisir entre Clinton et Trump, deux des individus les plus détestables qu'on puisse imaginer, et possiblement un troisième parti qui n'a aucune chance de gagner, mais quoi qu'il en soit aucune des contradictions au sein des cercles dominants n'est en voie d'être résolue.[2] Au contraire, l'état de guerre civile est on ne peut plus évident. Les partis politiques ont été détruits à toutes fins pratiques, le Congrès ne fonctionne plus et les élections en cours, plutôt que de rétablir un nouvel équilibre dans le statu quo, sont utilisées pour achever la « transformation » de la façon de gouverner : vers un processus politique qui outrepasse les structures de parti et de gouvernement, y compris les Nations unies, l'établissement de soi-disant liens directs avec les citoyens, au pays et à l'étranger, et le recours aux pouvoirs policiers. Ce processus appelé « troisième voie » a d'abord été introduit par le gouvernement de Bill Clinton et a été continué par George W. Bush et Barack Obama.

Obama a mobilisé autour de lui des « forces pour le changement » pour se propulser à la Maison blanche. Une fois arrivé, il a créé plusieurs sites web, dont « Change.gov », un nouveau site pour la Maison blanche et une page de pétitions et d'initiatives d'organisations de jeunesse. À l'étranger il a établi des liens directs avec des organisations dites non gouvernementales, pour justement contourner les gouvernements de certains pays. L'armée américaine a établi des liens directs avec les armées d'autres pays pour pouvoir chasser plus facilement les politiciens qui refusent de coopérer. Cela est particulièrement évident dans les régions et les pays où des guerres font rage, comme en Asie de l'ouest, en Asie centrale et dans le nord de l'Afrique, mais aussi à l'intérieur des alliances militaires avec le Japon, la Corée du sud, les Philippines et dans l'ensemble de l'Amérique centrale et du sud.

Le genre de changement qu'apporte l'élite impérialiste américaine renforce la méthode de gouvernance basée sur les pouvoirs policiers. Lorsqu'Obama a été élu, l'élite dominante avait besoin d'un sauveur capable d'unir les factions rivales dans les forces armées, y compris aussi les forces policières, les Forces spéciales et les agences de renseignement comme le FBI, la CIA et le Homeland Security. En déclarant une guerre permanente, le commandant en chef et les forces policières sont devenus prédominants et il s'est établi un pouvoir d'exception permanent. On va maintenant jusqu'à déclarer que le commandant en chef de l'armée est aussi le « commandant en chef du peuple ». Par ces moyens on cherche à créer l'illusion d'un rapport direct entre le commandant en chef et chaque Américain et Américaine, un commandant en chef qui, comme le dit Hillary Clinton, est « la seule chose qui nous sépare de l'Apocalypse ». Avec cette façon de gouverner, le leader devient omnipotent et les structures en place perdent leur importance, voire elles deviennent un obstacle à la gouvernance comme le laisse entendre Donald Trump quand il dit que « le système est truqué ». Le peuple est en proie à un sentiment d'impuissance parce qu'il est appelé à choisir entre deux options toutes aussi inacceptables l'une que l'autre. L'important à retenir est que les citoyens ne sont pas censés donner suite à leur désir de changement en se politisant eux-mêmes et en s'unissant à ceux qui veulent des structures économiques, politiques et sociales qui correspondent à la réalité moderne d'une vie socialisée.

Les défis auxquels est confrontée l'élite dominante des États-Unis dans le monde sont en partie liés au déclin de sa toute puissance économique, avec le passage de l'ordre mondial de l'après-Deuxième Guerre mondiale au Nouvel Ordre mondial des années 1990. Pour les dirigeants américains cela veut dire qu'ils doivent défendre leur domination même au risque de pousser leur système à l'effondrement, aux États-Unis et dans le monde. L'administration Obama et les oligopoles et cartels qui veulent faire élire Hillary Clinton semblent même disposés à provoquer une guerre avec la Russie pour atteindre leur fin. La désinformation, les guerres d'agression et l'écrasement des mouvements de résistance des peuples, de pair avec l'absence d'une conception du monde moderne et conséquente pour le peuple, ont pour effet de détourner le débat électoral de ce qui est véritablement en jeu pour les États-Unis.

La désinformation constante et la pression pour obliger le peuple à renoncer à ses droits et à ses mouvements de résistance créent un scénario où le corps politique ne semble pas avoir de but et est réduit à choisir entre deux mauvais choix plutôt que de s'atteler à la tâche de bâtir le nouveau. L'absence de conception du monde détourne l'attention de l'ampleur de la crise générale qui assaille le système de gouvernance américain et rend difficile de faire les premiers pas pour se sortir du marais.

Quel est le rapport entre la crise générale et le processus politique ? Si le processus politique (les élections, les partis, les assemblées législatives, les tribunaux et toutes les autres institutions de l'État qui forment un gouvernement des lois) ne permet plus de résoudre les problèmes et les contradictions surgis de la société et de l'existence même, que faut-il faire pour avancer ? Il est clair que les pouvoirs policiers utilisés pour résoudre les problèmes au pays et à l'étranger ne sont pas les pouvoirs d'une institution en particulier et qu'ils agissent à l'extérieur du gouvernement des lois et en contradiction avec lui. Ils ne sont pas de nature à soutenir un gouvernement des lois, que ce soit aux États-Unis ou ailleurs.

L'état de la démocratie américaine

Priver le peuple d'une conception du monde va de pair avec la cooptation, le confinement et la destruction de toute résistance et de tout mouvement d'opposition parmi le peuple, de toute pensée basée sur les mouvements pour le nouveau et sur la défense des droits de tous et toutes. L'État de la démocratie américaine est tel que sur une population de plus de 320 millions d'habitants, deux des personnes les plus détestées sont candidats à la présidence des États-Unis, la puissance mondiale qu'on appelle « nation indispensable » (ce qui par définition veut dire que les autres nations sont superflues).

Et de même, les Américains qui refusent de se soumettre à l'injustice et qui par conséquent n'entrent pas dans la catégorie des « gouvernés » sont également considérés comme « superflus ». C'est pourquoi le processus électoral ne traite pas les Américains comme des citoyens ayant des droits égaux mais les déshumanise en les réduisant à des groupes d'intérêts spéciaux : le « vote indécis », le « vote noir », le « vote latino », etc. Cela aussi sert à désinformer le corps politique et à le laisser sans but.

La désinformation laisse entendre que c'est Hillary Clinton qui devrait être élue parce qu'elle est une femme, que cela va créer une première aux États-Unis, briser la barrière invisible et donner créance à la démocratie américaine. Quoi qu'on en pense, l'élection de Clinton ne peut pas être considérée comme étant un but pour le corps politique, pas plus que l'élection de Barack Obama en tant que premier président afro-américain ne pouvait être le but du corps politique en 2008. L'absence d'un but se voit au fait que les efforts d'Obama pour mettre fin à « l'humiliation des États-Unis » ont échoué. Les crimes qu'il a commis au nom de la guerre au terrorisme, les scandales financiers récurrents et l'effondrement du « rêve américain » ont aggravé l'humiliation des États-Unis et les ont rabaissés comme jamais auparavant dans l'histoire. Aucune des actions des représentants politiques des oligopoles, qui mettent en danger la vie sur terre, ne contribue au développement d'un but pour le corps politique qui corresponde aux besoins de l'humanité et de la vie elle-même.

Le but et la conception du monde conformes aux conditions sociales ne peuvent provenir que de ceux qui vont bénéficier du changement, ceux-là mêmes que l'élite impérialiste considère comme étant « superflus ». La lutte des travailleurs, des jeunes, des petites gens d'affaires, des nations opprimées et des autres collectifs du peuple pour leurs droits et pour de nouveaux rapports de production et le renouveau démocratique exprimant une nouvelle gouvernance conforme aux conditions sociales modernes va créer son propre but, sa propre conception du monde et son propre ordre du jour. Ils doivent priver l'élite impérialiste dominante et son commandant en chef du pouvoir de priver le peuple de ses droits.

La destruction de l'opinion publique

L'opinion publique existe en vertu d'un processus politique ; le processus politique existe en vertu des relations qui existent entre les individus et les collectifs, la partie et le tout, tous les intérêts en lutte, qui doivent faire l'objet d'un arrangement. Cet arrangement existe dans l'acte de priver ceux qui privent les autres, l'acte qui propulse la société vers l'avant. C'est la raison pour laquelle la démocratie et le système qu'on appelle démocratique sont des phénomènes des sociétés de classes. Lorsque le temps est venu pour eux de remettre leurs pouvoirs et que les « superflus » construisent le nouveau, ceux qui dirigent les États, qui oppriment et exploitent les classes sociales « superflues » comme les esclaves et les travailleurs n'ont que les pouvoirs policiers à offrir, lesquels sont à l'extérieur du gouvernement des lois. Même l'élite dominante aux États-Unis sait très bien qu'il en est ainsi puisqu'elle a elle-même pris le pouvoir en privant le roi d'Angleterre de ses pouvoirs dans les colonies américaines.

L'élection montre que le système électoral américain, le système de partis politiques et de gouvernance, est épuisé. Il est exténué, vidé. Il n'a rien à offrir. Seuls subsistent les pouvoirs policiers. La démocratie représentative apparaît comme une dictature militaire sans politique, où seuls subsistent les pouvoirs policiers et les dangers qu'ils posent à l'humanité.

Les candidats dotés d'armées personnelles pour se faire élire, l'imposition d'un état de guerre et d'un régime d'exception permanent et la création d'un « commandant en chef », dans le contexte du dysfonctionnement avoué des institutions autrefois politiques telles que le Congrès, ne va pas conférer de légitimité à quiconque sortira vainqueur de cette élection. Au contraire, dans une situation où il n'existe pas de processus permettant de résoudre les contradictions au sein des cercles dominants et entre les cercles dominants et le peuple, le danger de l'éclatement d'une guerre civile avec conflit armé, dictature militaire et occupation au pays et des aventures toujours plus dangereuses à l'étranger sont une préoccupation majeure qui ressort de cette élection.

Le Parti communiste du Canada (marxiste-léniniste) saisit l'occasion pour affirmer sa confiance totale dans la classe ouvrière, les jeunes, les minorités nationales et les nations autochtones des États-Unis. S'il est évident qu'aucune des deux factions rivales qui cherchent à triompher l'une de l'autre avec leurs basses manoeuvres et contre-manoeuvres dans le contexte de l'élection présidentielle et de ses suites ne parviendra à résoudre les problèmes de l'élite dominante, elles ne réussiront pas non plus à éliminer les mouvements de résistance du peuple américain, lesquels vont à coup sûr prendre de la force et de l'ampleur.

Le PCC(M-L) est d'avis que la seule voie vers l'avant en ce moment est de déployer les mouvements de résistance du peuple et d'établir un processus politique qui puisse mener à l'établissement d'un gouvernement antiguerre. Entre-temps, tous les efforts doivent être faits pour donner au corps politique une conception du monde qui correspond aux conditions sociales pour que les problèmes qui assaillent l'humanité en ce XXIe siècle puissent être résolus sur une nouvelle base historique.

Nous appelons les Canadiens et les Canadiennes à s'opposer à l'élection d'un autre président ou présidente de guerre aux États-Unis et à soutenir le peuple et les nations opprimées des États-Unis dans le renforcement de leur résistance et de leurs organisations, leurs mouvements pour un gouvernement antiguerre et pour ramener les soldats au pays, pour défendre les droits de tous et toutes et pour humaniser l'environnement naturel et social.

Notes

 1. Le candidat à la présidence qui obtiendra 270 des 538 votes du collège électoral sera proclamé président. Chaque État se voit attribuer une partie des votes du collège électoral en fonction du nombre de représentants qu'il a au Congrès, dont trois assignés d'avance au District de Columbia où se trouve la Maison blanche. Les votes du collège électoral de chaque État sont censés aller au candidat qui a obtenu le plus grand nombre de suffrages dans cet État, à l'exception du Maine et du Nebraska qui redistribuent les votes du collège électoral dans la même proportion que les suffrages exprimés. Si aucun candidat ne reçoit 270 votes, le président est choisi par la Chambre des représentants parmi les trois candidats qui auront remporté le plus de votes tandis que le vice-président est choisi par le Sénat.

 2. Selon un sondage Washington Post /ABC effectué du 26 au 29 octobre, 60 % des électeurs probables ont une mauvaise opinion d'Hillary Clinton tandis que 58 % ont une mauvaise opinion de Donald Trump. Le même sondage montre que 97 % des partisans de Trump n'ont pas une opinion favorable à Clinton (et 90 % ont une très mauvaise opinion d'elle), tandis que 95 % des partisans de Clinton ont une mauvaise opinion de Trump (et 90 % ont une très mauvaise opinion de lui). Les intentions de vote sont à 46 % en faveur de Clinton et à 45 % en faveur de Trump. Le sondage New York Times /CBS, lui, dit que 80 % des électeurs admissibles trouvent la campagne à la présidence répugnante.

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Une campagne pour éliminer les partis politiques
et saper la lutte du peuple pour
s'investir du pouvoir

Alors que les élections présidentielles aux États-Unis entrent dans leur dernière semaine, beaucoup d'Américains sont plus en colère maintenant qu'ils ne l'étaient au début de la campagne. Ils ont été témoins d'une suite de scandales qui a englouti  tant Trump que Clinton et de leurs menaces qui ont suivi. Les deux candidats sont maintenant plus détestés qu'au début.

La campagne a confirmé que tant Trump que Clinton font partie de regroupements criminels rivalisant pour servir leurs ambitions et celles des autres riches impérialistes. Surtout, le plus inquiétant pour beaucoup est que malgré une aussi longue campagne aucun des problèmes auxquels fait face le corps politique n'est abordé, du besoin de garantir l'égalité entre êtres humains à la nécessité de garantir que le peuple est la source du pouvoir politique. Aucun progrès non plus n'a été fait dans le sens de faire des États-Unis un facteur de paix et non d'agression et de guerre. La demande d'Hillary Clinton de créer une zone d'interdiction de vol en Syrie menace directement la Russie et pourrait provoquer le déclenchement d'une guerre mondiale d'envergure catastrophique. Trump menace lui aussi d'élargir la guerre en déclarant son intention d'envoyer l'armée américaine intervenir directement dans tous les pays où se trouve l'État islamique pour le combattre et l'éliminer. Il s'agit de dizaines de pays selon les autorités américaines. La militarisation de la police et de l'immigration et l'occupation militaire de villes et de communautés entières sont passées sous silence. La résistance courageuse du peuple, comme à Standing Rock où les Amérindiens et de nombreux regroupements protestent contre la construction de l'oléoduc Dakota Access pour protéger l'eau à laquelle s'abreuvent des millions de gens et pour défendre la souveraineté de la nation Sioux, se heurte à des chars d'assaut, des armes automatiques, des bangs soniques, le poivre de Cayenne et l'arrestation de 140 manifestants non armés en une seule journée. Des gens sont tués par des drones ou par des policiers déchaînés et cela fait partie de la militarisation de la vie, où s'installe l'impunité des gouvernements qui prétend combattre le terrorisme au pays et à l'étranger. Or, rien de cela n'est reflété dans cette campagne.

La campagne présidentielle a accru les inquiétudes des Américains et du monde face à la perspective d'un élargissement de la guerre et refroidi l'espoir de voir s'achever les guerres présentement en cours. Les deux candidats va-t-en-guerre se servent de l'élection pour discréditer ce qui reste de la gouvernance par les lois et promouvoir l'élection d'un leader qui sera le commandant en chef à la fois de l'armée et du peuple. Un commandant en chef ne dirige pas selon la loi mais par le pouvoir policier : le pouvoir de criminaliser, de punir, d'emprisonner, de tuer et de détruire impunément.

On cherche à convaincre les électeurs qu'il est nécessaire de choisir un commandant en chef pour diriger le pays plutôt qu'un gouvernement dysfonctionnel, avec des partis dysfonctionnels.C'est pourquoi il y a eu tant d'attention durant la campagne sur l'aptitude des deux candidats à jouer le rôle de commandant en chef. Les chefs militaires ont été ouvertement invités à se prononcer et il y a même eu un débat des candidats consacré entièrement à ce sujet à bord d'un porte-avion militaire.

L'attention portée à la sélection d'un commandant en chef et à l'élargissement des pouvoirs policiers au pays et à l'étranger sape l'effort du peuple américain pour s'investir du pouvoir de décider des affaires qui le touchent et le concernent. L'élimination des partis politiques et la promotion de personnalités fortes ont pour effet de dépolitiser le peuple. La seule façon d'ouvrir une voie vers la solution des problèmes des États-Unis aujourd'hui est de politiser le peuple et de trouver les moyens de l'engager dans la politique, surtout les jeunes, de se donner le pouvoir de décider et d'exercer un contrôle sur les affaires politiques, économiques et sociales.

L'élimination des partis démocrate et républicain

Pour convaincre les Américains d'accepter d'être gouvernés et menés par un commandant en chef, les deux campagnes se sont acharnées à discréditer et détruire les partis démocrate et républicain, de l'extérieur comme de l'intérieur. Trump et Clinton ont essentiellement contribué à éliminer leurs propres partis en tant qu'organisations politiques viables qui ont des liens organisés avec le peuple. 

Dans ces élections, Trump a ouvertement attaqué le Parti républicain dès le départ quand il a menacé de se présenter comme candidat indépendant s'il n’était pas traité équitablement. Depuis sa nomination, c'est littéralement des centaines de républicains et d'importants spécialistes de la sécurité nationale et des affaires étrangères qui lui ont tourné le dos et ont refusé de le soutenir, y compris de hauts dirigeants du parti. Trump a accru la tension en bloquant le financement de républicains se présentant à d'autres postes.

Clinton a courtisé les républicains mécontents de Trump et bon nombre d'anciens de l'administration Bush se sont joints à elle. Avec son mot d'ordre « plus forts ensemble » elle a attiré des néoconservateurs avec de vagues promesses de postes au sein de son gouvernement. Cela comprend Paul Wolfowitz, considéré comme l'architecte de la guerre en Irak pour le président Bush ; John Negroponte, directeur du service de renseignement et secrétaire d'État adjoint de l'administration Bush ; Richard Armitage, secrétaire d'État adjoint de l'administration Bush et conseiller de Ronald Reagan et de George W. Bush ; et Brent Scowcroft, conseiller de trois présidents républicains. Tous des fauteurs de guerre.

L'intervention du directeur du FBI James Comey pour dire qu'Hillary Clinton était sous enquête, une semaine avant le vote et au mépris d'un avis du département de la Justice et des règles de non-intervention dans une élection, montre que les pratiques et les normes du passé ne tiennent plus et que les conflits s'intensifient. Le FBI rivalise avec la CIA, l'armée et les autres corps policiers et l'intervention du directeur montre que les normes d'atténuation de ces conflits ne fonctionnent plus.

Les divisions et les nouvelles alliances sont signe que les deux partis ne fonctionnent plus en tant que partis avec une discipline de parti et des plate-formes distinctes. Plusieurs facteurs permettent de conclure que, pour les riches, les partis ne sont plus requis. Ces derniers sont remplacés par une arène politique dominée par des dirigeants avec chacun sa machine et ses regroupements en rivalité pour la présidence. Obama, Clinton et Sanders ont tous leur machine personnelle qui supplante et détruit la machine de parti. Tout comme Trump qui a acheté sa machine à même sa fortune personnelle à l'extérieur du Parti républicain, Clinton s'appuie non pas sur l’appareil du Parti démocrate mais sur sa propre machine, comme l'illustrent les courriels fuités du compte de son directeur de campagne John Podesta. Cet appareil privé est formé de conseillers et de gens loyaux à l'intérieur comme à l'extérieur de la campagne et à différents niveaux de gouvernement, dans la Fondation Clinton, le réseau de 80 millions $ et de liens étendus d'un ancien président. Le pouvoir et le succès de cet appareil sont la preuve que Clinton a « ce qu'il faut ».

Pour les riches impérialistes, l'État américain n'existe que pour préserver leur privilège de classe et leur contrôle de la propriété sociale et pour maintenir la classe ouvrière à l'écart du pouvoir. L'État américain a deux formes principales : un gouvernement des lois et un gouvernement de pouvoirs policiers.

Le gouvernement des lois requiert d'une part un Congrès fonctionnel pour légiférer et d'autre part l'élection de ceux qu'on appelle les représentants du peuple. Les élections servent à conférer au gouvernement l'autorité du peuple pour légiférer et gouverner. Les deux éléments donnent au gouvernement sa légitimité et par conséquent son droit de recourir à la force. Un gouvernement des lois est aussi censé voir aux besoins du peuple, ou du moins donner l'apparence de le faire.

La présidence n'est plus présentée comme étant principalement le poste d’un civil responsable d’un gouvernement des lois mais bien comme celui d'un commandant en chef qui détient des pouvoirs policiers étendus qu'il peut utiliser au pays et à l'étranger. On assiste à une transition générale d'un gouvernement des lois vers un gouvernement de pouvoirs policiers. C'est en partie la raison pour laquelle Trump et Clinton font tous deux intervenir de hauts gradés militaires dans la campagne, alors que l'armée est traditionnellement neutre dans une élection. Cette tradition de neutralité sert à garantir le soutien de l'armée à quiconque est élu. Or, maintenant, avec le dénigrement, sinon la destruction des partis démocrate et républicain, les militaires sont invités dans la mêlée et y jouent un rôle important. La rupture de la tradition de neutralité est un développement dangereux parce que cela veut dire qu'on ne sait plus à qui les militaires voueront leur fidélité après l'élection et que des scissions peuvent éclater par la suite.

Le gouvernement de pouvoirs policiers, lesquels pouvoirs comprennent l'armée, les agences de renseignement et tous les corps policiers, ne confère pas et ne peut pas conférer de légitimité au pouvoir des riches impérialistes et à leur État. Les pouvoirs policiers, ce sont l'utilisation de la force, le pouvoir de punir, de criminaliser, d'emprisonner et de tuer toujours plus impunément. Ils ne sont pas gênés par l'imputabilité ou la responsabilité envers le peuple, comme quand les autorités tuent impunément des gens par des frappes par drone ou dans les expéditions des forces spéciales au Yémen, au Pakistan, en Syrie et ailleurs. Au pays, les forces policières de plus en plus militarisées tuent des citoyens et attaquent des manifestants, comme on le voit présentement à Standing Rock et comme on l'a vu à Baton Rouge, Baltimore, Ferguson et ailleurs. Il n'y a ni imputabilité, ni État de droit.

L'élimination progressive du gouvernement des lois et des partis politiques est en marche depuis longtemps. En témoigne le dysfonctionnement du Congrès, en partie parce que les partis politiques ne fonctionnent plus comme des partis politiques. Les chefs de parti ne sont plus suivis et une majorité à la chambre, comme en détiennent présentement les républicains, n'est plus suffisante à faire adopter des lois. Les différents mécanismes de résolution de conflit au sein des cercles dirigeants, comme les postes dans des comités et la répartition du budget, ne fonctionnent plus. La campagne présidentielle actuelle est un pas important vers l'élimination des partis et du gouvernement des lois et vers l'avènement d'un pouvoir policier omnipotent. Le commandant en chef en tant que chef doit être suivi sinon le pouvoir policier vous tombera dessus.

Le développement des partis politiques fut une bonne chose pour le peuple, parce qu'ils sont nécessaires pour donner une expression à la volonté collective. La politique est nécessaire pour défendre nos intérêts individuels et collectifs et ceux de la société. C'est par la politique que le peuple participe aux prises de décision et au contrôle des affaires qui le concernent et qui l'affectent. La dépolitisation du peuple par les riches impérialistes, notamment par l'élimination de la politique et des partis politiques, sert à diviser le peuple et à le détourner de la défense de ses droits individuels et collectifs, à l'empêcher d'occuper l'espace du changement. Pour faire progresser la cause de la démocratie aujourd'hui, il faut la politique de l'habilitation du peuple, la mobilisation politique du peuple pour qu'il se gouverne et décide.

Dans cette élection, les riches impérialistes sont plus spécifiquement engagés dans un effort pour obliger le peuple à se soumettre aux guerres d'agression sans fin des États-Unis et aux préparatifs pour un conflit inter-impérialiste plus général entre les grandes puissances et à l'impunité et la militarisation grandissantes de la vie au pays. En présentant le président comme le commandant en chef du pouvoir policier, bien que toujours le représentant de la volonté politique du peuple, on oblige le peuple à accepter la guerre comme nécessaire et inévitable et son habilitation et le changement prosocial comme impossibles. C'est également pour cette raison que Clinton affirme qu'elle est « la seule chose qui vous sépare de l'Apocalypse ». Ainsi parle un commandant en chef « du peuple, par le peuple et pour le peuple ». Il vous menace et demande votre appui du même coup, car il est le seul espoir d'éviter l'Apocalypse. Clinton parle ainsi alors même qu'elle menace de faire la guerre à la Russie, guerre que beaucoup perçoivent comme le début de l'Apocalypse. C'est une direction des événements qui est dangereuse et destructive et qui doit être combattue vigoureusement.

L'imposition de cette direction antisociale pose un problème pour les riches impérialistes, puisque le peuple n'est pas si facilement disposé à se soumettre aux diktats du pouvoir policier. On le voit dans les grands mouvements de protestation qui se poursuivent à travers le pays et dans la colère face à cette élection présidentielle. De plus en plus d'Américains se convainquent du besoin d'une autre direction, une direction prosociale et antiguerre et l'habilitation du peuple, surtout des jeunes. Tandis que les riches impérialistes cherchent à présenter leur direction dangereuse et rétrograde comme la voie du changement, l'histoire appelle le peuple à occuper l'espace du changement et à s'organiser pour établir une direction prosociale, vers un gouvernement antiguerre et l'habilitation du peuple.

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Le discrédit des élections présidentielles accroît
les possibilités d'une intervention fédérale
et d'une guerre civile

Les deux candidats à la présidence, Donald Trump et Hillary Clinton, discréditent les élections. Trump ne cesse de parler de fraude électorale qui serait en cours. Il parle surtout de la fraude par des électeurs individuels, notamment des immigrants. Il a demandé à ses partisans de se rendre aux bureaux de vote pour défier les électeurs, ce qu'ils sont libres de faire. Il a dit qu'il allait contester le résultat de l'élection s'il perd parce que Clinton et son entourage pourraient truquer le vote. Un des super comités d'action politique (super PAC) qui amasse des fonds pour Trump s'appelle « Stop the Steal » (arrêter la fraude). Il persiste à dire que la fraude électorale par des individus est un grave problème bien que les poursuites pour fraude commise par un électeur soient rares et que seulement 31 cas d'usurpation d'identité sur un milliard de votes exercés n'aient été rapportés. Son objectif est de semer le doute, pas de défendre le droit de vote.

Hillary Clinton a intenté des poursuites pour intimidation d'électeurs dans quatre États « clés », soit l'Ohio, l'Arizona, le Nevada et la Pennsylvanie. Il s'agirait de cas où Trump et ses partisans ont « conspiré pour menacer, intimider et par conséquent empêcher de voter des électeurs de minorités nationales dans des milieux urbains ». La poursuite invoque la Loi sur le droit de vote de 1965 et la Loi sur le Ku Klux Klan de 1871. On cherche ici à créer l'impression que Clinton se soucie de la suppression du droit de vote d'Afro-Américains. Le fait que la poursuite ne concerne que quatre États et ne s'intéresse pas à la Caroline du Nord, au Texas et à la Floride, où les autorités gouvernementales ont lancé des campagnes pour priver certains électeurs de leur droit de vote, montre que son objectif n'est pas aussi noble qu'elle le laisse entendre et qu'elle cherche, comme Trump, à semer le doute sur le résultat plutôt que d'élargir et de garantir le droit de vote.

Les agissements des deux candidats ont pour effet de discréditer les élections plus généralement, et d'ainsi accroître les possibilités d'une intervention de l'autorité fédérale dans les affaires des différents États. Les deux candidats font fi des raisons principales de la marginalisation des électeurs, notamment des lois sur l'inscription des électeurs qui visent à empêcher les Afro-Américains en particulier et les travailleurs en général de voter. Une grande partie des électeurs admissibles ne pourront pas voter parce qu'ils ne sont pas inscrits.

Tout au long de son évolution, le processus électoral américain a servi à bloquer le vote plutôt qu'à garantir l'exercice du droit de vote. Aujourd'hui cela se fait par des lois qui resserrent les règlements sur l'identification des électeurs dans quatorze États, principalement situés dans le sud des États-Unis. En Caroline du Nord, par exemple, la National Association for the Advancement of Coloured People (Association nationale pour la promotion des gens de couleur) a déposé une demande d'injonction immédiate le 31 octobre pour interdire aux commissions électorales d'État et de comtés d'annuler illégalement l'inscription de milliers d'électeurs, dont un nombre démesuré d'Afro-Américains.

Selon une étude de 2010, la suppression du vote comprend le fait que plus de 5,8 millions de prisonniers et ex-prisonniers sont privés de leur droit de vote, dont 600 000 individus ne serait-ce qu'en Floride. Cette suppression de vote frappe de façon démesurée les Afro-Américains qui sont surreprésentés dans le système carcéral raciste. L'élimination d'électeurs de la liste électorale pour différentes raisons, la réduction du nombre de bureaux de vote et les déplacements des bureaux de vote le jour de l'élection, qui créent des lignes d'attente plus longue et du mécontentement, sont parmi les moyens utilisés pour priver les électeurs de leur droit de vote. Les électeurs font face à des problèmes beaucoup plus graves que l'usurpation de l'identité par des individus dans l'affirmation de leur droit de vote. Mais ni l'un ni l'autre des deux candidats ne s'intéresse à ces problèmes systémiques causés par l'action des gouvernements et non par celles des individus.

Alors pourquoi parlent-ils tant de fraude électorale et d'intimidation ? C'est une façon de discréditer les élections encore plus dans une situation où les Américains sont déjà très en colère face à ce qui se passe. Le fait de prendre à partie certains États, comme le font tous deux Trump et Clinton, ouvre la voie à l'intervention de l'autorité fédérale chargée d'assurer l'« équité » des élections. Les agissements du département de la Justice (DoJ) laissent entrevoir cette possibilité. Le DoJ envoie habituellement des centaines d'observateurs et de scrutateurs dans les bureaux de vote à travers le pays pour empêcher l'intimidation des électeurs. En 2012, il a envoyé 780 observateurs spécialement formés pour surveiller le vote dans 51 juridictions dans 23 États. Cette année un nombre réduit d'observateurs formés seront déployés dans moins de cinq États. Le DoJ n'enverra pas d'observateurs dans les 14 États qui ont adopté de nouvelles lois resserrant entre autres les règles sur l'identification des électeurs.

Ainsi, avec la probabilité que des gens non formés des camps Clinton et Trump vont être dépêchés aux bureaux de vote alors que de nouvelles lois et règles sur l'identification entrent en vigueur, le tout dans le contexte historique de restriction du droit de vote par les autorités, le DoJ décide d'être absent à ces bureaux de vote. Il pourra alors blâmer les États pour la confusion, les perturbations et allégations de fraude.

De pair avec l'effort des deux candidats pour discréditer l'élection, cela donne un argument pour que les autorités fédérales prennent en charge les élections ou du moins pour une intervention fédérale. Le gouvernement fédéral peut occuper l'espace qui lui est ainsi ouvert en disant apporter des changements qui rendent le processus plus démocratique alors qu'en réalité il sape l'initiative des électeurs qui réclament des changements en faveur de l'habilitation du peuple. L'usurpation du pouvoir des États va dans la même direction que l'institution d'un commandant en chef comme dirigeant du pays et détenteur de pouvoirs policiers. Cela crée également un scénario de guerre civile quand les États refuseront le contrôle fédéral.

Aux États-Unis, que la présidence prenne le contrôle des différents corps policiers n'est pas une mince affaire, surtout quand il s'agit de pouvoirs présentement contrôlés par les villes, les comtés et les États, dont la Garde nationale. Des divisions sont aussi apparues dans l'armée, comme le montre le fait que plusieurs généraux et autres hauts gradés ont déclaré leur appui à l'un ou l'autre des deux candidats à la présidence. Traditionnellement, le président a la responsabilité d'unir les corps militaires pour préserver l'Union et présenter un front uni des riches impérialistes capable d'empêcher le peuple d'accéder au pouvoir.

Dans les circonstances actuelles, les cercles dirigeants impérialistes semblent espérer pouvoir imposer un commandant en chef du pouvoir policier qui sera reconnu comme commandant en chef nécessaire, voire indispensable, du peuple. Ils réussiraient ainsi à préserver l'Union tout en démobilisant le peuple qui s'oppose à la destruction du gouvernement de droit et en lui faisant accepter un gouvernement de pouvoirs policiers, un État policier militarisé.

L'État qui s'appuie sur le pouvoir policier à l'extérieur du gouvernement des lois avance dans une direction instable, destructrice et dangereuse. Il y a un besoin urgent de donner une nouvelle direction aux affaires politiques des États-Unis. Le peuple organisé pour défendre ses intérêts individuels et collectifs et les droits de tous et toutes peut se mobiliser dans la politique pratique et mener une bataille consciente pour une direction prosociale qui l'investisse du pouvoir de décider de ses affaires et qui mène à l'établissement d'un gouvernement antiguerre.

(Voice of Revolution)

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Le département de la Justice réduit le
nombre d'observateurs fédéraux
dans les bureaux de scrutin

Pour l'élection de novembre, le département de la Justice (DoJ) réduit de manière significative le nombre d'observateurs fédéraux postés à l'intérieur des bureaux de scrutins. Cela se produit au moment où de plus en plus d'électeurs sont de nouveau confrontés aux lois visant à restreindre plutôt qu'à étendre le droit de vote. Plus d'une douzaine d'États ont de nouvelles lois électorales sévères pour exclure les électeurs, la plupart obligent la présentation de pièces d'identité au bureau de scrutin, en plus des exigences d'inscription.

Depuis leurs origines les États-Unis s'organisent pour réduire la participation des électeurs par divers moyens. Aujourd'hui comme dans le passé, cela inclut l'inscription des électeurs selon des exigences qui sont systématiquement racistes, orientées vers la suppression de la participation des Afro-Américains. Les lois actuelles ciblent également les étudiants, les personnes âgées et plus généralement, comme par le passé, ceux qui sont pauvres.

Les nouvelles lois comprennent l'obligation de présenter, au bureau de scrutin, des pièces d'identité avec photo approuvées seulement par le gouvernement. Cette exigence va provoquer des conflits. De plus, Donald Trump a appelé ses partisans à surveiller eux-mêmes les bureaux de scrutin, ciblant spécifiquement les Latino-Américains. Les démocrates devraient également avoir des observateurs sur place. Autant les candidats que les partis peuvent envoyer des observateurs à l'intérieur des bureaux de scrutin. Aucun de ces bénévoles n'a besoin d'être formé ou informé sur les lois. On soupçonne qu'ils vont chercher à intimider les électeurs sinon à perturber le vote en interrogeant chaque électeur, ce qui va ralentir le processus et produire de longues lignes d'attente aux bureaux de scrutin.

Au cours des cinq dernières décennies, le DoJ a envoyé des centaines d'observateurs et de scrutateurs partout au pays, en particulier dans les États du sud où le DoJ prétend vouloir prévenir la discrimination envers des électeurs. Le mandat du DoJ découle de la Loi sur le droit de vote de 1965, elle-même le résultat de luttes populaires dans le Sud et partout au pays à la défense du droit de vote. Une décision de la Cour suprême en 2013 a éliminé une partie clé de la loi, supprimant le mandat fédéral d'approuver les changements effectués par les États aux lois électorales.

Il y a 14 États où les travailleurs postés dans les bureaux de scrutin de l'État sont appelés à mettre en oeuvre de nouvelles lois, y compris pour la première fois des exigences d'identification des électeurs, dans le cadre d'une élection présidentielle. Selon le DoJ, les observateurs fédéraux ne seront pas postés dans les bureaux de scrutin de ces États.

Lors de l'élection présidentielle de 2012, la dernière avant la décision de la Cour suprême, le ministère de la Justice a envoyé plus de 780 observateurs spécialement formés et d'autres membres du personnel dans les bureaux de scrutin de 51 juridictions réparties dans 23 États pour surveiller les activités illégales et rédiger des rapports sur d'éventuelles violations des droits civils. Cette année, le DoJ envoie des observateurs dans moins de cinq États et seulement parce que des juges en ont ordonné la surveillance. Alors que le DoJ indique que la décision de la Cour suprême l'empêche d'envoyer des observateurs, des organisations de défense des droits affirment que la décision ne mentionne pas spécifiquement les observateurs. On se demande par ailleurs pourquoi le DoJ a annoncé et rendu public le fait qu'il ne va pas envoyer d'observateurs.

L'expérience répétée indique que même avec la présence d'observateurs fédéraux, des atteintes sérieuses au droit de vote se produisent régulièrement le jour des élections, en grande partie causées par les États mêmes. Les fonctionnaires d'État suppriment des listes électorales des électeurs admissibles, les bureaux de vote sont déplacés ou supprimés pour favoriser l'une ou l'autre partie, les Afro-Américains sont régulièrement ciblés, leur droit de voter est contesté et plus encore. L'ensemble des mesures mises en place pour l'inscription et les exigences sévères le jour des élections sont conçues non pas pour défendre le droit de vote mais pour le bloquer. Les gestes posés actuellement par le DoJ sont en partie des moyens pour provoquer la confusion et des perturbations aux bureaux de scrutin, tout en blâmant les États pour cette situation. Est-ce un coup monté pour justifier l'ingérence et les objections du fédéral face aux résultats dans certains États en particulier ? Peut-être une prise de contrôle des élections à l'avenir par le fédéral ? Dans une situation où la bataille pour la présidence est décisive au sein de l'élite dirigeante et les combats entre les différentes factions s'est grandement intensifiée où les États y jouent un rôle, il devient nécessaire d'examiner les actions du DoJ et des États précisément en ce qui a trait au processus électoral.

(Voice of Resolution. Photos: American Civil Liberties Union.)

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Résistance courageuse du peuple aux États-Unis

La désobéissance et la résistance à
Standing Rock se poursuivent

Tous aux actions de solidarité avec Standing Rock

CALENDRIER D'ÉVÉNEMENTS

La résistance des peuples autochtones et de leurs supporters à l'oléoduc de Dakota Access (DAPL) à Standing Rock, au Dakota du Nord, s'intensifie en dépit du recours à la violence par l'État contre eux. Le conflit démontre le refus continuel des cercles dominants des États-Unis de fournir une solution aux conflits avec les peuples autochtones sur une base politique de nation à nation. Au lieu de cela, ils reprennent toutes les pratiques du temps de la grande Guerre Sioux de 1876, aussi connue comme la Guerre des Black Hills entre les Sioux Lakota, les Cheyennes du Nord et le gouvernement des États-Unis. La guerre a été causée par le désir du gouvernement américain de prendre possession des Collines noires où de l’or avait été découvert et les colons avaient commencé à empiéter sur les terres. Les Sioux et les Cheyennes ont refusé depuis ce temps-là de céder la propriété de ces terres aux États-Unis. La Bataille de Little Big Horn, également connue comme la dernière bataille de Custer, fut l’une des batailles de cette guerre.

Le 28 octobre, près de 140 personnes ont été arrêtées et plusieurs autres attaquées par 100 agents de la police anti-émeute venant de plusieurs États et par la Garde nationale, armés de poivre de cayenne et de véhicules blindés de transport de troupes. Leurs tentatives de criminaliser les médias indépendants et les individus ont échoué et les témoins oculaires et les vidéos sur les réseaux sociaux confirment le recours à la brutalité contre les femmes, les aînés et les enfants par les forces de l'ordre.

Le recours odieux à la violence par l'État alors qu'il refuse de reconnaître les revendications et les justes demandes des Sioux de Standing Rock incite toujours davantage d'individus à se rallier à la défense de leurs réclamations sur la terre. Plusieurs se joignent aux manifestations au Dakota du Nord et organisent des actions partout en Amérique du Nord pour exprimer leur solidarité et notamment faire valoir leurs propres luttes à la défense de leurs terres contre les monopoles et les gouvernements à leur service.

LML appelle tout le monde à participer à ces actions en appui aux Sioux de Standing Rock.

La protection de la terre et de l'eau se poursuit au Dakota du Nord

Le 2 novembre, les forces de l'ordre ont profané les lieux de sépulture d'Alma Parkin et de Matilda Galpin, deux femmes autochtones anciennement propriétaires du Cannonball Ranch près de la rivière Cannonball et du site ciblé par le DAPL. Alors que des protecteurs de l'eau tenaient une cérémonie de l'eau dans la rivière, des tireurs embusqués ont tiré des coups dits non létaux à partir de véhicules blindés garés autour de l'arbre indiquant l'emplacement des tombes. Les activistes affirment que près de 100 personnes ont été blessées par la police.

Actions au pont Mercier à Montréal

Mohawk Nation News écrit : « Les Mohawks de Kahnawake, leurs amis et alliés, ont dressé un campement de solidarité pour Standing Rock dans la partie sud du pont Mercier qui couvre le fleuve Saint-Laurent jusqu'à Montréal. Amis et alliés sont les bienvenus ».

Le 28 octobre, des membres de la communauté de Kahnawake ont bloqué le pont pendant deux heures en signe de solidarité.

Les Mohawks d'Akwesasne ont tenu une marche de solidarité le 30 octobre.

Des actions contre les financiers d'oléoducs

Par des actions de solidarité partout en Amérique du Nord, des activistes ont ciblé les banques qui financent le DAPL, dont CitiBank, la banque TD, Wells Fargo et JP Morgan.


  Manifestation au siège social de JP Morgan, ville de New York, le 1er novembre 2016

Occupation du hall d'entrée du siège social de CitiBank, San Francisco, le 31 octobre 2016

Action à Wells Fargo, ville de Salt Lake, au Utah, le 31 octobre 2016

Manifestation au siège social américain de la banque TD, Mount Laurel au New Jersey,
le 27 octobre 2016

Occupation du quartier général de la campagne électorale de Clinton

Le 28 octobre, quelques minutes seulement avant le raid policier massif à Standing Rock, des jeunes autochtones de Standing Rock ont occupé le quartier général de la candidate démocrate américaine Hillary Clinton, pour exiger qu'elle se prononce sur le DAPL. Ils ont tenté de remettre une lettre à Clinton mais le personnel du quartier général l'a refusée et personne n'a daigné discuter avec les jeunes de leurs préoccupations. Une déclaration émise par les organisateurs de la campagne de Clinton la journée même a été rejetée et dénoncée comme étant dépourvue de contenu et ne s'adressant aucunement aux inquiétudes du peuple tout en défendant la répression de l'État et le droit de monopole.

Plus d'un million de personnes visitent Standing Rock
via les médias sociaux

Le 31 octobre, plus d'un million de personnes ont pris part à une action en ligne visant à protéger les activistes de Standing Rock de la surveillance policière des médias sociaux.

« Le département du shérif de Morton County utilise Facebook pour vérifier qui est présent à Standing Rock afin de mieux les cibler dans le but de perturber les camps de prière.

« Pour cette raison, les Protecteurs de l'eau lancent l'appel à tous de visiter le site web de Standing Rock, Dakota du Nord, afin de les submerger et de semer la confusion. Il s'agit d'une action qui peut concrètement aider les gens qui agissent au risque de leur intégrité physique et de leur vie et c'est une action qui peut se faire sans quitter la maison. »

Appui de la part de chercheurs et d'universitaires

En septembre, plus de 1200 archéologues, anthropologues, universitaires, conservateurs et responsables de musées ont signé une lettre en appui aux manifestations contre l'oléoduc du Dakota Access et appelant le gouvernement des États-Unis et ses agences à mettre un terme à la construction de l'installation pétrolière.

On peut y lire entre autres :

« En tant qu'archéologues, anthropologues, historiens et travailleurs de musée qui avons à coeur une gestion responsable, nous sommes engagés à la préservation et à l'interprétation de l'héritage archéologique et culturel pour le bien commun. Nous nous joignons à la nation Sioux de Standing Rock pour dénoncer la destruction récente de sites de sépulture ancestraux, de lieux de prière et d'autres artefacts culturels importants sacrés pour les peuples Lakota et Dakota.

« Le samedi 3 septembre 2016, la compagnie responsable du contesté projet de l'oléoduc du Dakota Access ont rasé à coups de bulldozer les terres contenant des sites de sépulture autochtones, des indicateurs de tombes et des artefacts, y compris des cairns ancestraux et des cercles de prière en pierre. Le personnel de construction, accompagné d'agents de sécurité privés et d'escouades canines, est arrivé quelques heures seulement après que des avocats autochtones des Sioux de Standing Rock eurent révélé lors d'une déposition auprès des tribunaux l'endroit du site découvert récemment.

« Nous appelons le gouvernement fédéral à agir conformément à la loi et à initier une recherche sur les répercussions environnementales ainsi qu'une étude des ressources culturelles le long de la route de l'oléoduc, tout en menant une consultation adéquate auprès de la nation Sioux de Standing Rock. Nous soutenons la nation Sioux de Standing Rock et affirmons son droit de traité, sa souveraineté en tant que nation et la protection de ses terres, de ses cours d'eau et de ses sites culturels et sacrés, et nous appuyons aussi tous ceux qui tentent d'empêcher que ne se produisent de nouveaux torts irréparables ».

Note:

Pour de plus amples imformations sur la résistance à Standing Rock, lire le numéro du 5 octobre 2016 du LML

(Sources : sacredstonecamp.org, TeleSUR, MNN. Photos: Standing Rock Sioux, MNN, E.R. McGregor, J. Davis-Hockett, Rising Tide NA, J.F. Tinternet, S. Skinner, J. Cordova, R. Wilson, Kehrt.)

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Les prisonniers continuent de dénoncer le système esclavagiste moderne


Manifestation à Pittsburgh en appui à la grève des prisonniers, 9 septembre 2016

Les prisonniers partout aux États-Unis ont déclenché une grève le 9 septembre pour dénoncer les conditions de leur vie en prison, notamment la torture de l'isolement cellulaire, le manque de soins de santé, la mauvaise qualité de la nourriture et la négation de leur droit de poursuivre leurs études.

Ils dénoncent en particulier leur exploitation en tant qu'esclaves modernes. De nombreux prisonniers sont forcés de travailler pour rien ou presque rien, dans des centres d'appels ou à fabriquer des uniformes et d'autres biens pour des monopoles et les gouvernements des États.

Plus de 50 000 prisonniers ont participé dans des gestes de résistance, refusant d'aller travailler le 9 septembre et les jours qui ont suivi. Cette résistance massive organisée est encore plus remarquable compte tenu des conditions mêmes de leur vie en prison. Les principaux organisateurs ont fait face à des représailles de la part des autorités carcérales et ont été déplacés ou placés en isolement cellulaire. Ils se sont quand même engagés à poursuivre leur travail. La capacité des prisonniers d'organiser une grève aussi étendue de même que l'appui qui est venu de l'extérieur dans des conditions aussi difficiles démontre leur détermination et leur refus de se soumettre. C'est une qualité qui doit être appuyée et défendue par tous.

Plusieurs actions ont été menées à l'échelle du pays en appui à la grève dans les jours qui ont précédé le 9 septembre et le jour de son déclenchement. De la Floride à l'État de Washington, au Texas et au Massachusetts, les gens ont organisé des manifestations, des visionnements de films, des conférences d'éducation populaire, des groupes de discussion, des envois de lettres aux prisonniers et plein d'autres actions. Partout, des efforts ont été faits pour bâtir des relations avec les prisonniers et faire en sorte que leurs voix soient entendues à l'extérieur des murs de la prison. Déploiements de bannières, rassemblements, affichage, appels aux autorités et aux médias, tout cela a servi à faire connaître au public que les prisonniers organisaient la résistance et refusaient d'être réduits au silence.

L'incarcération massive aux États-Unis est une forme de contrôle de masse et de génocide, dirigés en particulier contre les minorités nationales mais ayant un impact sur tous. La grande majorité des prisonniers sont là pour des infractions non violentes reliées à la drogue. Ils sont gardés là et souvent isolés pour avoir résisté et défendu leurs droits. Les États-Unis se classent deuxièmes au monde en termes de taux d'incarcération (après les Seychelles), avec 698 prisonniers adultes pour 100 000 personnes. Alors que les États-Unis représentent 4,4 % de la population mondiale, ils incarcèrent 22 % des prisonniers à l'échelle mondiale et possèdent aussi le plus grand nombre de prisonniers au monde, soit 2,2 millions. La majorité de ces prisonniers sont des Afro-Américains et des gens des minorités nationales.

Les problèmes qui sont soulevés par les prisonniers et le taux massif d'incarcération aux États-Unis sont un réquisitoire contre le chauvinisme des cercles dominants qui prétendent que les États-Unis sont de grands défenseurs des droits humains. Ces problèmes sont aussi un réquisitoire contre le système social, politique et électoral des cercles dominants, lequel engendre un taux élevé d'incarcération et prive le peuple du pouvoir politique et nie l'existence de ces problèmes et de nombreux autres problèmes sociaux en rabaissant la politique à l'électoralisme le plus grossier. Tout cela démontre une fois de plus la nécessité d'un profond changement prosocial qui est réalisé par la lutte organisée du peuple américain. 

Le texte qui suit est l'appel aux actions du 9 septembre qui soulignait aussi le 45e anniversaire des protestations de masse des détenus de la prison d'Attica dans l'État de New-York.

Appel à l'action contre l'esclavage carcéral aux États-Unis --
Appuyez la résistance des prisonniers


  Lansing, Michigan

D'une seule voix s'élevant des cellules d'isolement à long terme, des dortoirs et des blocs cellulaires de la Virginie à l'Orégon, nous, prisonniers partout aux États-Unis, nous engageons à mettre un terme une fois pour toutes à l'esclavage en 2016.

Le 9 septembre 1971, des prisonniers ont pris le contrôle d'Attica et ont fermé cette prison la plus notoire de l'État de New York. Le 9 septembre 2016, nous entamerons des actions visant à fermer des prisons partout au pays. Non seulement revendiquerons-nous la fin de l'esclavage carcéral mais nous y mettrons fin nous-mêmes en arrêtant d'être esclaves.

Dans les années soixante-dix, le système carcéral aux États-Unis s'écroulait de partout. À Walpole, San Quentin, Soledad, Angola et dans plusieurs autres prisons, les gens se soulevaient, luttaient et reprenaient possession de leur vie et de leur corps pour rompre avec les plantations carcérales. Depuis six ans maintenant, nous avons commémoré et renouvelé cette lutte. Pendant ce temps, la population carcérale a explosé et les développements technologiques de contrôle et de détention sont devenus les plus sophistiqués et les plus répressifs de l'histoire mondiale. Pour maintenir leur stabilité, les prisons ont de plus en plus recours à l'esclavage et à la torture.

Les prisonniers sont forcés de travailler pour un salaire maigre voire inexistant. C'est ce qui s'appelle de l'esclavage. Le 13e amendement de la constitution des États-Unis contient une exception juridique permettant le prolongement de l'esclavage dans les prisons des États-Unis. Selon cet amendement, « il n'existera dans les États-Unis, et dans toute localité soumise à leur juridiction, ni esclavage ni servitude involontaire, si ce n'est à titre de peine d'un crime dont l'individu aurait été dûment déclaré coupable ». Des surveillants observent nos moindres gestes, et si la tâche qui nous est assignée n'est pas faite de façon jugée satisfaisante par eux, nous sommes punis. Le fouet a peut-être été remplacé par le poivre de cayenne, mais la plupart des autres formes de torture sont les mêmes : l'isolement, les positions qui rendent le mouvement impossible et les fouilles à nu où nous sommes scrutés et tâtés comme des animaux.

L'esclavage est bel et bien vivant dans le système carcéral, mais avant la fin de cette année, il ne le sera plus. Ceci est un appel pour mettre fin à l'esclavage en Amérique. Cet appel s'adresse directement aux esclaves eux-mêmes. Cet appel ne s'adresse pas à nos ravisseurs sous forme de demandes ou de requêtes, il s'adresse à nous-mêmes et nous incite à l'action. À chaque prisonnier dans chaque État et institution fédérale de ce pays, l'appel est lancé de cesser d'être un esclave, de laisser les récoltes pourrir dans les champs de plantation, d'aller en grève et d'arrêter de reproduire les institutions de notre séquestration.

Ceci est un appel à un arrêt de travail national des prisonniers pour mettre un terme à l'esclavage carcéral, dès le 9 septembre 2016. Ils ne peuvent faire fonctionner ces installations sans nous.

Les protestations non violentes, les arrêts de travail, les grèves de la faim et d'autres formes de refus de participer à la routine et aux besoins carcéraux ont augmenté depuis quelques années. Les actions les plus connues sont la grève de la prison de Géorgie en 2010, les nombreuses grèves de la faim rotatives en Californie, les arrêts de travail du Free Alabama Movement en 2014, mais il y a eu plusieurs autres manifestations du pouvoir des prisonniers. De grandes et parfois très efficaces grèves de la faim ont éclaté au pénitencier de l'État d'Ohio, au Menard Correctional dans l'Illinois, au Red Onion en Virginie et dans plusieurs autres prisons. Le mouvement de résistance en plein essor est diversifié et interrelié et comprend des centres de détention d'immigrants, des prisons pour femmes et des centres pour mineurs. L'automne dernier, les femmes incarcérées de la prison de Yuba County en Californie ont participé à une grève de la faim initiée par des femmes incarcérées dans des centres de détention d'immigrants en Californie, au Colorado et au Texas.

Des prisonniers partout au pays participent régulièrement à des manifestations de pouvoir dans les prisons mêmes. Ils l'ont fait en grande partie grâce à la solidarité des détenus et à la mise en place de coalitions larges sans égard aux notions d'origine ou de gang pour mieux confronter l'oppresseur commun.

Quarante-cinq ans après Attica, les vents du changement soufflent à nouveau dans les prisons américaines. En septembre, nous souhaitons coordonner et donner plus d'ampleur à ces protestations afin qu'elles se développent en un immense raz-de-marée que le système carcéral américain ne pourra plus ignorer ni supporter. Nous voulons mettre fin à l'esclavage carcéral en le rendant impossible, en refusant d'être esclaves plus longtemps.

Pour atteindre cet objectif, il nous faut l'appui des gens de l'extérieur. Une prison est un environnement qui se ferme facilement et est propice à la répression, au contrôle et au confinement. Chaque mur de pierre, chaque maillon de chaîne, chaque geste et chaque routine suintent la répression. Lorsque nous tenons tête à ces autorités, elles nous tapent dessus, et la seule protection possible nous vient de la solidarité de l'extérieur des murs. L'incarcération de masse, que ce soit dans les prisons de l'État ou dans les prisons privées, est un stratagème qui permet aux chasseurs d'esclaves de patrouiller nos quartiers et de contrôler nos vies. Ce stratagème est fondé sur la criminalisation de masse. Les épreuves qui sont les nôtres en dedans servent à contrôler nos familles et nos communautés à l'extérieur. Certains Américains vivent chaque jour sous la menace d'exécution extrajudiciaire, comme les manifestations suite à la mort de Mike Brown, de Tamir Rice, de Sandra Bland et de tant d'autres l'ont montré après tant d'années de silence, et sous la menace d'être capturés, enchaînés et forcés de travailler dans ces plantations carcérales.

Notre protestation contre l'esclavage en prison est aussi une protestation contre le corridor entre l'école et la prison, contre la terreur policière et contre les contrôles effectués qui suivent libération. Lorsque nous aurons aboli l'esclavage, les autorités perdront une grande partie de leur intérêt à incarcérer nos enfants. Elles cesseront de tenter d'arnaquer à nouveau ceux qu'ils ont libérés. Dès que nous aurons éliminé l'intérêt économique de notre travail forcé du système carcéral des États-Unis, toute la structure des tribunaux et de la police, de contrôle et de chasse aux esclaves devra changer pour nous accommoder en tant qu'êtres humains et non plus en tant qu'esclaves.

Les conditions carcérales affectent tout le monde. Lorsque nous passerons à l'action et que nous exprimerons notre refus le 9 septembre 2016, nous devons savoir que nous avons l'appui de nos amis, de nos familles et de nos alliés à l'extérieur. Ce printemps et cet été seront des saisons pour organiser, pour relayer l'information, pour bâtir des réseaux de solidarité et pour démontrer de quel bois nous nous chauffons.

Levez-vous, avancez-vous et joignez-vous à nous. Contre l'esclavage carcéral. Pour la libération de tous.

Pour de plus amples informations, des mises à jour, du matériel et des foyers d'organisation, voir les sites web suivants : SupportPrisonerResistance.net; FreeAlabamaMovement.com; IWOC.noblogs.org.

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Convergence à la frontière mexicaine à la défense des droits, contre la militarisation et la politique étrangère des États-Unis


Vigile aux chandelles, 8 octobre 2016

La convergence annuelle de School of the Americas Watch (SOAW) pour protester contre la formation par l'armée américaine d'escadrons contre-révolutionnaires à déployer partout en Amérique latine et dans les Caraïbes a eu lieu du 7 au 10 octobre. Cette année, elle a été déplacée du site habituel à Fort Bening, en Géorgie, vers la frontière entre Nogales, en Arizona, et Sonora, au Mexique, au Centre de détention Eloy, ainsi qu'à Tucson en Arizona « en vue des élections de novembre pour protester contre la militarisation et pour attirer l'attention sur la politique étrangère des États-Unis comme une des causes de la migration ». Les organisateurs ont souligné que « le changement de lieu s'inscrit dans l'élargissement du problème et de notre lutte contre la militarisation étasunienne au pays et à l'étranger ».

Dans son appel à l'action cette année le SOAW écrit :

« Certaines communautés sont ciblées par des assassinats et la répression d'État dans toutes les Amériques par des militaires et des policiers formés par l'armée des États-Unis. Les Latino-Américains continuent d'être forcés de fuir les forces de sécurité répressives formées par l'armée étasunienne mais se retrouvent aussi confrontés à une frontière militarisée, à des lois de l'immigration racistes et à un discours xénophobe dans le contexte électoral. Des personnes noires et brunes continuent d'être ciblées aux États-Unis, systématiquement emprisonnées et tuées. On ne peut plus séparer les deux aspects et aujourd'hui nous disons : Assez ! Nous ne pouvons pas examiner la réforme de l'immigration sans aller à la source des problèmes de l'immigration. Nous ne pouvons pas parler de brutalité policière ou du complexe carcéral industriel aux États-Unis sans parler de leur raison d'être. La violence d'État est utilisée pour exercer un contrôle sur nos communautés pour maintenir en place un système raciste et exploiteur. »

Les demandes de Convergence à la frontière sont :

- Que fin soit mise aux interventions militaires, économiques et politiques des États-Unis qui ont des effets destructeurs dans les Amériques.

- La démilitarisation des frontières. Nous devons construire des ponts avec nos voisins, pas des murs.

- Le démantèlement des systèmes racistes et sexistes qui volent, criminalisent et tuent des migrants, des réfugiés, des autochtones, des transgenres, des gens de couleur et d'autres dans toute l'hémisphère.

- Le respect, la dignité, la justice et l'autodétermination pour toutes les communautés, surtout les pauvres et les plus vulnérables.

- Les profits ne voient plus passer avant les êtres humains ! Les entreprises militaires, carcérales, pétrolières et minières privées ne doivent pas décider de notre avenir et de celui de la terre. Ce sont les peuples qui doivent être souverains.

LML reproduit ci-dessous le rapport sur la convergence de cette année.

Vendredi 7 octobre


Rassemblement devant le Centre de détention Eloy le 7 octobre 2016

Des centaines de migrants, d'étudiants, de membres de communautés religieuses, d'anciens combattants et de défenseurs des droits humains se sont rassemblés devant le centre de détention Eloy en Arizona pour demander la libération de migrants incarcérés, justice pour tous et que les entreprises privées cessent de faire des profits de la souffrance humaine.

Les intervenants ont parlé du lien entre la militarisation étasunienne en Amérique latine et la migration forcée aux États-Unis et ont décrit les horreurs vécues dans les centres de détention comme celui d'Eloy, géré à profit par l'entreprise privée Corrections Corporation America.

Ceux qui refusent de changer ces lois « permettent que des enfants meurent dans des endroits comme Eloy », a dit Berta Avila, qui a été détenue pendant qu'elle était enceinte et qui a perdu son enfant parce qu'on lui a refusé les soins nécessaires.

Après un spectacle émouvant de chants de résistance, au coucher du soleil, la foule s'est déplacée en direction du centre de détention avec des chandelles et des instruments de musique. Des détenus qui s'étaient organisés à l'intérieur du centre ont salué les manifestants avec des bouts de linge à la fenêtre et en fermant et rallumant les lumières de leur cellule, tandis que la foule à l'extérieur créait un mur de son avec des chants, des tambours et des slogans.

À Nogales, qui est séparée de Sonora par la frontière, des gens en provenance de tous les coins des Amériques se sont rassemblés. Les prestations de Deported Veterans, du groupe de danse Abya Ayala, de Las Patronas, Mesoamerican Migrant Movement, Brothers on the Road, Broder Patrol Victims Network et des groupes de résistance des communautés frontalières ont démontré que la guerre n'a pas séparé toutes nos luttes.

« La frontière est une plaie béante que nous pourrons guérir avec l'aide de tout le monde. Les activités comme celle-ci nous rappellent que nous sommes plus qu'une région, nous sommes un peuple, blessé mais non vaincu. Nous sommes un peuple meurtri mais honorable », a dit Ana Enamorado, du Mesoamerican Migrant Movement, qui s'est engagée dans cette lutte après la disparition de son fils, le citoyen hondurien Oscar Antonio Lopez Enamorado, au Mexique en 2010.

Samedi 8 octobre

Des marches parallèles, menées par des anciens combattants, ont eu lieu des deux côtés de la frontière entre les États-Unis et le Mexique, suivies d'un rassemblement où musiciens et orateurs ont fait le lien au-delà du haut mur.

Shena Tutierrez, de Border Victims Network, a parlé de la lutte pour exiger des comptes des agents des douanes et de la sécurité frontalière. En 2011, son mari, José Gutierrez, a été battu violemment par des agents des douanes près d'un port d'entrée dans le sud de l'Arizona. Depuis cette tragédie, à laquelle son mari a survécu, Shena est devenue la porte-parole des communautés frontalières et des victimes des patrouilleurs. Elle inspire les gens de ces communautés et les éduque à propos de leurs droits.

Toute la journée de samedi, à Tucson, l'organisation Frente X for International Liberation a tenu des ateliers et une plénière et des rencontres de dénonciation par des gens de couleur pour réinventer la solidarité mutuelle contre la violence sanctionnée par l'État, pour réclamer la justice pour les races et pour les sexes. La rencontre est une occasion unique pour les gens directement touchés par la violence de l'État aux États-Unis, en Amérique latine et ailleurs dans le monde pour apprendre les uns des autres et pour bâtir des réseaux de solidarité transnationale et interraciale. L'obligation morale de rendre ces rencontres accessibles aux familles non documentées a mené à la création de l'espace pour personnes de couleur à Tucson, où il n'est pas nécessaire de passer par des points de contrôle.


Atelier à Nogales le 8 octobre 2016

Le leader de Puente, Carlos Garcia, a fait un discours touchant sur la guerre d'attrition des migrants et des gens de couleur en Arizona. Il a expliqué le contexte de la crise en Arizona. « Les territoires sur lesquels nous nous trouvons sont des territoires O'odham, des territoires Yaqui, a-t-il dit. Ils étaient et sont toujours des territoires autochtones. » Il a retracé l'origine des lois et politiques anti-immigrants depuis la mise en oeuvre de l'Accord de libre-échange d'Amérique du Nord (ALÉNA) en 1994 et de la montée parallèle du mouvement de résistance qui a donné naissance au mouvement Puente, devenu une force considérable qui a réussi à faire échouer 12 des 13 nouveaux projets de loi anti-immigrants.

« Nous levons le poing et résistons, mais nous avons aussi la main tendue pour faire contrepoids à cette attrition. Lorsque l'État essaie de rendre la vie si difficile que nous options nous-mêmes pour la déportation, que pouvons-nous faire pour être là les uns pour les autres ? Nous avons nos programmes, nous essayons d'établir des programmes de santé, des programmes communautaires, des ateliers pour éduquer les gens sur leurs droits, tout ce qui peut aider nos gens à se sentir qu'ils n'ont pas besoin d'opter pour la déportation. Nous empêchons nos gens de se faire arrêter et mettre en cage, nous essayons de les sortir de ces cages, et nous faisons en sorte qu'ils soient plus forts et mieux organisés et qu'ils ne quittent pas. »

Samedi après-midi, nous avons également participé à une vigile anniversaire en l'honneur de José Antonio Elena Rodríguez à Nogales, Sonora : nous avons d'abord marché de la Plaza de las Palomas à Nogalez, Sonora, vers le site où Jose Antonio a été tué par les forces des Patrouilles frontalières et assisté à une messe avec l'évêque de Nogales. Nous avons tenu une cérémonie interreligieuse au mur frontalier et une vigile aux chandelles, suivies d'un concert transfrontalier stimulant mettant en vedette Charlie King, Colleen Kattau, Emma's revolution, Natalia Serna La Muna, Olmeca, Pablo Peregrina, the Peace Poets, et Son Jarocho.

Dimanche 9 octobre


Convergence au mur frontalier, 9 octobre 2016

Nous avons commémoré au mur frontalier ceux qui ont perdu la vie à cause de la violence de l'État avec les traditionnels SOA Watch ¡No Más ! No More ! & Presentes.

Parmi les orateurs on comptait Shannon Rivers, une membre de la tribu Akimel O'odham ; Padre Prisciliano Peraza, coordonnateur du refuge pour migrants Centro Comunitario de Atención al Migrante y Necesitado (CCAMYN)] à Altar, Sonora ; Carlotta Wrey, membre fondatrice de People Helping People d'Arivaca ; Hector Aristizabal, militant colombien des droits humains et survivant de la torture ; Mariela Nájera Romero et Uriel Gamaliel Guzmán, de Las Patronas ; Marleny Reyes Castillo, Maria Guadalupe Guereca Betancourt et Araceli ; Carlos Garcia, Puente ; Frier Tomás González Castillo coordonnateur de La 72, Hogar Refugio para Personas migrantes y refugiadas, à Tenosique, Tanasco ; George Paz Martin, militant de la paix, de la justice et du climat et éducateur. Il y a eu des performances musicales offertes par Francisco Herrera, Natalia Serna La Muna, Gabino Palomares et d'autres artistes.

Suite à la cérémonie au mur frontalier, plus de 200 militants dont le père Roy ont poursuivi leur manifestation avec une marche vers le point de contrôle frontalier étasunien sur l'autoroute I-19 highway, 20 minutes au nord de Nogales. Contestant la légitimité de ces points de contrôle où se produisent des violations systématiques de droits humains envers les résidents de l'Arizona et qui sont directement responsables de la mort de plus de 3000 personnes forcées de traverser le désert pour les éviter, nous avons brandi l'Article 13 de la Déclaration universelle des droits de l'homme qui garantit la liberté de mouvement à tous les êtres humains de même que le droit de quitter et le droit de retour dans son pays. Déclarant que « nous nous souvenons de tous ceux qui sont tués par ces points de contrôle, nous communions avec leur esprit, ils sont toujours avec nous », nous avons tenu un die-in non violent. Cliquez ici pour visionner les extraits vidéos de l'action.

Lundi 10 octobre

Nous nous sommes joints à la fête de quartier qui était organisée par la Journée des peuples autochtones 2016 au Centre mondial de la justice à Tucson en Arizona.

Notre rassemblement de fin de semaine a renforcé la solidarité et la réalisation que nous allons changer ce système raciste de violence et de domination.

(Photos : School of the Americas Watch, S. Pavey)

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Guerre criminelle contre le Yémen

Les États-Unis coupables de crimes de guerre


Manifestations au Yémen le 9 octobre 2016 contre les frappes aériennes saoudiennes sur des funérailles à Sana

Les États-Unis financent militairement et appuient politiquement les frappes brutales et répétées de l'Arabie saoudite contre le Yémen et continuent leurs attaques illégales par drone dans ce pays. Si les actions appuyées par les États-Unis sont menées par l'Arabie saoudite, les États-Unis demeurent les principaux responsables des frappes à répétition qui ont détruit des écoles, des hôpitaux, des usines pharmaceutiques, des secteurs résidentiels, et plus récemment, un salon funéraire où s'entassaient des personnes en deuil et où 140 personnes ont été tuées et plusieurs autres blessées. Ce sont là des crimes de guerre, organisés et appuyés politiquement par les États-Unis sans qui l'Arabie saoudite ne pourrait continuer d'intervenir, ce qui fait des États-Unis les plus grands criminels de guerre.

Les États-Unis fournissent à l'Arabie saoudite des milliards $ en fonds de guerre. Sous l'administration Obama, les États-Unis ont fait plus de 115 milliards $ en ventes d'armes aux Saoudiens et prévoient maintenant en ajouter un autre 1,15 milliard $. Cela comprend des armes de toutes sortes, des hélicoptères de combat, des navires de guerre et des bombes. Les États-Unis aident également l'Arabie saoudite au niveau du ciblage, de la surveillance et du ravitaillement en vol des bombardiers saoudiens fabriqués aux États-Unis afin que les attaques puissent se poursuivre sans interruption.


Dévastation causée par les frappes aériennes saoudiennes le 8 octobre 2016

De plus, en raison du blocus appuyé par les États-Unis contre le Yémen, des aliments et des produits médicinaux de base n'entrent pas au pays, affectant en particulier les femmes et les enfants. Plus de 1,5 million d'enfants souffrent de malnutrition dont 370 000 de malnutrition aiguë. Près de 80 % des approvisionnements alimentaires au Yémen sont importés et le blocus empêche une grande partie de ces produits d'arriver au pays. Sur une population de près de 26 millions de Yéménites, 21,2 millions, soit 82 % de la population, sont maintenant dépendants de l'aide humanitaire, qui souvent ne se rend pas au pays, et 14,4 millions de personnes souffrent de manque de nourriture.

Les États-Unis sont criminellement responsables de la mort et de la destruction qui s'abattent sur le Yémen. Tout financement et tout appui politique doivent cesser immédiatement.


Manifestation de Code Pink devant l'ambassade saoudienne à Washington, DC, le 23 août 2016

Les États-Unis cherchent à maintenir en place un gouvernement de leur choix tandis qu'ils empêchent le peuple du Yémen de prendre lui-même ses décisions. Les Yéménites ont une riche histoire de lutte pour leurs droits et d'organisation pour décider eux-mêmes de la voie à suivre. Par exemple, ils ont construit la République démocratique populaire du Yémen dans la partie sud du pays de 1969 à 1990. La lutte qui se mène actuellement a moins à voir avec les conflits religieux, comme on le prétend généralement, qu'avec les efforts déployés par le peuple du Yémen pour s'organiser, libre de toute ingérence étrangère et libre de décider de ses propres affaires. Ce sont les États-Unis qui tentent d'inciter des conflits religieux et de diviser le peuple comme ils l'ont fait en Irak, en Afghanistan et en Syrie. Ces efforts ne servent que les intérêts des États-Unis et de leur empire mondial et non ceux des Yéménites.

Voice of Revolution condamne les crimes des États-Unis et de l'Arabie saoudite contre le Yémen et exige que cesse immédiatement tout financement et appui accordés au régime et que toutes les troupes et les armes américaines soient retirées du Yémen et de tout le Moyen-Orient.

* Voice of Revolution est la publication de l'Organisation marxiste-léniniste des États-Unis

Note de LML

Depuis que Justin Trudeau est à la tête du gouvernement du Canada, il a approuvé une vente de 11,8 milliards $ de véhicules blindés à l'Arabie saoudite. Le Canada est ainsi devenu le deuxième plus important pays vendeur d'armes au Moyen-Orient en 2015, après les États-Unis. Ces véhicules blindés servent à l'Arabie saoudite dans ses attaques meurtrières contre le Yémen.

(Photos: Xinhua, Code Pink)

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On cache le rôle des États-Unis dans le massacre au Yémen pour que le bombardement soit présenté comme de l' « autodéfense »


Manifestations antiguerre au Yémen le 9 octobre 2016 suite aux frappes aériennes saoudiennes sur des funérailles

À en croire les grands médias américains, les États-Unis ont été entraînés dans une toute nouvelle guerre mercredi [12 octobre].

Des destroyers américains dans le golfe d'Aden ont lancé des missiles contre les rebelles houthis, un groupe insurgé chiite subissant présentement une vaste campagne de bombardement par une coalition menée par l'Arabie saoudite dans le conflit qui dure depuis un an et demi entre les rebelles largement chiites et le gouvernement sunnite appuyé par l'Arabie saoudite au Yémen. Le Pentagone a affirmé que des missiles de croisière ont été lancés contre le USS Mason dimanche [9 octobre] et mercredi [12 octobre] en provenance du territoire contrôlé par les Houthis et il a qualifié la réplique américaine de réponse « limitée d'autodéfense ».

Il va sans dire que les médias américains ont suivi la ligne du Pentagone. Le fait que les États-Unis ont littéralement fourni le carburant des avions de guerre saoudiens pendant 18 mois, tout en vendant des armes et fournissant des renseignements à la monarchie du Golfe, des gestes que même le Département d'État américain estime susceptibles d'exposer les États-Unis à des poursuites pour crimes de guerre, a été minimisé ou ignoré. Les médias n'ont pas non plus rappelé la longue histoire de guerre des drones des États-Unis au Yémen, où l'armée et la CIA ont mené des assassinats perpétrés à longue distance depuis 2002, tuant plus de 500 personnes dont au moins 65 civils.

Jusqu'à présent, la plupart des reportages des médias imprimés ont au moins pris la peine de placer l'attaque et la contre-attaque dans un contexte plus large, notant le rôle des États-Unis dans la campagne brutale de bombardement qui a fait plus de 4 000 morts, dont plus de 140 lors de funérailles à Sanaa la semaine dernière, bien que les articles aient minimisé l'histoire de la participation américaine à ce conflit. Le New York Times (12 octobre 2016), par exemple, écrit dans le second paragraphe de son reportage sur les frappes aériennes (notre souligné) :

« Les frappes contre les rebelles houthis ont été la première intervention militaire des États-Unis dans la guerre civile entre les Houthis, un groupe chiite indigène ayant de vagues liens avec l'Iran, et le gouvernement yéménite, qui est soutenu par l'Arabie saoudite et d'autres nations sunnites. »

L'article du Times cependant en vient à reconnaître, de manière quelque peu contradictoire, que les États-Unis ont « fourni discrètement un soutien militaire à une campagne de bombardement dirigée par l'Arabie saoudite contre les rebelles depuis l'année dernière ». L'article note que les États-Unis ont « fourni des renseignements et des avions citernes de l'Air Force pour ravitailler les avions à réaction et les bombardiers de la coalition. L'armée américaine a ravitaillé plus de 5 700 avions mobilisés dans la campagne de bombardement... Plus de 4 000 civils ont été tués depuis le début des bombardements, selon le représentant aux droits humains des Nations unies. »

Les reportages télévisés, en revanche, ont gardé le message officiel et omis le contexte. Ils ont surtout omis de mentionner que les États-Unis secondent l'assaut saoudien contre les rebelles houthis depuis un an et demi, et ont dépeint l'incident comme une attaque contre un navire de guerre américain qui se trouvait simplement là dans les eaux internationales.

David Martin du réseau CBS, tout frais sorti de sa publicité de 14 minutes du Pentagone [en septembre], n'a pas mentionné la campagne saoudienne de bombardement ou expliqué le rôle des États-Unis dans la guerre dans son segment pour le This Morning de CBS (13 octobre 2016). En fait, Martin n'a jamais prononcé les mots « Arabie saoudite » ou nommé aucun des autres pays engagés au Yémen, notant seulement que les rebelles « tentent de renverser le gouvernement ». Le téléspectateur moyen pourrait penser que le navire de la marine américaine se trouvait là par hasard dans les environs lorsqu'on a fait feu sur lui par hasard également.

Martha Raddatz d'ABC (Good Morning America, le 13 octobre 2016) n'a pas elle non plus dit au téléspectateur que les États-Unis interviennent dans la guerre civile depuis 18 mois. Elle non plus n'a jamais prononcé les mots « Arabie saoudite » ou fait référence à la campagne brutale de bombardement ; elle a à peine fait allusion à l'existence d'un conflit.

Barbara Starr de CNN (CNN, 13 octobre 2016) s'est jointe au club en omettant entièrement le rôle des États-Unis et de l'Arabie saoudite dans le conflit. Elle est même allée plus loin en spéculant à maintes reprises sur l'implication iranienne « directe » dans l'attaque contre le Mason et les conséquences que cela aurait, bien qu'il n'y ait aucune preuve et aucune suggestion de la part du Pentagone d'une participation iranienne. Starr a même associé Al-Qaïda et l'Iran bien qu'ils soient dans des coins opposés dans ce conflit :

« Les missiles yéménites étaient plutôt vieux mais ils ont été équipés d'ogives hautement létales, du genre qu' Al-Qaïda et l'Iran savent fabriquer. »

La suggestion était qu' Al-Qaïda aurait pu d'une manière ou d'une autre fournir des missiles aux rebelles houthis, mais cela bien sûr est absurde : les Houthis et Al-Qaïda sont des ennemis sectaires qui se combattent l'un l'autre dans cette guerre civile. Peu importe, Starr avait besoin de hausser les enchères et d'agiter autant d'épouvantails qu'elle le pouvait.

Rachel Maddow de MSNBC (13 octobre 2016), a été la pire de tous. Non seulement a-t-elle elle aussi omis de mentionner la campagne de bombardement de l'Arabie saoudite et le rôle des États-Unis (laissant le téléspectateur croire que l'attaque ne suivait aucune logique), elle a tourné l'affaire en une question partisane déplacée, rappelant que Trump avait promis d'attaquer les navires de guerre iraniens qui menaceraient les États-Unis :

« Vous vous rappelez peut-être que le candidat républicain Donald Trump avait fait un bref commentaire durant la campagne à l'effet que nous allions faire sauter les navires iraniens qui s'approcheraient trop près des navires américains et dont les marins feraient des gestes grossiers envers nos marins américains. Et bien, les navires iraniens et américains sont en ce moment dans les mêmes eaux, au large des côtes du Yémen au milieu d'une guerre, avec des missiles Tomahawk et des missiles de croisière déjà en action. Prêts à tout. »

Que font les navires américains dans ces eaux ? Pourquoi les missiles Tomahawk sont-ils « en action » ? Le conflit n'est jamais expliqué : il est invoqué seulement pour que Maddow puisse avertir que le candidat du Parti républicain pourrait empirer les choses. Bien sûr, ce n'est pas Trump qui a soutenu les Saoudiens dans une campagne aérienne qui a fait des milliers de morts mais Obama, et c'est Hillary Clinton qui, en tant que secrétaire d'État, a demandé avec enthousiasme qu'on vende des avions de guerre à Riyad ( The Intercept , 22 février 2016). Ces faits cependant viendraient perturber la narration qui est faite de la campagne électorale.

Maddow, comme d'autres, a utilisé l'expression hautement chargée « soutenus par l'Iran » pour décrire les Houthis (bien que les experts et les fonctionnaires du Pentagone pensent que le soutien de l'Iran est surestimé). Il s'agit d'une asymétrie brutale, compte tenu du fait qu'aucun des rapports n'a dit que le gouvernement yéménite était « soutenu par les États-Unis » ou « soutenu par l'Arabie saoudite ». Elle a dit également que la marine a attribué l'attaque aux Houthis, alors que le Pentagone a seulement dit que les missiles provenaient du territoire rebelle et auraient bien pu être lancés par d'autres groupes alliés (New York Times , 13 octobre 2016).

Non seulement l'appui des États-Unis à l'Arabie saoudite est totalement absent de ces reportages, mais les mots « Arabie saoudite » le sont aussi. Le téléspectateur a l'impression que la guerre, mis à part l'ingérence iranienne, est une affaire entièrement intérieure, alors que plus de 15 pays y sont engagés, principalement des monarchies sunnites appuyant le gouvernement yéménite et que les rebelles ont décidé tout à coup de s'en prendre à la plus grande armée de l'histoire mondiale.

Les Houthis, pour leur part, ont démenti avec véhémence avoir perpétré l'attaque contre le Mason, et il n'existe aucune preuve que c'était eux ou des forces alliées. Il faut toutefois noter que les forces houthies ont reconnu avoir coulé un navire d'approvisionnement des Émirats arabes unis il y a deux semaines.

Comme c'est souvent le cas avec la guerre, la question du « premier sang versé », ou qui a commencé le combat, devient embourbée. Les gouvernements veulent naturellement que les auditoires mondiaux et leurs propres citoyens voient leurs actions comme étant défensives, une réponse nécessaire à une agression, pas l'agression elle-même. Les grands médias américains contribuent à cette manipulation officielle avec leur reportage sur le bombardement américain du Yémen.

Adam Johnson est un analyste collaborateur pour FAIR.org.

(14 octobre 2016. Photos/graphics: Xinhua, C. Latuff)

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Les États-Unis et le Royaume-Uni continuent de participer activement aux crimes de guerre saoudiens, ciblant les civils yéménites

Depuis le début de la terrible campagne de bombardement saoudien menée contre le Yémen il y a 18 mois, deux pays ont joué un rôle actif et clé pour permettre le carnage : les États-Unis et le Royaume-Uni. Les atrocités commises par les Saoudiens auraient été impossibles sans leur appui indéfectible et agressif.

L'administration Obama « a offert de vendre 115 milliards $ d'armes à l'Arabie saoudite au cours de ses huit années de mandat, plus que toute autre administration américaine », a rapporté cette semaine The Guardian et elle fournit également une technologie de surveillance étendue. Comme l'a démontré en avril The Intercept, « Durant ses cinq premières années comme président, Obama a vendu 30 milliards $ de plus en armes que le président Bush pendant ses huit années comme commandant en chef.


Protest at Farnborough Air Show in England, July 13, 2016

Il est important de souligner que selon le ministre saoudien des Affaires étrangères, bien que ce soient les Saoudiens qui ont l'autorité ultime quand il s'agit de choisir les cibles, « des militaires britanniques et américains sont au centre de commandement et de contrôle des attaques aériennes saoudiennes contre le Yémen » et « ont accès aux listes des cibles ». En somme, alors que cette campagne de bombardement est invariablement décrite par les médias occidentaux comme étant « dirigée par l'Arabie Saoudite », les États-Unis et le Royaume-Uni en sont des participants essentiels et indispensables. Comme l'a mentionné un éditorial du mois d'août du New York Times  : « Les États-Unis sont complices de ce carnage », et le Guardian a écrit que « la Grande-Bretagne est largement responsable de ces souffrances ».

Dès le début, les Saoudiens soutenus par les États-Unis et le Royaume-Uni ont bombardé des civils à l'aveugle et parfois délibérément, tuant des milliers de personnes innocentes. Du Yémen, Iona Craig et Alex Potter ont fait de nombreux reportages pour The Intercept sur cette campagne de bombardement qui a entraîné la mort de nombreux civils. Alors que les Saoudiens ont continué à tuer et à bombarder intentionnellement des civils, les armes américaines et britanniques ont continué d'arriver à Riyad, ce qui a assuré la poursuite de ce massacre. De temps en temps, lorsque des meurtres particulièrement horribles commis massivement font surface dans les nouvelles, Obama et différents fonctionnaires britanniques sont forcés de publier des déclarations laconiques exprimant « une inquiétude », avant de recommencer à alimenter les attaques.

Cette fin de semaine, alors que l'attention américaine était consacrée presqu' exclusivement à Donald Trump, l'un des massacres les plus révoltants s'est produit. Le samedi [8 octobre], des avions de guerre ont attaqué un rassemblement funéraire à Sanaa, bombardant à plusieurs reprises la salle où il se tenait, tuant plus de 100 personnes et en blessant plus de 500.

Les officiels saoudiens ont d'abord menti en essayant de blâmer « d'autres causes », mais ils ont dû se rétracter depuis. La prochaine fois que quelqu'un qui s'identifie au monde musulman attaque des citoyens américains ou britanniques et que les voix politiques les plus importantes de ces pays répondent à la question « pourquoi, pourquoi nous haïssent-ils ? » en rassurant tout le monde qu' « ils nous haïssent pour nos libertés », ce sera instructif de visionner cette vidéo.

La Maison-Blanche de Barack Obama, par l'intermédiaire de son porte-parole Ned Price, a condamné ce qu'il a appelé « la série troublante d'attaques qui ont ciblé des civils yéménites », des attaques, a-t-il omis de dire, qui ont été appuyées à plusieurs reprises par la Maison-Blanche, et il a ajouté sans conviction que « la coopération en matière de sécurité avec l'Arabie saoudite n'est pas un chèque en blanc ». Pourtant, c'en est bien un. Les 18 mois de bombardements appuyés par les États-Unis et le Royaume-Uni ont, comme l'a dit ce matin le New York Times , « largement échoué, alors que les rapports de décès de civils sont devenus monnaie courante et qu'une grande partie du pays est au bord de la famine ».

Depuis le début, on sait que la campagne de bombardement saoudienne a été systématique et brutale, ce qui n'a pas empêché Obama et le gouvernement des États-Unis de continuer à y jouer un rôle central. Un rapport des Nations unies obtenu en janvier par The Guardian « a témoigné des attaques généralisées et systématiques contre des cibles civiles en violation du droit international humanitaire » ; le rapport a conclu que « la coalition avait mené des attaques aériennes visant des civils et des biens civils, en violation du droit international humanitaire, attaquant notamment des camps de personnes et de réfugiés déplacés dans le pays, des rassemblements de civils dont des mariages, des véhicules civils dont des autobus, des zones résidentielles civiles, des installations médicales, des écoles, des mosquées, des marchés, des usines et des entrepôts alimentaires, de même que d'autres infrastructures civiles essentielles ».

Mais ce qui n'était pas connu, jusqu'à ce que ce soit dévoilé dans un excellent rapport de Reuters écrit par Warren Strobel et Jonathan Landay [en date du 10 octobre], c'est qu'Obama a été explicitement averti non seulement que les Saoudiens commettaient des crimes de guerre, mais que les États-Unis eux-mêmes pouvaient être légalement considérés comme leurs complices :

« L'année dernière, selon des documents gouvernementaux et des compte-rendus d'anciens et de récents fonctionnaires, l'administration Obama a procédé à une vente d'armes de 1,3 milliard $ à l'Arabie saoudite malgré les avertissements de certains responsables à l'effet que les États-Unis pourraient être impliqués dans des crimes de guerre pour leur appui à une campagne aérienne dirigée par les Saoudiens au Yémen qui a tué des milliers de civils.

« Les fonctionnaires du Département d'État étaient également sceptiques quant à la capacité des Saoudiens de cibler les militants houthis sans tuer des civils et détruire ' les infrastructures essentielles ' nécessaires au Yémen pour reprendre des activités normales, selon les courriels et d'autres documents obtenus par Reuters et les entrevues faites avec une douzaine de fonctionnaires ayant eu vent de ces discussions. »

Autrement dit, le Prix Nobel de la paix 2009 a été explicitement informé qu'il pourrait être un collaborateur des crimes de guerre en fournissant des armes aux organisateurs d'une campagne qui cible délibérément les civils et en continuant à leur fournir des quantités record d'armes pour les aider à poursuivre leurs desseins. Rien de tout cela ne devrait être surprenant : il serait difficile pour Obama de condamner les frappes faites selon la technique « des deux coups » du genre que les Saoudiens ont perpétrées, une technique où les premiers intervenants ou les personnes en deuil sont ciblés, étant donné qu'il a lui-même utilisé cette tactique, couramment décrite comme un trait saillant du « terrorisme ». De leur côté, les Britanniques ont bloqué les enquêtes de l'UE sur la question de savoir si des crimes de guerre étaient commis au Yémen, alors que les principaux parlementaires ont bloqué des rapports prouvant que des armes britanniques étaient utilisées pour commettre des crimes de guerre et pour cibler délibérément des civils.

Les États-Unis et le Royaume-Uni sont les deux principaux pays quand il s'agit d'exploiter cyniquement les droits humains et les lois de la guerre pour attaquer leurs adversaires. Eux et leurs principaux chroniqueurs aiment prononcer de jolis discours intéressés sur la façon dont les autres nations, ces primitifs et ces méchants, ciblent des civils et commettent des crimes de guerre. Pourtant, ils soutiennent fermement tous les deux l'un des régimes les plus brutaux et les plus répressifs de la planète en l'armant jusqu'aux dents sachant très bien qu'ils permettent des massacres qui ciblent des civils de façon brutale et souvent délibérément.

Ces 18 mois d'atrocités ont à peine été mentionnés pendant les élections américaines, en dépit du rôle clé qu'a joué la principale candidate, Hillary Clinton, pour armer les Saoudiens, sans parler des millions de dollars que la fondation familiale a reçus de son régime (son adversaire, Donald Trump, a à peine prononcé un mot sur la question et lui-même a reçu des millions en profits provenant de divers oligarques saoudiens).

Une des raisons pour lesquelles les élites politiques et médiatiques américaines et britanniques aiment condamner avec éloquence la brutalité des ennemis de leur propre gouvernement c'est que cela fait la promotion de visées tribales et nationalistes : c'est une stratégie pour affaiblir les adversaires tout en renforçant leurs propres gouvernements. Mais un motif tout aussi important c'est que proférer ces condamnations détourne l'attention de leurs propres crimes de guerre et de leurs massacres, ceux là-mêmes qu'ils permettent et qu'ils appuient.

Certaines pays de la planète jouissent de crédibilité pour condamner les crimes de guerre et le ciblage délibéré des civils. Les deux pays qui ont passé près de deux ans à armer l'Arabie saoudite pour le massacre continu des civils yéménites ne sont certainement pas parmi ceux-là.

(The Intercept, 10 octobre 2016. Photos: CAAT, Control Arms.)

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