Le Marxiste-Léniniste

Numéro 126 - 1er octobre 2016

La réforme électorale du gouvernement Trudeau

La réforme électorale à l'ère du système de partis de cartel

PDF

La réforme électorale du gouvernement Trudeau
La réforme électorale à l'ère du système de partis de cartel
Un semblant de «dialogue sur la réforme électorale» à Vancouver - Anne Jamieson

Lettre à la rédaction
De la Commission royale à l'assemblée publique au « téléforum
avec des résidents »


La mondialisation impérialiste et l'édification d'empire du gouvernement Trudeau
Les Canadiens ont besoin d'un projet d'édification nationale centré sur l'être humain qui défend les droits de tous et toutes
Le contrôle du commerce international - K.C. Adams

La campagne pour élire un président de guerre aux États-Unis
Il faut renforcer la lutte pour les droits et un gouvernement antiguerre!
Les élections aux États-Unis et le danger réel d'une guerre civile - Voice of Revolution


La réforme électorale du gouvernement Trudeau

La réforme électorale à l'ère du système de
partis de cartel

Le Parti marxiste-léniniste du Canada (PMLC) croit que les réformes de la loi électorale que propose le gouvernement Trudeau ne vont pas améliorer « l'accessibilité et l'inclusion », « la légitimité et l'intégrité » contrairement à ce que prétendent les libéraux. L'affirmation qu'en changeant la façon dont les votes sont comptés (en passant du scrutin majoritaire uninominal à un tour à une représentation proportionnelle ou un système de vote préférentiel) on va créer une meilleure égalité des chances pour tous les partis et pour les candidats indépendants et augmenter le taux de participation des électeurs est fausse. Ces réformes ne sont pas conçues pour résoudre le problème de faire en sorte que « chaque vote compte ». Le PMLC conclut que si l'exercice se résume à choisir une méthode de compter les votes, sans examiner les problèmes du système appelé démocratie représentative et sans leur chercher des solutions, les réformes proposées ne servent que ceux qui les proposent.

La raison en est que nous sommes à l'ère du système de partis de cartel. Parallèlement à la concentration du pouvoir économique entre les mains des quelques-uns il y a aussi concentration du pouvoir politique. Les plus hauts échelons d'un groupe sélect de partis politiques forment un cartel, lequel impose sa domination avec des méthodes mafieuses, comme les tractations de coulisses et des guerres de territoire. Les partis cartélisés se financent à même l'argent de l'État, ils s'occupent de politiser les intérêts de monopoles privés qui prennent directement le contrôle de la gouvernance et gouvernent par le biais des pouvoirs policiers, les pouvoirs arbitraires du conseil des ministres.

Les majorités parlementaires servent à réformer la loi électorale de manière à saper la théorie politique sur laquelle sont fondées les institutions de la démocratie représentative. Les partis du cartel agissent de connivence pour passer des lois qui portent impunément atteinte aux droits des électeurs et prétendent que c'est démocratique. Le seul problème qu'il reconnaissent est que ces lois et institutions ne sont pas perçues comme démocratiques ou que les députés et le gouvernement ne sont pas perçus comme représentatifs. Ils espèrent donc donner un air de légitimité au processus en changeant la façon dont les votes sont comptés. Or, à moins que la nouvelle méthode ne donne aux citoyens un plus grand contrôle sur qui est élu et ce qu'ils vont une fois élus, elle ne va qu'aggraver le problème.

Les délibérations sur la réforme des lois électorales ne tiennent pas compte de l'avènement du système de partis de cartel au Canada et des dangers que cela représente pour les institutions démocratiques. L'équilibre du système parlementaire canadien, qui consiste en l'existence d'un parti au pouvoir et d'un parti dans l'opposition, tous deux réclamant une représentation nationale, s'est effondré en 1993. Avec lui sont disparues la cohérence du système tripartite et la cohérence des partis qui le forment. Le débat sur la réforme du système électoral, ou plus précisément sur la façon de compter les votes, se fait sans tenir aucun compte de cette réalité.

Les piliers du système de démocratie représentative dominé par les partis, soit les partis politiques en tant qu'organisations primaires, sont corrodés. Les partis politiques sont censés offrir un lien entre les électeurs et la gouvernance, une structure organisationnelle pour la participation des citoyens au processus politique. Durant une élection, ils sont censés être l'instrument de l'expression de la volonté politique du peuple devant être traduite en volonté juridique dans la forme d'un gouvernement de parti. Les électeurs qui ne sont pas représentés par le parti au pouvoir sont censés être représentés par le ou les partis de l'opposition. Or, depuis le début des années 1990 on reconnaît que moins de 2 % des électeurs sont membres d'un parti politique. Ces partis politiques non représentatifs sélectionnaient les candidats aux élections, tandis qu'aujourd'hui les candidats sont de plus en plus choisis par le chef du parti. Les associations de comté n'ont plus beaucoup d'influence dans la sélection des candidats et sont de plus en plus réduites au simple rôle de recueillir des fonds.

L'ère du système de partis de cartel est également caractérisée par le financement public des partis politiques, introduit par les partis qui s'étaient déjà établis par les privilèges que la loi électorale accordait à certains et qui ont uni leurs efforts pour maintenir le peuple à l'écart. Ces partis dépendent de plus en plus des subventions de l'État et de moins en moins des membres et supporters, tant pour le soutien financier que pour le bénévolat. Ce phénomène est si avancé au Canada que les partis politiques canadiens sont souvent décrits comme des « vaisseaux vides », sans membres.

Depuis 1993, les institutions politiques du Canada ont connu une restructuration importante par une successions de réformes de la loi électorale, avec comme conséquence une plus grande concentration du pouvoir entre les mains du conseil des ministres et l'érosion des droits, devoirs et responsabilités des députés dans le processus décisionnel, sans mentionner ceux des simples citoyens et résidents. Tout cela a mis en relief le besoin d'éliminer la prérogative royale, de même que les mécanismes qui devaient à l'origine encadrer son utilisation et qui servent maintenant à l'imposer. Il faut un système qui transfère le pouvoir au peuple. C'est le peuple qui doit être investi du pouvoir souverain, pas les élites qui détiennent la prérogative royale.

Les audiences et consultations du Comité parlementaire et les assemblées publiques organisées par les députés pour faire la promotion des positions de leur parti confirment que ces réformes à la pièce sont inacceptables et ne tiennent aucun compte :

 1) des demandes et préoccupations des Canadiens qui veulent le pouvoir de décider de leurs affaires ;

 2) de la théorie politique sur laquelle est basé le système parlementaire, des conséquences des changements proposés à la lumière de cette théorie et de l'impact négatif sur le système de démocratie représentative fondé sur elle ;

 3) de la concentration accrue du pouvoir dans les mains de l'exécutif ;

 4) du besoin d'engager le corps politique dans un débat de fond sur ces questions pour que les délibérations puissent se faire dans le domaine de l'opinion publique plutôt que d'être marginalisées et dominées par les échanges partisans au parlement et dans les comités parlementaires ;

 5) du besoin de permettre aux Canadiens et Canadiennes de décider eux-mêmes du genre de changements qui doivent être apportés au processus politique et électoral.

Nous devons continuer de débattre de ces questions au-delà du cadre imposé, à savoir comment changer la façon de compter les votes, pour pouvoir tirer des conclusions significatives sur ces questions mais aussi sur tous les autres problèmes de la démocratie qui signalent un besoin de renouveau. Sans tenir compte de tous les autres facteurs de l'incohérence du système électoral et politique du Canada, aucune réforme ne favorisera le corps politique.

Il est depuis longtemps évident que le système a des problèmes graves et qu'il faut aborder ces problèmes en mettant au centre le besoin d'investir les Canadiens et les Canadiennes du pouvoir de décider, y compris décider comment réformer le système. Le bricolage actuel ne tient pas compte de ce besoin et ne fera qu'accentuer la crise d'un système qui a perdu sa cohérence et le rendre encore plus dysfonctionnel qu'il ne l'est déjà.

La nouvelle façon de compter les votes ne va pas renverser la concentration du pouvoir dans les mains des échelons supérieurs des partis politiques, elle risque peut-être même de l'accélérer. Elle va accroître l'absolutisme. Elle va davantage exclure et marginaliser les Canadiens et Canadiennes dans le processus politique et réduire encore le rôle des délibérations parlementaires dans l'adoption des lois. Elle va éliminer le besoin de bâtir une opinion publique sur les changements nécessaires pour faire avancer la société.

Tout indique que la réforme électorale et politique à la pièce n'a pas d'autre objectif que de cacher l'impact global de ces changements concernant la concentration du pouvoir.

En cette ère du système de partis de cartel, la pratique selon laquelle le parti au pouvoir institue une réforme électorale au détriment des autres partis et des candidats indépendants et au détriment de l'ensemble du corps politique ne fait qu'aggraver la crise du système. Quand cela convient au parti au pouvoir, surtout s'il est en situation majoritaire où il peut faire ce qu'il veut, rien ne l'empêche de se servir des consultations couplées de tractations secrètes pour obtenir les conclusions qu'il souhaite. Les électeurs et les simples députés seront plus marginalisés que jamais.

Haut de page


Un semblant de «dialogue sur la
réforme électorale» à Vancouver

Le gouvernement Trudeau organise une série de réunions publiques partout au Canada pour promouvoir de façon expéditive sa conception de réforme électorale. Tout doit être terminé avant l'annonce imminente des résultats des délibérations du Comité parlementaire sur la Réforme électorale. On donne à ces réunions le titre de « dialogues sur la réforme électorale » en dépit du fait que la question a sans doute déjà été réglée par les libéraux et les membres du comité, qui auraient passé l'été en entier à « travailler comme des acharnés pour venir à bout de cette question ».

Un de ces « dialogues » a eu lieu vendredi le 9 septembre à Vancouver, à l'hôtel Sandman. Maryam Monsef, la ministre de la Réforme démocratique, a présidé cette réunion, comme elle l'a fait ailleurs. Il régnait un climat jovial chauviniste, avec des « meneuses de claques » qui scandaient ni plus ni moins : « Tout est pour le mieux dans le meilleur des pays. Tout ce qu'il faut c'est de faire en sorte que les gens aillent voter. » Quant à madame Monsef, elle donnait l'impression d'une conférencière en motivation ou d'une animatrice de groupe dont l'air joyeux disparaît dès qu'un membre de l'auditoire s'exprime sur quoi que ce soit. Elle a déclaré d'emblée que la démocratie canadienne est « merveilleuse » et réitéré les cinq principes directeurs qui vont assurer le succès des délibérations sur la réforme électorale : « rétablir la légitimité et l'efficacité, favoriser la participation, soutenir l'accessibilité et l'inclusion, préserver l'intégrité du processus électoral ainsi que la responsabilisation des représentants locaux ».

Il y avait parmi les 300 personnes présentes un nombre considérable de supporters libéraux, dont deux députés et une vingtaine de jeunes membres enthousiastes du groupe « À l'action » (LeadNow), qui portaient tous un chandail mauve et des macarons et qui applaudissaient sur commande. Le groupe « À l'action » a fait partie de la machine électorale libérale lors des élections d'octobre 2015.

Contribuant à l'ambiance infantilisante, la ministre a demandé à tout le monde de former des petits groupes « pour apprendre à se connaître » avant de leur rappeler les questions sur lesquelles ils devaient délibérer. Voici les sujets qui devaient être discutés pendant deux minutes par chaque membre du groupe :

 1. Les différents systèmes électoraux sur « la façon de compter les votes et comment les convertir en sièges »

 2. Devrait-il y avoir un vote en ligne pour « encourager les jeunes et d'autres à aller voter ? »

 3. Le vote devrait-il être obligatoire ? (« puisque 30 % des Canadiens ont décidé de ne pas voter à l'élection de 2015 »), mesure, qui selon madame Monsef, pourrait contribuer à « consolider la démocratie, à lui redonner une santé et donner plus de légitimité au gouvernement ».

Deux autres questions portaient sur l'importance relative des « cinq principes directeurs ».

La présence d'un membre du Conseil privé a été soulignée et celui-ci a passé en revue trois différents types de processus électoraux à prendre en considération : 1. le système existant du scrutin majoritaire uninominal à un tour. 2. les systèmes dits « proportionnels » et 3. les systèmes mixtes.

Cette présentation a été suivie de délibérations durant lesquelles un secrétaire pour chaque groupe devait noter en 30 secondes les délibérations du groupe, et les groupes choisis par Monsef devaient présenter leurs résultats aux autres groupes. Les bouts de papiers sur lesquels on avait griffonné les notes ont été recueillis pour témoigner des commentaires exprimés « par l'électorat canadien » sur la question de la réforme électorale.

Entre autres, lorsque la question de la tenue d'un référendum sur les possibles changements a été soulevée, la ministre Monsef l'a esquivée en donnant son point de vue personnel à l'effet que les référendums sont « onéreux » et « sèment la discorde ».

Malgré l'ambiance de légèreté forcée, il était évident que la plupart des participants prenaient la question de la réforme électorale très au sérieux et n'appréciaient pas le côté expéditif des « consultations ». Un conseiller municipal de Vancouver (et membre du Parti vert) a déclaré : « Notre démocratie est en péril. » Plusieurs autres ont tenté tant bien que mal de ne pas se laisser museler de force. Par exemple, un des groupes, qu'on avait ignoré jusque-là, s'est fermement opposé à la question « Comment un vote obligatoire serait-il mis en oeuvre ? ». Le porte-parole du groupe a dit que les membres du groupe avaient rejeté la question parce qu'ils la trouvaient illégitime. D'ailleurs, lors d'un semblant de vote « obligatoire » précisément sur la question d'un vote obligatoire (que madame Monsef avait proposé aux participants sur un ton amusé), les gens présents ont massivement levé la main pour indiquer leur opposition à cette proposition. Certains des membres du groupe qu'on semblait tenir à l'écart ont dit qu'ils voulaient parler de la nécessité pour l'électorat d'être partie-prenante au processus électoral et que plutôt que de financer les partis politiques, le gouvernement devait financer le processus politique pour améliorer la participation des électeurs.

Tout comme les audiences sur Kinder Morgan, les consultations du gouvernement Trudeau sur la réforme électorale sont une farce. Il s'agit d'une manoeuvre de diversion pure et simple. Tout est soulevé hors contexte et on nie à quel point le processus électoral actuel est discrédité et comment il ne peut être réparé au moyen de réformes superficielles détachées des développements sociaux et politiques.


Manifestation à Victoria le 23 août 2016 pour dénoncer la consultation bidon sur le projet de pipeline Kinder Morgan

Il est inacceptable de prétendre que le gouvernement « consulte le peuple » en imposant des balises restreintes à la discussion de cette façon. On ne prévoit aucun espace pour discuter de la nécessité de renouveau démocratique ni de la nécessité de l'habilitation des citoyens pour qu'ils soient en position de décider. Il ne faudrait pas non plus, selon les libéraux, remettre en cause le système de « démocratie représentative » et la domination du processus politique par les partis de cartel. On peut donc prévoir sans trop se tromper que les libéraux majoritaires mettront de l'avant leur version préférée de « réforme électorale » (ou plutôt leur méthode préférée de compter les votes) pour secourir un processus politique périmé et légitimer un processus qui marginalise la vaste majorité des citoyens tout en concentrant le pouvoir dans le cabinet du premier ministre.

Haut de page


Lettre à la rédaction

De la Commission royale à l'assemblée publique
au « téléforum avec des résidents »

Je ne savais pas si je devais rire ou pleurer lorsque j'ai lu sur le site Web du journal local que mon député tiendra un « téléforum » d'une heure le 27 septembre de 19 h à 20 h. Et il semble vraiment croire à ses propos quand il dit : « Les résidents auront l'occasion de discuter avec monsieur Miller (député de Bruce-Grey-Owen Sound, Ontario) de la réforme électorale, incluant la question à savoir si un référendum national est requis pour changer le système de vote, les systèmes alternatifs de vote, le vote obligatoire et le vote en ligne. La discussion émanant du téléforum informera la contribution de monsieur Miller au Comité spécial sur la réforme électorale (ERRE).  » (Souligné par moi)

Selon l'article : « Les résidents recevront un appel téléphonique automatisé peu avant 19 h le 27 septembre et seront invités à rester en ligne. Ceux qui souhaitent participer n'ont qu'à rester en ligne. Ceux qui manquent l'appel mais reçoivent un message sur leur répondeur recevront des instructions sur comment participer. » J'ai attendu mon appel avec impatience mais en vain. Et pourtant j'ai une ligne terrestre ! Je me demandais si tous les résidents (population en 2006 : 105 947 ; électeurs en 2007 : 68 722 ; superficie : 6 447 km²) étaient dans le système de composition automatisé, incluant ceux qui n'utilisent que des téléphones cellulaires. Ou sommes nous tous devenus des non-personnes aux fins de notre participation à la prise de décision ?

Monsieur Miller écrit dans le journal local : « Je suis impatient d'entendre différentes préoccupations, questions et opinions sur la réforme électorale... J'ai espoir qu'un téléforum communautaire permettra la plus grande participation possible. J'espère que tous prendront le temps de participer à cette importante discussion. »

J'ai conclu que les problèmes avec lesquels notre démocratie est aux prises sont très graves quand des députés sont soit si centrés sur leurs propres intérêts qu'ils en viennent à croire leurs propres balivernes, soit marginalisés à tel point qu'ils en perdent la raison et répètent des sottises sans s'en rendre compte. Mais ce à quoi je m'objecte surtout, c'est la tentative de nous entraîner dans leur folie. Et la ministre Monsef appelle cela la meilleure démocratie au monde. Vraiment !

Une lectrice de Hanover

Haut de page


La mondialisation impérialiste et l'édification d'empire
du gouvernement Trudeau

Les Canadiens ont besoin d'un projet d'édification nationale centré sur l'être humain qui défend les droits de tous et toutes


Manifestation à London contre l'AECG le 25 septembre 2014. Les manifestants tiennent des pancartes sur lesquelles sont écrits les noms des villes canadiennes qui ont pris
position contre l'AECG.

La ministre du Commerce international Chrystia Freeland s'est rendue en Europe récemment pour faire la promotion de l'Accord économique et commercial global (AECG) que le gouvernement Trudeau essaie de faire signer le plus vite possible. En entrevue le 20 septembre au réseau de télévision de Bloomberg à Berlin, elle a présenté avec éloquence la position du gouvernement Trudeau à l'effet qu'il n'existe pas d'alternative à la mondialisation néolibérale et son accusation que quiconque n'épouse pas les programmes d'austérité des intérêts privés qui se sont emparés des institutions d'État au Canada et dans différents pays européens est un protectionniste, un élément de droite et donc un xénophobe, etc.

Les Canadiens n'ont pas besoin de faire le bilan de leur expérience du libre-échange, déclare Freeland, parce celui-ci fait de nous « une société ouverte efficace, où une classe moyenne confiante accueille favorablement les possibilités que lui offre le monde ». Dans ses remarques d'ouverture au Forum mondial de Toronto qu'elle a faites peu avant de s'envoler pour l'Europe, elle a même fait référence à Karl Marx pour convaincre l'auditoire que penser autrement serait exprimer une fausse conscience (voir les extraits de son discours ci-dessous).

« Les temps sont difficiles pour le commerce en ce moment et je pense qu'il en est de même pour l'idée d'une économie mondiale ouverte », a dit Freeland lors de son entrevue à Berlin. Elle a parlé de « la montée d'un sentiment protectionniste et anti-mondialisation parfois très hideux en Europe -- un sentiment qui s'exprime avec force dans la campagne électorale aux États-Unis ».

Près de 320 000 personnes ont manifesté dans sept villes allemandes samedi le 17 septembre pour protester contre l'AECG et l'accord de commerce proposé entre les États-Unis et l'UE, le Partenariat transatlantique de commerce et d'investissement ou PTCI.

De son côté, le premier ministre Justin Trudeau a présenté une allocution au Sommet Global Progress qui s'est tenu à Montréal les 14 et 15 septembre dans laquelle il a choisi de passer sous silence la destruction nationale que les monopoles mondiaux ont causée au Canada. Selon Justin Trudeau, la mondialisation n'a pas de signification historique, elle signifie seulement ouverture et à ce titre le Canada est un exemple de « bonne mondialisation ».

La mondialisation est liée au développement par l'humanité des forces productives. L'opposition décontextualisée à la mondialisation est semblable à l'opposition décontextualisée à la production industrielle de masse : elle passe sous silence la question de qui décide et qui contrôle -- les producteurs véritables des biens et des services agissant pour le bien-être de l'humanité et de la société, ou une classe privilégiée d'exploiteurs et d'oppresseurs impérialistes servant leurs intérêts privés étroits et leur privilège de classe.

La mondialisation impérialiste et ses projets d'édification d'empire représentent une corruption de ce qui pourrait être réellement stimulant et unificateur pour l'humanité et une façon de résoudre les problèmes sociaux et autres. Plutôt que d'unir les travailleurs par le biais du commerce mondialisé des biens et des services pour l'avantage et le développement mutuels, la mondialisation impérialiste impose la catastrophe de la concurrence, de la guerre et de l'édification d'empire sous le contrôle des monopoles et des cartels qui ne sont redevables qu'à ceux qui les possèdent et les contrôlent. Les cartels et les monopoles et ceux qui les contrôlent ont recours aux États et à leurs pouvoirs militaro-policiers pour commettre le vol et l'extorsion à l'échelle mondiale en toute impunité, fouler aux pieds les droits de tous, mettre les pays à sac et incorporer ce qui reste à leurs empires.

La mondialisation impérialiste et ses projets d'édification d'empire intensifient l'exploitation des travailleurs, pillent et arrachent les ressources naturelles du sol et des océans, spoliant l'environnement social et naturel. L'élite impérialiste au pouvoir s'engage dans des manoeuvres parasitaires irresponsables pour le profit privé par l'achat et la vente dérivés de valeur déjà produite. Elle refuse de résoudre la contradiction évidente qui a été laissée par le renversement de la petite production, soit celle entre le caractère privé de la production industrielle de masse et leur propriété et leur contrôle par une petite élite dominante, une contradiction personnifiée dans la contradiction entre la classe marchande/bourgeoise en transition, qui est devenue l'élite impérialiste dominante, et les producteurs véritables des biens et des services, soit la classe ouvrière.

L'élite impérialiste au pouvoir impose sa volonté aux composantes de l'économie qu'elle contrôle, créant un conflit constant entre les composantes et avec l'ensemble. L'élite au pouvoir et ses experts écartent du revers de la main avec une grossière indifférence les crises économiques récurrentes au moyen de phrases dogmatiques banales apprises par coeur. Elle refuse de traiter des problèmes insurmontables qui sont aggravés par la pauvreté persistante et les relations désastreuses qui sont créées parmi les peuples par la pression idéologique qui vise à maintenir le pouvoir, la domination et le privilège de classe de l'élite impérialiste. Elle fait tout ce qu'elle peut pour dépolitiser la classe ouvrière et l'empêcher de jouer son rôle central dans la vie moderne. Elle s'engage dans des guerres de pillage et inter-impérialistes constantes, dans des préparatifs de guerre et des blocs militaires sans aucun souci pour les conséquences catastrophiques qui en résultent et elle est guidée uniquement par son objectif de défendre et d'étendre sa richesse et ses empires privés.

La mondialisation centrée sur l'être humain

La mondialisation centrée sur l'être humain est la négation de la mondialisation impérialiste et l'alternative à cette mondialisation. La classe ouvrière organisée et politique est la force sociale qui peut donner naissance à la mondialisation centrée sur l'être humain et en faire une réalité. Le mouvement débute en s'opposant à la mondialisation impérialiste par des projets d'édification nationale de la classe ouvrière sur lesquels le peuple exerce son contrôle, un peuple investi de la souveraineté par le renouveau démocratique et une nouvelle direction prosociale de l'économie.

La classe ouvrière organisée et politique met de l'avant le facteur humain/conscience sociale dans la lutte pour priver l'élite impérialiste au pouvoir de son pouvoir de priver la classe ouvrière de ses droits, en particulier de son droit de s'opposer à la mondialisation impérialiste et de donner naissance à la mondialisation centrée sur l'être humain. La classe ouvrière organisée et politique met de l'avant et mène la lutte de classe pour établir ses projets d'édification nationale sous le contrôle souverain du peuple et comprenant une nouvelle direction prosociale de l'économie et des rapports de production modernes qui correspondent aux forces socialisées de la production industrielle de masse.

Cette transformation vers le nouveau complèterait la transition de la petite production vers l'ère moderne de la production industrielle de masse et la mondialisation centrée sur l'être humain sous le contrôle des producteurs véritables ; elle complèterait la transition de l'autocratie du privilège de classe vers la démocratie de masse et le contrôle des producteurs véritables sur leur vie, leur production et la société.

Il appartient à la classe ouvrière organisée et politique de prendre en main la tâche de compléter la transition vers le monde moderne de la démocratie de masse et de la mondialisation centrée sur l'être humain en menant la lutte de classe pour priver l'élite impérialiste dominante de sa mainmise sur le pouvoir, le privilège de classe, la mondialisation impérialiste et sur tout ce qui est vieux et pourrissant qui provient du pouvoir autocratique de la période précédente. En étant organisés et politiques, les travailleurs peuvent ouvrir la voie et compléter la transition vers la société moderne et ouvrir les perspectives d'un avenir radieux pour toute l'humanité.

À titre d'information - Les remarques d'ouverture de Chrystia Freeland au Forum mondial de Toronto le 12 septembre 2016

Dans son discours au Forum mondial de Toronto le 12 septembre dernier, Chrystia Freeland a mis de l'avant une nouvelle fois la conception néolibérale intéressée de la mondialisation et du commerce.

« Je pense que nous vivons aujourd'hui dans l'environnement le plus protectionniste qui ait existé au cours de ma vie, et je dirais même depuis la Deuxième Guerre mondiale. Il s'agit de tendances très importantes. Nous les voyons déjà se manifester dans le cadre d'importantes élections pas très loin de chez nous, mais aussi beaucoup en Europe. Nous avons eu le vote sur le Brexit. D'importantes élections sont à venir en Autriche, et ces thèmes y jouent un rôle significatif.

[...] Il est certainement question de protectionnisme, mais un sentiment anti-immigration et xénophobe s'y ajoute aussi souvent. Je dirais qu'il s'agit, de manière plus générale, d'une vague très puissante contre la mondialisation en général, qui pousse à chercher un coupable à blâmer.

Le premier point que je voudrais faire valoir auprès de vous tous aujourd'hui est qu'il est extrêmement important de ne pas nous méprendre sur le pouvoir des sentiments qui envahissent les pays industrialisés occidentaux. Tout cela est réel. Les plus vieux d'entre vous se souviennent peut-être qu'il a existé, dans le courant des années 1960 et 1970, une idée marxiste très populaire selon laquelle il existait une fausse conscience. Selon cette idée, si seulement les travailleurs avaient raisonné adéquatement, ils auraient su qui ils devaient soutenir.

Je pense parfois que dans de tels environnements, de tels groupes, nous pouvons tomber dans notre propre version de la fausse conscience et penser que si seulement nous pouvions mieux expliquer aux gens à quel point une société ouverte est bonne, à quel point le commerce est bénéfique et à quel point le protectionnisme est mauvais, tout irait pour le mieux ; les gens sortiraient de cette fausse conscience et soutiendraient ces choses fabuleuses que nous appuyons tous.

[...] La réalité est qu'au cours des trois dernières décennies, une période d'extraordinaire révolution technologique au cours de laquelle la mondialisation a connu un grand succès, les gens de la classe moyenne de tous les pays occidentaux industrialisés ont eu le sentiment, à juste titre, qu'ils perdaient du terrain.

[...] Ce n'est que si les gens de la classe moyenne chez nous, confiants et en sécurité sont sûrs des perspectives économiques qui s'offrent à eux et à leurs enfants que nous pourrons avoir un pays qui accueille la société ouverte et le monde.

[...] À un moment où tant de pays sont envahis de sentiments xénophobes, de protectionnisme, le Canada est en fait l'une des plus puissantes voix du monde pour la société ouverte. Nous demeurons un pays ouvert aux immigrants et à l'immigration, maintenant plus que jamais.

[...] Je pense aussi que le fait que nous soyons une société ouverte efficace, où une classe moyenne confiante accueille favorablement les possibilités que lui offre le monde, à un moment où une si grande partie du monde dit « non » au commerce et à l'économie mondiale, alors que le Canada est en position de dire « oui », peut constituer pour nous un avantage concurrentiel considérable. Je crois vraiment que nous travaillons fort pour que cette année soit historique. Nous travaillons fort pour que ce soit l'année où l'Accord économique et commercial global (AECG) entre le Canada et l'Union européenne sera signé.

Cette reine du déni nous met en garde contre le déni :

[....] il est très important de ne pas être dans le déni en ce qui concerne les critiques à l'endroit de la mondialisation.

L'une des choses les plus importantes que notre gouvernement a faites dès le début de son mandat a été d'écouter les critiques concernant l'AECG, tant au Canada qu'en Europe, et de comprendre certaines des préoccupations, certaines des préoccupations légitimes des gens, surtout concernant des domaines tels que les investissements.

Nous avons fait des changements significatifs parce que nous voulons conclure cet accord. Je crois qu'il s'agit maintenant de l'accord commercial le plus progressiste jamais établi, un accord centré sur les normes de travail et les normes environnementales. Je crois que si nous voulons progresser en matière de commerce, nous devons nous pencher sur ces questions et trouver des façons de les régler. Je pense que nous pouvons y arriver.

[...] j'ai tenu chez moi un barbecue avec de nombreux syndicalistes allemands ; et je passerai toute la semaine prochaine en Europe. Je peux vous assurer que je fais tout en mon pouvoir, tout comme le premier ministre ; il s'agit d'un moment où nous pouvons faire quelque chose de grand et d'important qui créera des emplois et des possibilités pour les Canadiens et les Européens, et qui ira même bien au-delà — nous aurons des conversations intéressantes aujourd'hui.

J'ai confiance en l'importance de l'économie mondiale, en l'ouverture et en le maintien des voies commerciales. Nous avons l'occasion de vraiment accomplir quelque chose. S'il vous plaît, aidez-moi ! Concluons cet accord.


Le contrôle du commerce international

Le contrôle du commerce international est une question controversée. Au sein des milieux officiels de l'élite dirigeante, la discussion sur le commerce international est généralement réduite au libre-échange, parfois caractérisée comme la mondialisation versus l'anti-commerce, parfois caractérisé comme l'anti-mondialisation ou le protectionnisme. Le point de vue de la classe ouvrière est rarement discuté, à savoir que le commerce est positif et bénéfique lorsqu'il est sous le contrôle des véritables producteurs et qu'il se fait sur la base de l'avantage mutuel et du développement économique général des partenaires commerciaux.

Le gouvernement libéral de Justin Trudeau se place carrément dans le camp du libre-échange et dénonce tous les détracteurs comme des protectionnistes qui sont opposés à la mondialisation et au développement économique. Les libéraux font la promotion autant de l'Accord économique et commercial global (AECG) pour le libre-échange entre le Canada et l'Union européenne que du Partenariat transpacifique (TPP), qui comprend les États-Unis, le Japon, le Canada et neuf autres pays côtiers du Pacifique, mais pas la Chine.

L'utilisation de l'expression libre-échange est fantaisiste car cela signifie en pratique que le commerce international au sein des accords de libre-échange est destiné à être libre de la réglementation, des normes et de la surveillance gouvernementales. Ceux engagés dans les échanges, généralement les plus grands monopoles mondiaux, sont libres d'agir de manière à faire profiter leurs intérêts privés tout en pouvant nuire à l'intérêt public et aux économies concernées. L'intérêt public représenté par une autorité publique n'est pas libre d'agir, de réglementer ou de restreindre les activités commerciales des monopoles et ce manque de liberté est la liberté que les monopoles cherchent à acquérir, surtout par le biais des accords de libre-échange.

La ministre du Commerce international du gouvernement libéral Chrystia Freeland, lors d'une allocution donnée le 12 septembre au Forum mondial de Toronto, a dit : « Nous travaillons fort pour que ce soit l'année où l'Accord économique et commercial global (AECG) entre le Canada et l'Union européenne sera signé... à un moment où une si grande partie du monde dit 'non' au commerce et à l'économie mondiale, alors que le Canada est en position de dire 'oui' . »

Freeland caractérise l'opposition à l'AECG comme une opposition au commerce, au développement et à la mondialisation. En rapportant ses commentaires, Reuters écrit : « [l'AECG] fait face à l'opposition de l'Autriche et des groupes anti-mondialisation, et risque d'être pris dans une réaction du public en Occident de plus en plus opposé au libre-échange et à la mondialisation, dont les critiques reprochent les fermetures d'usines, la diminution des salaires et l'écart grandissant entre les riches et pauvres. »

Reprenant ce thème, Reuters rapporte que Freeland a dit : « Lorsqu'on pense à l'environnement protectionniste dans le monde dont nous avons parlé, si nous arrivons à conclure l'AECG, il sera extrêmement important pour le Canada ; ce sera un avantage concurrentiel énorme, et un message très puissant au monde entier. »

Le gouvernement libéral et les médias présentent deux camps : le libre-échange versus le protectionnisme ; la mondialisation versus l'anti-mondialisation. Mais la vie même présente une réalité tout à fait différente. La mondialisation est une réalité de la vie moderne et ne disparaîtra pas, tout comme la grande production industrielle est un fait de la vie et ne disparaîtra pas. Le problème n'est pas la mondialisation ou la grande production industrielle, mais qui contrôle la mondialisation, qui contrôle le commerce international et la grande production industrielle.

Les impérialistes américains utilisent le commerce international pour limiter la capacité des autres à participer au commerce. Pour ce faire, ils font appel au boycottage, aux embargos et au contrôle des organisations internationales qui gèrent le commerce et la finance, telles que l'Organisation mondiale du commerce, le Fonds monétaire international et la Banque des règlements internationaux. Ils utilisent tous les moyens, y compris leurs armées, pour imposer des échanges inégaux entre les partenaires commerciaux et exclure certains pays des échanges internationaux tels que Cuba, l'Iran, la République populaire démocratique de Corée et même aujourd'hui la Russie. Ils utilisent leur contrôle des prix et l'offre de produits clés tels que le pétrole pour exercer une énorme pression sur les autres pays et les soumettre à leur diktat. Ils envoient des agents dans d'autres pays pour instiguer un changement de régime si ce régime n'accepte pas les termes de l'échange au sein du système impérialiste des États qu'ils dominent.

L'ensemble du continent africain a été une zone de libre-échange pour les monopoles mondiaux les plus puissants, leurs machines d'État et leur édification d'empire pendant toute l'ère moderne. S'il y a affrontement entre eux sur la mondialisation et le libre-échange dans la nouvelle ruée vers l'Afrique, il est uniquement à savoir laquelle des puissances impérialistes aura le contrôle de quelle région.

Le mouvement de la classe ouvrière a son propre point de vue sur la mondialisation et le commerce international, qui est similaire à celui sur l'économie en général et qui gravite autour des questions de « Qui décide ? » et « Qui contrôle ? ». La force sociale qui contrôle a le pouvoir de déterminer les termes de l'échange et qui en bénéficie. La classe ouvrière n'a aucun intérêt à exploiter d'autres pays car elle est contre l'exploitation et l'oppression, car les travailleurs sont les principales victimes des rapports de productions actuels, au pays comme à l'étranger.

Pour la classe ouvrière, la question est simple : comment peut-elle régler les problèmes de sa propre économie si elle n'a pas de contrôle sur les marchandises qui sortent et entrent, ou sur les prix et où sont faits les investissements importants ? Sans contrôle sur le commerce, les monopoles dominants manipulent plus facilement l'économie à leur avantage, ce qui ne signifie pas nécessairement à l'avantage d'une économie nationale dynamique qui suffit à ses besoins. Pour le Canada, le contrôle par les monopoles a signifié une économie déséquilibrée pour la plupart du pays et de ses régions, l'absence d'un secteur manufacturier dynamique et cohérent et l'absence d'investissements nécessaires dans les services publics et les programmes sociaux, dont a besoin toute économie moderne.

Les questions de contrôle et dans l'intérêt de qui le commerce international et la mondialisation sont exercés ont besoin d'être résolues dans tout accord commercial et les solutions doivent être fondées sur l'avantage mutuel. Les monopoles ne peuvent pas contrôler le commerce parce que leurs intérêts privés sont trop étroits. Le contrôle du commerce doit être entre les mains d'une autorité publique qui représente les intérêts généraux de la population, des différentes régions, de tous les secteurs et composantes de l'économie. Le commerce international et la détermination des prix ne peuvent pas être laissés sous la domination des monopoles. Ils doivent être entre les mains d'une autorité publique responsable devant le peuple, notamment les travailleurs qui produisent au sein de l'économie et qui sont plus largement et profondément touchés par les décisions concernant le commerce.

Il faut une autorité publique qui prive les monopoles de leur pouvoir de contrôler le commerce. Le commerce doit être orienté vers l'avantage mutuel et le développement général de l'économie et des projets d'édification nationale des partenaires commerciaux, ce qui doit inclure une économie qui suffit à ses besoins et qui a une base solide. À quoi bon le commerce s'il nuit à l'économie nationale et fait obstacle à son développement ? Le mouvement du libre-échange contrôlé par les monopoles, qui donne aux monopoles la liberté d'agir selon leurs intérêts privés étroits et pour une édification d'empire libre de toute réglementation et responsabilité publique, est un désastre non seulement pour les Canadiens, mais pour les peuples et leur économie à travers le monde, en particulier les pays opprimés , qui n'ont pas eu l'occasion de développer une économie nationale stable assise sur une base élargie.

Le libre-échange pour l'édification d'empire des monopoles est irrationnel, antisocial, anti-conscient et contraire à la tendance progressive du développement des relations harmonieuses entre les peuples du monde entier. Le libre-échange contrôlé par les monopoles est une recette pour des crises économiques et la guerre. Il doit être remplacé par le commerce sous le contrôle d'une autorité publique qui est responsable devant le peuple et qui maintient des relations de principes et des conditions harmonieuses d'échange avec les partenaires commerciaux sur la base de l'avantage mutuel, de la coopération, du développement et de l'amitié.

Haut de page


La campagne pour élire un président de guerre aux États-Unis

Il faut renforcer la lutte pour les droits et un gouvernement antiguerre!

Les élections présidentielles aux États-Unis continuent de révéler une classe dominante qui n'a aucune solution aux problèmes fondamentaux, en particulier ceux liés à l'économie et aux questions de guerre et de paix. Les électeurs, de manière générale, sont en colère contre un système électoral qui produit deux candidats, Clinton et Trump, que la majorité n'aime pas ou ne veut pas comme président. Lors du Forum du commandant en chef de la NBC, les questions générales des agressions illégales des États-Unis, de leur guerre des drones et de la torture, et de comment y mettre un terme afin de contribuer à la paix, n'ont même pas été abordées. L'accent a été surtout mis sur le passé, comme les courriels de Clinton et les regrets de Trump. Les gens sont bombardés par la désinformation des médias sur les différents commentaires de Clinton ou de Trump, de leurs partisans ou de leurs détracteurs et le radotage continue sur les sondages en constante évolution sur qui est en avance et où. Aucun problème important n'est examiné et toute discussion sur les solutions est bannie. Cela a été le cas dans le débat qui s'est tenu le 26 septembre à l'Université Hofstra de New York. L'objectif de la campagne n'est pas d'informer le public et de discuter sérieusement des problèmes, mais de diviser le peuple américain, tandis que l'élite au pouvoir cherche à atteindre une sorte de consensus afin d'empêcher que le scénario de guerre civile ne se matérialise davantage.

Dans ce contexte, la campagne électorale américaine montre l'approfondissement des conflits parmi ceux qui sont au pouvoir et leur incapacité à trouver un moyen de sortir de leurs crises, et que la démocratie américaine est en lambeaux chez elle et à l'étranger. Ils cachent leurs échecs derrière le slogan de Rendre à l'Amérique sa grandeur, qui s'applique uniquement aux très, très rares qui bénéficient de sa lutte pour la domination du monde.

Une présidence Clinton complétera le programme de changement mis en place depuis la présidence de Bill Clinton en 1993. Il s'agit des mesures prises pour concentrer tous les pouvoirs entre les mains de la présidence. Toute l'autorité publique et le partage antérieur des pouvoirs entre l'autorité fédérale et les États sont maintenant concentrés dans les pouvoirs de police sous les ordres du commandant en chef. La définition du gouvernement comme ayant une responsabilité sociale envers le peuple, ou du moins sa prétention, est effectivement éliminée tandis que seuls demeurent les pouvoirs de police arbitraires au-dessus du gouvernement des lois et le recours à la force pour résoudre les problèmes.

Trump est également un partisan de l'édification d'empire. Il présente la guerre comme un outil de négociation, sans aucun but politique et dont l'objectif principal est de tout écraser, comme il l'a indiqué dans ses « plans » pour éliminer l'EIIL « partout ». Dans sa campagne, toute discussion sur la demande du peuple de mettre fin aux guerres des États-Unis et de ramener les troupes au pays afin de contribuer à la paix dans le monde entier est interdite. C'est cette exigence qu'exprime le peuple américain depuis des années que la campagne présidentielle actuelle sert à bloquer.

Ne figure pas non plus à l'ordre du jour pour y trouver une solution le racisme institutionnel de l'État étasunien qui se traduit par les tueries actuelles par la police des Afro-Américains, les attaques contre les Amérindiens et Portoricains , l'incarcération de masse, l'inégalité dans les emplois et l'éducation et ainsi de suite. Ces problèmes, ainsi que ceux de la pauvreté et de la destruction de l'environnement, exigent des réponses. Dans cette situation où la grande majorité pense que le pays avance dans la mauvaise direction et ne pense pas que les élections vont changer cette orientation, il est utile d'examiner plus généralement le rôle de l'élection présidentielle et son impact sur les mouvements contre la guerre et pour les droits.

À titre d'information de nos lecteurs, LML publie ci-dessous des extraits de la présentation de Kathleen Chandler de l'Organisation marxiste-léniniste des États-Unis (USMLO) au Séminaire sur la situation nationale et internationale, tenu par le PCC(M-L) le 14 août 2016 à Ottawa qui traite de certains des points principaux de la campagne présidentielle américaine.

Présentation de l'USMLO

« Les élections présidentielles aux États-Unis ont deux objectifs principaux, a dit Kathleen Chandler au nom de l'USMLO lors du séminaire. Le premier est de détourner et de détruire les mouvements du peuple contre la guerre et pour les droits afin d'écarter le peuple du pouvoir. Le second est de résoudre les conflits entre ceux qui sont au pouvoir afin de préserver l'union et de prévenir une guerre civile chaude, y compris les conflits entre la présidence et les autorités militaires et d'autres autorités opposées. »

« En ce qui concerne ce dernier point, a-t-elle poursuivi, les conflits s'intensifient, car plusieurs généraux appuient ouvertement l'un ou l'autre candidat. Lors du Forum du commandant en chef de la NBC, Trump a déclaré avoir le soutien de 88 généraux et amiraux. Cela pose le problème de ce qui adviendra de leur loyauté après l'élection, s'il perd. La même chose vaut pour les forces militaires et du renseignement qui soutiennent Clinton. »

Sur l'utilisation des élections pour attaquer le mouvement antiguerre et ceux qui luttent pour les droits, Kathleen a dit : « Cela a été fait principalement en utilisant la campagne de Bernie Sanders et celle de Trump. Toute la campagne présidentielle a avancé et entretenu l'illusion que les élections peuvent provoquer le changement et cela malgré l'échec de la démocratie américaine aux États-Unis et à l'étranger, malgré les énormes sommes dépensées, estimées à 15 milliards de dollars actuellement toutes campagnes confondues, malgré qu'un milliardaire soit en mesure d'être candidat simplement parce qu'il est milliardaire, malgré que le caractère non démocratique de l'ensemble du processus ait été exposé.

« Sanders, dès le début, avait pour rôle de motiver la jeunesse et d'attirer dans la campagne présidentielle ceux qui étaient actifs dans le mouvement contre la guerre et la lutte pour les droits dans la campagne présidentielle. Pour cela, sa campagne a inclus différentes revendications touchant la réduction de la dette étudiante, l'éducation gratuite jusqu'à l'université, tout en parlant également de manière générale de s'opposer à la ' classe des milliardaires ' et d'avoir un gouvernement qui ' sert chacun d'entre nous, pas juste le 1 pour cent '. Bien qu'il soit resté généralement silencieux, tout comme Trump et Clinton, sur les questions de guerre et de paix, Sanders a cherché à détourner les forces antiguerre de leur combat contre la guerre pour les amener à le soutenir et à le considérer comme une source de changement.

« Sanders a tenté de jouer sur le sentiment croissant parmi le peuple que le système existant est dysfonctionnel et non légitime et a fait la promotion de ce qu'il a appelé une ' révolution politique '. Il s'est présenté comme une personne qui est contre les privilèges de classe, tout en déclarant qu'il pouvait y avoir un ' gouvernement pour tous ' qui s'attaque aux inégalités, à la pauvreté, etc.. De cette manière, il apparaît comme une force de changement alors qu'en réalité il attire les gens dans le système existant qui défend nécessairement les privilèges de classe et la domination de classe des propriétaires des monopoles. Comme suite logique et comme il fallait s'y attendre, il a appuyé Clinton malgré la forte opposition de ses partisans, notamment lors de la convention, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur. Beaucoup de jeunes et de militants ont manifesté avec des pancartes ' Jamais Clinton ' et ont refusé de la soutenir.

« En partie pour lutter contre cette opposition, et comme Obama avant lui qui a créé une organisation appelée 'Organizing for Action' pour reprendre ses campagnes et qui existe comme une force qui le suit en tant que 'leader', Sanders lance ce qu'il appelle 'Our Revolution' dans un effort de maintenir une force organisée qui soutient son ordre du jour. Tous deux s'efforcent de mobiliser les jeunes en particulier dans ces organisations.

« Dans une lettre à ses sympathisants au lendemain de la convention, Sanders a présenté son plan de base :

Dès le premier jour de notre campagne, j'ai écrit à mes sympathisants et dit, « cette campagne n'a rien à voir avec Bernie Sanders. Il s'agit d'un mouvement populaire des Américains qui se lèvent et déclarent : 'Ça suffit'. Ce pays et notre gouvernement appartiennent à chacun d'entre nous, non pas à seulement une poignée de milliardaires ».
C'est aussi vrai aujourd'hui que cela l'était alors. C'est pourquoi Our Revolution se concentrera sur trois domaines distincts de travail :
Revitaliser la démocratie américaine en rassemblant des millions de travailleurs et des jeunes dans le système politique.
Donner les moyens d'agir à la prochaine génération de dirigeants progressistes en inspirant, en recrutant et en soutenant les candidats progressistes dans tout le spectre du gouvernement, de la Commission scolaire au Sénat américain.
Faire ce que les entreprises médiatiques ne font pas : accroître la conscience politique en éduquant le public sur les enjeux les plus pressants auxquels notre nation fait face et les solutions audacieuses nécessaires pour s'y attaquer.
Ensemble, nous pouvons revitaliser notre démocratie, habiliter les nouveaux dirigeants progressistes et éduquer le public sur les questions cruciales auxquelles fait face notre pays.

« Ce qui est évident ici, ce sont les nouvelles dispositions de ceux qui sont au pouvoir, dans lesquelles la présidence est suprême et le Congrès et les partis politiques sont dysfonctionnels. Cela vise à éliminer les partis politiques et à légitimer des individus qui se présentent comme candidat à la présidence et une ' vie publique ' centrée sur le soutien à la présidence. Sanders travaille à maintenir les gens dans un système qui en fait élimine la politique et dépolitise les gens, et ne transforme pas la politique d'une manière qui les favorise. La démocratie américaine ne peut pas être revitalisée, car elle n'a jamais servi les intérêts du peuple. Une démocratie que nous aurons créée qui habilite le peuple et la vie publique, qui est centrée sur l'humain, dans laquelle le droit public est reconnu et défendu, est à l'ordre du jour. Sanders s'est écarté spécifiquement de cette voie, celle de qui décide et de donner le pouvoir au peuple comme la voie à suivre ».

En ce qui concerne comment lutter contre ces attaques, Kathleen a expliqué comment l'USMLO était intervenue aux deux conventions pour mettre au premier plan la question de la guerre et de la lutte pour un gouvernement antiguerre. « Nous avons promu la nécessité de lutter contre les efforts de domination mondiale de l'impérialiste américain, contre les préparatifs de guerre à l'étranger et la montée de l'État policier au pays. Pour cela, notre bannière : Unissons-nous et luttons pour un gouvernement antiguerre ! était présente à de nombreux événements. Nous avons lancé des slogans comme : Drones tueurs, flics tueurs = génocide gouvernemental et Défendons les droits chez nous et à l'étranger . Les pressions énormes et les diversions mises de l'avant par les campagnes se sont traduites par l'absence d'un contenu antiguerre plus prononcé dans les manifestations, par comparaison au passé, et cela alors que s'accroissent les guerres et les préparatifs de guerre des États-Unis. Cependant, lors de nos discussions avec les gens et de la distribution de Voice of Revolution , nous avons vu que les gens sont conscients du silence qui est imposé sur les questions de la guerre et de la paix et de la nécessité de lutter contre la guerre. Par exemple, beaucoup se sont arrêtés pour discuter et prendre des photos de la bannière. » Il est essentiel de poursuivre les efforts pour contrer ces pressions et faire avancer la lutte pour un gouvernement antiguerre et investir le peuple du pouvoir pendant le reste de la campagne électorale et après.

La campagne de Trump

Kathleen a expliqué que la campagne de Trump servait aussi à détourner et à désinformer ceux qui luttent pour leurs droits, en particulier ceux qui luttent pour les droits des immigrants et contre le racisme d'État et les tueries policières. Les médias, Sanders, Clinton, et Obama ont tous dépeint Trump comme étant le plus dangereux et le plus raciste et inapte à être président. Les médias ont soigneusement répété chaque commentaire et chaque invention racistes émis par Trump contre les immigrants et les musulmans. En partie, l'objectif est de diviser le peuple et de promouvoir le chauvinisme américain, lequel est mis de l'avant par tous les cercles dirigeants. À la convention démocrate, Clinton a présenté une famille musulmane dont le fils était un soldat tué en Irak, et Trump en a fait le sujet d'une de ses attaques. C'est ainsi qu'on fait d'une pierre deux coups en appuyant l'armée et en faisant la promotion des musulmans qui s'y enrôlent. Par contre, pour ce qui est de l'immense opposition aux guerres étasuniennes par les musulmans et par les peuples en général, au pays et à l'étranger, c'est le silence total.

Aussi, on tente par tous les moyens de faire dévier de sa route le mouvement des droits des immigrants qui tient Obama responsable en tant que Déporteur-en-chef, lui qui a déporté plus de deux millions de personnes, plus que tout autre administration. En effet, les démocrates eux-mêmes ont mené de nombreux raids, ont détenu des familles sur des périodes prolongées dans ce qui sont rien de moins que des camps de concentration, et ont procédé sans relâche à déporter les gens. Les grèves de la faim des femmes réfugiées pour contester leur détention à durée indéterminée sont passées sous silence. Toute l'attention médiatique est centrée sur Trump, qu'il faut empêcher d'arriver au pouvoir en votant pour Clinton, au détriment des nombreux mouvements pour les droits.

Kathleen a souligné que ce que Trump propose est déjà monnaie courante. Les Syriens sont déjà victimes de filtrage spécial et les réfugiés reconnus par l'ONU attendent souvent deux ans avant d'être autorisés, et lorsqu'ils le sont, ils se voient imposer de nombreuses restrictions. Les musulmans sont depuis longtemps dans la mire de l'État qui espionne les mosquées et les organisations étudiantes musulmanes, sans parler des supercheries du FBI et les accusations de terrorisme montées de toutes pièces ainsi que l'étiquetage répété des musulmans en général en tant que terroristes. Clinton elle-même a joué un rôle majeur dans l'invasion de la Libye, les plans d'invasion de la Syrie et possiblement de l'Iran. Elle appuie la guerre par drones d'Obama et les milliards $ en armements étasuniens destinés à détruire la Palestine, le Yémen, le Pakistan et d'autres pays. Elle est étroitement liée à l'armée et est la présidente belliciste que favorisent en ce moment les cercles dirigeants. Malgré tout, on la présente sous un visage « libéral », et Trump sous celui du « pire » des fascistes. Ces campagnes visent à miner la résistance du peuple et ses revendications antiguerre et prosociales en la transformant en un mouvement d'appui à Clinton.

De la même façon, on cherche par tous les moyens à transformer la lutte contre les tueries policières et l'impunité gouvernementale en une lutte contre Trump . On cherche à miner les luttes nombreuses — celles de Ferguson, de Cleveland, de Baltimore, de Chicago, de Bâton Rouge et d'ailleurs — qui sont de plus en plus dirigées contre l'État raciste étasunien et qui exigent que celui-ci rende des comptes, pour les rendre moins proactives et pour qu'elles soient réduites, par exemple, à réagir aux déclarations racistes de Trump. On n'hésite pas non plus à dépêcher sur les lieux de l'opposition aux tueries racistes des organisateurs d'ONG (organisations non gouvernementales) rémunérés dont le rôle est de réconcilier les manifestants avec la police, de promouvoir les « policiers communautaires », les comités civils consultatifs, etc. On cherche ainsi à faire capituler le mouvement à la police et à le pousser à abandonner ses revendications contre l'État raciste étasunien et contre son impunité au pays et à l'étranger.

Ces mesures sont conformes à comment l'État est intervenu dans les deux conventions — celle des républicains à Cleveland et celle des démocrates à Philadelphie. En effet, la police a été appelée à jouer un rôle plus discret, c'est-à-dire, pas de gaz lacrymogènes, pas de poivre de Cayenne ni d'arrestations de masse comme pour les autres conventions et manifestations antérieures. En général, les forces policières ne portaient pas leurs tenues de combat ou d'escouade anti-émeute avec vestes et matraques et armes automatiques, mais étaient vêtus de leurs uniformes réguliers et, de façon générale, n'étaient pas très visibles.

Cleveland et, en particulier, Philadelphie, sont reconnues pour leurs forces policières particulièrement racistes et brutales. C'est à Philadelphie, en 1985, qu'on a bombardé le collectif afro-américain, MOVE, tué 11 personnes y compris des enfants et incendié les lieux, détruisant six pâtés de maison. Ce sont des villes reconnues pour la brutalité de leur répression policière. Et voilà que pour ces conventions, les forces policières se sont faites passablement discrètes.

Ce n'est pas dire qu'il n'y a pas eu de mesures arbitraires prises par les agences de police. À Cleveland, on a dressé une longue liste d'objets que les manifestants étaient interdits de porter, y compris des sacs à dos, de la corde de plus de six pieds, des balles de tennis et des bâtons en bois, en métal ou en plastique. Ni ne pouvait-on transporter des masques à gaz ou tout ce qui pourrait servir à se « protéger des irritants chimiques », comme l'indiquait la liste en question. Si on n'a pas tellement fait respecter cette liste, on s'en est servi pour intimider les gens et pour rendre les conditions plus difficiles pour les manifestants. C'est en ce sens qu'on a fait la promotion de l'Ohio comme d'un État où on peut porter des armes, en d'autres mots, si vous avez un permis, vous pouvez ouvertement vous promener avec des armes dans la rue et dans des endroits publics. Cela n'a servi qu'à intimider la population locale et à la décourager de participer aux manifestations.

À Philadelphie, de façon arbitraire, on a décidé que le « refus de se disperser » et le « méfait public » ne seraient pas jugés des actes criminels mais des gestes méritant plutôt une contravention. En général, la police n'a même pas cherché à disperser les manifestants. Les actions dans les deux villes ont plutôt servi au rodage du département fédéral du Homeland Security, lui offrant une occasion de mener de nouveaux entraînements pour les « Équipes d'intervention d'urgence » des forces policières locales, de comté ou d'État. La raison d'être de ces équipes est de contrôler les manifestations et de mener des arrestations de masse. C'est en ce sens que ces équipes sont intervenues, déployant des brigades de motocyclettes, des clôtures et d'immenses blocs de ciment pour contrôler et diriger les diverses actions.

Ainsi, malgré une présence policière publique plutôt discrète aux deux conventions, on a constaté par contre l'intervention d'importantes agences militaires, dont NorthCom, le commandement militaire pour toute l'Amérique du Nord et NORAD, la défense antimissile de l'Amérique du Nord, le Pentagone, le département de la Sécurité intérieure des États-Unis, le FBI, le Immigration and Customs Enforcement, la Patrouille frontalière, le Service secret — près de 50 agences au total. Non seulement les États-Unis, par le biais de leur vastes exercices de guerre, tentent-ils de consolider leur commandement et leur contrôle des forces militaires étrangères, mais ils font de même à l'interne, et ces conventions leur servent de terrain d'essai. Ces mesures sont conformes à une situation où les cercles dirigeants n'ont pas de solutions aux problèmes sociaux et où tout ce qui leur reste d'autorité publique sont les pouvoirs policiers.

Kathleen a conclu en disant comment il était important d'intervenir dans ces luttes, de veiller à ce que le mouvement reste focalisé sur l'État étasunien raciste, et de dénoncer les activités génocidaires que sont les assassinats criminels par drones à l'étranger et les tueries policières au pays tout en dénonçant l'impunité du gouvernement. Elle a fait valoir la nécessité d'un gouvernement antiguerre et d'un processus politique qui habilite le peuple et son ordre du jour antiraciste et prosocial, y compris la lutte pour « Ramener immédiatement toutes les troupes » et « Défendre les droits de tous, au pays comme à l'étranger » comme partie intégrante de faire échec à l'empire étasunien et ses tentatives d'éliminer les mouvements populaires.


Les élections aux États-Unis et le danger réel
d'une guerre civile

Lors du récent forum des « commandants en chef » diffusé à partir d'un porte-avions amarré dans le port de New York, Donald Trump a martelé qu'il avait gagné l'appui de 88 généraux et amiraux. De son côté, Clinton a affirmé à plusieurs reprises qu'elle bénéficie de l'appui de dirigeants de l'armée et d'agences de renseignement. Que la discorde au sein des forces militaires et entre les différentes forces militaires et la présidence éclate ainsi au grand jour révèle l'ampleur des difficultés qu'éprouvent les dirigeants à préserver l'union et à prévenir l'éclatement d'une guerre civile. Les vieux arrangements qui permettaient au Congrès et aux partis politiques de fonctionner et même de résoudre les conflits n'existent plus.

La présidence et ses pouvoirs policiers deviennent de plus en plus l'unique source de pouvoir. Voilà en partie pourquoi la notion du président en tant que commandant en chef a éclipsé celle du président en tant que civil qui a une responsabilité sociale envers son peuple.

Comme les forces militaires sont omniprésentes dans le débat, les dirigeants ont du mal à défendre la légitimité du gouvernement. En principe, les élections devraient servir à ce que le peuple autorise le gouvernement à gouverner. Au contraire, les campagnes électorales font en sorte que le peuple ne reconnaît plus la légitimité du présent gouvernement. Non seulement le peuple n'appuie-t-il pas le Congrès, mais il le perçoit comme étant dysfonctionnel. Aussi, le peuple est carrément rebuté par les campagnes négatives et les milliards de dollars qui y sont engloutis et se sent floué par le système, une situation dont ont parlé Obama et Clinton, et qui a été au coeur des campagnes de Trump et de Sanders. De façon objective, lorsque la gouvernance ne relève plus de la primauté du droit, comme c'est le cas à l'heure actuelle alors que le président ne cesse d'usurper le pouvoir et d'agir avec impunité de façon anarchique et criminelle, elle perd sa légitimité. Les pouvoirs policiers ne servent pas à légitimer la gouvernance et ils sont tout ce qui reste en termes d'autorité publique.

Les vieux arrangements selon lesquels deux partis des riches rivalisent et coopèrent n'existent plus. Ceci est particulièrement évident dans cette campagne où on assiste ouvertement à la destruction des deux partis. Un grand nombre de républicains, dont la famille Bush, se sont ouvertement rangés contre Trump. Soixante-dix républicains renommés, y compris de hauts fonctionnaires, ont sommé le Comité national républicain de cesser de financer Trump et de financer plutôt d'autres républicains qui sont soit à la Chambre des représentants ou au sénat. Cinquante hauts dirigeants de la sécurité nationale ont aussi publié une lettre en opposition à Trump et d'autres ont ouvertement endossé Clinton. Antérieurement, une autre lettre avait été signée par une centaine de hauts dirigeants de la « sécurité nationale ».

Les démocrates sont aussi manifestement divisés, comme en témoigne le refus d'un grand nombre de supporters de Sanders d'appuyer Clinton et le fait qu'on s'oppose à ce que Clinton cherche de l'appui dans les rangs des néoconservateurs. Parmi ces derniers, il y a James Kirchick, Bill Kristol et Robert Kagan, tous du Foreign Policy Initiative, et Max Boot, qui se décrit lui-même comme étant un « impérialiste américain » et qui a affirmé que Clinton était « une démocrate centriste plus belliciste que le président Obama ».

En tant que « centriste la plus belliciste », Clinton a gagné l'appui non seulement de personnalités telles que Boot, mais aussi d'autres personnalités dans le camp de Bush, telles que Sally Bradshaw, la principale conseillère de Jeb Bush, John Negroponte, le directeur des renseignements nationaux et secrétaire d'État adjoint sous le règne de Bush, Richard Armitage, secrétaire d'État adjoint et conseiller de Ronald Reagan et de George H. W. Bush, Brent Scowcroft, président du Conseil consultatif des renseignements du président des États-Unis et conseiller de trois anciens présidents républicains. Cet appui démontre bien comment les familles Clinton et Bush rivalisent depuis longtemps dans le but de représenter les mêmes factions militaristes pro-guerre parmi les cercles dirigeants, et que cette fois-ci c'est Clinton qui l'a remporté. Ce qui confirme aussi que les nouveaux arrangements recherchés n'ont plus rien à voir avec les partis politiques, mais bel et bien avec des individus choisis à la présidence ayant une « vie publique » axée sur la présidence et, s'il n'en tient qu'aux cercles dirigeants, une élimination de la politique et des mouvements politiques du peuple pour ses droits. Tous ces facteurs démontrent l'urgence d'intensifier la cadence dans l'édification d'un mouvement politique capable de mettre en place un gouvernement antiguerre et une nouvelle direction pour les affaires politiques.

Un autre problème pour les cercles dirigeants et qui joue un rôle encore plus important dans ce scénario de guerre civile c'est que ces nouveaux arrangements sont recherchés par de nombreuses autorités qui rivalisent entre elles et qui veulent s'accaparer de tous les pouvoirs policiers concentrés dans la présidence. Ces factions de l'élite dirigeante qui rivalisent entre elles sont prêtes à se servir de ces autorités, telles l'autorité militaire, contre la présidence. Il existe en surcroît la possibilité de scissions régionales au pays, alors que des voix au Texas et en Californie, par exemple, s'élèvent en faveur de la sécession et pour que ces états deviennent des pays indépendants.

Cette inquiétude face à un conflit ouvert au sein des forces militaires et des agences policières, d'une part, et entre elles et la présidence, de l'autre, a été flagrante au cours de cette élection. Le général Hayden, le dirigeant de l'agence de sécurité nationale et de la CIA sous la présidence de George W. Bush, a déclaré publiquement que l'armée ne suivrait pas les ordres de Trump. À chacune des conventions des généraux des forces armées à la retraite sont intervenus. Le lieutenant général de l'armée à la retraite, Michael Flynn, a appuyé Trump tandis que le général de la marine à la retraite John Allen a soutenu qu'Hillary Clinton serait la meilleure dirigeante. Lors d'une entrevue où il a expliqué pourquoi il s'était prononcé en faveur de Clinton, Allen a spécifiquement dit au sujet des propos de Trump à l'effet que les forces militaires ne pouvaient gagner : « J'ai dénoncé ces propos qui ont le potentiel de nous plonger dans une crise entre le civil et le militaire, une crise surpassant tout ce que nous avons connu auparavant dans ce pays ». Le général de l'armée à la retraite, Martin Dempsey, ancien président des chefs d'état-major, a publié une lettre dans The Washington Post suite aux conventions, où il a affirmé qu'il était inacceptable que ses collègues et généraux à la retraite se mêlent d'élections présidentielles.

« En tant que généraux, ils ont une obligation de défendre nos traditions apolitiques », a écrit Dempsey. « C'est une erreur d'avoir participé à ces conventions comme ils l'ont fait. C'est aussi une erreur que nos candidats présidentiels les aient invités ». Et Dempsey d'ajouter : « Les forces militaires ne constituent pas un prix politique ».

Ces déclarations publiques dénotent une inquiétude grandissante à l'effet que les forces militaires pourraient agir contre le président ou encore ne pas respecter les ordres du président puisque plusieurs généraux appuient différents dirigeants individuels. Tout ceci se produit dans un contexte où diverses autorités rivalisent pour davantage de pouvoir, y compris l'armée, la marine et la CIA. Toutes ces entités possèdent des forces armées qu'elles peuvent mettre en marche en appui à leurs intérêts privés, par exemple, les monopoles militaires et énergétiques. Le contexte en est un aussi où le président fait de moins en moins figure de dirigeant civil et davantage celui d'un président commandant en chef. Ce qui veut dire que dans les conditions de guerre pour l'empire et de différends entre factions sur comment réaliser l'empire mondial, ces conflits peuvent engendrer des conflits violents ouverts au sein même des cercles dirigeants, ou, pour emprunter les paroles du général Allen, « une crise civile et militaire surpassant tout ce que nous avons connu auparavant dans ce pays ».

Pour l'instant, compte tenu des approbations et des appuis financiers favorables à Clinton, il est clair que les dirigeants se sont ralliés à elle en tant que présidente de guerre. En même temps, les médias poursuivent leurs efforts pour discréditer Trump, remettre en cause son état mental, le qualifier d'incompétent, etc.

Il y a aussi une très réelle tentative de miner le mouvement antiguerre et la lutte pour les droits avec le slogan de Make America Great . Tandis que Trump dit qu'il faut redorer le blason des États-Unis, Clinton, elle, prétend que les États-Unis n'ont rien perdu de leur stature et qu'elle va contribuer à les rendre encore plus grands. Ces notions ont été réitérées sous diverses formes aux deux conventions et depuis. Une autre notion qui a été amplement véhiculée est que les États-Unis sont exceptionnels et que seuls les États-Unis peuvent diriger le monde, malgré une situation où la démocratie « à l'Américaine » est en ruines et est en train d'être rejetée aussi bien à l'étranger qu'au pays même. Tout le processus électoral lui-même est exposé comme étant antidémocratique et pourtant on continue de prétendre qu'il serait une « source de changement ».

La notion de Make America Great n'est rien de moins qu'un effort pour alimenter le chauvinisme étasunien dans le but de désinformer le mouvement antiguerre et la lutte pour les droits. Elle est promue au moment même où les autochtones, qui ont été victimes de génocide, revendiquent leurs droits, où les Afro-Américains sont tués en pleine rue par la police et où le peuple est tellement en colère que des athlètes refusent de se lever pour l'hymne national, comme ce fut le cas au football de la NFL et au baseball. Le Make America Great vise à contrer cette conscience grandissante à l'effet qu'aussi longtemps que les élites monopolistes restent au pouvoir, les États-Unis ne pourront engendrer que le génocide, le racisme d'État et l'impunité gouvernementale.

On cherche aussi à éliminer la conscience à l'effet que les peuples d'Irak, d'Afghanistan, de la Palestine ou du Yémen comptent, que les relations entre peuple imprégnées de respect et d'avantage réciproques comptent et méritent d'être entretenues, comme le soulèvent avec force les activistes antiguerre. Pour l'élite au pouvoir, cet esprit d' Une humanité, une lutte pour nos droits , dont le peuple américain est une partie intégrante, doit être défait et remplacé par la notion que seuls les États-Unis et leurs aspirations de consolider leur empire comptent et que tous doivent se soumettre sans quoi ils connaîtront la guerre et la répression.

Il est primordial d'intensifier le travail pour consolider le mouvement politique du peuple pour les droits et pour un gouvernement antiguerre. Cela pourra se matérialiser en s'opposant aux guerres et aux agressions impérialistes des États-Unis et leurs efforts de domination mondiale et de consolidation d'un état policier. Mettre en place un gouvernement antiguerre est un objectif autour duquel le peuple peut s'unir et se rallier et qui contribuera à bloquer les plans bellicistes des États-Unis et à contribuer ainsi à la paix mondiale. La lutte pour une nouvelle direction pour les affaires politiques, qui habilite les gens eux-mêmes à gouverner et à décider, est partie intégrante de ce travail.

Que tous participent à organiser pour un ordre du jour antiguerre et prosocial du peuple de façon proactive et indépendante, en menant la lutte pour un gouvernement antiguerre et pour notre droit de gouverner et de décider !

(Traduit de l'anglais par LML)

Haut de page


Lisez Le Marxiste-Léniniste
Site web:  www.pccml.ca   Courriel: redaction@cpcml.ca